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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 25 juin 1833

(Moniteur belge n° 178, du 27 juin 1833)

(Présidence de M. Raikem)

La séance est ouverte à 1 heure 1/4.

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse, l’un des secrétaires, procède à l’appel nominal.

M. Dellafaille, autre secrétaire, donne lecture du procès-verbal qui est adopté.

Pièces adressées à la chambre

Quelques pétitions sont analysées ou renvoyées à la commission. Nous en remarquons une des habitants des environs d’Anvers qui demandent à être indemnisés des dégâts qu’ils ont essuyés par suite de l’intervention de l’armée française.

M. Liedts. - Je demande que la commission des pétitions soit invitée à comprendre dans son premier rapport la pétition des propriétaires des habitants d’Anvers. C’est moins dans l’intérêt des pétitionnaires eux-mêmes que dans l’intérêt du trésor que je fais cette demande car si les pétitionnaires n’obtiennent pas justice à l’amiable, ils s’adresseront aux tribunaux et les frais de poursuite retomberont à la charge du trésor public.

Projet d'adresse en réponse au discours du trône

Discussion des paragraphes

Paragraphe additionnel

M. le président. - L’ordre du jour appelle la continuation de la discussion sur l’amendement de MM Fallon et Dubus. La parole est à M. Ernst.

- Plusieurs voix. - Il n’y a pas de ministres présents.

- En ce moment MM. les ministres de la justice et des affaires étrangères entrent dans la salle.

M. Ernst. - Messieurs, un honorable député de Bruges M. Devaux, en combattant l’amendement que je viens appuyer, a discuté la question des destitutions et celle de la dissolution de la chambre. Je pense, avec l’honorable M. Dubus, que la première question est épuisée. Je me bornerai à parler de la dissolution. A mon avis rien ne prouve mieux le vice du système que je combats que la futilité des raisons sur lesquelles on a voulu l’étayer.

La dissolution de la chambre, dit-on, est un acte constitutionnel, ce n’est pas un coup d’Etat ; soit. Mais quand on ajoute que ce n’est pas un acte de haute gravité, je demanderai s’il n’est pas souverainement impolitique et blâmable de dissoudre la chambre sans raison suffisante, de livrer inutilement le pays aux agitations et aux divisions, lorsque tout devrait tendre à faire naître l’ordre et l’union ; je demanderai quel nom il faut donner à l’acte par lequel on use d’une prérogative royale contre l’esprit de la constitution et l’intérêt du pays ?

Je sais qu’il est dangereux de supposer trop facilement l’existence de coups d’Etat ; mais il l’est davantage de faire des actes qui y ressemblent.

Et il y a encore plus d’inconvénient à dire que l’arrêté dont les ministres seuls doivent répondre est un acte plus que ministériel, à laisser penser que cet acte n’a pas été conseillé par les ministres, et à rendre la couronne moralement responsable d’une disposition contre laquelle tout le pays s’est élevé.

« On peut recourir à la dissolution non seulement dans le cas de nécessité, non seulement dans des circonstances graves, mais aussi dans des circonstances douteuses.

« Le ministère était appuyé par le sénat, et dans la chambre des représentants il voyait des dissidences de 42 contre 44. Il était naturel de s’enquérir du vœu national. »

Mais il n’y avait de dissidences sur aucun point capital. Le patriotisme de la chambre et son dévouement n’ont jamais été en défaut.

Aussi, dès qu’on a su qu’il était question de dissolution, la presse a-t-elle protesté de toutes parts, de toutes les manières.

Le ministère a bravé l’opinion publique, c’est un reproche qui lui a déjà été fait et dont on n’a pas même essayé de le laver.

« La dissolution n’est pas une injure pour la chambre, c’est un appel à une puissance supérieure, à la puissance électorale. »

C’est vrai ; aussi ne blâmons-nous pas la dissolution pour des motifs personnels aux membres de l’ancienne chambre, mais considérant l’acte en lui-même dans sa cause et ses effets, et c’est précisément ce qui justifie la résolution que la chambre veut prendre.

L’honorable député dont je combats l’opinion, s’est réjoui de la dissolution. C’était un moyen pour lui de recevoir un nouvel hommage des électeurs.

C’est une joie qui a été partagée par peu de membres de l’ancienne chambre ; ceux même qui étaient assurés d’une réélection, voyaient avec une peine profonde une mesure aussi importante prise avec tant de légèreté ; « ceux-là préférèrent à une satisfaction d’amour-propre le bien-être de leur pays. »

Du reste, l’honorable député nous dit qu’il appartient à l’opinion ministérielle. Or, les gouverneurs, les commissaires de district et leurs employés, les procureurs-généraux, les procureurs du Roi, les avocats-généraux, les substituts, doivent combattre pour le ministère par la crainte d’une destitution, et tous ceux qui briguent des places, à peine de ne pas en obtenir.

Avec un pareil système, il n’y a pas toujours plus d’honneur à être élu qu’à ne pas l’être.

Et pour citer un exemple, je dirai que mon honorable ami M. Jaminé, éloquent défenseur de ses compatriotes, n’a pas moins conservé ses titres à la reconnaissance de son pays et à l’estime des honnêtes gens, quoiqu’il n’ait pas été réélu. Je suis heureux que ma voix puisse le venger dans cette enceinte de l’ingratitude de quelques hommes.

La dissolution peut être légitime et utile, même quand le ministère a la majorité : à l’appui de cette proposition, l’honorable M. Devaux invoque l’exemple de la chambre française qui a été dissoute par Casimir Périer, et la constitution belge qui prononce la dissolution des chambres en cas de changement à faire aux lois fondamentales.

La réponse est facile : quand l’intérêt du pays le demande, la dissolution de la chambre doit être approuvée.

La chambre des députés en France, en faisant des changements à la charte avait usurpé le pouvoir constituant. Il fallait faire ratifier par la nation le nouvel ordre de choses fondé par la révolution de juillet. Un appel au pouvoir électoral était donc politique et utile.

En cas de révision de la constitution, il est prescrit par un de ses articles que de nouvelles chambres seront convoquées. Alors la dissolution a lieu de plein droit, son utilité est évidente, et il n’y a pas d’induction à tirer de ce cas à l’hypothèse actuelle qui est toute différente.

La nomination de 24 nouveaux députés est, suivant l’honorable député de Bruges, la justification de la dissolution. Blâmer la dissolution, ce serait dire à nos 24 nouveaux collègues qu’ils ne représentent pas l’opinion du pays ; ce serait blâmer les électeurs, les traduire devant nous.

Cette argumentation est insignifiante : avec tous les moyens dont le ministère dispose, il serait inconcevable qu’il ne fût pas parvenu à faire nommer quelques nouveaux membres, et il n’est pas question de blâmer les électeurs ; je ne crains pas de dire qu’ils ont été les premiers à censurer la dissolution dont tout le monde reconnaissait l’inopportunité et les inconvénients.

« Depuis deux ans, le pouvoir s’est trouvé plus d’une fois dans le cas de dissoudre la chambre ; par exemple, lors du traité des 24 articles. »

De ce que les ministres n’ont pas prononcé la dissolution quand ils avaient de bonnes raisons de le faire, veut-on en conclure qu’ils pouvaient recourir actuellement à cette mesure sans motifs ? La conséquence serait singulière.

« Les membres de l’opposition ne devraient pas former de vœu plus ardent que de voir dissoudre la chambre. Le ministre qui fait un appel à l’opinion, est digne de confiance ; ceux qui lui en font un reproche renient cette opinion. »

Mais, pour désapprouver la dissolution, les membres de l’opposition s’accordent avec les membres de toutes les opinions de la chambre, avec le vœu qui a été universellement exprimé dans la Belgique. Ils ne peuvent pas désirer que le ministère fasse ce qu’il ne doit pas faire.

