(Paru à Liège le 27 mars 1841, chez Riga, imprimeur-libraire)
(page 3) Messieurs,
L'un des membres de la Chambre, connu par son esprit conciliant et modéré, a révélé, lors des dernières discussions qui ont eu dans le sein de la représentation nationale, combien avaient été vains les efforts tentes par les magistrats de la Ville de Mons, pour obtenir de l'évêque du diocèse, et, à son refus, du (page 4) cardinal-archevêque, un ecclésiastique chargé de l'enseignement religieux dans le collège de cette ville.
Il ajouta : « J'entends à mes d'honorables collègues dire qu'on a éprouvé les mêmes refus pour Liège, Audenaerde et d'autres villes encore. »
M. l'évêque van Bommel, sous prétexte de rectifier celui de ces faits qui le touchait plus spécialement, a saisi cette occasion d’exposer des doctrines étranges en matière d'enseignement, et qui ont profondément affligé tout ceux qui se préoccupent de l’avenir du pays. Il a déclaré que les évêques de Belgique avaient adopté cette règle invariable : « Point de coopération à un collège communal ou à tout établissement quelconque, à moins qu’ils n’aient la garantie que cette coopération sera utile » ; et pour qu’elle soit utile, « il faut ; le mot est impérieux ! - il faut (au clergé) une part dans le choix ou la nomination de tous les professeurs et maîtres des écoles et des collèges...
« De l’application vraie ou fausse de ces principes dans une loi va dépendre, a-t-il dit, une partie des devoirs de l’épiscopat et de tout le clergé belge dans ses rapports avec l’autorité civile ; de là, par conséquent, harmonie ou conflit.
« Deux fois, avons-nous dit et répété dans de récentes publications, deux fois la question de l’instruction, mal comprise par le gouvernement, a été mal résolue, et deux fois cette erreur a compromis la paix à l’intérieur du pays, deux fois l’existence de ces gouvernements mal avisés a été elle-même compromise.
« Voudrait-on une troisième fois commencer la même faute ? »
(page 5) Le pays est donc averti ! Les hauts prélats, à qui il faut procéder un riche salaire prélevé sur l’impôt, ont arrêté, en fait d’enseignement, un système invariable dont ils ne se départiront pas ; si les Chambres, si le gouvernement du roi ne peuvent y souscrire, si la majorité légale du pays le repousse, s’il n’est pas consacré par une loi, les devoirs de l’épiscopat, dans ses rapports avec l’autorité civile, obligeront à agir ; il y aura conflit ! La paix à l’intérieur sera en danger ; l’existence même du gouvernement sera compromise !
Ainsi parle le chef du diocèse, le ministre d’un Dieu de paix ; et afin que l’on ne doute pas de la hardiesse de ses déterminations, il se hâte d’annoncer que ce qu’il proclame aujourd’hui en écrivain au courant de l’état des choses, il est prêt à le faire en une autre qualité et d’une autre manière, si les circonstances viennent à lui en faire une obligation grave !
Le bon sens du public, son amour de l’ordre et de la paix, premier et indispensable élément de tout progrès moral et matériel, feront justice de ces prétentions et de ces menaces.
Nous ne pouvions les passer sous silence, Messieurs, car la Commission chargée par vous de vous éclairer sur les faits relatifs au collège de Liége, signalés par l’écrivain, a été frappée de l’aveu naïf de M. l’évêque, qui se défend, d’une part, d’avoir refusé de charger un ecclésiastique de l’enseignement religieux au collège, et qui déclare, d’autre part, que si demande était faite. il ne l'accueillerait point, ou plutôt, il (page 6° ne consentirait à y accéder qu'à des conditions que le vœu des électeurs. votre mandat. votre honneur et la loi vous feraient également un devoir de repousser.
Vous pourrez vous convaincre dans un instant, Messieurs, de la sincérité du langage de M. l'évêque. dans les accusations qu'il a lancées contre vos prédécesseurs ; vous verrez s'ils n'ont pas essuyé, par le fait, un refus de concours de la part du chef du diocèse ; vous verrez s'il avait, en 1831 et 1832, les prétentions qu'il vient d'annoncer ; s'il ne faut pas, au contraire, placer le temps où elles ont pris naissance à une époque postérieure, et si ce n'est pas dès ce moment qu'ont paru les premiers actes d’une hostilité manifeste, contre un établissement qui inspire toute confiance aux pères de famille. dont la prospérité excite l’envie et pour lequel la ville ne cesse de faire d’immenses sacrifices.
Ecoutons d'abord comment M. l'évêque raconte, sous prétexte « de redresser les faits » ce qui s'est passé, lorsque le Conseil a créé une chaire d'enseignement religieux au Collège de Liége :
« En 1831-32 la Régence de Liége aurait voulu établir un cours de religion au Collège communal, mais en se réservant le choix de celui qui serait chargé de le donner. Nous ne pûmes céder à cette exigence. Suivant l'immuable principe de la Religion catholique sur lequel ni évêque, ni simple fidèle ne saurait jamais transiger, l'enseignement religieux émane de l'autorité ecclésiastique seule. La mission d'enseigner le dogme et la morale chrétienne a été donnée aux apôtres ; elle appartient en propre à leurs successeurs ; jamais elle ne peut être donnée par une autorité civile quelconque.
(page 8) « Les choses en restèrent là jusqu'en 1832-33, Alors M. le Bourgmestre de Liége vint nous prier d'arranger les choses à l'amiable. On nous laissait le libre choix des personnes et on leur promettait une franche coopération.
« Pour des raisons toutes particulières à la ville, nous cédâmes. Un curé respectable de la ville fut désigné par nous pour le cours supérieur de religion, nous confiâmes le cours inférieur à un vicaire. Ils acceptèrent cette tâche avec empressement et se mirent en devoir de la remplir.
« Elles étaient donc bien mal informées les personnes qui soufflèrent à l'orateur, qu'à Liége l'on avait éprouvé le même refus.
« Cependant avons-nous eu lieu de nous applaudir d'avoir accédé aux vœux de la Régence sans autres conditions que celles énoncées tout à l'heure ?
« Nous ne craignons pas de l'avouer, non ; nous nous sommes trompé en nous montrant si facile ; et si dans des cas identiques d'autres évêques ont refusé, ils ont eu raison.
« En effet, une très courte expérience a suffi pour nous ouvrir les yeux. Sait-on à quoi se réduisit la coopération promise aux deux ecclésiastiques chargés du cours de religion ? D'abord le cours fut rendu facultatif et sur plusieurs centaines d'élèves qui fréquentaient le Collège, à peine une soixantaine s'y firent inscrire. Ensuite on mit la leçon de religion aprê8 toutes les autres, de 11 1/2 heures à 12 1/2. Il fallait au petit nombre d'élèves résolus de suivre ce cours extraordinaire beaucoup de bonne volonté pour sortir de la foule qui, à l'heure du dîner, se pressait dans les corridors, et pour se rendre presque furtivement dans la classe de religion. Enfin on ne mit à la disposition des deux ecclésiastiques aucun moyen d'encouragement ; il n'y eut aucune sanction contre ceux qui ne tardèrent pas à s'éloigner. Lorsque à différentes (page 8) reprises les deux ecclésiastiques s'adressèrent à la Régence afin qu'il fût remédié à ces divers inconvénients, on leur fit des promesses qui demeurèrent sans exécution. Plusieurs fois ils vinrent nous prier de nous interposer, protestant qu'il leur était impossible de continuer sur ce pied et qu'ils seraient obligés de donner leur démission ; nous les encourageâmes à plusieurs reprises, et nous fîmes plus d'une démarche en leur faveur, ou plutôt dans l'intérêt de la jeunesse. Tout fut inutile. A la fin, ces Messieurs, abreuvés de dégoûts, envoyèrent leur démission. La Régence, de son coté, supprima le cours de religion, et voilà des années que les nombreux externes du Collège de Liége n'y reçoivent plus aucune instruction religieuse. »
L'obligation de tout écrivain qui veut que sa parole soit respectées c'est de dire franchement la vérité ; quand cet écrivain accuse, c'est moins qu'un devoir, ce n'est que de la justice ; quand cet écrivain est un prêtre, un évêque, le chef d'un diocèse, et que, à la faveur du sacerdoce dont il est revêtu, il impute à l'autorité des faits qui seraient de nature à lui enlever, s'ils existaient, la considération dont elle doit jouir, il ne peut manquer à la vérité sans faillir à sa mission, sans ternir l'éclat de la robe qu'il porte !
Est-il donc vrai que les heures du cours de religion aient été fixées, comme le fait entendre M. l'évêque, dans un but hostile et afin de rendre en quelque sorte illusoire l'enseignement que l'on venait spontanément d'établir ?
Est-il vrai que cc cours ait été rendu facultatif ?
Est-il vrai que l'on n'ait mis à la disposition des deux ecclésiastiques chargés de ces leçons, aucun moyen d'encouragement ?
Est-il vrai que, sur leurs réclamations, on leur fit des promesses qui demeurèrent sans exécution ?
(page 9) Est-il vrai que M. l'évêque ait dû s'interposer pour eux, qu'il ait fait plus d'une démarche en leur faveur, ou plutôt, Messieurs, remarquez ce zèle, dans l'intérêt de la jeunesse ?
Est-il vrai, enfin, que les deux ecclésiastiques aient envoyé leur démission parce qu'ils étaient « abreuvés de dégoûts » ?
Les documents qui reposent dans vos archives vont répondre à ces questions. Ils renferment les témoignages les plus éclatants de vos bonnes intentions, des soins que l'on a mis dans cette importante affaire, de la constante sollicitude du Conseil pour la prospérité des études, et de ce dévouement inaltérable aux développements de l'instruction, que déployait dans ce temps-là, et dont a fait preuve longtemps après le chef de l'administration communale, l'honorable M. Jamme !
