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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 28 novembre 1849

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1849-1850)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 99) M. de Luesemans procède à l'appel nominal à une heure et quart.

- La séance est ouverte.

M. Dubus donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Luesemans donne lecture des pièces suivantes adressées à la chambre.

« Plusieurs fabricants de tabacs, à Liège, demandent une modification au tarif des douanes quant aux côtes et tiges. »

- Renvoi à la commission d'industrie.


« Le sieur François Pycke prie la chambre de lui accorder une pension ou un secours. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Plusieurs habitants de la commune de Bras demandent l'exécution d'un chemin de fer de Bruxelles à Arlon. »

- Même renvoi.


« Le sieur André, cabaretier à Bruxelles, demande remise des amendes auxquelles il a été condamné pour contraventions de police. »

- Même renvoi.


Dépêche de M. le ministre de l'intérieur, accompagnant l'envoi des délibérations des conseils provinciaux et plusieurs autres pièces relatives à la proposition de M. Jacques, tendantes à établir l'unité de circonscription pour les arrondissements administratifs et judiciaires.

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. Moncheur, retenu chez lui par des affaires de famille, demande un congé de quelques jours.

- Le congé est accordé.

Rapports sur des demandes en naturalisation

M. Destriveaux, au nom de la commission des naturalisations, dépose quatre rapports sur des demandes de naturalisation.

M. de Perceval, au nom de la même commission, dépose un projet de loi relatif à la naturalisation du sieur A.-S. Radou.

- La chambre ordonne l'impression de ces pièces.

Proposition de loi relative à la détention préventive

Développements

M. Lelièvre développe en ces termes sa proposition relative à la détention préventive, présentée dans la séance du 21 de ce mois. - Messieurs, depuis longtemps la révision du Code d'instruction criminelle, en ce qui concerne l'arrestation préventive, est considérée comme indispensable. Dans l'étal actuel des choses, la fortune, l'honneur et la liberté des citoyens sont livrés à l'arbitraire d'un juge d'instruction, dont les pouvoirs exorbitants ne comportent aucune limite et dont la volonté tient lieu de loi. L'homme le plus honorable peut être écroué sous les plus futiles prétextes ; son incarcération peut être prolongée outre mesure, et il est bien tard de proclamer son innocence lorsque, par suite d'une longue détention préventive, ses intérêts les plus importants ont éprouvé un tort irréparable, lorsque sa santé et sa vie même sont compromises par une épreuve à laquelle le caractère le plus énergique ne résiste pas. Evidemment, une législation pouvant donner lieu à d'aussi graves abus ne peut subsister dans un pays libre. La liberté sans garantie n'est qu'un vain mot, et l'expérience démontre qu'elle n'existe pas là où elle n'est pas assurée solidement par des dispositions tutélaires.

Telles sont les considérations qui m'ont engagé à soumettre à la chambre la proposition dont j'ai l'honneur de l'entretenir en ce moment. Je ne me dissimule pas les difficultés de la tâche que j'ai entreprise. S'il s'agit de sauvegarder les droits les plus précieux des citoyens, il est nécessaire de ne pas perdre de vue les intérêts non moins sacrés de la société; s'il est juste de s'intéresser au sort des prévenus, il est indispensable, d'un autre côté, de conservera la justice ses moyens d'action. Concilier la liberté individuelle avec la nécessité d'une répression efficace des crimes et délits, tel est le problème que tente de résoudre le projet dont nous allons présenter l'analyse.

Sous la législation en vigueur, le mandat d'arrêt ou de dépôt décerné par le juge d'instruction n'est susceptible d'aucun recours. Le projet autorise l'inculpé à s'opposer à son exécution ultérieure, et la chambre du conseil, après avoir entendu contradictoirement les parties, statue sur l'opposition dans les 24 heures.

Indépendamment du droit de défense et de la garantie d'un débat contradictoire consacrés par le projet, le mérite de l'incarcération est apprécié par trois juges dont deux au moins sont étrangers à la mesure contre laquelle on se pourvoit, et sous ce rapport les intérêts de l'inculpé sont suffisamment sauvegardés.

Si la chambre du conseil pense qu'il n'existe pas de motifs suffisants» pour maintenir l'arrestation préventive, elle ordonne la mise en liberté provisoire de l'inculpé, et celui-ci ne peut être frappé d'un nouveau mandat que dans le cas où surviennent de nouvelles charges. Si au contraire les juges sont d'avis que l'arrestation préventive est justifiée par des indices suffisants, et des considérations graves, ils examinent s'il y a lieu à accorder au prévenu la liberté provisoire sous caution. C'est en ce dernier point que le projet diffère essentiellement du Code d'instruction criminelle en vigueur.

D'après nos lois actuelles, tout individu inculpé d'un fait emportant peine afflictive ou même simplement infamante, ne peut obtenir sa liberté provisoire même sous caution.

Ce principe rigoureux ne saurait être maintenu. Il est évident que, même relativement à certains faits réputés crimes par la loi, la détention préventive au moins pendant certaine période de l'instruction n'est pas indispensable ; si l'accusé par sa conduite antérieure, sa position sociale offre des garanties suffisantes qu'il se représentera en temps utile aux ordres de la justice, s'il existe d'autres circonstances qui permettent de ne pas considérer l'arrestation comme nécessaire, il est juste d'autoriser les tribunaux à accorder au prévenu la liberté provisoire avec ou sans caution.

La détention préventive ne peut se justifier que par une nécessité absolue ; c'est aux corps judiciaires à apprécier jusqu'à quel point la manifestation de la vérité et l'intérêt de la société exigent l'emploi de cette mesure exorbitante, et la bonne justice commande qu'en matière criminelle la liberté provisoire puisse être accordée ou refusée suivant les circonstances.

Cette latitude, contre l'exercice de laquelle le ministère public et la partie civile auront la faculté de se pourvoir, est laissée d'après le projet, en premier degré de juridiction, à la chambre du conseil sauf recours,. comme nous le verrons plus tard.

La liberté provisoire viendra à cesser du moment qu'un arrêt de la cour d'appel aura renvoyé l'accusé devant la cour d'assises. On conçoit, en effet, qu'alors l'ordonnance de prise de corps, décernée par la chambre d'accusation, doive recevoir son exécution immédiate.

Des charges suffisantes pour admettre l'accusation ayant été reconnues, l'accusé doit être en état lorsqu'il comparaît devant la cour d'assises. Cette mesure est indispensable pour assurer l'exécution de l'arrêt et aussi pour que l'accusé ne puisse, par défaut de comparution, retarder le jugement et entraver le cours de la justice.

Relativement aux faits qui constituent des délits correctionnels, le projet propose l'adoption d'une mesure que nous envisageons comme éminemment libérale. Dans notre opinion, lorsqu'il ne s'agit que de délits, la liberté provisoire ne peut être refusée. La nature des faits justifie cette disposition, et l'on en comprend la justice, lorsqu'on réfléchit que l'individu condamné pour délit ne peut se soustraire à la pénalité prononcée contre lui qu'en subissant une peine plus grave que celle qu'il a encourue, c'est-à-dire un bannissement d'une durée de cinq ans au moins, terme requis pour que le bénéfice de la prescription de la peine lui soit acquis.

Toutefois il sera facultatif aux juges d'exiger suivant les circonstances une caution suffisante. On a cru devoir établir cette garantie comme indispensable dans l'intérêt de la société pour prévenir les abus qui pourraient résulter d'une mise en liberté pure et simple accordée sans réserve.

A la règle que nous venons d'établir en matière de délits, le projet admet quelques exceptions : c'est lorsque l'inculpé a été condamné antérieurement pour crime ou correctionnellement à un emprisonnement de plus d'une année, et aussi dans le cas où, après avoir obtenu antérieurement sa mise en liberté provisoire, il aurait laissé contraindre sa caution. Dans ces hypothèses, en effet, l'on conçoit que le prévenu puisse être déclaré indigne de jouir de la liberté provisoire. Une condamnation précédente pour crime ou pour un délit correctionnel très grave doit le faire considérer comme dangereux pour la société; d'autre part, si l'inculpé a manqué une première fois aux obligations qu'il avait contractées envers la justice, il ne mérite plus que celle-ci ait confiance dans ses promesses.

Les pouvoirs étendus et importants que le projet attribue aux chambres du conseil ne sauraient leur être confiés en dernier ressort. Ils doivent être soumis au contrôle du juge supérieur, et les intéressés doivent pouvoir demander la réformation de la décision des premiers juges. C'est ce qui a dicté l'article 6 du projet, autorisant le ministère public, la partie civile et l'inculpé à déférer à la chambre des mises en accusation l'ordonnance de la chambre du conseil relative à la liberté provisoire.

La cour d'appel statuera sur l'opposition dans les formes tracées par le Code d'instruction criminelle en vigueur. Seulement elle aura la faculté d'entendre les parties contradictoirement, mesure qui, dans certains cas, peut être fort utile et de nature à éclairer le juge sur la décision importante qu'il est appelé à rendre.

(page 100) Le droit d'opposition contre l'ordonnance de mise en liberté provisoire étant attribué à la partie civile, il est évident que si celle-ci succombe dans son recours, elle doit pouvoir, selon les circonstances, être condamnée aux dommages cl intérêts envers l'inculpé dont, par son fait, elle a prolongé la détention. A cet égard, la chambre d'accusation appréciera le plus ou moins de (erratum, page 133) fondement à l’opposition, et les principes généraux du droit lui serviront de guide dans la réparation du dommage qu'il lui appartient de prononcer.

Viennent ensuite quelques dispositions qui ne paraissent nécessiter aucun développement particulier. L'article 8 a pour objet de désigner l'autorité qui sera investie des attributions déférées à la chambre du conseil, lorsque le mandat d'arrêt ou de dépôt sera décerné par un magistrat supérieur, et l'article 9 a pour but de faciliter l'exercice d'un droit qui intéresse vivement la liberté individuelle, l'exercice qui dès lors doit être mis à la portée de tous les citoyens.

Les dispositions du projet relatives à la liberté provisoire sous caution ne répondraient qu'imparfaitement au but que nous nous sommes proposé, si nous ne nous occupions en même temps des moyens propres à empêcher que la détention préventive dans les cas où elle est maintenue, ne soit prolongée outre mesure et au-delà du terme exigé par une impérieuse nécessité. A cet effet il est essentiel d'arrêter des prescriptions de nature à imprimer à la marche de la procédure un degré d'activité qui prévienne les funestes conséquences de l'arrestation.

D'après le projet, si l'instruction se prolonge au-delà d'un mois, l'affaire devra nécessairement être soumise à la chambre du conseil qui examinera si la cause est en état de recevoir décision. Si les juges estiment qu'une instruction supplémentaire est nécessaire, ils devront le déclarer par ordonnance motivée qui prescrira la continuation des poursuites.

