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Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du vendredi 15 avril 1836
Sommaire
1) Pièce
adressée à la chambre. Pétition relative au canal de Zelzaete à la mer du Nord
2)
Démission d’office d’un membre de la chambre (Bosquet)
3) Projet
de loi relatif au canal de Zelzaete à la mer du Nord. Discussion générale.
Lutte contre les inondations dans les Flandres, canal de Bruges à Ostende,
wateringues et polders (Lejeune, de
Foere, Pirmez, Jullien, Dumortier, F. de Mérode, Gendebien, Andries, Verdussen, Dumortier, C. Rodenbach, Desmet, Gendebien, de Theux, Dumortier, Van Hoobrouck, de Jaegher, Jullien, de Renesse, Legrelle, A. Rodenbach, Dubus, Devaux, Dumortier)
(Moniteur
belge n°107, du 16 avril 1836)
(Présidence de M. Raikem.)
M. Verdussen
procède à l’appel nominal à une heure.
M. de Renesse
donne lecture du procès-verbal de la précédente séance ; la rédaction en est
adoptée.
M. Verdussen
fait l’analyse d’une pétition adressée à la chambre.
PIECE ADRESSEE A
« Le sieur Setroux,
à Sougne, adresse des observations à l’appui du
projet de séparer la commune de Sougne de celle de
Sprimont pour la réunir à Aywaille. »
- Cette pétition est renvoyée à la commission
spéciale chargée de l’examen de la loi proposée relativement à la séparation
des communes.
________________
M. Vanden Wiele écrit pour
demander un congé à cause du mauvais état de sa santé.
- Le congé est accordé.
DEMISSION D’OFFICE D’UN
MEMBRE DE
M. Gustave Bosquet
adresse la lettre suivante à M. le président :
« M. le président,
« Le Roi ayant daigné, sur ma demande,
m’appeler aux fonctions de conseiller près de la cour d’appel de Bruxelles,
fonctions auxquelles j’ai la ferme intention de me vouer exclusivement, je
m’empresse de vous en informer, en vous priant de vouloir bien le porter à la
connaissance de la chambre, au sein de laquelle je dois cesser, aux termes de
l’art. 36 de la constitution, d’avoir l’honneur de siéger.
« Je vous prie, etc. »
RAPPORT SUR UNE PETITION
RELATIVE AU CANAL DE ZELZAETE A
M. Lejeune, organe
de la commission des pétitions, demande qu’une pétition des habitants
d’Assenede, qui se rapporte au canal de Zelzaete soit renvoyée au ministre de
l’intérieur.
M. Lejeune demande
ensuite, en son nom, que la même pétition reste déposée sur le bureau de la
chambre pendant la discussion du projet du canal de Zelzaete.
- Cette proposition de M. Lejeune est adoptée.
PROJET DE LOI RELATIF AU
CANAL DE ZELZAETE A
Discussion générale
M. le président. -
Avant de passer outre à la discussion, je dois déclarer à la chambre que M. Lejeune a déposé sur le bureau un
amendement ainsi conçu :
« La part pour laquelle les intéressés devront
contribuer dans l’entretien du canal sera ultérieurement fixée par la
loi. »
M. de Foere. -
Messieurs, les adversaires du projet ont porté la discussion sur le terrain de l’équité.
Ils ont bien fait. C’est sur ce terrain que toutes ces discussions doivent être
établies. C’est au surplus le plus sûr moyen de l’entendre et de contenter
l’esprit étroit de provincialisme qui envahit si souvent et si malheureusement
cette chambre. La chambre devrait donner au pays l’exemple de son attachement
aux principes de l’économie sociale. Les parties ne se combattent jamais sans
nuire considérablement au tout. L’esprit d’association a pour premier besoin
l’union ; sans cette union, l’association même nationale est impossible. Au
contraire, lorsque les diverses parties de l’Etat semble s’entendent, il y a
moyen d’en venir à des résultats immenses auxquels chaque partie prend sa part
de prospérité et de bonheur.
Après ce préambule, ne vous attendez pas,
messieurs, que j’aie l’intention de demander aux autres provinces aucune
concession gratuite en faveur des provinces de
Est-il vrai, ou non, qu’à l’exception de l’écluse
du Hazegras, tous les autres débouchés soient, par le
fait de la révolution, au pouvoir des Hollandais ? Or, que vous demandent les
Flandres ? Elles vous demandent d’autres débouchés. Les Flandres ne s’attachent
pas d’une manière exclusive au canal de Zelzaete à la mer. Elles vous demandent
principalement d’être rétablies dans leurs anciens droits que la révolution a
détruits. Le gouvernement a compris cette équité : d’après l’avis unanime de
ses ingénieurs, il vous propose le canal en remplacement des anciens écoulements.
Quels sont les motifs qui ont conduit le
gouvernement dans cette proposition ? Ce sont des motifs d’intérêt général. Le
ministre de l’intérieur les a exposés à la chambre. En premier lieu, le canal
doit servir à faire cesser les interruptions continuelles qu’éprouve la
navigation sur le canal de Bruges à Ostende. La navigation n’est jamais un
intérêt isolé. Cet intérêt se rattache toujours au commerce et à l’industrie.
Admettons maintenant que, dans l’intérêt de la
navigation intérieure,
En second lieu, le gouvernement propose le canal
dans un autre intérêt général. Il veut assainir cette partie du pays dans un
intérêt sanitaire de l’armée et des employés de la douane. Cette contrée étant
périodiquement inondée, les soldats et les douaniers sont aussi périodiquement
décimés. Le mal est aujourd’hui parvenu à tel point que le ministre de la
guerre est obligé d’offrir une prime aux officiers et aux soldats qui
s’offriraient volontairement pour le service de cette partie du pays. Le
ministre des finances peut vous dire de son côté les obstacles qu’il éprouve de
ce chef dans le service de la douane. Et lorsque, dans cet intérêt sanitaire,
le gouvernement vous propose le canal, de préférence à toute autre voie
d’écoulement, vous voulez que
Ensuite, le trésor public cherche à se garantir, au
moyen du canal, contre les pertes majeures que lui font éprouver les 80,000
bonniers exposés, depuis quatre ans, à des inondations périodiques et sur
lesquels il ne perçoit aucune contribution ; et vous voulez que
En quatrième lieu, le gouvernement veut soustraire
cette partie intéressante et productive du pays au mauvais vouloir de
Dans quelques jours vous demanderez aux Flandres de
contribuer dans les nouvelles routes que l’on se propose de construire dans
toutes les provinces du pays.
Eh bien, vous avez remarqué
la grande disproportion qui existe dans les lieues à construire dans les autres
provinces, comparativement aux provinces de
Messieurs, malgré ces considérations, puisées dans
l’intérêt général, je suis cependant déterminé à rester dans les règles que je
crois être dictées par une juste équité. Par ce motif, je ne m’opposerai pas à
ce que les wateringues qui existent aujourd’hui dans les Flandres supportent,
pour l’entretien du canal, des dépenses dans la même proportion dans laquelle
elles les supportent maintenant pour l’écoulement des eaux, en défalquant
cependant les dépenses que les Flandres seront obligées de subir, afin de
conduire les eaux vers le nouveau canal.
Voilà, messieurs, la seule part de dépenses qu’en
bon droit vous puissiez exiger des Flandres pour l’entretien du canal.
J’ai dit.
M. Jullien. -
Comme M. Pirmez doit parler contre le projet je lui céderai la parole, et je
parlerai après lui.
M. Pirmez. -
L’honorable préopinant vient de parler d’esprit de province et d’esprit de paroisse.
Il me semble que dans cette discussion on a singulièrement interverti les
rôles. L’esprit de paroisse et de province, on le reproche à ceux qui refusent
d’accorder des faveurs aux localités. Ce sont ceux qui demandent des faveurs
pour leurs localités, et non ceux qui veulent empêcher qu’on les accorde, qui
se montrent possédés de l’esprit de localité. Or, voyez quels sont ceux qui
viennent à chaque instant soutenir ces conflits entre les intérêts locaux,
quels sont ceux qui ont demandé ces lois prohibitives qui ne sont rien d’autre
que des faveurs locales. Ce ne sont que les Flandres et toujours les Flandres
qu’on voit faire des demandes de cette nature.
