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Chambre des représentants de Belgique
Séance du samedi 3 mars
1838
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Motion d’ordre relative à la mise à l’ordre
du jour des conclusions de la commission des pétitions sur la réforme
électorale (Scheyven, Rogier, Pollénus, F. de Mérode, Lebeau, Pollénus, Lebeau)
3) Prise en considération de demandes en
naturalisation ordinaire. Procédure de vote (règlement de la chambre) (de Langhe, Pollénus, de Jaegher, Dubus (aîné)), (Lebeau, Simons)
4) Projet de loi organisant le jury d’assises.
Discussion des articles. Composition du jury (rejet des fonctionnaires publics
amovibles et des illettrés en cas de délit de presse ou de délit politique),
« épuration » par les députations provinciales ou les tribunaux (Dechamps, Ernst, Devaux,
de Behr, Verhaegen, Dechamps, de Behr, Ernst, Lebeau, Verhaegen,
Pollénus, Metz, Ernst,
de Behr, de Behr, Maertens, de Behr, Verhaegen, Ernst, Verhaegen, Ernst, de Behr, Metz, de
Behr, Ernst, Metz, Ernst, Raikem, Maertens,
de Behr, Verhaegen, Ernst, Verhaegen, Ernst,
Raikem), conditions d’admissibilité aux fonctions de
jurés (condition de cens) (Lebeau, Dumortier,
Ernst, Verhaegen, Lebeau, Dumortier, Ernst, Dechamps, Pollénus, Maertens, de Behr)
(Moniteur belge n°63, du 4 mars 1838 et Moniteur belge n°64, du 5 mars 1838)
(Présidence
de M. Raikem.)
M.
de Renesse procède à l’appel nominal à une heure et demie.
M.
Kervyn lit le procès-verbal de la dernière séance ; la
rédaction en est adoptée.
M.
de Renesse. présente l’analyse d’une pièce adressée à la
chambre.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Le
sieur Bonnard Ganssen, à Stabrock, demande le maintien de la loi du 22 décembre
1828 et l’abrogation de l’obligation de renouveler les titres après 30 ans. »
-
Renvoi à la commission chargée d’examiner le projet de loi relatif à
l’abrogation de la loi du 22 décembre 1828 sur les inscriptions hypothécaires.
MOTION D’ORDRE RELATIVE AU PETITIONNEMENT SUR LA
REFORME ELECTORALE
M. Scheyven
(pour une motion d’ordre.) - Il y a quinze jours que le rapport sur les pétitions
concernant la réforme électorale a été présenté ; il conviendrait de le
discuter ; mais comme tous nos collègues ne sont pas présents, je pense qu’il
faudrait aujourd’hui déterminer le jour où cette discussion aura lieu. Je
demanderai que ce soit vendredi prochain, jour consacré aux pétitions.
M.
Rogier. - Il a été décidé, dans la séance d’hier, que
cette discussion serait ajournée jusqu’après la délibération des lois mises à
l’ordre du jour.
M. Pollénus.
- Il est très vrai qu’à la séance d’hier M. Dumortier avait fait la proposition
de fixer la discussion du rapport sur la réforme électorale après les divers
projets qui déjà sont mis à l’ordre du jour.
Mais
l’auteur de cette proposition s’était lui-même aperçu que la proposition ne
pouvait lui faire atteindre le but qu’il avait en vue, puisqu’une mise à
l’ordre du jour à une époque non déterminée ne pouvait utilement avertir les
membres absents du jour où devrait avoir lieu cet important débat. Aussi M.
Dumortier a-t-il retiré sa proposition.
La
proposition de M. Scheyven indique au contraire un jour fixe, elle atteint
ainsi un but réel.
J’appuie
cette proposition qui d’ailleurs est conforme au règlement de la chambre, qui
assigne aux rapports des pétitions les séances du vendredi.
En
adoptant la proposition de M. Scheyven, on ne dérangera donc la discussion
d’aucun des projets qui maintenant sont à l’ordre du jour.
M. Rogier. - Il n’y a pas
urgence.
M. F. de Mérode. - Messieurs, il est des questions qui, après
avoir été soulevées, s’éclairent d’elles-mêmes après un certain temps ; je
pense que la question relative à la réforme électorale est de ce nombre, et
qu’elle a fait beaucoup de progrès depuis qu’elle a été agitée.
Si
on la discute on n’avancera guère les choses, et l’on perdra seulement un temps
précieux qui serait mieux employé à discuter des lois dont le pays a besoin.
M. Lebeau.
- Je n’irai pas aussi loin que l’honorable préopinant ; je ne demanderai pas un
ajournement indéfini. La question est grave, mais il n’y a pas d’urgence à la
résoudre. Dès qu’il n’y a pas d’urgence, je ne conçois pas l’empressement que
l’on met à agiter une question qui excitera des débats plus ou moins prolongés,
plus ou moins irritants. Si la chambre n’était pas en ce moment saisie de
projets de loi importants et urgents, je serais le premier à appuyer la demande
qui est faite ; mais nous avons mis à l’ordre du jour des projets d’une grande
urgence ; vous avez, par exemple, la loi sur les barrières, dont les baux
doivent être renouvelés au 1er avril. Dans cette loi il y a une innovation
importante, puisqu’on y propose des baux triennaux au lieu de baux annuels ;
cette proposition soulèvera probablement des difficultés et excitera peut-être
des scrupules constitutionnels. Vous avez encore d’autres lois urgentes. Ne
nous lions donc pas à l’avance et ne grossissons pas l’arriéré de projets
urgents par une discussion que l’urgence ne commande pas. Je demande que les
lois à l’ordre du jour soient d’abord discutées.
M. Pollénus. - L’honorable
préopinant semble croire que la proposition qui est faite aurait pour objet de
retarder la discussion de projets importants ; mais il n’en est rien. Le
vendredi est consacré aux pétitions, et l’on a demandé que ce jour soit employé
pour discuter le rapport sur les pétitions relatives à la réforme électorale ;
on ne dérange rien par cette demande. Les projets de loi sur les barrières et
sur d’autres matières ne souffriront aucun retard. Pourquoi voudrait-on
ajourner la discussion sur un objet auquel on paraît attacher de l’importance ?
Parmi les pétitions qui se rapportent à la réforme électorale, il en est qui
sont d’une date assez ancienne ; je ne vois pas pourquoi on ferait une
exception pour les pétitions concernant la réforme, puisqu’on se montre disposé
à expédier les pétitions en général ; il faut être conséquent et vouloir en finir
avec la question de la réforme.
M.
Lebeau. - Messieurs, il faut être franc, il faut
présenter les choses comme elles sont. Il ne s’agit pas de pétitions ordinaires
; il est évident qu’il s’agit de questions très importantes. Et ne croyez pas
que ce sera en une demi-heure qu’on aura discuté les conclusions de la
commission ; il faudra au moins trois ou quatre jours ; c’est une question des
plus irritantes.
Nous
avons à discuter plusieurs projets importants, urgents, qui donneront lieu à
des débats plus ou moins prolongés ; j’ai cité la loi sur les barrières ; vous
avez encore la loi sur l’école militaire, et la loi sur les ventes à l’encan.
Ne nous exposez pas à intervertir l’ordre dans lequel ces lois et la loi sur
les cafés doivent être examinées. Je le répète, il ne s’agit pas ici des
questions ordinaires que soulèvent les pétitions, il s’agit d’une question de
principes, d’une question de constitution, selon l’auteur du rapport lui-même.
On ne tranche pas des questions de cette nature comme un renvoi à un ministre
d’une demande de pension ou de paiement d’arrérages d’un traitement.
Je
demande l’ajournement de la décision de la mise à l’ordre du jour du rapport
jusqu’à après la discussion des lois qui sont actuellement à l’ordre du jour.
-
La proposition d’ajournement faite par M. Lebeau est mise aux voix et adoptée.
PRISE EN CONSIDERATION DE DEMANDES EN NATURALISATION
ORDINAIRE
M. le
président. - Il est ouvert un scrutin de liste sur les demandes
en naturalisation ordinaire qui ont été formées par les individus dont les noms
suivent :
Biston
(Charles-Xavier), arpenteur, à Namur.
Fery
(Jean-Fortuné-Maurice-François), employé au ministère de la guerre, à Ixelles.
Hans
(François-Bernard), employé de 2ème classe au ministère de la guerre, à
Bruxelles.
Grison
(Bartholomé), à Ostende.
Thisse
(Nicolas), serrurier, à Ethe (Luxembourg.)
Flispart
(Jean-François), marchand ambulant et propriétaire, à Ethe (Luxembourg.)
Almognier
(Etienne), apprenti typographe, à Verviers.
Holdener
(Jean-Baltazar), ancien militaire, à Louvain.
Stischeler
(Mathias), percepteur des barrières, à Pont-Pierre (Luxembourg.)
Saurel
(Bruno-Joseph), employé à la direction des contributions, à Gand.
Wunderlin
(Frédéric), à Hal.
Schwartz
(Nicolas-Joseph), régent de rhétorique au collège, à Diest.
Hemery
(Louis-Nicolas), cordonnier, à Bruxelles.
Cobb
(François-Riley), ancien militaire, à Anvers.
Breinen
(Louis-Charles), ancien militaire, à Anvers.
________________
Nombre
des votants, 58.
Majorité
absolue, 30.
M. le
président. - On me fait observer qu’il y a eu trois
bulletins blancs dans l’urne ; il s’agit de savoir si ces bulletins compteront
dans le nombre de suffrages. (Non ! non !)
