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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du vendredi 22 avril 1842
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre, notamment pétition
réclamant des mesures protectrices pour le secteur vitrier (Zoude),
à une demande de nature fiscale par un polder (Van
Hoobrouck)
2) Motion d’ordre relative au projet de loi sur les
sucres (Osy, Smits, Eloy
de Burdinne, Smits, Cogels, Dubus (aîné), Smits, Osy)
3) Projet de loi sur le transit
4) Projet de loi relatif au canal de Zelzaete à la mer
du Nord (lutte contre les inondations de l’Escaut et de
(Moniteur
belge n°113, du 23 avril 1842)
(Présidence
de M. Fallon)
M. Kervyn procède à l'appel nominal à midi un quart.
M. Scheyven donne lecture du procès-verbal de la séance
précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. Kervyn fait connaître l'objet des pièces adressées à la
chambre :
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Xavier Prinz,
professeur au collège de Hasselt, né à Aix-la-Chapelle, demande la
naturalisation. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
_______________________
« Le sieur Petroment,
fabricant de drap à St.-Léger, demande que la loi qui établit des privilèges en
faveur des fabricants de drap, molletons, etc., qui se trouvent dans la partie
cédée du Luxembourg, soit rapportée. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
_______________________
« L'administrateur-gérant
de la société pour la fabrication de glaces, verres à vitres, etc., demande
qu'il soit pris des mesures protectrices de cette industrie. »
- Sur la proposition de l'honorable M. Zoude, cette pétition est
renvoyée à la commission d'industrie.
_______________________
« Le conseil communal d'Anvers demande que la
chambre ne donne pas son adhésion au projet de loi portant des modifications à
la loi communale, en ce qui concerne les comptes communaux. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet.
_______________________
« L'administration
communale de Verrebroeck réclame la reconnaissance
d'une somme de 60,000 florins payée au gouvernement autrichien comme avance
pour l'exemption des contributions de ce poldre. »
- Renvoi à la commission des pétitions avec demande
d'un prompt rapport, sur la proposition de l'honorable M. Van
Hoobrouck de Fiennes.
______________________
« Le sieur Nagant, distillateur,
adresse des observations sur la pétition des distillateurs de Liége, analysée à
la séance du 18 de ce mois. «
« Le sienr Nagant, distillateur à Liége, adresse à la chambre un
mémoire contenant des observations sur le projet de loi relatif aux
distilleries. »
« Le sieur C. Verkissen,
distillateur, adresse des observations sur le projet de loi relatif aux
distilleries. »
« Les distillateurs de la ville d'Audenaerde et
des environs adressent des observations sur le projet de loi relatif aux distilleries. »
- Dépôt de ces quatre pétitions sur le bureau pendant
la discussion du projet, et insertion au Moniteur.
_______________________
« Le sieur van Baerlem
demande à être autorisé à plaider pour obtenir le remboursement de sommes prétendûment
payées au sieur Hap, en sa qualité de bourgmestre
d'Etterbeek par le gouvernement anglais, pour prestations militaires faites
en1814 et 1815, par lui et d’autres habitants de cette commune. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
_______________________
Par message en date du 21 avril, le sénat informe la
chambre qu'il a adopté le projet de loi relatif aux indemnités.
- Pris pour notification.
M. Osy. - Messieurs, la deuxième section s'est réunie ce matin
pour examiner la loi sur les sucres ; mais elle a été arrêtée dans cet examen,
parce qu'elle désire avoir les réponses de M. le ministre des finances aux
différents mémoires des comités d'agriculture et des chambres de commerce ; la
deuxième section ne s'assemblera plus, avant d'avoir reçu ces réponses.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, je dois faire
remarquer que ces réponses ne m'ont pas été demandées et que c'est spontanément
que je les ai annoncées à la chambre. Quoi qu'il en soit, on travaille à ces
notes qui sont assez étendues, et quand elles seront terminées, je
m'empresserai de les faire remettre aux sections respectives.
M. Eloy de Burdinne. – Messieurs, les
réfutations que l'on demande se trouvent déjà, me paraît-il, dans l'exposé même
des motifs du ministre. La chambre a déjà le pour et le contre, et
c'est maintenant à elle à décider. Pourquoi retarderait-on la discussion d'un
projet si important pour le trésor ? Tous les jours nous votons des dépenses,
et nous ne voulons pas créer des ressources pour les couvrir. Je ne conçois pas
cette manière d'agir. Si l’on crée des dépenses, il faut aussi chercher des
voies et moyens pour y faire face. Activons donc le plus possible le projet de
loi sur les sucres dont l’impôt devrait rapporter à la
rigueur 7 à 8 millions ; mais pour empêcher que le trésor ne les perçoive, on
ne cesse d'apporter des entraves.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Les observations faites
par l’honorable préopinant sont parfaitement exactes, dans ce sens qu'il n'y a
pas de motifs pour les sections de retarder l’examen du projet de loi jusqu'à
la remise de notes ultérieures. Il existe en effet un exposé des motifs qui
contient tous les renseignements désirables ; la chambre est régulièrement en
possession des avis des chambres de commerce et des commissions d'agriculture.
J'ai, je le répète, spontanément offert une note subsidiaire ; mais si cette
note ne paraît pas suffisante aux sections, serait-ce un motif pour elles
d'ajourner encore l’examen du projet de loi ? Cette manière
d'agir serait inusitée.
M. Cogels. - Messieurs, s'il ne s'était agi que d’opinions erronées, la
deuxième section n'aurait pas retardé son travail, parce qu'il lui aurait été
très facile de les réfuter elle-même ; mais il s'agit ici d'erreurs de fait. Il
est possible que ce soient des erreurs de statistique. L’instruction n'est dès
lors pas complète, et pour que la section puisse procéder
avec fruit à l’examen du projet, elle doit savoir en quoi consistent ces
erreurs.
M. Dubus (aîné). - Messieurs, je crois aussi qu'il est intéressant
que les sections soient mises à même d'examiner, avec tout le soin qu'il
mérite, un projet de l’importance de celui qui concerne l’accise sur le sucre ;
je dis un projet de cette importance, car la plupart des chambres de
commerce qui appartiennent aux localités où existent des sucreries indigènes,
de même que la plupart des commissions d'agriculture, signalent le projet comme
devant amener la ruine inévitable de tous les établissements de sucrerie indigène.
Vous conviendrez qu'en présence d'une pareille accusation, nous ferons bien
d'attendre les observations de M. le ministre en réponse aux avis des collèges
dont je viens de parler.
Au surplus, ces avis ne sont pas encore au complet ;
d'ici au moment où M. le ministre communiquera ses nouvelles observations, il
sera probablement à même de nous communiquer en même temps les avis de celles
des chambres de commerce, des commissions d'agriculture, qu’il n'a pas encore
reçus. Au reste, ce n'est pas la première fois que les
sections demandent des renseignements au gouvernement, avant de procéder à
l’examen d'un projet.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, j'ai adressé à
la chambre toutes les observations qui me sont parvenues, et à mesure qu'il
m'en parviendra d’autres, si tant est qu'il doive m'en parvenir, je
m'empresserai de les remettre au président. J'ai écrit aux chambres de commerce
et aux commissions d'agriculture que si elles avaient des observations à faire,
elles voulussent bien me les transmettre avant les reprises des travaux de la chambres, c'est-à-dire avant le 12 avril courant. Il est donc
probable que je n'en recevrai plus.
M. Osy. - Messieurs, ce ne sont pas les avis manquants des chambres
de commerce que la deuxième section réclame ; mais elle demande uniquement que
M. le ministre lui transmette le plus tôt possible les observations
qu'il s'est offert à donner dans la lettre qu'il a adressée à la chambre.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Je m'empresserai de rédiger
ces nouvelles observations, mais il n'y a pas là un motif pour retarder
l'examen du projet de loi.
PROJET DE LOI SUR LE TRANSIT
M. Le ministre des finances (M. Smits) présente le projet de loi
suivant, contresigné par lui et son collègue de l'intérieur :
« Art.1er. Le gouvernement pourra apporter au
régime d'importation de transit direct et transit par entrepôt, telles
modifications qu'il jugera favorables au commerce et compatibles avec les
intérêts du trésor et de l'industrie nationale. »
« Art. 2. La présente loi n'aura d'effet que pour
un au et sera exécutoire à partir du jour de sa promulgation. »
- Il est donné acte à M. le ministre des finances du
dépôt de ce projet de loi, qui sera imprimé et distribué.
La chambre en ordonne le l'envoi aux sections.
Discussion des articles
Article premier
M. Devaux. - Messieurs, un amendement présenté dans la séance d'hier
a placé la discussion sur un terrain nouveau. J'ai demandé la parole pour le
combattre.
Il faut d'abord se rendre compte de la portée de cette
disposition présentée par les honorables MM. Fleussu et Osy.
Le canal de Zelzaete se compose de deux sections,
l'une de la mer à Damme et l'autre de Damme à Zelzaete.
Le projet de loi déposé par l'honorable M. Lejeune,
ainsi que les amendements que M. le ministre a proposés sanctionnent en principe
la construction du canal tout entier de la mer à Zelzaete. Mais le gouvernement
et M. Lejeune sont d'accord pour ne demander actuellement que l'exécution de
la première section. La section de la mer à Damme, comparée à la section de
Damme à Zelzaete, présente sur la carte une grande différence avec l'autre,
puisqu'elle ne forme guère que la 5e ou 6e partie du tout ; mais c'est la
partie proportionnellement la plus coûteuse ; comme c'est cette section qui
doit recevoir les eaux du reste du canal, elle dort être plus large, et il lui
faut d'ailleurs des écluses très coûteuses qui absorberont presque la moitié
de la somme qu'elle doit coûter.
Toutefois, MM. Fleussu et Osy sont d'accord avec M. le
ministre et M. Lejeune sur ce point que cette section de Damme à la mer doit
être creusée dans la prévision de l'exécution du canal complet de Zelzaete à la
mer, car ils ont établi leurs calculs sur le chiffre demandé par M. Lejeune et
M. le ministre, qui est de 1,700,000 fr.
Ils ont pris le tiers de cette somme pour le mettre à
la charge de l'Etat, laissant les deux autres tiers à la charge de la province
de
Il importe de bien comprendre cette portée de la
proposition. Vous voyez que, bien que MM. Fleussu et Osy dans la rédaction du
projet aient l'air d'exclure la construction de la section de Damme à Zelzaete,
que les autres posent en principe sans en arrêter l'exécution, ils prévoient cependant
cette exécution. Elle est dans leur pensée lointaine, si l'on veut, soumise
dans son exécution à un nouveau vote des chambres, comme dans le projet
de M. Lejeune et celui du gouvernement. Si on n'avait voulu qu'un canal d'évacuation
des eaux du Zwyn, on n'aurait pas calculé la dépense sur un pied
aussi élevé ; s'il ne s'agissait que de la seule évacuation des eaux du
bassin du Zwyn, les frais seraient beaucoup moindres.
Je voudrais examiner la question sous plusieurs points
de vue. Puisqu'on ne demande aujourd’hui que l'exécution du canal de Damme à la
mer, et que l'exécution de l'autre partie dépendra d'un vote ultérieur de la
chambre, je m'attacherai d'abord à prouver que l'exécution du canal de Damme à
la mer est réclamée aujourd'hui comme une mesure de justice, je dirai presque
comme un droit par ceux qui la demandent.
L'état du bassin du Zwyn
vous est probablement connu maintenant. Vous savez que là les terres ont perdu
tous les écoulements qu'elles possédaient avant la révolution, sauf le plus
insuffisant de tous, celui qui est situé à l'ouest de cette partie de
On a été forcé, par suite des événements politiques,
de supprimer les écoulements par ces voies ; ou plutôt on a concouru à cette
suppression des deux côtés ;
Les cours d'eau ont donc été interrompus, et
l'ensablement du Zwyn n'ayant plus été combattu par
les chasses d'eau, il est arrivé à un point tel que ces débouchés sont
aujourd'hui absolument inutiles et qu'on ne pourrait plus les rétablir qu'en
faisant de très grands frais, en construisant des travaux sur le terrain de
l'étranger avec la perspective de les voir dépendre de lui et de plus de les
voir s'ensabler un jour de nouveau.
Vous voyez, messieurs, que ce que ces localités
demandent au gouvernement n'est pas une indemnité du genre de celles qui ont
été réclamées de vous, il y a quelque temps. Pour le passé, on ne vous demande
aucune indemnité ; les pertes ont été grandes, mais on ne vous demande rien, ni
pour non-jouissance, ni pour destruction. Tout ce qu'on demande, c'est d'empêcher
pour l'avenir le retour de désastres qui ont lieu périodiquement et qui ont
lieu par le fait de l'Etat, par le fait d'événements politiques, par le fait de
mesures prises dans l'intérêt de la défense du pays.
Ceux qui défendent le canal de Zelzaete ne sont pas
dans la position d'un propriétaire qui dirait : Ma maison a été bombardée ; je
vous demande une indemnité pour réparer les pertes que j'ai éprouvées par ce
bombardement. Ils sont au contraire dans la position du propriétaire qui vous
dirait : Ne bombardez plus ma maison, ne me faites plus subir les pertes que
vous m'avez jusqu'ici occasionnées. Passons l’éponge sur le passé, mais ce que
je demande, c'est de ne plus souffrir chaque année de nouveaux désordres qui
ne sont pas mon fait, dont la cause est le fait de la généralité. Ce que je
demande en ce moment, c'est que vous me remettiez dans la situation ou j'étais
avant 1830.
J'ai entendu l'honorable M. Dubus contester l'urgence
de la nécessité des travaux dont il s'agit. Il nous a dit : Mais cela est
réclamé depuis bien longtemps ; en 1836 le projet n'a pas été adopté par le
sénat ; qu'en est-il résulté. Les Flandres n'ont pas péri !
Non, les Flandres n'ont pas péri ; elles ne sont pas
rentrées dans le sein des eaux d'où la persistance et l'industrie de leurs
habitants les ont fait sortir. Et s'il faut un argument de ce genre pour faire
adopter le canal, je suis assez heureux, je l'avoue, pour ne pas pouvoir le
présenter.