On ne nie pas que le gouvernement doive intervenir
dans la construction du canal de Zelzaete ; tout le monde, et M. Gendebien
lui-même, député du Hainaut, l’a reconnu. Mais les propriétés que doit
traverser le canal sont plus intéressées que la nation elle-même à sa
construction. Je prendrai les propres aveux des députés des Flandres qui sont
consignés dans le Moniteur. Ils ont
dit que c’était en 1829 que leur pays avait le plus souffert de sa situation ;
que maintenant les Hollandais ne les gênaient nullement dans l’écoulement de
leurs eaux, mais que c’était avant la guerre, avant la séparation de ta
Hollande, qu’ils avaient le plus souffert.
M. Andries. - Je
n’ai pas dit cela.
M. Pirmez. -
Toujours est-il que vous avez dit que les Hollandais vous donnaient la plus
grande facilité d’écouler les eaux des Flandres. Si vous éprouvez maintenant
quelques embarras pour cet écoulement, cela ne vient pas de l’état de guerre,
mais de la situation naturelle du pays, des ensablements, des atterrissements
qui sont sur les côtes.
Ainsi, si l’on fait un canal qui améliorera la
position des propriétés flamandes, ces propriétés doivent contribuer dans les
dépenses à faire.
Si la situation actuelle des propriétés des
Flandres était uniquement la conséquence de l’état de guerre, ce serait la
nation qui devrait y porter remède. Mais vous-mêmes, députés des Flandres, vous
avouez que ce n’est pas l’état de guerre qui met votre pays dans cette
situation, et qu’au surplus le canal améliorera sensiblement ces propriétés.
L’amendement que vient de proposer M. Lejeune ne
signifie absolument rien ; c’est dire : Passons outre ; autorisons la
construction du canal, et après nous verrons par qui devront être supportés les
frais d’entretien et de réparations. J’espère que la chambre ne donnera pas
dans ce piège.
Quant aux inconvénients
qu’éprouvent les habitants des côtes, je ne pense pas que le canal puisse les
faire cesser. Tout le monde connaît l’aversion qu’ont les troupes pour ces
garnisons, et notamment ce proverbe : Dieu nous préserve de la famine et de la
garnison de Gravelines. Je ne crois pas que le canal de Zelzaete garantira les
habitants des côtes des fièvres auxquelles ils sont exposés.
On a parlé dans cette discussion du projet de
routes comme s’il était déjà adopté. Je déclare pour mon compte que je le
combattrai quand il sera mis en discussion. Si ce projet était adopté, je
concevrais qu’on veut en argumenter comme on l’a fait ; mais à présent on ne
peut en tirer aucun argument.
Je déclare, en terminant, que si on ne fait pas
intervenir les propriétaires intéressés pour une grande partie dans les frais
de construction, je voterai contre la loi.
M. Jullien. - Je
commence par déclarer à l’honorable préopinant que les Flandres ne demandent
pas de faveurs, et que quant à moi je n’en réclame pas. Si je croyais, en
prenant la parole, devoir obtenir, au détriment de l’intérêt général, une
faveur pour les Flandres, je me tairais ; cas telle n’est pas mon intention. Je
réclame, ou plutôt le gouvernement, car c’est lui qui a présenté le projet,
réclame un acte de justice distributive. Je suis autorisé à croire que la
justice est une vertu des nations comme une vertu des particuliers. Mettons
donc de côté ces récriminations qui se reproduisent chaque fois qu’il y a un
travail à faire dans l’une ou l’autre province, quelque prospérité que ce
travail doive procurer à la localité et quelque influence qu’il doive exercer
en même temps dans l’intérêt général.
Il y a là quelque chose de peu
honorable pour la représentation nationale, qui blesse la dignité de la
chambre. Nous devons avoir confiance les uns dans les autres, si nous voulons
que nos commettants aient confiance en nous.
J’avais cru la discussion épuisée, mais toute
l’argumentation des orateurs qui ont parlé contre le projet dans la séance
d’hier a roulé dans une erreur matérielle, dans une erreur de faits ; et les
orateurs auxquels je fais allusion sont les honorables MM. Dumortier et Eloy de
Burdinne. Ces deux orateurs ont constamment supposé qu’il s’agissait, par ce
canal, de faire des dessèchements de terre ; qu’il s’agissait de faire des
conquêtes sur la mer, et de livrer à la culture des propriétés qui étaient tout
à fait stériles.
M. Dumortier. -
Je n’ai pas dit cela.
M. Jullien. - Vous
avez parlé de desséchements, de conquêtes sur la mer ; vous avez raisonné dans
ce sens. Il est assez singulier, quand le Moniteur est là, quand je l’ai
entendu, que vous prétendiez que je me sois trompé.
M. Dumortier. -
Nous avons simplement parlé de terres, telles qu’elles se trouvent aujourd’hui,
et non de terres à conquérir ; nous avons dit que quiconque acquérait des
polders le faisait à son corps défendant.
J’ai voulu donner ce mot d’explication pour
empêcher qu’on n’argumente plus longtemps en me prêtant des choses que je n’ai
pas dites.
M. Jullien. - Je
répète ce que j’ai dit, on a traité la question comme s’il s’agissait de
dessèchements qui devaient profiter immédiatement aux propriétaires ou leur
procurer des profils nouveaux, tandis que les terres inondées dont il s’agit
sont en culture depuis un siècle et même davantage. Elles sont comprises dans
les matrices des contributions, et paient les contributions malgré les
inondations dont on se plaint.
Elles appartiennent à des wateringues, c’est-à-dire
à une association de propriétaires qui se cotisent pour procurer à leurs terres
l’écoulement des eaux pluviales et améliorer la culture. Voilà les terres dont
il est question. Dès qu’on reste sur ce terrain, il n’est plus possible
d’admettre les conséquences qu’ont tirées les orateurs dont je viens de parler.
Si vous voulez assainir vos terres, ont-ils dit, si vous voulez leur donner une
triple ou une quadruple valeur, il faut que vous, propriétaires, vous
contribuiez à la dépense. C’est le principe qui s’applique aux dessèchements de
terrains. Quand un propriétaire veut faire la conquête de polders, le
gouvernement se contente de l’encourager, et cela en lui accordant une
exemption de contributions pendant un grand nombre d’années.
Le gouvernement intervient ainsi pour encourager
ces conquêtes sur la mer, parce quelles sont un bien pour le pays en ce
qu’elles l’enrichissent de terres fertiles.
Voilà les principes qu’on a fait valoir, mais qui
ne peuvent s’appliquer à la question. Car les terres pour lesquelles on demande
un canal d’écoulement, n’auront pas pour un sou de valeur de plus
qu’auparavant. En effet, elles avaient avant 1830 un moyen d’écoulement que
leur avait procuré l’association des wateringues. C’est ce moyen d’écoulement
qu’elles ont perdu par la faute du gouvernement, qu’elles réclament du
gouvernement.
Il ne s’agit donc pas de donner à des terres une
valeur triple ou quadruple de celle qu’elles avaient, mais de les maintenir
dans l’état où elles étaient avant la révolution, ni plus, ni moins. On ne veut
pas profiter des événements, et s’il résulte une amélioration du canal dont on
réclame la construction, on ne demande pas mieux que de la payer. Voilà l’état
de la question ; il est impossible de le changer, à moins de parler contre la
connaissance des lieux et contre la connaissance des faits. L’honorable M.
Dumortier a dit encore que quant à la navigation que ce nouveau canal allait
favoriser, il en avait parlé à des bateliers de Tournay qui avaient répondu
qu’ils ne savaient pas ce qu’on voulait dire, qu’ils n’avaient jamais éprouvé
d’interruption.