M.
de Langhe. - La loi électorale dit positivement qu’un
billet blanc n’entre pas dans le compte du nombre des suffrages ; je pense donc
que les trois bulletins blancs doivent être considérés comme nuls.
M. Pollénus.
- Messieurs, avant de passer au scrutin, je crois avoir entendu dire autour de
moi, de la part d’un collègue qui avait oublié son bulletin, qu’en déposant un
billet blanc, il entendait voter contre toutes les naturalisations proposées.
Du reste, je ne vois pas que le scrutin actuel doive être comparé à une
élection ordinaire. Ici l’on présente une liste à chaque membre, laquelle
contient les noms des personnes qui demandent la naturalisation ; celui qui
donne un billet blanc ou efface tous les noms, fait la même chose.
M.
de Jaegher. - Messieurs, je ne puis pas partager l’opinion
de l’honorable préopinant, je crois que celui qui met dans l’urne un billet
blanc fait acte de doute, il n’a pas ses apaisements sur tous les noms des
pétitionnaires, et par conséquent il s’abstient. C’est dans ce sens que
j’aurais voté si j’étais venu un peu plus tôt à la séance ; je n’avais pas relu
les rapports qui ont été faits sur chacun des individus ; dès lors, je n’aurais
pas voulu émettre un vote positif, dans la crainte de me tromper ; je crois que
c’est en ce sens qu’on doit envisager les billets blancs.
M.
Dubus (aîné). - Il faudrait examiner si la question n’est
pas résolue par le texte d’une loi.
M. le
président. - Messieurs, voici la résolution qui a été
prise par la chambre le 1er mai 1837.
« Par
dérogation aux articles 4 et 5 règlement du 11 mai 1830, il sera, à l’avenir,
procédé à la prise en considération des demandes en naturalisation ordinaire
par scrutin de liste.
«
A cet effet, le bureau fera imprimer des listes, portant les prénoms, noms,
qualités et domicile des pétitionnaires, relativement auxquels la commission
aura fait son rapport. Les listes ne pourront contenir plus de 25 noms.
« Chaque
membre recevra à domicile une liste et effacera les noms des pétitionnaires
auxquels il veut refuser la naturalisation. Un secrétaire fera l’appel nominal
; les listes seront déposées dans une urne. Le bureau vérifiera le nombre des
votants, 4 bureaux et 4 scrutateurs tirés au sort dépouilleront le scrutin.
« Les
articles 4 et 5 du règlement du 11 mars 1836 continueront à être observés pour
les demandes en grande naturalisation. »
M.
Dubus (aîné). - Puisque ceux qui ont déposé un billet blanc
n’ont pas voté conformément à cette disposition, on doit considérer leur
bulletin comme nul. (Adhésion.)
-
La chambre consultée, décide que les trois billets blancs qui ont été déposés
dans l’urne sont nuls ; en conséquence le nombre des votants est réduit à 55,
et la majorité absolue n’est plus que de 28.
M.
Biston a obtenu 49 suffrages.
M. Fery, 32.
M. Hans, 32.
M. Grison, 31.
M. Thisse, 35.
M. Flispart, 30.
M. Allognier, 33.
M. Holdener, 40.
M. Stischeler, 35.
M. Saurel, 32.
M. Wunderlin, 34.
M. Schwartz, 29.
M. Hemery, 32.
M. Cobb, 43.
M.
Breinen, 42.
-
Tous les pétitionnaires ayant obtenu la majorité absolue, leur demande en naturalisation
ordinaire est prise en considération.
M. le
président. - S’il n’y a pas d’opposition nous allons
passer à l’objet de l’ordre du jour.
M.
Lebeau. - Je dois rappeler qu’il y a déjà près d’un an
que la chambre a pris en considération plusieurs autres demandes en
naturalisation et que le sénat les a également prises en considération ; je
demanderai donc qu’on s’occupe également de la décision définitive à prendre
sur ces demandes.
M.
Simons. - Il y a également des demandes en grande
naturalisation sur lesquelles il faut statuer. Depuis qu’il existe un règlement
qui autorise la chambre à voter par scrutins de liste sur les demandes en
naturalisation ordinaire, la chambre ne s’est occupée d’aucune demande en
grande naturalisation. Je demande que les demandes en grande naturalisation
soient également mise à l’ordre du jour.
PROJET DE LOI ORGANISANT LE JURY D’ASSISES
Discussion des articles
Article additionnel
(Moniteur belge n°64, du 5 mars 1838) M. le président. - La chambre, dans une séance
précédente, a décidé que l’amendement de
M. Verhaegen ne serait pas renvoyé à la section centrale ; veut-on maintenant s’occuper
du fond de cet amendement. (Assentiment.)
Il
est ainsi conçu :
« Dans
les affaires politiques ou de la presse, ne feront pas partie du jury les
fonctionnaires amovibles et les jurés qui ne savent pas lire. »
-
Personne ne demandant la parole et la division étant demandée, la proposition
est d’abord mise aux voix, en ce qui concerne les fonctionnaires publics ;
cette partie de l’amendement n’est pas adoptée
L’autre
partie de la proposition est ensuite mise aux voix ; elle n’est pas adoptée.
Article premier
M. le
président. Nous passerons maintenant à l’article premier,
proposé par M. le ministre de la justice et dont la section centrale propose
l’adoption.
M.
Dechamps. - Il me paraît, messieurs, qu’il serait plus
rationnel de discuter d’abord ce qui concerne l’épuration des listes, car
évidemment la question du cens perdra beaucoup de son importance si la chambre
adopte soit les propositions de M. le ministre, soit celles de la section centrale
relativement à l’épuration. (Assentiment).
M. le
président. - Voici la proposition de M. le ministre de la
justice :
« Dans
la première quinzaine du mois de décembre, et pour le service des assises de
l’année suivante, la députation permanente des états de la province réduira la
liste générale des jurés au nombre de :
« 700
pour la Flandre orientale,
« 600
pour le Brabant,
« 500
pour les provinces d’Anvers, de Liége, de la Flandre occidentale et de
Limbourg,
« 400
pour les provinces de Hainaut, Namur et Luxembourg.
« Dans
la liste ainsi réduite, le président du tribunal de première instance fera le
tirage au sort, conformément aux dispositions en vigueur.
« Les
citoyens qui ont fait partie d’un jury, seront dispensés d’office de siéger
pendant la même année, et ne seront plus portés sur la liste de l’année
suivante. »
Voici
les propositions de la section centrale :
«
Art. 2. En exécution de l’article précédent, la députation du conseil
provincial dressera une liste générale pour chaque arrondissement judiciaire de
la province, et transmettra cette liste au président du tribunal avant le 30
septembre de chaque année.
« Art.
3. Le président du tribunal, assisté des deux membres les plus anciens dans
l’ordre du tableau, formera une liste de la moitié des noms portés sur la liste
générale, et adressera cette liste, avant le 1er novembre, au premier président
de la cour d’appel.
« Art.
4. Le premier président et les deux présidents de chambre les plus anciens
réduiront à la moitié chacune des listes envoyées par les présidents des
tribunaux respectifs du ressort de la cour.
« Les
listes ainsi réduites des arrondissements de la même province seront réunies en
une seule liste pour le service du jury de l’année suivante.
« Art.
5. Les opérations prescrites par les deux articles précédents auront lieu dans
la chambre du conseil, après avoir entendu le ministère public. Il sera fait
mention du nom de l’officier qui en fera les fonctions, et chaque liste sera
signée par les présidents et juges qui auront concouru à sa formation, ainsi
que par le greffier ; en cas d’empêchement des présidents ou jurés, ils seront
remplacés d’après le rang d’ancienneté dans l’ordre des nominations.
« Art.
6. Avant le 1er décembre la liste pour le service du jury sera transmise par le
premier président au président du tribunal du lieu où siégera la cour d’assises
; il sera tiré au sort trente noms pour chaque session ou série, conformément
aux dispositions en vigueur.
« Art. 7. Le nombre de 30 jurés fixé par
l’article 395 du code d’instruction est réduit à 24.
«
Art. 8. Ceux qui auront fait partie des trente jurés et qui auront satisfait
aux réquisitions prescrites par l’article 391 du code d’instruction criminelle,
ne seront pas portés sur les listes des autres sessions de l’année, ni sur les
listes de l’année suivante.
« Art.
9. A chacune des trois dernières sessions, les membres de la cour d’appel
ci-dessus désignés compléteront la liste qui a servi au tirage au sort de la
session précédente, par un nombre de citoyens égal à celui des jurés dispensés
aux termes de l’article précédent.
« Ces
citoyens seront pris dans les listes transmises par les présidents des
tribunaux de première instance. »
M.
le ministre se rallie-t-il à ces propositions ?
M. le ministre de la justice (M. Ernst).
- Je suis très disposé à accueillir les propositions de la section centrale ;
cependant je prierai la chambre de me permettre de ne me prononcer
définitivement que lorsque j’aurai entendu la discussion. Comme la section
centrale, je ne désire qu’une chose, c’est de bien composer le jury ;
l’essentiel, c’est de l’améliorer, c’est de réconcilier cette institution avec
l’opinion publique.
