Accueil Séances plénières
Tables
des matières Biographies Livres numérisés
Bibliographie et liens Note
d’intention
Séance précédente Séance suivante
Chambre des représentants de Belgique
Séance du lundi 24 novembre 1834
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre
2)
Projet de loi portant organisation des communes. Discussion des articles. Du conseil
communal. Actes du conseil communal soumis à l’approbation de la députation
permanente portant, notamment, sur les établissements de bienfaisance (Donny, de Behr, Verdussen,
Pollénus, de Behr, Milcamps, Dubus, Milcamps, Verdussen, de Theux, de Nef, H. Dellafaille), portée des règlements municipaux (Pollénus, de Brouckere, Pollénus, de Brouckere, H. Dellafaille, de Theux, de Brouckere, H. Dellafaille,
Pollénus, Dumortier, de Theux, Pollénus, Fallon, Dumortier, de Theux, Pollénus, Fallon, Pollénus, de Brouckere, Pollénus, Dumortier), libellé et mise en vigueur des actes
municipaux (Pollénus, Dumortier,
Pollénus, Dumortier, Pollénus, Fallon)
3)
Projet de loi approuvant la convention conclue avec les concessionnaires du
canal de Charleroy
4)
Projet de loi relatif à l’établissement des budgets provinciaux
5)
Projet de loi portant organisation des communes. Discussion des articles. Du
conseil communal. Arrêt des comptes des institutions de bienfaisance (de Theux, Dubus, Dumortier, de Behr, Fallon), répartition des contributions directes (de Nef, de Theux)
(Moniteur belge n°329, du 25 novembre 1834)
(Présidence de M. Raikem.)
La séance est ouverte à
une heure et demie.
M.
de Renesse procède à l’appel nominal.
M.
Brixhe donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La
rédaction en est adoptée.
M.
de Renesse expose sommairement l’objet des pièces adressées à la
chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Plusieurs bateliers de
Namur demandent que la chambre prenne une disposition qui réduise les patentes
de batelier à 10 centimes par tonneau sans distinction de diverses espèces de
chargements.
- Renvoi à la commission
chargée de l’examen du budget des voies et moyens.
_______________
« Les notaires de
campagne de l’arrondissement de Diekirch (Luxembourg) demandent à pouvoir
instrumenter hors de leurs cantons. »
- Renvoi à la commission
des pétitions.
_______________
« Le sieur M.-A. Bamps,
à Hasselt, demande que dans la nouvelle loi communale il ne soit plus alloué de
traitement aux membres les administrations communales. »
- Dépôt sur le bureau du
président.
Discussion des articles
Titre
II. - Des attributions municipales.
Chapitre Ier. - Des attributions du
conseil municipal.
Article 75 (du projet de la
section centrale)
M.
le président. - Dans la dernière séance la chambre est parvenue à l’article
75 du projet de la section centrale. Cet article relatif aux actes communaux
soumis à l’autorité provinciale contient 8 paragraphes ; M. Verdussen en
propose un neuvième ainsi conçu : « Les règlements d’organisation et les
comptes annuels des administrations des monts-de-piété.»
M.
Donny. - Messieurs, j’appuie l’amendement de M. Verdussen. Je pense que le gouvernement ne doit intervenir en
aucune manière dans les établissements des monts-de-piété ; je le pense parce
que cette intervention ne peut être d’aucune utilité, et qu’au contraire elle
peut donner lieu à de graves inconvénients.
L’intervention du
gouvernement dans les établissements du mont-de-piété ne peut être utile, ai-je
dit, et en effet dans les institutions d’intérêt purement local, comme le sont
les monts-de-piété, la seule intervention utile est celle des autorités locales
d’abord, et ensuite celle des autorités provinciales : ces autorités ont seules
une connaissance assez complète des besoins des localités pour pouvoir
intervenir d’une manière efficace. Quant au gouvernement, il ne connaît pas ces
besoins ; ou s’il les connaît, c’est trop imparfaitement pour que son action
puisse produire quelque bien.
Du moment que
l’intervention du gouvernement n’a pas un caractère bien évident d’utilité, je
ne puis la considérer que comme une simple mesure de centralisation ; et comme
telle je dois la repousser.
J’ai dit que
l’intervention du gouvernement pouvait avoir de graves inconvénients ; et mon
opinion est basée sur l’expérience.
Le gouvernement du roi
Guillaume a voulu s’immiscer dans les établissements des monts-de-piété. Il l’a
fait, d’abord, par un arrêté contenant des bases organiques uniformes pour tout
le royaume ; ensuite au moyen d’un règlement-modèle envoyé à toutes les
administrations pour leur faire connaître de quelle manière on voulait qu’elles
réglassent le service intérieur de leurs établissements.
Quant à l’arrêté
organique, indépendamment des doutes qu’on peut élever sur sa constitutionnalité,
il avait le défaut de n’être pas en harmonie avec les besoins des localités,
puisque ces besoins diffèrent d’une localité à une autre et qu’il ne contenait
que des dispositions uniformes pour tous les établissements ; en outre il avait
le défaut de contenir des dispositions absolument inexécutables, du moins dans
les localités que je connais.
Quant au règlement
modèle, c’était un ramassis indigeste dans lequel on avait reproduit toutes les
dispositions de l’arrêté organique, en y ajoutant une foule d’autres
dispositions dont les unes étaient en contradiction manifeste avec le texte et
l’esprit de l’arrêté, dont les autres étaient ridiculement puériles, dont
d’autres en enfin étaient absurdes : c’était en un mot un travail si mauvais
que le dernier employé d’un gouvernement provincial aurait rougi de se
l’attribuer
Il est facile de
concevoir que l’intervention du gouvernement exercée de cette manière devait
jeter la perturbation dans toutes les administrations du mont-de-piété ; et
c’est là en effet ce qui est arrivé.
J’ai maintenant à vous
citer un fait qui vous prouvera jusqu’à quel point le gouvernement peut abuser
du principe de l’intervention.
Une régence avait à
nommer un directeur de mont-de-piété ; cette nomination lui était exclusivement
attribuée par tous les règlements organiques ; et, ni le pouvoir central, ni
les autorités provinciales, n’avaient le droit de s’immiscer dans cette
nomination : cependant, le fonctionnaire qui, à cette époque, se trouvait à la
tête de cette branche du service public, ayant appris que la régence n’était
pas disposée à nommer une personne qu’il protégeait particulièrement, se permit
d’écrire à la députation provinciale que si la régence ne voulait pas revenir
de sa manière de voir à l’égard de son protégé, la députation provinciale
devait la mettre à la raison.
Je
traduis littéralement le texte hollandais de la dépêche. Je dois ajouter, à
l’honneur de la députation provinciale et de la régence dont il s’agit, que la
première n’a pas même essayé de mettre la seconde à la raison ; et que la
régence, de son côté, était si peu disposée à se laisser mettre à la raison,
qu’elle n’a pas accordé une seule voix au protégé du gouvernement.
Je crois en avoir dit
assez pour montrer que l’intervention du pouvoir central est à la fois inutile
et dangereuse, et je crois avoir justifié l’appui que j’accorde à l’amendement
de M. Verdussen.
M. de Behr. - L’art. 13 de l’arrêté d’octobre
1826 dit que la reddition des comptes des monts-de-piété se fait annuellement à
l’administration locale : c’et en effet le mode qui a été toujours en vigueur
jusqu’au moment actuel ; je ne sais pas pourquoi on veut dessaisir les
municipalités de ce droit pour le faire entrer dans les attributions des
conseils provinciaux. A Liége il y a un mont-de-piété dont les comptes ont
toujours été rendus à la régence ; et je ne vois pas pourquoi on changerait ce
qui existe. Je demanderai la division de l’amendement, et je voterai contre la
partie de cet amendement relative à la reddition des comptes.
M.
Verdussen. - Je crois qu’il est utile de conserver dans mon amendement
la partie qui concerne la reddition annuelle des comptes des monts-de-piété.
Nous voulons faire annuler l’arrêté du 31 octobre 1826, et notre amendement
atteindrait ce but. L’article 10 de cet arrêté porte : « Les
administrations des lombards font leurs fonctions sous l’administration des
autorités locales, et sous la haute surveillance des administrations
provinciales et du gouvernement. » C’est par suite de cet article que
l’administration du mont-de-piété d’une grande ville a été obligé de soumettre
ses comptes à l’autorité provinciale et de les envoyer au gouvernement.
L’art. 13 invoqué par
l’honorable préopinant est conçu en ces termes : « La reddition des
comptes se fait annuellement à l’administration locale, et est arrêtée par elle
dans les villes où une administration générale existe : on entend son avis sur
les comptes avant de les arrêter. »
Par ce mode
d’administration, je crois qu’on a toujours entendu la députation provinciale ;
du moins c’est ainsi que cela a été interprété dans la ville que j’habite.
C’est de cette ville que j’ai entendu parler quand j’ai dit que dans une ville,
les comptes du mont-de-piété étaient soumis non seulement à l’administration
communale, mais encore à l’administration provinciale et même à
l’administration supérieure.
