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Note
d’intention
« Aperçus
de la part que j’ai prise à la révolution de 1830 »
(« Mémoires »), par A. Gendebien (1866-1867)
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D. L’ASSOCIATION NATIONALE.
II. Gendebien démissionne du premier gouvernement du régent
(page 177) « Depuis quelque
temps, se réunissaient tous les jours à mon ministère de la Justice, bon nombre
de jeunes et énergiques patriotes qui faisaient de la police non pour de
l’argent, mais avec leur argent. C’était bien la meilleure des polices. A
chaque réunion, ils me pressaient d’agir, je leur disais : «
Attendez, attendez encore, nous n’avons pas de preuves suffisantes. Attendez
que les projets et l’audace des Orangistes soient bien constatés, soient
évidents pour tout le monde. Quand le moment sera venu, je donnerai moi-même le
signal. »
Le 23 mars, le moment était venu, la veille 22 mars au matin, des
propositions et des révélations très catégoriques m’avaient été faites ; le
soir, chez le Régent, la discussion que j’ai reproduite plus haut, tout faisait
comprendre la nécessité d’agir ; ce jour-là, étaient réunis autour de ma
table de bois blanc (il n’y avait pas de luxe à mon ministère) Ducpetiaux, Alvin, les frères Bayet, Leclerc, greffier du
Congrès, Hauwart, commandant des chasseurs de Chasteler, Lévêque,, Frantz Faider, deux autres encore dont j’ai oublié les noms. Après
un simple exposé, je dis : « Le moment est venu d’agir, constituons une ligue
patriotique. »
(page 178) Cette proposition fut accueillie avec enthousiasme, je dictai les bases de l’Association.
Immédiatement après, j’envoyai au Régent ma démission de Ministre de la
Justice et de premier président de la Cour supérieure de Bruxelles.
Ce n’est donc pas le 24 mars,
M. Juste, comme vous le dites page 114
(pour rappel, ces
« révélations » avaient pour objet de faire certaines corrections aux
assertions contenues dans le livre de Th. Juste, consacré au Régent), c’est le 23 mars que je donnai ma double démission. Cette rectification a
une importance que je veux conserver.
Je ne tenais pas non plus, comme vous le dites même page, la présidence de
la cour de M. le Régent, mais du Gouvernement provisoire et après l’avoir
refusée deux fois. Le Régent n’a donc pas eu la délicatesse de me l’offrir
comme vous le dites même page.
En un mot, je ne dois rien ni à la bonté, ni à la délicatesse du Régent. Si
l’un des deux est l’obligé de l’autre, ce n’est pas moi.
A la réception de mes deux lettres de démission, le Régent m’invita à
passer chez lui ; je répondis à son envoyé que je n’en voyais pas l’utilité,
que j’y voyais même de graves inconvénients. Le Régent insista, je me rendis le
soir à son invitation.
Après avoir insisté vainement sur la nécessité d’appeler le prince
d’Orange, plutôt que de le subir, sans condition, il me dit qu’il ne pouvait
refuser ma démission de ministre, mais qu’il devait en conscience refuser ma
démission de président de la cour.
Je lui répondis « Dans la lutte suprême qui s’engage, je veux bien, je dois
jouer ma tête, mais je ne puis et ne veux pas compromettre la dignité du
magistrat et du corps que j’ai l’honneur de présider. »
Au moment de le quitter, le Régent me dit : « Mon cher
Gendebien, vous allez à une défaite
certaine, à une mort probable, songez au vae victis. Au nom de votre
père qui est mon ami, au nom de votre femme et de vos sept enfants, je vous
conjure de réfléchir. »
Je lui répondis : « Mon cher Monsieur Surlet,
dans toute autre circonstance, je réfléchirais sur vos conseils et vos
sympathiques appréhensions ; mais aujourd’hui, je ne puis que vous répéter que
vous êtes dans une erreur profonde, vous ne connaissez pas le terrain sur
lequel vous entraînent les intrigants et les traîtres ; ils abusent de votre
bonne foi et de votre faiblesse, ou plutôt de votre ignorance des faits.
« Je connais le terrain sur lequel nous allons manœuvrer et combattre,
il est solide ; le vôtre se dérobera sous vos pieds ; je l’affirme avec une
profonde conviction. Notre terrain, c’est le peuple ; il est nombreux, brave et
passionné ; le vôtre, c’est l’orangisme qui compte très peu d’adhérents, pas un
homme qui ose prendre franchement, (page
179) ouvertement sa bannière, des folliculaires salariés abusant de la
liberté de la presse dont les plumes
insultent, calomnient, audacieusement les meilleurs patriotes ; mais ces plumes
serviles seront impuissantes au jour du combat. »
Cette première partie de la lettre se terminait par une rectification de
date c’était le 23 et non le 24 mais que
Gendebien avait adressé à Surlet sa démission de
ministre de la Justice et de premier président de la Cour supérieure de
Bruxelles. Cette dernière fonction, il la tenait, non de la délicatesse du
Régent, comme l’avait écrit Juste, mais du Gouvernement provisoire.