Mais les Flandres n'ont-elles pas souffert
considérablement ? Consultez l'état officiel des travaux hydrauliques
nécessites par le défaut d'écoulement et des pertes causées par les
inondations, vous verrez que, pour les terrains situés entre Damme et la mer,
les pertes s'élèvent à plus de 700 mille francs ; les travaux extraordinaires
au canal d'Ostende (indépendamment des travaux d'entretien) pour remédier aux
détériorations que ce canal a subies, s'élèvent à 3 ou 400 mille francs.
Voilà un million à onze cent mille francs de charges pour une localité peu
étendue, par suite d'un fait politique et imputable à la généralité. Ces faits
ne constatent-ils pas la nécessité des travaux proposés ? Faut-il de plus
grandes pertes que celles là ? Pour le canal d'Ostende, on a dépensé 3 à 400
mille francs en travaux extraordinaires. .
Mais ce n'est pas tout ; ce canal, pour être mis dans
un état satisfaisant nécessite de grands travaux nouveaux dont la dépense devra
être faite en l'échelonnant sur un grand nombre d'années. Cette dépense
tellement considérable que le conseil provincial à qui elle a été demandée n'a
pas encore pu se décider à la décréter. Voilà dans quelle position l'état de
choses qui existe a mis les propriétés du bassin du Zwyn
et le canal de Bruges à Ostende.
Les poldres ont souffert également par des causes de
force majeure là le gouvernement est intervenu. Hier M. le ministre des travaux
publics a évalué à 7 millions les dépenses faites pour les polders, et je ne
crois pas que les propriétaires aient été taxés, qu'ils aient dû intervenir
pour un quart dans la dépense. Ici les propriétaires auront non seulement à
contribuer pour un quart dans la dépense, si vous adoptez la proposition du
gouvernement, mais encore à changer complètement la direction des voies secondaires
d'écoulement vers le canal. Voyez, sous ce rapport, combien leur position est
fâcheuse. En 1830 les anciens moyens d'écoulement sont supprimés ; il faut se
servir du canal d'Ostende. Dès ce moment, des voies d'écoulements secondaires
sont faites à leurs frais par les propriétaires. Maintenant, si on rétablit
l'ancien ordre de choses ou si on en établit un nouveau, il faut que les
propriétaires changent de nouveau les travaux qu’ils ont dû faire, pour les
mettre en harmonie avec la nouvelle direction du canal.
L'honorable M. Dubus a dit aussi que le chômage du
canal de Bruges à Ostende n'était pas considérable. Mais qu'il veuille jeter
les yeux sur le rapport fait en 1837 par M. Nothomb, page 43 ; il verra le
tableau, jour par jour, des époques de chômage du canal d'Ostende ; il verra
qu'en moins de 7 ans il y a eu 533 jours de chômage, c'est-à-dire du cinquième
au quart de tout le temps.
El cependant, messieurs, remarquez-le, ce qui importe,
ce n'est pas seulement la durée, mais encore l'époque de chômage. Un chômage
d'un mois par an, s’il a lieu à une époque où le commerce est actif, peut être
extrêmement préjudiciable. Que sera-ce d'un chômage de deux ou trois mois. Cela
est si bien senti que nous avons une pétition de la chambre de commerce de
Mons, en faveur du canal de Zelzaete, et la raison en est que le commerce
houiller du Hainaut est intéressé à ce que les baisses d'eau du canal d'Ostende,
nécessitées par le défaut d'écoulement par le Zwyn,
ne se répètent pas comme cela se fait aujourd'hui.
A l'ouverture de la session, quand j'étais à Bruges
(je ne sais ce qui s'est passé depuis) quatre-vingts bateaux charges de houille
avaient été retenus pendant environ trois semaines, parce que les eaux du canal
avaient dû être baissées pour laisser écouler les eaux du bassin du Zwyn.
Dans la discussion de 1836, on a cité une
correspondance entre le gouverneur du Hainaut el le gouverneur de
Il y a plus, le canal de Bruges sert aux vaisseaux de
mer ; il amène dans le port de Bruges les vaisseaux de ce port qui font le
commerce maritime. Qu'arrive-t-il ? Lorsqu'un vaisseau revient d'un voyage par
delà la mer, si les eaux sont baissées, il est obligé de séjourner à Ostende
jusqu'à ce que le niveau des eaux soit relevé. D'un côté, les ponts et
chaussées se trouvent dans cette singulière position, que l'agriculture leur
crie baissez les eaux pour nous délivrer des inondations ; les commerçants leur
disent de leur côté vous nous ruinez, si vous ne retirez pas les eaux du canal.
Car nos vaisseaux ne peuvent revenir à Bruges et sont forcés de séjourner à
Ostende ou de transborder. Voilà quelle position la situation actuelle du
canal fait à la navigation du canal de Bruges.
L’honorable M. Dumortier, pour prouver que la
construction du canal n'est pas urgente, a dit qu'il n'y a pas d'ensablement.
La preuve, a-t il ajouté, c'est qu'il y a deux rivières qui débouchent dans le Zwyn. Laissez faire ces rivières, dit-il, et ne vous
inquiétez pas de cet ensablement. Mais depuis 1830, les eaux de ces deux
rivières, qu'on flatte un peu en leur donnant ce nom, se déchargent, par le
canal de Damme, dans celui de Bruges à Ostende. Ainsi, ces deux rivières qui devaient
entretenir la profondeur du Zwyn sont en quelque
sorte détournées. S'il y a encore une partie des eaux qui arrive au Zwyn, ce ne peut être que lorsque les eaux sont tellement
hautes quelles parviennent à franchir l'obstacle qui s'est formé à leur embouchure
dans le Zwyn ; et quand elles arrivent à cette
hauteur, les propriétés voisines sont inondées. Car vous savez que ces canaux
sont formés de digues ; c'est-à-dire qu'ils sont en quelque sorte autant
au-dessus qu'au-dessous du niveau du sol. Par conséquent, si on élève le niveau
de leurs eaux, les canaux d'assèchement ne servent plus qu'à inonder les
terres.
Si vous pouviez rendre au bassin du Zwyn les anciennes embouchures, l'intérêt local, l'intérêt actuel
de la localité et même de la navigation du canal d'Ostende serait satisfait.
Mais vous ne le pourriez pas sans de très grands frais, aussi grands, plus
grands peut-être que ceux de construction du canal. Ensuite vous seriez obligés
de faire ces travaux considérables à vos frais sur le territoire de l'étranger,
pour les mettre sous la dépendance et afin peut-être qu'un jour il s'en serve
contre nous.
Un honorable sénateur disait en 1836, dans la
discussion du sénat, qu'il avait contribué autrefois, pour sa part, pour 6000
fr., dans la construction d'une écluse sur le territoire hollandais. Cette
écluse, pendant nos premiers démêlés avec
Pourriez-vous consentir à des dépenses qui auraient
pour objet de faire construire des écluses sous la direction du gouvernement
hollandais, de construire à grands frais sur ce territoire des canaux qui
seraient d'ailleurs ensablés quelques années plus tard, sauf à devoir ensuite
abandonner ces écluses, et à les voir diriger contre vous, lorsque cette
direction vous serait le plus utile en cas d'inondations de guerre ?
Il y a une grande erreur à croire que le canal de
Damme est une espèce de Pactole pour le bassin du Zwyn,
à croire que ce bassin va se trouver tout à coup amélioré beaucoup au-delà de
sa position d'autrefois. Il y aura amélioration quant à aujourd'hui, cela est vrai
quant à la situation qu'ont faite les événements politiques, mais quant à
l'état de choses qui existait avant les événements politiques de 1830, il n'y
aura pas. La seule amélioration qu'il puisse y avoir pour les propriétaires du
bassin du Zwin est une amélioration d'avenir, une
amélioration éventuelle. C'est que le Zwyn s'ensable
peu à peu ; dans un demi-siècle, un siècle peut- être, il aurait fini par
s'ensabler. Voilà l'avantage, avantage éventuel, avantage lointain, très peu
appréciable en argent, que dans tous les cas les propriétaires payent puisque,
d'après le projet du ministre, ils interviennent pour un quart dans la dépense.
Je crois que ces considérations prouvent qu'il y a non
seulement urgence, mais justice, dans le projet de loi proposé, et que ceux qui
le réclament ont en quelque sorte un droit rigoureux à invoquer.
Permettez-moi de ne pas me borner là et d'examiner la
question sous d'autres aspects encore.
Un des honorables auteurs de l'amendement nous a dit :
Ce que vous demandez est un canal d'écoulement ; si c'était un canal de
navigation, s'il s'agissait d'une voie navigable comme l'Escaut ou
Or, c'est dans l'intérêt de la navigation de ce canal
que le Hainaut, comme
Quelle différence faites-vous entre la navigation du
canal de Bruges à Ostende et la navigation de
Or, on a dit l'autre jour que la baisse fréquente des
eaux présentait des dangers d'ensablement pour le port d'Ostende. Cela
s'explique de la manière la plus simple : c'est que les écluses de chasse
d'Ostende ne peuvent agir avec efficacité qu'autant qu'il y a une grande
différence de niveau entre les eaux du canai et les eaux de la mer. Si le canal
d'Ostende doit servir de canal d'écoulement il faut baisser fréquemment les
eaux, alors les écluses de chasses perdent leur puissance, elles ne chassent
plus avec assez de force ; les eaux qu'elles envoient dans la mer ne tombent
plus d'assez haut et ne se précipitent plus avec assez d'énergie.
Je n'ai parlé que du bassin de Zwyn,
parce qu’il m'est le mieux connu. Mais ces raisons d'utilité et même de justice
existent aussi pour le bassin du Brackman.
Outre les faits de la révolution, il y a dans ce
bassin un fait du gouvernement, qui a changé sa situation, c'est le creusement
du canal de Terneuzen qui est venu substituer un canal de navigation à un canal
d'écoulement.
Aujourd'hui, messieurs, le canal de Terneuzen est très
favorable à la navigation, mais il est nuisible aux assèchements. Là comme dans
le canal d'Ostende, l'intérêt des assèchements exige qu'on abaisse les eaux, et
l'intérêt de la navigation qu'on les lève.
On s'est beaucoup plaint depuis quelque temps des
inondations du haut Escaut, et je dirai à ce sujet que j'ai dans les mains une
pétition venant de l'arrondissement de Tournay, où l'on prie la chambre de
donner au gouvernement les moyens de prolonger les voies d'assèchement jusqu'à
la mer. Ainsi on se plaint des inondations de l'Escaut, non seulement dans les
Flandres, mais dans le Hainaut. Or, à quoi tiennent les inondations du Hainaut
dans l'opinion des hommes de l'art ? Quel est le remède à y apporter ? la cause de ces inondations, c'est qu'à Gand les eaux ont un
débouché insuffisant ; le remède, c'est d'élargir le débouché des eaux à Gand.
Le canal de Terneuse qui
pourrait sous ce rapport rendre de très grands services, s'il n'était pas canal
de navigation, est un moyen très insuffisant, comme débouché du trop plein des
eaux de l'Escaut. Que fera le canal de Zelzaete à la mer ? Il rendra à Gand les
moyens d'écouler les eaux sans nuire à la navigation. Le canal de
Zelzaete à la mer ne sauve pas seulement le canal de Bruges à Ostende, mais
aussi il sauve la navigation du canal de Gand à Terneuse.
Il y a là deux canaux de navigation qui dans ce moment doivent servir à la fois
pour la navigation et pour l'assèchement ; ou il faut que la navigation
souffre, ou il faut que l'assèchement souffre. Le canal de Zelzaete se pose
entre ces deux canaux, comme simple moyen d'écoulement ; il permet ainsi de donner
à chacun des deux sa pleine navigabilité, et en même temps il permet d'écouler
le trop plein des eaux qui arrivent à Gand par l'Escaut et par
Messieurs, il y a encore en faveur de la construction
du canal, qui est en discussion un autre ordre de motifs, qui me paraissent
devoir avoir leur gravité à vos yeux.
Vous savez combien, de tout temps, cet écoulement des
eaux par le territoire étranger a amené de difficultés pour
Car enfin, si on vous ferme une écluse, si on ne fait
pas le service comme vous le voulez, vous n'irez pas faire la guerre parce
qu'un ruisseau se trouve bouché, parce que quelques hectares de terrain
souffrent. Vous n'allez pas faire la guerre, et cependant vous subissez une
humiliation. S'il s'agissait d'un grand fleuve, s'il s'agissait de l'Escaut, de
Je sais bien qu'on vous a dit que vous avez à l'égard
de
N'est-ce pas un intérêt général pour un pays que la
formation, la délimitation de la frontière ? Or, je dis que tant que les choses
restent dans l'état où elles sont, vous n'avez réellement pas de vraies
limites. Vous êtes à cet égard dans une position où un particulier ne resterait
pas un mois à l'égard de son voisin.
Quand on fait un traité de paix, quand il y a un
changement de territoire, quelle est la première mesure que l'on prend ? On
nomme des commissaires pour délimiter bien exactement les terrains, afin qu'il
n'y ait aucun mélange d'intérêt, aucune occasion de conflit entre les deux
peuples voisins. Ici vous avez un contrat continuel avec vos voisins, vos
intérêts sont mêlés aux siens au-delà de la frontière, vos propres écluses sont
chez lui, vous devez continuellement avoir recours à lui. Il peut vous nuire à
toute heure sans même en avoir l'air. En un mot, vous êtes dans la position de
deux associés qui, d'humeur incompatible, ont séparé leurs affaires, mais qui
restent les mains dans les poches l'un de l'autre. Ou si vous l'aimez mieux,
c'est une propriété, une maison, dont on en fait deux, qui sont vendues à des
propriétaires différents, mais auxquelles on donne une seule porte, une seule
gouttière, un seul égout.
Ne suis-je pas fondé à dire que le pays a un grand
intérêt à sortir de cet état de choses irrégulier ; et puisque l'occasion s'en
présente, puisqu'il y a nécessité de mettre la main à l'œuvre, je dis qu'il
est utile, qu'il est prévoyant de le faire ; de telle sorte que les intérêts
des deux pays soient bien séparés, bien indépendants.