M. de Behr semble
craindre que par mon amendement je ne retire à l’administration locale l’arrêté
des comptes du mont-de-piété. Mais il n’en est pas ainsi, et ou peut s’en
convaincre en jetant un regard attentif sur les termes dans lesquels est conçu
mon amendement ; car il porte que les comptes des administrations des
monts-de-piété seront soumis à l’approbation de l’autorité provinciale et comme
c’est dans la loi communale que se trouve cette disposition, il est évident
qu’on doit entendre ainsi cette disposition : que les comptes dont il s’agit,
après avoir été arrêtés par l’autorité communale seront transmis à l’autorité
provinciale pour recevoir une approbation ultérieure. J’avais dit que dans mon
opinion l’administration des monts-de-piété n’était pas exclusivement
communale. En effet, cette administration est communale, sous ce rapport que
les produits doivent revenir aux administrations de bienfaisance telles que les
hospices ; mais elle cesse d’être communale pour ce qui concerne la fixation du
taux de l’intérêt auquel les prêts seront faits. Si l’administration
provinciale n’était pas mise à même de juger que le taux est trop élevé, on
pourrait craindre que l’administration communale, afin de se soustraire à la
nécessité de voter de nouveaux impôts pour couvrir les dépenses des hospices,
n’élève le taux de l’intérêt auquel seraient faits les prêts du mont-de-piété.
Ce danger est très grave, car il aurait pour résultat de porter atteinte à
l’intérêt que doivent nous inspirer les malheureux qui sont obligés d’avoir
recours aux monts-de-piété.
Quand les bénéfices
s’élèveront à un taux extraordinaire, il sera du devoir de l’autorité
provinciale de faire des observations à l’autorité communale afin de faire
baisser l’intérêt. Pour cela il faut que les comptes annuels des
administrations de monts-de-piété soient soumis à l’approbation de l’autorité
provinciale qui verra en même temps si des vices ou des abus ne se trouvent pas
dans ces administrations.
M.
Pollénus. - J’avais compris l’amendement de M. Verdussen comme il vient
de l’expliquer, qu’il n’entendait pas soustraire à l’administration locale l’arrêté
des comptes des monts-de-piété, mais seulement soumettre cet arrêté à
l’inspection des autorités provinciales. Ainsi les observations de M. de Behr
ne s’appliquent pas directement à l’amendement. L’honorable M. Verdussen a dit
qu’il avait eu surtout en vue de mettre hors d’effet un arrête du roi Guillaume
du 31 octobre 1826. Je crois devoir faire une observation sur cet arrêté.
M. Verdussen paraît
croire que cet arrêté a force de loi. Pour ma part, j’en doute et voici
pourquoi : L’arrêté du 31 octobre 1826 contient des pénalités et différentes
dispositions sur le taux de l’intérêt et sur la manière dont se perdent
irrévocablement les gages.
Il
ne s’agit pas seulement dans cet arrêté de règlements d’administration ; mais on
y dispose de la propriété des particuliers.
Cet arrêté, je crois,
n’a jamais été publié en Belgique ; je pourrais même l’affirmer, car j’ai eu
occasion de faire des recherches à cet égard, et mes recherches ont été
infructueuses. Dès lors, pour ce qui concerne les dispositions relatives aux
droits des particuliers, M. Verdussen se trompe, quand il dit que son
amendement a pour objet de mettre cet arrêté hors d’effet, car il n’en a jamais
eu, et il ne pourrait en avoir que pour autant qu’il aurait été publié.
Je pense d’ailleurs que
les objets énumérés pat M. Verdussen devraient faire l’objet d’une loi. Car une
loi seule peut disposer de la propriété des particuliers et établir des
pénalités. Quant aux simples règlements organiques, je suis d’accord avec lui.
M.
de Behr. - Je n’avais, en effet, pas bien compris l’amendement de M.
Verdussen ; je croyais qu’il s’agissait de dessaisir l’autorité communale de la
surveillance des comptes des monts-de-piété.
A cet égard je ne suis
trompé ; mais l’amendement n’introduit pas moins une sorte d’irrégularité.
D’après l’arrêté, les monts-de-piété sont assimilés aux établissements de
bienfaisance, car l’art. 65 porte :
« Les
lombards sont placés sur la même ligne que les bureaux de bienfaisance et les
hospices. » Leurs comptes sont approuvés par les conseils de régence, et jamais
on ne les a soumis à l’approbation provinciale. C’est aussi ce que porte l’art.
77 du projet de loi communale : « Le conseil de régence arrête les comptes des
administrations des hospices et bureaux de bienfaisance de la commune. »
Or, si le mont-de-piété
est placé sur la même ligne que les bureaux de bienfaisance, il y aura une
sorte d’irrégularité à faire intervenir la députation dans ses comptes, alors
qu’elle n’intervient pas dans ceux des hospices et bureaux de bienfaisance.
Je persiste donc dans
mon opinion.
M.
Milcamps. - Je vais répondre quelques mots aux observations présentées
par M. de Behr. Il existe aussi
dans ma ville un mont-de-piété. Ce mont-de-piété a été organisé en vertu de
règlements approuvés par un arrêté de l’ancien gouvernement. Mais, quant aux
comptes, ils sont rendus directement à la régence qui les approuve. Jamais la
régence de Nivelles n’a transmis ces comptes à la députation des états. Il en
est de même des comptes des bureaux de bienfaisance ; jamais on ne les a soumis
à la députation provinciale. Si on devait lui soumettre les comptes du
mont-de-piété, il y aurait les mêmes raisons pour lui soumettre ceux des établissements
de charité, et puisque sous l’ancien gouvernement on n’exigeait pas cette
approbation, je ne vois pas pourquoi nous voudrions aujourd’hui pousser plus
loin les précautions.
Quand
une commune veut établir un mont-de-piété, les règlements organiques doivent,
en vertu d’une loi, être soumis à l’autorité royale, mais les comptes de ces
établissements ne sont réglés que par l’autorité communale.
Vous savez que quand des
communes ont placé des fonds dans un mont-de-piété, elles ne peuvent les
retirer sans une autorisation des états. Il y aurait peut-être quelque chose à
faire à cet égard.
Messieurs, plusieurs
fois vous avez renvoyé des amendements à la section centrale ; celui dont nous
nous occupons me paraît assez important pour lui être renvoyé ; j’en fais la
proposition.
M.
Dubus. - Je ne pense pas qu’il y ait lieu de renvoyer l’amendement dont
il s’agit à la section centrale. Cet amendement a été présenté à la séance du
19 novembre ; chacun de nous a eu le temps de l’examiner. Cet amendement a deux
objets : les règlements organiques et les administrations des monts-de-piété.
M. Verdussen propose de soumettre les uns et les autres à l’approbation de la
députation des états. Sur le premier point je partage son avis. Mais je ne le
partage pas quant à la seconde.
Le gouvernement déchu
avait soumis les règlements des monts-de-piété à l’approbation royale, et je
crois que le préopinant vient d’émettre l’opinion qu’il y avait encore lieu à
soumettre ces règlements à l’approbation royale. Pour moi, je ne le pense pas ;
je crois qu’on peut supprimer cette disposition sans inconvénient et que
l’approbation de la députation provinciale peut suffire ; on pourrait même se
contenter de la disposition générale de l’art. 76 du projet de la section
centrale, d’après lequel tous les règlements sont transmis par le conseil à la
députation permanente, qui veille à ce que ces règlements ne puissent pas être
contraires aux lois et aux règlements d’intérêt général.
L’article ajoute que ces
règlements sont abrogés de plein droit si, par suite, il est statué sur les
mêmes objets par des lois ou règlements d’administration générale.
Je crois que nous avions
là une garantie suffisante. On fait quelque chose de plus, on exige
l’approbation expresse de la députation ; je ne sais pas ce qu’on pourrait
demander encore.
Mais, d’ailleurs, il y a
des lois qui pourront s’occuper de ces matières ; il y a des règlements
d’administration générale qui pourront les traiter. Il est reconnu que les
règlements des régences ne peuvent contenir des dispositions contraires aux
lois existantes, et qu’ils sont annulés de plein droit du moment qu’ils sont en
opposition avec les règlements d’administration générale. D’ailleurs, la
députation permanente, avisera à ce que les règlements d’administration
générale soient observés, et en supposant que ce corps se prêtât aux déviations
des règlements communaux, le pouvoir royal serait là en définitive pour annuler
les actes de la députation.
Par conséquent, s’il y
avait abus, l’abus serait redressé. Il n’y a pas plus de raison d’exiger
l’approbation par la députation des règlements organiques des monts-de-piété
que d’exiger l’approbation de tous les règlements des administrations dépendant
des autorités communales. On pourra toujours donner cette raison : ces
règlements pourraient être contraires aux lois. Il faut donc que le
gouvernement s’assure par lui-même qu’elles n’ont pas été violées. Tout
aboutirait de cette manière au pouvoir central qui contrôlerait et réviserait.
Aussi il serait plus simple de le déclarer et de diminuer les rouages
administratifs en supprimant les autorités intermédiaires entre le gouvernement
et la commune.
Pour ce qui est de la
deuxième partie de l’amendement de M. Verdussen, en ce qui concerne les comptes
annuels des monts-de-piété, je partage complètement l’opinion de l’honorable M.
de Behr. Je crois qu il y aurait anomalie si l’on exigeait pour ces comptes
l’approbation de la députation permanente, alors qu’on ne l’exige pas à l’égard
des comptes des bureaux de bienfaisance. Je ferai remarquer que dans beaucoup
de localités les monts-de-piété ne forment qu’une même administration avec
l’administration des hospices.