C’est encore une chose qui me paraît assez étrange
que ces espèces de démentis qu’on se donne mutuellement dans cette chambre ;
quand des membres viennent rendre compte de faits qui se sont passés sous leurs
yeux, de leur répondre que cela n’existe pas, parce qu’on a parlé à un batelier
qui dit n’avoir pas éprouvé d’interruption de navigation. A peine l’honorable
membre avait-il articulé ces paroles, que M. Hye-Hoys a lu une lettre ayant
deux jours de date, dans laquelle on rend compte des malédictions dont les
wateringues étaient l’objet de la part des bateliers et notamment des bateliers
de Tournay, à cause de l’interruption forcée de la navigation et des avaries
qu’éprouvaient leurs navires quand on ouvrait les écluses. Ces interruptions de
navigation seront attestées par tous ceux qui habitent les Flandres. J’atteste
l’ancien gouverneur des Flandres, M. de Muelenaere, qui est à même de vous dire
qu’un des plus grands embarras du waterstaat est de
concilier l’intérêt de l’agriculture avec l’intérêt du commerce.
Chaque fois que l’ingénieur fait baisser les eaux,
la navigation est interrompue et le commerce crie ; chaque fois qu’il rend les
eaux au canal, et que les écoulements n’ont plus autant de force, les
propriétaires réclament : voilà l’état des choses. Il ne faut pas avoir de
grandes connaissances hydrauliques pour comprendre que du moment où on a enlevé
aux Flandres les moyens d’écoulement, elles ne peuvent s’empêcher de faire
usage du canal de Bruges à Ostende, en en faisant baisser les eaux : car enfin
les Flandres peuvent dire : Notre canal est à nous ; avant tout nous devons
nous occuper de l’écoulement des eaux qui inondent nos campagnes, et la
navigation deviendra ce qu’elle pourra.
Eh bien, au moyen du canal que l’on ferait, on
aurait la libre navigation de Bruges à Ostende ; c’est le commerce en général
qui en profiterait ; est-ce que ce n’est pas là une chose d’intérêt général ?
L’intérêt général n’est pas dans le canal d’écoulement, mais il se trouve en
ceci, que le canal d’écoulement construit, on jouira d’un grand canal pour la
navigation intérieure, puisqu’on ne sera plus obligé d’en baisser les eaux ;
voilà où est l’intérêt général.
En effet, sans cette navigation-là, je ne sais pas
ce que les honorables députés du Hainaut feraient de leurs charbons ; car c’est
un fait notoire que 1,200 bateaux de charbon descendent par ce canal pour aller
à Dunkerque.
On a dit que nous avions récriminé contre le
Hainaut à cause du canal de Charleroy ; mais personne d’entre nous n’a fait
entendre de récriminations semblables ; cependant ce canal a été créé bien plus
pour le Hainaut que pour les Flandres. Jamais, a dit M. Dumortier, le Hainaut
n’a profité du banquet du budget ; mais est-ce que l’on oublie que l’on a
abaissé deux ou trois fois, au détriment du trésor, les tarifs sur le canal de
Charleroy ? Toutefois a-t-on entendu les Flandres se plaindre du tort que l’on
faisait au trésor, tort que devaient supporter les contribuables ?
Quoi qu’il en soit, il me semble que quand on donne
des moyens de prospérité à des provinces comme les Flandres, cette prospérité
doit intéresser tout le pays. On ne peut nier cette vérité, à moins d’avoir les
idées les plus étroites en économie politique.
On a demandé des crédits pour réparations à faire
aux rives de
Maintenant, Je viens à l’amendement présenté en
second lieu par le ministre de l’intérieur.
C’est une chose à regretter de voir que le ministre
de l’intérieur, toutes les fois qu’il a une loi importante à présenter, vienne
toujours, au milieu du débat, jeter un amendement qui bouleverse de fond en
comble la loi et change la face de la discussion. M. le ministre de l’intérieur
a commencé par présenter un article unique de loi, lequel disait tout uniment
qu’il serait fait aux frais de l’Etat une section de canal depuis la ville de
Dam jusqu’à la mer ; et maintenant qu’on a discuté pendant deux jours, le
ministre se ravise, et présente un amendement qui, comme l’a très bien dit M.
Verdussen, bouleverse la loi. Pour vous en convaincre, je donnerai lecture de
cet amendement :
« Art. 2 nouveau. Les
frais d’exploitation, de surveillance, d’entretien et des réparations de toute
nature seront couverts au moyen de rétributions à payer par les diverses
directions des polders intéressés, sauf le recours de ces dernières coutre les
propriétaires des terrains nouvellement asséchés.
« Un règlement d’administration général,
arrêté par le gouvernement après avoir entendu les parties intéressées,
déterminera l’exécution du présent article.
« Il sera tenu un compte spécial des recettes
et dépenses, qui sera communiqué annuellement aux administrations des
polders. »
Voilà un article sur lequel il est presque
impossible de s’entendre ; car il n’y a rien de plus difficile à faire que la
ventilation des frais d’entretien et d’exploitation dans lesquels devront
entrer les propriétaires intéressés. Le gouvernement, vous le voyez, voudrait
que les propriétaires intéressés fissent tous les frais de l’administration du
canal, et que lui conservât l’exploitation. Ainsi les propriétaires
commenceraient par payer tous les frais d’une administration qui serait dans
les mains du gouvernement ; or, on sait que dans ce cas le gouvernement a la
main extrêmement large ; et il n’y a aucune association qui consentirait à
s’exposer à payer tous les frais de gros et menu entretien qu’il plairait aux
agents du ministère, dans leur sagesse, de faire au canal.
La disposition ne peut être admise ; elle blesse
toutes les notions du droit et du juste ; si le gouvernement reconnaît qu’il
est dans l’obligation de restituer aux Flandres ce qu’il leur a enlevé, et de
conserver à la navigation le canal de Bruges à Ostende, il doit remplir cette
obligation sans exiger des propriétaires d’autres sacrifices que ceux qu’ils
faisaient auparavant.
Comme l’a très bien fait
observer M. de Foere, si les Flandres ne doivent pas perdre par le canal
d’écoulement, d’un autre côté elles ne doivent pas gagner. Que les Flandres
paient pour le canal ce qu’elles payaient pour les anciens ouvrages, rien de
plus juste ; et je suis sûr que les députés des Flandres appuieront cette
proposition : mais l’amendement du ministre n’est ni justifiable ni acceptable.
Aussi longtemps que le canal ne sera pas fait, il sera impossible de fixer
quels seront les intéressés ; c’est quand les eaux seront conduites, par les
administrations des wateringues, au canal, que l’on connaîtra la part de
chacune.
Une chose qu’il ne faut pas perdre de vue, c’est
que les anciens ouvrages hydrauliques existent ; qu’ils ont été construits et
qu’ils sont entretenus aux frais des administrations des wateringues,
quoiqu’ils ne rendent plus les mêmes services.
L’amendement de M. Lejeune me paraît seul
admissible. Il faut déclarer que les intéressés participeront aux frais
d’entretien d’après un règlement qui sera fait ultérieurement. C’est à cet
amendement-là, sauf amélioration, que je pourrai me rallier. Mais je déclare
que je rejetterai celui du ministre de l’intérieur.
M. F. de Mérode.
- La plus grande objection que l’on ait faite contre le canal d’écoulement est
fondée sur le défaut de fonds ; c’est là du moins ce que j’ai remarqué de plus
saillant dans les discours des orateurs qui s’opposent le plus formellement à
ce canal. M. Dumortier vous a rappelé hier la position du trésor public ; il a
indiqué les objets qui réclamaient des fonds, et les dépenses qui ne sont pas
couvertes par les voies et moyens.
J’ai plusieurs fois signalé l’inconvénient de voter
des budgets de voies et moyens trop faibles. Sans doute qu’il est très sage
d’éviter les surcharges d’impôts ; mais si, pour éviter des surcharges, on
néglige des travaux utiles qui doivent conserver la richesse dans le pays ou
l’augmenter ; il est certain que nous resterons constamment stationnaires, et
que nous n’obtiendrons aucune amélioration ultérieure.