Cet ouvrage, messieurs, serait fait depuis longtemps,
si
Joseph II l'avait voulu ; malheureusement, vous le
savez, Joseph II a eu à cet égard comme à l'égard de la liberté de
l'Escaut, des velléités que sa politique comme monarque autrichien, allié avec
Nous sommes assez heureux pour pouvoir faire ce que
Joseph II n'a pas fait ; nous n'avons plus d'intérêt étranger à
Vous avez compris dans une autre question, combien
cette dépendance de
Il me semble qu'il s'agit précisément ici d'une
question du même genre. Nous demandons pour l'écoulement des eaux des Flandres,
de ne dépendre que de
Remarquez-le bien, messieurs, nous ne sommes pas sur
nos frontières dans une situation bien favorable envers
Le canal de Zelzaete est un moyen de compenser jusqu'à
un certain point cette supériorité de position que
Il y a plus, c'est un moyen de supériorité sur
Ainsi, non seulement, vous vous défendez contre
D'autres membres ont déjà démontré l'intérêt que
présentera le canal de Zelzaele comme ligne de
défense militaire ; ne fût-ce que contre des excursions qui font toujours
beaucoup de mal ; on a également démontré les avantages qui résulteront du
creusement de ce canal sous le rapport de la facilité de la surveillance douanière.
Je vais maintenant considérer en lui-même l'amendement
des honorables MM. Fleussu et Osy.
Ces honorables membres ne contestent pas les chiffres
du gouvernement ; ils reconnaissent que le canal de Damme à la mer, seule
partie dont on réclame l'exécution, que le canal de Damme à la mer coûtera 1,700,000 francs ; ils mettent à la charge du gouvernement
1,700,000 fr. et 1,200,000 fr. à la charge de
Messieurs, cet amendement, c'est le rejet de la loi ;
cet amendement est inexécutable ; comment
« Mais, dira-t-on peut-être,
Ainsi, messieurs, l'amendement des honorables MM.
Fleussu et Osy me paraît tout à fait inexécutable, car on ne sait pas qui l'on
chargera des frais que l'on ne met pas à la charge de l'Etat : ce ne peut être
La preuve, messieurs, que cet amendement c'est le
rejet de la loi, c'est ce qui s’est passé en 1836.
Alors le gouvernement a cru ne pas pouvoir mettre à la
charge des localités la moitié de la dépense, ce qui était cependant beaucoup
plus favorable que la proposition de MM. Fleussu et Osy, d'après laquelle les
localités devraient supporter les trois quarts de la dépense. Le sénat adopta
un amendement qui mettait la moitié de la dépense à la charge des localités ;
mais que devint le projet ? Le gouvernement crut devoir le retirer parce qu’il
le considérait comme inexécutable.
En 1836, la chambre des représentants avait décidé que
tout ce canal serait construit aux frais de l'Etat ; le sénat décida que l'Etat
supporterait seulement la moitié des frais. Dans cette position, que fait M.
Lejeune ? Il a tâché de trouver une position intermédiaire entre le projet
adopté par la chambre des représentants et le projet amendé par le sénat : la
chambre des représentants avait décidé que l'Etat serait chargé de tous les frais
; le sénat avait voulu que l'Etat n'intervînt que pour la moitié ; pour mettre
d'accord le sénat et la chambre des représentants, le gouvernement adopta une
moyenne assez naturelle entre les deux projets ; il proposa de faire supporter
par l'Etat les trois quarts de la dépense ; c'est bien là le milieu entre la
moitié et la totalité. Au lieu de cela que proposent MM. Fleussu et Osy ? de nous mettre dans la plus singulière position vis-à-vis du
sénat ; vous avez envoyé au sénat un projet de loi où vous dites : les frais
du canal seront tous à la charge de l'Etat ; le sénat vous a répondu
: « Non, l'Etat ne donnera que la moitié. » Pour nous mettre
d'accord avec le sénat, ou pour proposer de ne plus même accorder la moitié,
vous ne donnerez plus que le tiers. Vraiment, messieurs, la dignité de la
chambre serait compromise, si elle se mettait dans une si étrange position
vis-à-vis du sénat, et vis-à-vis du pays.
Je terminerai ces observations par une recommandation
que j'ai à faire à M. le ministre des travaux publics.
Il y a quelque temps qu'une pétition a été adressée à
la chambre par les propriétaires de bateaux pêcheurs de Blankenherghe,
qui demandaient que le tracé du canal soit révisé et qu'on le fasse déboucher à
Blankenberghe même. Les pétitionnaires disent que
cela pourrait se faire sans beaucoup de frais et avec les mêmes avantages que
ceux qui résulteraient du tracé actuel ; au point où débouchera le canal il y
aura une espèce de petit port de refuge qui sera très avantageux aux bateaux
pêcheurs, ils ajoutent qu'il vaudrait mieux donner cet
avantage à Blankenberghe qu'à Heyst,
la pêche de Blankenberghe étant beaucoup plus
importante que celle de cette dernière localité. Il s'agit ici d'une question
d'art, sur laquelle je ne veux pas énoncer d'opinion, el que la chambre ne peut
pas trancher. Je demande seulement que le gouvernement veuille bien examiner s'il y aurait en effet moyen de concilier ici l'intérêt de la
pêche de Blankenberghe avec les autres intérêts qui
se rattachent au canal.
M. Cogels.- J'ai été assez surpris, messieurs, d'entendre dans cette
discussion, invoquer par quelques membres de cette chambre des principes que
dans d'autres circonstances j'ai défendus avec beaucoup d'insistance mais qui
n'ont pas été admis alors par ces honorables membres.
L'honorable député de Bruges qui a ouvert la
discussion dans la séance d'hier, en parlant de ce qui s'est passé il y a 6
ans, lorsque nous avons adopté une première fois la proposition de l'honorable
M. Lejeune, nous a dit que la chambre alors était touchée du sort de cette
masse de victimes qui depuis six ans souffraient des inondations auxquelles
elles avaient été constamment en butte, qu'il n'y avait alors en réalité qu'une
seule voix dans cette enceinte pour soutenir qu'il était de toute équité de
rendre à ces malheureux ce que les événements politiques leur avaient fait
perdre,
Eh bien, messieurs, c'est là le principe que j'ai
défendu dans une autre circonstance, et alors ce principe n'a pas été reconnu,
Je ne viens pas du tout blâmer la décision de la chambre ; je m'y soumets, je
la respecte ; mais je m'étonne qu'en ce moment, où il s'agit d'un canal qui
doit également être fait dans des intérêts particuliers, quoi qu'on en dise, on
soit venu invoquer un principe qu'on n'a pas voulu admettre en faveur d'hommes
qui souffrent des mêmes événements.
Je dirai plus ; l'honorable membre qui siége à mes
côtés, nous a dit que les détériorations des terres qu'il s'agit d'assécher
proviennent du fait qui a amené l'indépendance, la nationalité de
Je demande pardon à la chambre d'avoir fait cette
observation et ce ne sera pas un motif pour moi de voter contre le canal de
Zelzaete, Seulement je ne puis pas admettre le projet de loi tel qu'il nous est
proposé et j'en expliquerai très brièvement les motifs ; car je réclamerai
l'indulgence de la chambre ; j'aurai peut-être de la peine à me faire entendre,
il me serait impossible de parler pendant longtemps.
Le projet qui nous est soumis décrète non pas la
construction du canal de Damme à la mer, mais la construction du canal, depuis
la mer jusqu'à Zelzaete. Seulement dans le projet, il est dit que la première
section du canal sera exécutée immédiatement, mais la construction du canal
tout entier n'en est pas moins décrétée. Nous ne savons pas à quelle dépense
cela pourra nous conduire, et si la loi passe, toutes les dépenses devront se
faire, quelle qu'en soit l'importance.
Il y aura chose jugée, lorsqu’on viendra nous demander
des sommes quelconques pour l'achèvement du canal, on vous dira que vous ne
pouvez pas refuser ces sommes, qu'elles vous sont demandées en vertu d'une
loi.
Je ne pourrai donc pas accepter un projet qui limite
les sacrifices à faire par les propriétaires, mais qui ne trace aucune limite
pour les sacrifices que doit faire l'Etat ; je ne proposerai cependant pas
d'amendement, mais si le projet n'est pas modifié, je serai forcé de voter
contre.
Je voudrais aussi, puisque la seule section du canal
qu'il soit urgent de construire en ce moment, la section de Damme à la mer, je
voudrais que cette section seule fût décrétée par la loi, ainsi que cela avait
eu lieu par une proposition antérieure de l'honorable M. Lejeune et par le
premier projet de loi tel qu'il a été amendé par le sénat.
Pour présenter la construction du canal de Zelzaete
comme un objet d'intérêt général, l'honorable préopinant nous a fait valoir la
nécessité d'une délimitation de frontières. Il a dit que nous n'avions pas de
frontières, que nous étions en contact immédiat avec les voisins dont nous nous
sommes séparés.
En effet, messieurs, le canal qu'on propose pourra
atteindre en quelque sorte ce but, mais cependant il ne l'atteindra pas
complètement, parce que derrière le canal, vous laisserez encore beaucoup de
terrains qui resteront en contact arec
On a dit, probablement dans la prévision de l'argument
que j'ai fait valoir en prenant la parole ; on vous a dit que ce n'était pas
une indemnité qu'on réclamait. Cela est vrai, messieurs, il ne s'agit pas d'une
indemnité pour des pertes éprouvées ; mais cela n'équivaut pas à une indemnité
? On vous demande plus que nous n'avions réclamé. Nous demandions seulement une
réparation de dommages soufferts, ici on demande l'amélioration de propriétés particulières.
Il est donc bien juste que les propriétaires qui verront s'accroître la valeur
de leurs propriétés, contribuent dans la dépense pour une part proportionnelle
; car, il est très possible que l'accroissement de valeur de leurs propriétés
qui pourra résulter de la construction du canal, suit plus qu'équivalent à la
contribution qu'on leur imposera.
Comme je me sens fatigué, je bornerai là pour le
moment mes observations ; mais si les premiers articles, tels qu'ils sont
proposés étaient adoptés, j'aurais encore alors à faire des observations sur le
mode de paiement, dont il est question à l'art. 9.
M. Maertens. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour répondre en
peu de mots à l’honorable préopinant qui m'a fait l'honneur de citer un passage
de mon discours pour soutenir que je me trouvais en contradiction avec la
conduite tenue par moi dans une autre circonstance, lorsqu'il s'agissait
d'intérêts qui concernaient principalement la localité qui a envoyé l'honorable
préopinant dans cette enceinte.
Messieurs, ma conduite d'alors n'est nullement en
contradiction avec la conduite que je tiens aujourd'hui.
Comme l'a fait remarquer hier M. le ministre des
travaux publics, nous avons dépensé au-delà de sept millions pour l'endiguement
des polders, pour préserver les polders de nouvelles inondations ; nous avons
voté toutes ces sommes avec empressement, et ces allocations ont été toutes
mises à la charge du trésor public, sans que les intéressés aient
contribué pour une obole dans la dépense.
Nous, messieurs, députés des Flandres, nous qui
insistons pour obtenir le canal de Zelzaete, nous ne demandons absolument rien,
pour les pertes que les inondations ont occasionnées à nos terres, depuis que la
révolution nous a privés de nos voies d’écoulement. Dès lors, nous pensions
aussi que nous ne devions rien aux poldres pour les pertes que les inondations
leur avaient occasionnées, et que nous avions fait acte de bonne justice, en
replaçant ces poldres dans la position où ils se trouvaient avant la
révolution. C'est la même chose que nous demandons aujourd'hui : nous ne
réclamions aucune indemnité pour les pertes énormes que nous essuyons depuis 12
ans ; nous demandons uniquement que vous nous préserviez des nouvelles pertes
dont nous sommes menacées ; nous demandons que vous nous donniez le canal de
Zelzaete, pour remplacer des voies d'écoulement qu'avant la révolution nous
avions vers la mer, et dont la révolution nous a privés.
Je crois, messieurs, que dans toutes les
circonstances, les députés des Flandres ont fait acte de patriotisme dans cette
enceinte ; si chaque fois qu'il s'agit de construire un ouvrage quelconque d'un
haut intérêt sur une partie du royaume situé en dehors du territoire des Flandres
; si, dis-je, les députés de ces provinces voulaient se coaliser, s'ils
voulaient contester l'utilité de ces travaux, s'ils voulaient voter contre, la
chambre aurait les mains liées, toute administration deviendrait impossible ;
rien ne pourrait plus se faire dans l'intérêt général. Mais, nous, députés des
Flandres, nous avons agi d'une manière toute différente ; dans tous nos votes
nous n'avons eu en vue que l'intérêt général. Ainsi, nous avons voté 8 millions
d'indemnité, et certes la ville d'Anvers y est pour une large part, du chef de
son entrepôt. Nous, députés des Flandres, nous n'avons rien réclamé et nous
n'avions rien à attendre de cette somme pour nos localités. Et, en effet, nous
avons payé, nous, les dommages des pillages qui ont été le résultat de la
révolution ; c'est nous qui avons indemnisé les perdants, sans que l'Etat ait
contribué à ce paiement ; et cependant c'étaient là sans doute des pertes qui,
par leur nature, exigeaient l'intervention de la généralité. Dans d'autres
circonstances, nous avons voté des dépenses pour préserver
(Moniteur belge
n°114, du 24 avril 1840) M. Dubus (aîné) - Messieurs, je ne pense pas que nous devions nous
séparer ici (erratum, Moniteur belge n°116, du 26
avril 1842)
en députés de telle ou telle province. Dans les paroles que j'ai prononcées
hier, je n'ai pas fait allusion à la province à laquelle pouvaient appartenir
les députés qui soutenaient la proposition du ministre, je n'ai examiné que les
questions en elles-mêmes, et je me suis appuyé sur des faits. Je viens ajouter
quelques considérations à celles que j'ai fait valoir hier, et cela en réponse
aux observations présentées par un honorable député de Bruges, au début de la
discussion de ce jour.
J'ai soutenu hier, en ce qui concerne les poldres en
aval de Gand, que la situation est meilleure que celle d'autrefois, parce qu'on
a recreusé le canal du Sas, qui est devenu le canal de Terneuzen, et qu'on a
créé ici une nouvelle voie d'écoulement, meilleure que les précédentes.
