Accueil Séances plénières
Tables
des matières Biographies Livres numérisés
Bibliographie et
liens Note
d’intention
Séance précédente
Séance suivante
Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du vendredi 30 janvier 1835
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre
2)
Projet de loi portant le budget du département de l’intérieur pour l’exercice
1835. Discussion des articles.
a) Lettres, arts et sciences. Monuments de la place des Martyrs (de Roo, de Theux, Rogier,
de Roo, H. Dellafaille, de Theux), brevets d’invention (Verdussen,
de Theux), subsides aux communes pour améliorations
sanitaires (Rogier, H.
Dellafaille, de Roo, Rogier)
b) Archives du royaume. Projet de dépôt à la porte de Hal (de Theux, de Brouckere, H. Dellafaille, Legrelle, de Brouckere, Dumortier, H. Dellafaille, de Theux, de Brouckere, de Theux, Legrelle, Dumortier, Desmanet de Biesme, Gendebien, de Roo, Gendebien, de Brouckere, de Theux, de Roo, de Brouckere, Desmet, de Theux), dépôt d’archives
dans les provinces (de Brouckere, de Robaulx)
c) Frais de célébration des fêtes nationales et/ou construction d’un
palais des arts, des sciences et de l’industrie (Legrelle,
de Theux, Gendebien, Rogier, Desmanet de Biesme, de Brouckere, de Theux,
(+cour des comptes) Dumortier, (+cour des comptes) Rogier, H. Dellafaille, (+cour
des comptes) Gendebien et de
Brouckere, Rogier, Dumortier)
d) Ordre des travaux de la chambre : sûreté de l’Etat (de Theux), (de Brouckere),
canal d’écoulement dans les Flandres (Dumortier)
e) Indemnités aux victimes de l’agression hollandaise (Legrelle, Gendebien, Dumortier)
f) Travaux aux rives de
(Moniteur belge n°31, du 31 janvier 1835)
(Présidence de M. Raikem.)
La séance est ouverte à
une heure.
M.
de Renesse procède à l’appel nominal.
M.
Brixhe donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. Il est
adopté.
M.
de Renesse donne lecture de l’analyse des pièces suivantes adressées à
la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le conseil charbonnier
représentant 60 sociétés houillères du bassin de Charleroy demande que le
personnel du tribunal de cette ville soit augmenté d’une chambre
entière. »
« Même demande de
la chambre de commerce de Charleroy. »
- Renvoi à la commission
des pétitions chargée de faire le rapport dans la huitaine.
________________
« Le sieur S.-C.
Zoude, ancien jurisconsulte à Namur, renouvelle sa demande tendante à ce qu’il
soit nommé une commission chargée de la liquidation des sommes avancées à titre
de prêt au gouvernement autrichien, connues sous le nom d’engagères. »
- Renvoi au ministre des
finances, pour rappel aux explications demandées par la chambre, à l’égard des
pétitions déjà antérieurement adressées à ce ministre.
« La régence de Dinant demande que le
personnel du tribunal de première instance qui siège dans cette ville soit
augmenté. »
- Renvoi à la commission
des pétitions chargée d’en faire un rapport dans la huitaine.
________________
M.
Frison. - Malgré l’espèce de défaveur avec laquelle vous avez accueilli
hier la demande de M. Pirson, je viens encore vous proposer aujourd’hui le
renvoi immédiat à M. le ministre de la justice des deux pétitions du comité
houiller et de la chambre de commerce de Charleroy, relative à l’augmentation
du personnel du tribunal de cette localité. Vous avez récemment adopté le
renvoi à M. le ministre de la pétition du barreau qui traitait le même objet.
Les deux dernières ne sont que le complément de la précédente et ne peuvent en
être disjointes.
M. Pirson. - Il
y a environ 15 jours une pétition semblable a été adressée à la chambre, et
vous l’avez renvoyée à M. le ministre de la justice. Hier je vous ai fait la
même demande relativement à l’augmentation du personnel du tribunal de Dinant,
et vous n’y avez pas accédé ; et cependant M. Frison vous demande une chose
pareille à l’égard du tribunal de Charleroy. J’appuie la proposition de cet
honorable membre et vous prie de revenir sur la décision que vous avez prise
hier. Il y a identité parfaite dans les deux positions.
M.
Verdussen. - Je croyais que cette question avait été décidée hier sur
la demande de l’honorable M. Pirson.
J’avais fait observer à l’assemblée qu’il ne me paraissait pas convenable
d’envoyer directement à un ministre des pétitions dont la chambre n’avait pas
connaissance, mais qu’il était bien mieux de les renvoyer à la commission des
pétitions, afin qu’elle les examinât. Je crois qu’on ne peut pas ainsi éluder
l’examen de la chambre.
M. Dumont. - Ce qui a été décide à l’égard du
tribunal de Charleroy est réellement une exception a cause de l’urgence. C’est
sans doute ce qui a porté la chambre à renvoyer directement la pétition à M. le
ministre de la justice. Aujourd’hui que des pétitions semblables se présentent
à la chambre, il me paraît extrêmement naturel de leur faire subir le même
sort. Ce que je demande, c’est dans le but que les pétitions sur le même objet
soient dans le même dossier.
J’appuie donc la
proposition de l’honorable M. Frison et je ne m’oppose point à celle de
l’honorable député de Dinant.
M. Pirson. - Si c’est par mesure de forme que vous
voulez le renvoi à la commission des pétitions de la demande dont il s’agit je
le veux bien. Mais qu’est-ce que la commission vous apprendra de nouveau ? Rien
que vous ne sachiez déjà, c’est-à-dire que le tribunal de Dinant sollicite une
augmentation de personnel. Cependant, si vous voulez sauver la forme, j’y
consens ; mais fixons un jour positif pour que la commission des pétitions
fasse son rapport.
M. de Robaulx. - Je ne sais pas s’il s’agit à présent de
revenir sur la décision prise à l’égard de la pétition de l’honorable M.
Pirson. Certes, en thèse générale, je ne m’oppose pas à ce qu’une pétition,
toute d’utilité locale, soit renvoyée directement à un ministre ; mais je pense
que, par trop de sollicitude, souvent on manque l’effet. Qu’arrive-t-il dans le
cas dont il s’agit ? C’est que le ministre reçoit une pétition qui n’est pas
examinée, pas appuyée par la chambre ; le ministre la reçoit comme si cette
assemblée lui avait servi de bureau de poste. D’après le règlement, la
commission doit examiner la pétition et en faire un rapport ; alors elle arrive
au ministre, qui y prête plus d’attention et y attache plus d’importance.
Quant à la pétition de
Charleroy que j’appuie parce que je reconnais la nécessité de l’accueillir,
elle est déjà au ministère de la justice. Le ministre, par ses rapports avec
les parquets, doit connaître l’urgence de la demande qu’elle renferme. Je
désire, moi, que la commission des pétitions s’occupe de celle qui vient d’être
adressée, que sous huitaine elle en fasse l’objet d’un rapport spécial et qu’on
y joigne la pétition de Dinant. Par là on aura procédé convenablement ; je
demande donc que la nouvelle pétition de Charleroy soit renvoyée à la
commission des pétitions et qu’un seul rapport soit fait pour cette demande et
celle du tribunal de Dinant.
M. Frison. - Je ne m’oppose pas à la proposition
de mon honorable ami M. de Robaulx.
Je ferai seulement observer que la dispensation de la justice ne peut pas être
envisagée comme un intérêt local ; la dispensation de la justice est toujours
d’un intérêt général, elle découle de nos institutions ; il n’y a donc point
dans ce cas d’intérêt de localité.
M. de Robaulx. - Je ne dis pas le contraire.
M.
Pirson. - Je prie M. le ministre de dire à la chambre ce qui est à sa
connaissance relativement à la demande d’augmentation du personnel du tribunal
de Dinant. Vous apprendrez par là, messieurs, que ce n’est pas la demande de
Charleroy qui a donné à Dinant l’idée de faire une demande conforme à celle qui
a été adressée par la première de ces deux villes.
M.
le ministre de la justice (M. Ernst). - Je confirme ce qu’a dit
l’honorable préopinant. Il y a, à mon ministère, des réclamations faites depuis
longtemps par la ville de Dinant, à l’effet d’obtenir une augmentation dans le
personnel de son tribunal.
- La proposition de M.
de Robaulx est adoptée ; en conséquence le renvoi est ordonné à la commission
des pétitions, avec demande sous huitaine d’un rapport spécial qui comprenne
les demandes de Charleroy et de Dinant.
M.
Fallon. - Plusieurs pétitions ont été adressées à la chambre, tendant à
obtenir la liquidation des médianats et engagères
fournis à la maison d’Autriche pour emplois qui ont été supprimés lors de la
réunion de
Ces pétitions furent
renvoyées à la commission des pétitions qui ordonna le renvoi de ces requêtes à
M. le ministre des finances, avec demande d’explications. Cela se passait en
juin 1834. Un des pétitionnaires s’adresse aujourd’hui la chambre, pour savoir
si ces explications lui sont parvenues et pour que, dans le cas contraire, elles
soient réclamées. Comme il n’a reçu aucune explication de M. le ministre des
finances, c’est à la chambre à faire exécuter sa décision. Je désire donc que
par forme de rappel on demande à M. le ministre des finances les explications
dont il s’agit, en rappelant que des explications sur des pétitions précédentes
ont déjà été demandées sans résultat.
- La proposition de M.
Fallon est adoptée.
Discussion des articles
Chapitre XII. Lettres, arts et sciences
M.
le président. - L’article 1er du chap. XII, intitulé : Lettres,
sciences et arts, ayant été adopté hier au chiffre de 191,740 fr., la
discussion est ouverte sur l’art. 2 : Monument de la place des Martyrs.
M. de Roo. - Vous voyez, messieurs, que la section
centrale a demandé des explications à M. le ministre de l’intérieur à ce sujet,
et il a répondu que MM. … et Geefs avaient été
chargés de fournir un nouveau projet. Je conseille à M. le ministre, avant
d’adopter ce projet, d’ouvrir un nouveau concours auquel concourront de
nouveaux artistes, et d’accorder une prime au meilleur qui sera soumis. Quant à
la composition du jury d’examen, je prie M. le ministre de ne pas le composer
uniquement d’artistes intéressés dans la question et de leur adjoindre quelques
autres membres qui ne soient pas artistes. Cela, je pense, amènera plus
d’équité dans les décisions.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je ferai observer à l’honorable préopinant que l’exécution du groupe est déjà
commencée, que l’artiste est en ce moment en Italie, que le marbre est extrait,
et qu’enfin il serait trop tard pour revenir sur ce qui est fait.
M. Rogier. - Je ferai observer à M. de Roo qu’il
est dans l’erreur, s’il croit que le modèle projeté pour le monument de la
place des Martyrs sera semblable à celui qui s’y trouve en ce moment. Il est
également dans l’erreur quand il pense que la composition du jury n’a pas été
faite d’une manière impartiale : ce jury se composait d’artistes et de
personnes étrangères à la pratique de l’art, et dans son ensemble il présentait
toutes les garanties que pouvait désirer l’honorable préopinant. Je ne pense
pas comme lui qu’il soit possible de recommencer un nouveau concours, deux déjà
ayant été inefficaces, alors que le gouvernement s’est décidé à confier ce
travail aux deux artistes qui s’étaient le plus distingués, et le nom de ces
deux artistes suffit pour donner toutes les garanties désirables.
M. de Roo. - Je ne doute nullement du talent des
deux artistes dont il s’agit. Quant aux deux concours dont a parlé l’honorable
M. Rogier, je ne crois pas qu’ils aient eu lieu. Mais d’ailleurs, d’après ce
qu’a dit M. le ministre, il y a déjà eu commencement d’exécution ; il n’y a
donc plus de remède.
M. H.
Dellafaille, rapporteur. - Je ne ferai aucune observation sur l’œuvre du monument de la place
des Martyrs ; c’est une affaire dans laquelle, je crois, nous ne saurions
porter un jugement concluant. Mais je crois que M. le ministre peut nous donner
des renseignements sur le coût total du monument : d’après les comptes je vois
déjà figurer une somme de 164,000 fr., moitié pour la sculpture, moitié pour
les bases du bâtiment.
Les bas-reliefs, les
portes, les inscriptions ne sont pas compris dans cette somme, et il y aurait lieu
de croire, d’après ce que j’ai entendu dire, que cette partie monterait à une
dépense égale, c’est-à-dire pour le tout, à une somme de 300 à 340 mille
francs. Je crois utile de savoir à quelle dépense totale on s’engage pour la
construction de ce monument.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Il me serait difficile de dire, quant à présent, quelle sera la totalité de
la dépense ; ce que je puis dire, c’est que le contrat fait avec M. Geefs stipule une somme de 74,000 fr. : 13,000 à payer la
première année, 13,000 la seconde, 30,000 la troisième, 18,000 la quatrième et
6,000 la cinquième. Voilà le seul contrat qui ait été fait jusqu’ici.
Grand nombre de membres. - Aux voix ! aux
voix !
- Le chiffre de 30,000
fr. est adopté.
M.
le président. - On passe à la discussion de l’article 3, fr. 10,000.
M.
Verdussen. - Je prends la parole pour adresser une question à M. le
ministre de l'intérieur.
Je vois que c’est en
vertu de la loi du 25 janvier 1817 que ce crédit est demandé. En effet, je
trouve à l’art. 9 de cette loi :
« Art. 9. Il sera
tenu un compte séparé des droits à payer par ceux qui obtiendront un brevet
d’invention, et le produit en sera employé en primes et en récompenses pour
l’encouragement des arts et de l’industrie nationale. »
Mais j’ai remarqué que
dans le budget des voies et moyens la somme est portée à 12,000 fr., tandis
qu’en dépenses elle n’est que de 10,000 fr. S’il y a erreur, je demande qu’on
la redresse. S’il y a des motifs pour qu’on change ce chiffre, je demande qu’on
veuille bien les expliquer.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je ne saurais pas répondre en ce moment à l’honorable préopinant. Sa
réflexion est juste, il y a une différence évidente ; mais je dirai qu’il
arrive presque toujours qu’il est dépensé pour ces encouragements des sommes
supérieures à celles fixées ; ainsi je ne vois pas qu’il puisse y avoir quelque
difficulté pour voter l’article, malgré l’observation qui vient d’être faite.
M.
Verdussen. - Je propose qu’on fixe la même somme pour la recette que
pour la dépense ; si d’un côté il y a 12,000 francs, je propose que le produit
des brevets d’invention soit fixé à 12,000 fr.