On donne pour raison
qu’il pourrait s’élever des abus dans le taux de l’intérêt. Mais je crois me
souvenir que ce sont les règlements qui vont parer à ces sortes d’abus, et que
c’est là que l’on doit y trouver un remède. C’est à coup sûr dans les
règlements que l’on posera la limite que l’intérêt ne pourra dépasser. Si l’on
donne pour raison que les règlements pourront être violés, ce serait un motif
que l’on pourrait avancer pour soumettre à un contrôle supérieur tout acte
quelconque des administrations de charité sous le prétexte de leur
non-exécution.
D’ailleurs,
messieurs, il y a un moyen bien simple de parer à tous les inconvénients qu’on
signale. Il suffit que la députation permanente ait le droit de se faire
produire à titre de renseignements les actes des établissements de charité pour
qu’il ne puisse exister d’abus.
Ces établissements ne
peuvent, d’après la loi provinciale que nous avons votée, refuser de pareilles
communications. La députation permanente s’assurera donc pour elle-même de
l’exécution des règlements. Il y a toujours moyen de veiller à l’exécution des
lois, sans faire un nouveau pas vers la centralisation.
Je me prononcerai donc
contre la partie de l’amendement de M. Verdussen qui a rapport à l’approbation
des règlements organiques des monts-de-piété, et pour le sous-amendement de M.
de Behr relatif aux comptes de ces administrations.
M.
Milcamps. - Je sais bien que, d’après l’article 73 de la loi en
discussion, ce conseil règle tout ce qui est d’intérêt communal, et qu’il
suffit que les règlements soient envoyés pour notification à la députation pour
qu’ils soient en vigueur. Cette disposition avait été prise dans les anciens
règlements. Mais il est à remarquer que lorsque les autorités communales font
des règlements de police, il existe des lois qui fixent les objets sur lesquels
les règlements doivent porter. Les lois ont déterminé les objets confiés à la
vigilance de la police municipale. Relativement aux monts-de-piété, il en est
de même. Les monts-de-piété n’ont été établis que pour s’opposer au fléau de
l’usure. Ces établissements sont autorisés à stipuler un intérêt extra-légal :
12 p. c. dans certains endroits, 15 p. c. dans d’autres.
Si
vous abandonnez purement et simplement aux conseils communaux le droit
d’établir des monts-de-piété, ils pourront établir un intérêt de 15 et même de
20 p. c., lorsque les frais sont considérables ; ils
pourront stipuler un intérêt exorbitant. Il me semble que la société en général
est intéressée à ce que l’autorité supérieure ne soit pas étrangère à la
formation des règlements organiques des monts-de-piété.
Cependant, comme nous
n’avons pas sous les yeux les documents relatifs à ces établissements, je pense
que nous ne pouvons actuellement émettre un vote sur l’amendement de
l’honorable M. Verdussen. Quant
à moi, je ne suis pas prêt à décider la question tout à fait en connaissance de
cause.
M.
Verdussen. - Je croyais avoir prévenu les observations de l’honorable
M. de Behr dans le discours que j’ai prononcé au sujet de mon amendement. Je ne
les réfuterai pas. Quant à celles qu’a faites l’honorable M. Milcamps, je pense
qu’il donne aux règlements organiques des monts-de-piété une portée que ces
mots n’ont pas. Je crois qu’aux termes du décret impérial du 24 messidor an
XII, l’établissement d’un mont-de-piété appartient toujours au pouvoir central
comme rentrant dans la catégorie des objets qui intéressaient la morale
publique. Mais, une fois que le gouvernement a reconnu l’utilité d’un pareil
établissement dans une localité, c’est alors seulement que le règlement
organique en est formé, et ce n’est que dès lors que je demande qu’il soit
soumis à la députation des états. Je répèterai ce que j’ai dit dans une séance
précédente à l’égard de la différence qu il y a entre les monts-de piété et les
autres établissements communaux. Je crains toujours l’influence d’une autorité
qui a un intérêt direct dans les bénéfices des monts-de-piété. Je crains
toujours que si les comptes de l’établissement ne sont pas soumis à
l’approbation d’une autorité supérieure, personne dans le sein du conseil communal
ne sera tenté de baisser le taux de l’intérêt.
L’on a dit que les
règlements organiques régleraient la limite du taux du l’intérêt. Mais ce taux
doit baisser en raison de l’importance des opérations auxquelles se livrent ces
établissements.
Quand un mont-de-piété
est nouvellement ouvert, il y a plus de frais à couvrir ; le taux de l’intérêt
est par conséquent plus élevé. Si les règlements organiques devaient fixer une
limite immuable, les malheureux n’auraient jamais l’espoir de voir l’intérêt
diminuer. C’est pour atteindre ce but que je demande que l’approbation de la
députation des états soit applicable et à la formation des règlements
organiques et aux comptes annuels des monts-de-piété.
- le renvoi à la section
centrale est mis aux voix, il n’est pas adopté.
La première partie de
l’amendement de M. Verdussen est mise aux voix et adoptée ; elle est ainsi
conçue :
« Les règlements
organiques des administrations des monts-de-piété. »
La deuxième partie de
l’amendement, ainsi conçu : « et les comptes annuels » est mise aux
voix ; elle n’est pas adoptée. En conséquence le paragraphe se compose de ces
seuls mots : « Les règlements organiques des administrations des
monts-de-piété. »
M. le président. - La chambre a encore à statuer
sur le paragraphe dixième du projet du gouvernement qui n’est pas reproduit
dans celui de la section centrale ; il est ainsi conçu :
« Les budgets et
comptes qui doivent leur être présentés par les administrations des pauvres,
établissements de bienfaisance et de charité, ainsi que les autres institutions
qui recevraient ou demanderaient un subside. »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
-Je consens à ce qu’on diffère la discussion de ce paragraphe jusqu’à ce qu’on
soit arrivé à l’article 77 du projet de la section centrale, sans toutefois me
rallier à la rédaction de cet article.
Je dois déclarer en
outre que si je consens à ce que les budgets et les comptes ne soient pas
soumis à l’approbation de la députation, il est bien entendu que je proposerai
un article destiné à faciliter les réclamations des administrations de
bienfaisance, lorsqu’il s’élèvera des difficultés entre elles et les
administrations des villes.
M. de Nef. - Je demande que le n°10 du projet du
gouvernement soit maintenu, au moins pour les communes au-dessous de 3,000
âmes. Je partage l’opinion de ceux qui veulent donner aux administrations des
communes toute liberté qui est compatible avec les vrais intérêts de leurs
habitants ; mais si, dans le cas dont il s’agit, vous abandonnez la
comptabilité des bureaux de bienfaisance, qui demandent des subsides aux
administrations communales, sans surveillance aucune, je crains que des
dilapidations ne soient pas rares dans quelques communes rurales, et que, dans
d’autres, une économie trop sévère présidera aux distributions. J’y ajouterai
que très souvent les comptes ne seront pas régulièrement rendus.
M. H. Dellafaille. - Je ferai observer
qu’en supposant même le maintien de ce paragraphe, il y aurait toujours lieu de
l’ajourner jusqu’à la discussion de l’art. 77. Il n’y a aucune raison de
soumettre à la députation les budgets et les comptes des établissements de
bienfaisance subsidiés par les communes, lorsqu’il y a accord entre eux et ces
communes. Ce n’est évidemment que lorsqu’il y a désaccord qu’il y a lieu à
l’intervention de la députation. J’appuie l’ajournement demandé par M. le
ministre.
M.
de Nef. - J’y consens.
- Le dixième paragraphe
est ajourné.
M.
le président. - Comme il y a encore un paragraphe de cet article sur
lequel la section centrale doit faire son rapport, nous ne pouvons voter
l’ensemble de l’art. 75. Nous passons à l’article suivant.
Article 77 (du projet du
gouvernement) et article 76 (du projet de la section centrale)
M.
le président. - Il est ainsi conçu dans le projet du gouvernement ; dans
celui de la section et dans l’amendement de M. Pollénus.
« Art. 77 (projet du
gouvernement). Le conseil peut faire des règlements municipaux d’administration
intérieure et ordonnances de police.
« Les règlements et
ordonnances ne peuvent porter sur des objets déjà régis par des lois ou
règlements d’administration générale. Ces règlements et ordonnances sont
abrogés de plein droit si dans la suite il est statué sur les mêmes objets par
des lois ou règlements d’administration générale.
« Le conseil en transmet
des expéditions à la commission permanente, dans les quarante-huit heures qu’il
auront été arrêtés.
« Ces ordonnances
et règlements, signés par le bourgmestre et contresignés par le secrétaire,
seront, s’il y a lieu, publiés au nom des bourgmestres et échevins, et il y
sera fait mention qu’ils ont été arrêtés par le conseil.
« Les conseils
municipaux peuvent statuer des peines contre les infractions à leurs
ordonnances, pour autant qu’une loi n’en ait pas fixé. Ces peines ne peuvent
excéder une amende de 50 fr. et un emprisonnement de trois jours, ou, si la
commune compte moins de 5,000 habitants, une amende de 25 fr. et un jour
d’emprisonnement, soit séparément, soit cumulativement.
« Ces règlements ne
pourront être admis à exécution sans avoir préalablement été approuvés par le
roi, sur l’avis de la députation permanente du conseil provincial. »
« Art. 76 (projet
de la section centrale). Le conseil fait les règlements communaux
d’administration intérieure et les ordonnances de police.