On répond que je suis dans l'erreur, que c'est là un
canal de navigation, que ce n'est pas là un canal d'écoulement, et qu'il ne
peut pas même servir convenablement à assécher les poldres dont j'ai parlé.
Je ferai remarquer à la chambre que ce n'est pas
légèrement que j'ai articulé ce fait, mais que j'avais sous les yeux des
documents émanés du ministère des travaux publics. J'ai déjà cité des passages
du rapport de 1837. Mais depuis 1837, dans les pièces qui ont été adressées à
la chambre par M. le ministre des travaux publics, on a toujours présenté le
canal de Terneuzen comme ayant la double destination dont je parle, et comme
réalisant cette double destination, Et à cet égard, j'invoquerai le cahier qui
nous a été distribué dans la session dernière, sous le titre de Nouveaux
développements à l'appui du budget des travaux publics de 1841. Voici des extraits de ces
développements :
« Ce sont les eaux de l'Escaut et de
« Le canal reçoit, en outre, les eaux des
polders d'une partie de
L'on comprendra sans doute que les Hollandais ne sont
pas disposés à laisser inonder les polders qui ont besoin du canal de Terneuzen,
et quand on baisse les eaux, pour assécher les polders hollandais, il faut bien
que nous profitions de la baisse de ces eaux.
« Il est à la fois canal d'évacuation et canal de
navigation (…)
« Depuis le Sas de Gand jusqu'au point de
séparation à Terneuzen, la largeur au plafond augmente progressivement depuis
12 jusqu'à
« Une écluse de décharge, établie à Gand, à
l'endroit nommé Tolhuys, et ayant trois
passages de
« Il existe sous les digues du même canal un
assez grand nombre d'aqueducs et d'éclusettes, ayant
depuis 0.50 jusqu'à
(Et plus bas) :
« De la limite jusqu'à Terneuzen, le terrain,
composé entièrement de poldres, est depuis un jusqu'à deux mètres plus bas
que la ligne d'étiage du canal ; en sorte que pour la décharge des eaux de
ce quartier, on est obligé, de temps en temps, de baisser le niveau de l’eau
et de faire stater pendant ce temps la navigation. »
C'est toujours le ministre des travaux publics qui
parle.
Eh bien, messieurs, j'avais donc raison de dire que ce
canal était un canal d'évacuation, en même temps qu'un canal de navigation et
qu'il réalisait cette double destination.
J'ajouterai que sur ce point l'intérêt hollandais
coïncide avec le nôtre, puisque les Hollandais sont obligés, pour leurs propres
poldres, de baisser de temps en temps le niveau des eaux, afin de faire servir
ce canal comme moyen d'évacuation des eaux qui se trouvent dans les poldres
hollandais. Comment pourraient-ils dès lors s'opposer avec quelque apparence
de fondement, comment même leur serait-il possible de s'opposer à ce que nous
missions à profit cet abaissement pour l'écoulement de nos propres eaux ?
Je pense donc que cela ne peut pas être mis en doute,
qu'il existe là un moyen d'évacuation pour les eaux, ce moyen est plus
favorable que celui qui existait précédemment, ai-je dit ; il est même plus
durable. Et cela, ce sont les défenseurs du canal de Zelzaete qui se sont
chargés de l'établir. Que dit-on à l'appui du projet de loi dont il s'agit ? On
dit que ce qui a précipité l'envasement des débouchés actuels, c'est précisément
la disposition du traité de Munster, qui a fermé à la navigation le Sas de
Gand, le Brackman et le Zwyn
; sans cette fermeture, dit-on encore, des siècles se seraient écoulés avant
que l'envasement fût arrivé dans ces parages au point où il est aujourd'hui ;
parce que la navigation aurait maintenu un chenal qui aurait permis aux eaux de
continuer à s'écouler par cette voie. Considéré ainsi, c'est donc un bien que
le canal de Terneuzen, construit pour servir de voie d’écoulement, soit en même
temps un canal de navigation.
Je dis cela à ceux qui s'appuient sur la disposition
susdite du traité de Munster, en la signalant comme la cause d'un envasement
plus rapide du Sas, du Brackman et dû Zwyn.
J'avais dit encore que nous avions d'ailleurs une
garantie, que les choses seraient réglées à notre satisfaction dans la clause
du traité qui nous oblige à payer cinq millions annuellement à
Quant au Zwyn, par où l'on
nous dit que les voies d'écoulement sont toutes perdues, sauf le Hazegras, l'honorable député auquel je réponds n'est pas
disconvenu qu'elles seraient susceptibles d'être rétablies, au moyen de
certains frais. Il a dit seulement qu'il faudrait de très grands frais pour
cela.
Mais d'après ce que j'ai dit dans la séance d'hier,
les exemples que j'ai cités, à qui incomberaient ces frais ? Aux propriétaires.
Ce serait à eux à rétablir ces issues comme ils l'ont fait dans toutes les
circonstances antérieures. L'état de guerre ayant cessé, ils n'ont qu'à rouvrir
les débouchés momentanément obstrués. C'est donc pour leur épargner cette
dépense, que l'on creuserait aux dépens du trésor un nouveau canal.
Toutefois, messieurs, je n'ai pas refusé tout concours
de la part du trésor public. Quand j'ai parlé hier pour la première fois, j'ai
dit que je ne consentirais jamais à voter une somme aussi considérable que
quatre ou cinq millions, et je me suis attaché à justifier ce vote. Mais quand
un amendement a été déposé qui limitait à 550,000 fr. le sacrifice de l'Etat,
j'ai annoncé l'intention de me rallier à cet amendement.
On a fait valoir différentes considérations pour
établir qu'il y aurait ici intérêt général, mais la portée de ces
considérations n'est pas de faire disparaître l'intérêt évident de la province,
l'intérêt non moins évident des particuliers. La conséquence serait donc seulement
que l'Etat, la province et les particuliers doivent concourir à la dépense. Or,
tel est le but de l'amendement.
L'intérêt de la province deviendrait plus évident
encore, d'après les faits qui viennent d'être allégués par le député auquel je
réponds, car s'il est vrai qu'il résulte pour la province, de l'état de choses
actuel, un surcroît de dépense aussi considérable qu'on l'a dit, parce que les
eaux s'écoulent par le canal d'Ostende, la province a cet intérêt de plus,
indépendamment de celui que j'ai démontré hier, à concourir à une construction
qui fera cesser ce surcroît de dépense pour l'avenir.
Au reste, si j'avais dit hier qu'en ce qui concerne ce
surcroît de dépense et le chômage de la navigation résultant de ce que par moment
on emploie le canal de Bruges à Ostende comme canal d'évacuation, les
assertions produites à l'appui du projet me paraissaient exagérées, je m'étais
fondé précisément pour cela sur les tableaux même qu'on m'oppose. En ce qui
concerne le chômage, je répéterai qu'on ne peut pas comprendre dans le calcul
de la moyenne, les années extraordinaires où des inondations ont été tendues
par les Hollandais. Pour chacune des années 1831 et 1832, il y a eu au-delà de
120 jours de chômage ; ces années ne peuvent pas être prises en considération
non plus que l'année 1833. Prenez les quatre années qui suivent sur le tableau,
et vous trouverez une moyenne d'environ 50 jours de chômage pour toute l'année
; et encore ce chômage porte sur les mois d'hiver qui ne sont pas assurément
ceux où la navigation est la plus active. L'inconvénient dont on se plaint est
donc, il faut bien le reconnaître, exagéré de beaucoup.
L'honorable député auquel je réponds repousse
l'amendement comme inexécutable, et par suite comme un rejet de la loi. A cet
égard, il a fait remarquer que les calculs des auteurs de l'amendement
supposent la construction du canal à grande dimension, et que l'Etat, la
province et les particuliers supporteraient chacun un tiers de la dépense. Je
ne sais comment l'amendement sera expliqué à cet égard ; mais quant à moi, je
ne l'avais pas compris ainsi.
Ce qui m'avait satisfait dans la proposition, je le
répète, c'est que le sacrifice de l'Etat avait été limité à une somme de 550
mille fr. Mais à cette occasion, j'appellerai l'attention de la chambre sur un
tableau qui accompagne le travail général de l'ingénieur Vifquain, qui est
déposé sur le bureau et que M. le ministre des travaux publics a jugé être un
document inutile à consulter par nous pour la discussion actuelle.
L’évaluation de la dépense nécessaire pour creuser le
canal de Zelzaete est comprise dans ce travail général. On nous en a donné,
dit-on, la partie qui est relative à ce canal, mais cet extrait me paraît
incomplet, car le tableau dont je parle et qu'on ne vous a pas distribué, après
avoir résumé les dépenses à effectuer dans les diverses provinces, en établit
la répartition entre l'Etat, la province et les particuliers intéressés.
Or, on y lit, en ce qui concerne le canal de Zelzaete,
ce qui suit : Désignation des rivières et canaux. - Canal de Zelzaete, 1er
section de Damme à la mer, coût, 1,720,000 fr. Répartition de la dépense :
somme à provenir du fonds spécial pour l'exécution directe par l'Etat 573,333
fr., portion restant à la charge de la province et des sociétés 1,146,667 fr.
Le même travail est fait pour chacun des autres projets dont s'occupe le
rapport général que nous n'avons pas encore reçu et qui ne nous sera distribué
que plus tard. La chambre comprendra qu'il aurait été du plus haut intérêt
pour chacun de ses membres d'avoir sous les yeux ce travail où tous les
ouvrages de même nature sont compris et où l'on répartit la dépense entre les
intéressés, les provinces et l'Etat, de manière à diminuer la charge du trésor
et à permettre peut-être de satisfaire aux besoins de toutes les provinces.
Cependant on laisse ce tableau de côté ; on ne le
comprend pas dans l'extrait distribué ; on le considère comme nous étant
inutile quant à présent ; et en même temps l'on s'écarte, à notre insu, de ce
travail par la proposition qui vous est soumise, qui met à la charge de l'Etat
non 575,000 fr., mais toute la dépense du canal, sauf une fraction minime qui
pèserait sur les propriétaires.
On a beaucoup invoqué dans cette discussion, en faveur
de la proposition ministérielle, l'opinion des ingénieurs ; et voilà qu’il
paraît que leur opinion était que les provinces et les sociétés intéressées
concourussent pour les deux tiers de la dépense. J’ai pense qu'il était utile
de faire connaître cela à la chambre.
M. Dumortier. - Il faudrait imprimer cela.
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières)
et M. d’Hoffschmidt demandent la parole.
M. Dubus (aîné) - J'ai oublié tout à l'heure, en parlant du canal
d'Ostende, d'ajouter une considération à celles que j’ai fait valoir hier. J'ai
dit hier que ce n'était pas un état de choses intolérable que le chômage de 50
jours par an, en moyenne, alors surtout que les moyens de communication jusqu'à
la mer pour le transport des marchandises sont déjà augmentés, et le seront
encore dans un avenir plus ou moins prochain.
Il m'est tombé sous les yeux un document remontant à
1822, époque à laquelle la seule voie de navigation vers la mer était le canal
d'Ostende et où cependant on considérait comme une chose toute simple de faire
servir le canal d'Ostende à l'écoulement des eaux. Ce document est une
convention entre
« La présente convention recevra plein effet et
exécution aussi longtemps qu'il n'aura pas été pris, de concert entre les deux
provinces, des arrangements pour procurer à
De ce passage, il résulte qu'on trouvait tout naturel
de faire servir le canal d'Ostende, quoiqu'il ne fût pas en concurrence avec
un chemin de fer, à l'évacuation des eaux, lorsqu'il y avait nécessité ; en
second lieu, que déjà alors il y avait des inondations presqu'annuelles,
tandis qu'on nous présente ces inondations comme le résultat de la révolution
et du traité. Au reste, ces inondations, presqu'annuelles alors, me paraissent
encore être celui qui ont déterminé les propriétaires des poldres en aval de
Gand à offrir, en 1823, à créer à leurs frais, un débouché vers la mer, celles
par le canal de Sas étant obstrué. Ce à quoi il a été satisfait par le canal de
Terneuzen. Cela vient confirmer ce que je disais
hier, que la position des propriétaires de ces poldres, loin d'empirer, s'est
améliorée depuis la révolution.
(Moniteur belge
n°113, du 23 avril 1842) M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - L'honorable préopinant a
voulu tirer argument d'une citation qu'il vous a faite d'un passage du travail
de M. l'inspecteur Vifquain, pour prétendre que le gouvernement lui-même ne
considère pas le canal comme devant être construit pour les trois quarts aux
frais de l'Etat, comme il l'a proposé. En déposant le travail de M.
l'inspecteur Vifquain sur le bureau de la chambre, j'ai eu la précaution de
vous dire que ce n'était pas le travail du gouvernement, mais simplement le
travail d'un ingénieur que je communiquais à la chambre, afin qu'elle pût
prendre dès à présent connaissance des premiers éléments nécessaires pour le
travail général de la navigation du pays.
Mais si M. Vifquain lui-même a indiqué dans son
travail, une somme moindre que celle qui vous est demandée pour le canal de
Zelzaete, c'est que son travail était relatif à la formation d'un fonds spécial
pour travaux de construction et d'amélioration relatifs aux voies navigables.
Il n'a donc examiné le canal de Zelzaete que sous le rapport des services que
ce canal est appelé à rendre à la navigation, il a estimé que, par suite de ces
services, la navigation lui devait la somme qu'il a indiquée dans son tableau.
Aujourd'hui qu'on ne soutient plus que très faiblement
la question purement de localité qu’on trouvait auparavant dans le canal de
Zelzaete, je me bornerai à résumer les considérations émises sur ce point.
Le canal de Zelzaete est d'abord d'intérêt général,
parce que ce sont des faits politiques qui ont amené la nécessité de
l'établissement de ce canal. Ces faits politiques remontent très haut. Autrefois,
surtout avant la prise de possession par les Hollandais des terrains d'alluvion
de la rive gauche de l'Escaut, il existait un bras de ce fleuve marchant sur
différentes largeurs de Saffigen au Zwyn par Hulst, Axel, Biervliet, Aardenbourg, Oostbourg et l'Ecluse.