Cette formalité, qui sera renouvelée chaque mois, est une garantie puissante contre les retards qu'éprouvent souvent les procédures au grand détriment des intérêts des accusés. Elle ne laissera plus du reste au pouvoir d'un seul homme la faculté exorbitante de continuer une instruction qu'erronément il suppose n'être pas complète. Il y a plus, recours sera ouvert aux parties intéressées contre la décision de la chambre du conseil qui par erreur aurait considéré comme non terminée une instruction fournissant les éléments nécessaires pour éclairer la justice. Une décision judiciaire qui prolonge sans nécessité la détention de l'inculpé occasionne à ce dernier un tort trop important pour qu'il ne puisse pas en provoquer la réformation. En ce cas, si le juge supérieur estime que l'affaire est en état, il devra, en annulant la décision lui déférée, statuer immédiatement sur le mérite de l'inculpation et par conséquent renvoyer le prévenu devant la juridiction compétente ou déclarer n'y avoir lieu à suivre.

On le voit, messieurs, je me suis attaché à harmoniser le projet avec le système général de nos lois, de manière toutefois à corriger ce que celles-ci présentaient de trop rigoureux et à établir des garanties qui dans un pays libre doivent sauvegarder la liberté individuelle. Si nous devions attendre la révision générale des Codes, il est évident qu'il serait impossible de prévoir l'époque à laquelle nous ferions cesser des dispositions qui depuis longtemps sont l'objet des plus justes critiques. Il faut donc procéder graduellement et réaliser tout le progrès possible. Je dois dire du reste que sauf le pouvoir effrayant attribue aux juges d'instruction, le Code d'instruction criminelle en vigueur ne paraît pas réclamer des changements immédiats. Telle est l'opinion émise par M. le ministre de la justice lors de la discussion de son dernier budget, et je pense qu'il a apprécié sainement l'état des choses.

Du reste, la proposition qui vous est soumise ne renferme rien d'exorbitant. Tout se réduit, en définitive, à exiger pour la détention préventive les mêmes garanties que pour la condamnation à une peine correctionnelle, et ces exigences ne dépassent pas les justes bornes. Conçoit-on, en effet, qu'un citoyen ne puisse être condamné à quelques jours d'emprisonnement sans avoir le droit de recourir à une cour d'appel composée de cinq juges, tandis qu'il dépend de l'arbitraire d'un seul homme de le priver de la liberté pendant plusieurs mois?

En ce qui touche la faculté d'ordonner l'élargissement sous caution, le projet ne fait que sanctionner des dispositions déjà reçues dans des contrées avec lesquelles la Belgique a certes le droit de rivaliser sous le rapport de la civilisation. En Hollande même, on n'a admis la détention préventive relativement aux simples délits que dans des cas peu nombreux. Quant aux actes qualifiés crimes, il est d'abord incontestable que plusieurs faits que nos lois frappent d'une peine infamante n'exigent nullement l'emploi de la mesure exorbitante que nous proposons de réduire dans de justes limites.

D'un autre côté, n'oublions pas que l'accusé ne peut se soustraire aux recherches de la justice sans les plus désastreuses conséquences. Son cautionnement est confisqué, ses biens sont frappés de séquestre et administrés par l'Etat, lui-même est pendant le terme de 20 années réduit à errer en proie à de perpétuelles angoisses. Certes, il est peu de peines, même afflictives, qui soient un châtiment plus sévère que cette pénible position.

En dernière analyse, l'usage de la faculté que nous proposons de décréter, est abandonné à la sagesse des corps judiciaires les plus élevés; les intérêts de la société peuvent sans danger être confiés à la magistrature belge, l'ordre public est en sûreté lorsqu'il repose sur pareil état.

Je ne me flatte pas, du reste, d'avoir en cette matière importante, formulé une proposition qui ne laisse rien à désirer. Mais je n'ai pu me défendre d'appeler votre attention sur les améliorations indispensables que réclame la partie de la législation dont il s'agit. Tel est le but de l'initiative que j'ai prisé, et pour atteindre un résultat digne de nos institutions libérales, j'ose, faire appel à votre concours intelligent et éclairé.

Prise en considération

La discussion est ouverte sur la prise en considération.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Il ne peut être question aujourd'hui que de la prise en considération de la proposition de l'honorable M. Lelièvre. Or, le gouvernement ne peut repousser en principe la prise en considération ; en effet, à diverses reprises, il a déclaré dans cette enceinte et au sénat que, dans son opinion, il y avait quelque chose à faire en matière de détention préventive, soit pour en adoucir la rigueur, soit pour en abréger la durée, ou la rendre moins fréquente qu'aujourd'hui.

Le gouvernement ne peut donc contester ni le principe, ni l'utilité de la proposition. Je dois dire cependant que la proposition, telle qu'elle est formulée , ne pourrait être admise, sans qu'il en résultât une désorganisation presque complète de notre système d'instruction criminelle et un grand affaiblissement de la justice répressive. Je crois donc que cette proposition devra subir de profondes modifications et même, en quelque sorte une transformation complète. Quoiqu'il en soit, je ne m'oppose pas à la prise en considération. J'exprimerai seulement le vœu que la chambre n'apporte pas trop de précipitation à l'examen de cette proposition importante, afin que j'aie le temps de lui communiquer les documents et les avis que je m'efforcerai de recueillir pour éclairer cette question.

M. de Perceval. - Je suis heureux d'avoir entendu M. le ministre de la justice déclarer que les dispositions du Code d'instruction criminelle, pour ce qui regarde l'arrestation préventive, laissaient à désirer, et qu'elles n'étaient pas en harmonie avec les institutions qui nous régissent. Je prends acte de cette déclaration.

Maintenant permettez-moi, messieurs, d'appuyer par quelques observations la prise en considération de la proposition de mon honorable collègue et ami M. Lelièvre.

Je suis de son avis quand il nous dit que depuis longtemps la révision du Code d'instruction criminelle, en ce qui concerne la détention préventive, est considérée comme indispensable.

Elle est indispensable, en présence des articles 7 et 10 de notre Constitution qui garantissent la liberté individuelle et l'inviolabilité du domicile.

Elle est indispensable, par suite de quelques abus qui se sont produits, et que, du reste, le pays, par l'organe du jury, a condamnés en acquittant les victimes.

N'y aurait-il eu qu'un seul abus depuis dix-huit années, encore faudrait-il y remédier d'une manière efficace, car nous ne pouvons perdre de vue cette vérité de Servan : « Quand la porte d'un cachot crie sur ses gonds, toute la société devrait l'entendre et l'écouter!»

Elle est encore indispensable parce que la raison non moins que l'humanité demandent que la détention préventive soit limitée.

Sans doute il ne faut pas désarmer la justice et contrarier l'action nécessaire de la vindicte publique ; et bien coupable serait celui qui présenterait des mesures tendantes à donner l'impunité à ceux qui désobéissent aux lois et ne reconnaissent aucun des devoirs que la société nous impose.

Mais tout aussi coupable est celui qui, revêtu du droit élevé d'exercer la justice, n'use de ses pouvoirs que pour faire triompher des intérêts qui ne sont pas ceux de l'ordre social.

Le magistrat est chargé de la garde des lois; l'esprit de parti, les passions politiques ne doivent jamais influencer sa conduite.

Avec l'arme qu'il tient actuellement dans les mains, il peut, soit pour flatter une puissance quelconque, soit pour satisfaire tout autre motif puisé dans un sentiment égoïste ou étroit, jeter en prison un homme, le premier venu, qui lui sera montré du doigt ou qu'il aura désigné lui-même.

Il peut prolonger sa détention, lui faire subir les tortures morales du secret, ruiner sa santé et sa fortune, sauf, après avoir atteint ce but, à le relâcher et à lui dire: Je vous rends à la liberté; je me suis trompé!...

La discussion générale de la proposition de l'honorable M. Lelièvre me fournira l'occasion de revenir et de m'appesantir sur ces hypothèses, que l'on croirait, bien à tort, irréalisables en Belgique.

N'anticipons donc pas aujourd'hui sur ce débat; il ne s'agit, pour le moment, que de prendre en considération les dispositions soumises à votre examen par l'honorable député de Namur.

C'est dans ce but que je crois devoir faire ressortir l'importance de ce projet de loi, et je m'adresse sans crainte à toutes les opinions qui siègent dans cette assemblée, dans la conviction qu'elles partageront indistinctement mon appréciation à ce sujet. Ne vivons-nous pas dans une époque où l'imprévu joue un bien grand rôle?

Dans les pays qui nous entourent n'avons-nous pas vu des majorités devenir en peu de temps des minorités, et des minorités se constituer, avec une rapidité égale, en majorité? Faisons en sorte que la magistrature respecte toujours les droits des premières comme des dernières. Et pour qu'elle ne puisse jamais subir le soupçon de prêter l'oreille à de coupables suggestions qui pourraient lui être inspirées, dans la suite, par un parti vainqueur quelconque, n'abandonnons plus sans contrôle au magistrat, à l'arbitraire d'un juge et du pouvoir un droit discrétionnaire avec la garantie de l'impunité.

(page 101) Oui, il faut le dire, la loi actuelle donne au magistrat une latitude trop grande. Une vengeance de la police habilement conduite, une délation se faisant jour sous le voile de l'anonyme, une appréciation politique mal comprise ou méchamment commentée, peuvent, sous l'empire de notre législation présente, vous enlever votre liberté, quoique l’article 7 de la Constitution la garantisse. Vous serez incarcéré, tenu au secret pour peu que vous déplaisiez à un parquet ombrageux ou servile.

De pareilles lois fonctionnant sans des restrictions tutélaires et pouvant, par conséquent, donner lieu à des abus, doivent être révisées dans un pays libre comme le nôtre.

Majorité, minorité, quelle que soit l'opinion à laquelle on appartienne, il importe à tous, il est du devoir de tous de demander des dispositions législatives qui soient plus en harmonie avec nos institutions, nos mœurs, notre siècle.

Dans la séance d'hier, à l'occasion de la discussion d'un des articles de la loi sur les faillites et sursis, l'honorable M. Coomans nous disait : la Constitution garantit le secret des lettres ; vous devez respecter cette prescription.

Bien certainement aujourd'hui l'honorable député de Turnhout se joindra à moi pour ajouter que la Constitution garantit de même la liberté individuelle et qu'il faut aussi la respecter.

Il appuiera donc, j'en ai la conviction, la prise en considération de la proposition de l'honorable M. Lelièvre, tendante à limiter, à régler la détention préventive.

- La chambre, consultée, prend la proposition en considération, et la renvoie à l'examen des sections.