- La proposition de M.
Verdussen tendant à faire monter le chiffre à 12,000 francs est rejetée.
Le chiffre de 10,000
francs est adopté.
Article 4
« Art. 4. Service
de santé : fr. 45,000. »
- Adopté.
M.
le président. - L’article 5, hygiène publique, est mis en discussion.
M.
Rogier. - La section centrale et le gouvernement étant d’accord pour
retirer le crédit proposé à l’art. 5 pour hygiène publique, je conçois que les
efforts que je pourrais faire pour l’y maintenir seraient sans succès.
Je dois cependant entrer
dans des explications que je tâcherai d’abréger pour justifier cette
proposition et pour repousser quelques allégations de la section centrale. La
section centrale reconnaît d’abord que le but de la proposition est louable en
ce que ce but est le bien public. Il paraîtrait qu’une proposition faite dans
l’intérêt du bien public aurait dû mériter un examen un peu plus sérieux ou une
conclusion un peu mieux motivée que le rejet pur et simple qu’elle a proposé en
très peu de mots.
Le motif principal que
la section centrale a mis en avant pour rejeter la dépense proposée consiste en
ce que probablement les fonds seront employés à un usage tout différent de leur
usage primitif. Je ne sais pas pourquoi la section centrale considérerait cette
dépense sous un autre point de vue que beaucoup d’autres allocations de
l’espèce. La somme de 500,000 fr. n’avait pas pour but d’accorder des
gratifications aux communes, de faire des libéralités. Le seul but du
gouvernement était d’exciter au moyen de ce subside à des travaux
d’amélioration que les communes n’exécuteraient pas elles-mêmes, soit dans le
cas où elles manqueraient de ressources suffisantes, soit dans le cas où elles
n’auraient pas l’activité nécessaire.
On trouve tout naturel
d’accorder des subsides aux communes pour l’instruction primaire, pour le
culte, pour la construction des routes ; et pourquoi trouverait-on inconséquent
d’accorder des subsides pour l’amélioration des rues, pour la construction de
fontaines, pour l’établissement d’égouts, pour le dessèchement de marais, pour
les pavement de places, pour des prisons de passage, pour mille autres travaux
d’intérêt public, d’intérêt matériel, qui manquent dans la plupart de nos
communes, et non pas seulement dans les grandes communes, mais surtout dans nos
communes rurales où véritablement les habitants sont dans une position plus
malheureuse que les habitants des grandes villes.
Avec les 500,000 fr. que
je propose, on parviendrait à mettre en mouvement dans le pays environ quatre
millions, pour des travaux d’amélioration matérielle. Voici à cet égard un
calcul bien simple qui prouve mon assertion.
Supposez que chaque province
porte à son budget une somme de 100,000 francs, ce n’est pas exagérer ; déjà
une province a voté une telle allocation pour l’exercice 1835. Supposez aussi
que chaque commune porte 1.000 francs à son budget ; je prends ici la moyenne
des allocations possibles, et vous trouverez en effet un chiffre de 4 millions
consacrés chaque années à des travaux publics, et pour lesquels aucune somme
n’est portée au budget de l’Etat.
Je sais que la dépense
est nouvelle, qu’elle grève le budget d’une nouvelle charge ; je conçois que
les renseignements fournis au budget ne levaient pas toutes les difficultés,
mais c’est qu’on ne connaissait pas tous les détails. Quoi qu’il en soit, je
pense que de même que les communes interviennent pour la construction
d’églises, pour la construction de routes, d’écoles, elles peuvent intervenir
pour l’exécution de tous les travaux que j’ai indiqués.
On craint que cette
somme de 500,000 fr. soit absorbée en grande partie par la capitale : ceci
ferait supposer que le gouvernement en disposerait avec partialité. Car je ne
me dissimule pas qu’une partie pourrait être employée avec beaucoup d’utilité
dans la capitale ; car c’est surtout là que se trouve la population la
nombreuse, la plus pressée, et souvent la plus dangereuse. Je crois que si l’on
parvenait à stimuler le zèle de la capitale par une somme qu’on lui
accorderait, et si on parvenait à modifier, à déraciner certains abus qui y
existent, on ferait chose utile au pays ; puisqu’il importe au pays qu’elle
donne de bons exemples sous le rapport des travaux d’amélioration matérielle.
Lors de l’invasion du
choléra, on a vu qu’il n’était pas si difficile pour le gouvernement, pour
l’administration, d’intervenir dans ces améliorations matérielles ; vous avez
vu, dans beaucoup de localités, exécuter des travaux d’assainissement.
Des
maisons de pauvres ont été repeintes, d’autres ont reçu des fumigations. Dans
d’autres villes on établissait des égouts ; on prenait les mesures nécessaires
pour faire disparaître des rues et des places publiques les ordures qui
affectent si désagréablement les yeux et l’odorat. Voilà quelques exemples qui
viennent à l’appui de la proposition.
Mon intention,
messieurs, n’est pas d’insister plus longtemps sur l’utilité de l’allocation ;
mon intention n’est pas non plus de prouver plus longuement qu’elle est
facilement applicable ; mais du moment que le gouvernement n’est pas convaincu
de cette facilité d’application, il ne m’appartient pas de persister pour le
maintien du chiffre au budget de l’Etat. Cependant je le déclare, il ne se
passera pas d’année où je ne reproduise, lors de la discussion du budget de
l’intérieur, la même demande ; et j’espère que la chambre, après y avoir
mûrement réfléchi, admettra enfin ce qu’elle repousse maintenant.
M. H. Dellafaille, rapporteur. - Le chiffre repoussé par les
sections l’a été également par la section centrale ; mais puisqu’on a combattu
l’avis de la section centrale, il doit être permis à son rapporteur de le
défendre.
La proposition que l’on
dit avoir été inspirée pour un but d’utilité publique méritait, assure-t-on, un
examen plus approfondi. Nous avons cru devoir rendre justice à la pensée qui a
présidé à cette demande de crédit ; nous n’avons pas trouvé que les intentions
fussent mauvaises ; mais nous avons fait une distinction entre les intentions
et le résultat probable ; et ce résultat ne nous a pas paru aussi bon que les
intentions. L’examen de la proposition a été sérieux dans les sections comme
dans la section centrale.
L’honorable M. Rogier
compare le crédit qu’il demande à celui que l’on accorde pour les réparations
des églises, des écoles. La différence nous en a semblé grande au contraire.
Le besoin d’un subside
pour une église, pour une école, est un fait matériel, aisé à constater ; mais
la nécessité d’assainir un quartier, de percer une nouvelle rue, d’établir une
fontaine, est un fait qui ne se constate pas aisément, et qui peut rencontrer
des contradicteurs.
Quant aux communes
rurales, je crois qu’elles auraient très peu de part au crédit ; elles
paieraient l’embellissement des villes. Les seuls objets qui pourraient
intéresser les communes rurales ne doivent pas entrer dans ce chapitre. S’il se
trouve quelque part des marais insalubres, si des travaux d’assainissement sont
nécessaires, le ministre de l’intérieur est toujours libre de présenter un
article spécial au chapitre des travaux publics, et les chambres peuvent le
voter. Heureusement les marais ne sont pas fréquents dans notre pays ; nous
n’avons pas ici de marais Pontins.
L’honorable M. Rogier
nous a donné une idée des travaux qu’il se proposait d’exécuter : son plan est
magnifique ; mais ce n’est pas la première fois que l’exécution ne répond pas
au plan.
Nous avons en effet
craint que le crédit ne soit absorbé par trois ou quatre villes, et pour
exprimer notre pensée, nous avons indiqué la capitale comme une de celles qui
en auraient une grande partie. Nous n’avons pas pour cela supposé que
l’honorable membre fût partial en faveur de la capitale ; mais nous avons considéré
qu’étant le siège du gouvernement on lui accorderait par cela même, et fort
naturellement, plus de subsides qu’aux autres villes du royaume qui ne sont pas
dans une position aussi heureuse sous ce rapport.
L’honorable M. Rogier nous a rappelé que, lors du choléra, des quartiers
entiers ont été assainis : nous savons en effet que dans des communes ont été
exécutés de grands travaux à cette époque, mais les dépenses de ces travaux
sont aux frais des communes, et il n’est nullement utile d’établir un crédit
permanent pour ces sortes d’objets. Un crédit d’un demi-million n’est pas chose
légère, et il ne faut pas augmenter, sans motifs puissants, les charges de
l’Etat.
Je maintiens le vote de
la section centrale, si tant est qu’on veuille proposer le rétablissement du
crédit. (Aux voix ! aux voix ! le
gouvernement ne le demande pas !)
M.
de Roo. - La section centrale, émanation de toutes les sections, a
rejeté ce que les sections avaient rejeté et je crois qu’elle a bien fait.
M.
Rogier. - Cependant une section avait admis le crédit.
M.
le président. - Il n’y a rien à mettre aux voix, puisque le
gouvernement ne demande rien. Ainsi, je déclare l’article 5 supprimé.
Chapitre XIII. Archives du royaume
Article premier
« Art. 1er. Frais
d’administration (personnel) : fr. 19,400. »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Depuis plusieurs années on recherchait un local pour les archives ; tout le
monde comprend le danger qu’elles courent dans le lieu où elles sont déposées
au milieu de la ville. Les bâtiments qu’elles occupent sont de plus réclamés
par les tribunaux. Le moment est donc venu de prendre une décision à cet égard.
L’année dernière, la section centrale a rejeté à l’unanimité le crédit demandé
pour les archives.
Des architectes ont
visité les bâtiments connus sous le nom de la porte Hal, et ils ont décidé
qu’ils étaient convenables pour contenir les archives du royaume, puisqu’ils
étaient isolés et n’avaient aucune humidité. On a aussi considéré qu’ils
étaient suffisants pour contenir toutes les archives existantes. Dans cet état
de choses, je crois qu’il y a lieu d’accorder un crédit pour le transport des
archives et pour l’appropriation du local : il faudrait 30,000 fr. pour établir
des calorifères, un logement au concierge, un cabinet de travail, des
tablettes, et pour le transport des papiers.
Pour ne rien laisser ignorer à l’assemblée, je
dirai que la commission que j’avais chargée de l’examen des bâtiments de la
porte de Hal pensait que l’on pourrait les élever d’un étage en les couronnant
de la même manière qu’ils ont été faits : la somme nécessaire à cette élévation
était de 100,000 fr. ; mais l’un des architectes qui avait dirigé les travaux
sous le gouvernement précédent, croit que les bâtiments ne présentent pas assez
de solidité pour supporter un exhaussement.
Il faudra donc laisser
les bâtiments en l’état où ils sont. C’est d’après ces divers renseignements que
je me suis décidé à faire la demande du crédit de 30,000 francs.
M. de Brouckere. - Je demanderai si le
procès entre le gouvernement et la ville de Bruxelles, relativement à la porte
de Hal, est terminé.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Il n’y a pas de procès entre le gouvernement et la ville ; la régence réclame
seulement la permission de démolir la porte de Hal ; mais cette réclamation
cessera si les bâtiments sont employés.
M. H.
Dellafaille, rapporteur. - Je crois que le ministre de l’intérieur doit agir prudemment dans
cette circonstance. Si je me le rappelle bien, il a été dit que la ville de
Bruxelles voulait démolir la porte de Hal et que le gouvernement s’y était
opposé ; qu’il y avait de plus contestation sur la possession de ces bâtiments.
Je pense bien que la
ville consentira à l’appropriation du local pour recevoir les archives ;
cependant, avant de commencer ces travaux, il faudrait savoir à qui ces
bâtiments appartiennent ; l’Etat ne peut faire des constructions sur le
bâtiment d’un autre. Le ministre doit s’expliquer plus catégoriquement sur la
question de propriété.
M.
Legrelle. - Pourquoi adopter aujourd’hui un crédit refusé l’année
dernière ? Voter 30,000 fr. pour un bâtiment qui ne resterait pas au
gouvernement, ce serait grossir inutilement le budget. Les archives peuvent
encore rester une année où elles sont. Prenons-y garde, nous grossissons nos
budgets d’année en année, et cependant nous ne sommes pas en position de le
faire. La dépense pour les archives, fort utile sans doute, n’est pas de celles
que l’on doit déclarer urgentes ; on peut la renvoyer à l’année prochaine.
Vidons le conflit existant entre la ville et le gouvernement, et nous verrons
ensuite ce que nous aurons à faire.
- L’art. 1er, Frais
d’administration (personnel), 19,490 fr., est adopté sans discussion.
Article 2
« Art. 2. Frais
d’administration (matériel) : fr. 2,600. »
- Adopté sans
discussion.
M.
le président. - L’article 3 sera intitulé : « Frais de transport et
d’appropriation du local pour les archives : fr. 30,000. »
M. de Brouckere. - J’avais demandé au
ministre de l’intérieur de vouloir bien dire si l’espèce de différend entre la
régence de Bruxelles et le gouvernement relativement à la porte de Hal était
terminé. Le ministre n’a pas répondu. Il a supposé que le gouvernement se
décidant à approprier les bâtiments pour recevoir les archives, la ville ne
formerait aucune opposition. Je vous prie de remarquer qu’il n’a fait qu’une
supposition appuyée d’aucune pièce.
Je puis renouveler à la
chambre l’assurance que je lui ai donnée l’année passée que la chambre se
regarde comme propriétaire de la tour de Hal, à tel point qu’elle porte tous
les ans au budget des recettes une somme de 12,000 fr, produit présumé de la
vente des matériaux que la démolition de cet édifice procurerait. Pour en agir
ainsi, il faut bien qu’elle croie son droit de propriété incontestable.
Si
le gouvernement voulant transporter les archives du royaume à la porte de Hal,
affectait à la translation de ce dépôt précieux une somme de 30,000 fr. et que
la ville de Bruxelles, si elle ne persiste pas actuellement dans ses
réclamations vînt plus tard faire valoir des moyens fondés à l’appui de ses
prétentions ; si ces moyens triomphaient en justice non seulement la dépense
première de 30,000 fr. serait insuffisante, mais il faudrait une allocation
nouvelle pour opérer un nouveau transport dans un autre local.