Alors nos eaux avaient leur écoulement libre par ce
bras du fleuve que parcouraient et nettoyaient journellement le flux et le
reflux. Depuis cette époque, des opérations militaires, la construction de
plusieurs forts, tels que Philippeville et autres et de digues nombreuses ont
toujours tendu à réduire le chenal qu'on appelle le Passe Gueule.
L'établissement du Bakkersdam en 1788, par un fait
politique des Hollandais a soumis le Zwyn à une cause
très active d'envasement qui a été fortement accéléré par le fait de la
révolution de 1830, et ce au point que l'écoulement par le Zwyn
est aujourd'hui complètement empêché. L'établissement du Bakkersdam
a eu, quoique moins activement, aussi pour résultat l'envasement progressif du Brackman. Mais ce qui est venu encore activer l’envasement
pour le Brackman, c'est, quoi qu’en ait dit,
l'établissement du canal de Terneusen.
L'établissement de ce canal en barrant l'Axelsgat a
fait disparaître ce grand chenal, dont je vous parlais tout à l'heure à l'égard
du Brackman, et a décidé pour un temps qui n'est pas
éloigné son envasement total. Ainsi, par suite de faits politiques, le Zwin a entièrement disparu ; il n'existe plus pour
l'écoulement des eaux. Et le Brackman est en grande
marche d'envasement.
Ensuite la libre navigation du canal d'Ostende à
Bruges n'est-elle donc pas d'intérêt général ?
Lorsque j'occupais le ministère des finances,
immédiatement après la conclusion du traité du 19 avril, le gouvernement n'a
pas hésité à vous présenter un projet de loi, pour assurer la navigation de
l'Escaut. Ce projet de loi a chargé le pays d'une rente perpétuelle de plus de
600,000 fr, par an. Et pourquoi ? pour reconquérir la libre navigation de
l'Escaut ; pour remédier aux obstacles à cette navigation qu'un grand fait
politique est venu poser tout comme les autres faits politiques que je viens de
citer, en mettant obstacle à l'écoulement de nos eaux par le Zwyn et le Brackman ont porté
atteinte à la navigation de nos canaux de Gand à Bruges, Ostende, Fumes,
Nieuport, Ypres et Dunkerque.
Remarquez-le bien, messieurs, à l'égard de l'Escaut il
ne s'agissait pas de 1,700,000 francs, ni de 3
millions, en capital comme au cas présent, il s'agissait d'une rente annuelle
de plus de 600,000 francs. Eh, messieurs, la liberté de navigation des canaux
d'Ostende et de Bruges, des autres canaux vers Dunkerque, est-ce principalement
les Flandres qu'elle intéresse ? Sont-ce principalement les produits des
Flandres qui sont portés pour ces canaux chez l'étranger ? Non, messieurs, ce
sont surtout les produits du Hainaut : les houilles et la chaux.
Ensuite de cela, messieurs, on vous a démontré à
l'évidence que le port d'Ostende avait le plus grand besoin du canal de
Zelzaete. Je suis à même de vous citer un fait qui s’est passé depuis
que j'ai l'honneur d'occuper au département des travaux publics. Ce fait a eu
lieu l'été dernier, lors des grandes pluies qui ont amené des inondations et de
fortes eaux à évacuer. Eh bien, messieurs, il a fallu alors que l'ingénieur en
chef de la province de
Maintenant, messieurs, restituer à de nombreux
terrains qui font partie de notre territoire leur ancienne fertilité, la
fertilité que leur ont fait perdre des faits politiques commis contre nous,
n'est-ce pas là une affaire d'intérêt général ? En restituant à ces terres leur
fertilité, ne restituez-vous pas au pays ses propres richesses ? N'avons-nous
pas dû, depuis la révolution, charger notre budget de non-valeurs assez
considérables, par suite de ce que ces terrains étaient devenus improductifs ?
Car l'abolissement de ces non-valeurs que procurera le canal de Zelzaete,
n'est-ce rien quant aux revenus du trésor ?
Ne vous a-t-on pas dit, et un honorable ancien
collègue que je regrette de ne plus voir ici, ne vous a-t-il pas démontré à
l'évidence que le canal de Zelzaete constitue un moyen défensif excellent pour
le pays ? J'entends aussi dire près de moi qu'il constitue un moyen défensif
contre la fraude ; et c'est la vérité.
Messieurs, je ne puis assez le répéter : oui, le canal
de Zelzaete procurera aux eaux supérieures de l'Escaut un écoulement plus facile,
en ce qu'il rendra d'abord les canaux de Bruges et d'Ostende plus disponibles
dans certains moments de grandes eaux, pour soulager les contrées qui se
trouvent vers le haut Escaut.
Messieurs, d'où viennent maintenant les grandes
inondations de l'Escaut, dont-on se plaint très vivement ? D'où
proviennent-elles ? Elles proviennent de ce que, à raison des travaux qui ont
été exécutés en France depuis nombre d'années, les eaux nous arrivent de ce
pays en plus grande abondance et d'une manière bien plus accélérée. Eh bien ! messieurs, il s'est trouvé que le débouché d'Antoing par
lequel doivent passer ses eaux, était trop étroit ; de là, des inondations en
France et en partie sur notre territoire. Il s'est trouvé ensuite qu'à
Audenaerde il en a bientôt été de même ; de là, inondations vers Tournay.
Messieurs, un honorable député de Tournay s'est plaint
hier très vivement de ce que, sur la ligne du chemin de fer de Mouscron à
Tournay, il ne se trouvait pas assez d'ouvriers employés à la section entre
Templeuve et Tournay, pour que les travaux fussent assez tôt terminés.
M. Dumortier. - J'ai dit qu'il ne se trouvait pas un seul ouvrier.
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières)
- Vous avez dit qu'il ne s'y trouvait pas un seul ouvrier, Eh bien, soit ! mais savez-vous, messieurs, à quoi cela tient ? Aux eaux. Je
tiens en mains un rapport de M. l'inspecteur Noël dans lequel je lis
: « La présence des eaux dans la vallée de l'Escaut (aux abords de
Tournay) et dans les vallons qui en dépendent, n'a pas encore permis de
reprendre les travaux avec vigueur. Cependant on achève quelques ouvrages d'art
; on met la dernière main au corps de la route vers Templeuve, et on doit
commencer la pose du railway. » Ainsi, vous le voyez, c'est la présence des
eaux qui empêche le prompt achèvement de cette section du chemin de fer, et qui
est cause du retard dont se plaint l'honorable M. Dumortier, et si le canal de
Zelzaete existait il n'en serait pas ainsi.
Messieurs, dans la discussion de 1836, il est encore
un autre motif que l'honorable membre de cette chambre qui se trouvait alors à
la tête du département de l'intérieur vous a fait valoir pour démontrer que le
canal de Zelzaete était d'intérêt général : c'est celui de l'état sanitaire
des troupes et des douaniers qui doivent séjourner dans les terrains auxquels
il s'agit de restituer leur assèchement. J'y ajouterai encore, messieurs,
l'état sanitaire des habitants de ces contrées, et je dirai que c'est là encore
un motif pressant d'intérêt général pour construire le canal de Zelzaete.
A tous ces faits qui démontrent à l'évidence l'intérêt
général qui se rattache à la création du canal de Zelzaete, qu'oppose-t-on, si
ce n'est que c'est un intérêt de localité, parce qu'il s'agit, dit-on, d'améliorer
des terres ? Voilà absolument à quoi se réduisent en dernière analyse toutes
les objections que l'on fait. Mais, messieurs, je dirai d'abord à ceux qui
veulent la canalisation de
Messieurs, on vous a aussi dit qu'il ne fallait pas
insérer dans la loi le principe de la construction du canal entier de Zelzaete à
la mer, qu'il fallait se borner à décréter dans la loi la construction de la
section de Damme à la mer ; que c'était ce qu'on avait fait en 1836 et que
c'était ce qu'il fallait encore faire aujourd'hui.
Mais, messieurs, je vous l'ai déjà fait remarquer hier,
en 1836 on a aussi décrété implicitement le principe de la construction du
canal de Zelzaete à la mer. Car on s'est basé sur le chiffre d'estimation des
travaux nécessaires à l'exécution de la section de Damme à la mer, mise en
rapport avec l'exécution non immédiate mais certaine du canal entier jusqu'à
Zelzaete.
La loi a été votée par la chambre dans l'hypothèse que
cette dernière partie serait faite plus tard ; il avait été entendu que tous
les travaux, les terrassements, écluses, ponts, etc., seraient construits sur
des dimensions telles que le canal pût être prolongé jusqu'à Zelzaete. Or,
qu'on le dise implicitement ou explicitement, cela ne revient-il pas au même ?
Ne convient-il pas même que dans une loi l'on s'exprime franchement et explicitement
?
Mais, encore une fois, on n'engage pas dès à présent,
du moins pour un terme indéterminé, toute la somme nécessaire à la construction
du canal de Zelzaete à la mer, on n'engage actuellement que la somme nécessaire
pour la section de Damme à la mer et vous restez toujours juges de l'époque à
laquelle la construction de la section de Damme à Zelzaete devra être commencée
; on ne cesse de vous le dire ; cette époque n'arrivera que dans un temps
indéterminé, et la chambre restera, je ne puis assez le répéter, toujours juge,
en définitive, de la question de savoir si l'époque est
arrivée, oui ou non, de voter les fonds nécessaires pour l'achèvement du canal.
M. Cogels. - Messieurs, l’honorable député qui m'a répondu,
doit m'avoir très mal compris. Il croit m'avoir entendu lui reprocher qu'il
était guidé par un esprit de localité, et aux députés des Flandres en général
de n'écouter, dans cette circonstance que les intérêts de leurs provinces.
Messieurs, je n'ai rien dit de pareil. J’ai dit seulement que si dans cette
question il y avait un intérêt général, cet intérêt général était dominé par un
intérêt particulier, c'est-à-dire par l'intérêt des propriétés qui doivent se
trouver améliorées par la construction du canal de Zelzaete. Voilà ce que j'ai
dit. Je ne me suis jamais laissé guider, la chambre me rendra justice, par un
étroit esprit de localité ; je n'ai accusé personne de ce tort, je voudrais
voir l'esprit de localité aussi bien que l’esprit de parti banni de nos
discussions.
L'honorable M. Maertens a encore dit, à propos du vote
émis lors de la discussion du projet de loi d'indemnités : « Mais nous
avons dépensé pour les poldres sept millions de francs sans que les
propriétaires aient dû concourir à la dépense. Messieurs, ces sept millions
n'ont pas été exclusivement dépensés dans l'intérêt des poldres, ils ont été
dépensés dans l'intérêt du rétablissement des grandes communications entre
Anvers et Gand. Une des plus grandes dépenses a été la réparation de la rupture
de Burght. Eh bien ! cet
ouvrage n'a été fait ni dans l'intérêt de la province d'Anvers, ni dans
l'intérêt des poldres, mais dans l'intérêt du rétablissement des grandes
communications.
Il y a d'autres dépenses qui ont été faites dans
l'intérêt de notre défense, dans l'intérêt des forts ; ensuite, vous aviez
encore l'intérêt de la navigation. Vous voyez donc bien que la très grande
partie de ces dépenses ont été faites dans l'intérêt général.
L'honorable M. Maertens a cru que, par esprit de
localité, je m'opposais complètement à la construction du canal de Zelzaete ;
c'est là une erreur ; messieurs, je ne m'oppose pas à la construction du canal
de Zelzaete, mais je ne veux pas accorder tout ce qu'on demande pour ce canal,
et en cela, je ne fais que suivre l'exemple de l'honorable membre, qui n'a pas
accordé non plus tout ce que nous demandions. Je m'oppose à ce que nous
décrétions dès aujourd'hui que le canal de Zelzaete sera construit, sans que
nous sachions ce qu'il coûtera, et qu'après cela, on puisse venir nous opposer
notre vote pour nous demander toutes les sommes dont on pourrait avoir besoin. .
Je n'ai pas voulu prendre l'initiative pour proposer
un amendement, je préfère attendre que d'autres le fassent, mais si on ne limite
pas le sacrifice qu'il s'agit d'imposer au trésor, certes je ne pourrai pas
donner mon vote au projet.
Il ne s'agit en ce moment que de la section de Damme à
la mer, pourquoi ne pas borner la loi à cette section ? Nous pourrions voir
ensuite ce qu'il y aura à faire pour la section de Damme à Zelzaete ; M. le
ministre des travaux publics vient de dire lui-même qu'on ne demande en ce
moment que les fonds nécessaires à la construction de la 1ère section, que si
l'on ne reconnaissait pas l'utilité de l'autre section ou si l'on
reconnaissait que les frais en sont trop élevés, nous serions toujours libres
de refuser les crédits demandés pour cette autre section. Ne nous occupons donc
pour le moment que de la section de Damme à la mer, la seule qui soit urgente,
la seule pour laquelle on demande des fonds.
J'appuierai donc le premier amendement de l'honorable
M. Fleussu, qui tendait à modifier la loi en ce sens, qu'au lieu de dire :
« Il sera construit un canal de Zelzaete à la mer du Nord, » on
dirait : « Il sera construit un canal de Damme à la
mer du Nord. »
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières)
- Il paraît, messieurs, que l'honorable préopinant n'a pas compris ce que j'ai
dit tout à l'heure. J'ai dit qu'en 1836 le principe de la construction du canal
entier depuis Zelzaete jusqu'à la mer se trouvait implicitement décrété en ce
sens qu'on avait calculé la dépense à faire pour la section de Damme à la mer
dans la prévision que le canal serait ensuite, quand le besoin s'en ferait
sentir, prolongé depuis Damme jusqu'à Zelzaete.
Il est facile de comprendre que si l'on voulait se
borner à faire la section de Damme à la mer sans songer à faire plus tard la
section de Damme à Zelzaete, la première de ces sections n'aurait pas besoin
d'être faite sur une aussi grande échelle ; les écluses, les ouvrages d'art ne
devraient pas être faits sur une aussi grande dimension que lorsqu'on se
propose de prolonger dans la suite le canal jusqu'à Zelzaete ; que par
conséquent dans le premier cas, la dépense ne serait pas à beaucoup près aussi
élevée que celle dont il s'agissait dans le projet de 1836.