Lorsqu’on avait voté l’année dernière les 10 p. c., on s’est hâté de les supprimer, parce que, disait-on, on
avait demandé ces fonds pour la guerre ; or, la guerre n’ayant pas eu lieu, on
s’est hâté, je le répète, de supprimer les voies et moyens destinés à un objet
pressant auquel personne ne pouvait refuser son concours.
Si on avait laissé ces 10 p. c. s’établir jusqu’à
la fin de l’année (trois mois de plus), je ne pense pas que les contribuables
en eussent été plus malheureux ; je pense même qu’ils ne s’en seraient pas
aperçus. Nous aurions alors des fonds nécessaires pour l’exécution du canal
proposé.
Et remarquez qu’il ne s’agira seulement pas de ce
dernier travail, mais il s’agira ultérieurement de travaux de routes qui sont
nécessaires dans d’autres provinces, telles que
Ne croyez pas, messieurs, que les provinces riches
éprouvent des dommages réels, lorsqu’elles aident les provinces du royaume
moins favorisées. L’avenir les indemnisera sans aucun doute de leurs sacrifices
présents.
Mais ce dont je veux m’occuper particulièrement en
ce moment, c’est des voies et moyens. Si, lors de la discussion du budget de
1836, je n’ai pas réussi dans les propositions que j’ai faites, j’espère que
l’année prochaine la prévoyance sera plus grande qu’elle ne l’a été cette
année.
En attendant, je pense qu’il est urgent d’accorder
au pays dont il est question, c’est-à-dire à toute la lisière qui s’étend le
long de
Toutefois, je ne puis partager l’opinion de MM.
Jullien et de Foere, qui voudraient que l’Etat se chargeât non seulement de la
création du canal, mais encore de son entretien et de celui de l’écluse qui
servira à cet effet.
Il est certain que dans ce
moment-ci les écluses de
Or, d’après les renseignements qui nous ont été
communiqués, l’écluse qui serait établie sur la grande mer donnerait des moyens
d’écoulement d’un mètre et demi de plus que ce qui existe.
Il est incontestable qu’un pareil avantage doit
être payé par les propriétaires des terres qui en profiteront. Je ne sais pas
trop de quelle manière on peut régler la quote-part de chacun d’eux dans
l’entretien des travaux que l’on se propose de faire. C’est un point à régler
ultérieurement.
Mais dès à présent il n’est pas douteux à mes yeux
que les propriétaires doivent se charger, même exclusivement, de l’entretien
dont il est question.
Je m’aperçois que M. le ministre de l’intérieur
n’est pas présent ; je ne sais s’il répondra plus directement aux objections
qui ont été dirigées contre son amendement ; je pense qu’en principe l’article
additionnel doit être adopté.
M. Gendebien. -
Messieurs, ce n’est pas sans répugnance que je reprends une seconde fois la
parole dans cette discussion, qui dégénère en récriminations aigres, en
mesquines jalousies de localités.
Messieurs, je n’avais pourtant rien dit qui pût
autoriser à soulever des questions de localités ; au contraire j’ai écarté
toute pensée de localité ; il me semble que j’ai fait preuve de modération, et
d’idées un peu plus libérales, plus générales que celles qui ont été émises
depuis deux jours avec un acharnement vraiment déplorable.
Depuis deux jours il me semble que vous avez à
décider un grand procès entre le Hainaut et les Flandres ; depuis deux jours on
ne cesse de récriminer contre le Hainaut ; on a prétendu que l’égoïsme de cette
province s’opposait à un travail d’utilité générale ; on me permettra sans
doute de répondre à ces récriminations, et je vous prie de remarquer que je ne
fais que défendre le Hainaut, et que je ne suis nullement l’agresseur.
A entendre les députes des Flandres, le Hainaut est
plus intéressé que les Flandres elles-mêmes à la construction du canal en
projet.
On a été jusqu’à dire, messieurs, que ce canal
était nécessaire pour l’évacuation des eaux de le province du Hainaut, comme si
tout le monde ne savait pas que nos eaux traversent Anvers et le territoire
hollandais : c’est donc la ville d’Anvers et
Je ne conçois donc pas comment les propriétaires
des Flandres peuvent se plaindre, alors même qu’ils reçoivent nos eaux, puisque
ce serait toujours, non pas comme un acte de bienveillance de leur part, mais
en raison de leur position géographique, qu’il ne dépend ni d’eux ni de nous de
changer.
D’un autre côté, la navigation du beau canal
d’Ostende à Bruges et de Bruges à Gand semble ne servir qu’au transport des
produits de la province de Hainaut, et l’on nous fait pour ainsi dire un grief
d’user de ce canal.
Nous déclarons aux habitants des Flandres que s’ils
voulaient nous envoyer autant de bateaux et même un nombre double de celui que
nous leur en envoyons, non seulement nous ne leur en ferions pas un crime, mais
même nous les en remercierions, et nous nous croirions tenus d’en devoir de la
reconnaissance envers eux.
Cessez donc, MM. les députés des Flandres, de nous
considérer comme vos obligés, alors que par notre industrie nous vous faisons
gagner quelque argent, par le transit de nos produits par votre province, et
j’invoque à ce sujet l’opinion de tous ceux qui sont partisans de la loi du
transit ; ils me comprendront mieux que ceux qui font un crime à la province du
Hainaut du transit de ses produits par les Flandres.
Autre sujet de récrimination : le Hainaut est doté
de canaux : le gouvernement a racheté récemment le canal de Charleroy et celui
de
Pour ne pas abuser de votre patience, je vais
parler, messieurs, du canal de Pommeroeul à Antoing :
vous y verrez un exemple à suivre pour la solution de la présente question,
A quel propos le canal de Pommeroeul
à Antoing a-t-il été fait ? Il fut fait par suite de notre séparation de
Est-ce la généralité du pays qui a payé ce canal ?
Non ; ce canal a été mis en adjudication ; c’est un particulier qui l’a entrepris,
et il a obtenu une perception tellement élevée que le gouvernement de Guillaume
jugea utile de le racheter pour le compte de l’Etat ; et après avoir, par cette
opération, doublé le prix du coût réel du canal, s’il avait été fait par le
gouvernement, l’Etat fit encore une bonne spéculation, puisque le gouvernement
provisoire a diminué en 1830 les frais de navigation de 50 p. c. ; et
aujourd’hui le gouvernement retire encore 10 ou 12 p. c. du prix d’achat du
canal. Est-ce une semblable opération que vous proposez pour les Flandres ? Et
pourquoi ferait-on pour les Flandres autrement qu’il a été fait pour le Hainaut
?
Vous êtes privés de l’écoulement des eaux par
Y a-t-il un terme de comparaison entre le canal du
Hainaut et celui proposé par les Flandres ? Que produira le canal de Dam à la
mer et de Zelzaete à la mer ? rien ! tandis que le canal de Pommerœul
produit à l’Etat 10 à 12 p. c. Non seulement le canal en discussion ne produira
rien, mais vous ne voulez pas même vous charger des frais d’entretien de ce
canal. Je vous demande de quel côté sont les exigences, les faveurs, de quel
côté sont les charges ; et pourtant, messieurs, ce ne sont pas les députés du
Hainaut, ce n’est pas moi surtout qui adresse des reproches aux députés des
Flandres ; ce sont eux qui ne cessent de récriminer, ce sont eux qui nous
reprochent précisément le rachat du canal que je viens de prendre pour terme de
comparaison.
Vous vous vantez de votre disposition à adopter
l’emprunt de 6 millions pour construction de route, dans lequel les Flandres,
dites-vous, ne prendront qu’une petite part. Cette observation est encore bien
malencontreuse, bien maladroite. D’abord les Flandres prendront une part aussi
considérable que le Hainaut dans les produits de l’emprunt. Puis, qu’il me soit
permis à ce sujet de vous rappeler que ce sont les bénéfices sur les routes du
Hainaut qui paieront l’exécution de routes nouvelles dans les Flandres et
ailleurs. C’est l’excédant des produits sur les dépenses spécialement dans le
Hainaut, qui contribue pour les deux tiers dans les bénéfices ; et ce sont ces
bénéfices que vous allez employer à payer les intérêts et l’amortissement de
l’emprunt.