Il paraît que le
bâtiment de la porte de Hal est assez approprié au dépôt des archives. S’il en
est ainsi, je ne refuse pas les 30,000 fr. que l’on demande pour le transport
de ce qui doit y être renfermé. Mais je demande que M. le ministre prenne
l’engagement formel de ne rien employer sur cette somme, à moins d’avoir une
renonciation entière de la ville de Bruxelles à toute prétention sur ce
bâtiment. Un assentiment tacite qu’elle peut révoquer du jour au lendemain ne
peut suffire. Si le gouvernement n’obtient pas cette renonciation, je demande
qu’il ne dispose d’aucune somme sur les 30,000 fr. Dans le cas où M. le
ministre se refuserait à prendre cet engagement formel, je déclare que je ne
pourrai voter un centime.
M.
Dumortier. - Je crois que l’honorable préopinant est dans l’erreur. Je
ne pense pas que l’acte de renonciation qu’il demande soit nécessaire.
L’appropriation du bâtiment de la porte de Hal au dépôt des archives du royaume
s’est faite d’un commun accord entre le gouvernement des Pays-Bas et la régence
de Bruxelles. Il ne dépend pas de la régence de se délier des obligations du
contrat.
M. de Brouckere. - Y a t-il un contrat ?
Voilà la question.
M.
Dumortier. - Les dépenses ont été faites d’un commun accord entre
l’ancien gouvernement et la régence pour le placement des archives dans les
salles du bâtiment. La disposition intérieure de ce local avait été commencée.
Car il existe actuellement quelques boiseries qui avaient été placées pour
contenir les archives, lesquelles s’y trouveraient toutes classées, si la
révolution de septembre n’avait pas arrêté les travaux.
Beaucoup d’administrations,
messieurs, ont été saisies d’un esprit de vertiges de démolition. On a voulu
abattre tout ce qui nous restait de monuments anciens. Celui dont il est
question avait été compris dans la proscription générale. Aux yeux de certaines
personnes, il faisait mauvais effet. La régence de Bruxelles s’est dès lors
imaginé qu’elle avait le droit de dégager la vue des boulevards en le
démolissant. Comme le gouvernement s’est opposé à cette démolition, elle fait
chaque année des réclamations à l’effet de l’accomplir. Dans les années
précédentes, la chambre a exigé que le gouvernement fît transporter les
archives à la porte de Hal, et si elle a refusé des fonds pour la construction
d’un local spécial, ce n’a pas été dans un but d’économie comme le dit l’honorable
M. Legrelle, mais parce que le bâtiment projeté aurait coûté un demi-million à
l’Etat.
Vous n’avez pas voté une
allocation pareille, parce que déjà le gouvernement avait fait des sacrifices
pour le dépôt des archives à la porte de Hal, et qu’il
ne fallait pas qu’ils eussent été faits en pure perte.
La section centrale,
pour s’assurer du plus ou moins de fondement des plaintes élevées contre le
local projeté, s’est transportée elle-même à la porte de Hal, et les personnes
les plus prévenues contre ce bâtiment ont été obligées de convenir qu’il était
impossible de trouver un local mieux approprié pour le dépôt des archives.
Voulez-vous que je vous cite un autre exemple en faveur de la conservation de
la porte de Hal ? Dernièrement une commission a été nommée à l’effet d’arrêter
la démolition des monuments de
Savez-vous ce qui est
résulté de cette visite sur les lieux ? C’est que tous les membres de cette commission,
composée d’artistes et d’architectes à même d’apprécier la beauté et l’état de
conservation d’un monument, ont reconnu que le local était parfaitement adapté
à l’usage auquel le gouvernement le destinait, et qu’il serait impossible d’en
trouver un qui réunît des conditions aussi avantageuses. Il y a plus. J’ai
entendu de mes propres oreilles l’architecte même qui a proposé la démolition,
avouer que s’il avait connu l’intérieur de cet édifice, il n’aurait jamais
demandé la démolition. Maintenant, je demande si l’on est fondé à refuser une
somme de 30,000 francs pour la translation des archives.
L’honorable M. Legrelle
a parle d’économie. Il n’est personne qui ait fait plus que moi preuve du désir
d’apporter des réformes dans les dépenses de l’Etat. Mais je ne demande des
économies que là où elles sont praticables.
Si
vous n’accordez pas au gouvernement les 30,000 fr. qu’il vous demande, il
faudra, comme je vous l’ai dit, dépenser un demi-million pour construire un
local propre au dépôt des archives. De plus, vous souscrirez tacitement aux
prétentions de la régence de Bruxelles qui s’empressera de faire disparaître un
de ces monuments du moyen-âge, dont le nombre diminue tous les ans en Belgique.
Je crois en avoir assez dit pour motiver la demande du gouvernement.
La plus grande objection
que l’on ait faite contre le local de la porte de Hal, c’est que l’humidité
pourrait y altérer les archives. Dès l’année 1830, quelques pièces ont été déposées
dans ce local, et je puis assurer, pour en avoir fait moi-même la vérification,
qu’elles sont dans un parfait état de conservation, aussi sèches, aussi pures
que quand elles y ont été déposées.
M. H.
Dellafaille, rapporteur. - L’honorable préopinant vous a fait remarquer que la difficulté ne
consiste pas dans la question d’économie ou d’appropriation du local, mais
qu’il s’agit préalablement de savoir à qui appartient le bâtiment. Relativement
à l’intérieur du local, je suis complètement de son avis. Le bâtiment de la
porte de Hal convient parfaitement au dépôt des archives ; l’on peut être
rassuré sur la conservation de ces précieux documents. Ils seront tout à fait à
l’abri de l’humidité.
Mais avant de procéder à
la translation des archives, il faut que la question de propriété soit vidée,
il faut que l’on sache si le bâtiment appartient à la ville ou à l’Etat ; si
c’est à la ville qu’il appartient, il faut que le gouvernement s’assure que la
dépense qu’il y fera ne sera pas en pure perte. Comme la somme demandée ne
l’est pas pour des constructions nouvelles, il faut que le gouvernement, avant
d’approprier le local au dépôt des archives, nous dise quelle garantie de durée
dans la jouissance du local offre le contrat, si la concession que lui a faite
la régence lui permet de faire les frais.
Le vote que j’émettrai
sur ce chiffre en discussion dépendra des explications que M. le ministre de
l’intérieur donnera à cet égard.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Ce n’est pas la propriété de la porte de Hal que nous avons à estimer
actuellement. Il s’agit de savoir simplement si le gouvernement n’a pas un
droit équivalent à la propriété, un droit d’usage. Sons le gouvernement
précédent, la régence de Bruxelles avait consenti à ce que le local de la porte
de Hal fût affecté au dépôt des archives. Aucune époque n’était limitée pour la
cessation de l’usage du local. Cet usage était donc perpétuel de sa nature.
Sous ce rapport je crois
donc que les prétentions du gouvernement sont entièrement fondées, puisque ce
n’est que du consentement de la régence que le gouvernement a procédé à des
travaux nécessaires pour l’appropriation du local. C’est ainsi que l’édifice
fut recouvert d’une toiture en cuivre. 30,000 florins furent dépensés avant la
révolution dans l’intérêt de l’Etat.
La régence de Bruxelles,
comme paraît le désirer l’honorable M. de Brouckere, donnerait-elle au
gouvernement la déclaration formelle qu’elle renonce à ses prétentions de
propriété sur le bâtiment de la porte de Hal ? C’est ce que j’ignore. Je crois
qu’il suffit au gouvernement d’avoir la jouissance du bâtiment et de posséder
des droits à en conserver l’usage. Mais exiger que la ville renonce à tout droit
de propriété, je ne sais pas trop comment l’on pourrait amener la régence à
prendre une telle délibération.
Quoi
qu’il en soit, messieurs, il faut sortir de l’impasse où nous sommes engagés.
Que le gouvernement demande des fonds pour la construction d’un local propre au
dépôt des archives ; on lui répond : N’avez-vous pas la porte de Hal ? S’il
demande une allocation pour approprier la porte de Hal à cet usage, on lui
répond : Assurez-vous avant de vos droits de propriété sur ce bâtiment. Il est
impossible de sortir de cette impasse. Les choses en sont cependant venues au
point qu’il serait à désirer qu’on prît enfin une résolution. D’un côté, le
gouvernement réclame le local des archives. D’un autre, on reconnaît que ce
local est devenu dangereux, qu’il manque de solidité ; car, dans l’opinion des
gens de l’art, il s’affaisse sous le poids des archives.
Pour mettre fin à un
pareil état de choses, je demande que les 30,000 fr. demandés par le
gouvernement soient votés.
M. de Brouckere. - L’honorable M.
Dellafaille a répondu à un des honorables préopinants en lui disant que si la
chambre hésite à accorder le subside, ce n’est pas par un motif d’économie ;
mais c’est dans la crainte que la dépense ne soit complètement inutile et n’entraîne
même plus tard une dépense nouvelle. J’ai dit qu’il fallait, avant d’accorder
les 30,000 fr. demandés, que la chambre, sût si le bâtiment auquel cette
allocation est destinée est la propriété du gouvernement.
M. le ministre de
l'intérieur pense que nous n’avons pas à examiner la question de propriété.
Selon lui, il s’agit simplement de savoir si le gouvernement n’a pas un droit
équivalent à celui de possession. Soit ; que M. le ministre me prouve que ce
droit équivalent existe, et je voterai la somme avec le plus grand plaisir.
Mais M. le ministre ne prouve rien ; il se borne à arranger quelques
allégations qui ne décident pas la question.
Dans l’opinion de M. le
ministre, l’usage du bâtiment de la porte de Hal appartient au gouvernement, et
cela lui suffit. Mais M. le ministre sait bien qu’en fait de questions
contentieuses, l’opinion du gouvernement ne prévaut pas toujours. C’est ainsi
que le gouvernement a succombé devant les tribunaux à l’occasion de la
réclamation de l’imprimeur du Moniteur
dont le contrat avait été résilié. C’est ainsi que, dans une circonstance
récente, il a soutenu désavantageusement un procès contre la digue de Borgerweert. Il pourrait arriver que le gouvernement, s’il
entrait en jouissance du bâtiment de la porte de Hal, fût attaqué par la ville
et succombât comme dans le procès que je viens de rappeler. La dépense qui
aurait été faite serait alors non seulement inutile, mais, je le dirai,
préjudiciable aux archives. Car on sait que ces pièces se détériore
par des translations fréquentes, et d’ailleurs, il faudrait une somme nouvelle
de 30,000 fr. pour affecter un autre local à leur usage.
Ce que je demande, c’est
que le gouvernement ne fasse aucun emploi de la somme de 30,000 fr., sans être
certain d’avance qu’il a sur la porte de Hal un droit de propriété ou tout au
moins un droit d’usage incontestable.
Il y a un contrat, dit
l’honorable M. Dumortier. Il
faut bien que ce contrat ne soit pas clair puisque le ministre ne s’empresse
pas ou de le produire ou d’avancer d’une manière positive que le droit d’usage
du bâtiment lui est acquis en vertu du contrat.
Mais, a ajouté M. le
ministre, vous nous mettez dans une singulière position. Demandons-nous de
l’argent pour construire un bâtiment nouveau, la chambre nous répond : Faites
usage du bâtiment de la porte de Hal. Demandons-nous de l’argent pour en
approprier les locaux, l’assemblée nous répond encore : Assurez-vous de la
propriété de ce bâtiment. Il est impossible de sortir d’une impasse pareille.
Je ne vois pas de
difficultés dans cette impasse. Je trouve que la chambre raisonne fort
sagement. Avant de donner de l’argent pour approprier le local de la porte de
Hal à un dépôt d’archives, elle demande au gouvernement : Avez-vous un droit de
propriété sur cet édifice ? C’est là le raisonnement que ferait tout homme qui
n’aurait que du bon sens, qui serait dénué de toute espèce d’instruction : il
trouverait souverainement ridicule que l’on dépensât trente, vingt, dix mille
francs, n’importe la somme, pour un bâtiment dont la propriété serait
contestée.
Je m’explique
formellement, messieurs, je veux bien que le local de la porte de Hal soit
affecté au dépôt des archives, mais avant de venir nous demander de l’argent,
je désire que le gouvernement s’assure qu’il a un droit de propriété ou d’usage
incontestable.
Quant à ce qui a été dit
par un honorable membre sur l’esprit de vertige qui s’est emparé de la régence
de Bruxelles...
M.
Dumortier. - Je n’ai pas nommé de régence.
M. de Brouckere. - Je ne doute pas qu’elle
ne soit sensible au compliment que l’honorable membre veut bien lui adresser.
Je ferai seulement observer à M. Dumortier qu’il s’est trompé quand il a
représenté la porte de Hal comme un monument antique. Ce n’est pas un monument
antique. Comme monument. c’est un édifice tout à fait
insignifiant. Ce n’est qu’une masse informe de pierres, ou, comme le disait un
ancien membre de cette assemblée, ce qu’un gros caillou. Ce n’est pas pourtant
que j’en demande la démolition. Bien que je trouve que ce monument, sous le
rapport de l’art ou de souvenirs historiques ne rappelle rien, je ne m’oppose
pas à ce qu’on l’utilise, à ce qu’on en fasse un bon usage. Mais si le
gouvernement ne parvient pas à y établir ses droits, il faut laisser la régence
en faire ce qu’elle voudra. Si elle en ordonne la démolition, les amis de l’art
n’auront certainement pas à regretter un monument de l’antiquité.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Il est évident que l’on n’ira pas opérer la translation des archives si l’on
ne possède pas un droit que l’on puisse considérer comme certain. Personne ne
serait assez absurde pour faire des dépenses dans un édifice dont on pourrait
perdre la possession peu de temps après.
M.
Legrelle. - Je suis d’accord avec M. le ministre de l’intérieur sur
l’absurdité (c’est le mot dont il s’est servi), sur l’absurdité qu’il y aurait
à faire la dépense avant de savoir si le bâtiment appartient à l’Etat. Mais je
trouve que l’argument que l’honorable M. Dumortier a employé pour prouver que
le bâtiment appartient à l’Etat prouve précisément le contraire.
En effet, cet honorable
membre prétend que c’est en vertu d’un contrat passé entre l’ancien
gouvernement et la régence de Bruxelles, que le bâtiment appartient à l’Etat ;
mais s’il y eu un contrat, c’est que le gouvernement n’a pas cru que ses droits
à la propriété de la porte de Hal fussent bien grands ; c’est qu’il a reconnu
que la ville était le véritable propriétaire. Lorsque je crois qu’un objet
m’appartient, je ne fais pas de contrat pour établir mon droit de propriété.