Ainsi, messieurs, en 1836 on a volé implicitement le
principe de la construction du canal depuis Zelzaete jusqu'à la mer, mais on
n'a voté l'exécution immédiate que de la section de Damme à la mer ; eh bien,
c'est encore ce que propose le projet actuel ; seulement en ce qui concerne le
principe de la construction du canal entier, ce principe
est exprimé explicitement dans le projet actuel, tandis qu'il ne se trouvait dans
le projet de 1836, que d'une manière implicite.
M. Lejeune. - Messieurs, un honorable préopinant, dont la parole
toujours grave, exerce ici beaucoup d'influence, est revenu sur des faits qu'il
avait déjà discutés hier, et que je ne puis laisser passer sans quelques
explications. Il s'agit du canal de Terneuzen.
Cet honorable député de Tournay vous a dit,
entr'autres, messieurs, que les poldres en aval de Gand se sont améliorés par
suite de la construction du canal de Terneuzen et que la voie d'écoulement qui
leur a été donnée est meilleure. Il a dit aussi que la destination du canal
était l'évacuation des eaux de l'Escaut et de
J'ai déjà dit que le canal de Terneuzen a été
construit dans un moment où les ensablements avaient rendu presque nulle
l'évacuation des eaux par le canal du Sas, pour ce qui concernait l'écoulement
des eaux supérieures de l'Escaut et de
L'évacuation des eaux supérieures par le canal
primitif du Sas de Gand était bonne ; les eaux se déchargeaient au Sas de Gand
immédiatement dans la mer sans devoir se réunir dans un réservoir, avec les
eaux des terrains inférieurs. Là les intérêts de l'écoulement des eaux
supérieures, et les intérêts de l'écoulement des eaux des terrains bas
n'étaient pas confondus. Le canal donc était une bonne voie d'écoulement pour
les eaux supérieures qui tombaient directement dans la mer.
En construisant le canal de Terneuzen, il a fallu le
séparer en deux biefs : le bief amont qui va de Gand au Sas-de-Gand et le bief
aval qui va du Sas-de-Gand à Terneuzen. Je ne dois pas ici m'occuper beaucoup
de navigation, mais j'en dirai cependant un mot en passant. Quels services le
canal nous rend-il sous le rapport de la navigation, et quelle influence cette
navigation a-t-elle sur l'écoulement des eaux ? Messieurs, la navigation est
encore un intérêt qui vient en opposition avec l'écoulement des eaux ; pour
naviguer sur le canal, il faut le remplir et il faut le remplir à tel point que
cette navigation nous a causé, entre Gand et le Sas-de-Gand, des inondations
inconnues auparavant. Sous ce rapport donc, abstraction faite des intérêts de
la navigation, le canal de Terneuzen nous fait beaucoup plus de mal que de
bien.
Le canal doit servir de voie d'écoulement pour les
poldres en aval de Gand, disait l'honorable M, Dubus ; mais, messieurs, ces
poldres ne sont pas du tout ceux dont il s'agit ici, ce sont les poldres qui
n'ont aucun rapport avec la construction du canal de Zelzaete. Ce sont les
poldres zélandais situés à la droite du canal de Terneuzen, qui déchargent
leurs eaux dans ce canal ; c'est le pays d'Axel et de Hulst
qui décharge ses eaux dans le bief aval du canal de Terneuzen.
Dans l'intérêt de l'écoulement des eaux de ces poldres
zélandais, il est indispensable de tenir le canal à un étiage très bas, et de
là l'honorable M. Dubus a conclu que nous pouvons écouler les eaux belges,
attendu que dans l'intérêt même des polders hollandais, il fallait tenir le
canal fort bas.
Mais, messieurs, l'effet est précisément contraire ;
c'est parce que le bief aval doit être tenu fort bas qu'on doit tenir fermé le
barrage du Sas, qu'on doit refuser passage à nos eaux pour ne pas inonder les
polders zélandais. C'est de là qu'il résulte que le canal de Terneuzen, pour
l'écoulement des eaux supérieures est beaucoup moins bon que l'était le canal
du Sas.
Voici, messieurs, ce qui arrive sur le canal de
Terneuzen, quand il faut naviguer, on remplit le canal et alors l'étiage du
canal, même en aval du Sas, doit être beaucoup plus élevé que les terrains
zélandais qu'il doit assécher, de sorte que ces terrains, ces poldres
zélandais, pendant la navigation, doivent fermer leurs écluses, et attendre le
moment où la navigation est suspendue, pour pouvoir de nouveau écouler leurs
eaux.
Pendant la navigation, nous ne pouvons pas non plus
écouler nos eaux supérieures, parce que le canal doit être tenu rempli ;
lorsque le moment est venu de baisser le canal, il doit être baissé tellement
pour pouvoir recevoir les eaux des terrains inférieurs, que l'écoulement de nos
eaux supérieures n'est plus possible qu'à petite section.
Je pense que l'honorable membre est tombé à peu près
dans la même erreur, quant au canal de Bruges et d'Ostende.
On se plaint, disait-il, que le canal d'Ostende doive
servir à l'écoulement des eaux, et d'un autre côté on le réclame pour l'écoulement
des eaux.
Cette observation provient, messieurs, de ce qu'on
confond les deux intérêts opposés, l'intérêt de l'écoulement des eaux des terrains,
et l'intérêt de l'écoulement des eaux supérieures.
Pour faire servir le canal d'Ostende à l'écoulement
des eaux des terrains bas, il faut le tenir fort bas, et maintenir le barrage à
Bruges. De là il résulte que nous ne pouvons pas écouler par là les eaux
supérieures. Si le canal de Zelzaete se construit, les terrains bas auront un
écoulement tout à fait séparé et le barrage ne devra plus être maintenu à
Bruges : vous ouvrez ainsi une voie nouvelle pour l'évacuation des eaux de
Une chose fort importante et qui a été encore
contestée aujourd'hui, c'est que lorsque le canal d'Ostende doit être tenu
fort bas, il est impossible de faire des chasses, parce que pour remplir vos
bassins de retenue, il faut avoir le canal bien rempli.
Mais, je pense qu'il est inutile de dire que
l'écoulement des eaux des terrains bas, quoique continuel, n'opère pas de
chasse, mais qu'il occasionne aucune, au contraire, des envasements. Les
chasses ne peuvent s'opérer qu'avec une grande chute.
L'honorable M. Dubus a dit encore que lorsqu'il
s'agissait de construire le canal de Terneuzen, les poldres zélandais avaient
demandé l'autorisation de construire un canal d'écoulement. On n'a pas donné suite
à ce projet, parce que le canal de Terneuzen a été construit, et que les
terrains contigus qui sont toujours les poldres zélandais, à la droite du
canal, y déversent leurs eaux, moyennant une légère indemnité qui ne représente
qu'une très faible partie des frais d'entretien.
Je dois rencontrer ici une observation faite par
l'honorable M. Eloy de Burdinne. M. Eloy nous disait hier : « On veut faire
construire le canal de Zelzaete pour se soustraire au payement d'une somme de
150,000 florins qu'on paye aujourd'hui. » Eh bien, messieurs, il n'en est
pas ainsi. Nous ne voulons pas soustraire les terrains à l'imposition
extraordinaire qu'ils supportent, ces impositions existent et continueront à
exister. La construction du canal de Zelzaete ne nous déchargera pas de cette
charge ; mais jusqu'à complet remboursement de la part dont on frappe les
propriétaires, cette imposition sera au moins triplée, et je ne tiens encore
aucun compte des dépenses toutes particulières du premier établissement des
affluents vers le canal et des écluses.
Messieurs, on a encore insisté sur l'amendement qui
tendrait à ne pas décréter le canal de Zelzaete à la mer. Mais je dois répéter
ce que je vous ai dit hier : Vous n'auriez rendu justice qu'à demi, et pas même
à demi, je vous ai dit que vous voulez remplacer le Zwyn
; vous voulez que les terrains qui s'y jettent, trouvent un autre débouché ! Je
vous ai fait remarquer que ces terrains s'étendent jusqu'au delà d'Eccloo, jusqu'à la hauteur de Lembeke
et dès lors il y a dès à présent nécessité de construire le canal tout entier.
Messieurs, si vous refusiez de décréter le canal de
Zelzaete, ce n'est pas seulement le canal de Zelzaele
que nous n'aurions pas, mais ce serait une entrave insurmontable à toute espèce
d'amélioration possible et projetées à
Si le canal de Zelzaete n'est pas fait par le
gouvernement, ce canal ne se fera pas ; il est impossible qu'il soit fait
autrement que par le gouvernement ; les propriétaires seraient impuissants à le
faire.
Que deviendrait alors cette partie du pays ?
Abandonnée par la législature belge, elle continuerait à traîner péniblement
son existence problématique, dans la dépendance de
M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, j'ai demandé la
parole pour motiver mon vote sur l'amendement qui a été proposé par MM. Osy et
Fleussu.
Mon vote sur cet amendement sera négatif, parce que
j'en regarde l'adoption comme emportant le rejet du projet de loi. Or, je me
suis déjà exprimé à cet égard ; je ne suis pas hostile au projet et il est
évident que si nous adoptions l'amendement dont il s'agit, le gouvernement, ou
l'honorable auteur de la proposition, M. Lejeune, la retirerait sans doute ;
car comment pourrait-il la laisser subsister, puisqu'en 1836 le gouvernement
retira le projet de loi tel qu'il avait été amendé par le sénat, bien que ce
projet modifié fût beaucoup plus avantageux que l'amendement en discussion ?
Ainsi, messieurs, je suis contraire à cet amendement,
au moins dans les termes dans lesquels il est formulé.
Cela prouve que, contrairement à ce qu'on a allégué
plusieurs fois, que ceux qui ont proposé ou appuyé l'ajournement de la discussion,
n'étaient pas opposés au fond à la construction du canal de Damme à la mer.
Je regrette cependant vivement encore que cet
ajournement n'ait pas été adopté. Je le regrette surtout, après avoir entendu
ce que l'honorable M. Dubus nous a lu du travail de M. Vifquain. Je crois même
que dans l'intérêt du projet qui est en discussion, il eût été à désirer que la
délibération qui nous occupe maintenant, n'eût lieu que dans la session
prochaine. Je pense que ce rejet n'aurait pas amené de grandes calamités pour
les Flandres, et que l'adoption du projet eût alors rencontré moins de
difficulté.
En effet, n'est-ce pas une chose vraiment étrange que
lorsqu'on vous parlait d'un projet de canal dans cette enceinte, on vous disait
toujours : Attendez le rapport de M. Vifquain ; quand vous aurez ce rapport,
vous pourrez discuter en parfaite connaissance de cause, et que quand ce
rapport vient de nous arriver, nous demandons en vain qu'il nous soit possible
de nous livrer à un examen sérieux des détails qu'il contient ?
Quoi qu'il en soit, puisque la chambre en a décidé
autrement, ce ne sera pas pour moi un motif suffisant, pour que je me prononce
formellement contre le projet de loi.
Je ferai cependant encore remarquer qu'il est
possible, maintenant que nous allons voter la partie du canal comprise entre
Damme et la mer, qu'il est possible, dis-je, que nous adoptions, pour subvenir
aux frais de construction, des principes tout différents de ceux que nous
adopterons plus tard pour l'exécution d'autres canaux tout aussi utiles au
pays. En effet, le principe qu'on nous propose maintenant, est celui que
l'Etat subviendrait pour les 3/4 de la dépense, tandis que, d'après l'honorable
M. Dubus, il paraîtrait que M. l'ingénieur Vifquain ne proposerait d'appeler
l’Etat à concourir dans ces dépenses que pour le tiers. Il s'en suivrait
que si nous adoptions les principes posés pour la dépense par cet ingénieur,
nous aurions favorisé considérablement les parties du pays intéressées
particulièrement à la construction du canal de Zelzaete.
Malgré mes bonnes dispositions pour le projet, je
désirerais cependant, ainsi que l'a demandé M. Cogels, qu'il se bornât à décider
en principe la construction du canal de Damme à la mer. Je ne conçois pas
pourquoi on veut nous faire poser maintenant le principe de la construction de
toute la ligne de Zelzaete à la mer. Comme on l'a déjà dit, le premier projet
présenté par le gouvernement en 1836, ne mentionnait que le canal de Damme à la
mer.
Le rapport de la commission qui a été fait sur ce
projet s'exprimait formellement pour qu'il ne soit question que de cette
partie. Il n'a pas été implicitement décidé, comme le disait tout à l'heure M.
le ministre, qu'on ferait le canal de Zelzaete à la mer, En voici la preuve
évidente, C'est ce que disait le rapport de la commission sur cette question.
Ce rapport a été fait par M. de Puydt en 1836 au nom de la commission spéciale
chargée d'examiner les amendements et le projet relatifs au canal de Zelzaete.
Voici comment il s'exprime :
« La loi consacrera-t-elle le principe du canal
d'écoulement de Zelzaete à la mer, ou simplement la section de Damme à la mer.
« Plusieurs membres de la commission auraient
désiré que le canal fût décrété en entier, sauf à ne pourvoir, pour le moment,
qu'à la construction de la partie la plus urgente, celle qui doit immédiatement
lever les entraves apportées à la navigation du canal d'Ostende. Mais la
majorité de la commission a pensé que la forme donnée à la proposition du
ministre ne préjugeait rien contre la section de Zelzaete à Damme, dont
l'utilité avait été suffisamment constatée par les discussions de la chambre,
et consacrée par les motifs mêmes des votes que la commission venait d'émettre
sur les questions ci-dessus.
« Il est à observer, en outre, que la législature
devant, dans tous les cas, être consultée plus tard pour les fonds nécessaires
à l'exécution de cette branche de Zelzaete à Damme, la décréter à l'avance,
sans moyens d'exécution, ne servirait à rien.
« La commission a, en conséquence, admis la
rédaction du ministre de l'intérieur pour cet article. »
Ainsi vous voyez que la commission s'est bornée à
décréter le canal de Damme à la mer et je pense même qu'il ne s'est élevé aucune
discussion sur ce point. Dans mon opinion nous ferions bien de nous en tenir à
cette section. Je ne vois pas d'avantage dans l'intérêt des Flandres à décider
qu'on fera le canal si étendu et si coûteux de Zelzaete à la mer.