« Blâmer la dissolution est chose inouïe : une autre chambre pourrait blâmer toute dissolution et se perpétuer ; le droit de blâme qu’on réclame paralyserait l’exercice de la prérogative royale. »

Non, c’est une dissolution comme celle qui a eu lieu qui est chose inouïe. Il est absurde de supposer que par ce moyen une chambre pourrait se perpétuer. Le gouvernement ne craindra jamais de faire un appel au pays quand la chambre ne représentera pas l’opinion nationale. L’exercice de la prérogative royale ne sera jamais empêché ; mais, dans l’intérêt du trône même, il importe d’avertir le Roi quand ses ministres en font un usage généralement condamné.

« Il serait imparlementaire de parler de dissolution : la dissolution est de l’histoire. Notre dignité nous commande de nous abstenir. Il faut imiter l’exemple donné par le discours du trône. »

Il ne sera jamais imparlementaire en Belgique de dire respectueusement au Roi une vérité utile. La franchise est dans les mœurs des Belges ; ils n’ont jamais caché à leur prince ce qu’ils devaient lui dire, et l’affabilité des souverains a toujours été un des plus grands titres à leur affection. La dissolution sera blâmée par l’histoire. La protestation de la chambre figurera honorablement à coté de ce fait.

Il n’y a rien de contraire à la dignité de la chambre à blâmer la dissolution, puisqu’il ne s’agit pas d’une injure personnelle à ses membres, mais d’une mesure impolitique.

Non certes, nous n’imiterons pas l’exemple du discours de la couronne : autant les ministres avaient de motifs pour passer sous silence un acte qui blesse les vœux et les intérêts nationaux, autant il importe que nous manifestions ouvertement l’opinion du pays que nous représentons.

M. Legrelle. - Messieurs, lorsque deux systèmes opposés se trouvent en présence, qu’ils sont exposés d’une manière absolue et qu’ils sont poussés tous deux dans leurs dernières conséquences, ils conduisent à l’absurde. C’est ce que nous a démontré le développement de la doctrine émise par l’honorable M. Dubus, et de celle émise par M. le ministre de la justice. Ces deux doctrines me paraissent également erronées.

La première tend à ôter à la prérogative royale une partie de son action et de ses droits ; la seconde priverait la représentation nationale de son indépendance et de sa dignité. Celle-là, messieurs, rend, à mes yeux, tout gouvernement impossible ; celle-ci ferait des agents du gouvernement des serviteurs du pouvoir.

Je le répète, je ne veux ni de l’une ni de l’autre de ces extrémités, et je le demande à l’honorable M. Dubus : si l’on voulait ôter au gouvernement la faculté de révoquer dans tous les cas un fonctionnaire quelconque, sans être obligé de répondre de sa conduite à cet égard, le gouvernement, dans une pareille situation, pourrait-il marcher ?

Si d’un autre côté il était vrai que tout agent du pouvoir, tout fonctionnaire député qui n’embrasserait pas sans distinction les opinions du gouvernement, fût révocable à la volonté des ministres, où serait dans cette chambre la liberté de suffrages, la liberté d’exprimer son avis suivant ses convictions ? Il en résulterait certainement de graves inconvénients. Je ferai voir surtout à M. le ministre de la justice les conséquences de son système, entendu dans toute sa plénitude, au sein de la chambre et hors de la chambre.

Au sein de la chambre, messieurs, quelle confiance auriez-vous dans l’opinion de députés qui, sans cesse soupçonnés de vouloir voter pour le système ministériel, sembleraient ne reproduire que la pensée des ministres ? Et en dehors, de quelle considération seraient environnés les fonctionnaires qui ne pourraient penser, parler et agir sans être censés penser, parler et agir par et pour les ministres, sans être accusés d’être l’écho des ministres ? (Dénégations de M. le ministre de la justice.) Je sais bien que telle n’est pas la manière de voir de M. le. ministre, mais c’est la conséquence de sa doctrine.

M. le ministre répondra qu’il s’agit d’un système politique, qu’il admet que les fonctionnaires puissent voter en certains cas dans un sens opposé au gouvernement. Mais ce mot politique a une telle élasticité, que je ne sais pas où s’en arrêtera la portée.

Je suppose qu’un ministère soit composé d’hommes ultra-catholiques, comme on dit ; dans ce cas quelle sera la ligne politique que devront suivre les fonctionnaires ? La ligne ultra-catholique, et alors je crains l’établissement de l’inquisition dans le pays. Si ce ministère ne trouve pas les opinions des fonctionnaires conformes à son système, il pourra donc les révoquer en masse ? Combien d’entraves ne leur suscitera-t-il pas pour mettre en contradiction leurs intérêts et leur conscience ? C’est cependant là que conduirait la doctrine que nous avons entendu émettre par M. le ministre de la justice.

Ainsi le fonctionnaire, ou celui qui aspirera à le devenir, devra se considérer comme un moulin à vent, prêt à être tourné suivant l’impulsion que le chef ministériel voudra donner à la machine. Or, quel homme honorable consentira ou aspirera à être fonctionnaire à ce prix ?

Mais, parce que le système émis par le gouvernement est inadmissible, s’ensuit-il qu’il faille approuver l’amendement de MM. Fallon et Dubus ? Je crois que non, et cela par les mêmes principes que je viens de développer.

Dans le cas actuel, messieurs, il ne doit pas selon moi y avoir de système ; nous devons nous tenir en dehors de tout système. Tout en laissant au ministère la faculté de démettre un fonctionnaire dans des circonstances graves, nous ne devons considérer cela que comme une exception et non pas comme la règle.

D’une autre part, je crois que nous ne pouvons pas manifester dans un paragraphe de l’adresse au discours du trône notre improbation du système contraire, pris d’une manière absolue ; car dans tous les sens nous établirions un principe, lequel dégénérerait en système et ici tout système serait désastreux.

Si dans le discours du trône nous avions trouvé un seul mot qui eût trait à cette matière délicate, je concevrais que nous y fissions une réponse ; mais comme le Roi garde le silence, je ne pense pas que de notre côté il faille dire quelque chose à ce sujet. Qu’il nous suffise de blâmer les doctrines, de flétrir telle ou telle partie des doctrines. Emettons franchement notre opinion, comme je n’ai pas craint de le faire ; mais bornons-nous à cela. En allant plus loin nous empiéterions, selon moi, sur les prérogatives royales qu’il est aussi important pour nous que pour le pays de conserver intactes.

Quant au second paragraphe de l’amendement, je ne puis l’adopter non plus. Il me semble qu’en dissolvant la chambre, le pouvoir n’a fait qu’user d’une latitude que lui accordait la constitution, et il serait dangereux de déverser sur lui un blâme dans cette circonstance, parce que ce serait poser un antécédent en vertu duquel on blâmerait le gouvernement chaque fois qu’il y aurait dissolution, ce qui rendrait la dissolution impossible, et ce qui serait formellement contraire à l’esprit et la lettre de la constitution.

Je voterai donc contre l’amendement.

M. de Muelenaere. - Messieurs, je viens également m’opposer à l’amendement proposé par MM. Fallon et Dubus. Cet amendement se compose de deux parties. Les motifs à l’appui de la première partie vous ont été développés par M. Fallon, et les motifs à l’appui de la deuxième par M. Dubus.

Cet amendement, dans son ensemble, renferme un blâme, du moins implicite, de la conduite du ministère relativement à la dissolution de la chambre et à la révocation de deux fonctionnaires publics. L’intention de blâme est d’autant plus évidente que ni l’un ni l’autre de ces points n’est traité dans le discours du trône.

Mais, me dira-t-on peut-être, pourquoi n’avez-vous pas repoussé l’amendement proposé par M. de Brouckere, puisque cet amendement était également relatif à un objet qui n’était pas traité non plus dans le discours royal ? Messieurs, dans les deux cas, il n’y aucune espèce d’analogie.