« Ces règlements et
ordonnances ne peuvent être contraires aux lois, aux règlements
d’administration ; ils sont abrogés de plein droit, si par la suite il est
statué sur les mêmes objets par des lois, ou règlements d’administration
générale. Le conseil en transmet, dans les quarante-huit heures des expéditions
à la députation permanente.
« Les conseils de
régence peuvent statuer des peines contre les infractions à leurs ordonnances,
à moins qu’une loi n’en ait fixé. Ces peines ne pourront excéder une amende de
50 francs ou un emprisonnement de trois jours, soit séparément, soit
cumulativement. »
« (Rédaction
amendée proposée par M. Pollénus) Le conseil fait les règlements communaux
d’administration intérieure et les ordonnances de police.
« Ces règlements et ordonnances
ne peuvent porter sur des objets régis par les lois ou par les règlements
d’administration générale ou provinciale ; ils sont abrogés de plein droit si
dans la suite il est statué sur les mêmes objets par une loi ou par un
règlement d’administration générale.
« Le conseil de régence
peut établir pour leur exécution des peines qui n’excèdent point trois jours
d’emprisonnement et 50 fr. d’amende.
« Les règlements et
ordonnances seront signés par le bourgmestre et contresignés par le secrétaire.
« Ils sont publiés dans
la forme suivante : « Le conseil de régence de … province de … arrête ou
ordonne. »
« Le conseil en
transmet dans les 48 heures expédition à la députation permanente.
« Ces règlements et
ordonnances deviennent obligatoires le cinquième jour après leur publication,
sauf le cas où le délai aurait été abrégé par le règlement ou l’ordonnance.
« Expéditions des
ordonnances de police seront immédiatement transmises au greffe du tribunal de
première instance et à celui de la justice de paix, où elles seront transcrites
sur un registre à ce destiné. Mention de ces ordonnances sera insérée au
mémorial administratif de la province. »
La
discussion est ouverte sur le premier paragraphe de cet article.
M.
Pollénus. - Les dispositions de cet article correspondent à trois
dispositions que la chambre a adoptées dans le projet de loi d’organisation
provinciale. Je crois qu’il y a lieu d’adopter pour les conseils communaux les
dispositions que la chambre a sanctionnées pour les conseils provinciaux. Tel a
été le motif qui m’a déterminé à présenter mon amendement.
M. de Brouckere. - Je crois que, dans ce
paragraphe, il est nécessaire d’ajouter après le mot « police » le
mot « communale. » Vous ne pouvez laisser dans l’article les termes
généraux qui s’y trouvent. Il est incontestable qu’aucune autre autorité ne
peut faire des règlements municipaux d’administration intérieure ; mais on ne
peut nier que d’autres autorités ont le droit de faire des ordonnances de
police, et que le conseil ne peut faire que des ordonnances de police
communale. Cela est si vrai, que les paragraphes suivants du même article
parlent d’ordonnances de police émanées d’une autorité autre que celle de la
commune. Je demande donc que le mots
« communale » soit ajouté à la fin du paragraphe.
M.
Pollénus. - Je me rallie à la proposition de l’honorable préopinant. Il
était sans doute dans l’intention de la section centrale, comme cela est dans
la mienne, qu’il ne s’agit dans cet article que de police municipale.
- L’amendement de M. de
Brouckere est mis aux voix et adopté.
Le premier paragraphe du
projet de la section centrale ainsi amendé est adopté.
M.
le président. - La chambre passe à la discussion du deuxième
paragraphe.
M. Pollénus. - Ma proposition relativement à ce
paragraphe tend à ajouter après les mots « règlements d’administration
générale » ceux « ou provinciale. » Je ne dirai que deux mots pour
justifier la proposition de cette addition.
Si je me réfère au
projet de loi d’organisation provinciale, je vois que les conseils provinciaux
ont le droit de faire des règlements de police. Il est impossible de concilier
cette disposition avec celle de la loi communale, si l’administration communale
peut faire des règlements sur des objets déjà régis par cette autorité
supérieure. On me répond : « Il s’agira de police provinciale ; »
mais, répondrai-je, ces règlements pourront se rapporter à la police des
communes, et dans ce cas vous ne pouvez autoriser ces communes à prendre des
dispositions contraires aux règlements de police provinciale. La même raison
qui vous empêche d’autoriser les communes à faire des
règlement sur les objets régis par l’administration générale, doit
s’appliquer aux règlements de l’administration provinciale. C’est le seul motif
de l’addition que j’ai l’honneur de vous proposer.
M. de Brouckere. - Je ne m’oppose pas à ce
qu’on ajoute le mot « provinciale, » ainsi que le propose l’honorable
préopinant. Mais je pense qu’il faut supprimer toute la deuxième partie du
paragraphe, c’est-à-dire à partir des mots : « ils sont abrogés de plein
droit. »
Le gouvernement propose
de dire que les règlements ne peuvent porter sur des objets déjà régis par des
lois ou règlements d’administration générale. La section centrale a très bien
compris que le gouvernement allait trop loin. En effet, il peut arriver, il
arrivera même très fréquemment que les règlements des conseils communaux
s’appliquent à des objets déjà régis par des lois et règlements
d’administration générale. Il faut seulement que les règlements communaux ne
soient pas contraires à ces lois et règlements. La section centrale a donc avec
raison proposé une rédaction nouvelle portant : « Ces règlements et
ordonnances ne peuvent être contraires aux lois, aux règlements
d’administration générale. »
Qu’on ouvre seulement le
code de simple police, et on verra sur combien d’articles se fonde la nouvelle
rédaction de la section centrale. Ce code commine une amende pour défaut de
nettoyage de cheminées et de réparation des usines. Suit-il de là qu’une
disposition d’un conseil communal ne peut régler les réparations et le
nettoyage des cheminées ni ce qui est relatif aux usines ? En aucune façon. Il
suffit que ces dispositions ne soient pas contraires au code de simple police.
La rédaction de la
section centrale, quant à la première partie de ce paragraphe, vaut donc mieux
que celle du gouvernement ; mais, me semble-t-il, la section centrale, dans la
second partie du même paragraphe, ne s’est pas montrée conséquente avec
elle-même ; elle est ainsi conçue : « Ils sont abrogés de plein droit si,
par la suite, il est statué sur les mêmes objets par des lois, ou règlements
d’administration générale. » Il ne faut pas que les règlements
d’administration communale soient abrogés par cela seul qu’ils traitent la même
matière ; il faut qu’en même ils soient contraires à ce qui est prescrit par
ces règlements d’administration générale. Il suffit donc de la première partie
de l’article.
Je
ne sais si je me fais comprendre. (Oui,
oui.) Il me semble qu’il est plus clair et plus conséquent de supprimer la
deuxième partie de l’article, et de le borner à ces mots : « Les règlements
et ordonnances ne peuvent être contraires aux lois, aux règlements
d’administration générale. »
Il va sans dire que les
règlements communaux antérieurs ou postérieurs à un règlement d’administration
générale, par cela qu’ils lui sont contraires, sont abrogés de plein droit.
M. H. Dellafaille. - L’honorable député de
Bruxelles vient de prouver à l’évidence, selon moi, qu’il y a lieu de maintenir
la rédaction de la première partie de l’article de la section centrale. Il y a
une différence notable entre les règlements de police d’administration générale
ou provinciale et les règlements de police émanant de communale. Comme le
gouvernement, l’administration provinciale ne régie les objets que dans leur
ensemble. Les municipalités, au contraire, traitent des intérêts privés de la
commune. Il est une foule de circonstances sur lesquelles le conseil provincial
ne peut statuer, et sur lesquelles il appartient au conseil communal de
prononcer.
Ainsi,
en ce qui concerne les convois de poudre, c’est au conseil communal et non au
conseil provincial qu’il incombe de prendre les mesures nécessaires pour qu’ils
passent par une rue plutôt que par une autre, par un canal.
De même pour la
navigation, un conseil provincial la fixe à tel jour ; le conseil communal en
déterminera l’heure. Je dis donc qu’on ne peut interdire aux conseils communaux
de régler des objets régis par des règlements émanés de l’autorité centrale ou
provinciale, mais seulement de les régler dans un sens contraire à ces règlements.
Quant a la deuxième
partie de l’article, je pense avec l’honorable M. de Brouckere qu’elle est
inutile et qu’il n’y a aucun inconvénient à en supprimer.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je désire donner à la chambre quelques explications sur la portée que le
gouvernement accorde à cette disposition. Elle a été longuement méditée dans la
commission nommée par le Roi pour préparer les projets de loi provinciale et de
loi communale.
Il y avait dans le sein
de cette commission d’habiles jurisconsultes qui se sont spécialement occupés
de la question en discussion. C’est pour lever les doutes qui avaient été
soulevés que la commission a cru devoir proposer la rédaction du projet,
rédaction que la chambre a déjà admise dan la loi provinciale, art. 85, portant
: « Les règlements et ordonnances ne peuvent porter sur des objets régis
par les lois ou ordonnances de l’administration générale. »
De même ici la
commission a proposé de dire : « Les règlements et ordonnances ne peuvent
porter sur des objets déjà régis par des lois ou règlements d’administration
générale. Ce n’est pas à dire qu’ils ne peuvent traiter des matières déjà
régies par ces lois et règlements, mais qu’ils ne peuvent ajouter à la pénalité
que prononcent ces lois.