La
régence de Bruxelles a voulu démolir un édifice que l’on nous dit avoir été
cédé par contrat à l’ancien gouvernement. Tous les ans, loin d’avoir renoncé à
ses prétentions justes ou non, cette régence passe au budget de ses recettes
une somme de 12,000 à provenir de la vente des décombres. Cette recette a été
portée au budget de 1834. Peut-on en présence de pareils faits venir demander
une somme pour des dépenses à faire dans un bâtiment dont la propriété est
aussi manifestement contestée au gouvernement ? Que diriez-vous, messieurs,
d’un locataire qui ferait des dépenses à un bâtiment dont l’usage pourrait lui
être retiré du jour au lendemain ? Vous diriez, messieurs, que c’est un
imprudent : N’agissons pas comme ce locataire et commençons par assurer notre
droit de possession. Nous ferons la dépense ensuite. N’allouons les fonds que
lorsque nous serons certains qu’il en sera fait un emploi utile.
M.
Dumortier. - Je ne comprends rien à ce qu’a dit l’honorable préopinant.
Si le gouvernement a fait un contrat, a-t-il dit, c’est une preuve qu’il trouve
son droit de propriété contestable : ne peut-on pas lui répondre que s’il est
manifeste que le droit de propriété était contestable avant le contrat, il a
cessé de l’être par le fait seul qu’il a été passé.
Ce qu’il y a de certain,
c’est que le gouvernement des Pays-Bas a dépensé 50,000 fl. en réparations au
bâtiment de la porte de Hal. C’est aux frais du gouvernement que le toit en
cuivre a été construit. Si l’Etat a fait cette dépense, c’est parce qu’il avait
le droit en même temps que l’intention d’affecter ce local au dépôt des
archives du royaume. Ces dépenses ont été faites de commun accord avec la
régence, qui consentait à céder au gouvernement l’usage de la porte de Hal.
Plusieurs membres. - Qu’on nous montre le contrat.
M.
Dumortier. - Je n’ai pas le contrat en poche, mais rendez-vous au
ministère de l’intérieur ; on vous le communiquera.
L’on a dit que la
régence de Bruxelles avait à plusieurs reprises voulu démolir la porte de Hal :
est-ce que cela prouve en faveur de son droit de propriété ? Si la volonté de
la régence n’avait pas rencontré d’obstacles sérieux de la part du
gouvernement, elle n’aurait pas hésité dans son plan de démolition. Mais le
gouvernement a fait opposition en invoquant les dépenses qu’il avait faites
pour mettre le local en état de servir de dépôt d’archives. Il a invoqué la
convention antérieure entre la ville et lui, et la chambre et la chambre
elle-même a formellement insisté pour que cette démolition n’eût pas lieu. La
régence porte, il est vrai, à son budget des recettes, une somme de 12,000 fr,
mais cette somme représente le prix du cuivre employé à couvrir le monument. Je
demande s’il serait loyal de la part de la régence de vendre des matériaux qui
ont été employés pour le compte de l’Etat et dans l’intérêt de l’Etat.
Je crois avoir
suffisamment réfuté les arguments des honorables préopinants. J’ajouterai
cependant une réponse aux paroles de l’honorable M. de Brouckere. Il a dit que la régence serait sensible au
compliment que je lui ai fait. Pour moi, je suis aussi peu sensible aux
compliments de M. de Brouckere que la régence de Bruxelles le sera aux miens.
Si l’on présente le bâtiment de la porte de Hal comme insignifiant, c’est que
l’on a jamais pris la peine de se rendre dans l’intérieur de ce local.
M. de Brouckere. - Insignifiant comme
monument.
M.
Dumortier. - Vous ne comprenez pas ce que c’est qu’un monument (Hilarité générale que partage M. de
Brouckere lui-même.)
M. de Brouckere. - Je n’ai pas l’honneur
d’être académicien.
M. Dumortier. - J’invite mes honorables
collègues à visiter le bâtiment de la porte de Hal ; ils y verront non pas,
comme on l’a dit, des cachots pour les prisonniers, mais des salles deux fois
au moins aussi grandes que celle-ci. Je me charge de les y conduire.
Je répète ce que j’ai
dit déjà l’architecte même qui a proposé la démolition de la porte de Hal m’a
assuré que s’il avait vu de ce monument, il n’aurait jamais fait semblable
proposition. On nous dit qu’à l’extérieur ce n’est pas un monument remarquable.
Je demanderai si la tour de Londres est à un monument plus remarquable. Si l’on
devait proposer à la chambre des communes la démolition de cet édifice,
croyez-vous qu’elle souscrivît à cette oeuvre de destruction ?
M. Desmanet de Biesme. - Le crédit
demandé par le gouvernement ne préjuge rien dans la question soulevée par
l’honorable M. de Brouckere. Ce
n’est pas la somme que nous attaquons, c’est la manière dont elle sera dépensée
; aussi nous pourrions discuter très longtemps sur la question de propriété car
nous n’avons pas le contrat.
Que veut l’honorable M.
de Brouckere ? que le gouvernement ne fasse pas une
dépense inutile ? M. le ministre de l’intérieur a un moyen bien simple de
terminer tout ce débat : qu’il examine le contrat : si cette pièce ne lui
paraît pas assurer suffisamment le droit de propriété du gouvernement, qu’il
transige avec la régence de Bruxelles. Son but est d’avoir de l’argent, et pour
une somme de 10 à 12,000 fr., l’Etat aura la propriété définitive d’un monument
que l’on trouve très convenable pour le dépôt des archives.
Le ministre commettrait
une imprudence s’il faisait une dépense sans connaître l’étendue de son droit
de propriété. Si, malgré les frais qu’a déjà fait l’Etat, la régence de
Bruxelles persiste dans ses prétentions, la marche est tracée. Il ne faudra
employer les fonds que lorsque l’on sera sûr de le faire avec utilité.
M.
Gendebien. - Je m’étais abstenu de prendre la parole en qualité de
membre de la régence de Bruxelles. Cependant je me vois forcé de rompre le
silence. Toute cette discussion ressemble assez à la vente de la peau de l’ours
avant qu’on ne l’ait abattu. (Hilarité.)
Vous discutez l’emploi des fonds à allouer au transfert des archives à la porte
de Hal, vous disposez de ce bâtiment ; mais il s’agit avant tout de savoir si
la régence consentira à vos arrangements. Il faut savoir à qui appartient la
porte de Hal. Je puis assurer que la ville persévère dans ses prétentions à la
propriété de ce prétendu monument, prétentions qu’elle croit pleinement
fondées. Il me semble que M. le ministre qui dispose si facilement d’un
édifice, devrait prouver auparavant qu’il lui appartient.
Il faut terminer cette
discussion en rejetant le crédit demandé ou en ne l’accordant que
conditionnellement, comme le propose M.
de Brouckere.
Je ne répondrai pas à l’accusation
adressée à la régence de s’être laissé entraîner à la manie de détruire.
Je défie l’honorable
membre qui se l’est permise de citer aucun fait. La
ville de Bruxelles a construit grand nombre d’édifices depuis 15 ans, et ces
constructions ont obéré ses finances à tel point qu’elle est embarrassée pour
faire face à ses dépenses, et qu’elle a dû augmenter sa dette de plusieurs
millions. Je défie M. Dumortier, je le répète, de citer un seul acte de
vandalisme qu’on puisse reprocher au conseil de régence de Bruxelles.
Je ne vois pas en quoi
on puisse faire un reproche à la ville de Bruxelles de vouloir démolir la tour
de Hal. Car c’est ce qu’on peut trouver de plus hideux et pour sa forme
extérieure et pour les souvenirs qui s’y rattachent. L’honorable M. Dumortier
peut avoir des raisons de science pour conserver ce qu’il appelle un monument
antique. Il est membre de l’académie, il a pu trouver des souvenirs de science
attachés à cette tour ; mais nous, qui n’avons pas la prétention de faire ici
de la science, nous trouvons que, monument ou non, c’est une chose hideuse, qui
n’a rien de monumental, et que si, par hasard, on pouvait y trouver quelque
chose de monumental, il aurait été flétri par les changements apportés à cette
tour, qui a été modernisée par des percées qui ne rappellent rien de
l’antiquité.
On a
prétendu qu’il y avait plusieurs salons deux fois grands comme cette chambre.
Il suffit de voir l’extérieur en tenant compte de l’épaisseur des murs pour
être convaincu qu’il est impossible de trouver des salles doubles de la chambre
où nous siégeons, ce qui dans tous les cas ne pourrait donner à ce bâtiment
aucun aspect monumental à l’extérieur. La démolition n’inspirera de regret à
personne. Tout le monde au contraire désire voir disparaître cette masse qui,
comme on le disait tout à l’heure, ressemble à un gros caillou au milieu d’une
belle promenade. Hâtez-vous donc de faire disparaître ce gros caillou.
Je ne serai jamais
enthousiaste de monuments semblables, et dût-on m’accuser de vandalisme, je les
verrai détruire avec plaisir.
La ville verra si elle
doit ou non démolir ce bâtiment ; c’est son affaire. Le gouvernement y
transportera ou non les manuscrits, cela le regarde ; mais avant tout il faut
qu’il s’assure qu’il fera l’affaire de l’Etat sans mécompte. Je suis prêt à
voter la somme si le ministre veut prendre l’engagement qu’il ne fera pas pour
un sou de dépense avant de s’être entendu avec la ville et d’avoir établi son
droit, non pas par une simple allégation, mais le contrat authentique à la
main, qui lui défère la propriété ou l’usage perpétuel. Quand nous en viendrons
là, j’aurai mon mot à dire à la régence comme ici.
M. de Roo. - Il me semble qu’on pourrait diviser
le crédit demandé par M. le ministre. Une partie est destinée à faire des
constructions et l’autre au transport des manuscrits. Je serais disposé à voter
la somme demandée pour le transport des manuscrits, mais je ne serais pas porté
à accorder celle destinée à faire face aux nouvelles constructions à faire.
Puisque le ministre a
déjà dit qu’il n’emploierait la somme qu’autant…
M. Gendebien. - Le ministre n’a pas dit qu’il
n’emploierait pas la somme, mais qu’il y aurait absurdité à le faire sans le
consentement de la ville. Il y a tant d’autres absurdités qu’on a faites et qui
nous coûtent cher, qu’on pourrait bien encore faire celle-ci.
M. de Roo. - Le gouvernement fera valoir ses
droits ; en attendant, il pourrait toujours placer dans ce bâtiment les
manuscrits, sauf à payer à la ville de Bruxelles le loyer qu’il paie pour les
locaux actuels,
M. de Brouckere. - Je demande si le ministre
consent à déclarer qu’il n’emploiera le crédit qu’autant qu’il se soit entendu avec
la ville au sujet des bâtiments dont il s’agit. De cette déclaration dépend mon
vote.
M. le
ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je crois m’être suffisamment
expliqué en disant qu’il serait absurde de faire transporter les manuscrits à
la porte de Hal si on n’était pas sûr d’en conserver la propriété. Je ne puis
pas dire autre chose, pour ne pas compromettre les droits de l’Etat. Je puis
assurer du reste que je n’ai jamais eu d’autre intention que celle que je viens
d’exprimer.
Quant à la proposition
de diviser le chiffre, je répondrai que je ne veux pas un centime, si on ne
m’accorde pas la somme entière. Car si je n’ai pas de fonds pour approprier la
porte de Hal, dans la supposition où le dépôt des manuscrits pourrait être
établi là, je ne les y ferai pas transporter. Et dans le cas où nous ne
pourrions pas disposer de ce bâtiment, il faudrait quelques cent mille francs
pour construire des bâtiments nouveaux. De sorte que si on ne voulait accorder
que la somme nécessaire pour le transport des archives, elles resteraient
éternellement où elles sont.
M. de Roo. - Je renonce à la division que j’ai
proposée.
M. de Brouckere. - M. le ministre de l’intérieur
ayant dit qu’il ne ferait transporter les archives qu’autant que le
gouvernement serait assuré de conserver la possession de la porte de Hal, je
déclare que je voterai pour l’allocation de 30 mille fr. demandée.
- L’allocation de 30
mille fr. demandée par le ministre est mise aux voix et adoptée.
M.
Desmet. - L’an dernier, quand il fut question du transfert des
archives, la section centrale a pensé qu’on devait faire un triage de ces
archives, pour ne transporter que les archives utiles, et nommer une commission
pour faire ce travail.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- C’est chose très difficile qu’un triage d’archives.
Article 3 (devenu article 4)
« Art. 3 devenu art.
4. Archives de l’Etat dans les provinces (traitement des conservateurs et
autres dépenses) : fr. 6,800. »
- Adopté.
« Art. 5. Frais
d’inspection des archives dans les provinces, et frais de recherche et de
recouvrement des archives manquantes fr. 1,000. »
M. de Brouckere. - Je voudrais qu’on dît ce
que c’est que ces inspections.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Ce sont des tournées pour reconnaître si dans les dépôts qui sont dans les
provinces, il n’y a pas des archives appartenant à l’Etat. Les inspections
faites jusqu’à présent ont déjà produit des résultats très avantageux. Le
travail est à peu près terminé, je crois qu’il est important de ne pas l’arrêter.
M. de Robaulx. - Je voudrais savoir quelles
sont les espèces d’archives dont on fait l’acquisition, si ce sont quelques
lettres écrites par un Espagnol, un évêque ou des livres, comme cette bible sur
laquelle il est écrit de la main de Louis XIV : « Cette bible est à moi. »
Je déclare que je ne vois pas l’utilité de pareilles acquisitions. Peu nous
importe d’avoir des lettres de je ne sais qui, écrites à je ne sais qui et sur
je ne sais quoi, sans aucun caractère politique. Je conçois qu’on recherche
d’anciens traités sur les moeurs du pays. Mais pour des objets de pure
curiosité, comme il en est qu’on a achetés, je pense qu’on ne doit pas y
consacrer l’argent du pays. Je voterai en conséquence contre le crédit demandé.
- L’art. 5 est mis aux
voix et adopté.
Article 6
« Art. 6. Frais
d’impression des archives appartenant à l’Etat : fr 1,000 fr. »
- Adopté.
Chapitre XIV. Frais de célébration des fêtes nationales
« Art. unique. Frais de célébration des fêtes nationales : fr.
50,000. »
M.
Legrelle. - Je voudrais savoir si l’allocation de l’année dernière a
été entièrement épuisée. Vous savez que nous n’avons voté la somme demandée que
sur l’assurance qu’on nous a donnée, qu’on ne dépenserait que ce qui serait
strictement nécessaire.