Mes honorables amis et moi, nous déplorons, nous condamnons autant que qui que ce soit les désordres qui, à différentes époques, ont déshonoré notre révolution ; ces excès, ces actes de barbarie, indignes d’un peuple qui veut être libre ; car l’ordre public seul peut fonder la véritable liberté ; sans l’ordre public, il n’y a plus qu’anarchie. Dès lors, l’amendement de M. de Brouckere, amendé par M. Dellafaille, n’était que l’expression d’une pensée, d’un vœu qui était dans tous les cœurs, et nous avons pu l’admettre sans objection aucune. Peut-être cependant eût-il été plus convenable, plus politique de suivre le conseil de M. de Robiano ; mais nous l’avons adopté, parce qu’il n’y avait point d’inconvénient à le faire.

En est-il de même de l’amendement propose par MM. Dubus et Fallon ? La première partie est un blâme, du moins implicite, de la dissolution. Je ne rentrerai pas dans la question générale ; je sais que vous êtes impatients de mettre un terme à une discussion trop longue, à une discussion à laquelle le projet me semble avoir peu d’intérêt en ce moment, et qui nous a empêchés de nous occuper de choses plus utiles et plus réelles.

Quoi qu’il en soit, je vous rappellerai que je crois avoir établi de concert avec mes honorables collègues, qui ont partagé mon avis, que la dissolution est un droit incontestable de la couronne ; qu’elle n’est ni une injure ni une atteinte à la dignité de la chambre ; qu’au contraire, ce n’est qu’un hommage rendu à la souveraineté nationale que l’appel du Roi au pays, et que c’est une occasion pour le pays d’exprimer sa véritable opinion sur la marche des affaires et du gouvernement.

Mais, m’objecte-t-on, nous ne contestons pas ce principe ; nous soutenons seulement qu’il n’est pas applicable à l’espèce. Moi au contraire, je soutiens que nous n’avons pas à examiner si la dissolution était opportune, si elle était nécessaire. Je conviens même que c’est là une question sur laquelle on peut être, de très bonne foi, partagé d’avis. Je vais plus loin et je dis qu’en matière de dissolution on sera toujours divisé, parce que la dissolution doit nécessairement contrarier les vues d’un parti quelconque.

Messieurs, lorsque le plus grand homme d’Etat qu’ait eu la France depuis la révolution de juillet, celui auquel tous les partis ont fini par rendre justice après sa mort, Casimir Périer, le fondateur du système pacifique du 13 mars ; lorsque cet homme d’Etat eût dissous la chambre de 1830, est-ce que la plupart des journaux ne s’élevèrent pas avec force contre cette mesure qui fut traitée de mesure brutale et contre-révolutionnaire ? Est-ce que beaucoup de bons Français ne partagèrent pas ces avis et ne furent pas effrayés ? Eh bien la chambre nouvelle blâma-t-elle l’acte de la couronne ? Non, messieurs, elle le respecta ; elle ne fit pas un reproche au ministère d’avoir dissous une chambre qui avait fait la révolution de 1830, quoique l’utilité, la nécessité de cette dissolution pût être révoquée en doute de très bonne foi.

On a fait cette autre objection. Pourquoi n’avez-vous pas dissous la chambre lorsqu’il s’agissait des 24 articles ? C’était la une occasion favorable. Messieurs, je vous prie de vouloir bien évoquer vos souvenirs. Sans doute, en principe on aurait pu dissoudre la chambre, afin de pouvoir consulter le pays sur l’admission ou le rejet des 24 articles ; mais je demanderai si, dans un moment où la couronne pouvait se trouver dans la pénible obligation d’avoir le concours, l’avis immédiat de la représentation nationale, je demande s’il eût été prudent alors de lancer un acte de dissolution, et de rester pendant un mois ou six semaines sans représentation nationale. Nous-mêmes, messieurs, nous avons reconnu à cette époque qu’il eût été désirable de pouvoir dissoudre la chambre ; mais les circonstances nous faisaient un devoir de ne pas adopter cette mesure. D’ailleurs, s’il est vrai que les 24 articles fussent un motif de dissolution, la même raison se trouve dans la convention du 21 mai.

Un honorable membre s’est exprimé ainsi : Voulez-vous que je vous dise pourquoi vous avez dissous la chambre ? c’était pour être à même de faire adopter la convention du 21 mai. Eh bien, que le ministère tourne, s’il veut, cet argument à son profit ; qu’il dise : C’est parce que cette convention apportait des modifications au système jusqu’alors suivi que nous avons voulu consulter la nation, et voilà pour lui une excuse bien légitime.

Je crois, après tout, inutile d’insister davantage sur ce point, et je pense que la question de dissolution est complètement épuisée. Personne ne conteste à la couronne le droit de dissolution, La question d’opportunité peut être envisagée sous des aspects différents suivant l’impression que reçoit chaque membre de la représentation nationale.

La deuxième partie de l’amendement concerne le droit de révocation de quelques fonctionnaires publics. Jusqu’à présent je me sois abstenu de me prononcer dans cette partie de la discussion. Je l’ai fait, parce qu’une pareille discussion dégénère presque toujours en questions personnelles, et vous me rendrez tous cette justice, messieurs, de reconnaître que je cherche à éviter ces questions qui me semblent peu parlementaires ; car les noms propres devraient êtres exclus de nos débats.

Toutefois, les paroles proférées par un honorable membre dans la séance d’hier me font un devoir d’exprimer le motif de mon vote contre la seconde partie de l’amendement dont il s’agit.

Je vous ai déjà fait pressentir que je voterais contre la première et aussi contre la deuxième partie de cet amendement, non pas parce qu’en émettant un vote je craindrais d’être destitué par M. Rogier, mais parce que je veux bien conserver à l’honorable député de Tournay, qui a pu m’imputer un pareil motif, l’occasion de me destituer s’il devient ministre et si l’intérêt du pays l’exige. Que si je partageais l’opinion des auteurs de l’amendement, je m’abstiendrais de voter. Fonctionnaire révocable en vertu de la constitution, je ne voudrais pas qu’on pût me faire le reproche que je me suis prévalu de mon caractère de député pour m’assurer l’inamovibilité d’une place amovible.

Mais, dit-on, l’amendement n’est pas une question de personnes ; il n’est que la condamnation d’une doctrine émise par le ministre. Messieurs, avez-vous bien réfléchi à ces paroles ? En avez-vous bien calculé toute la portée ? Dites-moi, je vous prie, qui vous a donné le droit de condamner une doctrine ? Si vous condamnez aujourd’hui celle-ci, pourquoi, à Dieu ne plaise !, si un parti venait à prévaloir dans cette enceinte, pourquoi demain n’en condamneriez-vous pas telle autre ? Non, dans un pays comme le nôtre, les doctrines doivent être librement émises et débattues. Les doctrines ne se flétrissent pas par des phrases d’adresses, par jugements ni par arrêts ; c’est à l’opinion publique qu’il appartient de flétrir des doctrines anarchiques et contraires à l’ordre social.

Au surplus, si j’étais forcé dans cette occasion de m’expliquer sur les doctrines diamétralement opposées qui ont été développées par le ministère d’une part, et par des membres de l’opposition de l’autre, notamment par l’honorable M. Dubus, je vous déclare que je les repousserais toutes deux, parce que je sens l’inconvénient de tout système qui, poussé dans ses dernières conséquences, conduit à l’absurde.

Je ne connais d’autre système que celui de rester dans la constitution. Or, la constitution détermine quels sont les fonctionnaires révocables, et quels sont les fonctionnaires inamovibles. Voilà le droit. Je sais bien qu’on peut en abuser ; mais vous avez un contrôle sur l’administration. Si l’administration, en abusant d’un droit, a perdu votre confiance, vous trouvez fréquemment l’occasion de faire comprendre au ministère que vous n’adoptez pas sa manière de voir, qu’il fait abus d’un droit constitutionnel, et que les doctrines il les pousse jusqu’à l’extrême. Voilà tout ce que nous pouvons faire. Mais, des doctrines, je ne consentirai jamais à en justifier ni condamner aucune dans une adresse, pas même dans une loi, parce que cela n’est pas du ressort d’une assemblée parlementaire.