Projet de loi relatif aux vices rédhibitoires dans les vestes ou échanges d'animaux domestiques

Second vote des articles et vote sur l’ensemble du projet

Les amendements apportés au projet, lors du premier vote, sont définitivement adoptés.

Il est procédé au vote, par appel nominal, sur l'ensemble du projet.

79 membres répondent à l'appel nominal.

3 (MM. Dumortier, Reyntjens et David) s'abstiennent.

76 votent pour le projet.

En conséquence, le projet est adopté; il sera transmis au sénat.

Les membres qui ont pris part au vote sont : MM. de Man d'Attenrode, de Meester, de Perceval, de Pitteurs, De Pouhon, Dequesne, de Renesse, Desoer, Destriveaux, de Theux, Devaux, d'Hondt, Dubus, A. Dumon, Faignart, Fontainas, Jacques, Jouret, Jullien, Julliot, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Mascart, Moreau, Moxhon, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Rousselle, Sinave, Tesch, Thibaut, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Toussaint, Van Cleemputte, Vanden Berghe de Binckum, Vanden Brande de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Van Grootven, Van Iseghem, Vilain XHII, Allard, Ansiau, Bruneau, Cans, Christiaens, Clep, Cools, Coomans, Cumont, Dautrebande, H.de Baillet, de Baillet-Latour, de Bocarmé, Debourdeaud'huy, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, Debroux, Dedecker, de Haerne, Delehaye, Delescluse, Delfosse, de Liedekerke, de Liège, de Luesemans et Verhaegen.

M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. Dumortier. - Je n'étais pas présent à la discussion.

M. David. - N'ayant pas assisté à la discussion, j'ai dû m'abstenir.

M. Reyntjens. - Je n'étais pas présent à la discussion.

- M. Delfosse remplace M. Verhaegen au fauteuil.

Projet de loi portant révision de la législation sur les faillites, banqueroutes et sursis

Discussion des articles (Livre III du code de commerce. Des faillites, banqueroutes et sursis)

M. le président. - M. le rapporteur a sans doute un rapport à faire sur les amendements qui ont été renvoyés à la commission?

M. Tesch, rapporteur. - Messieurs, la commission s'est réunie aujourd'hui à 10 heures et a siégé jusqu'à 1 heure un quart sans pouvoir terminer l'examen des divers amendements dont elle avait à s'occuper.

M. le président. - Pensez-vous que le rapport puisse être fait demain?

M. Tesch. - La commission doit se réunir demain à 10 heures; elle se mettra en rapport avec M. le ministre de la justice, comme nous l'avons fait pour le projet de loi. Il me serait impossible de dire si nous pourrons terminer demain; mais la commission et le rapporteur y mettront toute la diligence possible.

M. le président. - Nous reprenons donc le projet de loi au point où nous l'avons laissé hier.

Titre premier. De la faillite

Chapitre V. Du concordat
Section première. De l'assemblée des créanciers
Article 511

« Art. 511. Immédiatement après le jugement porté en exécution de l'article 506 et sans attendre les délais accordés en vertu de l'article 499, il sera passé outre à la formation du concordat.

« Le juge-commissaire ordonnera à cet effet la convocation des créanciers et fixera les lieu, jour et heure de la réunion.

« Le jour de cette réunion sera déterminé de manière qu'elle ait lieu dans la quinzaine du jugement qui aura été rendu en exécution de l'article 506, et qu’il soit laissé à chacun des créanciers, entre sa convocation et le jour de la réunion, un délai de deux jours, augmenté d’un jour par cinq myriamètres de distance entre le lieu de son domicile réel et celui de lu réunion.

- Adopté.

Section II. De la formation du concordat
Articles 512 à 518

« Art. 512. La convocation des créanciers aura lieu dans les trois jours qui suivront l'ordonnance du juge-commissaire; elle sera faite à la diligence des curateurs, par affiches et publications, et par une circulaire adressée individuellement aux créanciers dont les créances auront été admises définitivement ou par provision; le tout de la manière et dans les formes prescrites par les articles 472 et 498. »

- Adopté.


« Art. 513. Aux lieu, jour et heure fixés par le juge-commissaire, l’assemblée se formera sous sa présidence. Les créanciers admis définitivement ou par provision ou leurs fondés de pouvoirs y seront seuls admis.

« Le failli sera appelé à cette assemblée; il ne pourra s'y faire représenter que pour des motifs valables et approuvés par le juge-commissaire.

- Adopté.


« Art. 514. Le juge-commissaire vérifiera les pouvoirs de ceux qui se présenteront à l'assemblée comme fondés de procuration. Les curateurs feront un rapport sur l'état de la faillite, sur les formalités qui auront été remplies et les opérations qui auront eu lieu, et sur le résultat probable de la liquidation. Le failli sera entendu. Le rapport des curateurs sera remis, signé d'eux, au juge-commissaire, qui dressera procès-verbal de ce qui aura été dit et décidé dans l'assemblée.

- Adopté.


« Art. 515. Sauf ce qui sera statué à l'article 523, il ne pourra être consenti de traité entre les créanciers délibérant et le débiteur failli qu'après l'accomplissement des formalités ci-dessus prescrites.

« Ce traité ne s'établira que par le concours d'un nombre de créanciers formant la majorité, et représentant, en outre, les trois quarts de la totalité des créances admises définitivement ou par provision, conformément au chapitre IV; le tout à peine de nullité. »

- Adopté.


« Art. 516. Les créanciers hypothécaires inscrits ou dispensés de l'inscription et les créanciers privilégiés ou nantis de gage, n'auront pas voix dans les opérations relatives au concordat pour lesdites créances, et elles n'y seront comptées que s'ils renoncent à leurs hypothèques, gages ou privilèges.

« Le vote au concordat emporte de plein droit cette renonciation ; elle demeurera sans effet si le concordat n'est pas admis.

« Ces créanciers pourront toutefois voter au concordat en ne renonçant à leurs privilèges, hypothèques ou gages que pour une quotité de leurs créances équivalant au moins à la moitié; dans ce cas, ces créances ne seront comptées que pour cette quotité dans les opérations relatives au concordat. »

- Adopté.


« Art. 517. Tout concordat est interdit si le failli se trouve dans le cas prévu par l'article 497, ou s'il a été condamné comme banqueroutier frauduleux.

« Dans le cas prévu par l'article. 497, les créanciers convoqués pour délibérer sur le concordat pourront, à la double majorité prescrite par l'article 514, surseoir à statuer jusqu'après l'issue des poursuites. Le rejet dur sursis emportera le rejet du concordat. »

- Adopté.


« Art. 518. Le concordat sera, à peine de nullité, signé séance tenante. S'il est consenti seulement par la majorité en nombre ou par la majorité des trois quarts en somme, la délibération sera remise à huitaine pour tout délai ; dans ce cas, les résolutions prises et les adhésions donnée» lors de la première assemblée demeureront sans effet. »

- Adopté.

Article 519

« Art. 519. Tous les créanciers ayant eu droit de concourir au concordat, ou dont les droits auront été reconnus depuis, pourront y former opposition.

« L'opposition sera motivée et devra être signifiée aux curateurs et au failli dans les cinq jours qui suivront le concordat; le tout à peine de nullité. Dans les cinq jours qui suivront cette signification, les curateurs et le failli pourront faire notifier leur requête en réponse à l'opposition et la déposer au greffe avec les pièces dont ils feront usage.

« Immédiatement après ce délai, sans autres formalités ou procédures, le juge-commissaire fera son rapport sur les caractères de la faillite et l'admissibilité du concordat, et le tribunal statuera par un seul jugement sur les oppositions et l'homologation. Les parties pourront toutefois comparaître ou se faire représenter à l'audience pour y exposer sommairement les moyens à l’appui de leurs prétentions.

« Si le jugement de l'opposition est subordonné à la solution de questions étrangères, à raison de la matière, à la compétence du tribunal de commerce, ce tribunal sursoira à prononcer jusqu'après la décision de ces questions. »

M. Tesch, rapporteur. - Messieurs, la commission, de concert avec le gouvernement, propose à cet article un amendement consistant en un paragraphe additionnel qui prendrait place avant le dernier paragraphe de l'article.

(page 102) Ce paragraphe est ainsi conçu :

« S'il n'a été nommé qu'un seul curateur et qu'il se rende opposant au concordat, il devra provoquer la nomination d'un autre curateur, vis-à-vis duquel il sera tenu de remplir les formalités prescrites au présent article.»

La chambre désire-t-elle faire imprimer cet amendement avec les développements, ou préfère-t-elle entendre la lecture des développements et discuter immédiatement l'amendement qui, du reste, est très simple et ne touche en rien à l'économie du projet?

M. Lelièvre. - L'impression n'est pas nécessaire.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - L'amendement dont il s'agit m'a été communiqué par l'honorable rapporteur; nous sommes d'accord sur l'utilité de son adoption. Il n'a pas été compris dans le projet de la commission, parce que ce n'est que depuis l'impression du rapport que nous avons reconnu la nécessité d'introduire dans le projet cette disposition, ainsi que deux ou trois autres.

- La chambre décide qu'il sera passé immédiatement à la discussion de l'article 519 et de l'amendement proposé.

M. Tesch, rapporteur. - Le Code actuel ne trace pas la manière de procéder dans le cas où il n'a été nommé qu'un seul syndic et où ce syndic se rend opposant au concordat. Cette lacune, signalée à la chambre française par M. Delespaul, lors des discussions qui ont précédé la loi de 1838, a été comblée par une disposition dont l'amendement que nous proposons n'est que la reproduction, et qui a pris place dans l'article 512 de cette loi.

La nécessité de la disposition est incontestable. L'espèce dont nous nous occupons pourra se présenter lorsque le curateur sera créancier, et comme l'on ne saurait admettre que le curateur se signifie l'opposition à lui-même, il est indispensable de dire comment et par qui, dans cette procédure, l'on fera représenter les créanciers.

L'on pourrait exiger que le curateur fît signifier son opposition à tous les créanciers signataires au concordat, mais cette procédure serait plus coûteuse et se concilierait mal avec la brièveté des délais accordés.

il va de soi, que quand il y aura plusieurs curateurs nommés et qu'ils feront tous opposition, ils devront également provoquer la nomination d'autres curateurs.

Si, par le fait du tribunal de commerce, le curateur n'était pas nommé dans les cinq jours, le curateur opposant n'encourrait pas la déchéance de son droit d'opposition. Il suffirait, dans ce cas, qu'avant l'expiration de ces cinq jours, il eût provoqué son remplacement et signifié dans le même délai son opposition au failli.

- L'amendement est adopté.

L'article 519 est adopté avec cet amendement.

Article 520

« Art. 520. En cas d'inobservation des dispositions ci-dessus prescrites, ou lorsque des motifs tirés soit de l'intérêt public, soit de l'intérêt des créanciers, paraîtront de nature à empêcher le concordat, le tribunal en refusera l'homologation. Dans ce cas, le concordat sera annulé à l'égard de tous les créanciers.