Je prie M. le ministre
de vouloir bien nous dire si le crédit alloué l’année dernière a été
entièrement épuisé.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Le crédit accordé au budget de l’année dernière est tout à fait épuisé. Je
dois ajouter qu’il doit y avoir cette année une fête extraordinaire, et qu’en
conséquence on ne peut pas réduire le crédit demandé.
M.
Gendebien. - Je consens volontiers à accorder l’allocation demandée,
quel que soit le but qu’on se propose en donnant des fêtes en commémoration de
nos glorieuses journées de septembre. Mais j’exprime le désir qu’on ne fasse plus
de fêtes auxquelles ne puissent pas assister les hommes qui ont fait la
révolution, le peuple enfin ; qu’on ne donne plus le scandale d’un concert
monstre, comme on l’a appelé, auquel ont été conviés les hommes du lendemain et
même beaucoup d’ennemis de notre révolution, au détriment et à l’exclusion du
peuple qui l’a fait triompher.
Je le dis ici et je puis
le dire, tout le monde sait combien le peuple a été indigné de la manière dont
on a dépensé l’argent destiné à célébrer la commémoration des journées de
septembre. Si la somme de 50,000 fr. est nécessaire pour donner au peuple
quelque compensation du peu de profit qu’il a tiré de la révolution, du moins
que ce ne soit pas encore l’occasion d’un nouveau leurre ; si, pour l’éblouir,
sur le résultat négatif de la révolution, vous croyez devoir demander beaucoup
d’argent pour des plaisirs, au moins ne le trompez pas en donnant à ces fonds
une tout autre destination.
On vous a dit,
messieurs, que le crédit accordé l’année dernière avait été absorbé. Je crois
pouvoir opposer à cette déclaration une dénégation. Non, messieurs, ce crédit
n’a pas été employé en entier aux fêtes de septembre ; car, indépendamment de
la fête, du concert auquel le peuple n’a pas été admis, si les renseignements
que j’ai recueillis sont exacts, on a employé une partie de la somme à
commencer une construction que la chambre n’a pas autorisée. Je demande sur ce
point des explications. Il est possible que ce qu’on m’a dit soit inexact. Mais
on m’a assuré qu’une partie du crédit alloué pour les fêtes de septembre avait
été employé à commencer des constructions sur l’emplacement de l’ancien hôtel
Van Maanen, et on aurait fait cette imputation à
prétexte que les bâtiments qu’on construisait pourraient servir un jour aux
fêtes de septembre.
Je
ne sais si telle a été l’intention de la chambre, en allouant le crédit. Mais
je prierai de remarquer que non seulement sans la consulter, mais malgré elle,
on a commencé des constructions là où elle ne voulait pas qu’il en fût fait.
Je demande d’abord qu’on
s’explique sur la question de savoir si le crédit de 50,000 fr. alloué pour les
fêtes de septembre a été dépensé en entier pour l’objet auquel il était
destiné, et dans le cas de l’affirmative, je demande qu’on nous dise où on a
puisé les fonds pour commencer à l’ancien hôtel van Maanen
les constructions que la chambre avait repoussées.
M.
Rogier. - Messieurs, comme les constructions dont il s’agit ont été
commencées sous mon ministère, je crois de mon devoir de les défendre. Mon
intention, messieurs, était de prendre les premiers frais de ces constructions
sur les fonds destinés aux fêtes de septembre. Je ne sais si l’imputation a eu
lieu sur ce crédit, mais telle était mon intention, j’en fais l’aveu formel.
Je crois que les
explications dans lesquelles je vais entrer, justifieront aux yeux de la
chambre le ministère dont je faisais partie d’avoir entrepris des travaux que
j’ai à regretter de ne pas voir continuer par mes successeurs.
Le gouvernement, dans
toutes les circonstances où des réunions publiques avaient eu lieu à Bruxelles,
avait été frappé du manque absolu de locaux convenables pour réunir un grand
concours de monde. On sait, messieurs, qu’à cet égard le gouvernement est à la
merci de la ville de Bruxelles ou des simples particuliers, à telles enseignes
que lorsqu’il s’est agi de distribuer les instruments d’honneur aux chefs de
musique des divers régiments de l’armée qui étaient venus concourir aux fêtes
de septembre l’année dernière, il a fallu emprunter le local d’un café près du
Parc.
C’est là seulement que
le gouvernement a pu faire la distribution des instruments d’honneur, mais de
telle manière que ceux qui ont reçu des récompenses ont pu seuls pour ainsi
dire assister à la cérémonie.
Le gouvernement ne possède
pas à Bruxelles une seule salle où il puisse réunir cinquante personnes pour
une cérémonie quelconque. Cependant, le décret du gouvernement provisoire a
voulu qu’il fût célébré des fêtes nationales, et chacun de vous désire que le
plus de monde possible soit admis à la participation de ces fêtes. Tantôt c’est
pour un concours de musique, tantôt pour une exposition de peinture, tantôt
pour une exposition des produits de l’industrie que le manque de local se fait
sentir.
Le gouvernement, en
instituant des expositions d’objets d’art et d’industrie, a senti aussi la
nécessité de créer un local destiné à ces expositions. Le conservatoire de
musique de Bruxelles prend chaque jour de plus grands développements, qui
manque également de local pour ses concerts.
Le gouvernement avait
créé un musée national, il a été dans l’obligation d’emprunter un salon pour déposer
les tableaux qu’il avait achetés et ceux qu’il se proposait d’acquérir.
Il était aussi question
d’acquérir, en peu de frais, un cabinet d’estampes, et la difficulté de trouver
un local dans la ville de Bruxelles a fait manquer une négociation qui aurait
été fort utile pour les arts en général en Belgique.
C’est frappé de ces
considérations et d’autres dont je ferai grâce à la chambre que le gouvernement
a résolu l’année dernière d’établir sur les ruines de l’ancien hôtel du
ministère de la justice un monument national destiné à toutes les grandes
réunions nationales et en même temps à recevoir toutes les collections
appartenant au pays. Mais on a voulu procéder avec économie. On a pensé qu’en
prenant chaque année sur les fonds alloués pour les fêtes publiques, une
certaine somme, on parviendrait en 10 ou 20 ans, à avoir un tel monument qui
manque à la capitale et dont la dépense se ferait insensiblement.
Des raisons d’économie
exigeaient aussi que cette construction eût lieu. On s’est élevé à plusieurs
reprises contre l’élévation des dépenses faites pour construction dans les
fêtes précédentes. Une première année, on dépensa pour cet objet 25,000 fr., et
la seconde année 12 ou 15,000 fr. Cependant la réunion avait lieu en plein air,
et il ne fallait qu’un mauvais temps pour faire manquer tout à fait la fête,
car il n’y avait nulle part une salle où le public pût être abrité.
D’après le plan que
j’avais fait faire pour les constructions commencées à l’ancien ministère de la
justice, il devait y avoir une salle très grande destinée à recevoir le plus de
monde possible, de manière à ne pas admettre seulement les classes
privilégiées, mais tous ceux que les fêtes nationales pouvaient intéresser.
J’avoue que je ne
comprends pas les reproches qu’on pourrait adresser au gouvernement pour les
constructions ordonnées sur les ruines de l’ancien hôtel de la justice. Il
n’est pas exact de dire que la chambre se soit opposée à ces constructions.
Jamais il n’a pu entrer dans l’intention de la chambre de maintenir des ruines
dont la vue afflige la capitale. Je crois que c’était un devoir pour le
gouvernement de faire disparaître ces ruines, et de donner l’exemple de reconstructions
dont quelques personnes s’abstiennent en s’appuyant sur l’exemple du
gouvernement.
Quant à moi, je regrette
que le gouvernement ait renoncé, pour le moment, à continuer ces constructions
qui offraient un véritable caractère d’utilité. Mais j’espère qu’au budget
prochain, une allocation sera portée pour la continuation de ce local, à moins
que le ministère ne veuille continuer la marche que je me proposais de suivre,
prélever sur le crédit alloué pour les fêtes de septembre la somme nécessaire pour
payer les frais de construction ou l’intérêt des capitaux avancés.
J’ai encore un mot à
ajouter. On a rejeté une somme destinée à construire un local pour les
archives. Mais, je le répète, il n’est pas entré dans l’esprit de la chambre
d’interdire au gouvernement toute construction sur les ruines de l’ancien hôtel
du ministère de la justice ; la chambre ne s’est nullement expliquée dans ce
sens.
On
a dit que le peuple avait été exclu des fêtes de septembre ; j’avoue que je
n’ai pas été frappé de cette prétendue exclusion : à la vérité, un concert a eu
lieu dans un local ferme, mais ce concert aurait perdu tout son effet en plein
air ; je pense qu’il faut que le peuple
prenne part à la célébration commémorative des journées de la révolution, mais
je ne veux de privilège pour personne, pas plus pour le peuple que pour les
autres classes de la société. Le concert d’ailleurs était pour ainsi dire en
dehors des réjouissances publiques ; pour y être admis, il fallait payer. Il ne
s’agissait pas là des hommes de la veille, ni de ceux du lendemain, tout le
monde était admis pour dix francs.
Mais partout ailleurs,
j’ai remarqué que le peuple était admis sur le même pied que tout le monde, et
au jardin Botanique et ailleurs ; à vrai dire, toute la population de Bruxelles
ne pouvait pas être contenue dans le jardin Botanique, mais on avait pensé
qu’en plaçant le concert monstre, puisqu’on l’appelle de ce nom, dans le jardin
Botanique, il pouvait être entendu de la partie de la population qui
stationnait facilement sur le boulevard. Je ne vois donc que ce concert, placé
dans une église, qui n’ait pas été accessible à tout le monde, et je ne puis
m’associer aux reproches que l’on a cru devoir adresser au gouvernement.
M. Desmanet de Biesme. - Je dirai
comme mon honorable collège M. Gendebien, que ce concert donné dans un lieu
fermé a produit le plus mauvais effet sur le public.
On conçoit que les fêtes
de septembre doivent être des fêtes populaires ; les riches ont assez
d’occasions de s’amuser pendant toute l’année ; les fêtes de septembre sont
celles du peuple. L honorable M. Rogier a prétendu qu’une société était bien
libre de donner à cette époque un concert ou toute autre chose qui lui
conviendrait, mais je voudrais savoir si le gouvernement a contribué pour une
partie aux frais de ce concert ; cela changerait grandement la question. Les
fêtes de septembre doivent avoir lieu en plein air, qu’on construire des
estrades, et qu’on les conserve pour les années suivantes.
Je
ne conçois pas par quelle espèce de subtilité on a pu employer l’argent des
fêtes de septembre à rétablir les ruines de l’ancien hôtel van Maanen ; je m’étonne que la cour des comptes, d’ordinaire
si difficultueuse, ait si légèrement passé sur cette circonstance, elle n’en
avait pas le droit. Le ministre a dit qu’on construirait des salles ; je ne
comprends pas qu’il soit possible d’admettre que ces salles soient capables de
contenir une partie de la population. On a parlé hier de cet hôtel van Maanen ; je ne conçois pas que le gouvernement s’engage
dans des dépense sans avoir au préalable obtenu
l’approbation des chambres. Je concevrais qu’on vendît le terrain de l’hôtel
van Maanen pour payer les acquisitions que l’on a
l’intention de faire ; on cherche à acheter des hôtels, eh bien ! qu’on emploie le produit de cette vente à les payer.
On reconstruit l’hôtel
Torrington pour le ministère de l’intérieur ; il me semble qu’après cela il
faudrait vendre l’hôtel où se trouve actuellement ce ministère. Je le répète,
le gouvernement ne me semble pas avoir le droit de faire de pareils actes sans
l’autorisation préalable de la législature.
M. de Brouckere. - J’aurai bien peu de chose à dire après ce que
vient d’avancer mon honorable collègue M.
Desmanet de Biesme. Il est positif que l’ancien ministre de l’intérieur a sans autorisation fait un transfert au budget de 1834. Il
a pris une partie de l’argent destiné aux fêtes de septembre pour l’employer à
de bâtiments civils ; c’est donc un véritable transfert, et ce transfert est
vicieux à tout égard.
On comptait employer une
pareille somme pour les constructions projetées, et cela devait durer 20 années
; je vous demande ce qu’aurait coûté en 20 ans l’édifice de M. Rogier ; 20 fois
sa valeur. Je pense comme l’honorable M. Desmanet de Biesme qu’il faut vendre
le terrain de l’ancien hôtel van Maanen. Si ce n’est
pas l’avis du gouvernement, qu’il vienne nous dire franchement ce qu’il a
l’intention de faire.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- J’ai déjà annoncé que je n’étais pas à même en ce moment de faire un rapport
à ce sujet, mais qu’il en serait soumis un à la chambre à la session prochaine.
Quant ce qui concerne les fêtes de septembre, quoique ce fait ne m’appartienne
pas, je dois dire que dans mon opinion, ces fêtes ont beaucoup été faites dans
l’intérêt des plaisirs du peuple. Si on a donné un concert où toute la
population n’était pas admise, il y a eu aussi un spectacle gratis. Les riches
ont pu se rendre à leur concert et les classes moyennes au spectacle : de plus,
je dois dire qu’il y avait des choses fort bien imaginées dans le programme de
ces fêtes ; la convocation des archers et arquebusiers des principales villes
du royaume a produit un très bon effet. Les fêtes dans leur ensemble étaient
très bien conçues. Au surplus, je désire pour ma part qu’à l’avenir les fêtes
de septembre aient lieu en plein air.
M.
Dumortier. - Messieurs, lors de la discussion générale du budget de
l’intérieur, le premier, j’ai élevé des plaintes sur l’emploi d’une partie du
crédit de l’an dernier. J’ai déclaré que c’était une faute très grave de la
part du ministre d’appliquer une partie des dépenses a
un objet repoussé par la chambre. Pour que le ministre de l’intérieur d’alors,
M. Rogier, n’établisse pas de doute sur ce que j’avance, je vais donner lecture
de la décision qui s’opposait à la construction d’un bâtiment sur le terrain de
l’ancien hôtel van Maanen : « Il y a eu
unanimité dans les sections pour écarter cette proposition. Le gouvernement
précédent avait fait des dépenses considérables pour restaurer la porte de Hal
et l’approprier au dépôt des archives du pays, etc. La section centrale a été
unanime dans le rejet de l’allocation proposée. »
Ainsi, la section
centrale n’a pas voulu que l’on fît des constructions sur ce terrain et
lorsqu’un ministre est venu se permettre de transgresser une pareille décision,
il s’est rendu à mes yeux coupable de forfaiture.