Ainsi vous vous faites un mérite de consacrer dans
une loi la spoliation du Hainaut ; vous vous en faites un mérite et vous vous
en prévalez contre le Hainaut
Soyez plus justes, soyez moins déraisonnables.
Quand j’ai parlé la première fois, ai-je récriminé contre les Flandres ? Ai-je
cherché à abuser de la parole ? Et j’ai le droit de dire qu’on en a abusé
contre le Hainaut et dans l’intérêt des Flandres ? Ai-je parlé dans un intérêt
particulier ? Ai-je mis en opposition les intérêts du Hainaut et des Flandres ?
N’ai-je pas, au contraire, adopté, avec trop d’empressement peut-être, la
première idée des députés des Flandres, qui rattachaient le canal à l’intérêt
général pour soutenir que l’Etat devait y contribuer, en raison de cet intérêt
général. Mais cet intérêt a été détruit par les paroles de l’honorable
rapporteur, qui cependant marche d’accord avec les députés des Flandres.
Les députés des Flandres avaient dit que les
travaux à exécuter présenteraient d’immenses avantages pour la défense du pays,
qu’ils rendraient impossible la défense de
Que résulte-t-il de là ? Il en résulte que je suis
autorisé à contester l’utilité générale du canal projeté, que j’avais d’abord
admise.
Avant de passer au second point, qui me paraissait
légitimer l’intervention de l’Etat dans une dépense d’intérêt local,
j’adresserai une interpellation à M. le ministre des affaires étrangères.
Est-il vrai que les propriétaires des polders
soient maintenant privés des moyens d’écoulement de leurs eaux, qui étaient en
leur possession avant notre séparation de
On a dit de plus, pour nous faire adopter la dette,
qu’une partie de cette dette serait affectée à dédommager
Si ces anciens débouchés existent réellement, alors
le gouvernement ne doit plus intervenir. Mais sans attendre la réponse du
ministre, qu’il n’est pas difficile de prévoir, et en supposant comme je le
supposais avant-hier, que les propriétaires des Flandres fussent privés de ce
moyen d’écoulement naturel de leurs eaux, dans ce cas, le gouvernement doit,
comme je l’ai déjà dit, intervenir dans les dépenses du canal. Mais, comme
l’ont reconnu tous les députés des Flandres, ces anciens moyens ne suffisent
plus, parce que les rigoles de mer ou les bras de l’Escaut, dans lesquels
débouchent toutes les rigoles d’assèchement, s’ensablent tous les jours d’une
manière effrayante, et d’un autre côté parce que la dimension des écluses est
insuffisante. En un mot alors même que la séparation de
Dès lors vous devez intervenir dans la dépense ;
d’une part parce que vous reconnaissez que les moyens actuels sont
insuffisants, surtout lorsqu’il y a une année pluvieuse. Vous devez intervenir,
par une ventilation, dans les dépenses à faire, parce qu’il y a utilité
actuelle et prévision, dans un avenir prochain, de la nécessité de pourvoir à
l’écoulement par une autre voie que celle que vous possédiez avant 1830.
D’un autre côté, il est démontré que par suite du
nouveau moyen d’écoulement des eaux il y a des terrains qui, à raison de leur
humidité naturelle, ne produisent que de faibles récoltes, tandis qu’ils
deviendront très productifs par la construction du canal. De ce chef encore
vous devez contribuer ; l’équité l’exige. D’ailleurs la loi de 1807, relative
au dessèchement des marais, doit être appliquée aux propriétaires qui profiteront
du nouvel écoulement des eaux des Flandres.
Un député de Bruges, mon honorable ami M. Jullien,
a paru croire que l’honorable M. Dumortier avait insisté principalement sur le
dessèchement.
Le canal, tel qu’on va le faire, desséchera
nécessairement des terrains maintenant submergés ou humides. Sous ce rapport,
la loi relative au desséchement des marais est très applicable. Ainsi,
l’honorable M. Dumortier ne s’est pas plus trompé que les autres membres de
cette assemblée. Quoique n’appartenant pas aux provinces des Flandres, nous
connaissons un peu aussi quelles sont les règles en cette matière.
Les polders sont des terrains conquis sur la mer,
au moyen de digues qui empêchent les marées de recouvrir le sol. Il en résulte
que tous les terrains en dessous du niveau des hautes marées, redeviendraient
mers si l’on n’avait pas de digues. De là nécessité d’entretenir les digues ;
mais au profit de qui ? des propriétaires de ces
terrains bas ; et par conséquent à charge de qui ? de
ceux qui en profitent, et non à la charge des terrains élevés qui n’ont pas à
craindre les envahissements de la mer, et dont les eaux s’écoulent par leur
pente naturelle dans la mer.
Mais pour les terrains qui se trouvent en-dessous
des hautes marées, il faut des écluses, il faut des travaux d’art. C’est la
position où se trouvent certaines parties des Flandres. Des propriétaires ont
conquis sur la mer des terrains qui redeviendraient mers sans les digues et les
travaux hydrauliques pour empêcher l’envahissement de la mer et procurer à
marée basse l’écoulement de leurs eaux. Voilà la théorie bien simple des
polders.
Il s’est trouvé des capitalistes qui ont conquis
des terrains sur la mer. Ils ont bien fait, dans l’intérêt public, et je les en
félicite ; mais ils ont mieux fait encore dans leur intérêt particulier, car
ils ont obtenu, et souvent à très peu de frais, des terrains très productifs et
plus productifs que tous nos terrains du Hainaut, mais ils les ont conquis avec
toutes les chances attachées à leur situation, et sans lesquelles il n’y aurait
point de compensation avec les avantages qu’ils en retirent.
Puisque j’ai prononcé le mot du Hainaut, je demande
si nous avions, par exemple, des marais à dessécher, et nous en avons de
considérables, si nous demandions à l’Etat 3 ou 4 millions, dans l’intérêt
général, dans l’intérêt du trésor, dans l’intérêt de la salubrité, de
l’agriculture, des consommateurs, que répondriez-vous ? Vous répondriez :
« Ces assèchements sont dans l’intérêt des propriétaires de ces marais ;
si vous n’avez pas de capitalistes pour assécher vos marais, eh bien, tant pis
pour vous ! »
Maintenant qu’il s’agit de terrains dans la même
situation, il faudrait faire la même réponse, mais il faut en revenir à
l’équité et aux règles de justice.
Je répète ce que j’ai dit il y a deux jours, et sur
quoi j’ai appelé des explications franches. S’il est vrai que les propriétaires
des polders soient privés de l’écoulement de leurs eaux, tel qu’il existait
avant notre séparation, et cela par le fait du gouvernement qui n’a pas exigé
l’exécution des traités, le gouvernement est tenu de les indemniser ; car, à
bonne équité, il ne faut pas que quelques particuliers souffrent des calamités
de la guerre.
Mais s’il est reconnu que le nouveau travail
présenté procurera des avantages aux propriétaires, ils doivent contribuer à la
dépense, parce que s’il est juste de les placer dans la même condition, ils
n’ont pas le droit d’être placés dans une position meilleure aux dépens de la
généralité.
Vous avez reconnu vous-mêmes que vous seriez
obligés de faire plus tard le travail que le gouvernement va exécuter. Pourquoi
dès lors ne pas établir par une ventilation votre part contributive dans ce
travail.
S’il n’y avait pas de reproche à adresser au
gouvernement pour défaut d’exécution de traités, ou si nous n’avions pas été
séparés de l’Escaut par la perte de
Je porte le défi le plus formel d’avancer une seule
raison plausible pour faire faire dans ce cas le canal par le gouvernement.