Remarquez que plus tard, nous serions plus éclairés
sur plusieurs questions que ce canal soulève et plus à même de les résoudre.
On veut nous faire décréter l'exécution de ce canal d'urgence. Pour la section
de Damme à la mer il paraît que l'urgence existe mais elle n'existe pas pour la
section de Damme à Zelzaete. M. le ministre lui même a dit que le temps pour
lequel cette section serait exécutée était indéterminé. On veut nous faire
décréter cette construction en principe avant que nous ayons pu prendre
connaissance du rapport de l'ingénieur Vifquain et que la commission instituée
pour s'occuper de l'écoulement des eaux des Flandres nous ait présenté le sien.
M. le ministre nous a dit encore que nous resterions
toujours juges de la question d'argent, Quelle nécessité y a t-il donc à décréter
maintenant un travail en principe, si par la suite, pour la portion de la dépense
à supporter par le gouvernement, nous pouvons refuser les fonds ? Je crois
qu'il serait infiniment plus sage de laisser cette question en suspens et de ne
la décider que quand tous les éléments dont nous pouvons avoir besoin nous
seront remis et que la nécessité s'en fera mieux sentir.
Ainsi, si l'amendement de M. Fleussu, tel même que je
l'avais compris hier, se bornait au sens que je viens d'indiquer, je serais
disposé à l'adopter. Mais quant à l'amendement en discussion, je serai forcé de
le rejeter.
M. Rodenbach. - La province refuserait.
M.
d’Hoffschmidt.
- Je ne comprends pas pourquoi elle refuserait le canal de Damme à la mer seulement
quand, en 1836, elle l'acceptait.
M. Cogels propose de porter à 860 mille fr. la somme de 550
mille fr. fixée comme subside à accorder à la province de
M. de Muelenaere. - Un honorable préopinant
s'est emparé d'un tableau qui a été déposé sur le bureau par M .Ie ministre des
travaux publics et qui est joint au rapport de M. l'ingénieur Vifquain. La
chambre n'a pas vu ce tableau qui n'a été ni imprimé ni distribué. Je
désirerais que M. le ministre se chargeât de demander à M. l'ingénieur quelques
explications sur ce tableau dont on vient de se prévaloir, car évidemment ce
rapport est conçu dans un tout autre ordre d'idées ; sans cela il serait
impossible de concilier le tableau joint au travail avec l'extrait de ce
travail joint au rapport. Quant à la participation de la dépense, M. Vifquain
est d'avis que les propriétaires intéressés ne doivent intervenir que pour un
quart dans la dépense. Il est même plus favorable aux propriétaires intéressés
que la proposition de M. le ministre des travaux publics. Je vous demanderai la
permission de vous lire seulement deux passages de l'extrait joint au rapport.
Voici le premier :
« Si ces faits prouvent à l'évidence la nécessité
absolue du nouveau canal d'écoulement, ils ne démontrent pas moins la
convenance et la justice de son exécution par l'Etat. »
M. Dumortier. - Il ne dit pas aux frais de qui.
M. de Muelenaere. - Il le dira tout à
l'heure.
Quelle est la proposition du gouvernement ? C'est
celle-ci : que les frais de construction seront supportés jusqu'à concurrence
des trois quarts par l'Etat et un quart par les propriétés intéressées, mais
qu'une fois le canal entièrement achevé, les frais d'entretien devront être
supportes par les propriétés intéressées.
C'était la proposition de M. Lejeune, de faire
contribuer les propriétés pour la moitié de la plus-value qu'elles
acquerraient. Dans aucun cas les propriétés ne devaient être imposées davantage
; c'était plus juste et plus équitable.
Voyons ce que dit M. Vifquain sur les frais de
construction. Après avoir dit que la dépense tout entière devrait être supportée
par l'Etat, voici ce qu'il ajoute :
« Que cependant, si l'on considère les
difficultés qui s'opposent à la mise à exécution de la loi de 1807, dans
l'appréciation de la valeur que les terrains dont il s'agit avaient avant la
révolution et de celle qu'elles auront acquise après l'exécution du canal,
déduction faite de mille sortes de dépenses que nécessitera même au loin le
nouvel étal de l'écoulement ; on sent qu'il conviendrait peut être mieux de
fixer tout d'abord dans la loi le quantum de la participation des
propriétaires du bassin du Zwyn, à répartir ensuite,
par les soins de l'administration provinciale, entre eux suivant le degré
d'avantage que leurs terrains auront retiré de l'exécution du nouveau canal. Ce
quantum ne devrait pas s'élever, vu toutes les circonstances, au-delà du
quart de la dépense de la partie des ouvrages qui, dans le projet du canal de
Damme à la mer, peut être considérée comme nécessité, pour l'écoulement des
eaux du bassin du Zwyn ; les propriétaires intéressés
participeraient aux frais d'entretien dans la même proportion. »
Vous voyez que, pour la construction, M. Vifquain est
d'accord avec le ministre des travaux publics, que dans aucun cas la part
afférente aux propriétaires intéressés ne devrait aller au-delà du quart de la
dépense. De plus, selon lui, ils ne devraient participer que jusqu'à
concurrence du quart aux frais d'entretien.
Le projet de loi qui nous est soumis met tous les
frais d'entretien à la charge des propriétaires intéressés.
Il me semble qu'il est impossible d'expliquer
autrement la pensée de M. Vifquain, que dès lors le tableau dont on s'est
prévalu, a été conçu dans un autre ordre d'idées. Cependant, comme on en a
argumenté, il serait à désirer que M. le ministre nous donnât des explications
sur ce tableau, afin qu'on sût quelles ont été les
intentions de M. l'ingénieur.
M. Cogels. - J'ai déjà expliqué les motifs pour lesquels je
pensais qu'on devait décréter seulement la section de Damme à la mer et
ajourner celle de Damme à Zelzaete. Cependant, comme dans le cas où le
prolongement aurait lieu les dimensions de la première section devraient être
tout autres que si on se bornait définitivement à la construction de cette
seule section, je veux mettre le gouvernement à même de la construire dans les
proportions voulues pour servir, au besoin, de tête au grand canal projeté.
Voilà pourquoi j'ai porté à 860,000 francs la somme
que MM. Osy et Fleussu avaient fixée à 550,000 francs, et de cette manière je
rentre entièrement dans l'esprit du projet de loi adopté par le sénat, parce
que ces 860,000 fr. forment la moitié de la somme de 1,720,000
fr. à laquelle est évaluée la construction du canal de Damme à la mer.
M. Osy et M.
Fleussu déclarent
se rallier au chiffre proposé par M. Cogels.
M. Dumortier.- Je crois d'abord qu'il est facile de donner une
explication à l'honorable M. de Muelenaere, l'inspection seule du tableau
suffira. Il résulte de ce tableau que l'Etat ne doit payer qu'un tiers. Les
deux autres tiers sont à la charge des provinces et des propriétaires.
M. de Muelenaere. - Je demanderai à
l'honorable M. Dumortier la permission de l'interrompre un instant.
M. Dumortier. – Très volontiers.
M. de Muelenaere. - Je crois que l'honorable
M. Dumortier se trompe. Il n'explique pas la pensée de M. Vifquain. Je me
confirme dans cette opinion par le passage suivant (page 12) du rapport de M.
Vifquain.
« Relativement à la
participation de la province, nous ferons remarquer que celle-ci a déjà soldé
sa grande part, tant par les pertes de ses revenus sur les canaux jusqu'ici
sacrifiés, que par les dépenses énormes qu'elle a faites pour leur entretien
ruineux et toujours insuffisant. »
M. Mast de
Vries cite un
passage du rapport de M. Vifquain dans le même sens.
M. Dumortier. - Les pièces qui se trouvent imprimées dans les
documents de la chambre ne sont qu'un faible extrait du rapport de M. Vifquain.
Cet extrait n'est rien en comparaison du rapport et des tableaux qui y sont
annexés et qui évaluent à 40,750,000 francs les
dépenses à faire pour nos voies navigables.
Je ne conçois pas que l'on s'oppose à ce que les
provinces interviennent dans les dépenses d'un canal, dont le but (les auteurs
de la proposition en conviennent) est principalement un intérêt provincial,
alors que pour faire une route, un pavé, on exige de la plus petite commune
qu'elle intervienne dans la dépense. Et cependant une route, tous les Belges
peuvent s'en servir, tandis qu'un canal d'assèchement ne sert qu'à la localité
qu'il doit assécher.
Je ne puis admettre un tel système. Ce n’est pas de la
justice distributive. C'est une injustice, et rien de plus. Prenez-y garde.
J'ai toujours eu de la sympathie pour les Flandres. Mais si un tel système
pouvait prévaloir, on ne dirait pas que les députés des Flandres entravent les
lois, comme semblait nous en menacer tout à l'heure un honorable membre, mais
on dirait qu'ils font les lois à leur profit, qu'ils font leurs affaires dans
le parlement. Les Flandres depuis 10 ans ont obtenu tout ce qu'elles ont
demandé. Jamais on ne leur a refusé ce qu'elles ont demandé.
M. Delehaye. - Mais qu'avons-nous demandé ?
M. Dumortier. - Lorsqu'il s'est agi du chemin de fer, on ne voulait
qu'un chemin de fer d'Anvers au Rhin, c'est vous qui, pour former une majorité,
avez exigé un chemin de fer jusqu'à Ostende, puis un second chemin de fer que
vous avez également obtenu.
M. Delehaye. - Vous avez aussi un chemin de fer.
M. Dumortier. - Qu'on le fasse, et nous serons contents. Nous ne
pouvons obtenir ce qui est juste, et vous, vous avez le superflu.
M. de Meer de Moorsel. - Il a été dépensé dans le
Hainaut 32 millions depuis la révolution.
(Moniteur belge
n°114, du 24 avril 1842) M. Dumortier. - Il n'a pas été dépensé depuis la révolution un
demi-million dans l'arrondissement de Tournay, qui est aussi grand et aussi
populeux que toute une province. Il ne faut pas avoir d'esprit de clocher, en
pareille matière.
N'est-il pas évident qu'un canal d'écoulement doit
être construit aux frais des localités ? Que l'état accorde un subside, j'y
consens. Mais mettre à la charge de l'état les défenses des localités, c'est
marcher vers une ruine certaine. Pour moi, j'ai toujours défendu les intérêts
du trésor public ; je les défends encore aujourd'hui. Si vous n'écoutez pas ma
voix, vous nous conduisez dans un abîme, dans lequel nous nous perdrons.
Messieurs, ce qui surtout est évident dans l'affaire
qui nous occupe, c'est que l'intérêt général n'est ici nullement en jeu ; et
tous les efforts que se sont donnés les orateurs qui défendent le projet pour faire
valoir l'intérêt général, ne reposent réellement sur rien de sérieux. Il est
manifeste que l'intérêt général est absolument étranger à la question.
Et, en effet, que vient-on vous dire pour appuyer cet
intérêt général ? Le grand argument, le voici : La révolution nous a privés de
nos voies d'écoulement. Eh bien, messieurs, je conteste complètement la vérité
de cette allégation. La révolution n'a ni amélioré, ni empiré les voies
d'écoulement des Flandres. La révolution a laissé les choses comme elle les a
trouvées.
Messieurs, veuillez, je vous prie, jeter les yeux sur
la carte qui vous a été distribuée avec le mémoire d’un de nos anciens
collègues, M. l'abbé Andries ; vous verrez quelles étaient les voies
d'écoulement qui existaient précédemment d'un côté pour la partie de Damme à la
mer, et d'un autre côté pour la partie de Damme à Zelzaete.
Quant à la partie de Damme à Zelzaete, il existait des
moyens d'écoulement sur le Brackman. Ces moyens
restent aujourd'hui absolument les mêmes que la révolution les a trouvés. Et
remarquez-le, messieurs,
Quant à ce qui est de la partie entre Damme et la mer,
vous remarquerez, messieurs, que les moyens d'écoulement sont triples ; les uns
se dirigent vers le Midi, les autres vers le Nord.
Vers le Midi, vous avez deux écluses donnant dans le
chenal d'Ostende, et communiquant avec le Nord-Ede, et qui à chaque marée
laisse écouler les eaux. Vous avez donc là un écoulement certain, un
écoulement qui est resté le même qu'avant la révolution.
Maintenant, vers le Nord, il existe deux moyens
d'écoulement, tous deux dirigés vers le Zwyn ; l'un
se dirige vers l'Ecluse, l'autre vers l'écluse de Hazegras.
Je crois devoir vous rappeler qu'avant Joseph II, toutes les eaux se
dirigeaient vers l'Ecluse. Mais comme à cette époque le gouvernement hollandais
avait entravé le cours des eaux, on a construit l'écluse de Hazegras
; à cette écluse on a joint un fort, le fort de Hazegras.
Et remarquez-le ici en passant, nous aurons aussi besoin d'un fort pour le
canal de Damme ; nous devrons encore consentir de ce chef, à une dépense de
cinq à six cent mille francs. On ne parle pas de cette dépense, parce que comme
elle sera à la charge du département de la guerre, l'Etat ne paraît pas devoir
la payer.
Je dis donc qu'il y avait deux écoulement vers le Nord
; eh bien, ces deux écoulements sont restés les mêmes. A cela que répond-on ?
C'est que le Zwyn, vers lequel ils se dirigent, est
ensablé ; et ce qui le prouve, c'est qu'autrefois des navires pouvaient y
entrer, et qu'aujourd'hui cela n'est plus possible.
Eh bien ! j'admets que le Zwyn soit ensablé, j'admets que les navires ne puissent
plus y arriver. Mais quel est l'effet d'un semblable ensablement ? Mon Dieu ! il ne faut pas sortir du pays pour l'apprendre. La même
chose est arrivée à Nieuport. Nieuport, autrefois un des plus beaux ports de
Un membre. - Nieuport reçoit les
navires.
M. Dumortier. - Oui de petits navires ; mais il ne peut plus en recevoir de
grands ; le Zwin est dans le même cas.