Ces considérations me déterminent à voter contre les deux parties de l’amendement proposé. Un de mes honorables amis proposera peut-être un sous-amendement. Celui-là, je le pense, finira par rallier toutes les opinions et même les plus divergentes.

- Plusieurs voix. - Voyons cet amendement ! qu’on en fasse la lecture !

M. de Theux se lève pour lire le sous-amendement annoncé par M. de Muelenaere.

M. Boucqueau de Villeraie. - Mais, M. le président, j’avais demandé la parole ; je l’ai cédée à M. de Muelenaere, je ne vois pas pourquoi on me l’ôterait maintenant.

M. de Brouckere. - Messieurs, on nous annonce un amendement qui doit concilier toutes les opinions. Il me semble que nous devons avant tout en entendre la lecture, d’autant plus qu’il rendra peut-être inutile tout autre discours. (Oui ! oui ! la lecture !)

M. de Theux. - Messieurs, d’après l’invitation de plusieurs de mes collègues, je présente un amendement dont vous allez entendre les termes, et en même temps je demande la question préalable sur celui de MM. Fallon et Dubus.

Voici mon amendement :

« Pénétrée de l’esprit de nos institutions nouvelles, la chambre des représentants défendra ses prérogatives, sans porter atteinte à celles de la couronne ; c’est ainsi que s’affirmeront chaque jour davantage la nationalité belge et le trône de Votre Majesté, qui en est le solide appui. »

M. le président. - La parole est à M. Boucqueau. M. de Theux l’aura ensuite pour développer son amendement.

M. Boucqueau de Villeraie. - Messieurs, par la discussion qui a eu lieu relativement au dernier amendement de MM. Fallon et Dubus, il est facile de reconnaître que deux principes ou propositions se trouvent ici en présence, qui paraissent tous deux incontestables en théorie, mais que dans la pratique semblent devenir inconciliables, lorsqu’on les applique aux membres de la chambre des représentants qui occupent en même temps des fonctions publiques amovibles.

Le premier de ces principes, c’est que les membres de la chambre des représentants doivent être parfaitement libres dans leurs votes, qu’ils n’ont à suivre que l’impulsion de leur conscience, et ne peuvent être recherchés à l’occasion de leurs suffrages.

Le second, c’est que le gouvernement, ayant le droit d’attendre de ses agents une obéissance complète, peut exiger d’eux qu’ils se conforment au système politique que suit le ministère et ne contrarient pas les projets qu’il présente, et qui se rattachent à ce système.

Maintenant un agent du gouvernement, membre de la chambre, comment pourra-t-il conserver cette liberté d’opinion, cette indépendance de suffrage, lorsque sa conscience lui dictera de repousser un projet présenté par le ministère, si celui-ci a le droit d’exiger de lui en sa qualité d’agent du gouvernement, qu’il vote pour ce projet, sous peine d’encourir sa destitution ?

Il y aura là deux forces contraires qui agiront sur un tel député, sa conviction et son intérêt. Comment pourra-t-il, s’il est soumis à cette double action, conserver son impassibilité et le caractère d’indépendance dans ses votes, inséparable d’un véritable représentant de la nation ?

Si l’on en croit M. le ministre de la justice, un tel député, agent du gouvernement, est obligé de voter avec le ministère, au moins dans les questions principales, dans les questions de gouvernement ; il peut bien se permettre de se séparer quelquefois du ministère, mais seulement dans les questions ordinaires, courantes, et sans en prendre l’habitude, sous peine de voir le ministère se séparer de lui par une destitution.

Les opposants soutiennent, au contraire, qu’un représentant ne peut dans aucun cas, fût-il agent du gouvernement ou pas, être recherché à l’occasion des opinions et votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions législatives ; ils fondent cette doctrine sur les termes précis de l’article 44 de la constitution, et en conséquence ils soutiennent que le gouvernement ne peut pas destituer un de ses agents, membre de la chambre des représentants, à cause qu’il aurait voté contre les propositions du ministère, et que si un ministre se permettait une telle destitution, il pécherait directement contre l’acte constitutionnel.

Il est vrai que M. le ministre assure que le ministère mettra dans la pratique beaucoup de modération, et de réserve dans l’usage de ce droit de destitution qu’il prétend, à l’égard des membres de la chambre, fonctionnaires publics, qui auront voté contre lui, et que ce ne sera que dans le cas de certaines questions plus essentielles ou fondamentales qu’il y aura recours.

Mais qui ne voit combien est vague et arbitraire cette distinction, cette délimitation entre des cas qui seront réputés essentiels, et où il faudra nécessairement que les fonctionnaires députés votent avec le ministère quand même, et les cas où il voudra bien user envers eux de plus d’indulgence, et leur octroyer une portion plus libérale de liberté et d’indépendance parlementaire ?

Cette distinction, c’est le ministère qui l’établira et qui pourra l’élargir ou la restreindre, suivant son bon plaisir et ses convenances, et la destitution planera toujours dans une distance plus ou moins rapprochée, ou même sera comme une espèce d’épée de Damoclès, au-dessus de la tête de tout représentant, agent du gouvernement, qui aura le courage, en suivant sa conscience politique, de voter autrement que le ministère.

C’est là une position fausse et insupportable pour des représentants de la nation, qui ne peut, à mon avis, que bien difficilement s’allier avec l’indépendance noble requise dans un véritable dépositaire des pouvoirs d’un peuple libre.

On s’est en quelque sorte apitoyé sur la position des ministres à l’égard de leurs agents fonctionnaires publics qui, par leurs votes comme représentants, contrarieraient leurs vues et leurs doctrines.

Mais, messieurs, a-t-on bien fait attention aussi à quel point la doctrine de M. le ministre de la justice était de nature à fausser la position politique de la chambre des représentants ; à quel point elle pouvait compromettre son indépendance générale et annuler en quelque sorte ses attributions constitutionnelles les plus essentielles, ou du moins en paralyser l’exercice ? Permettez-moi de vous en indiquer quelqu’exemple.

Supposons le système du ministère mis en pratique. En conséquence, tous les fonctionnaires amovibles qui sont en même temps membres de la chambre des représentants, sont obligés de voter dans le sens du ministère ; ils ne peuvent du moins s’en dispenser dans toutes les affaires importantes, et pour qu’ils ne puissent prétexter cause d’ignorance ou de doute, le ministère a soin de leur intimer qu’il regarde tel ou tel objet, telle ou telle question comme essentielle, importante, et les invite à voter avec lui et pour lui.

Supposez que cet objet contienne quelqu’atteinte cachée aux principes de la constitution ; par exemple, certaines propositions tendant à introduire des mesures préventives à l’égard de la liberté de la presse, ou quelques restrictions à la liberté de l’enseignement ou des cultes, ou bien à faire approuver par la chambre un traité diplomatique nuisible aux intérêts matériels du pays. Je ne fais pas aux ministres actuels l’injure de les croire coupables.

Eh bien dans une telle supposition tous les représentants, agents du gouvernement, devront donc voter avec et pour le ministère ?

Supposons un cas encore plus fort, supposons qu’un membre de cette chambre, en vertu de l’article 90 de la constitution, propose de mettre en accusation un ministre ou même tout le ministère ; certes celui-ci ne pourra manquer de regarder cet objet, cette affaire comme essentielle et importante, et même de la plus haute importance ministérielle possible, puisqu’il y va de son existence, et que si l’accusation est admise, le système ministériel en vigueur tombe en ruine ; ainsi il serait impossible de voter plus directement contre le système du ministère qu’en votant sa mise en accusation.

Eh bien ! qui pourra douter que, dans une telle occurrence, le ministère n’impose, suivant le système de M. le ministre de la justice, à tous ses agents fonctionnaires amovibles qui seront membres de la chambre, l’obligation de voter contre la mise en accusation ? C’est bien alors qu’il aura recours à toutes les exigences ministérielles, et les insinuations de destitutions éventuelles ou d’avancement, suivant les votes respectifs, ne manqueront pas de courir à leurs adresses.