Ainsi, dans le cas de
transport de poudre, supposé par l’honorable M. H. Dellafaille, si
l’administration locale ajoute une peine à celle établie par les règlements de
l’administration générale pour les transports de ce genre faits en
contravention à ces mêmes règlements, le règlement local sera sans vigueur.
Quant
à ce qu’a dit le même orateur de la désignation par le conseil communal des
rues par lesquelles les convois de poudre devront passer, je ferai remarquer
que ceci est en dehors des règlements généraux.
Mais si un fait prévu
par un règlement local vient ensuite à être prévu par un règlement de
l’autorité supérieure, l’ordonnance locale cessera de recevoir son application.
Il faut distinguer la matière et l’objet. Il faut distinguer 2 polices : une
police communale et une police d’administration générale. Sous ce dernier
rapport le conseil communal ne peut pas ajoutera à la loi.
M. de Brouckere. - J’ai très bien compris
l’explication de M. le ministre de l’intérieur, et assurément la disposition
entendue comme il l’a expliquée ne présente pas d’inconvénients. Mais qu’on
lise cette disposition, et je pose en fait que pas une seule personne ne
l’interprétera comme M. le ministre l’a interprétée. Il faut, dit M. le
ministre, distinguer les matières et les objets. Mais, lors de la mise à
exécution de la loi communale, il faudrait qu’un membre de la commission
expliquât, chaque fois qu’il en serait besoin, cette distinction subtile, et
dît : Là il y a des matières, ici il y a des objets. La loi ne pourrait être
comprise sans des commentaires explicatifs.
La disposition dit autre
chose que ce que le gouvernement a voulu lui faire dire. M le ministre veut
que, lorsqu’une contravention aura été prévue par une administration générale,
le règlement d’administration communale ne puisse prononcer contre le même fait
une peine plus forte.
Eh bien, messieurs, il
est inutile de faire une disposition pour cela. Je pense qu’il n’y a pas de
conseil communal, quel qu’il soit, qui ne sache qu’il ne lui appartient pas de
prononcer une autre peine que celle établie par la loi. Cela va de droit. Mais
d’après votre disposition, telle qu’elle est rédigée, il suffira qu’un objet ou
une matière quelconque ait été prévue par une loi, pour qu’aucun conseil
communal ne puisse s’occuper du même objet ou de la même matière. Il vaudrait
autant défendre aux conseils communaux de faire des règlements de police ; car,
quels que soient les règlements qu’ils voudront faire, ils toucheront à des
matières qui auront été traitées dans des lois générales. Lisez l’énumération
des contraventions prévues par le code de simple police, vous verrez que ce que
j’avance est parfaitement exact.
M.
le ministre a soutenu la rédaction du gouvernement, mais il ne nous a pas
démontré que celle de la section centrale fût vicieuse. Il dit qu’il faut
empêcher que dans aucun cas un conseil communal puisse rien faire de contraire
à une loi. Cela ne me paraît pas devoir être prévu. Si un conseil communal se
permettait de substituer à une peine de 5 francs d’amende une peine plus forte,
cette peine serait contraire à l’esprit du législateur, car le législateur qui
n’a prononce qu’une peine de 5 fr. d’amende contre une contravention n’a pas
cru qu’on dût aller au-delà. Or, si un conseil communal voulait dire : Je punis
ce fait de 10 francs d’amende, il aurait agi d’une manière contraire à la loi,
en allant plus loin que la loi ; alors sa décision ne devrait pas être
respectée.
Je persiste à croire
qu’il faut maintenir la première partie de la section centrale et supprimer la
seconde. Il n’y a aucun inconvénient a craindre, tout ce qui doit être prévu
sera prévu.
Je suis bien aise
d’avoir entendu un honorable membre de la section centrale appuyer mon opinion.
M. H. Dellafaille. - Je demande la parole
pour faire une simple observation. M. le ministre de l’intérieur craint que le
conseil de régence ne stipule des peines plus fortes que celles portées par la
loi. Le dernier paragraphe de l’article de la section répond à cette crainte :
« Les conseils de régence peuvent statuer des peines contre les infractions à
leurs ordonnances, à moins qu’une loi n’en ait fixé. »
M.
Pollénus. - J’avais aussi interprété le projet du gouvernement comme
vient de le faire le ministre de l’intérieur. En adoptant sa rédaction, je ne
fais que reproduire l’article 85 de la loi provinciale. Je crois me rappeler
que, d’après les explications données lors du vote de cet article, il
n’existait aucun doute sur sa portée.
Ce qui m’a surtout
déterminé à adopter le projet du gouvernement, c’est qu’il me semblait faire
tout ce qui était possible pour augmenter la force morale des lois ; car, en
ayant l’air de douter de leur droit de délibérer sur des matières réglées par
des lois, on les encourage à délibérer sur ces matières et il en résulte de
graves inconvénients. Je pense qu’il faut toujours éviter de provoquer ces
sortes de délibérations.
Mais, dit-on, il est
inutile de dire aux régences qu’elles ne peuvent pas s’occuper d’objets qui
sont réglés par les lois. Non, messieurs, cela n’est pas inutile ; et le député
d’Alost vous l’a prouvé, lorsqu’à la dernière séance il vous a donné
connaissance d’un arrêté de la régence de Gand évidemment contraire à la loi.
Il n’est donc pas inutile d’interdire aux régences de s’occuper d’objets réglés
par des lois, puisque nous avons vu la régence d’une des premières villes du
royaume annuler par un arrêté les effets bienfaisants ou fâcheux, suivant la
manière de les envisager, des latitudes accordées aux distillateurs. Quand le
législateur s’est occupé d’un objet d’une manière spéciale, il faut faire
comprendre aux régences qu’elles doivent s’en rapporter à ce qu’a fait le
législateur. Agir autrement serait diminuer la force morale des lois.
Les
régences, dit-on, n’établiront pas de peines plus fortes que celles portées par
la loi : non, mais elles en établiront d’autres.
Messieurs, comme je l’ai
déjà dit, vous avez adopté une disposition correspondante dans la loi
provinciale. C’est un motif puissant pour admettre ici la proposition du
gouvernement, car cette proposition consacre un vote précédemment émis par
vous.
M.
Dumortier, rapporteur. - Je pense que le préopinant n’a pas remarqué la
différence qui existe entre l’organisation provinciale et l’organisation
municipale, différence qui a motivé celle des deux projets de loi.
L’autorité provinciale
est en quelque sorte un diminutif du pouvoir de l’Etat. Elle règle non pas les
intérêts de telle ou telle localité, mais de beaucoup de localités. Ses
ordonnances ont donc cela de commun avec les lois générales qu’elles se
rapportent à une foule d’intérêts différents. Les règlements d’administration
locale, au contraire, sont des règlements exclusivement locaux.
L’erreur de l’honorable
préopinant vient de ce qu’il a confondu les règlements provinciaux et les
règlements locaux qui, différant de nature, doivent aussi différer dans leurs
dispositions.
Il n’est pas inutile,
dit-il, de défendre aux régences de s’occuper d’objets réglés par des lois.
Mais alors, que restera-t-il à faire aux régences ? Vous savez que, dans
l’arsenal des lois françaises, il y a 44 mille lois qui se sont occupées de
tout indistinctement. D’après le système du préopinant, les régences n’auraient
absolument plus rien à faire. Si l’honorable membre disait que les
administrations communales ne pourront pas dans leurs règlements insérer de
dispositions contraires aux lois en vigueur, je le concevrais ; mais il ne veut
pas qu’elles puissent rendre des ordonnances concernant des objets sur lesquels
une loi a déjà porté, quelle que soit la nature de cette loi.
Mais les 44 mille lois
françaises, pour avoir porté sur toutes les matières possibles, n’en ont pas
réglé tous les points. Il reste une foule de questions locales sur lesquelles
ces lois n’ont pu rien stipuler. Il faut que l’autorité communale y pourvoie.
Je suppose par exemple qu’un convoi de poudre doive demain traverser une ville,
il existe des lois générales qui ont réglé en termes généraux ce qu’on doit
faire, mais dans chaque localité il peut y avoir des précautions particulières
à prendre ; eh bien, par votre disposition, vous interdiriez à la régence de
faire une ordonnance sur un point aussi important qui peut compromettre la
sûreté de toute une ville.
Voilà la différence qui
existe entre l’article de la section centrale et celui du gouvernement
qu’appuie le député de Hasselt.
La section centrale
autorise les conseils de régence à faire des règlements, pourvu que ces
règlements ne soient pas contraires aux lois, tandis que le gouvernement ne
veut pas qu’ils puissent faire des règlements sur les objets ou matières
prévues par des lois.
Or, comme il n’est pas
d’objet ou matière dont il ne soit question dans l’immense arsenal des lois
françaises, il en résulte que le pouvoir de faire des règlements accordé aux
régences est nul.
Mais,
dira-t-on, les régences pourraient établir des pénalités, des amendes plus
fortes que celles prononcées par la loi ; il en résultera qu’il y aura deux
législations, et par conséquent conflit. C’est une erreur, cela ne peut pas
avoir lieu ; et pour le prétendre, il faut avoir oublié le texte de l’article
107 de la constitution.