M. Devaux. - Messieurs, je demanderai
une explication sur la préférence qu’on accorde aux tribunaux. M. le ministre
de la justice avait proposé de faire réduire les listes des jurés par les
députations provinciales : la section centrale propose maintenant de conférer
ce droit aux tribunaux qui procéderont à la composition des listes en présence
d’un officier du parquet ; on ne peut se dissimuler, messieurs, que, de même
que l’avocat est toujours naturellement porté à faire tout ce qui peut être
favorable à l’accusé, le procureur du Roi est naturellement dans des
dispositions contraires ; je ne sais pas si, pour cette raison, il ne vaudrait
pas mieux de faire composer les listes des jurés par une autorité comme la
députation provinciale qui, n’intervenant pas dans les affaires judiciaires, se
trouve toujours dans des dispositions d’esprit plus impartiales. Je soumets ces
observations à M. le rapporteur de la section centrale.
M. de Behr, rapporteur.
- Il me paraît, messieurs, qu’il convient de confier la rédaction des listes
des jurés plutôt aux tribunaux qu’aux députations provinciales. On craint
l’influence du ministère public, mais je ferai remarquer à la chambre que cette
influence ne sera pas très grande, car le ministère public n’aura, en
définitive, qu’un avis à donner ; il sera entendu, et les raisons qu’il donnera
seront appréciées par les juges qui procéderont à la confection des listes,
mais il n’interviendra en aucune manière dans le jugement.
Si
vous attribuiez, messieurs, aux députations provinciales le soin d’épurer les
listes des jurés, vous mettriez ces corps dans de grands embarras ; ils
pourraient être sollicités de divers côtés, et comme ils ont des ménagements à
garder, puisque les membres de ces corps songent nécessairement à leur réélection,
il pourrait résulter des inconvénients d’une disposition qui leur conférerait
le droit de composer les listes des jurés.
Je
crois, messieurs, que le système proposé par la section centrale présente
toutes les garanties ; nous faisons intervenir non seulement le tribunal de
première instance, mais encore la cour d’appel ; nous faisons également
intervenir la députation provinciale, qui forme la première liste, la liste
générale dont les tribunaux ne peuvent pas sortir, dans laquelle ils ne peuvent
que faire un triage.
M. Verhaegen.
- Messieurs, lorsque j’ai eu l’honneur de vous faire, il y a deux jours, une
proposition qui n’a pas été accueillie, j’avais précisément en vue ce qui
arrive maintenant ; si les affaires marchent comme tout annonce qu’elles
marcheront, les procès de presse auront le résultat que l’on voudra qu’ils
aient : quand les tribunaux procéderont à l’épuration de la liste des jurés, le
ministère public donnera des avis, il donnera des renseignements ; ce sont ces
avis, ces renseignements que nous nous devons récuser ; le ministère public qui
préside à l’instruction doit rester en dehors de la composition du jury.
L’autorité qui avait été indiquée d’abord, la députation des états, présente
des garanties que je ne trouve pas dans le mode proposé par la section
centrale, et si (ce que je n’admets pas) le système de confier la rédaction des
listes aux députations provinciales pouvait offrir des inconvénients en raison
de l’intérêt que les membres de ces députations auraient à se rendre agréables
à telles ou telles personnes qui seraient à même de favoriser leur réélection,
ces inconvénients seraient beaucoup moins graves que l’inconvénient de faire
intervenir le ministère public dans l’épuration du jury. Puisqu’il faut subir
les conséquences de cet état de choses, je donnerai mon assentiment à la
proposition de M. Devaux, mais je ne pourrai pas le donner à celle de la
section centrale.
M. Dechamps. - Messieurs, je
n’ajouterai que quelques considérations à celles déjà présentées par M. Devaux
. Il est très possible que les résultats pratiques du système de la section
centrale soient aussi bons que ceux que pourrait produire l’amendement du
ministre. Mais il est une considération que nous ne devons pas perdre de vue.
C’est que le système d’épuration faite par les tribunaux me paraît opposé au
principe de l’institution du jury.
Quelle
est l’idée qui a présidé à l’établissement du jury ? C’est la représentation du
pays, le jugement par les pairs, le jugement par la nation même. Le jury a été
institué en méfiance de l’influence du gouvernement, en méfiance des juges
permanents. Que cette idée soit bonne ou mauvaise, c’est ce que je n’examine
pas. Mais c’est l’idée fondamentale qui se trouve à la base du jury. Il est
plus rationnel de faire intervenir dans l’épuration des listes la députation
permanente du conseil provincial qui est un corps électif, que de faire
intervenir les juges des tribunaux en méfiance desquels le jury a été institué.
M. de
Behr, rapporteur. - L’honorable M. Verhaegen craint l’influence
du ministère public dans les délits de la presse et les délits politiques. Mais
il a perdu de vue que la liste doit être faite pour toute l’année et au plus
tard dans le mois de décembre précédent. Il est impossible de prévoir s’il
surviendra des affaires politiques ou non dans le courant de l’année. Si nous
avons demandé que le ministère public fût entendu, c’est une simple garantie de
plus que nous avons voulu avoir, mais cela n’est pas essentiel au système de
l’intervention des tribunaux dans l’épuration. Si les craintes de l’honorable
membre étaient fondées, ce qu’il y aurait à faire, ce serait de supprimer cette
disposition qui veut que le ministère public donne un avis. Cela ne tient pas
au système que nous proposons.
Un autre honorable membre a dit que le jury
avait été institué en méfiance des juges des cours d’assises. Je ferai observer
qu’alors les juges étaient amovibles. Aujourd’hui ils sont inamovibles. L’honorable
M. Verhaegen nous a fait sentir que l’homme innocent avait intérêt à être jugé
par des hommes habitués à apprécier les faits et les rapports qu’ils ont entre
eux. Si les juges méritent assez de confiance pour qu’on leur abandonne le soin
de prononcer sur une accusation capitale, à plus forte raison peut-on s’en
rapporter à eux pour former des listes, qui ne sont après tout que les listes
générales réduites au quart. Nous avons dit que ces listes comprendraient au
moins 250 citoyens. C’est donc dans ces 250 noms qu’on tirera au sort les 30 ou
36 jurés. Les personnes qui procèdent au tirage ne figureront jamais dans les
cours d’assises, car ce sont le premier président et les deux présidents de
chambre.
M. le ministre
de la justice (M. Ernst). - Messieurs, à
entendre l’honorable préopinant, il paraîtrait que la disposition qui vous est
soumise est une atteinte portée à l’institution du jury. Je crois devoir faire
remarquer que dans tous les pays où cette institution existe, l’autorité
publique désigne un certain nombre de personnes parmi lesquelles les jurés sont
tirés au sort. En France, la liste est formée par une autorité qui donne moins
de garantie que celle à laquelle nous proposons de conférer ce soin ; en
Angleterre, c’est le schérif qui fait choix de 40 à 70 personnes parmi
lesquelles le sort désigne les jurés. Nous confions le
choix à la volonté libre de magistrats indépendants. Si quelqu’un doit
applaudir à cette innovation, c’est l’honorable M. Verhaegen, qui a reconnu les
vices que présente l’institution du jury et déclaré qu’il adopterait toutes les
améliorations qu’on proposerait. Cet honorable membre a la plus grande
confiance dans notre magistrature, et sa confiance est bien placée ; je lui
ferai observer que la plupart des magistrats qui interviendront dans
l’épuration des listes ne sont pas à la nomination directe du gouvernement. Les
premiers présidents et les présidents de chambre sont élus par les corps
judiciaires, et les présidents et vice-présidents des tribunaux sont choisis
dans des listes de candidats présentées par les députations permanentes et les
cours. Je regarde l’élection des jurés par des magistrats indépendants comme
une mesure très libérale, comme le complément nécessaire de l’institution du
jury. Quant à l’intervention du ministère public, elle est tout officieuse. Les
juges ne restent pas moins libres dans leur choix. Il peut en résulter un bien
et jamais de mal. Ce sont des lumières de plus qu’on réunit, et la liberté des
magistrats reste la même.
M. Lebeau.
- J’avais cru entendre contester la proposition principale ; mais les critiques
de l’honorable M. Verhaegen ne s’appliquent qu’à la manière dont on veut
organiser la faculté épuratoire, si je puis m’exprimer ainsi. Je me proposais
de prouver que cette faculté d’épurer la liste a toujours existé depuis que le
jury a été introduit dans notre pays jusqu’au moment où fut porté le décret de
1831. Il en a été de même en France lorsqu’on y a organisé le jury ; à
l’imitation de ce qui se fait en Angleterre, le code de 1791 conférait au
directoire de chaque département la faculté de réduite, et de réduire bien
autrement que nous ne le proposons, la liste des jurés. Le code de brumaire an
IV, contre lequel je n’ai jamais entendu qu’on se soit élevé, donnait également
à l’autorité administrative le droit de faire des éliminations. Je n’examinerai
pas la question de savoir s’il faut donner la préférence à l’autorité
judiciaire ou à telle autre autorité, cela me paraît de peu d’importance. C’est
le principe d’épuration qu’il faut voir. Il n’est pas contesté ; d’après cela,
je ne crois pas devoir conserver la parole plus longtemps.
M.
Verhaegen. - M. le ministre de la justice et M. le rapporteur
m’ont mal compris ; ils ont cru voir une contradiction entre ce que j’ai dit
aujourd’hui et les paroles que j’ai prononcées dans le commencement de la
discussion de la loi sur le jury.