N'aurait-il pas suffi de se souvenir, Messieurs, du nom et du caractère de l'homme que la ville s'honorait alors de trouver à la tête du Conseil, pour reculer à l'idée d'écrire que deux professeurs, deux ecclésiastiques, avaient dû se retirer du Collège, parce qu'on les avait « abreuvés de dégoûts » ?
Vous allez juger, Messieurs, cc qu'il faut penser de cette injure !
Le 17 octobre 1831, le Collège des Bourgmestre et Echevins s'adressa à M. le vicaire-général pour le prier de désigner un ecclésiastique convenable pour l'enseignement de la religion. Ne recevant point de réponse à cette lettre, le Collège écrivit de nouveau le 26 octobre, et ce jour même il fut informé par M. Barrett, que l'absence de M, l'évêque, à qui la demande devait être soumise, avait empêché et empêchait encore de satisfaire en ce moment au désir du Conseil.
(page 10) M. Barrett fit connaitre, le 10 novembre 1831, que la
lettre de MM. les Bourgmestre et Echevins avait été communiquée à M. l'évêque. « Il me charge de vous faire observer, disait M. le vicaire-général, qu'il est de principe que la nomination d'un ecclésiastique chargé d'enseigner la religion catholique, appartient exclusivement à l'autorité
épiscopale. Néanmoins, voulant avoir des égards tout particuliers pour la Régence de Liége, il la prie de lui indiquer trois ou quatre ecclésiastiques ayant les qualités requises afin que S. G. puisse fixer son choix sur celui qu'elle jugera le plus digne et le plus capable. Ne sachant combien de leçons cet ecclésiastique devra donner par jour ou par semaine, je ne saurais déterminer le traitement qui devra lui être alloué ; mais il me paraît qu'il doit être fixé d'après la base adoptée pour les autres professeurs du Collège. »
Dans la séance du 26 novembre 1831, le conseil délégua M. le Bourgmestre pour terminer cette affaire avec M. l'évêque.
Le Conseil montrait-il quelque exigence à laquelle dût résister M. l'évêque ? M. l'évêque avait-il émis cet « immuable principe, sur lequel ni évêque, ni simple fidèle ne saurait jamais transiger », et que nous rencontrons pour la première fois dans la brochure de l'écrivain ?
N'offrait-il pas, au contraire, de concilier et ce principe et les droits du Conseil, en priant la Régence de désigner trois ou quatre ecclésiastiques, afin qu'il fixât son choix sur celui qu'il trouverait le plus digne et le plus capable ? Avait-il fait entendre, surtout, que ce concours ne pouvait être obtenu qu'à la condition de participer au choix de tous les professeurs ? Cette prétention n'était pas née ; nous étions au lendemain du jour la liberté d'enseignement avait été (page 11) proclamée, et l'on n'avait pas encore imaginé de changer cette liberté en un privilège, en un monopole au profit de quelques-uns. On était assez sage pour ne pas faire, de la religion, un moyen que l'on peut donner ou retirer à un établissement d'instruction, pour le favoriser ou pour lui nuire.
Le 19 septembre 1832, Messieurs les Bourgmestre et Echevins s'adressèrent de nouveau à M. l'évêque. « Le Conseil, porte cette lettre, doit s'occuper incessamment du programme des cours qui seront donnés au collège municipal de cette ville pendant l'année scolaire prochaine. Désirant qu'il soit pourvu à la chaire de religion catholique qu'il y a créée, il vous prie, par notre organe, de vouloir bien désigner un ecclésiastique qui réunisse les qualités requises pour cette branche importante de l'instruction.
« Cette démarche du Conseil vous fournira, M., une nouvelle preuve de sa sollicitude pour tout ce qui tend au progrès de la morale et à l'amélioration des études. »
M. l'évêque répondit le 22 septembre :
« Nous nous réjouissons de voir par votre lettre du 19 de ce mois, que la Régence vient de créer une chaire de religion catholique au Collège municipal de cette ville, et qu'elle s'adresse à nous pour qu'il y soit pourvu. Nous y voyons en effet une preuve de sa sollicitude pour l'amélioration des études, et le progrès de la saine morale qui croule si elle n'a pas la religion pour base. Aussi nous nous faisons un devoir et un plaisir de seconder à cet égard ses nobles efforts. Seulement, avant de déterminer notre choix entre différents ecclésiastiques de la ville que nous croirions aptes à remplir ce poste de confiance, nous désirerions savoir d'elle :
(page 12) « 1° Si le cours de religion doit être le même pour tous les élèves, ou si l'on veut établir pour les basses classes un cours inférieur, et un cours supérieur pour les classes plus élevées, car il est difficile de se rendre intéressant à la fois et des élèves qui ne font que commencer, et à ceux dont les connaissances sont déjà plus développées.
« 2° Combien de fois par semaine l'ecclésiastique devrait donner l'instruction au Collège ?
« 3° Quelles seraient les heures auxquelles il devrait s'y rendre ?
« 4° Et enfin si l'on consent à lui accorder pleine autorité pendant ses leçons, de manière à ce que non seulement aucune entrave ne puisse être mise au libre exercice de son ministère, mais qu'au contraire il puisse se faire convenablement respecter.
« Nous ajoutons cette dernière question, Messieurs, parce que tous les Ordinaires de la Belgique ont résolu, l'année dernière, de n'accorder de prêtres aux collèges, athénées, etc., qu'à cette condition expresse.
« Nous avons l’honneur d'être avec une parfaite considération.
« Corneille, évêque de Liége. »
Tel était, tel devait être le langage du premier pasteur du diocèse. Il ne voyait que la mesure, bonne et utile en elle-même ; il applaudissait aux nobles efforts du Conseil, il se faisait un plaisir et un devoir d les seconder. Ministre de la religion, il se réjouissait de l'offre qui lui était faite d'enseigner la religion à la jeunesse, sans idée de domination, sans prétendre à devenir le suprême directeur, le souverain maître de l'établissement dont les portes lui étaient ouvertes. Il indiquait seulement des conditions justes et raisonnables que le Conseil s'empressait d'accueillir.
(page 13) Le Collège écrivit ù M. l'évêque le 24 septembre : « Le Conseil de Régence à qui nous avons communiqué votre lettre, pense que sur les points qui y sont indiqués nous serons parfaitement d'accord. Il nous a chargé de lui faire des propositions à cet égard dans l'ensemble de l'enseignement et de l'emploi du temps des études. Nous nous en occupons et nous comptons être à portée très incessamment de vous sati8jàirc sous tous les rapports. »
En effet, le 4 octobre 1832, le Collège transmit à M. l'évêque la lettre suivante :
« Par suite à notre lettre du 24 septembre dernier, nous avons l'honneur de vous annoncer que, dans sa séance du 3 de ce mois, le Conseil de Régence a décidé que le traitement de l'ecclésiastique que vous chargerez de l'enseignement de la religion catholique au collège municipal sera de 550 florins ; que les leçons se donneront tous les jours, excepté les dimanches et fêtes, pendant l'hiver, de douze heures à 12 1/2 heures, et en été de onze heures et demie à 12 heures et demie, et qu'il y aura deux cours de religion pour mettre cet enseignement à la portée de tous les élèves, suivant leur âge ou leur degré d'instruction.
« Vous jugerez, M., ce qui conviendra le mieux ou de fixer trois leçons d'une heure par semaine pour chaque cours, ou une leçon d'une demi-heure seulement chaque jour.
« Il est entendu du reste que ce professeur sera entièrement libre dans son enseignement, et qu'il aura pleine autorité pendant les leçons, de manière à pouvoir se faire convenablement respecter.
« En nous référant à notre lettre du 19 septembre, nous avons l'honneur de vous prier de vouloir bien désigner le plus tôt possible l'ecclésiastique pour la chaire dont il s'agit.
(page 14) « L'ouverture du collège aura lieu le 8 octobre courant. »
Le nombre des cours de religion, l’heure des leçons, furent donc réglés de commun accord avec M. l'évêque. Pouvait-on supposer que la fixation de ccs heures serait plus tard le texte d'un grief malveillant ? Pouvait-on supposer, lorsque M. l'évêque gardait le silence, qu'on se réservait d'accuser après coup le Conseil d'avoir choisi ces heures pour nuire aux cours de religion ? Savait-il, M. l'évêque, que le courage des élèves serait mis à l'épreuve par l'indication de ces heures, qu' « il leur faudrait beaucoup de bonne volonté pour sortir de la et se rendre presque furtivement aux cours de religion ? Et, s'il le savait, pourquoi n'en avoir pas fait la représentation au Conseil ?
Le Conseil discutait, le 3 octobre, le programme des cours ; il indiquait l'heure des leçons ; il en informait M. l'évêque le 4 octobre ; l'ouverture du collège était fixée au 8 octobre. C'était le moment de présenter des observations, car on ne peut pas, sans inconvénients graves, remuer sans cesse les dispositions prises pour l'enseignement d'un collège, et M. le principal écrivait même, touchant un autre objet, le 4 septembre 1833 : « Qu'il s'était refusé, dans le cours de l'année scolaire, à proposer des changements qu’il regardait comme avantageux, par cette seule considération qu'il importe de ne point perdre de vue, que les changements doivent s'effectuer avant la reprise des classes, et le moins possible quand elles sont en activité. »
M. l'évêque admit donc, sans en faire l'objet de la moindre remarque, et en réponse d sa demande, l'heure fixée pour les leçons de religion. Bien plus, Messieurs, les archives n'ont gardé aucune trace qu'un changement ait été provoqué à cet égard ! Une seule fois MM. les ecclésiastiques (page 15) à qui le cours de religion était confié, énoncèrent que l'heure n'était pas des plus commodes, pour les élèves surtout, et ils s'exprimaient ainsi, non pour obtenir d'autres heures, mais afin que le nombre des leçons fût réduit à quatre, au lieu de six par semaine que le programme indiquait.