Or, messieurs, je vous le demande, où une pareille manière d’être, un semblable système de servage conduirait-il ? A paralyser, à annuler en quelque sorte complètement la mission importante que la constitution a confiée à la chambre des représentants, celle de surveiller les actes du ministère et de les mettre en accusation, lorsqu’il y a lieu, devant la cour de cassation.

S’agira-t-il peut-être ici d’une voix, de deux voix, de trois voix favorables à l’absolution, que cela procurerait au ministère ; non, messieurs, faites le relevé.

Combien la chambre des représentants a-t-elle de membres ayant des fonctions publiques amovibles du gouvernement ? La chambre dissoute, si je ne me trompe, en avait 25 ; celle actuelle, si j’ai bien compté, en a de 30 à 34 ; vous voyez que dans ce genre nous faisons des progrès ; et il ne peut guère en être autrement puisque MM. les honorables gouverneurs de province, MM. les honorables procureurs du Roi ou membres des parquets ont des avantages immenses et évidents pour persuader aux électeurs qu’ils ont toutes les qualités propres à être d’excellents représentants.

Ce n’est pas que je me plaigne de voir dans cette chambre les estimables fonctionnaires qui en font partie ; au contraire, il est heureux que nous puissions profiter de leurs connaissances pratiques d’administration ; seulement je voudrais qu’ils fussent parfaitement libres dans l’exercice de leurs suffrages.

Mais je reviens au cas supposé d’une proposition de mise en accusation de ministres, faite à la chambre des représentants, une chambre dans laquelle se trouvent 34 membres agents amovibles du gouvernement, c’est-à-dire le tiers de la chambre en la supposant au complet, ou la moitié, s’il n’y a que 68 membres présents, comme il arrive souvent, tous obligés de voter dans le sens du ministère : qui osera nier que ce système ministériel ne fausse entièrement la situation de la chambre, ne rende ses principales attributions inutiles et dérisoires, et son indépendance nationale essentiellement compromise ?

Qui ne sera obligé de convenir que, dans un pareil cas, le ministère sera, au moins pour un tiers ou une moitié, juge et partie dans sa propre cause ?

Et que dirait-on d’une manière d’administrer la justice, où un prévenu aurait la faculté d’introduire parmi les jurés chargés de prononcer sur son affaire, le tiers des membres de ce jury composé de compères, c’est-à-dire de gens obligés, forcés de voter pour son absolution ?

Admettez ce système que les fonctionnaires publics, membres de la chambre, sont obligés de voter dans le sens du ministère, et alors la responsabilité ministérielle qui est comme le pivot de toute notre machine administrative, ne sera bientôt plus qu’un vain mot, qu’une garantie illusoire.

La politique toute simple du ministère sera de travailler à faire entrer le plus grand nombre possible de fonctionnaires amovibles dans la chambre de représentants, sûr de leurs voix ; maître de leurs suffrages obligés, il pourra non seulement faire adopter toutes les mesures législatives qui lui plairont, fussent-elles désastreuses, mais encore se ménager dans la chambre elle-même, dans cette chambre redoutable à tous les ministres ineptes ou maladroits, une compagnie d’assurance, un nombre suffisant d’assureurs contre le danger des mises en accusation et autres tribulations ministérielles, je veux dire un nombre suffisant de membres obligés, forcés par leur qualité de fonctionnaires amovibles de voter dans le sens ministériel,

D’après cela, vous penserez peut-être, messieurs, que je trouve très convenable d’adopter le dernier amendement ; mais non, telle n’est pas ma pensée.

Quoique je regarde la nécessité de maintenir tous les membres de la représentation nationale dans la plus complète indépendance de leurs suffrages et de leurs opinions parlementaires, comme étant de la plus haute conséquence pour le maintien de nos libertés publiques, et quoique cette nécessité d’indépendance parlementaire me paraisse à moi d’un ordre bien supérieur et bien plus essentiel que la subordination des agents du pouvoir envers le ministère, même lorsqu’ils sont membres de la chambre ; je ne me dissimule cependant pas que le système opposé, le système défendu par le ministre de la justice, a aussi des probabilités en sa faveur, non seulement par le nombre de voix qui pourraient en voter en quelque sorte la sanction par le rejet pur et simple de l’amendement présenté par M. Dubus, mais encore qu’il y a aussi de forts motifs intrinsèques à faire valoir en sa faveur, tirés des inconvénients qui pourraient résulter pour la marche du gouvernement d’un système opposé.

En résultat je regarde la question relative à la position parlementaire des agents du gouvernement, membres du corps législatif, comme une des plus difficiles que présentent nos institutions politiques.

Qui tracera la ligne exacte où devront s’arrêter, à l’égard de ces fonctionnaires amovibles, les exigences ministérielles et au-delà de laquelle ils seraient placés dans la plus fausse des positions et dans la nécessité de manquer à la confiance de la nation qui les a choisis pour ses mandataires ou à celle du gouvernement dont ils sont les agents ?

C’est là un problème infiniment difficile à résoudre et que je trouve bien plus prudent de laisser indéterminé, du moins quant à présent, que de risquer de se tromper en le décidant trop légèrement.

La même question importante a déjà été agitée ailleurs qu’en Belgique, et on a vu combien elle était délicate : il n’y a pas longtemps qu’un ministre français voulut faire un essai du système qu’on vient de préconiser ici, de la part du ministère ; il destitua un fonctionnaire à la nomination du gouvernement pour n’avoir pas voté, dans une certaine occasion, pour le ministère dans la chambre des députés dont il était membre ; eh bien ! n’est-il pas arrivé que les démonstrations de l’opinion publique et l’indignation universelle excitée par cette destitution forcèrent peu après le ministre à replacer le député qui en avait été victime ? Et il est permis de douter que cette levée de boucliers du ministère contre les membres indépendants de la chambre ait augmenté sa popularité en France pas plus que les destitutions dont nous avons été dernièrement témoins ici n’ont augmenté la popularité du ministère en Belgique.

Toutes ces sortes de mesures, toutes ces exigences d’obéissance en quelque sorte passive de la part de fonctionnaires qui sont en même temps représentants de la nation ; l’abnégation de leurs opinions personnelles et leur sacrifice aux opinions et aux volontés ministérielles sous peine de destitution, ressemblent beaucoup trop aux doctrines du fameux message du 11 décembre, de tyrannique mémoire, pour faire fortune aujourd’hui dans ce pays et y obtenir l’assentiment public, après une révolution qui n’a été faite que pour abattre les exigences ministérielles et triompher des excès du pouvoir.

Mais la question relative à la position des représentants fonctionnaires publics étant aussi difficile et perplexe, sommes-nous donc obligés de nous prononcer par un vote solennel pour l’un ou l’autre système ? Je suis heureux de faire remarquer qu’il n’en est point ainsi ; nous nous occupons d’une réponse au discours du trône ; ce discours ne dit pas un mot qui ait rapport à cette grande et difficile question : il n’y a donc pour nous aucune nécessité d’en parler dans notre réponse, tandis qu’il pourrait y avoir de graves inconvénients à le faire, ou même à rejeter formellement l’amendement y relatif.

Dans cette position, quel est le parti le plus sage ? c’est à mon avis de laisser la question intacte, en adoptant sur ledit amendement la question préalable ; ce qui veut dire, suivant les termes du règlement, déclarer qu’il n’y a pas lieu à délibérer ; et c’est ce que j’ai l’honneur de proposer à la chambre.

Quant à l’autre de ces amendements, lequel est relatif à la dissolution de la chambre, je déclare que je ne puis m’empêcher de regarder cette mesure comme ayant été très inopportune et sujette à de graves inconvénients, sans avoir été provoquée par de véritables motifs de nécessité ou d’urgence politique.