J’ai
dit alors toute ma pensée sur l’institution du jury. Depuis, mon opinion n’a
pas changé. Aujourd’hui les tribunaux de première instance et les cours d’appel
m’inspirent autant de confiance qu’alors. Aussi ce n’est pas sous ce point de
vue que je combats la proposition de la section centrale. Je la combats surtout
à raison de l’intervention du ministère public. Si les auteurs du projet
voulaient retrancher la disposition qui concerne le ministère public, peut-être
je me rallierais à leur projet. Mais ce projet forme un ensemble ; et de la
manière dont les membres de la section centrale se sont expliqués,
l’intervention du ministère public est indispensable. Ce sera lui qui donnera
les renseignements. Il sera entendu en chambre du conseil. Cela présente de
grands inconvénients. A la fin d’une année, dit-on, on ne saura pas si dans le
cours de l’année suivante il se présentera telle affaire plutôt que telle
autre. Mais quand ce ne serait que pour une affaire ou deux qui devraient avoir
lieu, après l’époque de l’épuration, ne serait-ce pas un inconvénient assez
grave pour qu’on en tînt compte ? L’épuration se fait aujourd’hui ; dans huit
jours une affaire politique ou de presse doit avoir lieu. Et le ministère
public interviendra dans cette opération d’épuration ! Cela est impossible. Il
a dirigé l’accusation, il doit tenir à ce que l’accusation produise ses effets
de la manière dont on entend les fonctions du ministère public, et dont elles
ne devraient pas l’être.
Je ne crois pas être en contradiction avec
moi-même. Ce que j’ai dit, je le maintiens. Les inconvénients que j’ai signalés
subsistent dans toute leur force. Je demande aux auteurs du projet s’ils
veulent maintenir l’intervention du ministère public ; dans ce cas, je voterai
contre l’ensemble ; s’ils la retranchent, je me réserve mon vote.
M.
Pollénus. - On combat le projet de la section centrale,
parce que l’on croit que la faculté donnée au ministère public d’émettre un
avis sur les listes pourrait exercer une influence pernicieuse. Ces honorables
membres ne trouveraient aucune objection à faire si une faculté semblable était
confiée à un autre ordre de fonctionnaires, était attribuée à un agent du
gouvernement d’un plus haut rang. Car ils semblent incliner pour faire conférer
cette faculté à la députation permanente des états, et vous savez que les
députations des états sont présidées par les gouverneurs de province. Or, il y
a une différence immense entre l’influence d’un gouverneur et celle d’un membre
du ministère public. L’honorable rapporteur de la section centrale vous a dit que
ces membres du ministère public qui, d’après l’avis d’un honorable préopinant,
ne semblent pas assez pénétrés du but de leur mission, ont cependant, dans bien
des causes qui intéressaient le gouvernement, fait preuve d’une honorable
indépendance. Et lorsque vous avez entendu ce témoignage, donné par l’honorable
rapporteur de la section centrale, juge bien compétent par la position qu’il
occupe en dehors de la chambre, je crois que l’on peut en confiance s’en
rapporter aux réflexions qu’il a présentées et qui répondent aux soupçons que
l’on a articulés contre une classe de fonctionnaires qui, ainsi que l’a dit
l’honorable rapporteur, donnent journellement des preuves d’indépendance et de
sincérité dans les affaires où ils sont appelés à émettre leur avis.
Si
vous écartez le système de la section centrale, pour admettre l’intervention de
la députation provinciale, ne tomberez-vous pas dans l’inconvénient que vous
voulez éviter ? La députation est présidée par les gouverneurs de province,
agents essentiellement politiques ; oh ! je conçois que l’on puisse redouter
l’influence des gouverneurs, quoique à tort parfois ; mais les procureurs du
Roi, c’est vraiment sans motifs qu’on craint leur influence sur des corps
inamovibles et indépendants.
Ainsi
qu’on l’a déjà dit, la présence du ministère public ne tient d’ailleurs pas au
système proposé. La section centrale y renoncerait si on y faisait voir
quelques inconvénients. Mais la section centrale n’y a trouvé aucun
inconvénient, et elle y a vu beaucoup d’avantages. En effet, dans les causes à
l’audience, le ministère public est entendu pour éclairer la conscience du juge
et veiller à l’exécution de la loi.
Comment
peut-on redouter son influence en présence des nombreux acquittements dont on
s’est plaint de toutes parts ? Pour être conséquent, l’on devrait plutôt
soutenir que le ministère public n’a pas assez d’influence, et je crois
qu’alors on serait plus près de la vérité ; du reste, c’est là un point que je
puis me dispenser de traiter ici. J’en fais seulement la remarque pour
démontrer que les adversaires de la section centrale ne sont pas conséquents en
attaquant nos propositions.
Quant
à moi, je crois que les membres du ministère public qui se laisseraient
emporter par la passion d’accuser au-delà des justes bornes, cesseraient, par
là même, d’être redoutables, car l’exagération en toutes choses est le plus
grand obstacle à l’influence ; la droiture et l’amour de la vérité peuvent
seuls lui concilier l’influence, et avec ces conditions l’influence n’est pas à
craindre.
Messieurs,
nous vous proposons la présence d’un membre du ministère public à l’épuration
des listes des jurés, parce que nous avons cru qu’en raison de la nature de
leurs fonctions et de leurs relations avec les fonctionnaires des différents
ordres, ces magistrats sont les plus à même d’indiquer les individus qu’il peut
être utile de comprendre dans la liste du jury. Ne perdez d’ailleurs pas vue
que l’influence de ces magistrats sera nulle relativement aux causes soumises
au jury, qui pourront intéresser le gouvernement, puisque la liste sera formés
longtemps d’avance et pour une année ; toutes combinaisons, contraires à
l’intérêt d’une bonne justice, sont par là même rendues impossibles.
Je
crois donc que la section centrale peut avec confiance persister dans la
proposition qu’elle vous a faite et qui d’ailleurs est d’accord avec nos
institutions, qui appellent l’intervention du ministère public dans tous les
actes judiciaires qui intéressent l’administration de la justice.
-
L’article 2 est mis aux voix et adopté.
La
chambre passe à l’article 3 ainsi conçu :
« Art.
3. Le président du tribunal, assisté des deux membres les plus anciens dans
l’ordre du tableau, formera une liste de la moitié des noms portés sur la liste
générale, et adressera cette liste, avant le 1er novembre, au premier président
de la cour d’appel. »
M. Metz.
- J’avais entendu dire dans une précédente séance qu’on se proposait d’épurer
le jury, comme, par exemple, de faire sortir de son sein quelques individus mal
famés, exerçant des professions qu’on ne peut nommer et ainsi de suite. Mais,
par le système proposé, on veut réduire le jury, non de quelques individus,
mais au quart de ce que le jury devait être en effet. Je ne vois pas la
nécessité d’une réduction si considérable. J’aurais voulu savoir pourquoi la
section centrale réduit ainsi au quart la liste des jurés.
Le mode de cette réduction me déplaît aussi. On
réduit d’abord nécessairement la liste de moitié ; cette liste réduite est
envoyée au président de la cour d’appel, et elle est encore réduite de moitié.
Dans
ma province ce système peut avoir un inconvénient fort grave. Au moyen de ces
réductions on éliminera du jury tous les habitants des arrondissements
allemands qui ne parlent pas la langue française, et la charge du jury
retombera sur les arrondissements wallons.
Je
voudrais que la section centrale donnât de bonnes raisons pour réduire à 250 le
nombre des jurés, contrairement à la pensée de M. le ministre de la justice qui
voulait seulement écarter du jury quelques individus, incapables de remplir la
haute mission qui leur est confiée.
M. le
ministre de la justice (M. Ernst). - Je prie
l’honorable préopinant de faire attention que la section centrale a atteint le
but que je m’étais proposé dans mon amendement, et qu’elle a même fait beaucoup
mieux.
M. Metz.
- Je ne suis pas de cet avis.
M. le ministre de la justice (M. Ernst).
- L’honorable préopinant sera peut-être de mon avis s’il veut bien m’accorder
au moment d’attention.
J’avais
proposé de doubler le chiffre des jurés qui seraient reconnus nécessaires. La
section centrale propose de réduire la liste des jurés à un quart. Ce sera
presque le double du nombre nécessaire. Ensuite la section centrale fait ce que
je ne faisais pas : elle propose qu’après la sortie de l’urne de la série de
noms des jurés nécessaires pour le service d’une session, on remette dans
l’urne un nombre de noms égal au nombre de noms sortis. Dans son système cette
opération doit être faite trois fois dans l’année. Il résulte de là qu’il y
aura autant de choix pour la dernière session que pour la première ; je n’avais
pas trouvé ce moyen dans ma proposition.
Je
suis convaincu que le système de la section centrale présente toutes les
garanties désirables pour la bonne composition du jury et qu’elle assurera
particulièrement un meilleur jury dans la province du Luxembourg, car les
tribunaux connaissant les personnes qui sont le mieux à même de remplir
convenablement les fonctions de juré, écarteront celles qui n’ont pas
l’aptitude nécessaire.
M. de
Behr, rapporteur. - Il n’y a aucun inconvénient à réduire le nombre
des jurés au quart. Leur nombre sera encore dans les plus petites provinces de
250 au moins. Certes il y a là assez de latitude pour trouver pour chaque
session du jury 30 jurés, ou 36 si la chambre veut adopter ce chiffre.
Nous
avons également satisfait au vœu exprimé de ne pas forcer les jurés à siéger
deux années de suite. Nous avons dû pour cela ne pas porter sur la liste d’une
année un nombre trop considérable de jurés, afin qu’il restât un nombre
suffisant de personnes pour composer le jury de l’année suivante.