« Le programme des études du collège, disaient-ils, fixe six leçons de religion par semaine. Chargés de donner ce cours nous avons l'honneur de vous observer qu'il nous paraîtrait plus convenable de n'en donner que quatre. Nous croyons, Messieurs, qu'il serait bon au moins de commencer par là, parce que ce cours étant nouveau et l'heure de la leçon (midi) n'étant pas des plus commodes pour les élèves surtout, il pourrait se faire qu'au lieu de regarder la fréquentation de nos leçons comme un devoir facile et agréable, les élèves l'envisageassent comme une charge un peu onéreuse, ce qui, en dernier résultat, tournerait à leur détriment, et contrarierait beaucoup les vues sages qui vous ont dirigés dans cette affaire importante. » (Lettre du 15 novembre 1832.)
Eh ! bien, cette simple mention incidente n'échappa point à l'attention vigilante de M. le Bourgmestre Jamme, et une note de sa main qui se trouve au dossier, atteste qu'il n'avait pas voulu la perdre de vue. Mais déjà, le 9 octobre 1833, les deux ecclésiastiques avaient donné leur démission !
En réglant le programme des leçons, le Conseil décida, le 3 octobre 1832, « que les élèves seraient obligés de suivre tous les cours, sauf ceux que les parents auraient exceptés avant le commencement de l'année scolaire. »
Le Collège communiqua ces dispositions M. le principal le 11 octobre 1832 ; il l'informa qu'il y aurait deux cours pour l'enseignement religieux, et que le professeur de (page 16) religion serait entièrement libre dans son enseignement et convenablement respecté. (Lettre à M. Le principal du 4 octobre 1832).
M. l'évêque répondit, le 6, à la lettre du Collège du 4 octobre 1832 :
« Vous avez bien voulu répondre, par votre lettre du 4 courant, aux diverses questions que nous avons cru devoir proposer, relativement à l'ecclésiastique destiné à occuper la chaire de religion catholique récemment créée par la Régence et il en résulte :
« 1° Que d'après la décision de la Régence, il y aura deux cours de religion, l'un supérieur et l'autre inférieur.
« 2° Que chaque cours exigera une leçon par jour d'une demi-heure, ou trois leçons par semaine d'une heure.
« 3° Que le traitement de cc professeur est fixé 5150 florins P-B.
« Nous avons l'honneur de vous faire observer que nous n'avons pas parlé du traitement, parce que nous supposions que la chaire de religion serait, quant aux émoluments, ou équiparée à une chaire ordinaire, ou du moins mise de niveau avec la leçon de dessin ; mais comme il paraît que les ressources ne permettent d'y assigner que 350 florins, que cette somme ne peut suffire à l'entretien honnête d'un ecclésiastique qui doit se loger et se nourrir, et que cependant un homme spécial paraît requis pour donner convenablement et utilement tous les jours une leçon d'une heure, nous nous voyons obligé de faire des démarches près de deux respectables ecclésiastiques déjà en place de la ville, à l'effet de les engager à se charger, l'un du cours supérieur et l'autre du cours inférieur en leur proposant à chacun la moitié de la somme allouée.
« Nous regrettons que ces démarches entraîneront (page 17) vraisemblablement quelques délais.. Nous nous empresserons d'en communiquer le résultat à la Régence.
« Agréez Messieurs, la nouvelle assurance de notre parfaite considération.
« Corneille, évêque de Liége. »
On insista, le 8 octobre et le 2 novembre (lettre du Collège à M. l’évêque) pour que M. l'évêque pourvût à la nomination des professeurs. Il fixa son choix, pour le double cours de religion, sur M. le curé de Sainte-Véronique et sur M. le vicaire de Saint-Antoine.
La Régence s'empressa de demander l'avis de M. le principal sur la lettre de MM. les ecclésiastiques du 3 novembre 1832 que nous venons de citer. (Lettre à M. le principal du 14 novembre 1832). Il pensa que l'on pouvait décider, conformément à la demande qui en était faite que chaque cours serait de deux leçons par semaine ; mas il fit observer, en même temps, que deux cours ne semblaient pas suffire : « Outre que l'instruction des élèves qui suivent maintenant les même leçons est fort différente, il y aura l'inconvénient de faire fréquenter un même cours par un même élève pendant trois ans, depuis la troisième jusqu'à la rhétorique. S'il était donc possible de former trois cours pour l'étude de la religion, je crois que cette distribution serait plus avantageuse. » (Lettre de M. le principal du 17 novembre 1832.)
Le Conseil accueillit la proposition de MM. les ecclésiastiques ; et, avant de statuer sur celle de M. le principal, il l'invita à lui donner des renseignements plus précis sur l'utilité d'un troisième cours de religion, et à se concerter, à cet effet, avec MM, les professeurs chargés de ces cours. (Lettre à M. le principal du 22 décembre 1832.)
(page 18) Déjà, quelques jours auparavant, lors d'une visite faite au collège par plusieurs membres du Conseil, M. le Bourgmestre, en compagnie de ses collègues, avait prié M. le principal de faire connaitre la matière de l'enseignement religieux et la manière dont les leçons se donnaient. C’était, sans doute, une demande bien légitime, fort inoffensive ; et il suffit de rappeler, pour que le caractère n'en puisse être suspecté, que cette demande, qui témoignait de la sollicitude que l'on montrait pour l'instruction, était faite en présence de MM. Raikem, de Bayet et Frankinet (rapport du 14 octobre 1833) ; car, il est digne de remarquer que ces Messieurs composaient en ce temps-là, avec MM. de Stocklem, Lombard, Dejaer et autres, le Conseil de Régence ; et c'est sur eux, en définitive, que retomberaient les reproches de M. l'évêque,, les accusations d'avoir « abreuvé les ecclésiastiques de dégoûts », et non sur ceux qu'il voudrait atteindre, ces « libérâtres, comme M. l'évêque a la charité de nommer les citoyens qui ne partagent point ses opinions.
MM. les ecclésiastiques refusèrent de donner la moindre explication. Cependant il était nécessaire d'avoir leur avis sur l'utilité d'un troisième cours de religion qui paraissait à M. le principal indispensable au succès des études. Il fit donc une nouvelle démarche auprès d'eux ; en voici le résultat :
« Dès l'origine, dit le rapport spécial sur cet objet (rapport du 29 décembre 1832), je me suis abstenu de toute question, relative à leurs cours, aux ecclésiastiques chargés de l'instruction religieuse pour les externes. D'après l'observation que vous m'avez faite lors de votre dernière visite au collège, le 15 de ce mois, qu'il conviendrait que vous connussiez les (page 19) matières de cet enseignement et la manière dont les leçons se donnent, je me suis adressé à M. le curé de Sainte-Véronique, ce qui d'ailleurs était nécessaire pour que je pusse répondre à votre lettre du 22, qui demande des renseignements précis propres à éclairer le Conseil sur l'opportunité d’un troisième cours de religion.
« M. le curé s'est effarouché tout d'abord. Il n’entend point, m'a-t-il. dit, que la Régence exerce le moindre contrôle sur cc qu'il enseigne ; et tout ce que j'ai pu obtenir de lui, non pas de vive voix, il trous a été impossible de nous entendre, mais par écrit, c'est qu’il enseigne la religion sur un plan très large, et que (ce sont ses termes) le discours, etc., de Bossuet lui sert en fait de plan. Je ne puis croire ajoute-t-il, que l'intention de la Régence soit d'en connaître davantage. Quant à un troisième cours, il n'y voit aucune utilité.
« Je me suis adressé ensuite à M. le vicaire de Saint-Antoine, et pour éviter quelque malentendu ; je lui ai écrit la lettre suivante :
« M. le vicaire,
« La Régence désire savoir quelle est la distribution' du cours de religion que vous faites au collège et les points dont vous vous occupez dans votre enseignement. Ce n'est pas seulement pour user d'un droit qui lui appartient, et pour être informée de l’instruction qui se donne dans un établissement à elle, que la Régence demande ces détails ; c’est aussi pour pouvoir prononcer avec connaissance de cause sur l’avantage qu’il pourrait y avoir, pour l’instruction religieuse, à faire trois divisions au lieu de deux. Remarquez, je vous prie, Monsieur le vicaire, que la Régence n'a nullement l'intention de vous dicter cc que vous devez dire à vos élèves, qu'elle ne veut en rien (page 20) modifier votre enseignement ; elle ne demande qu'une chose, c'est de connaître avec quelques détails la marche que vous suivez et l'objet de vos leçons.
« J'ai l'honneur de vous faire cette observation, parce que M. le curé de Sainte-Véronique a refusé de me donner les renseignements que je vous demande, croyant que, par là que la Régence voulait gêner sa liberté. J'ose croire, M, le vicaire, que vous en jugerez autrement.
« Agréez, etc. » (Fin de la lettre.)
« Je vous rapporte cette lettre, parce qu'elle résume la conversation que j'avais eue avec M, le curé de Sainte-Véronique, Il me semblé qu’en effet, un père de famille a le droit de savoir ce qu'on enseigne à son enfant, et la Régence, comme tout chef d'institution, représente le père de famille à l'égard des élèves qui fréquentent les cours du collège. L'aumônier du pensionnat n'a carde de faire la plus petite difficulté pour m'admettre aux leçons de religion qu’il donne aux élèves internes et probablement même il serait fort étonné de ne m'y voir jamais.