M. Bruneau. - Je prie la chambre de substituer, dans cet article, le mot « intéressés » au mot « créanciers ».

M. Tesch, rapporteur. - Cet amendement a également été débattu en commission; je l'ai communiqué à M. le ministre de la justice, qui a déclaré s'y rallier. Dans un concordat, il peut être intervenu des cautions.

Le concordat dont l'homologation a été refusée n'est pas seulement annulé vis-à-vis de tous les créanciers, mais vis-à-vis de tout le monde; si une personne était intervenue au concordat à titre de caution, par exemple, elle serait certainement dégagée par le refus d'homologation.

L'emploi du mot « intéressé » est donc préférable.

- L'article 520 est adopté, avec la substitution du mot « intéressé »s au mot « créanciers ».

Articles 521 à 523

« Art. 521. L'homologation du concordat le rendra obligatoire pour tous les créanciers portés ou non portés au bilan, vérifiés ou non vérifiés, et même pour les créanciers mentionnés à l'article 499, ainsi que pour ceux qui, en vertu de l'article 506, auraient été admis par provision à délibérer, quelle que soit la somme que le jugement définitif leur attribuerait ultérieurement. Elle conservera à chacun des créanciers, sur les immeubles du failli, l'hypothèque inscrite en vertu du second paragraphe de l'article 489. A cet effet, les curateurs feront inscrire aux hypothèques le jugement d'homologation, à moins qu'il n'en ait été décidé autrement par le concordat. »

- Adopté.


« Art. 522. Aussitôt après que le jugement d'homologation sera passé en force de chose jugée, les fonctions des curateurs cesseront.

« Les curateurs rendront au failli leur compte définitif en présence du juge-commissaire; ce compte sera débattu et arrêté. Les curateurs remettront au failli l'universalité de ses biens, livres, papiers et effets; le failli en donnera décharge, et il sera dressé du tout procès-verbal par le juge-commissaire.

« En cas de contestation, le tribunal de commerce prononcera, sur le rapport du juge-commissaire. »

- Adopté.


« Art. 523. Si le débiteur, en faisant, l'aveu de sa faillite, a satisfait aux dispositions des articles 440 et 441 ; s'il a présenté les bases d'un concordat et demandé la convocation immédiate de ses créanciers pour en délibérer, et si sa bonne fol n'est pas suspectée, le tribunal pourra ordonner, soit par le jugement déclaratif, soit par un jugement ultérieur, et sans arrêter la marche de la faillite, que cette convocation sera faite sur-le-champ, et fixer, eu égard aux distances, les lieu, jour et heure de la réunion des créanciers.

Dans ce cas, la déclaration, l'affirmation, la vérification et, s'il y a lieu, l'admission des créances, pourront avoir lieu séance tenante, et le concordat ne s'établira que par le concours des trois quarts des créanciers portés au bilan vérifié, et représentant, par leurs titres de créances admises, les cinq sixièmes des sommes dues d'après ce bilan. A défaut de ce concours, la délibération sera ajournée à l'époque fixée ou à fixer en exécution de l'article 510.

- Adopté.

Section III. De l'annulation et de la résolution du concordat
Article 524 à 530

« Art. 524. Le concordat sera nul de plein droit si, depuis son homologation, le failli a été condamné pour banqueroute frauduleuse.

« Lorsqu'après l'homologation du concordat, le failli sera poursuivi pour banqueroute frauduleuse ou placé sous mandat de dépôt ou d'arrêt, ou sous mandat d'amener en cas de fuite, le tribunal de commerce pourra, sur le rapport du juge-commissaire, prescrire telles mesures conservatoires qu'il appartiendra. Ces mesures cesseront, de plein droit, du jour de la déclaration qu'il n'y a lieu à suivre, de l'ordonnance d'acquittement ou de l'arrêt d'absolution. »

- Adopté.


« Art. 525. Aucune action en nullité du concordat ne sera recevable après l'homologation que pour cause de dol découvert depuis cette homologation et résultant soit de la dissimulation de l'actif, soit de l'exagération du passif.

« La nullité du concordat, soit pour dol, ou par suite de condamnation pour banqueroute frauduleuse, soit pour le motif déterminé par le dernier paragraphe de l'article 518, opère de plein droit même à l'égard des cautions. »

- Adopté.


« Art. 526. En cas d'inexécution, par le failli, des conditions de son concordat, la résolution de ce traité pourra être poursuivie contre lui devant le tribunal de commerce, en présence des cautions, s'il en existe, ou elles dûment appelées.

« La résolution du concordat ne libérera pas les cautions qui y seront intervenues pour en garantir l'exécution totale ou partielle. »

- Adopté.


« Art. 527. Par le jugement qui prononcera soit l'annulation, soit la résolution du concordai, ou, dans les cas prévus par l'article 524, par un jugement rendu à la requête d'un ou de plusieurs créanciers, ou même d'office sur le rapport du juge-commissaire, le tribunal de commerce chargera les curateurs précédemment nommés de reprendre leurs fonctions ou en nommera de nouveaux, et il ordonnera aux créanciers du failli, postérieurs à l'homologation du concordat, de faire la déclaration de leurs créances dans le délai fixé à l'article 466.

Ce qui est prescrit aux articles 469 et 472 sera observé à l'égard de ce jugement.

Les curateurs pourront faire apposer les scellés. Ils procéderont sans retard, avec l'assistance du juge de paix ou du juge-commissaire, s'il a été chargé de l'apposition des scellés, sur l'ancien inventaire, au récolement des valeurs, actions et papiers, et feront, s'il y a lieu, un supplément d'inventaire. Ils dresseront un bilan supplémentaire et ils adresseront aux nouveaux créanciers la circulaire mentionnée à l'article 498.

- Adopté.


« Art. 528. Les nouvelles créances seront déclarées, affirmées et vérifiées conformément aux dispositions du chapitre IV.

« Il n'y aura pas lieu à nouvelle vérification des créances antérieurement admises au passif, sans préjudice néanmoins du rejet ou de la réduction de celles qui, depuis, seraient éteintes en tout ou en partie. »

- Adopté.


« Art. 529. Sont nuls et sans effet les différents actes mentionnés à l'article 445, faits par le failli postérieurement au jugement d'homologation et antérieurement à l'annulation ou à la résolution du concordat. Les autres actes fait dans cet intervalle par le failli ne seront annulés que s'ils ont été consentis au préjudice de l'exécution du concordat ou en fraude des droits des créanciers. »

- Adopté.


« Art. 530. Les créanciers antérieurs au concordat rentreront dans l'intégralité de leurs droits à l'égard du failli seulement; mais ils ne pourront figurer dans la masse que pour les proportions suivantes, savoir : s'ils n'ont touché aucune part du dividende, pour l'intégralité de leurs créances; s'ils ont reçu une partie du dividende, pour la portion de leurs créances primitives correspondant à la portion du dividende promis qu'ils n'auront pas touchée.

« Les dispositions du présent article sont applicables au cas où une seconde faillite viendra à s'ouvrir sans qu'il y ait eu préalablement annulation ou résolution du concordat. »

- Adopté.

Chapitre VI. De la liquidation de la faillite.
Articles 531 à 535

« Art. 531. S'il n'intervient point de concordat, les curateurs continueront (page 103) à représenter la masse des créanciers, et procéderont à la liquidation de la faillite; ils feront vendre les immeubles, marchandises et effets mobiliers, et liquideront les dettes actives et passives; le tout sous la surveillance du juge-commissaire, en se conformant aux dispositions des articles 480 et 481, et sans qu'il soit besoin d'appeler le failli.

« Ils pourront transiger, de la manière prescrite par l'article 404, sur toute espèce de droits appartenant au failli, nonobstant toute opposition de sa part. »

- Adopté.


« Art. 532. Les créanciers pourront néanmoins donner mandat, soit aux curateurs, soit à un tiers, sous la surveillance des curateurs, pour continuer l'exploitation de l'actif.

« La délibération qui leur conférera ce mandat en déterminera la durée et l'étendue, et fixera les sommes que les curateurs pourront garder entre leurs mains à l'effet de pourvoir aux frais et dépenses ; elle devra être prise immédiatement après le rejet du concordat, en présence du juge-commissaire et à la majorité en nombre et en sommes déterminée par l'article 515.

« La voie de l'opposition sera ouverte contre cette délibération au failli et aux créanciers dissidents. Cette opposition ne sera pas suspensive de l'exécution.

« Si les opérations des curateurs ou mandataires entraînent des engagements qui excèdent l'actif, les créanciers qui auront autorisé ces engagements seront seuls tenus personnellement au-delà de leur part dans l'actif, mais seulement dans les limites du mandat qu'ils auront donné. Ils continueront au prorata de leurs créances. »

- Adopté.


« Art. 533. Lorsqu'une société en nom collectif est en faillite, les créanciers pourront ne consentir au concordat qu'en faveur d'un ou de plusieurs des associés ; en ce cas, tout l'actif social demeurera soumis au régime de la faillite; les biens personnels de ceux avec lesquels le concordat aura été consenti en seront exclus, et le traité particulier conclu avec eux ne pourra contenir l'engagement de payer un dividende que sur des valeurs étrangères à l'actif social.

« L'associé qui aura obtenu un concordat spécial sera déchargé de toute solidarité. »

- Adopté.


« Art. 534. Immédiatement après le rejet du concordat, les créanciers assemblés seront consultés sur le maintien du secours alimentaire accordé en vertu de l'article 477 ou sur celui qui pourra être accordé ultérieurement au failli et à sa famille sur l'actif de la faillite. Si la majorité des créanciers présents y consent, le secours sera maintenu ou pourra être accordé. Les curateurs en proposeront la quotité qui sera fixée par le juge-commissaire, sauf recours au tribunal de la part les curateurs seulement.

- Adopté.


« Art. 535. Après le rejet ou l'annulation du concordat, le juge-commissaire pourra convoquer les créanciers lorsqu'il le jugera nécessaire. . Les créanciers assemblés pourront, à la simple majorité, avec l'autorisation du tribunal, le failli dûment appelé, charger les curateurs à traiter à forfait de tout ou partie des droits ou actions dont le recouvrement n'aurait pas été opéré, et de les aliéner. »

- Adopté.

Article 536

« Art. 536. Lorsque la liquidation de la faillite sera terminée, les créanciers seront convoqués par le juge-commissaire.

« Dans cette assemblée, les curateurs rendront leur compte, le failli présent ou dûment appelé. Le reliquat du compte formera la dernière répartition.

« Dans la même assemblée, les créanciers donneront leur avis sur l'excusabilité du failli. Il sera dressé un procès-verbal dans lequel chacun des créanciers pourra faire consigner ses dires et observations.