Elle a excité dans tout le pays une espèce de fièvre politique qui a réveillé toutes les passions, ranimé les partis, excité les défiances et les jalousies ; elle a essentiellement compromis la popularité du gouvernement ; elle a jeté sur lui une teinte d’ingratitude envers cette chambre dissoute, dont plus des deux tiers des membres avaient fait partie de ce congrès national, fondateur de la monarchie belge et auxquels le ministre n’a pas su donner d’autre marque de souvenir et de reconnaissance que de le renvoyer pour un vote motivé par le plus pur patriotisme et le désir de ménager les deniers de la nation, et de la faire sortir d’un état provisoire et précaire aussi insupportable et aussi longtemps prolongé.

Mais cette mesure de dissolution rentrant dans les attributions constitutionnelles du gouvernement, et ayant déjà été jugée et réprouvée, sous le rapport de la convenance et de l’inopportunité, par l’opinion publique et générale de la nation, il est inutile d’y revenir dans la réponse au discours du trône, puisque ce discours n’en parle aucunement, quoique certes ce fût un des événements politiques les plus marquants et les plus importants survenus depuis la dernière session.

Par ces considérations, je propose également à la chambre d’adopter la question préalable sur le premier amendement relatif à la dissolution de la chambre. J’ai dit.

M. de Theux. - Je me trouve entièrement d’accord avec l’honorable préopinant, bien que nous ne nous soyons concertés aucunement. Nous proposons tous les deux la question préalable ; seulement je demande qu’on ajoute un paragraphe additionnel au projet d’adresse. Les développements dans lesquels il est entré me dispenseraient complètement d’en donner de nouveaux. Cependant je me crois obligé d’exposer succinctement les motifs de mon amendement.

Je ne puis admettre l’amendement proposé par mes honorables collègues, MM. Fallon et Dubus.

La faculté de dissoudre les chambres ou l’une d’elles est si intimement liée avec le maintien des pouvoirs constitutionnels du Roi, que nous devons craindre d’en paralyser l’usage en exprimant un blâme quelconque. Je pense aussi que la dissolution a été inopportune, et cependant je ne puis consentir à poser un antécédent que je considère comme dangereux.

Sans doute la chambre dissoute a été gardienne des libertés que la constitution a garanties : elle a été dévouée à la patrie et au Roi ; mais ces titres ne lui sont pas contestés. L’acte de dissolution n’emporte aucune flétrissure ; il est donc inutile de la réhabiliter.

Je passe à la seconde partie de l’amendement ; il est évident, par la discussion qui y a donné lieu, qu’elle tend à résoudre une question constitutionnelle.

Il s’agit de consacrer dans l’adresse un principe qui a une haute portée, qui peut avoir pour résultat de paralyser la prérogative royale, consacrée par l’article 66 de la constitution, chaque fois qu’il s’agira d’un fonctionnaire revêtu du mandat de député.

Il me paraît important d’éviter de décider incidemment une question de cette nature.

Rien ne nous y oblige d’ailleurs ; le ministère a soutenu une théorie en fait de destitutions qui a soulevé de vives réclamations, mais cette théorie a été combattue.

A la vérité, il importe à la chambre de ne pas laisser croire, par un silence absolu, qu’elle l’adopte, qu’elle y consent ; l’amendement que j’ai formulé a pour but formel d’exprimer une réserve, de ne rien préjuger sur cette importante question : la chambre demeure libre de repousser une administration qu’elle croirait, par ses actes, porter atteinte à ses prérogatives ou blesser l’opinion nationale par l’introduction d’un système qui répugnerait à nos mœurs.

En fait, messieurs, je ne crains point l’introduction d’un tel système ; il éprouverait, je n’en doute pas, une opposition insurmontable dans cette chambre et dans le pays.

Je crois donc qu’il suffit d’adapter l’amendement que j’ai proposé, qu’on peut en toute sécurise adopter la question préalable, qu’il convient de le faire pour laisser intacte la question constitutionnelle.

- L’amendement de M. de Theux est appuyé.

M. Dumortier. - Messieurs, lorsque le ministre d’Etat, qui siège ma droite, nous a dit qu’un amendement nous serait soumis, je ne m’attendais pas que le ministre d’Etat, qui siège à ma gauche (on rit), allait nous présenter un système qui est l’appui le plus formel de la doctrine ministérielle.

Déjà depuis plusieurs jours je n’ai cessé de flétrir dans cette enceinte cette doctrine subversive de toute liberté et qui tend à rendre les fonctionnaires des agents serviles du pouvoir.

Un honorable membre, après nous avoir démontré jusqu’à l’évidence combien est fausse la doctrine que je combats, et combien ses conséquences seraient désastreuses pour nos libertés, a conclu en définitive par la demande de la question préalable sur l’amendement de mes amis, MM. Fallon et Dubus. Je ne puis non plus expliquer cette demande.

J’ai entendu, messieurs, avec étonnement l’honorable collègue qui réclame la question préalable, dire qu’elle laisse la question ministérielle entière. C’est là une grave erreur. Le ministère a établi, a formulé nettement son système ; il a dit : J’ai le droit de destituer tout membre qui, par une série de votes ou dans toute discussion importante, se sera mis en opposition avec moi. Il faut donc trancher cette question et la trancher sans hésiter.

Lorsque, il y a deux ans, le message du 11 décembre, de triste et déplorable mémoire, parut dans cette enceinte, vous vous rappelez avec quel élan d’indignation unanime l’accueillit la Belgique. Il est vrai qu’à cette époque il se trouvait un magistrat qui, après l’avoir examiné dan le silence du cabinet, après l’avoir mûrement médité, déclarait qu’il était compatible avec les libertés publiques ; qu’il était juste, qu’il fallait l’appliquer, restreindre la liberté de la presse ; en un mot, saper toutes les libertés. (Mouvement.)

Quant à moi, messieurs, loin de l’approuver, je flétrissais alors d’une des pages brûlantes de patriotisme, j’ose le dire, ce message que d’autres approuvaient. Et, aujourd’hui que la révolution a établi un nouveau système de liberté, je manquerais à mon mandat, si je ne flétrissais pas de tout mon pouvoir la même tentative. Il y a donc entre nous ce rapport que tous deux nous avons persévéré dans nos convictions ; il n’en est pas de même de ces écrivains qui alors, comme moi, flétrissaient cette œuvre de despotisme, et qui, aujourd’hui, ont pris à tâche de la défendre.

Pour vous montrer, messieurs, combien la doctrine que je flétris est analogue à celle du message de Guillaume, permettez-moi de vous donner lecture de l’arrêté du 10 janvier 1830, qui en applique les principes. Vous verrez si la doctrine du ministère n’est pas entièrement calquée sur celle du tyran que nous avons chassé.

« Guillaume, par la grâce de Dieu, etc.

« Considérant que les circonstances qui ont précédé et accompagné les délibérations récentes sur les budgets tendent de plus en plus à prouver combien il importe que les fonctionnaires de l’Etat en général, et ceux qui occupent des places de confiance en particulier, soient dévoués sincèrement et avec zèle à la marche, aux vues et aux principes du gouvernement, le soutiennent et donnent en ceci l’exemple à leurs concitoyens ; que cela est du devoir, non seulement de tous ceux qui se trouvent placés sous de tels rapports, mais même absolument indispensable à la conservation de la force nécessaire au gouvernement et au maintien intact des institutions constitutionnelles ; que cependant les circonstances sus-énoncées nous ont, à notre vif regret, fourni l’expérience que quelques fonctionnaires, des officiers de notre maison, et des personnes jouissant de preuves particulières de notre faveur, ont, dans leur conduise publique, manifesté une aversion absolue pour les principes de notre gouvernement ;

« Considérant que, bien qu’il s’en trouve parmi eux qui, étant en même temps membres des états-généraux, conservent comme tels la compétence constitutionnelle et indépendante de manifester ouvertement leurs sentiments à l’égard des projets en délibération, ces sentiments néanmoins, dés qu’ils sont en opposition avec les principes d’un gouvernement que, commue fonctionnaires, il convient qu’ils défendent et fassent respecter par leurs subordonnés, et soutiennent comme particulièrement favorisés, ne peuvent nous permettre de continuer à leur confier l’exécution de nos ordres, ni à leur laisser la jouissance des marques particulières de notre faveur ;

« Ouï les chefs des départements ministériels, avons trouvé bon et entendu, sauf les dispositions ultérieures auxquelles les considérations ci-dessus pourraient donner lieu de notre part, de révoquer comme nous révoquons par les présentes M. le baron de Stassart. de sa pension de 1,800 fl. ; M. Dellafaille d’Huysse (père de nos deux collègues) des fonctions de chambellan ; MM. Ingenhouser, Leyben de la Veilleuze, des fonctions de commissaire de district.