Il
faut supposer la moitié des personnes incapables. Assurément, ce n’est pas
trop, sur deux personnes, d’en supposer une incapable ; c’est pour cela que
nous avons admis la réduction des listes. C’est ce qui se pratique également en
France. D’après la loi du 2 mai 1837 qui est encore en vigueur, et dont les
bons effets sont appréciés, les listes sont également réduites au quart, et ce
quart ne peut jamais excéder le nombre de 300. Sous ce rapport, en France on va
plus loin que nous ; si donc le quart est de 400 jurés, le nombre est réduit à
300. Il en est ainsi dans tous les départements, celui de la Seine excepté, où,
en raison du grand nombre des affaires, le nombre des jurés est de 1,500.
-
L’art. 3 est mis aux voix et adopté.
« Art.
4. Le premier président et les deux présidents de chambre les plus anciens
réduiront à la moitié chacune des listes envoyées par les présidents des
tribunaux respectifs du ressort de la cour.
«
Les listes ainsi réduites des arrondissements de la même province seront
réunies en une seule liste pour le service du jury de l’année suivante. »
M. de Behr, rapporteur.
- Le motif qui a engagé la section centrale à proposer de réunir en une seule
liste toutes les listes d’arrondissement, ç’a été d’appeler à remplir les
fonctions de juré les habitants de toutes les parties de chaque province. En
France, le choix se fait arbitrairement. On peut prendre les jurés dans une
seule partie d’un département et exclure toutes les autres parties ; dans notre
système, cela ne peut pas arriver. Il faut réduire toutes les listes
d’arrondissement de moitié, et quand cette réduction a été faite, prendre la
moitié de toutes les listes et en former une seule, de sorte qu’on est sûr que le
jury représente toute la province. Voilà l’avantage que nous avons tiré de ce
mode.
M. Maertens. - Il me semble
qu’il serait préférable de donner le droit de réduire définitivement la liste
des jurés au président et à deux juges du tribunal du chef-lieu de la province,
où siège la cour d’assises. Dans les Flandres il y a deux provinces qui
dépendent de la même cour d’appel. D’après le projet, c’est au premier
président et à deux présidents de chambre qu’il appartient de réduire
définitivement les listes. Ce premier président et ces présidents de chambre ne
connaissent nullement les jurés de la Flandre occidentale ; il vaudrait donc
mieux que pour cette province le droit de désigner les jurés appartînt au
président du tribunal de Bruges assisté du vice-président et du plus ancien
juge. De même les membres du ministère public de cette localité seraient plus à
même de fournir des renseignements sur les personnes aptes à être jurés. Je
soumets cette réflexion à M. le ministre de la justice et à la section
centrale.
M. de
Behr, rapporteur. - Je ne comprends pas bien l’observation de
l’honorable membre. La chambre a déjà adopté une disposition d’après laquelle tous
les présidents de première instance réduisent de moitié la liste des jurés.
L’honorable membre voudrait qu’ils procédassent en outre à la rédaction
définitive de la liste, il faudrait donc une double opération. Car il
commencerait par réduire la liste de moitié ; puis il se déjugerait lui-même
par une seconde opération en arrêtant de nouveau une liste qu’il avait déjà
arrêtée.
Nous
avons voulu faire intervenir les magistrats qui ne font pas partie des cours
d’assises ; on dit qu’ils n’auront pas les renseignements nécessaires ; mais
ils se les procureront ; ils s’adresseront aux présidents de première instance,
aux juges de paix. D’ailleurs, je ne vois pas pourquoi on ferait exception pour
une seule province.
-
L’article 4 est mis aux voix et adopté.
« Art.
5. Les opérations prescrites par les deux articles précédents auront lieu dans
la chambre du conseil, après avoir entendu le ministère public. Il sera fait
mention du nom de l’officier qui en fera les fonctions, et chaque liste sera
signée par les présidents et juges qui auront concouru à sa formation, ainsi
que par le greffier ; en cas d’empêchement des présidents ou jurés, ils seront
remplacés d’après le rang d’ancienneté dans l’ordre des nominations. »
M. Verhaegen. - Je demande la
division de cet article, car il y a là des dispositions complexes.
Pour
ce qui est de l’intervention du ministère, j’ai déjà fait une observation
restée sans réponse, mais j’en ferai valoir une autre.
Le
ministère public est un et indivisible ; ainsi un officier du ministère public
interviendra ici pour dresser la liste, et lors du jugement, un autre officier
du ministère public fera des récusations ; c’est-à-dire que le ministère public
interviendra deux fois pour faire des récusations, la première d’une manière
indirecte, la seconde d’une manière directe ; l’accusé ne jouissant pas des
mêmes prérogatives, l’équilibre sera rompu. L’officier du ministère public qui
présentera des observations en chambre du conseil sera plus ou moins écouté du
président et des juges ; ce sera évidemment une récusation indirecte qu’il
exercera ; l’accusé ne sera pas mis sur la même ligne. Le nombre des jurés
étant réduit à 24, vous ne donnerez que 6 récusations à l’accusé ; le ministère
public aura ces 6 récusations indépendamment de celles qu’il aura déjà
obtenues. La position des officiers du ministère public est telle que, devant
soutenir l’accusation, ils sont naturellement portés à désirer une
condamnation, et ils agissent toujours en conséquence. L’accusé va se trouver
dans une plus mauvaise situation que sous les lois actuelles.
M. le ministre de la justice (M.
Ernst). - Je ne veux pas m’opposer à ma division,
puisqu’elle est de droit ; mais je combattrai la demande de retrancher la
disposition qui concerne le ministère public.
La
participation du ministère public ne peut être assimilée à une récusation ; car
il faudrait pour cela considérer les juges comme suivant une autre impulsion
que celle de leur conscience, ce qui n’est pas admissible. Le magistrat du
parquet donnera des renseignements ; et ces renseignements sont précieux. Si le
magistrat est un homme calme, intègre, il aura de l’influence, et il ne devra
son influence qu’à son caractère honorable ; si c’est un homme passionné,
injuste, il inspirera de la défiance ; et il suffirait qu’il voulût écarter un
juré sans motifs plausibles pour qu’on le maintînt sur la liste. Son devoir est
de rechercher des hommes recommandables par leur probité, par leur capacité, et
qui méritent l’estime de leurs concitoyens. Pourquoi se priver de
l’intervention du ministère public ? Je ne pense pas que l’on puisse retrancher
une disposition qui offre un moyen de perfectionner les listes.
M. Verhaegen. - Je puis répéter
ici ce que j’ai déjà dit, c’est que le ministre de la justice gagne du terrain
tous les jours. Il veut maintenant faire intervenir le ministère public. Quand
j’ai développé ma proposition, s’il j’avais connu cette prétention-là, j’en aurais
tiré un parti avantageux.
L’intervention
du ministère public est dangereuse ; et, quoi qu’on en dise, le ministère
public à raison de sa position, et tout en agissant conformément à ses
convictions, s’il est induit en erreur, il la poursuivra. Je n’entends pas
faire injure aux officiers du parquet, mais les hommes sont construits de cette
manière que quand ils se sont mis
quelque chose en tête, ils poursuivent leurs idées. Vous faites intervenir le
ministère public ; il ne manque plus que d’y faire intervenir le juge
instructeur ; encore n’en est-il pas exclus ; ainsi vous aurez et l’influence
du ministère public et celle du juge instructeur dans la formation des listes.
M. le ministre de la justice (M. Ernst).
- C’est une récusation indirecte, dit l’honorable préopinant ; non, messieurs,
l’opinion de l’officier du parquet n’aura de valeur que pour autant qu’elle
soit appuyée sur de bonnes raisons ; les magistrats apprécieront ces raisons,
et jugeront d’après leur conviction personnelle et non suivant la volonté du
ministère public. Je le répète, il n’est pas question de récusation, ni
directe, ni indirecte, mais d’une intervention utile dans l’intérêt de la
vérité et de la justice.
M. de
Behr, rapporteur. - On craint ici l’influence du ministère
public, tandis qu’on ne la redoute pas dans d’autres circonstances ; cependant
les magistrats ne sont dans aucun cas les instruments de la volonté et des
passions du ministère public. On parle du juge instructeur ; mais il ne peut
perdre sa qualité de juge. Quoiqu’il ait renvoyé un prévenu devant la police
correctionnelle, il ne siège pas moins pour juger ce prévenu ; et si les débats
lui relèvent de nouveaux faits, il peut se former une opinion différente de celle
qu’il avait.
-
L’article 5 mis aux voix est adopté dans toutes ses parties.
Articles 6 à 8 (nouveaux)
Les
articles 6 à 8 sont successivement mis aux voix et adoptés sans discussion.
« Art. 9. A chacune des trois dernières sessions,
les membres de la cour d’appel ci-dessus désignés compléteront la liste qui a
servi au tirage au sort de la session précédente, par un nombre de citoyens
égal à celui des jurés dispensés aux termes de l’article précédent.
« Ces
citoyens seront pris dans les listes transmises par les présidents des
tribunaux de première instance. »
M. Metz. - Je désirerais savoir, messieurs, si dans le
deuxième paragraphe de cet article, la section centrale a entendu dire que ces
citoyens seront pris au sort ou au choix : s’ils doivent être pris au choix, je
ne pourrais pas donner mon assentiment à la disposition, car tout autant
vaudrait de dire que les cours formeront le jury comme bon leur semblera. Vous
savez, messieurs, que de la liste des jurés réduite à 250 il en sortira 30 à
chaque session, de manière qu’après trois sessions les membres de la cour
d’appel auront 90 jurés de leur choix sur une liste totale de 250 ; ce serait
là donner aux cours d’appel un droit exorbitant, et qui, dans certains procès,
pourrait devenir très dangereux. Je propose donc de dire : Ces citoyens seront
pris au sort dans les listes, etc. »
-
L’amendement de M. Metz est appuyé.