« Du reste, M. le vicaire pense que l'on doit s'entendre et traiter les choses amicalement ; et, quoiqu'il ne soit pas plus curieux que le curé de me voir à ses leçons, ce qui semblerait, m'a-t-il dit, une espèce de contrôle, il n'a montré aucune répugnance à me donner les explications demandées. L'exposé de la doctrine chrétienne par Lhomond est le texte qu'il a choisi ; il le suit pas à pas, en ajoutant les développements qu'il juge nécessaires et qu'il puise dans le concile de Trente et quelques autres ouvrages. Un troisième cours lui paraît également inutile. Telle est, mot pour mot, la réponse verbale qu'il m'a faite. »
(page 21) Il ne vous échappera pas, Messieurs, et nous appelons votre attention sur ce point, que ce sont MM. les ecclésiastiques qui ont repoussé comme inutile, un troisième cours de religion.
Cette fois encore, le Conseil ne contraria point, il adopta l’avis de MM. les ecclésiastiques ; il maintint, conformément au vœu qu'ils exprimaient, deux cours de religion (résolution du 9 février 1833) :
Le 16 février 1833, ils présentèrent des observations sur ces cours.
« Nous avons l'honneur de vous adresser quelques observations touchant les deux cours de religion que nous donnons au collège royal.
« Nous vous observerons d'abord, Messieurs, que le nombre des élèves qui le fréquentent n'est pas aussi haut que nous l'espérions ; il n'y a qu'environ 25 à 30 élèves dans chacun des coties régulièrement ; ceci soit dit pour votre gouverne ; nous ne voulons pas le moins du monde surprendre votre confiance ; quant à nous, nous croyons que pour atteindre le but louable que vous vous étiez proposé, en un mot, pour qu'on puisse dire que réellement on donne l’instruction religieuse au collège, il faudrait une organisation plus complète, etc. (sic.)
« Une deuxième remarque, c'est qu'il nous paraît, Messieurs, qu'il serait indispensable qu’il y eût quelques moyens à notre disposition pour exciter l'émulation des élèves ; pourrions-nous, par exemple, faire des compositions et promettre aux élèves que la Régence accordera des prix ? Il y en a qui s'appliquent fort bien et me font des résumés des leçons très bien, dans le cours supérieurs ; j'ai eu quelque peine d'introduire (page 22) l’usage de la prière après la leçon ; ceci va maintenant assez bien ; je désirerais que nous eussions dans nos classes quelque objet de religion, un Christ par exemple ; plus tard nous tiendrions beaucoup à l'usage des sacrements ; en un mot, nous voudrions, Messieurs, ne pas faire les choses à demi. Vous comprenez que ceci exige des ménagements et de la patience, et surtout, nous le disons sans détour, Messieurs, le concours de votre appui ; il faudrait de plus une mesure qui parât aux railleries des récalcitrants. Nous croyons que cela, loin de nuire à la prospérité du collège, ne pourrait que lui acquérir de la confiance, et du reste, nous soumettons tout cela à vos réflexions.
« Nous nous ferons toujours un vrai plaisir de vous donner les renseignements que vous nous demanderez, Messieurs, mais nous aimons de traiter avec vous-mêmes.
« En attendant une réponse, nous avons l'honneur, etc. »
MM. les ecclésiastiques demandaient donc une organisation plus complète, « et cætera » ; mais, on vient de le voir, ils avaient été opposés à l'ouverture d'un troisième cours. Quelle était, en vérité, la modification que l'on voulait ?
Quoi qu'il en soit, le Collège répondit :
« Tout en regrettant comme vous, que les cours de religion dont vous êtes chargés ne soient pas suivis •lus généralement par les élèves du collège, nous ne pouvons, Messieurs, que vous engager à redoubler de zèle, et bientôt, sans doute, vos louables efforts seront couronnés d'un plein succès. Mais, vous le sentez comme nous, la persuasion seule peut amener cet heureux résultat : nous avons toute confiance dans vos lumières et votre prudence à cet égard.
« Nous mettons bien volontiers à votre disposition le Christ dont vous nous faites la demande.
« Quant aux prix pour vos classes, les dispositions faites en général pour les prix du collège, (page 23) sont applicables à ces élèves, et nous vous invitons vous concerter à cet effet avec M. le principal. » (Lettre à MM. les professeurs de religion du 17 mai 1833.)
C'est en face d'une déclaration aussi positive, aussi formelle, assimilant les cours de religion à tous les autres cours, quant aux moyens d'encouragement, que M. l'évêque n'a pas craint de publier, pour déverser le blâme sur les actes du Conseil, « que l’on ne mit à la disposition des ecclésiastiques aucun moyen d'encouragement » ! Quelle foi peuvent donc inspirer les assertions de M. l'évêque ?
La plus sérieuse attention était, du reste, constamment portée sur les observations de MM. les ecclésiastiques. Ils témoignaient le désir de traiter directement avec le collège des Bourgmestre et Echevins ; le bon ordre, la marche régulière, exigeaient, peut-être que M. le principal restât l'intermédiaire obligé entre l'autorité et MM. les professeurs ; mais, par une extrême déférence, afin de ne point exciter les susceptibilités de MM. les ecclésiastiques, on condescendait à leur vœu. Ils avaient à peine signalé le petit nombre d'élèves qui fréquentaient les cours, que l'on s'empressait d'en rechercher la cause.
Mais à quels motifs fallait-il attribuer cet état de choses ?
Ecoutons les rapports qui furent transmis à cette époque :
« J'évite, autant que je le peux de me mêler des cours de religion dans la crainte d'effaroucher des hommes très respectables d'ailleurs, qui se montrent très susceptibles à la moindre observation d'un laïque. Cependant, je les ai prévenus à plusieurs reprises, de la nécessité de l’exactitude aux heures, pour eux et leurs élèves ; je les (page 24) ai engagés à me remettre le nom des élèves inscrits pour leurs cours, qui ne les fréquenteraient pas assidument ; malgré cela, je sais qu'il en manque plusieurs à chaque leçon. Cela tient, en grande partie, à ce que l'un de ces Messieurs, M. Bronfort, a été forcé d'interrompre son cours pendant environ six semaines, pour cause de maladie, et encore pendant à peu près quinze jours pour la même raison ; que l'autre, M. Lejeune, a souvent été obligé, six ou sept fois, je pense, de manquer sa leçon à cause des devoirs que réclame de lui sa paroisse, et que, dernièrement encore, il a cru devoir commencer les vacances huit jours avant l'époque fixée au programme.
« Je pense que ce défaut d'exactitude, quoiqu'on ne puisse en faire aucun reproche aux deux professeurs ecclésiastiques, est fort préjudiciable aux progrès de leurs élèves, qui s'accoutument ainsi à ne pas considérer comme fort importantes des leçons qui tantôt se donnent et tantôt ne se donnent pas. » (Rapport du 31 mars 1833.)
Vous n'oublierez pas, Messieurs, ces sages réflexions, en appréciant les causes de l'inexactitude de MM. les professeurs ; mais aussi, vous garderez le souvenir des faits pour mieux décider du mérite des récriminations récentes de M. l'évêque, et pour que votre conscience ait tous ses apaisements dans le jugement sévère que vous porterez sur les actes dont nous devons encore vous entretenir.
Une nouvelle année scolaire allait s'ouvrir. Celle qui l'avait précédée, et durant laquelle un cours de religion avait été donné pour la première fois, devait être considérée, sous ce rapport, comme un temps d'essai, propre à faire reconnaître les améliorations que toute innovation peut réclamer. Ces améliorations, pour être utiles, doivent être progressives, basées sur l'expérience, et l'on avouera que l'espace de temps si court pendant lequel les leçons de religion (page 25) avaient été données, temps qui avait été marqué, quel qu'en soit le motif, bien plus par les absences des professeurs, que par leur exactitude dans l'enseignement dont ils étaient chargés, n'était guère de nature à éclairer soit le Conseil, soit même MM. les ecclésiastiques, sur les résultats que l'avenir promettait aux cours de religion.
Le Conseil, toujours attentif à cette partie de l'instruction, recherchait les moyens de la faire prospérer. Au moment de la rentrée des classes, il écrivait à M. le principal :
« Nous remarquons que les cours de religion sont peu fréquentés au collège municipal ; ce qui pourrait bien être attribué à l'inobservance du programme en cc qui concerne la faculté laissée aux parents de vous déclarer, avant la rentrée des classes, les cours qu'ils désirent que leurs enfants ne suivent pas. Pour rendre cette disposition efficace, il est nécessaire que les élèves qui veulent ne pas fréquenter lesdits cours vous remettent une déclaration de leurs parents. Il faudrait aussi que ces cours figurassent sur les certificats délivrés par vous, que les mêmes moyens de coercition employés pour les élèves qui ne suivent pas les autres cours, fussent applicables aux élèves qui, s'étant présentés pour suivre ceux de religion, s'en abstiendraient.
« Nous vous prions, Monsieur, de tenir soigneusement la main à l'exécution de ces dispositions.
« Le Conseil délibérera demain sur le projet du programme des études. » (Lettre du 27 septembre 1833.)
Vous voyez, Messieurs que la vigilance de l'autorité ne se ralentissait pas ; que l'on s'occupait de cet objet d'une manière toute spéciale ; que le Conseil n'était en demeure de (page 26) prendre aucune mesure qui pût être favorable aux leçons de religion : il avait mis à la disposition de MM. les ecclésiastiques les mêmes moyens d'encouragement que possédaient tous les autres professeurs ; il ordonnait que les mêmes moyens de coercition employés contre les élèves qui ne suivaient pas les autres cours, fussent applicables aux élèves qui, sans en être dispensés par leurs parents et par écrit, ne fréquenteraient pas ceux de religion.
