(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1871-1872)
(Présidence de M. Tack, premier vice-président.)
(page 707) M. Reynaert fait l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. de Borchgrave donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.
M. Reynaert présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre :
« L'administration communale de Tournai transmet, avec 125 exemplaires imprimés, une pétition du conseil communal demandant que le nombre des conseillers de cette ville soit fixé à vingt et un. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi portant dissolution des conseils communaux.
« Les sieurs Paris-Paris, président, et Becquet, secrétaire de l'Association générale des brasseurs belges, transmettent des pétitions de brasseurs dans les provinces de Limbourg, de Namur et de la Flandre orientale, contre le projet de loi relatif à l'accise sur la bière. »
M. Lelièvre. - J'appuie les pétitions et je demande qu'elles soient renvoyées à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi sur la. matière. Je demande que la section soit invitée à faire un rapport spécial, sur les requêtes dont il s'agit.
- Adopté.
« Le sieur Ferréol Fourcault demande que la loi consacre le principe de l'obligation en matière d'enseignement primaire. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion de la proposition de loi, relative à l'enseignement primaire obligatoire.
M. Malou, ministre des finances. - J'ai l'honneur de déposer un projet de loi allouant un nouveau crédit provisoire au département des travaux publics pour l'exercice 1872.
Des crédits n'ont été votés que pour les trois premiers mois de l'année et il est dès aujourd'hui certain que le budget des travaux publics ne sera pas voté avant le 1er avril.
M. le président. - Le bureau a reçu l'amendement suivant au projet de loi relatif à la révision des états de classification des communes et à la dissolution des conseils communaux :
« Ajouter le paragraphe suivant à l'article premier :
« Toutefois, les communes qui, d'après le recensement de 1866, perdraient un ou plusieurs conseillers conserveront le nombre de conseillers qu'elles ont actuellement, si elles y ont droit d'après les étals de population de l'année 1870.
« (Signé) Crombez, Rogier, Bara. »
M. le président. - Le premier objet à l'ordre du jour est la reprise du vote sur la demande de clôture de la discussion sur la pétition d'habitants de Gosselies relative à la mise en disponibilité de M. Kinet.
- Le vote par appel nominal donne le résultat suivant :
86 membres prennent part au vote ;
49 votent pour la clôture ;
37 votent contre.
En conséquence, la clôture est prononcée.
Ont voté pour la clôture :
MM. Beeckman, Berten, Biebuyck, Coremans, de Borchgrave, de Clercq, de Haerne, de Kerckhove, Delaet, Delcour, De Lehaye, de Liedekerke, de Montblanc, de Muelenaere, de Naeyer, de Smet, de Theux, de Zerezo de Tejada, Drubbel, Dumortier, Gerrits, Hayez, Jacobs, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Lefebvre, Lelièvre, Magherman, Moncheur, Mulle de Terschueren, Notelteirs, Pety de Thozée, Rembry, Reynaert, Schollaert, Snoy, Thibaut, Vanden Steen, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Outryve d'Ydewalle, Van Overloop, Van Wambeke, Verbrugghen, Verwilghen, Léon Visart, Wasseige, Wouters et Tack.
Ont voté contre la clôture :
MM. Bergé, Boulenger, Bouvier-Evenepoel, Bricoult, Couvreur, Crombez, d'Andrimont, Dansaert, David, de Baillet-Latour, Defuisseaux, de Lexhy, de Lhoneux, Demeur, de Rossius, Descamps, Dethuin, de Vrints, Drion, Elias, Frère-Orban, Funck, Hagemans, Houtart, Jamar, Jottrand, Le Hardy de Beaulieu, Mascart, Muller, Orts, Pirmez, Rogier, Sainctelette, Tesch, Van Humbeeck, Van Iseghem et Vleminckx.
M. le président. - Les conclusions de la commission sont le renvoi à M. le ministre de l'intérieur avec demande d'explications.
M. de Theux, membre du conseil des ministres. - Je demande la division.
M. le président. - La division est de droit.
- Le renvoi à M. le ministre de l'intérieur est mis aux voix et adopté.
M. le président. - Reste la deuxième partie, la demande d'explications.
- Plusieurs membres. - L'appel nominal !
M. Pirmez. - Je demande la parole.
- Plusieurs membres. - La clôture est prononcée.