« M. de Bousies, major de la maréchaussée, est mis à la disposition du ministre de la guerre, avec solde de non-activité. »

Messieurs, j’appelle votre attention sur cet arrêté du roi Guillaume. Vous vous rappelez quelle indignation unanime il a soulevée dans ce pays. Eh bien je vous demande si les doctrines flétrissantes que vous avez entendues ne sont pas absolument les mêmes que celles qu’on préconisait à cette époque. Comment, après que nous avons tous signé des pétitions pour protester contre ce système tyrannique et liberticide, comment les représentants de la nation pourraient-ils accepter aujourd’hui les mêmes doctrines par leur silence ; comment pourraient-ils y donner une adhésion tacite ?

Messieurs, le système préconisé par les ministres n’est pas nouveau ; il est depuis longtemps en usage en Angleterre, et ce n’est pas dans ses fautes que nous devons imiter ce pays. Le ministre Walpole le premier introduisit la corruption dans le parlement, qui en fit un moyen de gouvernement, et dans son délire il alla jusqu’à prétendre que chaque orateur avait un prix. Qui sait si bientôt le ministère ne soutiendra pas la même doctrine ?

On a invoqué l’exemple de la France ; mais qui ne sait que le système que nous repoussons a toujours été flétri par l’opinion publique ; que les destitutions y affaiblissent le pouvoir, bien loin de l’affermir ? Qui ne sait que l’estime générale s’attache toujours aux victimes, et que les destitutions amènent toujours le résultat inverse de celui qu’on en attend ?

Mais d’ailleurs, il y a une différence remarquable entre le système français et le nôtre. Je vous défie de trouver dans la charte française un seul article qui établisse l’indépendance parlementaire et défende de rechercher en rien un représentant pour ses votes. Et puis, en France les votes sont secrets, et un député pourrait toujours déposer dans l’urne un bulletin contre le ministère. Ici, tout se fait par la plus grande publicité ; on doit répondre à haute voix, par oui ou par non, et certes ce n’est pas en faveur du pouvoir qu’une telle disposition a été inscrite dans la constitution. Il fallait donc bien que les députés fonctionnaires fussent préservés de la colère ministérielle, et c’est ce qu’a prévu l’article 44 en défendant qu’ils puissent être recherché pour leurs votes. S’il en eût été autrement, on n’eût pas admis les fonctionnaires parmi la représentation nationale.

C’est donc une grande absurdité que de venir s’appuyer sur l’exemple de la France et de l’Angleterre pour venir établir chez nous le système de la corruption parlementaire ; et maintenant que vous avez entendu de si étranges doctrines, maintenant que le ministère s’est déclaré le général de l’armée des fonctionnaires publics, ne vous semble-t-il pas voir ceux-ci rangés en bataille dans cette enceinte, et les ministres faisant répondre oui ou non, selon la circonstance, au commandement de feu ? (On rit.).

Messieurs, si vous permettez à ce système de pervertir le gouvernement, on enverra bientôt aux fonctionnaires des billets pour assister à telle ou telle séance, importante selon l’intérêt ministériel, absolument comme on envoie un billet de garde pour faire la patrouille ou l’exercice (on rit de nouveau) ; voilà ou l’on veut vous conduire lorsque l’on veut amener la démoralisation des fonctionnaires et la corruption de la chambre des représentants.

Je m’étonne que le ministre d’Etat qui siège à ma gauche ait prétendu que nous voulions implicitement porter atteinte à la prérogative royale.

Loin de nous une idée semblable : si personne voulait jamais y toucher, moi qu’on voit toujours sur la brèche pour la défense des libertés nationales, je serais le premier à défendre ces prérogatives ; mais ce n’est pas ici l’occasion. Il s’agit maintenant de savoir si la couronne peut anticiper sur les prérogatives populaires. Ce ne sont pas les prérogatives de la royauté qui sont en question, mais celles du peuple. Et si vous adoptez les doctrines ministérielles, nos plus inviolables prérogatives sont perdues à jamais.

Voulez-vous voir combien le système des ministres est perfide et honteux ? (Rires au banc des ministres.) Je le répète pour que vous l’entendiez bien, MM. les ministres. Veut-on voir combien votre système est perfide et honteux ? eh bien ! admettez une supposition, puisqu’ici on raisonne par supposition. Je suppose qu’un fonctionnaire public, qui, deux ans avant la révolution, se serait fait journaliste par pur patriotisme, a, par dévouement pour son pays, abandonné l’une des plus belles clientèles du tribunal où il siégeait ; je suppose encore que le patriotisme de ce journaliste en vient à se faire persécuter par le tyran ; on met sa tête à prix ; il est sur le point d’être fusillé par les soldats du roi Guillaume. Je suppose encore que cet homme, après la révolution, a reçu du gouvernement provisoire la récompense qu’il méritait. Je suppose qu’il siège aujourd’hui dans cette enceinte, et que le gouvernement vienne le destituer. Je le demande, le gouvernement n’aurait-il pas destitué là un de nos amis, un de nos compatriotes ? Et le système du ministère ne serait-il pas réellement perfide et honteux ? Eh bien !, messieurs, cette supposition est vraie en tous points. Mais maintenant je vais présenter une hypothèse qui cesse de l’être.

Si cet homme qui a abandonné une belle clientèle en se faisant journaliste (il en est qui se sont faits journalistes et qui n’ont pas perdu de clientèle) (on rit), qui s’est sacrifié pour son pays, n’avait aucun moyen d’existence, voilà donc que l’on aurait mis sur le pavé un homme qui s’était dévoué ; voilà donc que vous lui enlevez tout ce qu’il avait acquis, et cela à cause qu’il aurait servi la cause de la révolution. Voilà pourtant où tend votre système. Vous le voyez, messieurs, on veut établir la corruption sur la crainte et la corruption ; vous ne pouvez pas admettre un système si pervers, ou si vous l’admettiez, il ne resterait plus qu’à imprimer en caractères de feu sur le front des fonctionnaires publics, comme un fermier sur son troupeau, cette expression : vendus ! (Mouvement.)

M. de Theux. - Je m’étonne que le préopinant ait si mal interprété mes paroles ; il m’a accusé d’avoir dit que l’amendement de MM. Fallon et Dubus empiétait sur les prérogatives royales. Ce n’est pas là ce que j’ai prétendu ; j’ai dit que la question était grave, douteuse, que nous devions nous abstenir prudemment ; et c’est pour cela que j’ai formulé une réserve dans le projet d’adresse.

Je m’étonne encore que l’on ait pu avancer que j’approuvais le système ministériel, alors que j’ai dit positivement que je croyais qu’un tel système, s’il était développé, rencontrerait dans la chambre et dans le pays une opposition unanime.

J’ai cru devoir rectifier ces faits, parce que j’y attache une haute importance.

M. de Robiano de Borsbeek. - Messieurs, j’ai hautement désapprouvé la dissolution de la chambre. Je suis loin cependant de ne pas y reconnaître l’exercice d’un droit légal, même dans cette occasion.

J’ai blâmé hautement certaine destitution et d’autres actes.

Toutefois des considérations d’un ordre supérieur me paraissent demander que, dans les circonstances présentes, un blâme ne soit pas exprimé officiellement. Je voterai en conséquence contre l’amendement de MM. Fallon et Dubus, parce que les développements lui ont donné une trop grande portée. Je voterai en outre pour la question préalable.