Aujourd’hui, par suite des circonstances, il y a une nécessité de faire un peu
plus tôt que vous ne l’auriez fait vous-mêmes. Pourquoi alors ne
contribueriez-vous pas dans la dépense, puisque vous avez dit que les moyens
actuels d’écoulement avec
Je craindrais d’abuser de vos moments ; je vais
passer à l’examen des amendements de MM. de Theux et Lejeune.
Je ne puis admettre l’amendement de M. le ministre
de l’intérieur, parce qu’il est trop vague ; et je ne saurais conseiller aux
wateringues de l’adopter, car il bouleverse toute la législation sur cette matière
importante et difficile. Il prête d’ailleurs beaucoup trop à l’arbitraire, et,
sous ce rapport, il va trop loin.
Quant à la question de savoir si, le travail une
fois fait, c’est aux propriétaires à pourvoir aux frais d’entretien, il me
semble qu’à cet égard il ne peut y avoir aucun doute. Les wateringues sont
chargés actuellement de toutes ces obligations, et, sous ce rapport,
l’amendement de M. le ministre de l’intérieur ne va pas assez loin. Il me
semble que les wateringues doivent non seulement entretenir les travaux qui
remplaceront les travaux existants, mais que comme ils auraient été plus tard
dans la nécessité de faire eux-mêmes toute la dépense, il est de toute justice
qu’ils y contribuent au moins pour une partie, d’autant plus qu’il y aura
bénéfice de plus-value pour presque toutes les terres.
Je trouve l’amendement de M. Lejeune plus explicite
; si on l’exécutait de bonne foi, je crois qu’il pourrait, sauf une
modification, suffire. Mais je ne puis l’admettre, parce que je ne puis admettre
dès à présent que les propriétaires des poldres seront sublevés
de toute contribution quelconque pour la construction ; je ne puis admettre que
les propriétaires ne prennent part qu’à une partie de l’entretien. Cette
dépense doit être tout entière à leur charge.
J’aimerais mieux un amendement rédigé de la manière
suivante :
« La part pour laquelle les intéressés devront
contribuer à la construction et à l’entretien du canal sera ultérieurement
fixée par la loi. »
Je serais disposé à admettre une proposition conçue
dans ce sens, à moins que la suite de la discussion ne prouve que je me suis
trompe sur les intentions de la chambre, comme en prenant la parole, je me suis
trompé sur les intentions de ceux qui ont parlé après moi.
- La discussion générale est close.
La chambre passe à la discussion des articles.
Discussion des articles
Article
premier
« Art. 1er. Il sera exécuté aux frais du
trésor public un canal de Dam à la mer.
« Les dépenses de cette exécution seront couverts au
moyen des fonds à provenir d’un emprunt qui sera ultérieurement réglé par la
loi. »
M. Andries. - Le
nouvel article présenté par M. le ministre de l’intérieur a interverti tout le
projet antérieur. Les rapports de la section centrale, des ingénieurs et de la
commission des travaux publics se sont occupés du canal de Zelzaete à la mer.
Aujourd’hui le cercle est singulièrement rétréci.
Si l’on posait le principe que le canal
d’écoulement sera exécuté de Zelzaete jusqu’à la mer, nous pourrions nous
entendre sur les conséquences qui doivent en résulter.
J’ai toujours mis de la franchise dans toutes mes
paroles. Je crois que la chambre l’aura appréciée jusqu’à présent. Je crois que
c’est ainsi que les députes d’une nation essentiellement franche et loyale
doivent comprendre leur mandat. C’est ainsi que je désire que les intérêts
généraux du pays soient traités.
Nous ne sommes pas devant un tribunal, et nous
devons nous garder de mettre en avant des chicanes dont rougirait le plus mince
avocat.
Tout ce que j’ai dit prouve la nécessité d’exécuter
le canal et porte davantage sur la section de Zelzaete à Dam que sur celle de
Dam à la mer. Sans doute la section de Dam à la mer est la première quant à
l’exécution. Quant à la décision du principe, c’est la section de Zelzaete qui
doit obtenir le premier rang.
J’ai fait valoir des considérations politiques. Je
désire qu’on ne les perde pas de vue. Le gouvernement hollandais est dans une
position très avantageuse que nous devons lui enlever.
Le système dans lequel est entré le gouvernement
autrichien, dans le traité des barrières, ce système existe encore. L’art 17 de
ce traité contient une clause pénible pour un Belge. L’Autriche consentait à
céder ultérieurement à
Il est certain que le canal de Zelzaete à Dam
enlèvera à
M. de Puydt a bien dit que dans le système
stratégique actuel les armées ne s’arrêtent pas devant des canaux. Je conçois
que le canal de Zelzaete ne serait pas fait pour arrêter une armée.
Mais c’est pour empêcher les Hollandais de faire
des excursions sur notre territoire, ce qu’ils font toujours pour faire
diversion pendant que leur armée d’opération agit sur le Limbourg ou la
province d’Anvers. Quelques jours avant les tristes événements de 1831, nous
avons vu les garnisons de l’Ecluse et des autres places de cette frontière faire
des sorties fréquentes pour nous obliger à conserver un corps assez fort sur
tous ces points et affaiblir l’armée que nous devions leur opposer. Si nous
avions un canal, ces excursions ne nous inquiéteraient plus autant ; en rompant
les ponts, un ou deux bataillons suffiraient pour garder la frontière.
On pourrait ainsi neutraliser sur ce point les
opérations de nos ennemis ; les fortifications sont détruites, et il n’est pas
à croire que pour conserver ce petit lambeau de terre, les Hollandais fassent
le sacrifice d’entourer de nouveau de remparts leurs villes frontières.
Dans la discussion générale, on a parlé de
l’appréciation des terres par les ingénieurs. Il est vrai que les terres à
exproprier ont été évaluées à trois mille francs le bonnier. Mais personne
n’ignore que ces évaluations ne sont jamais inférieures à la valeur réelle.
Mais vous vous rappelez qu’il a été distribué un
mémoire au mois de juin 1834, accompagnant une pétition signée par tous les
propriétaires de cette partie de
On a invoqué très souvent, dans la discussion,
l’opinion du directeur général des grandes wateringues de
Entre autres choses, il y était dit : « Ce canal
aura en outre l’inappréciable avantage de neutraliser les inondations ennemies
et de nous donner une ligne de défense qui manque absolument sur cette
frontière. »
Dans un autre passage on disait : « En outre,
il a l’avantage de compléter le système de l’administration française par la
mise en mouvement des eaux stagnantes, et de faire ainsi cesser une cause
d’insalubrité. »
Il est possible que depuis lors M. Dubosch ait
changé d’opinion ; mais ce changement, après s’être prononcé d’une manière
aussi formelle, doit être attribué à des causes étrangères à la réalité du
projet.
Dans la pétition des habitants de Bouchaut insérée au Moniteur,
il est dit : « La chambre ne doit pas ignorer les motifs pour lesquels M.
Dubosch fait ses efforts pour empêcher la construction du canal. Il est
directeur des grandes wateringues, ce qui lui donne une influence considérable,
et il voit que cette direction si importante va lui échapper par la
construction du canal. C’est peut-être là la cause de son changement
d’opinion. »
M. Dumortier, en abondant si vite dans la nouvelle
opinion de M. Dubosch, devait soupçonner qu’il allait embrasser une mauvaise
cause.
Dans la discussion générale on est convenu que les
polders avaient le droit de réclamer ce que la révolution leur avait fait
perdre, mais on a dit que la position des propriétaires de ces polders ne
devait pas être améliorée.
Nous sommes assez justes, assez loyaux, assez
équitables pour en convenir. Nous demandons que ce principe soit consacré dans
la loi. C’est pour cela que je propose qu’on décrète définitivement que le
canal sera exécuté de Zelzaete à la mer.
Je proposerai l’amendement suivant :
« Art. 1er. Il sera exécuté aux frais de
l’Etat un canal d’écoulement de Zelzaete à la mer du Nord.
« Art 2. L’exécution commencera par la section
de Dam à la mer.