M. Pirmez. - Il ne me paraît pas possible que la Chambre... (Interruption.)
Je demanderai la parole pour un fait personnel ou pour une motion d'ordre. Nous sommes en butte aux plus infâmes accusations. Voici ce que le principal organe de la majorité...
- Plusieurs membres : La clôture est prononcée.
M. Pirmez. - Ecoutez les infamies que l'on publie contre nous. (Interruption.) Vous avez donc bien peur que je me défende ? Ayez le courage, ayez la pudeur de m'entendre...
- A droite. - L'appel nominal !
M. Frère-Orban. - M. le président, maintenez la parole à M. Pirmez.
- A droite. - L'appel nominal !
M. le président. - On ne peut pas parler entre deux épreuves.
A droite. - L'appel nominal !
M. Pirmez. - Jamais la majorité d'une assemblée délibérante n'a donné l'exemple d'une semblable intolérance.
M. Bouvier. - Mon honorable collègue, si on ne vous laisse pas parler maintenant, vous pourrez demander tout à l'heure la parole pour une motion d'ordre.
- A droite. - L'appel nominal !
M. le président. - Il va être procédé à l'appel nominal.
- A gauche. - Non ! non ! nous protestons.
(page 708) M. Frère-Orban. - Je demande la parole.
M. le président. - D'après le règlement, on ne peut pas demander la parole entre deux épreuves.
M. Frère-Orban. - Je demande la parole pour un rappel au règlement.
- Un membre à droite. - Vous n'en avez pas le droit. (Interruption à droite.)
- Des voix à droite. - L'appel nominal !
M. Frère-Orban. - J'ai eu l'honneur, M. le président, de demander la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. - Vous avez la parole pour un rappel au règlement.
M. Frère-Orban. - On vient tout à l'heure..
M. Dumortier. - Quel article du règlement invoquez-vous ?
M. Frère-Orban. - On vient tout à l'heure d'invoquer le règlement en prétendant qu'on ne peut pas prendre la parole entre deux épreuves ; c'est l'objection qu'on oppose à M. Pirmez.
J'ai l'honneur de faire remarquer à la Chambre qu'il ne s'agit pas ici de prendre la parole entre deux épreuves. Un vote a eu lieu, il est accompli ; on a voté le renvoi pur et simple, il reste à voter sur une autre question, celle de savoir si l'on demandera des explications au gouvernement.
M. Dumortier. - Je demande la parole.
M. Frère-Orban. - Voila la situation,
M. Pirmez demande la parole sur la position de la question ; il est évident qu'on ne peut pas la lui refuser sans une violence qui serait tout à fait injustifiable.
Je me permets d'appeler sur ce point l'attention de la majorité.
Sous l'administration précédente, la majorité avait admis, en quelque sorte, comme une tactique de crier au ministre : Ne répondez pas ! et de réclamer immédiatement la clôture. Eh bien, cette pratique a fait le plus grand tort à l'administration précédente ; elle n'a pas fortifié la majorité dans l'opinion publique... (Interruption.) Cela est incontestable.
L'administration actuelle n'a pas employé jusqu'ici ces procédés ; on a admis à discuter ; et ces discussions qui ont eu lieu depuis lors ont-elles perdu quelque chose en dignité et en convenance dans cette Chambre ? (Interruption.)
Certainement non.
M. Wasseige. - Dignité est de trop.
M. Bouvier. - Vous n'en avez certes pas donné l'exemple.
M. Frère-Orban. - En tous cas, vous allongez le débat par vos constantes interruptions. (Interruption.) C'est porter atteinte à la dignité de la Chambre que d'empêcher la minorité de parler. (Interruption.)
M. Wasseige. - C'est de votre temps que cela se faisait. (Interruption.)
M. Frère-Orban. - En demandant la parole pour un rappel au règlement, je fais remarquer à la majorité, dans un esprit très impartial, que, dans la question qu'on a discutée, il s'agit d'un professeur, d'un directeur d'établissement de l'Etat... (interruption) qui se trouve avoir été frappé sans avoir été entendu. (Interruption.)
- Voix à droite. - Cela n'est plus du rappel au règlement.
M. Frère-Orban. - Je le sais ; aussi, si l'on ne veut pas ma continuer la parole sur ce point, je me tairai. Je reconnais qu'ici je suis en dehors de mon droit.
Mais si la Chambre voulait...
- Voix à droite. - Non ! non !