Et cependant M. l'évêque fait imprimer, sous l'autorité de son affirmation « qu'il n'y eut aucune sanction contre les élèves qui ne tardèrent pas à s'éloigner » !
Le même jour M. le principal répondit à la lettre que l'on vient de lire :
« Avant que les leçons commençassent, j'ai fait avertir tous les élèves QU'ILS ÉTAIENT OBLIGÉS de les suivre, à moins de me présenter une déclaration de leurs parents qui les en exemptât. C’est d'après les billets d'exemption (que je conserve) qu'ont été dressées les listes, et j'ai prévenu les ecclésiastiques à qui je les ai remises, qu'ils devaient exiger la plus grande exactitude de la part des élèves dont ils avaient les noms ; en cas d'absence de quelques-uns d'entre eux, je les ai engagés à remettre une note à la sortie de la classe. C'est, je pense, ce qu'ils ont fait, et je n'ai pas eu connaissance d'autres plaintes. Les professeurs des diverses classes n'emploient pas d'autres moyens pour assujettir à l'exactitude ceux qui se font remarquer par des absences réitérées. »
Ces cours étaient donc obligatoires, comme tous les autres, conformément à la résolution du Conseil du 5 octobre 1832.
Et M. l'évêque déclare, lui, qu'ils furent rendus (page 27) facultatifs ! Ils étaient obligatoires pour tous les élèves ; les parents seuls pouvaient les en dispenser. Est-ce dans ce sens, par hasard, que l'on voudrait prétendre qu'ils étaient facultatifs ? L'expression dont se sert M. l'évêque, et le but qu'il s'est proposé, ne permettent pas de le penser. Il dit, en effet, que les cours furent rendus facultatifs, ce qui suppose qu'ils ne l'étaient pas d'abord, et que c'est une mesure malveillante qui aurait été prise.
Mais, en premier lieu, la disposition était générale à cette époque ; tous les cours étaient obligatoires, et les parents pouvaient exempter leurs enfants de suivre tel ou tel cours. Cette règle n'avait pas été créée, par conséquent, pour le cours de religion. En second lieu, touchant cette matière délicate, qui affecte les sentiments les plus intimes de l'homme, ce serait une grave question de savoir jusqu'à quel point on pourrait contraindre un père de famille qui s'y refuserait, à soumettre son enfant à l'enseignement d'un ministre du culte qui n'aurait pas sa confiance. Le père de famille est le représentant de Dieu vis-à-vis de ses enfants. II leur doit, sans doute, l'instruction religieuse ; c'est un devoir de conscience, le premier de ceux qui s'accomplissent au foyer domestique ; mais il peut exiger de garder le droit de le remplir avec toute la liberté de conscience qui lui est garantie.
D'ailleurs aucune réclamation ne fut faite à ce sujet. Seulement, on répandait le bruit que les parents n'étaient pas informés de l'absence de leurs. fils aux leçons de religion ; on annonçait l'intention de ne reprendre les leçons que lorsque des mesures auraient été prises à cet égard ; puis, comme s'il fallait un prétexte à ce qui allait se passer, on se plaignit sourdement d’un manque prétendu de procédés envers MM. les ecclésiastiques, qui n'auraient été invités, ni à la distribution des prix, ni à la messe du Saint-Esprit. (page 28) Bien qu'aucun acte direct n'eût averti la Régence ou de ces bruits ou de ces plaintes, elle demanda de nouvelles explications à M. le principal, le 9 octobre 1833. Il les mit le même jour ; les voici ;
« Vous me faites savoir, par votre lettre de ce jour, que ma lettre du 27 septembre ne paraît pas répondre entièrement à vos observations, relatives aux cours de religion. Si j'ai omis quelque chose que vous désiriez connaître, c'est tout à fait contre mon gré. Vous ajoutez qu'on assure que les parents des élèves qui négligent de suivre ces cours n'en sont pas informés et que je garde le silence à cet égard. Cependant, Messieurs, j'ai eu l'honneur de vous dire que les seuls élèves exemptés de suivre les cours dont il s'agit sont ceux qui ont apporté une autorisation écrite de leurs parents. Je n'avais donc point à prévenir ccs derniers, puisque c'est de leur aveu et sur leur demande formelle, que leurs enfants ne suivaient point ces cours, Quant à ceux qui étaient obligés de les fréquenter, je n'ai jamais eu de plainte, de la part des professeurs, qui m'obligeât à une mesure sévère contre un seul de leurs élèves, encore moins qui pût exiger que j'en prévinsse un père de famille.
« Aucun professeur du collège ne reçoit d'invitation spéciale pour assister à la distribution des prix ; chacun d'eux a le programme, qui indique le jour et l'heure ; j'ai eu soin de l'envoyer à tous, à M. le curé de Sainte-Véronique et à M. le vicaire de Saint-Antoine comme aux autres ; M. l'abbé Moens pas eu d'autre invitation, et il s'est rendu à la distribution des prix.
« Il en est de même pour la messe du Saint-Esprit. Je l'annonce dans les journaux, et chaque professeur se tient pour averti. Quoique le programme des cours n'ait pu cette année être arrêté que fort tard, c'est néanmoins sur l’avis (page 29) publié par les feuilles de la ville que des professeurs sont revenus de la campagne assez à temps pour se trouver à la cérémonie religieuse qui ouvre l'année scolaire, que des pères et des mères de famille y assistaient. A la vérité, les ecclésiastiques chargés de donner l’instruction religieuse au collège ne s'y trouvaient pas, ce qui était d'autant plus remarquable qu'il y avait d'autres ecclésiastiques que leurs fonctions n'y appelaient point. Ils n'ont sans doute pas jugé à propos de s'y rendre ; mais je pense que c'est un tort, ne fût-ce que pour les élèves, qui ont pu, aussi bien que moi, s'apercevoir de leur absence. Je dois dire cependant que je n'ai entendu faire aucune réflexion à ce sujet, ni par les professeurs, ni par les élèves.
« L'envoi du programme pour la distribution des prix, l'annonce dans les journaux pour la messe du Saint-Esprit, tel est, Messieurs, l'usage consacré par quinze années consécutives. J'avoue que l'idée ne m'est par venue de faire autrement, et j'étais loin de croire que j'eusse choqué personne.
« J'ai jusqu'à ce jour tenu la main à ce que les classes fussent assidûment fréquentées par les élèves qui en font partie ; mais je suppose l'exactitude dans toute classe, dont le professeur ne s'adresse point à moi. Dernièrement encore, j'ai recommandé que chaque professeur s'assurât par la confrontation des listes, des élèves qui doivent suivre ses leçons, qu'il les astreignit, à une rigoureuse exactitude et qu'il vérifiât si ceux qui lui manquent ont des autorisations écrites de leurs parents. J'ai insisté sur ce que les cours de religion sont obligatoires comme tout autre car telle est la décision du Conseil ; et de plus, dès qu'une fois des cours de religion sont donnés dans un collège, il est de la plus grande importance qu'ils soient exactement suivis.
(page 30) « L'année, Messieurs, me semble commencer sous les plus favorables auspices ; les élèves abondent, tous les cours sont nombreux, les professeurs se montrent satisfaits de leurs élèves, cette prospérité croissante d'un bel établissement exciterait-elle l'envie ? D'où vient que les cours de religion seuls sont une source de difficultés, comme je le suppose d'après vos lettres ? A quoi cela tient-il donc ? Messieurs, c'est en effet à vous qu'il appartient d'en rechercher la cause, il ne me suffit pas de n'avoir à cet égard aucun reproche à me faire, je serais heureux que vos questions me missent à même de vous éclairer. »
Vous penserez assurément, Messieurs comme vos prédécesseurs, que ces explications étaient complètes et de nature à donner satisfaction sur tous les points. On n'avait pas pu, sérieusement, se trouver blessé de n'avoir point reçu d'invitation pour la distribution des prix ou pour la messe, lorsqu'on n'en adressait à personne, pas plus aux professeurs qu'à un autre ecclésiastique également attaché au collège, et que l'usage l'avait ainsi consacré pendant quinze ans ! Vous remarquerez, dans cette lettre, la rigoureuse exactitude qui est commandée aux élèves ; l'insistance toute particulière, « sur ce que les cours de religion sont obligatoires comme tous les autres cours ; car telle est la décision du Conseil ; et de plus, que, dès qu'une fois des cours de religion sont donnés dans un collège, il est de la plus grande importance qu'ils soient exactement suivis. »
Ce ne sont ni les faits, ni les paroles, d'hommes indifférents à l'instruction religieuse.
Mais les dernières phrases de la lettre vous prouveront, Messieurs„ que l'on n'ignorait pas les motifs réels qui faisaient du cours de religion une source de difficultés : « L'année me semble commencer sous les plus favorables (page 31) auspices, les élèves abondent ; tous les cours sont nombreux ; les professeurs se montrent satisfaits de leurs élèves ; cette prospérité croissante d'un bel établissement existerait-elle l'envie ? D'où vient que les cours de religion seuls sont une source de difficultés ? à quoi cela tient il donc ? »
Et tandis que ces questions éclairaient la Régence sur des desseins que l'on ne peut plus méconnaitre, MM. Lejeune et Bronfort envoyaient leur démission ! (Du même jour, 9 octobre 1833.)
Elle est ainsi conçue :
« Dans la conviction où nous sommes de ne pouvoir réaliser le bien, que vous, ainsi que nous, avions en vue en donnant un cours de religion au collège, et cela, croyons-nous, à défaut d'améliorations que nous avons sollicitées et vainement attendues jusques à ce jour, nous avons l'honneur de vous offrir notre démission, en saisissant cette occasion de vous remercier de la confiance que vous aviez bien voulu nous accorder.