M. de Behr, rapporteur. - Je ne vois pas, messieurs,
quel inconvénient il pourrait y avoir à laisser aux cours d’appel le choix des
30 jurés qui doivent composer les listes ; ce choix n’est pas absolu puisque
les jurés dont il s’agit doivent être pris dans la liste formée par les
tribunaux de première instance ; il me paraît que c’est là une garantie
suffisante. Si vous vouliez que les jurés qui seront appelés à compléter les
listes fussent tirés au sort, vous tomberiez, messieurs, dans l’inconvénient de
donner une trop grande influence au hasard, dans la composition du jury.
Ensuite,
messieurs, les listes ne seront pas de 250 jurés seulement, il n’y a qu’une
seule province où elles seront réduites à ce nombre ; mais dans toutes les
autres provinces les listes seront beaucoup plus nombreuses. D’ailleurs, quel
inconvénient y a-t-il à introduire dans la liste 90 jurés qui doivent
nécessairement être pris dans la liste dressée par le tribunal de première
instance ? Ce sera toujours le sort qui désignera les 24 membres du jury.
Je
crois donc, messieurs, que le seul moyen de réhabiliter le jury dans l’opinion
publique, c’est d’adopter les propositions de la section centrale.
M. le ministre de la justice (M. Ernst).
- J’ajouterai, messieurs, aux observations de l’honorable préopinant que
lorsqu’on voit tant d’inconvénients laisser aux premiers magistrats de l’ordre
judiciaire le soin de prendre 30 noms dans une urne pour les joindre a 220
autres noms, on perd de vue ce qui se passe en Angleterre, qui est la terre
classique de la liberté, qui est le berceau du jury. Là, messieurs, le schérif
choisit 48 citoyens où bon lui semble, et le sort en fait sortir 12 ; en
France, où l’on reconnaît aussi tant d’indépendance au jury, le choix se fait
par un magistrat dépendant du gouvernement. Ici des magistrats indépendants ne
font que prendre un petit nombre de jurés dans une liste, dont ils ne peuvent
sortir. On exagère évidemment les inconvénients qu’on attribue au système
proposé par la section centrale. Craignez, messieurs, de détacher quelque chose
de ce système si bien organisé, et de compromettre ainsi les heureux résultats
qu’on est en droit d’en attendre.
M. Metz.
- Messieurs, si nous vivions en France ou en Angleterre, où l’institution du
jury est respectée par tout le monde, je concevrais que mes observations
n’eussent pas toute leur importance ; mais chez nous, où cette institution a
été attaquée même dans cette enceinte, je ne pense pas qu’on puisse m’opposer
l’exemple de la France et de l’Angleterre.
Il
ne faut pas craindre, dit-on, l’influence que la cour d’appel mettra sur la
composition du jury lorsqu’elle prendra 30 noms pour les adjoindre à 220 autres
noms ; mais remarquez, messieurs, que ce choix se fera trois fois de suite, de
manière que ce ne seront pas 30 noms ajoutés à 220, mais en définitive 90 noms
ajoutés à 160, et cela peut présenter des inconvénients très graves, à moins
qu’on ne veuille dire qu’il faut s’en rapporter entièrement à la cour d’appel
pour la composition du jury.
Pour
donner toute satisfaction aux honorables membres qui combattent mon amendement,
je proposerai de dire : « Ces citoyens seront pris au sort dans la liste
transmise par le tribunal de première instance et réduite de moitié avant cette
opération. » De cette manière, messieurs, vous donneriez encore à la cour
d’appel une influence bien grande, mais au moins vous laisseriez aussi quelque
chose au hasard, qui est souvent la providence de l’accusé.
M. le président. - M. Metz propose
de rédiger le dernier paragraphe de l’article premier comme suit :
« Ces
citoyens seront pris au sort dans les listes transmises par les présidents des
tribunaux de première instance, et réduites à moitié avant cette opération.
M. le ministre de la justice (M. Ernst).
- Je ne pense pas, comme l’honorable préopinant, que le hasard soit une
providence dans la désignation des jurés ; au contraire, c’est à cette cause
fatale et aveugle que nous devons tous les vices de notre institution. Si le
jury jouissait chez nous, comme en France et en Angleterre, de la confiance
publique, dit l’honorable membre, je consentirais à ce qu’on fît des emprunts à
la législation de ces pays ; mais il est dans la déconsidération, et il a été
attaqué de toute part. Je répondrai que c’est précisément pour relever le jury
dans l’opinion, pour lui donner les garanties d’une bonne composition qui lui
manquent, qu’il faut importer chez nous un moyen que nos voisins emploient avec
succès, l’épuration de la liste des jurés ; et nous croyons que ce soin ne
pourrait être mieux confié qu’à des magistrats indépendants et éclairés.
M.
Raikem. - Je crois devoir dire quelques mots, pour
expliquer quelle a été l’intention de la section centrale, relativement à l’article
qui nous occupe.
Je
pense que l’on aura aisément remarqué que cet article a été fait dans le but de
coordonner toutes les dispositions du projet, afin que toutes les sessions du
jury soient placées dans la même catégorie. Et remarquez, en effet, ce qui a
d’abord lieu à la première session. Une liste est réduite pour toute l’année à
moitié par le tribunal de première instance ; en appel, cette liste est
ultérieurement réduite au quart. Je suppose qu’il se trouve dans une province
800 jurés ; le tribunal de première instance réduit cette liste à moitié ; elle
n’est donc plus que de 400 ; ensuite, la cour d’appel réduit cette nouvelle
liste de 400 au quart ; elle est donc réduite à 200, après cette deuxième
opération.
Voilà
donc à la première session 200 jurés qui, suivant le projet, proviennent du
choix de la cour d’appel, et entre lesquels on tire au sort, pour désigner les
membres qui seront appelés ultérieurement à former le jury du jugement. Or,
quel serait le résultat de l’amendement de l’honorable M. Metz ? De déranger
toute l’économie du projet. Et en effet, à la première session, les jurés sont
tous le choix de la cour ; aux sessions ultérieures, vous détermineriez par le
sort, non pas les jurés qui doivent être appelés à siéger, mais les jurés entre
lesquels on tirera au sort ; il y aurait donc plusieurs triages pour les
sessions autres que la première, tandis que vous n’en auriez établi qu’un pour
la première session.
Eh
bien, il faut maintenir tous les accusés dans la même catégorie. A la première
session, le tirage au sort des jurés qui doivent siéger a lieu dans une liste
qui est le choix de la cour ; il faut donc aussi qu’aux sessions ultérieures,
comme les accusés doivent être sur la même ligne, le tirage au sort ait lieu
dans une liste qui soit le choix de la cour. Un exemple fera aisément
comprendre ceci.
Je
suppose qu’à la première session on ait tiré 30 jurés parmi les 200 jurés qui
sont le choix de la cour ; ces jurés ont satisfait à leurs obligations ; l’on
ne peut plus, ni pour la même année, ni pour l’année suivante, les appeler à
siéger ; mais la cour, pour qu’il y ait toujours le même nombre de jurés entre
lesquels on tire au sort ; la cour, dis-je, remplace les
30 jurés sortants, au moyen de la liste qui a été formée par le tribunal de
première instance ; on a pu choisir pour la première session ; on doit donc
pouvoir également choisir pour la seconde, afin que toutes choses soient
égales. La cour choisit dans la liste du tribunal de première instance 30
jurés, et les ajoute aux 170 qui restent. Vous avez de nouveau 200 jurés. Ce ne
sont pas ces trente nouveaux jurés qui viennent former le jury du jugement, ce
n’est pas une liste réduite : mais ce sont trente nouveaux jurés qu’on ajoute
aux 170 restants et entre lesquels on tire au sort ; ce n’est pas la cour qui
forme le jury, c’est le sort ; la cour ne fait autre chose que former la liste
des jurés entre lesquels on tire au sort. Elle forme cette liste à la première
session ; elle doit pouvoir de même la former aux sessions ultérieures.
Je
crois donc que l’on ne peut adopter l’amendement de M. Metz sans renverser de
fond en comble le système de la section centrale qui, comme je viens de le
prouver, ne renferme aucune espèce d’arbitraire.
M. Maertens. - Messieurs,
j’adopte entièrement le raisonnement de l’honorable préopinant ; mais je crois
que sous ce rapport l’article 9 présente une lacune. Cet article ne prévoit pas
le cas de plusieurs séries dans la même session. Je suppose une session dans
laquelle il y aura trois séries ; 30 jurés seront appelés à la première série ;
30 le seront encore à la seconde, et la liste sera déjà diminuée de 60 lorsque
l’on en viendra à la troisième série.
Je
trouve donc que l’article présente une lacune, et pour me servir de l’exemple
de l’honorable préopinant, qui a pris pour base de son raisonnement le nombre
de 200, je pense que la cour d’appel ferait bien, après chaque série, de
remplacer les jurés qui ont figuré dans cette série. Je pense donc que l’on
ferait bien de permettre à la cour d’appel de désigner un certain nombre de
jurés supplémentaires.
M. de
Behr, rapporteur. - Messieurs, la section centrale n’a voulu
compléter le nombre qu’à chaque session, et non pas à chaque série, parce que
la chose n’est pas possible. Une série succède immédiatement à une autre, et
nécessairement on n’aurait pas eu le temps de compléter la liste.