M. Frère-Orban. -... dans l'intérêt de la chose publique, m'écouter un instant, je lui dirais que c'est justice de laisser parler ceux qui veulent se défendre contre une imputation odieuse et qui atteint en outre un particulier condamné sans avoir été entendu. (Interruption.)
- Voix à gauche. - II n'y a eu qu'une fraction d'enquête. (Interruption.) On a peur de nous entendre. Voilà la situation ! (Nouvelle interruption.)
M. Frère-Orban.- Vous avez peur de la vérité. (Bruyante interruption.)
M. le président. - Je mets aux voix le renvoi à M. le ministre de l'intérieur avec demande d'explications. Que ceux qui sont d'avis...
- Voix à gauche. - C'est vraiment trop fort ! (Interruption.)
M. Van Humbeeck. Voici l'article 23 du reniement : « II est toujours permis de demander la parole sur la position de la question. » M. Pirmez a demandé la parole sur la position de la question, donc vous ne pouvez pas la lui refuser.
M. Frère-Orban. -- Personne n'a le droit de la lui refuser. (Interruption.)
M. le président. - Veuillez, messieurs, m'accorder un moment de silence. J'avais pensé qu'après les explications de M, Frère, M. Pirmez n'insistait pas... (Interruption.) Si M. Pirmez insiste pour parler sur la position de la question, je lui donnerai la parole.
M. Malou, ministre des finances. - Je demande à dire un seul mot.
On ne peut pas parler entre deux épreuves, c'est évident ; mais nous ne sommes pas entre deux épreuves. Vous avez procédé à la première partie d'un vote par division : le renvoi pur et simple à M. le ministre de l'intérieur. Maintenant, il y a une seconde proposition ; le renvoi avec demande d'explications.
Évidemment le règlement doit être exécuté loyalement, c'est-à-dire qu'on ne peut pas, sous prétexte de parler sur la position de la question, renouveler un débat qui a été clos. (Interruption.) Permettez !
Je crois qu'on a tort de s'échauffer et qu'on peut facilement s'entendre.
Je dis donc qu'à mon avis il y a lieu, en ce moment, d'entendre l'honorable M. Pirmez sur la position de la question et de voter sur le point de savoir si, après les explications données, il y a lieu de provoquer d'autres explications. Je crois qu'il n'y a que cela à faire.
M. le président. - Veuillez remarquer que si j'ai parlé de double épreuve à propos du vote par division, j'ai ajouté que le débat avait été clos et c'est là le motif pour lequel j'ai refusé la parole à M. Pirmez.
Je constate, en outre, que M. Pirmez n'avait pas précisé sa pensée. Ce n'est qu'après coup qu'il l'a fait et qu'il a été parlé de la position de la question.
M. Pirmez a donc la parole sur la position de la question.
M. Pirmez. - Je commencerai par remercier M. le ministre des finances de la tolérance qu'il veut bien me montrer.
Je me permettrai de dire qu'on reconnaît les hommes de talent à cette tolérance.
Ceux qui savent se défendre et parler n'ont pas peur de la discussion. Ce ne sera jamais lui qui prendra part à ces manifestations bruyantes qui, par le bruit, étouffent la voix d'un adversaire. (Interruption.)
Je réponds à la modération, à la sagesse, à la tolérance de l'honorable M. Malou et je réponds à ceux qui, par des cris, veulent m'empêcher de parler.
M. Dumortier. - Ce sont les vôtres qui ont jeté des cris.
M. Pirmez. - Voici l'observation que je veux faire sur la position de la question.
L'honorable M. de Rossius et moi, nous sommes en butte à la plus odieuse et à la plus infâme des accusations.
Nous demandons qu'on ne nous refuse pas des explications, nous demandons qu'on nous permette de nous défendre et de nous justifier.
Si vous n'admettez pas la demande d'explications, si vous voulez enterrer ce débat, vous aurez proclamé que vous ne voulez pas que nous puissions nous défendre contre ces odieuses accusations.
M. de Naeyer. - Ce n'est plus la position de la question.
M. Pirmez. - Messieurs, vous en serez, malgré vous sans doute, moralement les complices.
Si, au contraire, vous voulez admettre le renvoi, avec demande d'explications, vous aurez déchargé votre responsabilité.
Pour que vous jugiez ce dont il s'agit, je vais vous lire quatre lignes du journal.