« Nous vous prions d'agréer en même temps l'hommage du parfait respect avec lequel nous avons l'honneur d'être
« Messieurs,
« Vos très-humbles serviteurs,
« (Signé) Lejeune, curé. Bronfort, vicaire. »
Quelles améliorations avaient-ils donc sollicitées ? On avait cru qu'un troisième cours de religion était nécessaire, ils s'étaient refusés à l'adoption de cette mesure ! Quelle est la pièce dans vos archives qui constate des demandes de MM. les ecclésiastiques qui n'auraient pas été écoutées ? Les recherches les plus minutieuses n'en ont fait découvrir aucune. Ils n'avaient pas apparemment au 9 octobre 1833 (page 32) d'autres griefs que ceux relevés par M. l'évêque dans sa brochure en 1841. Est-ce donc que l'heure des leçons ne leur convenait pas ? Mais elle avait été fixée pour l'année scolaire 1832, sans réclamation de M. l'évêque, et MM. les professeurs donnent leur démission le 9 octobre 1833 ! Est-ce que les cours étaient facultatifs ; ainsi que le publie M. l’évêque ? Mais ils étaient obligatoires ! Est-ce parce que l'on n'avait mis à la disposition des ecclésiastiques aucun moyen d'encouragement, ainsi que le publie M. l'évêque ? Mais les mêmes encouragements étaient applicables aux élèves du cours de religion qu'à tous les autres ! Est-ce parce que l'on n'employait pas de moyens pour réprimer l'absence des élèves des cours de religion, ainsi que le publie M. l'évêque ? Mais la plus rigoureuse exactitude était prescrite, et « jamais, écrivait M. le principal, je n'ai eu de plainte de la part des professeurs, qui m'obligeât à une mesure sévère contre un seul de leurs élèves, encore moins qui pût exiger que j'en prévinsse un père de famille ! » Que fallait-il donc faire ? A quelles secrètes exigences fallait-il se soumettre ?
Quels résultats si complets pouvaient, d'ailleurs, espérer MM. les professeurs ? Et s'ils n'étaient point absolument satisfaisants, à qui la faute ? » Les leçons de religion ne commencèrent que vers la mi-novembre 1832 ; M. le curé de Sainte-Véronique ne reprit ses cours qu'environ six semaines après la rentrée des vacances de Pâques et il les cessa environ deux mois avant les grandes vacances ; M. le vicaire de Saint-Antoine fut malade pendant près de deux mois, et lui et son confrère ne vinrent, la plupart du temps, qu'une fois par semaine au lieu de deux, et souvent pas du tout ! Leur absence, sans doute, était (page 33) due à leur santé ou aux leur ministère » (rapport du 14 octobre 1833) ; mais, en présence de ces faits, a-t-on besoin de chercher ailleurs des raisons du manque de succès des professeurs ? Avait-on bien le droit de s'en plaindre, de l'imputer à faute à la Régence, de l'attribuer à un défaut d'améliorations que l'on n'indique pas ; et la première de toutes les améliorations, la plus utile la plus nécessaire, la plus indispensable, n'était-ce pas une exactitude invariable de la part de MM. les ecclésiastiques ?
Aussi, vous concevez, Messieurs, l'étonnement du Collège en lisant une démission motivée en ces termes ; il chercha vainement quels actes de sa part avaient pu la provoquer. N'y pouvant réussir, il demanda un rapport « sur la cause des difficultés qu'entrainaient les cours de religion, sur les moyens d'exécuter le règlement du Collège relativement à cette matière délicate, et des explications confidentielles sur la retraite de MM. les ecclésiastiques » (lettre du collège des Bourgmestre et Echevins du 12 octobre 1837). Le travail qui lui fut fourni sur ces points est trop important, il contient trop d'éléments de conviction pour vous sur les motifs véritables de la démission de MM. les professeurs de religion, pour que nous puissions nous borner à vous en présenter seulement une analyse ; nous devons, au contraire, malgré son étendue, transcrire ce rapport presqu'en entier (rapport du 14 octobre 1833) :
« (...) Vous me demandez en outre de vous faire connaitre à quelles causes il faut attribuer les difficultés qu'entraînent ces cours de religion, et de plus quelques explications confidentielles sur la démission des ecclésiastiques chargés (page 34) de l'instruction religieuse, et sur les moyens d'exécuter le règlement du collège en ce qui concerne cette matière, en effet très délicate. Je vais tâcher de répondre à vos désirs, en justifiant votre confiance.
« Les élèves d'un collège observent entre eux une hiérarchie rigoureuse : les classes les plus élevées ne se mêlent point avec les classes inférieures, et un élève de troisième regarde un élève de quatrième comme fort au-dessous de lui. Ce n'est qu'avec peine que celui qui a besoin de suivre un cours d'histoire ou d'arithmétique, destiné à des élèves moins avancés, se décide à en fréquenter les leçons, il préfère prendre en dehors une leçon particulière. J'oblige, dans leur intérêt, quelques élèves faibles admis de troisième en seconde, à assister à l'heure de leçon donnée l'après-midi à la troisième ; ces jeunes gens, quoique cette mesure leur soit très profitable, la considèrent néanmoins comme une punition sévère. Il était donc très difficile que deux cours de religion comptassent beaucoup d'élèves. Toutes les classes se trouvent confondues entre elles, les plus grands ont obtenu de leurs parents la permission de s'exempter de ces cours, et, à leur exemple, les plus jeunes ont pour la plupart demandé et obtenu la même faveur ; car c'est une faveur pour un enfant, que d'avoir à suivre un cours de moins.
« J'attribue donc, Messieurs, en grande partie, le peu de zèle qu'ont montré les élèves pour les cours de religion, à la mauvaise distribution de ces cours. »
On a vu, plus haut, que MM. les ecclésiastiques avaient jugé que cette amélioration indispensable était inutile.
« Une autre cause, c'est l'enseignement en lui-même. Les élèves d'un collège ont fait leur première communion ; ceux qui ne l'ont point faite suivent les leçons du curé de paroisse, qui les y préparent ; tous les élèves qui suivent (page 35) au collège le cours de religion doivent être considérés comme sachant leur catéchisme, et c’est d'autre chose qu'il faut les occuper. Je n'ai pu, vous le savez, Messieurs, vérifier par moi-même ce qui avait lieu à cet égard l'année dernière ; mais, j'en sais assez pour être convaincu que l'instruction donnée dans les deux cours était convenable seulement pour des enfants en bas âge. Aussi plusieurs jeunes gens pleins de zèle se sont-ils dégoûtés.
« L'inexactitude des professeurs n'a pas peu contribué non plus au défaut de zèle chez les élèves. Quoique motivée par d'importantes fonctions, cette inexactitude est une cause infaillible de non-succès. Monsieur le curé de Sainte-Véronique n'a repris ses cours que six semaines à peu près après la rentrée des vacances de Pâques, et il les a cessés environ deux mois avant les grandes vacances. Voilà ce qui vient encore de m'être confirmé par Monsieur ... que j’ai prié d’y faire une sérieuse attention. Monsieur le vicaire de Saint-Antoine a été malade pendant prés de deux mois, et lui et son confrère ne venaient, la plupart du temps, qu'une fois par semaine, au lieu de deux, et souvent pas du tout. Leur absence, sans doute, était due à leur santé ou aux devoirs de leur ministère ; mais les enfants n'entrent pas dans toutes ces considérations, et je ne serais pas étonné que les professeurs de religion, bien qu'ils ne m'en aient fait aucune plainte, fussent venus parfois sans trouver personne.
« Enfin, Messieurs, (...) la manière dont certains ecclésiastiques (page 36) s'expriment sur le collège, les conseils donnés à des parents qui me les ont rapportés, montrent assez que si nos classes sont aussi nombreuses que nous les voyons, que si l'établissement n'a pas succombé avec tant d'autres, c’est à la bonté de l'enseignement qu'on y reçoit, et surtout à la protection de la Régence, que la ville en est redevable. Eh bien, Messieurs, dans un pareil établissement, des cours en dehors de l'instruction réglée et surveillée par la Régence, des professeurs qui se déclarent indépendants de l'administration et qui le publient, qui annoncent la volonté dc se soustraire à toute inspection, la ferme résolution de n'en souffrir aucune, et qui se refusent à donner aucun détail sur ce qu'ils font, n'inspirent pas à beaucoup de parents une entière confiance. C'est là l'un des motifs, je n'en doute pas, de la multitude d'exemptions qui m'ont été fournies l'année dernière, et de celles, en plus grand nombre, qui m'arrivent cette année.
« La démission des deux professeurs ecclésiastiques, quoique l'époque en soit singulièrement choisie, ne me paraît donc point un mal ; en causant un léger embarras qui n'est que momentané, elle prévient, je crois, des embarras beaucoup plus grands, beaucoup plus graves, qu'il est improbable que vous eussiez évités. Il eût même été je le pense, très difficile d'en sortir. Nommés par le chef du diocèse, les professeurs ecclésiastiques n'ont pu se retirer que par son ordre.
« Cependant, Messieurs, il est nécessaire aujourd'hui de pourvoir à leur remplacement : des cours de religion ayant été commencés, ayant été donnés l'année dernière, annoncés cette année, il serait, je le crains, très fâcheux qu'ils fussent supprimés. Toutefois, il le serait plus encore que vous permissiez d'enseigner au collège ce qu'il ne vous serait pas permis de connaitre, qu'il y eût des leçons (page 37) auxquelles il vous fût interdit d'assister. Un père de famille ne souffrirait pas que les choses se passassent chez lui de la sorte, et pour tous les enfants qui fréquentent nos cours, l'administration municipale, directrice suprême du collège, représente le père de famille....