La chambre a été d’un
avis unanime sur ce point ; elle a rejeté la proposition faite de bâtir sur ce
terrain, elle est loin d’avoir autorisé d’y élever des constructions. Distraire
les fonds d’un article pour les porter à un autre article, c’est se rendre coupable
de forfaiture ; car selon le code pénal, tout fonctionnaire qui s’écarte de ses
devoirs est coupable de forfaiture. Connaissant la manière honorable dont la
cour des comptes s’acquitte de sa mission, j’ai été étonné qu’elle ait autorisé
la dépense : mais ma surprise a cessé quand j’ai appris que le ministre avait
pris un moyen détourné. Il a demandé un crédit à titre de dépense à faire. Vous
savez que d’après les lois organiques, le congrès a voulu que toutes les
dépenses fussent soumises à un visa préalable afin d’empêcher qu’un ministre
appliquât les sommes allouées à autre chose qu’à leur destination ; quand on en
est venu à l’exécution, il est facile de reconnaître qu’il est certains objets
pour lesquels le visa préalable serait préjudiciable : par exemple, pour la
solde de l’armée, il ne faut pas de visa préalable. On a donc été obligé, au
congrès, d’autoriser les dépenses à faire. Qu’a fait l’ex-ministre de
l’intérieur pour méconnaître la volonté nationale ? Si je suis bien informé, il
a demandé un crédit pour dépenses à faire sur celui des fêtes publiques. C’est
avec cette somme qu’il a fait des constructions que vous aviez tous repoussées.
La conduite du ministre doit être blâmée dans cette occasion.
Si on tolérait une telle
conduite, on pourrait voir le gouvernement appliquer à d’autres objets les
sommes votées et le budget ne serait qu’un vain mot. Vous devez blâmer le
ministre, et il est des pays où il serait mis en accusation.
M.
Pirson. - Mettez-le en accusation.
M.
Dumortier. - Je sais ce que je dois faire et je sais comme on reçoit
ici la mise en accusation des ministres.
Je veux dire deux mots
sur l’emploi qui a été fait l’année dernière des sommes affectées aux fêtes de
septembre. J’ai vu que l’on avait substitué aux fêtes populaires des fêtes en
faveur de l’aristocratie financière, et qu’une fête a été préparée pour elle où
l’on payait 10 fr. à l’entrée. Ce n’est pas là remplir les vœux du congrès. Ce
ne sont pas les gens fortunés qui ont fait la révolution ; c’est le peuple qui
a élevé les barricades ; c’est le peuple qui s’est conduit en brave pendant les
journées de septembre, et qui a chassé les Hollandais ; c’est pour le peuple
que les fêtes doivent être données. Je blâme des fêtes données dans des locaux
décorés. Comme l’a dit le ministre de l’intérieur les fêtes populaires doivent
être données en plein air.
On s’est trompé encore
d’une autre manière sur le sens du décret du congrès. Ce décret porte que dans
toutes les villes il sera célébré des fêtes populaires ; cependant le crédit
est devenu l’apanage de la capitale. J’approuve les fêtes qu’on y donne ; mais
on ne doit pas en donner là seulement.
La
somme allouée l’année dernière doit suffire cette année. Je demande 30,000
francs ; avec cela on peut célébrer convenablement les journées de septembre,
au reste la véritable manière de fêter notre révolution, c’est, pour le
gouvernement, de ne pas écarter de lui les hommes de cette révolution. Je vois
avec peine qu’il les repousse. Cependant ce sont eux qui nous ont faits ce que
nous sommes ; sans eux nous ne serions pas ici ; sans eux il n’y aurait pas de
Belgique ! Pourquoi les repousser d’une manière indigne ? Rendez justice à ces
hommes. J’ai sur moi la preuve de faits déplorables, et mon cœur saigne quand
je considère comment on traite les hommes de septembre, et quand je vois que le
gouvernement leur préférer des intrigants, et des hommes du lendemain.
M. de Robaulx. - Les hommes de la révolution
auront la croix de fer.
M.
Rogier. - La chambre n’avait pas autorisé le gouvernement à faire des
constructions sur l’emplacement de l’ancien hôtel du ministère de la justice
pour y mettre les archives du royaume ; mais elle n’avait pas interdit d’y
faire aucune construction. J’ai expliqué comment le gouvernement avait été
amené à commencer les travaux sur cet hôtel ; et si j’avais cherché à me
couvrir du manteau de la popularité, en faisant sonner bien haut le nom du
peuple, j’aurais dit que l’intention du gouvernement en faisant ces
constructions était dès le principe toute populaire. J’avais demandé à
l’architecte qu’il construisît une vaste salle…
M.
Pirson. - Avec 10,000 fr.
M.
Rogier. - … sur les murs de laquelle il s’était proposé, au mois de
septembre dernier, d’élever une tente. Je suis partisan des fêtes en plein air
; il peut survenir des jours de pluie, et il ne faut pourtant pas laisser le
peuple sans abri. Il me semble avoir démontré par là autant d’égards pour le
peuple que ceux qui préfèrent le voir en plein air, exposé aux intempéries de
la saison.
Il est faux que le
gouvernement ait voulu surprendre la cour des comptes, l’arrête qui ordonnait
la construction d’un vaste local a été communiqué à la cour des comptes ; elle
a liquidé les dépenses comme légalement faites. C’eût été une véritable
absurdité que de vouloir procéder d’une autre manière : on ne peut tromper
personne dans des cas semblables ; du jour au lendemain on eût découvert la
supercherie.
On a parlé des
intentions du congrès relativement à l’institution des fêtes ; je crois être
plus à même que mon honorable adversaire de faire connaître ces intentions, car
je suis l’auteur de la proposition d’après laquelle des fêtes nationales ont
été instituées. Je nie que l’intention du congrès ait été de vouloir que la
capitale n’en fût pas le siège. A plus d’un titre la capitale mérite d’être et
de rester le siège de toutes fêtes. C’est dans la capitale que la révolution a
éclaté ; c’est dans la capitale que la révolution a triomphé, et c’est sur le
lieu du triomphe qu’il faut en célébrer les fêtes commémoratives ; si vous
éparpillez sur la surface du royaume les 50.000 fr. qu’il faut chaque année
arracher à la chambre, vous feriez des fêtes très peu dignes de leur objet,
très peu nationales, très peu populaires !
Pendant les deux années
que j’ai été au ministère, j’ai constamment eu en vue de donner aux fêtes de
septembre le caractère de popularité qu’elles comportent. Nulle part les fêtes
nationales n’ont eu, on peut le dire, plus de popularité qu’en Belgique.
Néanmoins, il serait ridicule de vouloir en éloigner les classes moyennes et
les classes riches ; et à cet égard, je dirai ma pensée tout entière.
Certes, messieurs, à
Bruxelles pas plus qu’a Paris, la révolution n’a été le résultat d’un hasard
instantané : elle a été préparée de longue main, non par les classes du peuple
qui n’arrivent qu’au moment de l’action, mais par les riches, par les classes
moyennes instruites. Les riches et les hommes éclairés des classes moyennes ont
eu la plus grande part à notre révolution, soit en la préparant, soit en la
soutenant quand l’événement a été consommé.
Quant à moi je
regarderai comme une absurdité, comme une injustice de proscrire les classes
riches de toute participation aux fêtes nationales.
Je ne sais, messieurs,
s’il m’appartient de défendre le gouvernement contre le dernier reproche que
lui a adressé le préopinant relativement à l’abandon où il aurait laissé les
hommes de la révolution, au dégoût dont on les aurait abreuvés. Si ce reproche
s’adresse au ministère précédent, je porterai le défi le plus formel de citer
un fait par lequel on puisse prouver que le gouvernement ait voulu porter le
moindre préjudice à un citoyen par cela seul qu’il aurait défendu la cause de
la révolution.
L’esprit
de l’administration précédente a toujours été favorable aux hommes qui ont contribuer au mouvement national. Je ne doute pas que
l’esprit de l’administration actuelle ne soit le même. Les rapports que, par ma
position, j’entretiens avec l’administration supérieure me mettent à même
d’assurer qu’aujourd’hui comme alors les hommes de la révolution, loin d’être
abandonnés, sont, lorsque les besoins du service le permettent, préférés à ceux
qui n’ont pas donné les mêmes gages de dévouement à la cause nationale. Il est
impossible qu’il n’existe pas des oublis, des injustices partielles. La tâche
du gouvernement est de jour en jour de faire disparaître ces oublis, ces
injustices partielles. Je suis persuadé que le ministère, comme le ministère
précédent, ne viendra jamais de gaîté de cœur mécontenter les hommes qui ont
fondé l’ordre national en Belgique. Je ne comprends pas que l’on se livre à des
reproches d’une telle aigreur. Très souvent l’on prête l’oreille à des
mécontentements individuels, et l’on croit y voir l’expression de plaintes
générales qui n’existent pas.
Cependant, la localité
qu’habite l’honorable M. Dumortier, devrait moins que tout autre contenir des
mécontents. Quiconque a consulter le tableau des
cadres de l’armée, a dû remarquer le nombre d’officiers tournaisiens qui
servent dans ses rangs. Je ne puis au reste qu’en féliciter l’armée et le pays,
parce que ce sont d’excellents patriotes et qu’ils ont la réputation d’être également
d’excellents soldats.
M. H. Dellafaille, rapporteur. - Je ne répèterai pas les
qualifications un peu sévères dont s’est servi l’honorable M. Dumortier à l’égard
du ministère précédent. Je ne verrai dans l’application du crédit pour les
fêtes nationales à la reconstruction d’un hôtel une forfaiture, mais tout
simplement une erreur.
C’est une erreur, parce
que le crédit avait été alloué pour des fêtes et non pour des constructions.
L’honorable M. Rogier a dit que la chambre avait rejeté le principe de la
construction d’un bâtiment pour les archives, mais non toute construction
quelconque. Je lui demanderai en vertu de quel droit le gouvernement peut faire
une construction pour laquelle il n’a pas reçu d’autorisation de l’assemblée.
Il faut que la chambre affecte un crédit spécial. Jusque-là le gouvernement n’a
pas le droit de rien construire. J’aurais passé cette allégation sous silence,
si l’honorable membre s’était borné à défendre la conduite du ministère
précédent. Mais il a exhorté le ministère actuel à suivre les mêmes errements.
Si la section centrale, prévoyant ce conseil, avait pensé que le ministère pût
le suivre et détourner de sa destination primitive des sommes demandées pour
une solennité nationale, elle aurait rejeté le crédit. Il est du devoir de la
cour des comptes de ne pas viser de pareilles dépenses.
Si les erreurs du
gouvernement étaient admises avec indulgence, il finirait par croire que la
chambre est disposée à y souscrire tacitement.
Quant aux fêtes, j’en
dirai peu de chose. Je crois que ces fêtes doivent avoir lieu en plein air, que
tout le monde doit être appelé à y prendre part. Si le gouvernement cependant
croit devoir construire un local couvert, qu’il demande un crédit spécial. La
chambre examinera l’opportunité de la dépense.
Je ne dirai qu’un mot
sur une observation de l’honorable M. Dumortier, sur la nécessité qu’il y a, selon
lui, de répartir les fonds des fêtes entre toutes les villes du royaume.
M. Dumortier. - Je n’ai pas dit cela.
M. H. Dellafaille, rapporteur. - Je crois que la chose serait
impraticable. J’ai cru devoir répondre à l’honorable M. Rogier. Je dirai en terminant que je voterai en faveur de
l’allocation demandée.
M.
Gendebien. - Il reste très vrai que l’on a détourné une partie de la
somme destinée aux réjouissances publiques pour la faire servir à l’amusement
des riches. C’est l’ex-ministre de l’intérieur qui l’a avoué lui-même,
puisqu’il fallait, dit-il, payer une entrée de 10 francs pour être admis dans
la salle du concert pour lequel il a été fourni un subside sur les 50,000
francs. Je reviens à un fait plus grave, celui de la reconstruction de l’ancien
ministère de la justice. J’insiste sur ce sujet, parce qu’il est bon que la
chambre se montre sévère sur de pareils actes qui peuvent l’engager dans de
fortes dépenses. S’il ne s’agissait que d’une somme de quelques milliers de
francs dépensée une fois pour toutes, l’on pourrait être indulgent. Mais l’on a
voulu entraîner la nation dans une dépense que le ministre lui-même
apprécierait difficilement. Quelle excuse vous a-t-on présentée pour pallier cet transfert illégal de fonds ? On a dit que le
gouvernement avait reconnu la nécessité de posséder un local très vaste pour
les fêtes publiques et pour le conservatoire de musique et autres objets
relatifs aux arts. Mais qu’est-ce que le gouvernement en matière de
constructions et de dépenses publiques ? Ce sont les chambres, c’est le pouvoir
législatif qui ordonne ; le pouvoir exécutif vient ensuite pour exécuter ce que
les chambres ont consenti ou ordonné. L’administration n’a pas le droit de
faire une construction qui été préalablement approuvée par la chambre.
Lisez l’article 115 de
la constitution ; il est formel à cet égard :
« Toutes les dépenses de
l’Etat doivent être portées aux budgets et dans les comptes. »
La dépense a-t-elle été
portée au budget ? Non ; M. l’ex-ministre de l’intérieur l’avoue lui-même.
Mais, ajoute-t-il, la chambre n’avait refusé que la construction d’un bâtiment
pour les archives. Vous voyez que l’on cherche à se défendre par une subtilité.
Le gouvernement a reconnu la nécessité de demander aux chambres une allocation
spéciale pour la construction d’un bâtiment destiné aux archives.
Tout le monde était
d’accord sur le principe, seulement on n’était pas d’accord sur le mode
d’exécution. Et la chambre, alors que tout le monde était d’accord sur la
nécessité de prendre des mesures pour la conservation des archives, a refusé
l’allocation demandée pour constructions à cet effet. Je vous demande si le
ministre aurait pu, malgré le rejet de l’allocation, se permettre de commencer
cette construction en imputant la dépense sur un crédit quelconque ? Cependant
là il y aurait eu quelque chose de plausible, puisqu’on avait reconnu a priori
la nécessité de pourvoir à la conservation des archives. Pour les constructions
dont il s’agit, la chambre n’a pas été même consultée. Ainsi le rejet d’une
construction pour les archives devait avertir le ministre qu’il ne pouvait y
substituer une autre construction dont l’utilité pouvait être contestée.