« Les dépenses de cette première section,
évaluées à un million huit cent mille francs seront couvertes par des bons du
trésor. »
« Art 3. Après l’achèvement de tous les
travaux, le législateur fixera la somme à verser annuellement au trésor par les
propriétaires des terres qui déchargeront leurs eaux dans ledit canal.
« Cette somme sera répartie par centimes
additionnels sur le revenu imposable de chaque propriété, et perçue par les
receveurs ordinaires des contributions directes. »
J’ai fait ce changement parce que je crois que
l’emprunt proposé par le ministre ne pourra être discuté qu’à une époque
éloignée et qu’il est urgent de commencer les premiers travaux le plus tôt
possible. L’augmentation de la dette flottante qui en résultera ne sera pas
considérable.
C’est seulement pour la première section qu’on
emploiera ce moyen ; pour la seconde, il faudra un nouveau crédit et une
nouvelle discussion pour fixer le moyen qu’on adoptera.
M.
le président. - M. Gendebien propose un sous-amendement à l’amendement
proposé par M. Lejeune.
M. Lejeune a proposé un amendement ainsi conçu :
« La part pour laquelle les intéressés devront
contribuer à l’entretien du canal sera ultérieurement fixée par la loi. »
M. Gendebien sous-amende ainsi cette proposition :
« La part pour laquelle les intéresses devront
contribuer à la construction et à l’entretien du canal sera ultérieurement
réglée par la loi. »
M. Verdussen. -
Nous discutons un projet qui a été improvisé pendant la discussion même ; comme
ce projet n’a pas passé par l’examen des sections, les objections dont il a été
l’objet n’ont rien d’étonnant.
M. Andries vient de proposer de nouveaux articles
qui sont différents de ceux présentés par le ministre et qui peut-être valent
mieux. Cependant il m’est impossible de comprendre toute la portée de la loi
formulée par M. Andries ; toutefois, je préfère son article premier à celui que
le ministre nous avait soumis.
Nous trouvons dans l’article premier du ministre
qu’il sera construit un canal de Dam à la mer aux frais du trésor public. Mais
ce canal ne sera qu’une fraction d’un canal plus étendu ; car lorsque je
consulte le rapport qui nous a été fait par M. de Puydt, je trouve que
la partie ouest de
Lorsque le ministre n’a proposé qu’une fraction du
canal, il a ajouté que la dépense d’exécution serait couverte par le moyen de
fonds à provenir d’un emprunt ; si donc plus tard on voulait exécuter la
seconde partie de Dam à Zelzaete, il faudrait un second emprunt ; mais je crois
qu’il vaut mieux suivre l’idée de M. Andries, c’est-à-dire de faire un canal de
Zelzaete à la mer, et de la mer par la partie de Dam à la mer ; car alors
l’emprunt s’appliquerait sur la totalité du canal.
Je ne partage pas l’opinion de M. Andries de
pouvoir faire couvrir ces dépenses au moyen de bons du trésor ; déjà la masse
des bons du trésor est imposante, et peut-être trop forte pour ne pas
compromettre les finances du pays si, par une crainte fondée ou non, son crédit
était altéré sur les places cambistes de l’Europe.
Cependant je vous avoue que je n’oserai me prononcer
sur l’article premier de cette loi, si je n’ai pas mon apaisement sur l’article
2. Et c’est par motion d’ordre que je proposerai de commencer la délibération
par l’art. 2 ; car si j’adoptais l’article premier, je me trouverais peut-être
dans le cas de voter sur le même article de deux manières différentes : je
pourrais en effet l’adopter d’abord ; mais si on ne joignait pas une seconde
section au canal, je serais obligé, selon moi, de le rejeter ensuite : mon vote
sur l’article premier dépend nécessairement de l’article 2. S’il était établi
dans l’art. 2 tel qu’il a été présenté par le ministre, que les parties
intéressées des Flandres et des wateringues ne doivent pas contribuer à la
construction, je voterai contre l’article premier et contre toute la loi.
Depuis que M. Gendebien a répondu à MM. de Foere et
Jullien, je crois qu’il a été prouvé à satiété que les débouchés existants
actuellement au pouvoir des Hollandais, quoique ouverts, sont insuffisants pour
l’écoulement des eaux des Flandres, et que, par conséquent, tout ce que l’on
nous a dit relativement à l’interruption de la navigation sur le canal de
Bruges à Ostende ne vient pas du fait des Hollandais, puisque les Hollandais ne
ferment pas les écluses.
Les députés des Flandres ont confondu deux choses,
la fermeture des écluses et leur possession par les Hollandais. C’est la seule
possession par les Hollandais qui nuit aujourd’hui aux Flandres et aux
wateringues, car depuis deux ans toutes ces écluses sont ouvertes et sont
desservies comme s’il s’agissait de l’intérêt même des Hollandais ; cependant
il a fallu se servir encore du canal de Bruges à Ostende pour l’évacuation des
eaux. C’est là une preuve que les débouchés, fussent-ils encore à
J’aurais pu présenter un projet de loi conforme à
mon opinion ; j’avais eu l’idée de faire supporter par le gouvernement
l’intérêt de l’emprunt que l’on doit créer pour couvrir les dépenses du canal,
tandis que le capital aurait été remboursé par les parties intéressées dans
l’intervalle de 20 ou 30 années, afin de ne pas les gêner ; mais je n’en ferai
pas de proposition formelle, car ce serait une nouvelle loi à faire, laquelle
devrait être mûrement examinée dans les sections et par la section centrale.
Je dis donc qu’il faut
décréter le canal tout entier de Zelzaete à la mer, qu’il faut n’en exécuter
que la partie de Dam à la mer ; mais en même temps j’ajoute que je voudrais
voir discuter l’article 2 avant l’art. 1er, et j’en fais la motion formelle.
M. le président. -
Voici un nouvel amendement présenté par M. Dumortier :
« Un tiers de la dépense nécessitée pour la
construction du canal sera fournie par le trésor ; un tiers par les provinces
que le canal traverse ; un tiers par les propriétaires des terres qui
écouleront leurs eaux par le canal.
« Un arrêté royal déterminera le mode de
répartition en prenant pour base le régime actuellement existant dans les
Flandres et dans les wateringues. »
M. Dumortier. -
J’aurai peu de chose à dire pour développer l’amendement que j’ai déposé sur le
bureau. Cet amendement repose sur les principes admis par chacun de nous et par
la constitution. Les travaux d’art qui intéressent soit les provinces, soit les
communes, soit les particuliers, sont faits avec leur intervention dans les
dépenses.
Lorsque l’on construit une route, on exige toujours
que la commune intervienne pour une part quelconque dans la dépense : c’est
ainsi que la ville de Malines vient de contribuer pour une somme de cent mille
francs pour un pavé qui se fait près de son territoire ; qu’un village vient
d’intervenir pour 35 mille francs pour un pavé ; que la commune de Lierre vient
d’intervenir pour 45 mille francs pour la continuation de pavés sur son
territoire. La petite ville de Renaix, pour obtenir une chaussée sur Tournay, a
offert de vendre jusqu’à la dernière de ces propriétés pour coopérer à sa
construction.
Il a été reconnu généralement enfin que les parties
intéressées devaient participer aux dépenses de la chose dont elles profitent ;
eh bien, c’est ce principe, que vous avez appliqué même à des constructions
productives, qu’il faut appliquer à plus forte raison aux constructions
improductives telles qu’un canal d’écoulement.
Il ne suffit pas que les particuliers aient à leur
charge les dépenses d’entretien ; il faut aussi qu’ils interviennent dans la
dépense de ce canal qui doit améliorer leurs terres ou en augmenter la valeur.
Rappelez-vous ce qu’ont dit les députés des Flandres : les eaux du Zwyn et du Braekman sont élevées
d’un mètre au-dessus de leurs terres.
Par un écoulement d’un mètre en dessous de
l’écoulement actuel, vous allez considérablement améliorer tous les terrains
qui écoulent leurs eaux par le Zwyn et le Braekman.