« Monsieur l'abbé Moens, aumônier du pensionnat, remplit parfaitement sa tâche dans l'instruction religieuse qu'il donne aux internes, et la remplirait, j'en suis sûr à la satisfaction générale, s'il la donnait à tout le collège. Je ne lui ai cependant pas encore dit un mot ce sujet, et il faudrait que je connusse vos intentions pour lui en parler.
« Quant au cours en lui-même, pour qu'il soit fructueux, il faut des leçons distinctes pour chaque classe, graduées selon l'instruction des élèves, de manière que dans la plus basse classe le professeur n'oublie pas qu'il s'adresse à des enfants qui ont fait leur première communion, et qui par conséquent savent leur catéchisme ; que dans les hautes classes il parle à des jeunes gens déjà initiés aux beautés des aux auteurs anciens, aux principes de l'art oratoire, dans lesquels ils se perfectionnent encore durant leur dernière année, et à ceux-ci c'est une lecture sentie, une analyse rapide des meilleurs écrivains, une véritable leçon de littérature sacrée qu'il faudrait faire. Les pères de l'église peuvent leur être expliqués par parties, en choisissant les morceaux, soit grecs soit latins, soit français. La route est facilitée par l'enseignement des autres classes, où chaque professeur, s'il ne parle point habituellement de religion, parce qu'il est chargé d'une autre instruction, suppose cependant, toutes les fois qu'il se présente quelque allusion religieuse, que son auditoire est catholique, et se conduit en conséquence. Une leçon de religion par semaine suffirait pour chaque classe, Les curés n'en donnent pas davantage.
(page 38) « Je vous expose, Messieurs, la marche qui me semble devoir être suivie ; je la soumets à votre sagesse et à vos intentions bienveillantes pour l'établissement.
« Il me reste un point presqu'aussi délicat que la matière même qui éveille votre sollicitude. Je veux parler des explications confidentielles que vous me faites l'honneur de me demander sur la démission des deux professeurs ecclésiastiques.
« Rappelez-vous, Messieurs, que ces deux professeurs ont débuté par me demander des conseils sur la manière de faire leurs cours ; qu'ils ont insisté sur l’importance qu'ils attachaient à ce qu'on ne forçât personne ; qu'ils témoignaient des craintes fort vives sur la conduite que tiendraient les élèves envers eux ; rappelez-vous aussi leur étonnement lorsque, pour les rassurer sur le trop grand nombre qu'ils paraissaient craindre, au moins dans les commencements, je leur dis que les élèves internes continueraient à recevoir les leçons de l'aumônier ; leur refus positif de répondre aux questions que je leur fis de la part de Monsieur le Bourgmestre, qui m'avait invité à les leur faire, en présence de Messieurs Raikem, de Behr, Bayet et Frankinet, conseillers de Régence, par lesquels il ne fut point démenti (...)
« Votre sagacité déduira facilement les conséquences des faits que je rapproche ici, votre prudente circonspection jugera de l'usage qu'elle doit en faire. »
Nous n'avons rien à ajouter à cc document, les hommes impartiaux l'apprécieront. Ils se souviendront que c'est à cette époque que commença cette conspiration contre les établissements d'instruction qui n'étaient pas sous la (page 39) direction immédiate de MM. les évêques, et qui faisait présager le système qui est aujourd'hui hautement avoué.
M. l'évêque ne voulait pas laisser de doutes, au surplus, sur l'intention qui avait inspiré la démission de MM. les professeurs de religion. Ils se retirent inopinément le 9 octobre 1833 ; ils n'avertissent pas que l'on ait à pourvoir à leur remplacement ; ils créent volontairement un embarras à l'autorité ; la Régence se met en devoir de ne point laisser vacante la chaire de religion. M. l'abbé Moens, aumônier du pensionnat qui remplissait parfaitement sa tâche dans l'instruction religieuse, qui marchait d'accord avec tous ses collègues et l'autorité, qui ne réclamait pas d'invitation spéciale pour assister à la distribution des prix ou à la messe du Saint-Esprit, et qui s'y rendait ; M. l'abbé Moens, à qui suffisaient les mesures générales applicables à tous les cours du collège ; qui, sans récriminer ou se plaindre, améliorait l'instruction religieuse par son zèle et son exactitude ; M. Moens, disait le rapport du 14 octobre 1833, aurait enseigné la religion à tout le collège a la satisfaction générale.
Le 2 décembre 1833, M. l'évêque lui retira ses pouvoirs comme aumônier du collège ! (Lettre du 3 décembre 1833)
« Etaient-elles donc si mal informées, les personnes qui soufflèrent à l'orateur, qu'à Liége l'on avait éprouvé les mêmes refus » (Réponse à un honorable membre de la Chambre, p. 4) qu'à Mons ?
Voilà les faits, Messieurs, non pas arrangés, dénaturés ou créés par la préoccupation d'un écrivain, mais tels qu'ils résultent des pièces qui reposent dans vos archives.. Et maintenant, jugez des reproches que l'on fait à l'autorité et qui sont tirés du choix des heures pour les leçons de Religion ! (page 40) Demandez-vous s'il est vrai que les cours « aient été rendus facultatifs », s'il est vrai que l'on ne mît « à la disposition des ecclésiastiques aucun moyen d'encouragement », s'il leur fut fait des promesses qui « demeurèrent sans exécution » ? Recherchez, Messieurs, quand M. l'évêque dut s'interposer pour MM. les ecclésiastiques, « quand il a fait plus d'une démarche en leur faveur, ou plutôt dans l'intérêt de la jeunesse », et vous verrez qu'il n'y a pas un » seule lettre de M. l'évêque à la Régence, à ce sujet, depuis celle du 3 novembre 1832, qui annonce la nomination de MM, Lejeune et Bronfort, jusqu'à ce jour ! Serait-ce, par hasard, « dans l'intérêt de la jeunesse », qu'il aurait retiré ses pouvoirs à M. l'abbé Moens, qui avait su mériter le respect des élèves et la bienveillance du Conseil ?
Mais, ce que personne n'excusera, ce qui ne peut avoir été écrit sans abdiquer tout esprit de justice et de modération, tout sentiment d'impartialité et de vérité, c'est que les deux ecclésiastiques envoyèrent leurs démissions, parce qu'ils étaient « abreuvés de dégoûts » !
Il fut désormais impossible de donner le cours de religion au collège. On fit vainement plus d'un appel public à MM. les ecclésiastiques pour convier l'un d' entre eux à accepter cette lâche. Un seul s'offrit au Conseil mais on ne pouvait le choisir puisqu’il annonçait lui-même, en protestant néanmoins que sa conduite était à l'abri de reproches, que M. l'évêque lui refusait tout emploi et même d'exercer les fonctions de son état. (Lettres des 9 et 13 novembre 1833.)
Le traitement du professeur ecclésiastique continua à figurer au budget de la ville. En 1835, espérant que le désir du Conseil se réaliserait, on éleva le traitement de 740 fr. (page 41) à 1270 francs. Enfin, en 1837 seulement, on supprima une allocation qui restait toujours sans emploi.
A qui donc faut-il attribuer, en réalité, « la suppression du cours de religion pour les externes » ? Le Conseil a fait preuve des meilleures intentions pour qu'il subsistât ; mais d'autres, n'ont-ils point de reproches à se faire à cet égard ?
Le Conseil n'avait pas, au surplus, à s'inquiéter outre mesure des dispositions peu bienveillantes que l'on témoignait envers le Collège. Les progrès de l'instruction dans cet établissement, la confiance qu'il inspire aux pères de famille, bons juges aussi en fait de moralité et de principes religieux, répondent assez aux attaques inconvenantes dont le collège est l'objet. Si les externes ne peuvent plus y recevoir des leçons de religion, l'instruction n'y est pas moins morale et religieuse, comme elle n'a pas cessé de l'être, comme elle le sera toujours : et si l'âge des élèves commande des soins plus étendus sous certain rapport, les pères de famille n'ignorent pas quels sont les devoirs qu'ils ont à remplir, et ile savent que l'enseignement du dogme est la mission des curés de paroisse.
Les actes d'hostilité dirigés contre le pensionnat avaient un caractère plus grave. Dans le pensionnat, les enfants doivent retrouver, autant que possible, la vie de famille ; l'instruction religieuse que les externes reçoivent sous l'œil de leurs parents, les pensionnaires la doivent obtenir sous l'œil du directeur à qui ils sont confiés, et qui veille strictement à l'entier accomplissement des pratiques religieuses. Ce serait un attentat condamnable que l'opinion publique n'absoudrait pas, que d'entraver, par esprit de parti, pour satisfaire d'injustes prétentions, l'exécution des mesures (page 42) destinées à faire germer dans le cœur de ces jeunes enfants des principes qui feront d'eux des hommes moraux et religieux, sans doute, mais aussi de bons citoyens, Tel est également en effet, le but de l'instruction publique, et, de ce point de vue, l'autorité a le devoir de lui imprimer une direction qu'elle n'abandonnerait pas sans danger pour la stabilité de nos institutions et pour la prospérité du pays.
Cependant, le même coup qui frappait les externes, menaçait d'atteindre les pensionnaires : les pouvoirs de M. l'abbé Moens, comme aumônier du pensionnat, lui étaient retirés ! On essaya lui donner un successeur. Un honorable ecclésiastique offrit ses services à la ville. Mais les dispositions défavorables. de M, l'évêque étaient connues à cc point, que cet ecclésiastique lui-même « témoignait le désir qu'on n'allât pas trop vite, afin que, de son côté, il pût préparer M. l'évêque, qui pouvait de tout moment lui retirer ses pouvoirs comme aumônier. » (Lettre de M. le principal du 23 décembre 1835).