Le gouvernement, dit-on,
ne peut pas rester constamment à la merci des particuliers ou de la ville, pour
les fêtes qu’il donne. Mais, messieurs, le gouvernement ce sont les chambres,
c’est le pouvoir législatif.
Si vous vouliez un
local, vous pourriez vous entendre avec le propriétaire du grand concert.
Un membre. - C’est trop petit !
M.
Gendebien. - C’est trop petit, dites-vous ? Mais il y en a un assez
vaste, c’est la salle du Grand Théâtre. Vous voulez une salle qui puisse
contenir dix mille personnes, là vous pouvez les réunir. Au moyen du plancher
qu’on établit pour les bals masqués, vous réunirez là autant de monde que vous
pouvez désirer.
Un membre. - On ne peut pas y réunir dix
mille personnes.
M.
Gendebien. - Si vous n’admettez pas qu’on puisse réunir dix mille
personnes au Grand-Théâtre, je vous demande ce que coûterait une salle plus
grande que ce Théâtre ! Et l’on veut construire un pareil local sans le
consentement des chambres ? Et on veut faire cela sur les rognures des
cinquante mille fr. destinés aux fêtes nationales ? et
on veut faire cela en vingt ans ? Pour se justifier, on dit qu’il y a nécessité
de faire un local et cette nécessité ne sera satisfaite que dans vingt ans :
quelle contradiction !
Messieurs, le ministre
savait bien qu’il faisait quelque chose d’illégal, car en commençant il a été
averti par la cour des comptes. Il avait d’abord pris un arrêté par lequel il a
décrété cet immense local en spécifiant les diverses destinations qu’il voulait
lui donner.
La cour des comptes a
refusé l’allocation pour cet objet ; le ministre est revenu à la charge, et il
a demandé une somme à valoir sur le crédit alloué pour les fêtes de septembre.
On avait rencontré un obstacle légal, on a tourné la difficulté en demandant
une allocation sur les fêtes de septembre. Voilà comment les choses se sont
passées. Si ce que je dis n’est pas exact, qu’on me rectifie.
Je ne dirai plus qu’un
mot. Le ministre de l’intérieur vous a dit qu’à la session prochaine il présenterait
un projet de loi pour disposer du terrain de l’hôtel van Maanen.
Je désire que le ministre de l’intérieur n’attende pas la session prochaine, je
désire qu’il fasse examiner au plus vite ce terrain ; il peut être employé à de
belles constructions civiles. C’est un terrain précieux qui serait très bien
vendu. Ce n’est pas au moment où nous sommes obligés d’acquérir des locaux pour
les diverses administrations dans le voisinage de notre chambre que nous
pouvons penser à faire d’autres constructions.
Qu’on
vende le terrain qui, je le répète, est propre à faire de belles constructions
; qu’on perce une rue partant de la rue des Petits-Carmes et arrivant jusqu’à
la rue de
Nous ne sommes pas dans
une position tellement prospère, que nous puissions laisser des capitaux sans
emploi, puisque pour couvrir nos dépenses extraordinaires, nous sommes obligés
d’augmenter de dix centimes toutes les contributions.
Voilà ce que j’avais à
dire sur cette question, et j’espère que le ministre qui a succédé à celui qui
a fait la faute que j’ai signalée ne la continuera pas, et que pour la réparer,
il avisera au moyen de tirer le meilleur parti possible de ce terrain.
M. de Brouckere. - Il est prouvé à toute
évidence que l’ancien ministre de l’intérieur a fait
sur le budget de 1834, de sa propre autorité, un transfert qui ne lui était pas
permis. On a témoigné quelque surprise de ce que la cour des comptes n’avait
pas empêché ce détournement, et on a ajouté que probablement on avait usé de
supercherie à son égard. Il est important que la chambre sache comment les
choses se sont passées.
Je tiens en main la
correspondance qui a eu lieu entre le ministre et la cour des comptes à ce
sujet.
L’ancien ministre avait
fait faire une dépense montant à 7,398 francs 63 cent. ; ce
sont, d’après ce que vous avez entendu 7,398 fr. et 63 c. jetés à l’eau. Le 5
août, une demande fut faite à la cour des comptes afin qu’elle autorisât le
payement de cette somme au sieur Michelet, entrepreneur. Voici ce que répondit
le 14 août la cour des comptes :
« Cour des comptes.
« Bruxelles, le 14
août 1834.
« Monsieur le
ministre,
« La cour a
l’honneur de vous renvoyer la demande de paiement au profit du sieur Michelet,
que vous lui avez adressée par dépêche du 5 de ce mois n°844, 3ème division.
« Cette demande de
paiement a pour objet les frais de construction d’un local devant servir à la
célébration des fêtes nationales.
« Voici les
observations auxquelles elle a donné lieu, et sur lesquelles la cour vous prie
de lui donner quelques explications, avant de la liquider.
« La dépense est
imputée sur le chapitre XIII du budget dont l’allocation est destinée à la
célébration des fêtes nationales, de sorte que la cour n’aurait aucune
objection à faire si l’arrêté du 15 juillet 1834 n’était rappelé en marge de la
demande de paiement ; mais il résulte dudit arrête que l’on a en vue la
construction d’un local qui doit servir à la célébration dés fêtes et
solennités nationales, aux expositions, aux dépôts des collections appartenant
à l’Etat, et qu’il devra contenir en outre une salle d’exercices pour le
conservatoire royal de musique.
« L’art. 3 du même
arrêté dispose que les frais d’acquisition de terrain et de construction seront
imputés pour l’exercice 1834 et pour les exercices subséquents sur les fonds aliénés
au département de l’intérieur pour les diverses branches auxquelles le local à
construire sera utile.
« Tout en rendant
justice, M. le ministre, aux vues d’utilité qui ont présidé à la conception de
l’arrêtée prémentionné, la cour se demande si elle peut donner la sanction à
des imputations sur plusieurs chapitres, par cela seul que le bâtiment est
destiné à des usages divers. Elle pense qu’elle ne le pourrait sans autoriser
des transferts, et que pour sanctionner la marche que l’arrêté indique, il faudrait
une autorisation spéciale de la législature, en indiquant à chaque allocation
la partie qui serait destinée pour la construction de ce bâtiment.
« La cour doit
néanmoins vous faire observer qu’elle ne trouve point d’inconvénient à imputer
la demande de paiement au profit du sieur Michelet sur l’allocation des fêtes
nationales, et de considérer ces constructions comme remplaçant celles qui
devraient avoir lieu pour cet objet.
« Mais avant de
viser la demande de paiement, M. le ministre, elle aura l’honneur de vous prier
de vouloir lui donner des explications plus précises concernant l’objet de
l’arrêté du 15 juillet dernier.
« La cour des
comptes.
« Le président, X.
Willems. »
Voici ce qui fut répondu
à la cour des comptes par le ministre de l’intérieur, le 19 août dernier :
Vous pouvez apprécier
jusqu’à quel point le ministre s’est bien ou mal conduit dans cette affaire.
« Ministère de
l’intérieur.
« Bruxelles, le 19
août 1834.
« Messieurs,
« En réponse à
votre lettre du 14 de ce mois, 2ème division, n°19936, j’ai l’honneur de vous
adresser de nouveau, avec prière de la revêtir de votre visa, la demande de
paiement n°7528, de fr. 7,398-63, délivrée au profit du sieur Michelet, maçon à
Bruxelles, pour frais de construction d’un local devant servir à la célébration
des fêtes nationales.
« Vous remarquerez,
messieurs, que, conformément à vos observations, je n’ai plus rappelé en marge
de ladite demande de paiement l’arrêté du 15 juillet dernier, pour l’exécution
duquel il sera demandé à la législature un crédit spécial.
« Le ministre de
l’intérieur, de Theux. »
Par suite de cette
correspondance, les 7,398 fr. 63 cent, ont été payés au sieur Michelet.
Messieurs, j’ai deux
mots encore à répondre à l’ancien ministre de l’intérieur. Il s’appuie sur ce
que la chambre n’a pas interdit toute espèce de construction sur l’emplacement
de l’ancien hôtel van Maanen. Je veux supposer pour
un instant que cela est vrai, que la chambre n’aurait pas interdit toute espèce
de construction en cet endroit ; cela ne suffirait pas, il faudrait qu’il
prouvât que la chambre l’a autorisé a en faire : car il ne peut se permettre
d’entreprendre aucune construction aux frais de l’Etat, sans y avoir été
autorisé par la législature. Il aurait eu de la peine à prononcer que la
législature a autorisé une construction quelconque, car il a demandé une seule
fois une allocation pour faire une construction sur les ruines de l’ancien
hôtel de la justice, elle lui a été refusée, et depuis lors il n’en a plus été
question.
On nous a répété plusieurs
fois que c’était dans un but louable que la construction avait été entreprise,
que c’était dans l’intérêt du peuple qu’on voulait qu’a l’avenir, aux jours où
les fêtes nationales se célébreraient le peuple fût abrité.
Je
ferai remarquer que d’après ce que vient de vous dire l’ancien ministre, on ne
voulait abriter le peuple que dans 20 ans ; mais pendant 20 ans qu’on devait
mettre à construire la salle projetée, ce pauvre peuple devait continuer à être
mouillé comme il l’est aujourd’hui. (On
rit.)
Après cela, je vous
dirai que c’était un très mauvais calcul que de commencer un bâtiment pour ne
le terminer qu’en 20 ans, cela augmente les dépenses considérablement. Un de
mes collègues a bien voulu faire un petit calcul, et me le communiquer. Vous
allez voir comme l’ancien ministre de l’intérieur gérait bien les affaires de
l’Etat.
M.
Rogier. - J’ai dit qu’on pourrait payer en dix ou vingt ans, mais non
qu’on mettrait ce temps pour terminer les constructions.
J’en appelle aux souvenirs
de la chambre
M. de Brouckere. - En n’appliquant que 7,300
fr. par an le bâtiment n’aurait pas été fait en vingt ans. D’ailleurs, peu
m’importe que la construction ait dû être terminée en moins de temps, il
fallait toujours payer l’intérêt du capital.
Voilà le calcul qui
m’est communiqué :
Un bâtiment qui serait
d’une dépense d’un million, fait en 2 ans, coûterait un million cinquante mille
francs, fait en 20 ans, il coûterait 2 millions 454 mille fr.
La chambre peut se convaincre
que le projet de l’ancien ministre était un très mauvais calcul. (Aux voix ! aux voix !)
M.
Rogier. - Je dois pouvoir me justifier aux yeux de la chambre, puisque
je suis attaqué d’une manière violente et fort injuste.
On vient de me prêter
l’idée absurde d’avoir vouloir faire construire un bâtiment en vingt ans. J’ai
dit que j’avais calculé que le paiement pourrait avoir lieu en vingt ans si on
y imputait annuellement une partie du crédit alloué pour les fêtes nationales.
La chose pouvait se
faire aussi bien en imputant chaque année une certaine somme sur le crédit
destiné aux fêtes nationales. En effet, des offres avaient été faites en ce
sens au gouvernement ; un architecte voulait se charger de faire les
constructions en deux ou trois ans, sauf à payer chaque année les intérêts du
capital, plus une certaine somme pour l’amortissement. Si ce mode n’avait pas
convenu, si on l’avait trouvé trop onéreux, rien n’aurait empêché de demander
un crédit spécial.
A cet égard, les
plaisanteries de l’honorable préopinant tombent à faux, car je n’ai nullement
dit qu’il aurait fallu 20 ans pour exécuter les travaux. M. Suys
m’avait assuré qu’en 2 ans il aurait terminé la construction du bâtiment
principal. Messieurs, au fond, la discussion roule sur ce que ces sept mille
francs ont été pris sur le crédit alloué pour les fêtes nationales. J’ai déjà
dit que la dépense était justifiée par le manque de locaux, et que j’avais eu
l’intention de faire construire un temple immense sur l’emplacement de l’ancien
hôtel du ministère de la justice, où on pût donner des fêtes auxquelles un
grand concours de monde pût être admis. Je pense que le temps aura manqué à mon
successeur pour examiner et exécuter le projet tel qu’il avait été conçu
primitivement.
On
avait pensé aussi à construire une grande salle en bois. Je pense que si, au
lieu de fondations en briques, j’avais construit une salle en bois, pour la
célébration des fêtes de septembre, pour le concert, on n’aurait pas pu venir
avec la moindre apparence de raison, attaquer cette construction, et prétendre
que c’était un détournement de fond illégal. La chambre, sans doute, n’aurait
pas autorisé une construction semblable si on la lui avait proposée, mais le
gouvernement pouvait disposer, pour les fêtes comme il l’entendait, des 50,000
fr. alloués. Une année, on a dépensé 30.000 fr. pour une estrade, et une autre
aunée on a employé 7,000 fr. à un commencement de construction.
Je ne pense pas qu’on
puisse, dans aucun cas, appeler détournement de fonds, l’emploi qui a été fait
d’une partie des 50,000 fr. C’est une expression importante. Il n’y a là qu’un
transfert de crédit. (La clôture ! la
clôture !)
M.
Dumortier. - Je demande la parole contre la clôture.
Je ne pense pas que
l’intention de l’assemblée soit de clôturer la discussion. L’ancien ministre
prétend qu’il n’y a eu qu’un transfert. Non, messieurs, il n’y a pas eu de
transfert. Pour que la dépense dont il s’agit fût un transfert, il faudrait
qu’il y eût eu un crédit voté, et le crédit demandé a été rejeté par la
chambre. Donc c’est un détournement de fonds dans toute la force du terme.
Savez-vous ce qu’on a
fait en France dans une occasion semblable quand M. de Peyronnel...
(Aux voix ! aux voix !) Une question
de cette gravité ne doit pas être traitée légèrement.
Une question aussi grave
ne doit pas être traitée légèrement, j’entends plusieurs membres demander
instamment la clôture, je vois que l’estomac va l’emporter ici sur la raison.
On désire en finir, me dit-on, et moi aussi, je suis pressé d’en finir, mais
quoiqu’il en soit, je répète que la chambre ne doit pas se montrer si facile
quand il s’agit d’un pareil détournement de fonds. En France, on a montre plus
de rigidité quand M. de Peyronnet employa dix-huit mille francs pour sa salle à
manger : on les lui fit restituer. Ici, on doit le faire à plus forte raison,
puisque le ministre a fait un emploi illicite d’une somme plus forte.
Plusieurs membres. - La clôture ! la
clôture !
- La clôture est prononcée.
Le chiffre demandé par
le gouvernement est adopté.