Eh bien ! l'effet d'un
écoulement périodique, c'est qu'il emporte tous les jours à marée basse le
sable que la marée haute a apporté. Si le flux apporte journellement un peu de
sable, lors du reflux, l'écoulement des eaux de l'intérieur emporte ce sable.
Il peut se faire que cet écoulement ne soit pas assez fort pour laisser une
anse, un port, mais il restera toujours un passage suffisant pour les eaux,
parce que l'écoulement de l'intérieur vers la mer est toujours beaucoup plus
fort que celui qui vient de la mer vers l'intérieur.
C'est par ce motif que le port d'Ostende n'a pas été
ensablé sous l'ancien gouvernement, alors qu'il empêchait la grande écluse de
chasse de jouer. Car si le port d'Ostende n'avait pas eu le canal de Bruges
pour verser des eaux dans le port d'Ostende, celui-ci se serait ensablé, comme
il en arrivera de tous les ports de
Vous le voyez donc, la révolution n'a pas empiré la
position des Flandres, elle l'a laissée dans l'Etat où elle se trouvait
auparavant. Il n'y a donc pas de ce chef intérêt général ; il n'y a pas non
plus la moindre similitude avec le collège de St-Trond, dont vous a tout à
l'heure parlé un honorable député de Bruges.
Dans l'affaire du collège de St-Trond, nous avions
privé, par notre vote, un établissement d'une de ses succursales ; c'était un
effet de la volonté nationale, et la chambre pouvait se regarder comme
responsable du fait qu'elle avait créé.
Mais par l'effet de la révolution nous n'avons enlevé
aux Flandres aucune espèce de voie d'écoulement. Nous avons au contraire stipulé
dans le traité les conditions les plus formelles pour leur conserver leur voie
d'écoulement. J'ajouterai qu'une commission spéciale à été nommée pour régler
la question d'écoulement des eaux des Flandres, et si je suis bien informé, les
deux gouvernements sont parfaitement d'accord pour faciliter par tous leurs
moyens cet écoulement. Voilà dans quel état sont les travaux de cette
commission. Aucune espèce de désaccord n'existe sur ce point. Il est donc
inexact de dire que la révolution aurait empiré la position précédente ; les
choses sont aujourd'hui comme elles l'étaient sous le gouvernement autrichien.
Messieurs, ce n'est pas tout.
Ainsi, vous le voyez, l'intérêt de nos voisins est une
garantie des services rendus à nos propres intérêts. C'est donc une erreur de
venir prétendre que la révolution est une cause qui a aggravé l'état des
Flandres. C’est là une erreur capitale ; je viens de le démontrer à
l'évidence.
On a poussé les choses à tel point, que M. le ministre
des travaux publics a dit que la création de certaines forteresses, comme
Philippine, avait diminué l'écoulement des eaux ; et on vient dire que c'est un
fait politique qui a nécessité la création du canal de Zelzaete. Mais, je le
demande, est-ce depuis la révolution qu'on a construit le fort de Philippine ?
Et s'il y a intérêt général, parce que il y a deux ans
Je ferai remarquer que cet argument est absolument de
même force que celui qu'a produit M. le ministre des travaux publics, lorsqu'il
a prétendu que lorsque l'on avait baissé les eaux du canal de Bruges, plusieurs
navires n'avaient pu entrer dans le port d'Ostende. J'avoue que je n'avais
jamais cru qu'il fallait de l'eau dans le canal de Bruges pour que les
vaisseaux puissent entrer dans le port d'Ostende.
M. Delehaye. - Vous avez mal compris.
M. Dumortier. - M. le ministre a ajouté que les capitaines de
navire lui avaient écrit qu'ils n'avaient pu entrer dans le port d'Ostende
parce qu'il n'y avait pas d'eau dans le canal de Bruges.
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières)
- Je n'ai pas dit cela.
M. Dumortier. - Voici ce que vous avez dit : on a baissé dans
l'été dernier les eaux du canal de Bruges, et plusieurs navires qui étaient en
vue du port d’Ostende n’ont pu y entrer.
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières)
- N'ont pu entrer dans le canal.
M. Dumortier. - Si c'est ainsi que vous l'avez entendu, c'est
différent. Mais je demanderai à M. le ministre des travaux publics s'il
s'imagine qu'il y ait des canaux dont on ne doive pas tous les ans baisser les
eaux pendant un certain temps. Tous les canaux sont dans le même cas, chaque
année on doit baisser les eaux pour les réparations. Vous ne pouvez prétendre
que le canal de Bruges soit d'une condition autre que les autres. Les vaisseaux
qui ne pouvaient y entrer, n'avaient qu'à attendre quelques jours dans le port
d'Ostende jusqu'à ce que les eaux fussent remontées. Ce n'était pas bien
difficile, et c'est ce qui se fait dans tous les canaux.
On vous parle de la navigation du canal de Bruges, Eh
bien ! la réponse ici est extrêmement facile. Le canal
de Bruges, je viens de le dire, est soumis à la condition de tous les canaux ;
il faut bien que l'on consente, à des époques plus ou moins rapprochées, à voir
baisser les eaux. Mais ce n’est pas tout : l’intérêt du canal de Bruges est
singulièrement diminué ; et comme je l'ai fait remarquer hier, c'est
l'honorable comte de Muelenaere qui l'a dit, cet intérêt est singulièrement
diminué depuis qu'on a autorisé la création du canal de l'Espierre, et le motif
en est simple ; c'est qu'au lieu d'aller par le canal de Bruges, les navires se
dirigeant vers Dunkerque auront plus court en prenant le canal de l'Espierre.
M. Rodenbach. - C'est impossible, il y a eu
un amendement pour mettre obstacle à cela.
M. Dumortier. - Il n'y a pas d'amendement qui puisse empêcher un navire
d'aller à Dunkerque ; Vous ne mettrez pas une écluse sur le territoire français
pour l’empêcher d'aller ou il veut.
Ainsi sous ce point de vue, le canal de Bruges a perdu
beaucoup de son intérêt.
D'ailleurs, est-ce là un motif pour que le canal
entier de Zelzaete soit fait aux frais de l'Etat ? Evidemment non. C'est un motif
pour accorder un subside, mais non pour faire toute la dépense.
Car évidemment avec de pareils arguments, il n'y a pas
de travail qu'on ne puisse justifier. Je me fais fort, avec de pareils
arguments, de justifier tous les travaux, quels qu'ils soient, fussent-ils à
l'avantage d'un particulier.
S'il est était vrai, messieurs, que les événements
politiques eussent modifié la position des Flandres sous le rapport de
l'écoulement de leurs eaux, s'il était vrai que le traité des 24 articles eût
enlevé aux Flandres une partie de leurs moyens d'écoulement, alors nous
devrions intervenir pour la plus grande part dans la construction du canal,
mais, comme je l'ai démontré tout à l'heure, il est manifeste que le traité n'a
en rien modifié la situation des Flandres sous ce rapport.
On vient, messieurs, mettre le haut Escaut en avant ;
on vient nous dire : « Mais ce n'est pas pour nous que nous faisons le
canal, c'est pour vous-mêmes qui vous y opposez. » Messieurs, il faut
convenir que nous, députés du Hainaut, nous jouons ici un rôle bien singulier ;
nous refusons les faveurs qu'on veut nous donner, nous repoussons les subsides
qu’on nous offre.
Ainsi, messieurs, c'est dans notre intérêt qu'on veut
construire le canal de Zelzaete, et plus tard, lorsqu'on viendra faire le
relevé des sommes qui ont été allouées aux diverses provinces, on comprendra
dans la part du Hainaut les 5 millions qu'il s'agit de consacrer à cette
construction ! (On rit.)
Eh bien, messieurs, je dis que le Hainaut est
complètement désintéressé dans la question, et je vais le prouver.
Il n'existe dans
Mais en aucune façon : les écluses qui ne sont pas
assez larges pour que nous puissions écouler nos eaux, ne sont ni les écluses
de Bruges ni celles d'Ostende, ce sont les écluses d'Audenaerde ; les
inondations ne sont pas entre Audenaerde et Gand, mais entre Tournay et
Audenaerde, laissez passer nos eaux à Audenaerde et nous n'aurons plus
d'inondations.
Les eaux de l'Escaut ne s'écouleront jamais dans le
canal de Zelzaete, parce que l'Escaut a un écoulement qui lui est propre, son
écoulement est à Anvers et j'espère, que le port d'Amers est assez large pour
recevoir les eaux qui passent à Tournay.
C'est donc une erreur de venir invoquer l'intérêt du
Hainaut en faveur du canal de Zelzaete ; nous avons un écoulement naturel par
Gand et Anvers, et cet écoulement est très facile, car tous les jours, à la
marée basse, il y a à Gand une chute de 6, 8 ou
M. le ministre des travaux publics nous a dit tout à
l'heure que la crue des eaux empêche les travaux du chemin de fer. D'abord,
messieurs, j'ai expliqué d'où venait la crue des eaux à Tournay, j'ai dit que
la cause en est dans l'insuffisance des écluses d'Audenaerde. Mais je ferai
remarquer à M, le ministre des travaux publics qu'il a été induit en erreur ;
que les travaux de terrassement peuvent très bien se faire. Il est fort à
regretter qu'on nous laisse dans une semblable situation, mais quand il s'agit
de Tournay on ne fait jamais rien, nous ne pouvons jamais rien obtenir, depuis
dix ans
Je viens de démontrer à l'évidence, messieurs, qu'il
ne s'agit pas ici d'un objet d'intérêt général ; ne croyez pas cependant que je
veuille m'opposer à la construction du canal de Zelzaete ; loin de là, je suis
très disposé à ce qu'on fasse le canal si on le juge nécessaire, mais je désire
au moins que nous sachions ce que nous votons, je désire que nous n'émettions
pas un vote dans le vague ; or, il me semble qu'en adoptant l'amendement tel
qu’il vient d'être modifié, nous ferons tout ce qu'il est possible de faire ;
cet amendement, qui met la moitié de la dépense à la charge de l'Etat, a
d'ailleurs le mérite de rentrer dans le projet qui avait été adopte par le
sénat, et la loi aura ainsi d'autant plus de chances d'être adoptée par cette
assemblée. Si cet amendement est adopté, la dépense pourra se répartir d'une
manière équitable ; l'Etat supporterait la moitié de la dépense ; on pourra
ensuite faire supporter un quart par la province et l'autre quart par les
particuliers.
Remarquez, messieurs, qu'indépendamment de cette
moitié que l'amendement met à la charge de l’Etat, nous aurons bien d'autres
dépenses à faire pour le canal ; comme il s'agit de faire des écluses de mer,
vous devrez nécessairement construire un fort pour protéger ces écluses, car si
vous n'aviez pas de fort pour protéger vos écluses, en cas d'hostilité avec
Je pense donc, messieurs,
qu'en votant l'amendement vous aurez satisfait aux besoins des localités dont
il s'agit et de cette manière au moins vous n'aurez pas posé un précédent
ruineux pour le trésor public.
(Moniteur belge
n°113, du 23 avril 1842) M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - Tout à l'heure,
messieurs, on a tiré parti d'un fait qui se trouve dans le rapport de M.
Vifquain, et que l'on n'a pas pu expliquer. J'ai déjà eu l'honneur de dire à la
chambre que le gouvernement, en déposant ce travail sur le bureau, n'a pas
entendu s'expliquer à l'égard de l'adoption ou de la non-adoption des
propositions ou des opinions émises dans ce travail. Je ne pense pas non plus
que les membres de la chambre soient disposés à adopter tout d'abord sans
examen, sans aucune discussion, toutes les opinions qui se trouvent exprimées
dans le rapport de M. Vifquain. Quoi qu'il en soit, on a tiré parti d'une
contradiction qu'il y a entre deux parties de ce rapport.
La première partie renferme la discussion
approfondie, la discussion spéciale des questions relatives au canal de
Zelzaete, celle-là vous la connaissez tous, et elle tend, comme l'a fort bien
dit l'honorable M. de Muelenaere, à mettre à la charge de l'Etat, non seulement
les 3/4 des frais de construction, mais encore les 3/4 des frais d'entretien et
d'administration du canal, tandis que le gouvernement, dans le projet qu'il
vous a présenté, a mis, en outre du quart du coût de la construction, la
totalité des frais d'entretien et d'administration à la charge des intéressés.
Or, messieurs, je le répète, la partie du rapport qui conclut ainsi, c'est la
partie essentielle en ce qui concerne le canal de Zelzaete ; quant à l'autre
partie qui a été citée, ce n'est qu'accidentellement que M. Vifquain y parle
du canal de Zelzaete ; à cet égard, je viens de recevoir à l'instant même une
lettre de cet ingénieur, et je vais en donner lecture à la chambre.
« Monsieur le ministre,
« J'ai bien entendu que la part des propriétaires
à l'exécution du canal ne serait que d'un quart.
« Dans le tableau, j'ai porté le tiers de la
dépense à la charge du fonds spécial de la navigation, et c'est par erreur que
les deux autres tiers ont été portés dans la colonne (des provinces et des
concessions). Ces deux tiers doivent être portés dans une colonne nouvelle,
sous le titre de Trésor de l'Etat.
« Votre respectueux serviteur,
« L’inspecteur VIFQUAIN. »
Vous le voyez, messieurs, M. Vifquain a été préoccupé,
pour cette seconde partie de son travail, entièrement de la répartition entre
le fonds spécial, d'une part, et les provinces et les concessions de l'autre.
C'est ce qui fait que, bien qu'il eût songé à mentionner ici aussi le canal de
Zelzaete, afin de le doter d'un subside d'un tiers sur le fonds spécial, il n'a
pas songé à ouvrir une autre colonne dans son tableau pour y porter les deux
autres tiers qui, dans son opinion, très bien, très amplement développée dans
la partie de son rapport spécial au canal de Zelzaete, tombent comme l'autre
tiers à la charge de l'Etat, avec cette seule différence que le premier tiers,
selon lui, doit être prélevé sur le fonds spécial des canaux de navigation
qu'il propose de créer, et les deux autres tiers sur les fonds généraux de
l'Etat.
- La séance est levée à 4 3/4 heures.