En cas de contestation, il sera procédé comme il est dit à l'art. 522.

M. Cans. - La commission propose des modifications à cet article.

M. Tesch, rapporteur. - Voici quelles sont ces modifications :

Remplacer les deux premiers paragraphes de l'article 536 par les dispositions suivantes :

« Lorsque la liquidation de la faillite sera terminée, les créanciers seront convoqués par le juge-commissaire. Il pourra ordonner que le compte des curateurs soit joint à cette convocation.

« Dans cette assemblée, le compte sera débattu, le failli présent ou dûment appelé. Le reliquat du compte formera la dernière répartition.

« Les deux autres paragraphes comme au projet de la commission, sauf à transposer ces deux paragraphes, à faire du dernier l'avant-dernier, en y ajoutant à la fin « paragraphe 3. »

La modification que nous proposons à cet article consiste à donner au juge-commissaire le droit d'imposer aux curateurs l'obligation de dresser à l'avance leur compte et de le joindre à la convocation qu'il doit faire pour la dernière assemblée des créanciers. Le terme qui s'écoulera entre la convocation et la réunion des créanciers permettra à ceux-ci de se livrer à quelques investigations sur la gestion des curateurs; ils ne seront plus exposés à devoir discuter immédiatement et accepter aussitôt un compte dont le plus souvent ils ne connaissent à l'avance aucun des éléments.

Le principe de cette disposition est conforme à l'article 55 de la loi anglaise du 12 août 1842 (Statuts 5 et 6, Victoria, ch. 122), ainsi conçu:

« Quinze jours avant la distribution du dividende final de la fortune du failli, l'agent nommé d'office enverra au procureur de chaque créancier, vérifié et admis à la masse, le compte courant établi entre ledit agent et la masse, et indiquant les sommes qui restent à distribuer, ainsi que la cause du retard. »

La disposition proposée n'est pas aussi absolue que celle de la loi anglaise. Dans les faillites peu importantes, qui n'ont donné lieu qu'à une comptabilité, à une liquidation peu compliquée, cette précaution serait sans utilité et donnerait lieu à des frais qu'il est, dans ce cas, bon d'éviter.

- L'article, modifié comme le propose la commission, est mis aux voix, et adopté.

Article 537 à 539

« Art. 537. Le juge-commissaire présentera au tribunal, en chambre du conseil, la délibération des créanciers relative à l'excusabilité du failli, et un rapport sur les caractères et les circonstances de la faillite, et le tribunal prononcera si le failli est ou non excusable.

« Ne pourront être déclarés excusables : les banqueroutiers frauduleux les stellionataires, les personnes condamnées pour vol, escroquerie ou abus de confiance, les comptables de deniers publics, les étrangers, les tuteurs, administrateurs ou dépositaires. »

- Adopté.


« Art. 538. Aucun débiteur commerçant ne sera recevable à demander son admission au bénéfice de cession.

« Si le failli est déclaré excusable, il demeurera affranchi de la contrainte par corps à l'égard des créanciers de sa faillite, et ne pourra plus être poursuivi par eux que sur ses biens, sauf les exceptions prononcées par les lois spéciales.

« S'il n'est pas déclaré excusable, les créanciers rentreront dans l'exercice de leurs actions individuelles, tant contre sa personne que sur ses biens. »

- Adopté.


« Art. 539. Si, à quelque époque que ce soit, avant la convocation des créanciers pour délibérer sur le concordat, il est reconnu que l'actif ne suffit pas pour couvrir les frais présumés d'administration et de liquidation de la faillite, le tribunal de commerce pourra, sur le rapport du juge-commissaire, prononcer, même d'office, la clôture des opérations de la faillite. Dans ce cas, les créanciers rentreront dans l'exercice de leurs actions individuelles contre la personne et les biens du failli.

« L'exécution du jugement qui aura prononcé cette clôture sera suspendue pendant un mois.

« Le failli ou tout autre intéressé pourra, à toute époque, le faire rapporter par le tribunal de commerce, en justifiant qu'il existe des fonds suffisants pour faire face aux opérations de la faillite, ou en faisant verser à la caisse des consignations une somme suffisante pour y pourvoir. Dans tous les cas, les frais des poursuites exercées en vertu du présent, article devront être préalablement acquittés. »

- Adopté.

Chapitre VII. Des différentes espèces de créanciers et de leurs droits en cas de faillite
Section I. Des coobligés et des cautions
Article 540 à 544

« Art. 540. Le créancier porteur d'engagements souscrits, endossés ou garantis solidairement par le failli et d'autres coobligés qui sont en faillite, participera aux distributions dans toutes les masses, et figurera pour la valeur nominale de son titre jusqu'à son parfait et entier payement. »

- Adopté.


« Art. 541. Aucun recours, pour raison des dividendes payés, n'est ouvert aux faillites des coobligés les uns contre les autres, si ce n'est lorsque la réunion des dividendes que donneraient ces faillites excéderait le montant de la créance en principal et accessoires, auquel cas cet excédant sera dévolu, suivant l'ordre des engagements, à ceux des coobligés qui auraient les autres pour garants. »

- Adopté.


« Art. 542. Si le créancier porteur d'engagements solidaires entre le failli et d'autres coobligés ou garantis par une caution a reçu, avant la faillite, un à-compte sur sa créance, il ne sera compris dans la masse que sous la déduction de cet à-compte, et conservera, pour ce qui restera dû, ses droits contre les coobligés ou la caution. »

- Adopté.


« Art. 543. Le coobligé ou la caution qui aura fait le payement partiel sera compris dans la masse pour tout ce qu'il aura payé à la décharge du failli. »

- Adopté.


« Art. 544. Nonobstant le concordat, les créanciers conservent leur action pour la totalité de leur créance contre les coobligés du failli. »

- Adopté.

Section II. Des créanciers nantis de gage et des créanciers privilégiés sur les biens meubles
Articles 545 à 550

« Art. 545. Les créanciers du failli, qui seront valablement nantis dégages, ne seront inscrits dans la masse que pour mémoire. »

- Adopté.


« Art. 546. Les curateurs pourront, à toute époque, avec l'autorisation du juge-commissaire, retirer les gages au profit de la faillite en remboursant la dette. »

- Adopté.


« Art. 547. Si le gage n'est pas retiré par les curateurs, et s'il est vendu par le créancier pour un prix qui excède la créance, le surplus sera recouvré par lesdits curateurs. Si le prix est moindre que la créance, le créancier nanti viendra à contribution pour le surplus dans la masse comme créancier ordinaire. »

- Adopté.


« Art. 548. Le salaire acquis aux ouvriers employés directement par le failli pendant le mois qui aura précédé, la déclaration de faillite, sera admis au nombre des créances privilégiées au même rang que le privilège établi par l'article 2101 du Code civil, pour le salaire des gens de service.

« Les salaires dus aux commis pour les six mois qui auront précédé la déclaration de faillite seront admis au même rang. »

- Adopté.


« Art. 549. Le privilège et le droit de revendication établis par le n°4 de l'article 2102 du Code civil au profit du vendeur d'effets mobiliers ne seront pas admis en cas de faillite.

« Il en sera de même de l'action en résolution de vente d'effets mobiliers. »

- Adopté.


« Art. 550. Les curateurs présenteront au juge-commissaire l'état des créanciers se prétendant privilégiés sur les biens meubles, et le juge-commissaire autorisera, s'il y a lieu, le payement de ces créanciers sur les premiers deniers rentrés.

« Si le privilège est contesté, le tribunal prononcera. »

- Adopté.

Section III. Des droits des créanciers hypothécaires et privilégiés sur les immeubles
Articles 551 à 555

« Art. 551. Lorsque la distribution du prix des immeubles sera faite antérieurement à celle du prix des biens meubles, ou simultanément, les créanciers privilégiés ou hypothécaires non remplis sur le prix des immeubles concourront à proportion de ce qui leur restera dû avec les créanciers chirographaires, sur les deniers dévolus à la masse chirographaire, pourvu toutefois que leurs créances aient été affirmées et vérifiées suivant les formes ci-dessus établies. »

- Adopté.


« Art. 552. Si, avant la distribution du prix des immeubles, on procède à une ou plusieurs répartitions de deniers, les créanciers privilégiés sur les immeubles et les créanciers hypothécaires concourront à ces répartitions dans la proportion de leurs créances totales, et sauf, le cas échéant, la distraction dont il sera parlé ci-après. »

- Adopté.


« Art. 553. Après la vente des immeubles et le règlement définitif de l'ordre entre les créanciers hypothécaires et privilégiés, ceux d'entre eux qui viendront en ordre utile sur le prix des immeubles , pour la totalité de leur créance, ne toucheront le montant de leur collocation hypothécaire que sous la déduction des sommes par eux reçues dans la masse chirographaire.

« Les sommes ainsi déduites ne resteront point dans la masse hypothécaire, mais retourneront à la masse chirographaire au profit de laquelle il en sera fait distraction. »

- Adopté.


« Art. 554. A l'égard des créanciers hypothécaires qui ne seront colloqués que partiellement dans la distribution du prix des immeubles, il sera procédé comme il suit. Leurs droits sur la masse chirographaire seront définitivement réglés d'après les sommes dont ils resteront créanciers après cette collocation immobilière, et les deniers qu'ils auront touchés au-delà de cette proportion, dans la distribution antérieure, leur seront retenus sur le montant de leur collocation hypothécaire, et réservés dans la masse chirographaire. »

- Adopté.


« Art. 555. Les créanciers hypothécaires qui ne viennent pas en ordre utile seront considérés comme chirographaires, et soumis comme tels aux effets du concordat et de toutes les opérations de la masse chirographaire. »

- Adopté.

Section IV. Des droits de la femme en cas de faillite du mari
Article 556

« Art. 556. La femme dont les apports en immeubles ne se trouveraient pas mis en communauté les reprendra en nature, de même que ceux qui lui seront survenus par succession ou donation entre-vifs ou pour cause de mort.

« Il en sera de même des immeubles acquis ensuite d'échange contre des propres de la femme ou de remploi, lorsque la stipulation de remploi aura été faite dans l'acte d'acquisition. »

M. Jullien. - Messieurs, je pense que, pour mettre l'article 556 de la loi que nous discutons, en rapport avec l'article 562, il convient de remplacer les mots : « ou pour cause de mort », par ceux-ci : « ou testamentaire ».

- L'amendement de M. Jullien est appuyé.

M. le président ; - M. Lelièvre propose de terminer le deuxième paragraphe de l'article 556 par ces mots : « et acceptée par la femme ».