Messieurs, il est des positions où le plus grand service qu’on puisse rendre à son pays ne consiste pas dans des efforts immédiats pour le redressement d’un grief, et où le véritable coup d’œil politique perce plus loin et découvre quelque chose de plus important au bien-être de la patrie.

- Nombre de voix. - La clôture ! la clôture !

M. le président. - Personne ne demande la parole contre la clôture ?

M. Fleussu. - Si la clôture n’est pas prononcée, je demanderai la parole. (La clôture ! la clôture !)

M. Dumortier. - La question est importante, il me semble que nous ne devons pas brusquer la clôture et entendre M. Fleussu. (La clôture ! la clôture !)

- La clôture est mise aux voix.

MM. les ministres et une grande partie de l’assemblée se lèvent pour. Elle est adoptée.

- Un grand nombre de membres. - L’appel nominal ! l’appel nominal !

- Plusieurs membres. - La question préalable

- D’autres membres. - La division ! La division !

M. le président. - On a demandé la division ; elle est de droit ; on a demandé la question préalable ; aux termes du règlement elle doit avoir la priorité. En conséquence il va être procédé à l’appel nominal pour savoir si l’on adoptera la question préalable sur la première partie de l’amendement de MM. Dubus et Fallon.

- L’appel nominal a lieu. Voici les noms des membres qui se sont prononcés pour la question préalable sur cette partie de l’amendement :

MM. Berger, Boucqueau de Villeraie, Cols, d’Hane, Coppieters, Davignon, de Foere, Wallaert, de Laminne, Dellafaille, F. de Mérode, W. de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Robiano de Borsbeck, de Sécus, Desmanet de Biesme, de Terbecq, de Theux, Schaetzser, Devaux, de Witte, Vanderheylen, Donny, Dubois, Duvivier, Eloy de Burdinne, Lebeau, Hye-Hoys, Simons, de Longrée, Legrelle, Beckaert, Liedts, Destambier, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Brixhe, Polfvliet, Poschet, Raikem, Pollénus, Rogier, Ad Dellafaille, Thienpont, Ullens, Vandenhove, Goblet, Vanderbelen, Vuylsteke, Deman, H. Vilain XIIII, Zoude.

Les membres qui ont voté contre sont :

MM. Angillis, Brabant, Corbisier, d’Autrebande, de Puydt, de Brouckere, Fleussu, Quirini, de Meer de Moorsel, de Renesse, Frison, de Roo, Desmaisières, Desmet, d’Hoffschmidt, d’Huart, Dubus, Dugniolle, Dumont, Dumortier, Ernst, Fallon, Gendebien, Trentesaux, Hélyas, Jadot, Doignon, Meeus, Smits, Pirson, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Rouppe, Seron, Van Hoobrouck, Vergauwen, Watlet.

(Erratum inséré dans le Moniteur belge n°179, du 28 juin 1833 : Dans les votes qui ont été émis dans la séance d’hier, quelques transpositions de noms ont eu lieu dans les listes que nous ayons rapportées. MM. Davignon, Hye-Hoys, Desmanet de Biesme ont voté négativement sur la première partie de l’amendement de MM. Fallon et Dubus, et ont voté affirmativement sur la seconde partie).

M. le président. - Voici le résultat de l’appel nominal :

91 membres ont répondu à l’appel : 54 ont voté pour la question préalable ; 37 ont voté contre. En conséquence, la chambre passe à la question préalable sur la première partie de l’amendement de MM. Dubus et Fallon.

- Un second appel nominal a lieu pour savoir si l’on passera également à la question préalable sur la deuxième partie du même amendement.

Le nombre des votants était de 91 : 55 ont vote pour ; 36 contre. En conséquence la question préalable reste adoptée.

On voté pour :

MM. Destambier, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Smits, Brixhe, Polvfliet, Poschet, Raikem, Pollénus, Rogier, Dellafaille, Thienpont, Ullens, Vandenhove, Goblet, Vanderbelen, Deman, H. Vilain XIIII, Zoude, Berger, Boucqueau de Villeraie, Cols, d’Hane, Coppieters, Wallaert, de Laminne, H. Dellafaille, F. de Mérode, W. de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Robiano de Borsbeck, de Roo, de Sécus, Desmanet de Biesme, de Terbecq, de Theux, Schaetzer, Devaux, de Witte, Vanderheyden, Donny, Dubois, Dugniolle, Dumont, Duvivier, Eloy de Burdinne, Lebeau, Hye-Hoys, Simons, de Longrée, Legrelle, Beckaert, Liedts.

Ont voté contre :

MM. Meeus, Pirson, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Rouppe, Seron, Van Hoobrouck, Vergauwen. Vuylsteke, Watlet, Angillis, Brabant, Corbisier, d’Autrebande, Davignon, de Puydt, de Brouckere, de Foere, Fleussu, Quirini, de Meer de Moorsel, de Renesse, Frison, Desmaisières, Desmet, d’Hoffschmidt, d’Huart, Dubus, Dumortier, Ernst, Fallon, Gendebien, Trentesaux, Helyas d’Huddeghem, Jadot, Doignon.

(Erratum inséré dans le Moniteur belge n°179, du 28 juin 1833 : Dans les votes qui ont été émis dans la séance d’hier, quelques transpositions de noms ont eu lieu dans les listes que nous ayons rapportées. MM. Davignon, Hye-Hoys, Desmanet de Biesme ont voté négativement sur la première partie de l’amendement de MM. Fallon et Dubus, et ont voté affirmativement sur la seconde partie).

Paragraphes 7 et 8

M. le président. - Voici maintenant les derniers paragraphes du projet de la commission :

« Les députés de la nation, Sire, donneront tous leurs soins aux améliorations intérieures du pays. Le projet de grande communication de la mer et de l’Escaut à la Meuse et au Rhin, les lois des budgets et des comptes, celles d’organisation provinciale et communale, ainsi que celle des distilleries, seront examinés avec toute l’attention et avec toute la sollicitude que réclament des besoins aussi impérieux.

« La chambre des représentants, Sire, partage la conviction que Votre Majesté lui a exprimée à l’égard des éléments de prospérité que renferme la Belgique, et de ses institutions libérales, qui attestent l’état avancé de sa civilisation. Nous comprenons combien il est important de leur imprimer, par nos efforts communs et avec le secours de la Providence, une direction sage et ferme vers un heureux avenir. C’est ainsi que s’affermiront chaque jour davantage la nationalité belge et le trône de Votre Majesté qui en est le solide appui. »

- Plusieurs membres. - Aux voix ! aux voix !

M. le président. - Vous connaissez l’amendement de M. de Theux ; il s’applique au dernier paragraphe, je le mets d’abord aux voix.

- Cet amendement est adopté à une très forte majorité.

Le paragraphe, ainsi amendé est ensuite mis aux voix et adopté.

Vote sur l’ensemble du projet

On procède à l’appel nominal pour l’adoption de l’ensemble du projet d’adresse ; en voici le résultat :

Nombre des votants, 90

Pour, 76

Contre, 14.

Délégation au roi

M. le président. - Il n’y a plus qu’à nommer la députation qui sera chargée de présenter l’adresse au Roi ; de combien de membres veut-on qu’elle soit composée ?

- Plusieurs membres. - De neuf membres.

- Les noms de ces neuf membres sont tirés au sort ; les voici MM. Desmet, de Brouckere, Morel-Danheel H. Dellafaille, de Nef, Trentesaux, d’Hoffschmidt, Wallaert.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Il n’y a plus rien à l’ordre du jour ; la chambre précédemment fixé la discussion des crédits provisoires après l’adresse ; en conséquence, cette discussion aura lieu demain.

M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) - Messieurs, après la discussion des crédits provisoires, les ministres appellent votre attention sur le projet de loi concernant les péages et sur celui relatif à la grande communication de la mer et de l’Escaut à la Meuse et au Rhin qu’ils vous présentent comme urgents.

- La séance est levée à 3 heures et quart.