Le texte en est
extrêmement clair : « Les cours et tribunaux n’appliqueront les arrêtés et
règlements généraux, provinciaux et locaux, qu’autant qu’ils seront contraires
aux lois. »
Si donc un règlement
quelconque établissait une disposition contraire aux lois, le devoir des
tribunaux, des justices de paix, des cours d’appel serait de déclarer que ces
dispositions sont de nul effet et de rendre force à la loi. Il suit donc
de l’art. 107 que le texte que la section centrale propose est entièrement
conforme à l’esprit de la constitution, aux besoins de tous les instants, et je
dois insister pour son adoption. Je me bornerai là pour le moment.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- D’après les explications données par l’honorable députe de Bruxelles, je ne
ferai aucune espèce de difficulté à me rallier à son opinion parce qu’au fond
nous sommes d’accord.
Mais puisque la chambre
a déjà adopté dans la loi provinciale des dispositions semblables, il me semble
qu’il est rationnel et conséquent d’adopter les mêmes dispositions dans la loi
communale, pour que l’on ne puisse pas inférer de leur absence dans celle-ci
une interprétation différente des deux lois. La discussion de la loi communale
ne sera pas toujours présente à l’esprit de ceux qui seront chargés de la
mettre à exécution, tandis que les autorités communales en auront toujours le
texte sous les yeux.
Je pense qu’il est
extrêmement important d’adopter la même rédaction dans les lois d’organisation
provinciale et communale, à moins que nous n’ayons des motifs sérieux de
revenir de notre première décision. Mais il n’en est pas ainsi dans le cas
actuel.
Nous avons simplement en
vue de prévenir qu’un délit déjà prévu par une loi générale ne soit frappé
d’une peine nouvelle dans un règlement de police locale. Tel est le seul et
véritable but de la première disposition en discussion.
Quant
à la deuxième disposition par laquelle les règlements locaux sont abrogés de
plein droit, si, dans la suite, il est statué par des règlements
d’administration générale, je crois qu’il est utile de la maintenir.
Rien de plus naturel que
d’expliquer cette clause dans la loi. Je pense que les lois doivent être
tellement claires qu’à la première lecture les citoyens connaissent exactement
leur ligne de conduite, et les administrations communales, leurs attributions,
sans qu’il soit besoin d’avoir recours à de longs commentaires. C’est ce que
nous devons avoir en vue dans la rédaction des lois.
M.
Pollénus. - Tout ce que j’ai dit, je l’ai dit en suite de
l’interprétation donnée par M. le ministre de l’intérieur, et mon amendement ne
devait avoir d’autre extension que celle que comporte l’art. 85 de la loi
provinciale concordant à la disposition en discussion. Je crois que je me suis
assez clairement exprimé à cet égard. Je ne puis donc qu’attribuer à l’absence
momentanée de l’honorable rapporteur l’interprétation qu’il a donnée à cette
partie de mon amendement. Le rapporteur a cité pour exemple les transports de
poudre ; il a dit qu’on pouvait en faire l’objet de règlements municipaux. Il
n’est pas entre dans mon intention d’empêcher les communes de faire ces
règlements, pour autant qu’ils se rapporteraient à l’intérêt de localité. Car
les mesures d’intérêt local ne sont point prévues dans les dispositions qui
n’établissent que des mesures de police générale dans le cas posé par
l’honorable M. Dumortier. Voilà
le véritable sens de mes paroles et de l’interprétation donnée par M. le
ministre à laquelle je me référais.
M.
Dumortier a fait une autre objection. Il a dit que les tribunaux décideraient
en cas de contradiction entre les règlements généraux et les arrêtés des
communes. Il est vrai, l’article 107 de la constitution reconnaît cette
intervention. Mais il me paraît qu’il est toujours désirable d’éviter de
semblables conflits. Je citerai pour exemple le fameux règlement sur les
distilleries porté par la régence de Gand, nonobstant l’attribution accordée
aux tribunaux par l’art. 107 de la constitution, cet arrêté subsiste, et on a
été réduit à le signaler jusque dans cette enceinte.
Je persiste à croire
qu’il faut consacrer les mêmes expressions dans la loi communale et dans la loi
provinciale, comme l’a fait observer M. le ministre. Toute différence
d’expressions dans des dispositions concordantes donnera infailliblement lieu à
des doutes et peut-être à des embarras inextricables.
M.
Fallon. - Si le paragraphe proposé par la section centrale n’était
qu’inutile, je ne prendrais pas la parole pour appuyer la proposition faite par
l’honorable M. de Brouckere de le supprimer. Ce paragraphe peut donner lieu à
de très graves inconvénients en tant qu’il est donné à des juges de paix de
décider en matière de police. Il est indispensable que les juges puissent
parfaitement comprendre la loi. D’après les explications données par M. le
ministre de l’intérieur, il résulte que les communes ne pourront statuer sur le
même fait que l’administration provinciale. C’est une grave erreur.
Je suppose qu’un
règlement d’administration provinciale déclare que les cabarets seront fermés,
dans toutes les communes, à 10 heures du soir, par exemple. Je demande si, par
suite de cette disposition, un conseil de régence ne pourra porter dans son
règlement que les cabarets seront fermés à huit heures du soir. Il me semble
que le règlement de l’administration provinciale ne peut s’opposer à une
pareille disposition. Pourtant, dans le cas que je cite, l’administration
communale aura statué sur les mêmes faits que l’administration provinciale.
Le
règlement municipal devra rester debout. Vous voyez l’inconvénient que présente
la rédaction du paragraphe tel qu’il vous est proposé. Je crois donc qu’il
vaudrait mieux le retrancher tout à fait.
On a objecté qu’une
pareille disposition avait été prise dans la loi d’organisation provinciale.
Cela et vrai. Mais il ne me semble pas que cette considération doive arrêter la
chambre, parce que les règlements d’intérêt communal n’embrasseront jamais,
comme les règlements provinciaux, des objets ressortissant de l’administration
générale.
M.
Dumortier, rapporteur. - L’honorable député de Maestricht a prétendu
que les réponses que j’ai faites à sa proposition devaient être attribuées à
mon absence momentanée de la chambre. S’il avait jeté les yeux sur moi pendant
qu’il parlait, il aurait vu que je prenais note de ses propres expressions. Je
répète que la doctrine qu’il a mise en avant est dangereuse. Je crois l’avoir
suffisamment établi. Toute loi n’établit que des principes. L’exécution en est
toujours laissée au pouvoir exécutif, que ce soit le Roi ou la commune.
Si vous admettiez ainsi
le texte de la loi provinciale, ou le texte de M. le ministre de l'intérieur
qui remplit exactement le même but, il en résulterait ou que le gouvernement
devrait faire des arrêtés réglementaires de tout ce qui existe en matière
d’administration communale, ou que les lois resteraient sans exécution.
J’ouvre le code pénal à
l’article 471. Cet article établit des pénalités contre les aubergistes qui
n’éclaireraient pas leurs maisons, contre ceux qui ne nettoieraient pas les
rues dans les communes où ce soin est laissé aux habitants ; si vous admettiez
le texte du gouvernement, il en résulterait que l’administration centrale
serait obligée de faire des arrêtés pour régler le mode d’éclairage des
auberges, etc. ou pour fixer la manière dont les rues devraient être nettoyées.
Ainsi du reste, il tombe sous le sens commun que l’on ne peut tout régler. Cela
ressemblerait un peu aux règlements de Joseph II qui fixait les heures auxquelles
les religieuses devaient chanter leurs offices (Hilarité.) Vous savez que ce sont de pareilles mesures, cette
avidité d’empiétements de la dynastie autrichienne sur les droits des
particuliers et des communes qui ont amené la révolution brabançonne.
Quelle que soit votre
opinion relativement à la loi provinciale, je maintiens que vous devez
nécessairement, sous peine de non-exécution des lois, laisser à
l’administration locale le soin de faire des arrêtés réglementaires. Il en
résulterait que le gouvernement réglementerait tout. Ce serai
une monstrueuse tyrannie.
Je prendrai un exemple :
il y a des dispositions sur la vérification des poids et mesures. Faudra-t-il
que ce soit le gouvernement qui fixe le jour et l’heure où chacun viendra avec
son aune, son mètre, sa balance, faire poinçonner ces différents objets ?
Je
m’étonne que des personnes qui devraient par leur position dans
l’administration posséder des connaissances assez étendues en matière de
législation, s’arrêtent à de semblables absurdités. En conséquence de ces
observations je rejetterai la proposition de M. le ministre.
J’ai
déjà fait remarquer à l’assemblée qu’il y avait une distance énorme entre la
loi provinciale et la loi communale : dans la loi provinciale on stipule
seulement pour des intérêts généraux ; dans la loi communale on stipule
seulement dans la localité : il faut donc que vous insériez dans la loi que les
autorités communales auront la faculté de faire des règlements pour l’exécution
des lois dans la localité ; il le faut si vous voulez que les lois soient
exécutées.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Pour mettre fin à une discussion sans importance, puisque nous sommes
d’accord sur le but que nous voulons atteindre, j’admets la rédaction de la
section centrale.
M.
Pollénus. - Je me réunis aussi à la proposition de la section centrale.