M. Lelièvre. - Mon amendement est fondé sur l'article 1435 du Code civil, qui ne considère le remploi comme parlait au profit de la femme que dans le cas où celle-ci l'a accepté. La déclaration de remploi faite par le mari dans l'acte au profil de son épouse ne suffit pas, l'acceptation de celle-ci est indispensable. En conséquent, il faut exiger la condition énoncée à mon amendement.

- L'amendement de M. Lelièvre est appuyé.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Messieurs, l'amendement de l'honorable M. Jullien peut, je crois, être admis sans inconvénient; quant à celui de l'honorable M. Lelièvre, il me parait avoir une portée assez grave, et je crois qu'il conviendrait de le renvoyer à l'examen de la commission.

M. Tesch, rapporteur. - Je me joins à M. le ministre de la justice pour demander le renvoi de l'amendement de l'honorable M. Lelièvre à la commission; je fais la même proposition pour l'amendement de M. Jullien.

- La chambre ordonne le renvoi des deux amendements à la commission et décide que l'article 556 sera tenu en réserve.

Article 557

« Art. 557. La femme reprendra pareillement les immeubles acquis par elle ou en son nom des deniers provenant desdites successions et donations, pourvu que la déclaration d'emploi soit expressément stipulée au contrat d'acquisition, et que l'origine des deniers soit constatée par inventaire ou par tout autre acte authentique. »

M. Jullien. - Messieurs, je crois qu'il convient de mettre en concordance la disposition de l'article 557 avec la disposition de l'article 562. L'article 557 consacre pour la femme le droit de reprendre les immeubles acquis par elle ou en son nom de deniers provenant de successions ou donations, pourvu que la déclaration d'emploi soit expressément stipulée au contrat d'acquisition et que l'origine des deniers soit constatée par inventaire ou par tout autre acte authentique.

Cet article exige donc, pour que la reprise des immeubles acquis par la femme de deniers à elle propres puisse avoir lieu, que l'origine de ces deniers soit authentiquement constatée.

L'article 562 qui a trait à l'hypothèque légale de la femme pour la reprise des deniers à elle propres, se borne, au contraire, à exiger que l'origine des deniers soit constatée par acte ayant date certaine.

De deux choses l'une : ou vous admettrez la femme à la reprise des immeubles acquis au moyen de ses deniers propres, en lui imposant l'obligation de rapporter la preuve authentique de l'origine de ces deniers, et, dans ce cas, vous devez aussi exiger, pour l'exercice de l'hypothèque légale de la femme, que le payement des deniers à elle propres soit authentiquement prouvé; ou bien vous vous placerez dans l'hypothèse de l'article 562,qui ne veut, pour en constater l'origine, qu'un écrit ayant date certaine, et dans ce cas vous devez admettre que la femme peut également reprendre les immeubles acquis de ses deniers, si elle prouve par un acte ayant date certaine, antérieure à l'acquisition, que ces deniers lui sont obvenus comme propres à titre successif. Je pense qu'il conviendrait de renvoyer les articles 557 et 562 à la commission afin qu'elle se prononce sur le point de savoir si elle admettra un principe uniforme dans les deux cas, et qu'elle fasse connaître celui qui lui parait préférable.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je ne m'oppose pas au renvoi à la commission; cependant il me semble qu'il y a une différence essentielle entre le cas de l'article 557 et celui de l'article 562.Dans l'article 557, il s'agit de prouver l'origine de deniers provenant d'une donation ou d'une succession faite par la femme pendant le mariage; or, l'avoir mobilier d'une succession ne se constate d'une manière certaine que par un inventaire qui est de sa nature un acte authentique, tandis que dans le cas de l'article 562, il s'agit de prouver la délivrance ou le payement de deniers propres de la femme, et pour cela une simple quittance sons seing privé paraît être suffisante du moment qu'elle ne présente aucun caractère de fraude et qu'elle a date certaine. Cependant je consens au renvoi à la commission.

M. Tesch, rapporteur. - J'avais demandé la parole pour proposer le renvoi à la commission; la discussion pourra s'ouvrir plus utilement quand la commission aura examiné l'amendement.

M. Jullien. - J'ai demandé la parole pour faire observer qu'il s'agit dans les articles 557 et 562 de deniers provenus à la femme au même titre, c'est-à-dire à titre de succession ou de donation, et que l'article 557 s'applique aussi bien que l'article 562 au cas où les donations et où les successions ont eu lieu pendant le mariage.

Les deux cas sont identiquement les mêmes. On ne peut voir dans la contexture des deux articles la différence qui a été signalée par l'honorable ministre de la justice, et que ne comporte pas l’article 557 conçu en termes généraux.

M. Lelièvre. - Le principe rigoureux écrit dans l'article 557 est fondé sur la nécessité d'obvier aux fraudes si faciles entre époux. C'est pour ce motif que la loi a exigé un inventaire ou tout autre acte authentique. Je pense qu'il faut maintenir cette disposition, qui a été empruntée à la loi française et qui sauvegarde les intérêts des créanciers contre les moyens frauduleux qui peuvent être employés par des époux au préjudice des tiers.

- Le renvoi des articles 557 et 562 à la commission est ordonné.

Article 558

« Art. 558. Sous quelque régime qu'ait été formé le contrat de mariage, hors le cas prévu par l'article précèdent, la présomption légale est que les biens acquis par la femme du failli appartiennent à son mari, ont été payés de ses deniers et doivent être réunis à la masse de son actif, sauf à la femme à fournir la preuve du contraire. »

M. Tesch, rapporteur. - Il y a un amendement proposé à cet article, il faut le réserver.

- L'article 558 et l'amendement proposé sont renvoyés à la commission.

Article 559

« Art. 559. L'action en reprise, résultent des dispositions des articles (page 105) 555 et 556 ne sera exercée par la femme qu'à charge des dettes et hypothèques dont les biens sont légalement grevés, soit que la femme s'y soit volontairement obligée, soit qu'elle y ail été condamnée.

M. Jullien. - Il faut remplacer dans cet article les ° 555 et 556 par les n°556 et 557.

M. Fontainas. - Je pense qu'il faut autant que possible éviter dans les textes de loi les surcharges, les surabondances de mots. Je propose à l'article 559 la suppression du mot « légalement » qui me paraît parfaitement inutile. Le gouvernement dans son projet s'était borné à dire: L'action en reprise résultant des dispositions des articles, etc., ne sera exercée par la femme qu'à la charge des dettes et hypothèques dont les biens sont grevés; en effet, les biens sont grevés légalement ou ne sont pas grevés légalement; s'ils sont grevés légalement, l'hypothèque produira son effet ; si elle n'est pas légale, elle sera inopérante ; il est donc inutile de dire que l'hypothèque devra être légale.

M. Tesch, rapporteur. - Sous le Code s'est élevé le doute sur la question de savoir si la femme mariée sous le régime dotal, et qui a hypothéqué ses biens dotaux, peut reprendre ces biens sans acquitter les charges dont ceux-ci sont grevés. Pour trancher la difficulté, la loi française de 1838 a introduit dans cet article le mot légalement; nous avons copié la loi française pour éviter de trancher toute difficulté qui pourrait s'élever à cet égard.

M. Fontainas. - Je lis dans le rapport les motifs qui ont déterminé la commission à insérer dans la disposition le mot dont je demande la suppression.

« Lors de la discussion de la loi de 1838, en France, l'on a adopté le mot « légalement » avant le mot « grevés ». L'on a voulu éviter tout doute sur la question de savoir si la femme serait tenue des dettes hypothécaires qui n'existeraient pas légalement, de dettes, par exemple, pour sûreté desquelles l'on aurait, contrairement à l'article 1554 du Code civil, hypothéqué un immeuble dotal : cette hypothèque étant nulle, la femme doit pouvoir reprendre celui-ci libre de cette charge. La commission vous propose la même addition et pense, d'un autre côté, qu'il y a lieu de supprimer comme inutile le mot « judiciairement », qui est l'avant-dernier de. l'article. »

Si l'immeuble dotal est grevé d'hypothèque, cette hypothèque n'étant pas légale, elle sera inopérante; l'effet est produit par la volonté même du législateur.

- La proposition, faite par M. Jullien, de substituer aux articles 555 et 556 les articles 556 et 557, est mise aux voix est adoptée.

La proposition, faite par M. Fontainas, de supprimer le mot « légalement », est mise aux voix; elle n'est pas adoptée.

L'article 559 est adopté, avec l'amendement de M. Jullien.

Articles 560 à 562

« Art. 560. La femme dont le mari était commerçant à l'époque de la célébration du mariage, ou le sera devenu dans les deux ans qui auront suivi cette célébration, ne pourra exercer dans la faillite aucune action à raison des avantages portés au contrat de mariage; et, dans ce cas, les créanciers ne pourront se prévaloir des avantages faits par la femme au mari dans le même contrat. »

- Adopté.


« Art. 561. Si la femme a payé des dettes pour son mari, la présomption légale est qu'elle l'a fait des deniers de son mari, et elle ne pourra, en conséquence, exercer aucune action dans la faillite, sauf la preuve contraire, comme il est dit à l'article 558. »

- Adopté.


« Art. 562. La femme dont le mari est commerçant à l'époque de la célébration du mariage, ou le sera devenu dans les deux années qui auront suivi cette célébration, n'aura hypothèque que sur les immeubles qui appartenaient à son mari à cette époque, ou qui lui sont échus depuis par succession, et seulement :

« 1° Pour les deniers et effets mobiliers qu'elle aura apportés en dot ou qui lui sont avenus depuis le mariage par succession ou donation entre-vifs ou testamentaire, et dont elle prouvera la délivrance ou le payement par acte ayant date certaine;

« 2° Pour le remploi de ses biens aliénés depuis le mariage ;

« 3° Pour l'indemnité des dettes par elle contractées avec son mari. »

- Cet article est renvoyé à la commission.

Article 563

« Art. 563. Tous les meubles meublants, effets mobiliers, diamants, tableaux, vaisselle d'or et d'argent et autres objets tant à l'usage du mari qu'à celui de la femme, sous quelque régime qu'ait été formé le contrat de mariage, seront dévolus aux créanciers, sans que la femme puisse en recevoir autre chose que les habits et linges à son usage, qui lui seront accordés d'après la disposition de l'article 470.

« Toutefois, la femme pourra reprendre en nature les effets mobiliers qu'elle s'est constitués par contrai de mariage ou qui lui sont avenus par succession, donations entre-vifs ou pour cause de mort, et qui ne sont pas entrés en communauté, pourvu que l'identité en soit prouvée par inventaire ou tout autre acte authentique.

« La femme, judiciairement séparée de biens avant la déclaration de la faillite reprendra également ,et sous les mêmes conditions, les effets mobiliers qui lui auront été adjugés en exécution du jugement de séparation. »

M. Jullien propose de substituer, dans cet article, le mot « testamentaires » aux mots « pour cause de mort ».

M. Thibaut propose de substituer, à la fin du deuxième alinéa de article, au mot « authentique » les mots « ayant date certaine ».