Chapitres XV - Récompenses honorifiques et
pécuniaires
Chapitre XVI - Statistique générale
Le chapitre XV, 10,000
fr. est adopté.
Le chapitre XVI, 2,540
fr. est également adopté.
M. le président. - Il y a des articles que l’on a
laissés de côté.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Il y a le budget de la police qui a été rejeté, du budget de la justice au
budget de l’intérieur. (A demain ! à
demain !)
M.
le président. - C’est un simple transfert à opérer. « Frais de
police, mesure de sûreté publique : fr. 80,000. »
M.
Gendebien. - L’article a été discuté et adopté, il me semble.
M. de Brouckere. - Il n’est pas probable que
nous terminions aujourd’hui le budget de l’intérieur, puisque nous avons à
délibérer sur plusieurs points importants : 1° sur les réparations des rives de
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Si la chambre le désire, je donnerai lecture de ce rapport.
M.
Legrelle. - Il vaut mieux passer à un autre article.
M.
Dumortier. - Le président du sénat désirerait que le budget de
l’intérieur fût voté demain, parce que le sénat se séparera si on ne le lui
porte pas incessamment. On pourrait faire du canal de Zelzaete l’objet d’une
loi spéciale ; je demanderai donc à la chambre que pour conserver la bonne
harmonie qui règne entre les deux chambres, on fît une loi spéciale pour ce
canal, comme on a fait pour le chemin de fer.
Chapitre II. - Pensions et
secours
M.
le président. - « Secours aux nécessiteux belges victimes de
l’agression hollandaise ou des ravages de la guerre : fr. 300,000. »
M. Legrelle se
rallie-t-il à la rédaction de la section centrale ?
M.
Legrelle. - Je me propose de m’y rallier, car je trouve qu’elle exprime
mieux ma pensée.
M.
Gendebien. - Je ne crois pas qu’il puisse s’élever de discussion sur
cet article ; pour moi, je voterai pour son adoption avec la plus vive
satisfaction.
M.
Dumortier. - Moi non plus, messieurs, je n’ai pas l’intention de
m’élever contre le chiffre de 300,000 fr. qu’on vous propose. Mais je dois
manifester le désir que cette allocation ne retarde pas la discussion d’une loi
d’indemnités qui s’appliquera à toutes les personnes lésées indistinctement,
qu’elles soient nécessiteuses ou non. Ces 300,000 fr. ne sont qu’un à-compte
que l’on accorde aux individus qui, par leur position de fortune, ne sont pas
en état d’attendre plus longtemps. C’est un acte non pas de munificence, mais
de justice. Et comme la justice n’admet pas de distinction entre les personnes
nécessiteuses et celles qui sont dans l’aisance, je désire que la chambre ne
perde pas de vue les droits des individus qui attendent depuis longtemps le
règlement de leur indemnité.
Puisque le gouvernement
a présenté une loi sur cette matière, j’insiste pour que la chambre la discute
sous peu.
Les sections ont été
saisies de ce projet. Elles ont communiqué leurs rapports à la section
centrale.
Il est à désirer que
celle-ci se hâte de terminer son travail pour que nous puissions enfin
acquitter cette dette de la révolution. C’est sous cette réserve que je voterai
le crédit demandé.
- L’article additionnel
est mis aux voix et adopté.
Il formera l’article 5
du chapitre II du budget du ministère de l’intérieur.
Chapitre IX. - Travaux publics
M.
le président. - « Travaux à
M.
Simons., auteur de la proposition, se rallie au chiffre adopté par la
section centrale.
M. de Brouckere. - C’est une rente qu’on
veut nous faire payer.
M.
Gendebien. - Comme le dit mon honorable ami M. de Brouckere cette
allocation est une rente au profit des riverains. Messieurs, tous les ans, pour
emporter d’assaut cette espèce d’allocation on vous dit que la somme est
indispensable si l’on veut éviter de grands malheurs.
Aucun ministre ne s’est jamais
aperçu de cette urgence. Jamais on ne nous a parlé de la nécessité de faire des
dépenses pour réparer les rives de
Il
y a nécessité de savoir jusqu’à quel point nous devons pourvoir à l’entretien
des rives de
Je déclare que je
voterai contre l’allocation demandée en ce moment, mais je déclare aussi que si
le droit est reconnu, je ne m’arrêterai pas à la somme de 40 ou 50 mille fr. et
que j’accorderai la somme nécessaire, quelle que soit sa hauteur.
Je n’accorderai rien à
l’intérêt particulier ni à l’intérêt général, quand les demandes seront faites
comme celle qui nous occupe.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- L’honorable préopinant a raison de ne rien accorder à l’intérêt particulier,
mais il est évident qu’il s’agit ici d’une question d’intérêt général. Chacun
sait que les revenus des fleuves et rivières sont employés annuellement par les
provinces à l’entretien et à l’amélioration des rivières, et à accorder des
subsides quand il y a lieu pour les constructions au-dessus des forces des
particuliers.
Il ne faut pas perdre de
vue la position tout exceptionnelle de la province du Limbourg. En 1819 les
fleuves et rivières furent abandonnés à toutes les provinces. Le lot le plus
onéreux échut en partage à la province du Limbourg. Aussi n’a-t-elle cessé de
protester contre le don qu’on lui avait fait, parce que les dépenses étaient
beaucoup au-dessus des produits des péages. Or, messieurs, si la province du
Limbourg n’était pas sans motif pour se plaindre alors qu’elle percevait des
produits annuels de 20 mille florins, combien sa position n’est-elle pas
devenue plus intéressante depuis qu’elle ne perçoit plus rien !
La province du Limbourg
a été alors, sur l’invitation du gouvernement, obligée de cesser toute espèce
de perception, de sorte qu’elle a été privée du revenu qu’elle retirait de ce
chef, et la somme de 40,000 florins, primitivement allouée, ne lui a cependant
pas été restituée. N’est-il pas juste que le gouvernement, successeur de la
province du Limbourg dans les droits que celle-ci avait sur
La
somme demandée a le double but de faire les travaux jugés nécessaires en tant
qu’ils concernent la navigation, et d’autre part d’accorder quelques subsides
aux communes qui n’ont pas les moyens d’exécuter elles-mêmes les travaux
auxquels elles sont obligées. Ces secours avaient été accordés également à
l’époque où le gouvernement avait la perception des revenus de
La demande qui vous est
faite est une demande fondée en équité. C’est le complément de l’allocation que
vous avez accordée l’année dernière. Vous assurerez contre la force des eaux
les propriétés des riverains et des communes. J’ai fait du reste auprès des
administrations locales des démarches à cet égard, que je continuerai jusqu’à
ce que je parvienne à un résultat.
M. de Brouckere. - C’est la troisième fois
que l’on sollicite une allocation de cette nature. Jusqu’ici je ne me suis pas
élevé contre ces demandes successives. Mon silence doit être attribué à l’intérêt
que je porte à une province que j’ai longtemps habitée.
Il me semble que notre
facilité commence à dégénérer en abus. C’est encore une fois pour travaux
urgents à
On prétend que l’on fera
une chose équitable envers les riverains en allouant des fonds ; je ne vois pas
qu’il en puisse être ainsi ; je ne vois pas qu’il faille aller à leur secours ;
mais pourquoi le gouvernement s’obstine-t-il à ne pas présenter un projet de
loi sur la matière, l’on s’est déjà élevé sur l’irrégularité du procédé du
gouvernement… Je m’aperçois que la chambre est fatiguée ; je le conçois,
l’heure est avancée, remettons à demain ; nous ne sommes plus en nombre pour
délibérer... (Parlez ! Parlez !) Je
n’ai que quelques réflexions à ajouter. C’est à la législature à prononcer sur
la part qui doit être à la charge du gouvernement, sur celle qui doit être à la
charge de la province et sur celle qui doit peser sur les riverains de
En février 1836, un
membre viendra encore nous dire : il y a des travaux urgents à
En
résumé je ne refuserai pas mon vote si le ministre veut prendre l’engagement de
ne pas venir faire des demandes semblables ni les appuyer ; s’il veut prendre
l’engagement de présenter Un projet de loi qui règlera la matière, et cela
avant le budget de 1836.
Auparavant on mettait
dans le libellé de l’article : « Sauf recours contre qui de droit. »
Le libellé porte
maintenant : « Travaux à
Comment le ministre s’y
prendra-t-il pour récupérer les sommes allouées jusqu’à présent, s’il était
prouvé que l’Etat ne devait pas faire les dépenses ? Vous voyez que cet état de
choses doit prendre une fin. Nous sommes dans une voie qui nous entraînera plus
loin que nous ne le pensons. Chaque année, nous votons des sommes plus ou moins
fortes.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- J’ai eu l’honneur de dire à l’assemblée que j’avais souvent une
correspondance avec l’administration provinciale du Limbourg pour en obtenir
des renseignements sur le travail. Quant aux réparations des rives, j’ai eu la
dernière réponse il y a trois jours. Lorsque le gouvernement imposa à la
province l’entretien des rives de
Maintenant, sera-t-il
possible d’arriver à un règlement définitif qui spécifie la part de
contribution des propriétaires. C’est que je ne pourrais affirmer.
M. de Brouckere. - Il faut une loi.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Si je ne puis établir un règlement, je présenterai un projet à la chambre qui
régularise le mode d’entretien des rives de
En attendant, je crois
qu’il est nécessaire que la chambre vote l’allocation demandée.
M. H. Dellafaille, rapporteur. - Que le
gouvernement ait bien ou mal fait de ne pas proposer l’allocation en
discussion, ce n’est pas ce qu’il s’agit d’examiner. Quant à la manière, dont
la dépense a été présentée, l’honorable M. Gendebien est dans l’erreur ; les
députés du Limbourg l’avaient présentée dans une section dont ils faisaient partie.
Cette section l’ayant rejetée, la section centrale ne crut pas devoir en faire
mention. Cependant l’urgence des travaux ne peut être contestée, la chambre a
été saisie du rapport de l’inspecteur des ponts et chaussées. C’est en suite
ces rapports que la chambre a accordé l’année passée des fonds pour réparations
aux rives de
Il s’agit maintenant de
savoir si l’Etat est obligé ou non de le faire. Je crois qu’il serait difficile
de contester qu’il le soit. Les péages perçus sur les fleuves et rivières sont
affectés à leur entretien ; il est même défendu, d’après la loi de l’an X, de
leur donner une autre destination. L’arrête de
Jusqu’en 1833, un
événement de force majeure a empêché la première de percevoir le péage, la
navigation étant interrompue ; mais après la convention de Zonhoven la province
a rétabli les droits qui lui appartenaient. Qui l’a empêché de continuer cette
perception ? L’Etat, dans l’intérêt général, afin de ne pas entraver la
navigation.
Il y a donc lieu
d’indemniser la province du sacrifice qu’on lui a imposé dans l’intérêt public
; si vous voulez qu’elle continue de supporter les frais mis à sa charge par
l’arrêté de 1819, rendez-lui les revenus affectés à cette dépense. La province
procurera des péages, mais la navigation en souffrira. Vous aurez des
réclamations de la part de Liége, de Namur et de tous les pays que traverse
Il
est juste ce me semble que l’Etat se charge des obligations qu’il a mis la
province du Limbourg dans l’impossibilité de remplir. Il me semble que les
conclusions que la section centrale vous a proposées soient fondées.
Quant aux lois et arrêtés
rappelés dans le libellé de l’article je ferai observer que la section centrale
a adopté ce libellé, afin qu’on ne confonde plus les dépenses à charge de la
province avec celles à charge des riverains. L’Etat ne doit des secours ou des
subsides aux riverains que dans les cas extraordinaires. Nous avons voulu
éviter qu’on mît à la charge de l’Etat tous les travaux, ceux qui appartiennent
à la province, comme ceux qui appartiennent aux riverains, c’est dans ce but
que nous avons adopté la rédaction que nous vous proposons. Nous n’avons plus
inséré de recours, parce qu’il est prévu, par ce libellé à l’égard des
riverains, et que d’un autre côté il ne doit plus avoir lieu à l’égard de la
province.
M.
Gendebien. - Il ne convient pas de rentrer dans la discussion. J’ai
opposé une fin de non-recevoir, non pour ajourner indéfiniment la question,
mais pour que le gouvernement et la chambre aient le temps d’aviser à ce qu’il
y à faire. Savez-vous ce qui va arriver ? On nous dit qu’il faut bien allouer
les 40,000 francs, parce que les propriétaires riverains ne veulent pas
s’entendre pour fournir leur contingent pour faire les constructions
nécessaires. Eh bien, si nous continuons comme nous l’avons fait jusqu’à
présent, à nous montrer si faciles à accorder les sommes qu’on nous demande,
les propriétaires riverains ne s’entendront jamais.
Refusons l’allocation et
disons que nous n’accorderons de fonds que quand les droits seront reconnus ;
les riverains s’empresseront de s’entendre pour ne pas exposer leurs
propriétés.
On dit que le
gouvernement a défendu à la province de percevoir les péages. Je ne sais pas de
quel droit il a pu faire cette défense, mais il ne s’ensuit pas que nous
devions payer toutes les dépenses d’entretien, nous ne devions supporter que la
dépense qui était à charge de la province.
Tous les travaux
relatifs à la conservation des propriétés regardent les riverains. Ceux qui les
ont achetés ont probablement pris en considération la nécessité fréquente de
réparation. Ensuite les propriétés riveraines ont plus de valeur que celles qui
sont plus éloignées du fleuve, elles doivent donc supporter les chances de
perte résultant de ce voisinage.
La
seule dépense à faire par l’Etat est celle que nécessitent les besoins de la navigation.
Nous avons demandé qu’une loi fût portée sur la matière. On nous l’avait déjà
promise. Mais nous attendons encore l’exécution de cette promesse. Je demande
donc que l’on ajourne la discussion actuelle jusqu’à la présentation de cette
loi. Le ministère a mauvaise grâce à s’opposer à cette demande, puisqu’il n’en
a pas fait l’objet d’un article au budget. On prétend qu’il en a été question
dans une section. Comment ceux qui n’en font pas partie auraient-ils pu le
deviner ?
Je n’entrerai pas dans le
fond de la discussion ; je demande seulement que l’on force le gouvernement à
nous présenter enfin une loi. Jamais vous n’y parviendrez si vous consentez
tous les ans à accorder la même allocation.
M. d'Hoffschmidt. - Je demande que la
discussion soit remise à demain. Il se fait tard, et je désirerais pourtant
prendre la parole.
Plusieurs membres. - A demain.
La séance est levée à
cinq heures moins un quart.