M.
le président. - M. Pollénus a demandé que le commencement du paragraphe
fût ainsi rédigé par l’addition du mot provinciale
: « Ces règlements et ordonnances ne peuvent être contraires aux lois, aux
règlements d’administration générale et provinciale. »
-
L’addition du mot provinciale est adoptée ; le paragraphe est également adopté.
Le reste du paragraphe
est supprimé sur la proposition de la section centrale.
M. le président. - Le paragraphe suivant est conçu
en ces termes, d’après la rédaction de la section centrale : « Le conseil en
transmet, dans les 48 heures, des expéditions à la députation
permanente. »
M.
Fallon. - Je demande que le conseil en transmette des expéditions non
seulement à la députation permanente, mais encore au procureur du Roi. C’est ainsi
que cela se pratique dans la province de Namur.
M. Pollénus. - Je pense que la proposition de M.
Fallon trouvera mieux sa place dans un paragraphe de mon amendement où je
demande que l’on transmette les règlements au greffe des tribunaux. Ces
règlements sont destinés à être insérés dans un registre du greffe où on en
trouvera la collection.
M.
Fallon. - Je veux bien que mon amendement soit placé là ; cela remplira
le but que je me propose.
M. de Brouckere. - Mais, dans le cas où
l’amendement de M. Pollénus serait rejeté, il faudrait que M. Fallon pût
revenir sur ses pas. (Oui oui )
- Le paragraphe lu par M
le président, mis aux voix, est adopté.
M.
le président. - La section centrale propose de fondre le paragraphe
suivant, du projet du gouvernement, dans l’art. 88 ; s’oppose-t-on à cette
proposition ?
-
Il n’y a pas d’opposition, et on ajourne la discussion du paragraphe ainsi
conçu : « Ces ordonnances et règlements signés par le bourgmestre et
contresignés par le secrétaire seront, s’il y a lieu, publiés au nom des
bourgmestres et échevins, et il y sera fait mention qu’ils ont été arrêté par
le conseil. »
M. le président. - Voici le dernier paragraphe de
l’art. 70 de la section centrale : « Les conseils du régence peuvent
statuer des peines contre les infractions à leurs ordonnances, à moins qu’une
loi ne les ait fixées. Ces peines ne pourront excéder une amende de 50 fr. ou
un emprisonnement de trois jours, soit séparément, soit cumulativement.
M.
Pollénus. - Je propose ici un changement de rédaction. Je demande que
l’on mette : « Le conseil communal peut établir, pour leur exécution, des
peines qui n’excéderont pas trois jours d’emprisonnement et 50 francs
d’amende. »
M.
Dumortier, rapporteur. - La rédaction de la section centrale vaut
mieux. Nous disons dans cette rédaction que les peines peuvent être appliquées
séparément ou cumulativement. La différence est immense entre cette disposition
et celle que présente M. Pollénus.
- La rédaction de M.
Pollénus est rejetée.
La rédaction présentée
par la section centrale est adoptée.
M.
le président. - La section centrale propose le retranchement du dernier
alinéa qui se trouve dans l’article du projet du gouvernement.
M.
Dumortier, rapporteur. - Je ne sais pas si M. le ministre de
l’intérieur se réunit à l’avis de la section centrale.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je ne m’oppose pas à la suppression.
-
La suppression est ordonnée.
M. le président. - M. Pollénus présente une
formule pour le libellé des actes municipaux.
M.
Pollénus. - Je n’ai pas développé les motifs qui m’ont déterminé à
présenter l’intitulé que je prépare. Les actes des conseils communaux sont des
actes de l’autorité, et j’ai cru qu’il était convenable d’arrêter la formule
dans laquelle ils doivent être conçus. Dans l’article 117 du projet de loi
provinciale, vous avez mis une semblable disposition relativement aux actes des
conseils provinciaux. Il faut éviter la bigarrure dans la manière dont les
actes communaux seront rendus, seront formulés. J’ajouterai que l’intitulé des
lois a également été déterminé par la constitution.
M. Dumortier, rapporteur. - Je ferai remarquer que
tout ce qui est relatif aux règlements émanés des conseils communaux est réglé
par l’art. 97 de notre projet. C’est là que l’amendement de l’honorable M.
Pollénus trouvera se place.
M.
Pollénus. - Ma proposition devrait, ce me semble, trouver ici sa place
; car la disposition de l’article n’est pas identiquement la même. Du reste, je
ne m’oppose pas à l’ajournement de mon amendement à l’époque de la discussion
de cet article.
M. le président. - « Les règlements et ordonnances
deviennent obligatoires le cinquième jour après leur publication, sauf le cas
où le délai aurait été abrégé par le règlement ou l’ordonnance..
M.
Pollénus. - Puisque la chambre a ajourné le paragraphe précédent de mon
amendement, je demande qu’elle ajourne également celui-ci.
M.
Dumortier, rapporteur. - Il est également réglé par un article
postérieur.
- Les paragraphes
pénultième et antépénultième de l’amendement de M. Pollénus sont ajournés.
La
chambre passe au dernier paragraphe du même amendement, ainsi conçu :
M.
le président. - « Expéditions des ordonnances de police seront
immédiatement transmises au greffe du tribunal de première instance et à celui
de la justice de paix, où elles seront transcrites sur un registre à ce
destiné. Mention de ces ordonnances sera insérés au mémorial administratif de
la province.
M.
Pollénus. - Je ne dirai que deux mots pour motiver cette partie de mon
amendement ; déjà M. Fallon l’a appuyé en présentant le sien ; car tous deux
tendent au même but.
Il convient, ce me
semble, que les règlements dont il s’agit soient déposés aux greffes des corps
judiciaires qui sont appelés a appliquer ces
règlements dans les divers degrés de juridiction. C’est le motif qui me fait
préférer mon amendement à celui de M.
Fallon. Car le greffe est le dépôt naturel des pièces qui concernent les
tribunaux. D’ailleurs ces pièces une fois déposées au greffe, le procureur du
roi ainsi que les officiers du ministère public près les justices de paix,
pourront y prendre connaissance de ces règlements dont ils peuvent être dans le
cas de devoir poursuivre l’application.
Je demande en outre dans
mon amendement que ces ordonnances soient indiquées par mention au mémorial
administratif de la province. Je sens fort bien que l’insertion du texte entier
rendrait ce recueil trop volumineux et entraînerait de trop grandes dépenses. C’est
pour ce motif que je propose la simple mention qui ne peut occuper qu’un très
petit espace, mais cette mention aura pour effet d’avertir les officiers du
ministère public de l’existence de telle ordonnance de police, relative à tel
ou tel objet. Ils seront ainsi à même de vérifier si l’envoi de ce règlement a
été fait au greffe.
D’autre part, les
autorités des communes voisines puiseront dans cette mention la connaissance
qu’un règlement de police sur cet objet a été sanctionné dans telle commune, et
par ce moyen les habitants mêmes en seront informés.
Il est vrai que la
simple mention ne donnera pas des notions bien complètes de toutes les parties
du règlement ; mais, dans l’impossibilité d’obtenir une notification entière,
je préfère d’obtenir une partie du résultat que je me propose, plutôt que de ne
rien obtenir du tout.
Voilà les motifs de
cette double proposition, qui, d’une part, tient à conserver dans les greffes
le dépôt de ces règlements, et de l’autre avertit autant que possible les
habitants des communes voisines intéressés à connaître des dispositions qui
peuvent leur être appliquées.
Je
citerai, comme tombant dans cette catégorie, les ordonnances sur la police des
marchés par exemple, qui peuvent indistinctement atteindre les habitants des communes
aussi bien que ceux de la commune dont émanent ces ordonnances.
D’ailleurs,
rappelez-vous qu’ii s’agit ici d’ordonnance pénale. Car ce n’est qu’à celles-là
que mon amendement s’applique. Les principes veulent que des dispositions de
cette nature avertissent avant de frapper.
M.
Fallon. - Si la chambre adopte l’amendement de M. Pollénus, je
retirerai le mien.
- Le dernier paragraphe
de l’amendement de M. Pollénus est mis aux voix et adopté.
M.
Doignon. - Je crois que l’assemblée n’est plus en nombre ; je prierai
M. le président de vouloir bien le vérifier.
- La séance est un
instant suspendue pendant que le bureau compte les membres présents.
Plusieurs voix. - L’appel nominal ! l’appel
nominal !
M.
le président fait inviter les membres qui sont dans la salle des
conférences à revenir dans la chambre.
- On procède ensuite à
l’appel nominal.
M.
le président. - Il y a 52 membres présents, nous allons reprendre la
discussion.
M.
Dumortier. - Comme membre de la chambre, je demande que les noms des
absents soient insérés au Moniteur.
Je ferai remarquer que nous ne faisons que commencer nos travaux. Il est
fâcheux que si peu de membres assistent à la discussion d’une loi aussi
importante que celle de la constitution des communes.
M.
le président. - Je ferai observer que, parmi les membres absents, plusieurs
se trouvaient au commencement de la séance.
- La chambre consultée
décide que les noms des membres absents seront insérés au Moniteur :
Membres absents :
Brabant, Coghen, Cols, Dams, Dautrebande, Davignon, de Laminne, W. de Mérode,
de Puydt, de Robaulx, de Roo, de Sécus, Desmaisières, Desmanet, Devaux,
Dewitte, Domis, Dumont, Jadot, Jullien, Lardinois, Lebeau, Liedts, Polfvliet,
C. Rodenbach, Rogier, Rouppe, Schaetzen, Seron, Smits, Teichmann, Thienpont,
Vandenhove, Van Hoobrouck, Verrue, Vergauwen, Ch. Vilain XIIII, Wallaert,
Watlet.