- Sur la proposition de M. le ministre de la justice (M. de Haussy), les amendements qui y sont proposés sont renvoyés à la commission.

Chapitre VIII. De la répartition entre les créanciers
Articles 564 à 567

« Art. 564. Le montant de l'actif mobilier du failli, distraction faite des frais et dépenses de l'administration de la faillite, des secours qui auraient été accordés au failli ou à sa famille, et des sommes payées aux créanciers privilégiés, sera réparti entre tous les créanciers au marc le franc de leurs créances affirmées et vérifiées. »

- Adopté.


« Art. 565. A cet effet, les curateurs remettront tous les mois au juge-commissaire un état de la situation de la faillite, et des deniers déposés à la caisse des consignations; le juge-commissaire ordonnera, s'il y a lieu, une répartition entre les créanciers et en fixera la quotité.

« Les créanciers seront avertis des décisions du juge-commissaire et de l'ouverture de la répartition par circulaires chargées à la poste de la manière prescrite par l'article 498. »

- Adopté.


« Art. 566. S'il existe des créanciers non vérifiés, à l'égard desquels le délai prolongé en vertu de l'article 499 n'est pas encore expiré, ou des créanciers dont les créances déclarées et affirmées dans le délai prescrit ont donné lieu à des contestations non encore jugées, il ne sera procédé à aucune répartition qu'après la remise en réserve de la part correspondant à leurs créances, telles qu'elles sont portées au bilan, quant aux premiers, et telles qu'elles ont été déclarées et affirmées, quant aux seconds.

Lorsque les créances, appartenant à des étrangers à l'égard desquels le délai aura été prolongé conformément à l'article 499, ne paraîtront pas portées sur le bilan d'une manière exacte, le juge-commissaire pourra décider que la réserve sera augmentée, sauf aux curateurs à se pourvoir contre cette décision devant le tribunal de commerce.

- Adopté.


« Art. 567. Aucun payement ne sera fait par les curateurs que sur la représentation du titre constitutif de la créance.

« Les curateurs mentionneront sur le titre la somme par eux payée ou mandatée conformément à l'article 481. En cas d'impossibilité de représenter le titre, le juge-commissaire pourra autoriser le payement sur le vu du procès-verbal de vérification. Dans tous les cas, le créancier donnera la quittance en marge de l'état de répartition. »

- Adopté.

Chapitre IX. Des ventes des immeubles du failli
Article 568

« Art. 568. S'il n'y a pas de poursuites en expropriation des immeubles, commencée avant le rejet ou l'annulation du concordat, les curateurs-seuls seront admis à poursuivre la vente; ils seront tenus d'y procéder : dans la huitaine sous l'autorisation du juge-commissaire , suivant les formes prescrites par la loi du 12 juin 1816.

« Les curateurs pourront toujours arrêter les poursuites commencées, en procédant dans les mêmes formes, avec l'autorisation du tribunal de commerce, le failli appelé, à la vente des immeubles saisis.

« Ils feront, dans ce cas, notifier au créancier poursuivant et au failli les lieu, jour et heure auxquels il y sera procédé. »

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je crois qu'il serait' utile de déterminer un délai pour la signification à faire au créancier poursuivant et au failli. Je proposerai donc d'ajouter, vers la fin du dernier alinéa, après le mot « le failli », les mots suivants : « huit jours au moins avant la vente ».

M. Tesch, rapporteur. - Cet amendement, que propose M. le ministre de la justice, me semble très simple; il peut, à première vue, être très facilement compris et apprécié dans ses conséquences. Je ne vois donc pas la nécessité de le renvoyer à la commission.

- L'amendement proposé par M. le ministre de la justice est adopté.

L'article, ainsi modifié, est adopté.

Article 569

L'article 569, sur lequel un amendement a été déposé, est renvoyé à la commission.

Chapitre X. De la revendication
Articles 570 à 574

« Art. 570. Le vendeur ne peut revendiquer les marchandises par lui-vendues et livrées au failli. Il peut retenir, conformément aux articles 1642 et 1643 du Code civil, celles dont la livraison n'a pas encore été faite. Les marchandises expédiées aux frais et risques du failli seront considérées comme livrées. Les marchandises faisant route, mais dont la livraison aurait été subordonnée, par la lettre de voiture, au payement immédiat du prix, seront réputées non livrées. »

- Adopté.


« Art. 571. Dans les cas prévus par les articles 1612 et 1613 du Code civil et en cas de revendication de marchandises réputées non livrées, les curateurs pourront, avec l'autorisation du juge-commissaire, exiger la délivrance des marchandises retenues par le vendeur, en payant le prix convenu entre le vendeur et le failli. »

- Adopté.


(page 106) « Art. 572. Pourront être revendiquées, aussi longtemps qu'elles existeront en nature en tout ou en partie, les marchandises consignées au failli à titre de dépôt, ou pour être vendues pour le compte de l'envoyeur. Dans ce dernier cas même, le prix desdites marchandises pourra être revendiqué, s'il n'a pas été paye, réglé en valeur, ou compensé en compte courant entre le failli et l'acheteur. »

- Adopté.


« Art. 573. Pourront être revendiquées, en cas de faillite, les remises en effets de commerce ou autres titres non encore payes, et qui se trouveront en nature dans le portefeuille du failli à l'époque de sa faillite, lorsque ces remises auront été faites par le propriétaire avec simple mandat d'en faire le recouvrement et d'en garder la valeur à sa disposition, ou lorsqu'elles auront été de sa part spécialement affectées à des payements déterminés. »

- Adopté.


« Art. 574. Les curateurs pourront, avec l'approbation du juge-commissaire, admettre les demandes en revendication; s'il y a contestation, le tribunal statuera, sur le rapport du juge-commissaire. »

- Adopté.

Titre II. Des banqueroutes

Chapitre premier. De la banqueroute simple
Article 575

« Art. 575. Sera déclaré banqueroutier simple tout commerçant failli qui se trouvera dans l'un des cas suivants :

« 1° Si les dépenses personnelles ou les dépenses de sa maison sont jugées excessives ;

« 2° S'il a consommé de fortes sommes au jeu, à des opérations de pur hasard ou à des opérations fictives de bourse ou sur marchandises;

« 3° Si, dans l'intention de retarder sa faillite, il a fait des achats pour revendre au-dessous du cours; si, dans la même intention, il s'est livré à des emprunts, circulations d'effets et autres moyens ruineux de se procurer des fonds ;

« 4° S'il a supposé des dépenses ou des pertes, ou s'il ne justifie pas de l'existence ou de l'emploi de l'actif de son dernier inventaire et des deniers, valeurs, meubles et effets, de quelque nature qu'ils soient, qui lui seraient avenus postérieurement ;

« 5° Si, après la cessation de ses payements, il a payé ou favorisé un créancier au préjudice de la masse. »

- Adopté.

Article 576

« Art. 576. Pourra être déclaré banqueroutier simple, tout commerçant qui se trouvera dans l'un des cas suivants :

« 1° S'il a contracté pour le compte d'autrui, sans receveur des valeurs en échange, des engagements jugés trop considérables eu égard à sa situation lorsqu'il les a contractés;

« 2° S'il est de nouveau déclaré en faillite, sans avoir satisfait aux obligations d'un précédent concordat;

« 3° Si, étant marié sous le régime dotal, ou séparé de biens, il ne s'est pas conformé aux article 69 et 70;

« 4° S'il n'a pas fait l'aveu de la cessation de ses payements dans le délai prescrit par l'article 440; si cet aveu ne contient pas les noms de tous les associés solidaires; si, en le faisant, il n'a pas fourni les renseignements et éclaircissements exigés par l'article 441, ou si ces renseignements et éclaircissements sont inexacts;

« 5° S'il s'est absenté sans l'autorisation du juge-commissaire ou si, sans empêchement légitime, il ne s'est pas rendu en personne aux convocations qui lui ont été faites par le juge-commissaire ou par les curateurs;

« 6° S'il n'a pas tenu les livres exigés par l'article 8; s'il n'a pas fait l'inventaire prescrit par l'article 9 ; si ses livres et inventaire sont incomplets, ou irrégulièrement tenus, ou s'ils n'offrent pas sa véritable situation active et passive, sans néanmoins qu'il y ait fraude.

M. Tesch, rapporteur. - Messieurs, je propose de supprimer le mot « et » et le chiffre « 70 » qui terminent le 3° de cet article et de dire : « il ne s'est pas conformé à l'article 69. »

L'article 70 du Code de commerce est un article transitoire qui est sans application possible en ce moment. Il a rapport aux contrats de mariage faits antérieurement à la publication du Code.

- L'article, modifié comme le propose M. Tesch, est adopté.

Article 577

« Art. 577. Seront condamnés aux peines de la banqueroute simple, sans préjudice, s'il y a lieu, à l'application de l'article 589 :

« 1° Ceux qui, dans l'intérêt du failli, auront soustrait, dissimulé ou recelé tout ou partie de ses biens meubles ou immeubles;

« 2° Ceux qui auront frauduleusement présenté dans la faillite, et affirmé soit en leur nom, soit par interposition de personnes, des créances supposées ou exagérées;

« 3° Le créancier qui aura stipulé, soit avec le failli, soit avec toutes autres personnes, des avantages particuliers à raison de son vote dans les délibérations de la faillite, ou qui aura fait un traité particulier duquel résulterait en sa faveur un avantage à la charge de l'actif du failli ;

« 4° Le curateur qui se sera rendu coupable de malversation dans sa gestion.

« Les coupables seront, en outre, condamnés à une amende égale à la valeur des avantages illégalement stipulés ou aux restitutions et dommages et intérêts dus à la masse des créanciers, et qui ne pourra être moindre de cent francs. »

M. Tesch, rapporteur. - Le chiffre 589, qui termine le premier paragraphe, doit être remplacé par le chiffre 580.

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

M. Thibaut. - Il me paraît assez extraordinaire, messieurs, de condamner aux peines de la banqueroute simple le créancier d'un failli ou le curateur à la faillite.

Je conçois que l'on condamne aux mêmes peines le curateur qui a malversé ou le créancier qui se trouve dans le cas prévu par l'article; mais le condamner aux peines de la banqueroute simple, ce serait le déclarer, en quelque sorte, banqueroutier lui-même.

M. Tesch, rapporteur. - Il ne sera pas condamné comme banqueroutier simple, mais il sera condamné aux peines de la banqueroute simple.

- L'article est adopté tel qu'il a été proposé par la commission.