M. l'abbé de Behr devint aumônier du pensionnat ; il résigna bientôt ses fonctions. On obtint que M. l'abbé Pisart, alors vicaire de Saint-Jacques, fût nommé à sa place. Comme son prédécesseur, comme M, l'abbé Moens, il enseigna la religion avec zèle, avec dévouement ; il acquit des titres à l'estime de tous ceux qui furent en relations avec lui. Le pensionnat prospérait de plus en plus. Pouvait-on souffrir, Messieurs, qu'il restât dans cet état florissant ? L'enseignement de M. l'abbé Pisart était complet ; lui aussi était satisfait de ses élèves ; toute accusation malveillante était impossible.
Au mois de mai 1839, M. l'abbé Pisaet fut envoyé contre son gré, à la succursale de Vaux !
(page 43) On était donc résolu à ne plus garder aucune retenue : le déplacement de M. Pisart devait avoir pour conséquence de priver le pensionnat d'un aumônier. En effet, et ceci est la preuve du but que l'on s'était proposé par la retraite de M. Pisart, les démarches les plus pressantes et plusieurs fois réitérées, les plus vives sollicitations de la part de M. le directeur du pensionnat, auprès de M. l'évêque, tout fut inutile ; on ne put obtenir un nouvel aumônier !
« Etaient-elles donc si mal informées les personnes qui soufflèrent à l'orateur que l'on avait éprouvé les mêmes refus à Liége qu'à Mons » ? (Réponse à un honorable membre, page 15.)
Mais, de même que la religion ne périt pas, qu'elle reste pure et respectée, malgré les fautes de quelques-uns de ses ministres, de même l'enseignement religieux ne pouvait mourir dans le pensionnat, à la volonté de M. l'évêque. Les élèves, privés d'aumônier, sont rentrés dans la classe ordinaire des paroissiens ; ils ne peuvent plus se confesser et communier dans la chapelle de l'établissement, ils accomplissent ces devoirs à l'église. M. l'abbé Moens, en attendant qu'il plaise à M. l'évêque de lui rendre les pouvoirs de confesser et de communier, leur enseigne de nouveau la religion depuis le mois février 1840 ; et l'observance de tous les devoirs religieux est d'autant plus rigoureuse, que l'on tente de se faire une arme contre l'institution, du refus obstiné de lui accorder un aumônier. On n'a réussi qu'en un point : on a substitué l'église à la chapelle, la publicité au secret de l'intérieur ; on a permis au public de se convaincre chaque jour, que la religion n'est ni méconnue, ni oubliée au collège de Liége !
M. l'évêque, qui a prudemment passé sous silence les actes relatifs au pensionnat et qui engagent hautement sa (page 44) responsabilité, ne s'est pas borné à travestir ce qui s'est passé lors de la création d'une chaire de religion au collège communal. Il a publié que « plusieurs curés respectables de Liége ont tenté en vain de travailler dans le système (de la commune de Liége en matière d'instruction), et que, par suite, l'instruction religieuse dans les écoles communales est aujourd'hui, de notoriété publique, complétement nulle. » (Réponse à un honorable membre, page 13.)
Cela est-il vrai, Messieurs' ? Et si cette accusation est dénuée de vérité pouvez-vous protester contre elle avec trop d'énergie ?
Permettez-nous de retracer ce qui a lieu dans vos écoles quant à l'enseignement religieux, ce que vous avez fait pour cette partie de l'instruction, ce qui est « de notoriété publique », dans la commune.
Les élèves des écoles communales sont généralement conduits à la messe chaque jour, excepté durant les froids trop rigoureux, afin de ne point nuire à leur santé. On commence et on finit régulièrement les leçons par une prière récitée à haute voix ; des leçons de catéchisme se donnent plusieurs fois par semaine. La base de l'enseignement est la doctrine chrétienne ; on prend à tâche de développer dans l'âme de ces jeunes enfants, les principes religieux, on les accoutume à la pratique des devoirs que la religion impose. Leurs pensées sont incessamment reportées vers la divinité ; on leur apprend, et nous souhaitons que partout l'enseignement soit aussi moral, à respecter les auteurs de leurs jours, en même temps qu'à vénérer Dieu ; on les initie à ces croyances qui doivent les rattacher à leurs semblables par les liens de la charité.
Vous avez désiré que cette instruction eût la sanction (page 45) ministres du culte ; on n'a pas toujours répondu à nos bonnes intentions, non pas qu'il y eût mauvais vouloir de la part de l'immense majorité de MM. les ecclésiastiques des paroisses, mais parce qu'une puissance occulte y mettait obstacle. Souvent les chefs des écoles se sont adressés à MM. les curés pour les prier de visiter les établissements et d'y faire une instruction religieuse. L'un répondait : « Je le voudrais bien, mais je ne le puis : des raisons particulières m'en empêchent » ; un autre : « Qu'il ne le pouvait maintenant, qu’il espérait qu'avec le temps toutes les difficultés s'aplaniraient. » (Rapports joints au dossier). D'autres, enfin, ne pouvant résister à l'intérêt qu'inspirent ces pauvres enfants à qui la ville donne gratuitement l'instruction, se rendaient parfois au milieu d'eux, et, à l'exemple du Christ qui demandait qu'on laissât approcher de lui les petits enfants, ils leur faisaient entendre la parole évangélique.
Vous avez réclamé publiquement le concours de MM. les ecclésiastiques pour l’enseignement religieux dans les écoles communales, vous avez porté annuellement à votre budget un millier de francs, destinés à indemniser les ministres du culte qui se seraient livrés à cet enseignement, et vous avez été assez heureux pour faire l'emploi d'une partie de cette somme. Depuis plusieurs années, vous accordez une indemnité à trois vicaires de l'église de Saint-Nicolas, sous la condition expresse qu'ils enseigneront la religion dans les écoles communales du quartier de l'Est.
Voici ce qu'ils vous écrivaient, à ce sujet, le 12 janvier 1839 : « Nous avons appris, avec plaisir, par votre lettre du 4 courant, que votre commission du budget maintient le subside que la ville nous alloue, et auquel nous avons les titres les plus pressants.
(page 46)« La condition qu'elle y appose a été constamment l'objet de notre sollicitude ; nous nous attachons à donner une bonne et solide explication du texte du catéchisme. Nous espérons même pouvoir nous en acquitter avec plus d'exactitude cette année.
« Nous avons l'honneur, etc.,
« N.-J. Bosard, vicaire de Saint-Nicolas, P.-F.Couman, vicaire de St-Nicolas, J.-L. Wafflard, vicaire de Saint-Nicolas.»
Et cependant, M. l'évêque imprime et réimprime, par trois fois (voir Réponse à un honorable membre, page 13) qu'il est impossible aux cuvés « de travailler dans le système de la commune de Liège en matière d'instruction, et que l'instruction religieuse dans les écoles communales est aujourd'hui, de notoriété publique, complètement nulle ! »
Nous comprimons, Messieurs, les réflexions amères que fait naitre tant de légèreté, pour ne rien dire de plus, de la part de M. l'évêque, dans les accusations qu'il a lancées contre le Conseil. Nous n'ignorons pas que M. l'évêque redoute peu les conflits avec l'autorité civile ; mais dans la lutte qu'il vient d'ouvrir et à laquelle il la provoque, il ne peut être dispensé, quel que soit le rang qu'il occupe, de respecter les convenances et la vérité ; vous direz s'il y a été fidèle dans la discussion qu'il a soulevée ; vous direz s'il est convenable, s'il est même loyal, d'insinuer que vous seriez en quelque sorte les instruments des loges (Réponse à un honorable membre), que vos résolutions seraient dictées par elles, et de produire, en preuve de vos prétendues doctrines en matière d'instruction, (page 47) quelques phrases d'un journal en le donnant comme l'interprète de vos plus intimes pensées ( Réponse à un honorable membre, page 12). Il serait au-dessous de votre dignité de combattre de tels moyens et de telles insinuations. Si l'on croit faire appel à de vieux préjugés morts depuis longtemps, et affaiblir l'autorité de vos décisions en balbutiant qu'elles émanent des loges, on se trompe ; la raison publique a fait assez de progrès, grâces au ciel, pour qu'il ne soit plus aussi facile de l'égarer ! Nos concitoyens qui ont commis à votre garde les intérêts moraux et matériels de la ville, savent assez que vous puisez vos inspirations dans votre conscience et non ailleurs ; qu'il suffit de vos actes pour faire connaitre vos principes, sans recourir aux publications de la presse qui vous sont étrangères, et que vous n'avez, dès lors, nul besoin d'avouer ou de désavouer ; et si, quelque jour, nos concitoyens, et non pas un étranger, vous demandent compte, non des doctrines ou des écrits d'autrui, mais de vos actes, vous serez prêts à en répondre devant eux !
« Le rapporteur, Walthère Frère.
« Le président, Lion. »
Le Conseil, ouï le Rapport de sa Commission d'instruction publique, à laquelle étaient adjoints MM. Lion, Piercot et Frère, et qui avait choisi pour Président M. Lion, et pour Rapporteur (page 48) M. Frère, approuve ledit Rapport en tout son contenu, l'unanimité moins une voix, celle de M. de Longrée, et en ordonnc l'impression.
En séance, le 27 Mars 1841.
Présents Messieurs : Piercot président, Chefneux, Lambinon, Billy, Delexhy, De Thier, Brixhe, Capitaine Tombeur, Lion, Galand, Wasseige, Nagelmackers, Mouton, Collette, Robert, De Longrée, Lesoinne, Frère et Joiris.