L’honorable M. Andries a dit que, dans l’état
actuel, beaucoup de terrains n’étaient propres qu’à la culture des marsages et nullement aux cultures d’automne, à raison de
ce que ces terrains étaient humides pendant une partie de l’hiver. Maintenant,
au contraire, il résultera de leur assèchement une plus-value dont l’Etat ne
doit pas faire cadeau aux propriétaires ; ceux-ci doivent intervenir dans la
dépense. Or le quantum que je propose n’est pas considérable, quand on fait
attention aux immenses avantages que la construction du canal doit procurer aux
Flandres. Ce canal doit dessécher et améliorer prodigieusement
Dans l’amendement, que j’ai proposé, j’ai trouve un
autre avantage, c’est que le trésor n’intervient a priori que pour un tiers de
la dépense. Dès lors vous n’avez pas besoin d’adopter le système de l’honorable
M. Andries, consistant à autoriser la création de 1,800,000
francs de bons du trésor.
Quanta au troisième tiers, je n’ai cru pouvoir
mieux faire que de rester dans les termes de l’art. 113 de la constitution,
dont le deuxième paragraphe porte : « Il n’est rien innové au régime
actuellement existant des polders et des wateringues, lequel reste soumis à la
législation ordinaire. »
Mais veuillez
remarquer que, dans l’état actuel, il est impossible d’admettre l’amendement de
M. Andries, car vous ne pouvez sans danger autoriser une émission de 1,800,000 fr. de bons du trésor. M. le ministre des finances,
dès l’ouverture de la discussion, a dit avec beaucoup de raison que l’émission
actuelle de bons du trésor ne pouvait pas être considérablement dépassée ; car
déjà l’on a été obligé d’augmenter d’un 1/2 p. c. l’intérêt des bons du trésor
; une nouvelle émission nécessiterait une nouvelle augmentation d’intérêt ; et
l’augmentation ne porterait pas seulement sur les 1,800,000 fr. que vous
émettez, mais encore sur les 25 millions déjà émis.
Je crois donc que par les considérations que j’ai
développées, vous devez admettre le système que j’ai proposé.
M. C. Rodenbach
(pour une motion d’ordre.) - J’ai demandé la parole pour proposer le renvoi à
la commission des amendements proposés.
Plusieurs nouveaux systèmes ont été présentés :
l’un par l’honorable M. Andries, l’autre tout différent par l’honorable M.
Verdussen. M. le ministre de l’intérieur a également proposé des amendements.
Je crois que pour la régularité de la discussion, il serait à désirer que ces
amendements fissent l’objet d’un rapport de la commission.
M. Desmet. - Je crois que
l’honorable M. C. Rodenbach se trompe dans de très bonnes intentions. Il croit
qu’après un rapport de la commission, il n’y aura plus d’amendements. Il y a
lieu de croire au contraire qu’il y en aura encore. Je pense donc qu’il vaut
mieux continuer la discussion.
Un
membre. - On parle de la commission ; mais il n’y a pas
de commission.
M. C. Rodenbach.
- Mais rien n’est plus facile que d’en nommer une. Et c’est indispensable. Sans
cela, placés entre 5 ou 6 propositions différentes, vous êtes dans un dédale
dont vous ne sortirez pas. Il y a impossibilité d’arriver ainsi à un résultat
réel et utile pour le pays.
M.
Gendebien. - L’honorable M. C. Rodenbach se plaint de l’irrégularité de
la discussion. Mais à qui la faute ? On a présente dans l’intérêt des Flandres
une proposition vague et indéterminée sous tous les rapports. Dès le
commencement nous avons dit qu’il fallait un projet de loi. A la fin de la
première séance, le ministre a présenté un article ; à la troisième il a
présenté un amendement ; ce n’est qu’à la quatrième que l’on s’aperçoit qu’il
faut un projet de loi, et que sans cela la discussion ne peut arriver à un bon
terme.
Que l’on fasse donc ce que nous avons demande dès
la première séance, maintenant que l’on reconnaît la nécessité de revenir sur
ce que l’on a fait.
Quant à l’irrégularité dont on se plaint, j’en repousse
le reproche, car assurément elle n’est pas de notre fait, nous l’avons signalée
dès l’ouverture de la discussion.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je dois également repousser le reproche
que l’honorable préopinant semble m’adresser.
Vous savez que c’est au budget présenté par mon
prédécesseur, que la somme dont il s’agit a été pétitionnée.
La section centrale a examiné le budget. Dans son
rapport elle a jugé à propos d’en extraire l’article relatif à la construction
du canal de Zelzaete et de le renvoyer à une commission spéciale. C’est sur le
rapport de cette commission que la discussion s’est ouverte. Je me suis borné
ensuite à proposer une rédaction que l’état de la discussion nécessitait.
Je repousse donc le reproche que l’honorable
préopinant veut bien m’adresser.
- La chambre est consultée
par appel nominal sur la proposition de M.
C. Rodenbach.
63 membres prennent part au vote.
1 membre s’abstient.
33 adoptent.
30 rejettent.
En conséquence, les
amendements seront renvoyés à une commission.
M.
F. de Mérode. - Je me suis abstenu parce que je désire que l’on exécute
les travaux le plus promptement possible, et qu’en même temps je ne sais pas
quels sont les voies et moyens ouverts pour cette construction.
M.
Dumortier. - Je propose de former une commission de 5 membres qui
n’auront pas pris part à la discussion.
M. Van Hoobrouck. - Je propose de former
une commission spéciale formée de 9 membres.
M.
de Jaegher. - La proposition de M. Dumortier n’est pas admissible. Les
orateurs qui ont pris part à la discussion, sont ceux qui sont le plus au fait
de la question. Pourquoi les exclure ?
M. Jullien. -
J’ajouterai à ce que dit M. de Jaegher, qu’il ne faut pas prendre la parole
pour prendre part à une discussion ; il suffit de voter.
M.
de Renesse. - Je proposerai de faire nommer la commission de 9 membres
par la chambre à la majorité relative.
M.
Dumortier. - Que le bureau nomme un membre par province.
M. Van Hoobrouck. - J’ai entendu que la
commission se prononcerait sur les amendements, mais non pas qu’elle ferait un
nouveau travail. Si elle fait un nouveau travail, je retire ma proposition.
M.
Legrelle. - Dans ce cas, je la fais mienne.
M. A. Rodenbach.
- Si la proposition de nommer un membre par province était admise, il n’y
aurait que les deux députés des Flandres qui voteraient pour le projet quand on
en viendrait aux voix. (Réclamations.)
C’est une supposition que je fais. Il faut éviter que ce cas ne se présente.
M. Dubus. -
L’observation de M. Rodenbach prouve seulement qu’il serait dangereux de nommer
une commission à la majorité relative. Vous obtiendriez ainsi une commission
qui pourrait représenter une véritable minorité.
Je ne puis admettre ni l’un ni l’autre des deux
modes de nomination que l’on propose.
Un grand nombre de membres. - Que le bureau nomme les
membres de la commission.
- Sur la demande de
plusieurs membres, la chambre procède par division au vote de la proposition.
La partie de la proposition tendante à faire nommer
une commission de neuf membres par le bureau est mise aux voix et adoptée.
M. Devaux. - Je
m’oppose à ce qu’on mette aux voix la seconde partie de la proposition ; il n’y
a ici que des députés de la nation, et non pas des députés de provinces. Je ne
veux pas qu’on insère un terme semblable dans des dispositions législatives.
Je demande la question préalable.
M. Dumortier. -
Messieurs, il n’y a rien d’inusité ni d’inconstitutionnel dans la manière dont
on propose de composer la commission. Il existe à cet égard des précédents ; je
rappellerai notamment que lors de la discussion du projet de loi relatif à la
péréquation cadastrale, il a été nommé une commission composée de deux membres
par province. (Aux voix ! aux voix !)
- La question préalable proposée par M. Devaux est
mise aux voix et adoptée.
En conséquence, la chambre décide qu’il n’y a pas
lieu de délibérer sur la seconde partie de la proposition.
La séance est levée à 4 heures.