- La dernière
proposition de M. Pollénus est mise aux voix et adoptée.
L’ensemble de l’articles est également adopté.
PROJET DE LOI
APPROUVANT
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je demande la parole pour la présentation d’un projet de loi.
« Sur la proposition de
notre ministre de l’intérieur, nous avons arrêté et arrêtons :
« Notre ministre de
l’intérieur présentera aux chambres en notre nom le projet de loi dont la
teneur suit :
« Vu la convention
en date du 6 novembre 1834, entre les sieurs Nieuwenhuysen
et Cie, concessionnaires du canal de Charleroy à Bruxelles, et le ministre de
l’intérieur,
« Nous avons, de
commun accord avec les chambres, décrété et nous ordonnons ce qui suit :
« Article unique.
Le gouvernement est autorisé à donner suite à la convention ci-dessus
mentionnée. »
Les motifs du projet
ainsi que la convention seront déposés.
M.
le président. - La chambre donne acte à M. le ministre de la
présentation du projet de loi dont il vient d’être donné lecture. Il sera
imprimé et distribué.
- La chambre ordonne le
renvoi de l’examen de ce projet à une commission nommée par le bureau.
PROJET DE LOI RELATIF
A L’ETABLISSEMENT DES BUDGETS PROVINCIAUX
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- « Vu la loi du 29 décembre 1833 ;
« Vu
l’impossibilité d’établir les conseils provinciaux assez à temps pour voter les
budgets des provinces pour l’exercice de 1835 ;
« Nous avons, de
commun accord avec les chambres, décrété et nous ordonnons ce qui suit :
« Article unique. Les
députations des états provinciaux, et le comité de conservation qui remplace la
députation des états dans la province de
« Les budgets seront
rendus publics par leur insertion au Mémorial
administratif quinze jours avant d’être soumis à l’approbation du Roi. »
- La chambre donne acte
à M. le ministre de la présentation de ce second projet de loi et en ordonne
l’impression et la distribution.
Il est également renvoyé
à l’examen d’une commission nommée par le bureau.
Discussion des articles
Titre
II. - Des attributions municipales.
Chapitre Ier. - Des attributions du
conseil municipal.
Article 77 (du
projet de la section centrale)
M.
le président. - Nous reprenons la discussion de la loi communale. -
« Art. 77 (du
projet de la section centrale) Le conseil de régence arrête les comptes des
administrations des hospices et bureaux de bienfaisance de la commune. Il
délibère sur leurs dépenses, lorsque ces établissements demandent ou reçoivent
des subsides de la commune.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je demanderai que l’on ajoute à cet article les mots suivants : « En cas
de réclamation il est statué sur ces objets par la députation des états. »
D’après la législation actuelle, les conseils de régence des villes délibèrent
sur les impôts et sur les budgets des hospices et des bureaux de bienfaisance ;
mais, pour les campagnes, ces délibérations sont soumises à la députation des
états. Je demande que les campagnes soient exemptées de cette formalité, et que
la députation n’intervienne qu’en cas de contestation.
M.
Dubus. - L’article proposé par M. le ministre de l’intérieur met sur la
même ligne les comptes de l’administration municipale et les comptes des
hospices et des bureaux de bienfaisance. Cette disposition ne nous a pas été
imprimée. Il est difficile d’en saisir actuellement toute la portée.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Il est bien entendu que ce ne sont que ce ne sont que les budgets tels qu’ils
ont été arrêtés par les bureaux de bienfaisance et par les hospices que je veux
voir soumettre en cas de contestation à la députation. Ces établissements
conservent leurs délibérations préalables.
M. Dubus. - Il y a un rapport dans lequel ces
budgets sont mis sur la même ligne que les budgets communaux. Il y a une
distinction à faire entre les comptes et les budgets des villes et les comptes
et les budgets des hospices et des bureaux de bienfaisance. Il faut que le
conseil communal ne puisse pas confectionner ces budgets, mais qu’il se contente
de les approuver. Je propose donc de rédiger l’article en ce sens :
« Sont soumis à l’approbation du conseil communal… »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je ne m’oppose pas à cette rédaction. J’avais pris les expressions consacrées
par les règlements existants.
M.
Dumortier, rapporteur. - Il y a une différence que l’on n’a pas
signalée. Dans le système de M. le ministre de l’intérieur, tous les comptes et
budgets des hospices ou administrations de bienfaisance, qu’ils reçoivent ou
non un subside de la commune, seront soumis à l’approbation du conseil
communal. Le système de la section centrale, au contraire, soumet à l’approbation
du conseil les comptes de ces administrations, mais n’exige la présentation des
budgets que de celles qui reçoivent un subside de la commune. Si nous examinons
l’état de la législation actuelle, nous verrons que par l’art. 75 du règlement
des villes, l’approbation des comptes des hospices était dans les attributions
du conseil de régence. Mais je ne trouve nulle part que leurs budgets fussent
soumis au même examen. Pour ma part, je vois que beaucoup d’administrations de
bienfaisance ont refusé de communiquer leurs budgets aux régences, et cela
parce que les règlements n’établissaient pas cette obligation. Je pense que
l’amendement de M. le ministre amènerait un système tout nouveau. Je me vois
donc forcé de maintenir la rédaction de la section centrale.
Si la commune fournit un
subside à une administration de charité, l’examen de son budget sera soumis au
conseil communal. Il faut bien que le conseil, qui y a intérêt, s’assure par
lui-même de l’élévation des dépenses et de la possibilité d’en réduire quelques-unes.
Mais, si la commune ne donne rien à un établissement de charité, de quel droit
en contrôlerait-elle le budget ?
L’on
me demandera par la même raison de quel droit les conseils de régence
examineraient-ils les comptes de ces mêmes établissements ? La question ici est
différente. Il faut que les comptes de toute autorité soient soumis à l’examen
d’une autorité supérieure, qui fasse à son égard l’office de cour des comptes.
Mais je ne sache pas qu’il soit nécessaire d’établir une cour des budgets. Il
est inutile de faire examiner les budgets des établissements de charité,
composés ordinairement d’hommes bienfaisants, par un conseil de régence qui
pourrait entraîner ces personnes à des dépenses qui répugneraient à leur
conscience. Il y aurait deux conseils dans une administration d’hospices au
lieu d’un. C’est ce qui ne doit pas avoir lieu.
M. de Behr. - L’honorable préopinant vient de
dire que la section centrale a reproduit la législation existante. Je puis lui dire
qu’à Liége les budgets des administrations des hospices ont toujours été soumis
à l’approbation du conseil de régence. Cette approbation est souvent très
nécessaire. Nous avons vu des administrations de charité porter à leurs budgets
des sommes de 100, de 200,000 francs pour construction de bâtiments, dont
l’emploi aurait été fait si la régence ne s’y était opposée. Je pense donc que
l’interprétation faite par l’honorable M. Dumortier, du règlement des villes,
n’est pas exacte.
M.
Fallon. - Je prends la parole pour appuyer l’opinion de l’honorable M. de Behr. A Namur, l’administration
communale a constamment vérifié les budgets et les comptes des hospices. Le
contrôle à exercer sur la formation des budgets est une formalité indispensable.
Vous ne pouvez attribuer au conseil communal le pouvoir de vérifier les
comptes, si vous ne lui donnez celui d’approuver le budget. Les hospices
pourraient faire des dépenses considérables. Il suffirait d’établir la balance
au bout de l’année et de présenter au budget une somme pareille à la somme
totale des comptes.
M. le rapporteur a
compare le conseil communal à une espèce de cour des comptes. Mais peut-il
concevoir qu’une cour semblable arrête des comptes, si elle ne connaît pas le
budget, ou n’a pas concouru a sa formation ?
M.
Dumortier, rapporteur. - Je me rallie à l’opinion des honorables
préopinants.
- La proposition faite
par M. de Behr d’ajouter à l’article en discussion les mots « et des
monts-de-piété », est mise aux voix et adoptée.
L’article 77 est mis aux
voix et adopté.
Article
78 (du projet de la section centrale)
M.
le président. - « Art. 78 (proposé par la section centrale). Le
conseil nomme les répartiteurs ou répartit lui-même conformément aux lois le
contingent des contributions directes assigné à la commune. »
M.
de Nef demande la suppression de cet article.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Nous ne pouvons pas admettre cette suppression ; car, aux termes des lois, il
faut nécessairement que le conseil communal nomme des répartiteurs ; la loi du
3 frimaire an VI est formelle à cet égard. On ne pourrait admettre la
suppression qu’en conséquence de la révision des lois financières. Partout les
répartiteurs ont des fonctions déterminées par les lois ; ces fonctions sont
maintenues par le projet de la section centrale qui ne déroge pas à la
législation en vigueur.
- L’art. 78 est mis aux
voix et adopté.
Article 79 (du projet de la
section centrale)
M.
le président. - « Art. 79 (proposé par la section centrale). Le conseil
arrête les conditions de location ou de fermage des biens et de tout autre
usage des produits et revenus des propriétés et droits de la commune, ainsi que
les conditions des adjudications et fournitures. »
- La chambre ajourne la
discussion de cet article.
La séance est levée à 4
heures et demie.