-
L’amendement de M. Metz à l’article 9 du projet de la section centrale est mis
aux voix et n’est pas adopté ; l’article 9 est ensuite mis aux voix et adopté.
La
chambre passe à la discussion de l’article suivant :
« Art.
10. Pour les sessions des cours d’assises de l’année 1838, postérieures à la
promulgation de la présente loi, il sera formé des listes, conformément aux
dispositions des articles précédents. A cet effet, un arrêté royal déterminera
les époques auxquelles ces listes seront respectivement transmises par les
députations provinciales aux présidents des tribunaux de première instance, et
par ceux-ci aux premiers présidents des cours d’appel, et par ces derniers aux
présidents des tribunaux des lieux où siègent les cours d’assises.
« Les
dispositions de l’article 391 du code d’instruction criminelle seront
applicables aux jurés portés sur ces listes. »
M.
Verhaegen. - Je prie M. le ministre de la justice de vouloir
bien nous dire s’il se rallie à cette proposition de la section centrale, et en
cas d’affirmative, s’il entend appliquer la disposition aux instructions déjà
achevées.
M. le ministre de la justice (M.
Ernst). - Messieurs, je me rallie à la disposition de
la section centrale, voilà ma réponse la première question de l’honorable
préopinant. Quant à la seconde question, celle de savoir si moi, ministre de la
justice, j’entends appliquer la disposition de telle ou telle manière ; à cet
égard, il ne m’appartient pas de statuer : dès que la loi sera en vigueur, elle
sera appliquée par les tribunaux, comme toutes les lois, suivant les principes
généraux de la législation.
Mais,
s’il faut dire toute ma pensée, j’ajouterai que la plupart des articles de la
loi peuvent être mis à exécution immédiatement après sa publication ; quant à
la formation des listes en vertu des dispositions nouvelles, les époques seront
réglées par arrêt royal, de manière qu’il n’y ait aucune difficulté pratique.
M.
Verhaegen. - Cette disposition m’a paru fort
extraordinaire. On pourrait dire au-dehors, comme je dis au-dedans, qu’elle est
faite pour les procès de presse qui vont occuper les cours d’assises.
M. le
ministre de la justice (M. Ernst). - C’est impossible
!
M.
Verhaegen. - Je ne sais si c’est impossible, mais nous
allons nous en expliquer.
L’article
10 porte :
« Pour
les sessions des cours d’assises de l’année 1838, postérieures à la
promulgation de la présente loi, il sera formé des listes, conformément aux
dispositions des articles précédents. A cet effet, un arrêté royal déterminera
les époques auxquelles ces listes seront respectivement transmises par les
députations provinciales, » etc.
Il n’y a là aucun délai déterminé, on peut aller
aussi vite qu’on le jugera à propos et retarder de même. Cela pourrait arriver
d’après les circonstances. Maintenant des procédures sont arrivées à fin, des
accusés attendent leur jugement. Appliquera-t-on à ces accusés l’article 10, si
on met assez de célérité dans le choix pour faire composer le jury de la
manière dont l’établit la loi ? Voilà une chose qui exige une explication
catégorique. Il me semble qu’il eût été tout naturel, pour éviter toute espèce
de rétroactivité ; car je verrais de la rétroactivité si on procédait de cette
manière ; il eût été tout naturel de dire que la loi ne serait obligatoire que
dans un mois ou six semaines à dater de sa promulgation. Alors il n’y aurait
aucune crainte pour les accusés dont la procédure serait arrivée à fin. Si on
ne fait pas cela, on verra ce que j’ai vu, que la loi est conçue de telle
manière qu’on pourra en faire tout ce qu’on voudra.
M. le ministre de la justice (M. Ernst).
- Messieurs, vous savez que le gouvernement n’est pas prodigue de procès de
presse. Quand il s’est déterminé à en intenter, c’est que l’opinion publique le
réclamait avec instance. Le gouvernement s’est toujours, à cet égard, laissé
guider par l’opinion publique. Il l’est encore dans celui qui s’instruit en ce
moment.
L’honorable
préopinant parle d’effet rétroactif donné à la loi. Comment peut-il y avoir un
effet rétroactif, quand on laisse au gouvernement le soin des mesures à prendre
pour que la loi puisse être mise à exécution ?
Il
parle aussi des craintes que certains accusés peuvent avoir ; je ne sais
quelles pourraient être ces craintes ; dans tous les cas, il serait très
difficile que les listes fussent faites pour un procès qui devrait être jugé
aux assises prochaines de la cour de Bruxelles. Mais il est d’autres parties de
la loi, d’autres dispositions qui pourraient être appliquées ; le vote secret,
par exemple : dès que la loi sera obligatoire, l’article sur le vote secret
devra être mis à exécution, cela est évident.
Je
suis assuré que la section centrale ne s’est aucunement préoccupée de l’affaire
politique à laquelle l’honorable préopinant a fait allusion ; elle n’a eu
d’autre but que de faire jouir le pays le plus tôt possible des améliorations
importantes introduites dans la législation sur le jury.
M.
Raikem. - Je demande la parole pour dire quelques mots
sur ce qu’a fait la section centrale. Aucun de ses membres n’a pensé aux délits
de presse, quand l’article dont il s’agit a été rédigé. Voici quel a été le but
de la section centrale. Elle a regardé le projet de loi en discussion comme
apportant des améliorations à l’institution du jury, et elle a cru qu’il
fallait la mettre le plus tôt possible à exécution. Mais il est des
dispositions déjà adoptées qui fixent aux mois de septembre, octobre et
novembre, les délais pour la formation des listes ; ces dispositions ne
pouvaient pas être appliquées à l’année 1838, mais seulement à l’année 1839.
Il
fallait donc prendre des mesures d’exécution pour l’année 1838 ; force était
bien de s’en rapporter à un arrêté royal, au gouvernement qui, calculant les
délais nécessaires pour la confection des listes, fixerait l’époque où la loi
pourrait être mise à exécution. Certes, nous avions raison en procédant ainsi ;
nous n’avons fait, au reste, qu’appliquer l’article 67 de la constitution qui
confère au Roi le droit de faire les règlements et arrêtés pour l’exécution des
lois.
Or,
ici un règlement était nécessaire ; voilà les motifs qui ont déterminé la
section centrale. Quant aux délits de presse qui sont poursuivis ou qu’on
pourrait poursuivre, elle n’y a pas songé.
On
trouvera sans doute bonne justice, et même, nous l’avons espéré, meilleure
justice devant le jury modifié par les dispositions nouvelles que devant le
jury tel qu’il est organisé aujourd’hui. Si on ne devait pas y trouver bonne
justice, ce ne seraient pas des améliorations que nous aurions introduites, et
nous aurions eu tort de faire la loi. Pour moi, je crois le contraire, et pour
les procès de presse auxquels on vient de nous faire penser, ce sera également
une amélioration. Si on intente des procès qui ne soient pas fondés, le nouveau
jury saura bien en faire justice.
-
L’article 10 est mis aux voix et adopté.
Article premier
M. le
président. - Maintenant, nous devons en revenir à
l’article premier dont la discussion a été ajournée.
Cet
article est ainsi conçu :
« Les
jurés seront pris :
« Art.
1er. Les jurés seront pris :
« 1°
Parmi les citoyens portés sur la liste électorale, qui versent au trésor de
l’Etat, en contributions directes, la somme ci-dessous indiquée :
« Dans
la province d’Anvers : 250 fr. (chef-lieu) ; 170 fr. (les autres communes) ;
« Dans
la province de Brabant : 250 fr. (chef-lieu) ; 170 fr. (les autres
communes) ;
« Dans la province de Flandre
orientale : 250 fr. (chef-lieu) ; 170 fr. (les autres communes) ;
« Dans la province de Flandre
orientale : 200 fr. (chef-lieu) ; 170 fr. (les autres communes) ;
« Dans la province de Liége : 200
fr. (chef-lieu) ; 170 fr. (les autres communes) ;
« Dans la province de Hainaut (Mons
et Tournay) : 200 fr. (chef-lieu) ; 170 fr. (les autres communes) ;
« Dans la province de Namur : 140 fr.
(chef-lieu) ; 120 fr. (les autres communes) ;
« Dans la province de Luxembourg :
120 fr. (chef-lieu) ; 120 fr. (les autres communes) ;
« Dans la province de Limbourg : 110
fr. (chef-lieu) ; 110 fr. (les autres communes). »
M. Lebeau.
- J’avais présenté un amendement tendant à élever le cens. Les dispositions
adoptées aujourd’hui diminuent de beaucoup l’importance de cet amendement. Je
crois que la garantie résultant de la faculté d’épuration est la garantie
principale. Nous avons fait ainsi rentrer l’institution du jury dans le droit
public commun. C’est ainsi que le jury est entendu en Angleterre et en France,
et partout où il a été conservé. Ne voulant pas prolonger davantage sur ce
point des débats qui ont déjà été fort longs, j’imiterai la section centrale
qui a renoncé à sa proposition et déclaré adhérer au système présenté par le
gouvernement, et je retirerai mon amendement.