Article 578

« Art. 578. Pourront être condamnés aux peines de la banqueroute simple, les gérants des sociétés anonymes qui n'auront pas fourni les renseignements leur demandés par le juge-commissaire ou les curateurs, ou si ces renseignements sont inexacts; ceux qui, sans empêchement légitime, ne se seront pas rendus à leur convocation.

M. Tesch, rapporteur. - Messieurs, la commission propose de modifier la rédaction de cet article. On remplacerait les mots : « leur demandes », par ceux-ci : »qui leur auront été demandés ». On dirait ensuite : « soit par le juge-commissaire, soit par les curateurs, » au lieu de : « par le juge-commissaire ou les curateurs. » C'est pour éviter la répétition du mot « ou ».

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - J'adopte entièrement cette nouvelle rédaction, mais je crois qu'on pourrait faire encore une autre correction à l'article : au lieu de dire : «ou si ces renseignements sont inexacts, » il faudrait dire : « ou qui auront donné des renseignements inexacts. » Je crois que la phrase serait plus correcte.

M. Tesch, rapporteur. - Messieurs, la rédaction proposée par M. le ministre avait été en quelque sorte convenue entre nous, mais on a remarqué qu'alors les mots : « Ceux qui sans empêchement, etc., » se trouveraient trop éloigné des mots : « juges-commissaires et curateurs, » auxquels ils se rapportent.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je demanderai que l'article soit renvoyé à la commission pour qu'elle en revoie la rédaction.

- Cette proposition est adoptée.

Chapitre II. De la banqueroute frauduleuse
Articles 579 et 580

« Art. 579. Sera déclaré banqueroutier frauduleux, tout commerçant failli qui se trouvera dans l'un des cas suivants :

« 1° S'il a soustrait ses livres, ou s'il en a frauduleusement enlevé, effacé ou altéré le contenu ;

« 2° S'il a détourné ou dissimulé une partie de son actif;

« 3° Si, dans ses écritures, soit par des actes publics ou des engagements sous signature privée, soit par son bilan, il s'est frauduleusement reconnu débiteur de sommes qu'il ne devait pas. »

- Adopté.


« Art. 580. Seront déclarés complices de banqueroutier frauduleux ceux qui, par l'un des moyens indiqués en l'article 60 du Code pénal, auront provoqué aux faits mentionnés en l'article précédent, ou donné des instructions pour les commettre, et ceux qui auront avec connaissance aidé le banqueroutier frauduleux dans les faits qui auront préparé ou facilité sa banqueroute ou dans ceux qui l'auront consommée. »

- Adopté.

Chapitre III. Dispositions générales
Article 581

« Art. 581. Dans les cas prévus par les articles 577, 579 et 580, la cour ou le tribunal saisis, statueront lors même qu'il y aurait acquittement :

« 1° D'office sur la réintégration à la masse des créanciers de tous biens, droits ou actions frauduleusement soustraits;

« 2° Sur les dommages-intérêts qui seraient demandés et que le jugement ou l'arrêt arbitrera.

« Les conventions seront, en outre, déclarées nulles à l'égard de toutes personnes et même à l'égard du failli.

« Le créancier sera tenu de rapporter à qui de droit les sommes ou valeurs qu'il aura reçues en vertu des conventions annulées. »

- Adopté.

Article 582

« Art. 582. Dans le cas où l'annulation des actes ou conventions frauduleux mentionnés aux articles 587 et 588, serait poursuivie par la voie civile, l'action sera portée devant le tribunal de commerce dans le ressort duquel la faillite s'est ouverte. »

M. Jacques. - Il faut mettre 577 et 579, au lieu de 587 et 588.

- L'article est adopté avec ce changement.

Articles 583 à 585

« Art. 583. Les frais de poursuite en banqueroute simple ou frauduleuse ne pourront être mis à la charge de lu masse qu'en cas d'acquittement, lorsque les curateurs à ce autorisés par une déclaration prise à la (page 107) majorité individuelle des créanciers présents, se seront portés partie civile. »

- Adopté.


« Art. 584. En cas de concordat, le recours du trésor public contre le failli, pour les frais, ne pourra être exercé qu'après l'expiration des termes accordés par ce traité. »

- Adopté.


« Art 585. Tous arrêts ou jugements de condamnation rendus en vertu des articles 585 à 589, seront affichés et publiés de la manière et suivant les formes établies par l’article 472 et aux frais des condamnés. »

- Adopté.

Chapitre IV. De l'administration des biens en cas de faillite
Article 586

« Art. 586. Dans tous les cas de poursuite et de condamnation pour banqueroute simple ou frauduleuse, les actions civiles, autres que celles dont il est parlé à l'article 590, resteront séparées, et toutes les dispositions relatives aux biens, prescrites pour la faillite, seront exécutées, sans qu'elles puissent être attribuées, ni évoquées aux tribunaux de police correctionnelle, ni aux cours d'assises.

- Adopté.

M. Bruneau. - Il y a une erreur dans l'indication des chiffres mentionnés à l’article 585.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Toutes ces erreurs pourront être redressées avant la réimpression du projet de loi pour le second vote. (Oui! oui!)

Article 587

« Art. 587. Seront cependant tenus les curateurs à la faillite de remettre au ministère public les pièces, titres, papiers et renseignements qui leur seront demandés. Ces pièces, titres et papiers seront, pendant le cours de l'instruction, tenus en état de communication par la voie du greffe ; cette communication aura lieu sur la réquisition des curateurs, qui pourront y prendre des extraits privés ou en requérir d'authentiques qui leur seront délivrés sur papier libre par le greffier.

« Les pièces, litres et papiers dont le dépôt judiciaire n'aura pas été ordonné, seront, après l'arrêt ou le jugement, remis aux curateurs, qui en donneront décharge. »

- Adopté.

Titre III. De la réhabilitation

Article 588

« Art. 588. Le failli qui aura intégralement acquitté en principal, intérêts et frais, toutes les sommes par lui dues, pourra obtenir sa réhabilitation.

« Il ne pourra l'obtenir, s'il est l'associé solidaire d'une maison de commerce tombée en faillite, qu'après avoir justifié que toutes les dettes de la société ont été intégralement acquittées en principal, intérêts et frais, lors même qu'un concordat particulier lui aurait été consenti. »

- Adopté.

Article 589

« Art. 589. Toute demande en réhabilitation sera adressée à la cour d'appel dans le ressort de laquelle le failli sera domicilié. Le demandeur joindra à sa requête les quittances et autres pièces justificatives. »

M. Coomans. - Messieurs, je ne m'oppose pas à l'adoption de cette disposition ; mais je désirerais connaître les motifs qui ont pu déterminer le gouvernement et la commission à ne pas exiger que la demande en réhabilitation soit adressée à la cour d'appel dans le ressort de laquelle le failli était domicilié au moment de la faillite ; il me semble que cette cour serait plus apte que toute autre à juger si le failli mérite la réhabilitation.

M. Tesch, rapporteur. - Messieurs, il me semble, au contraire, que c'est la cour d'appel dans le ressort de laquelle le failli est domicilié au moment de sa demande en réhabilitation, qui peut le mieux apprécier les titres du failli à cette réhabilitation. Une cour d'appel peut avoir perdu entièrement de vue un individu qui a fait faillite dans son ressort; et qui, depuis, a établi son domicile dans le ressort d'une autre cour d'appel. C'est par ce motif que le gouvernement, je pense, a proposé et que la commission a adopté la disposition en vertu de laquelle la cour d'appel dans le ressort de laquelle le failli a son domicile au moment où il demande sa réhabilitation, doit prononcer sur cette demande.

- Personne ne demandant plus la parole, l'art. 589 est mis aux voix et adopté.

Articles 590 à 598

« Art. 590. Le procureur général près la cour d'appel, sur la communication qui lui aura été faite de la requête, en adressera des expéditions, certifiées de lui au procureur du roi et au président du tribunal de commerce du domicile du demandeur; et s'il a changé de domicile depuis la faillite, au procureur du roi et au président du tribunal de commerce de l'arrondissement où elle a eu lieu, en les chargeant de recueillir tous les renseignements qui seront à leur portée sur la vérité des faits qui auront été exposés. »

- Adopté.


« Art. 591. A cet effet, à la diligence du procureur du roi, copie de ladite requête restera affichée, pendant un délai de deux mois, tant dans les salles d'audience du tribunal civil et du tribunal de commerce qu'à la bourse et à la maison commune, et sera insérée par extraits dans les papiers publics. »

- Adopté.


« Art. 592. Tout créancier qui n'aura pas été payé intégralement de sa créance en principal, intérêts et frais, et toute autre partie intéressée, pourront, pendant la durée de l'affiche, former opposition à la réhabilitation par simple acte au greffe, appuyé de pièces justificatives. Le créancier opposant ne pourra jamais être partie dans la procédure relative à la réhabilitation. »

- Adopté.


« Art. 593. Après l'expiration des deux mois, le procureur du roi et le président du tribunal de commerce transmettront, chacun séparément, au procureur général près la cour d'appel les renseignements qu'ils auront recueillis et les oppositions qui auront pu être formées; ils y joindront leur avis sur la demande. »

- Adopté.


« Art. 594. Le procureur général près la cour d'appel fera rendre, sur le tout, arrêt portant admission ou rejet de la demande en réhabilitation. Si la demande est rejetée, elle ne pourra être reproduite qu'après une année d'intervalle.

- Adopté.


« Art. 595. L'arrêt portant réhabilitation sera adressé tant au procureur du roi qu'au président des tribunaux auxquels la demande aura été adressée. Ces tribunaux en feront faire la lecture publique et la transcription sur leurs registres.

- Adopté.


« Art. 596. Ne seront point admis à la réhabilitation les banqueroutiers frauduleux, les personnes condamnées pour vol, escroquerie ou abus de confiance, les stellionataires, ni les tuteurs, administrateurs, ou autres comptables qui n'auront pas rendu et soldé leurs comptes.

« Pourra être admis à la réhabilitation le banqueroutier simple qui aura subi la peine à laquelle il aura été condamné. »

- Adopté.


« Art. 597. Nul commerçant failli ne pourra se présenter à la bourse, ni assister comme conseil ou représenter les parties comme procureur fondé devant le tribunal de commerce, à moins qu'il n'ait obtenu la réhabilitation. »

- Adopté.


« Art. 598. Le failli pourra être réhabilité après sa mort. »

- Adopté.


M. le président. - Nous arrivons au titre IV, Des sursis de payement.

- Des membres. - A demain.

M. le président. - Je propose de faire convoquer les sections pour demain à l'effet d'examiner le budget des travaux publics qui a été distribué ; je propose également que le budget des travaux publics soit examiné par les sections de février qui se sont occupées du budget des voies: et moyens......Il n'y a pas d'opposition ? Cette marche sera suivie.

- La chambre, consultée, fixe la séance publique de demain à 2 heures-.

La séance est levée à 4 heures.