M. Dumortier. - Je déclare que je
ne suis pas pleinement satisfait par l’amendement du ministre. J’aurais
plusieurs observations à faire sur les chiffres proposes pour les diverses
provinces. Vous conviendrez qu’il y a quelque chose d’assez singulier à voir le
chef-lieu de la province de Namur, qui est une ville très importante, payer un
cens moins élevé que les villages des provinces d’Anvers, du Brabant, de la
Flandre occidentale, de la Flandre orientale, de Liége et du Hainaut. Il est
manifeste que cela est très extraordinaire. J’ajouterai qu’il y a un vice
semblable pour ce qui concerne la province du Hainaut. Aujourd’hui, pour faire
partie du jury dans les communes du Hainaut, il suffit de payer 50 florins ou
105 fr. ; à l’avenir il faudra en payer 170. C’est restreindre le nombre des
jurés hors de mesure, surtout dans les campagnes.
J’aurais
préféré voir adopter un autre système, celui de doubler purement et simplement
le cens fixé par la loi électorale pour les villes et les campagnes, et mettre
ainsi le cens du jury dans un rapport direct avec celui des campagnes. Toutefois,
comme je ne veux pas prolonger cette discussion, et l’amendement proposé
consacrant le principe auquel je tiens, mettant la loi sur le jury en
corrélation complète avec la loi électorale, cette considération me détermine à
renoncer à présenter un amendement.
M. le
ministre de la justice (M. Ernst). - Je dois repousser
l’interprétation que vient de donner l’honorable préopinant ; le motif
politique auquel il a fait allusion, n’a eu aucune influence sur mon esprit ;
en fixant un cens différent pour les chefs-lieux et pour les autres localités,
j’ai été détermine par des raisons naturelles que j’ai déjà exposées. J’ai
cherché à répartir les fonctions de juré d’une manière égale, d’y appeler les
notabilités de toutes les parties du pays, de composer le jury le mieux
possible. Toute autre considération devait rester étrangère à ma pensée.
L’honorable
préopinant a prétendu que le cens n’avait pas été fixé dans une juste
proportion dans les provinces du Hainaut et de Namur ; il le trouve trop élevé
dans la première de ces provinces, et trop bas dans l’autre. Pour répondre à
ses critiques et justifier la proposition du gouvernement, il suffira de
rappeler les principes qui nous ont dirigés ; car les chiffres n’ont pas été
fixés arbitrairement, ils ont été combinés d’après des règles que j’ai eu
l’honneur de développer dans une séance précédente.
Le
cens dans la province du Hainaut n’était que de 100 fr., tandis qu’il s’élevait
à 170 fr. dans les provinces du Brabant, d’Anvers et de la Flandre orientale ;
or, en tenant compte de la population, des richesses, de l’instruction
présumée, il est évident que le Hainaut devait pour le moins être assimilé aux
provinces que j’ai citées, d’autant plus que les affaires criminelles sont
rares dans le Hainaut et que le nombre des jurés y était beaucoup trop grand.
Ainsi s’explique très naturellement la disposition qui met sur la même ligne
les campagnes des quatre provinces dont nous venons de parler. Une choquante
anomalie de la législation actuelle disparaîtra.
La
distinction que nous avons faite entre les villes de Mons et de Tournay d’un
côté, et les autres localités de la même province, est justifiée par la
considération suivante : dans ces villes le nombre des jurés était trop fort
comparativement aux autres communes ; il a fallu faire une différence pour les
deux villes principales qui forment pour ainsi dire le chef-lieu de la
province, afin de rétablir l’équilibre et de faire concourir dans une juste
proportion toutes les parties de la province ; nous avons, à cet égard, suivi
la même règle pour le Hainaut que pour les provinces des Flandres, d’Anvers, du
Brabant et de Liége.
L’honorable orateur s’étonne que le cens soit
moindre à Namur que dans les campagnes du Hainaut ; la chose est cependant
facile à comprendre. Si nous avions élevé le cens plus haut dans la province de
Namur, nous aurions couru le risque de n’avoir pas le nombre de jurés
nécessaire pour le service ; nous avons aussi introduit dans cette province une
différence, quant au cens, entre le chef-lieu et les autres communes, afin
d’établir la justice distributive qui n’existait pas dans la législation
actuelle, la ville de Namur contribuant dans la composition du jury dans la
proportion de 7 à 1, ce qui était contraire à la raison et à l’équité.
Je
répéterai en finissant que ce n’est pas sans peine que nous sommes parvenus à
coordonner les diverses combinaisons que nous avons soumises à vos
délibérations.
M. Verhaegen. - Quant à moi, je trouve
qu’il n’y a aucune distinction à faire entre le chef-lieu et les autres parties
de la province ; je ne présenterai ni amendement, ni développements, car
d’après la disposition qui s’est manifestée par une demande de clôture avant
que la discussion fût ouverte, ce serait chose inutile. Je ne fais qu’énoncer
en un seul mot le motif de mon vote comme protestation, afin qu’on ne m’objecte
pas, quand la question se représentera, que j’en aurais laissé passer
aujourd’hui la solution inaperçue.
M. Lebeau.
- Lorsque j’ai abandonné mon amendement, je l’ai fait sans aucune préoccupation
politique ; je n’en avais de même aucune lorsque je l’ai présenté. Je crois
qu’il n’y a rien à conclure de la loi du jury à la loi électorale ; ce sont
deux matières toutes différentes ; s’il fallait conclure de l’une à l’autre, je
demanderais à l’honorable M. Dumortier de quel droit il exclurait les capacités
du système électoral, puisque vous venez de les admettre dans le jury.
M.
Dumortier. - Je ne veux pas de ce système.
M. Lebeau. - Soit ; mais il a
été admis par la chambre.
Je
dis que si vous concluez de la loi du jury à la loi électorale, vous confondez
deux choses toutes différentes, surtout après l’adoption d’un système
d’épuration pour le jury, et que vous arrivez à des conséquences que beaucoup
de membres repousseront.
Je
n’avais, je le répète, aucune préoccupation politique quand j’ai présenté mon
amendement, je n’en avais également aucune quand je l’ai retiré. J’ai pleine
confiance dans les chiffres présentés par M. le ministre de la justice,
chiffres que sa position lui permet de vérifier d’après les renseignements et
les statistiques qu’il peut se procurer ; voilà pourquoi j’ai retiré mon
amendement. Ce sont les mêmes considérations qui ont engagé la section centrale
à retirer sa proposition.
M. le ministre de la justice (M.
Ernst). - Je tiens à répondre deux mots à l’honorable
M. Verhaegen. Si la clôture a été demandée, ce n’est pas qu’on trouvât la
question irritante, qu’on eût à craindre la discussion ; personne n’avait à la
craindre : c’est parce que le débat était étranger à la loi du jury.
Comme
je l’ai déjà dit, en proposant un cens différentiel, je n’ai eu d’autre but que
la justice distributive et la bonne composition du jury.
L’honorable
préopinant n’aurait pas dû se borner à dire qu’il n’y a pas de raison de
différence entre les chefs-lieux et les campagnes, il aurait dû répondre aux
différences que j’ai établies dans la première discussion ; alors j’ai démontré
que la ville de Bruxelles entrait dans la composition du jury pour 9 jurés,
tandis que les autres villes de la province, Louvain, Tirlemont, etc., n’y
entraient que pour un seul. Ce n’est pas là le jugement du pays comme nous
l’entendons. Nous voulons que toutes les notabilités concourent à la
composition du jury. J’ai dit que dans les grandes villes on arrivait
facilement au cens de 170 fr. en raison de la cherté du logement et de la
patente, tandis que celui qui paie ce cens dans une commune rurale est un bon
propriétaire qui offre toutes les garanties désirables pour être juré.
M.
Dechamps. - Ce n’est pas sur cette question que j’avais
demandé la parole. Je suis de l’avis de l’honorable M. Lebeau. Je ne vois dans
la loi du jury aucune analogie avec la loi électorale ; surtout depuis qu’on a
adopté le système d’épuration, je ne comprendrais pas que l’on pût conclure du
jury tel qu’on l’a fait à la loi électorale.
Je veux présenter une seule observation.
Lorsqu’il s’est agi d’adopter le système d’épuration, on s’est autorisé de
l’exemple de l’Angleterre et de la France, pays où le système d’épuration est
admis ; mais veuillez remarquer qu’avec ce système le cens peut être réduit.
Si
le système d’épuration n’était pas admis, je comprendrais qu’on cherchât une
garantie dans la quotité du cens ; mais depuis que le système d’épuration est
admis, la question du cens n’est plus la même ; nous pouvons sans inconvénients
élargir le cercle du jury. En France, la liste des jurés est calquée sur la
liste électorale ; en Angleterre, tous les propriétaires, tous les
franc-tenanciers, et tous ceux qui ont une charge quelconque, sont jurés.
Vous
voyez qu’en France et en Angleterre on va plus loin que ne l’a proposé
l’honorable Dumortier ; ainsi, j’appelle l’attention de la chambre sur la
question de savoir s’il ne conviendrait pas d’admettre un cercle plus grand
dans la fixation de la liste des candidats pour la composition du jury.
- L’article premier est mis aux voix et adopté.
M. le président. - La chambre a
encore à statuer sur un amendement de M. Pollénus relatif aux récusations.
M.
Pollénus. - J’ai retiré cet amendement dans la section
centrale.
M. le
président. - Dans ce cas, le premier vote de la loi est
terminé.
M.
Maertens. - Ainsi il est entendu que pour les
récusations on se réfère au code d’instruction criminelle.
M. de
Behr, rapporteur. - On se réfère au code d’instruction
criminelle, dont un article porte que le ministère public et l’accusé exercent
en nombre égal leurs récusations, jusqu’à ce qu’il reste 12 jurés qui forment
le jury de jugement.
-
La séance est levée à 4 heures 3/4.