M. Van Wambeke. - Ce n'est pas la position de la question cela ! (Interruption.)
M. Pirmez. - Voilà les bruits qui recommencent.
M. Wasseige. - Messieurs, si l'honorable M. Pirmez avait demandé la parole sur la position de la question, cela était son droit, personne sur nos bancs n'aurait songé à le lui contester dans ces limites. Il est mal fondé à prétendre que c'est grâce à l'intervention de l'honorable M. Malou qu'il a dû de pouvoir s'expliquer. Je proteste donc contre ces paroles et je répète que nous étions tous de l'avis de l'honorable ministre des finances. Mais ce n'est pas ce que voulait l'honorable M. Pirmez et vous en avez en ce moment la preuve évidente ; voilà pourquoi je réclame l'exécution du règlement.
Dans les paroles prononcées par l'honorable M. Pirmez, je ne puis ratifier que les éloges qu'il adressait à l'honorable M. Malou, éloges peut-être un peu suspects dans sa bouche, mais que nous déclarons, nous, parfaitement mérités ; mais je repousse énergiquement cette accusation que la droite avait l'habitude de clore les discussions lorsqu'elle se croyait (page 709) incapable de se défendre. Cela est vraiment incroyable en présence des débats dont le souvenir est encore présent à votre mémoire a tous.
Non, la droite ne craint pas les débats utiles et sérieux, elle l’a prouvé souvent à l'honorable M. Pirmez lui-même ; mais ce que la droite ne veut pas, c'est que l'honorable membre, sous prétexte de parler sur la position de la question, veuille rentrer dans la discussion, ce qui serait absolument contraire au règlement. Votons donc, et une fois le vote régulièrement accompli, M. Pirmez pourra, s'il le juge convenable, demander la parole pour une motion d'ordre ; il pourra y faire entrer l'article du journal qui paraît l'avoir si fortement ému, il pourra faire entendre telle protestation qu'il jugera convenir, ce n'est pas moi qui m'y opposerai, mais en attendant le règlement doit être respecté même par l'opposition et nous voulons qu'il le soit.
M. Pirmez. - Je constate que je pourrai me défendre après le vote et j'accepte : c'est toujours quelque chose.
M. le président. - Je vous avais déjà fait remarquer, M. Pirmez, que vous auriez pu demander la parole pour une motion d'ordre et présenter alors votre observation.
- La demande de renseignements est mise aux voix par appel nominal.
91 membres prennent part au vote.
51 répondent non.
40 répondent oui.
En conséquence, la demande de renseignements n'est pas adoptée.
Ont répondu non :
MM. Beeckman, Berten, Biebuyck, Coremans, de Borchgrave, de Clercq, de Haerne, de Kerckhove, Delaet, Delcour, De Lehaye, de Liedekerke, de Montblanc, de Muelenaere, de Naeyer, de Smet, de Theux, de Zerezo de Tejada, Drion, Drubbel, Dumortier, Gerrits, Hayez, Jacobs, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Lefebvre, Lelièvre, Magherman, Moncheur, Mulle de Terschueren, Notelteirs, Pety de Thozée, Rembry, Reynaert, Schollaert, Snoy, Thibaut, Vanden Steen, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Outryve d'Ydewalle, Van Overloop, Van Wambeke, Verbrugghen, Vermeire, Verwilghen, Léon Visart, Wasseige, Wouters et Tack.
Ont répondu oui :
MM. Anspach, Bara, Bergé, Boulenger, Bouvier-Evenepoel, Bricoult, Couvreur, Crombez, d'Andrimont, Dansaert, David, de Baillet-Latour, Defuisseaux, de Lexhy, de Lhoneux, Demeur, de Rossius, Descamps, Dethuin, de Vrints, Elias, Frère-Orban, Funck, Hagemans, Houtart, Jamar, Jottrand, Le Hardy de Beaulieu, Lescarts, Mascart, Muller, Orts, Pirmez, Rogier, Sainctelette, Tesch, Vandenpeereboom, Van Humbeeck, Van Iseghem et Vleminckx.
M. Pirmez (pour une motion d’ordre). - Messieurs, nous avons eu le regret, dans la séance d'hier, de ne pouvoir nous expliquer après que deux orateurs de la majorité, M. Drion et M. le ministre de l'intérieur, avaient pris la parole.
On a accusé le professeur dont il a été question dans ce débat d'avoir conduit ses élèves dans des établissements suspects.
Si nous avions pu parler, nous aurions démontré à l'évidence qu'il n'y avait pas l'apparence d'un fondement, pas un prétexte à une pareille accusation.
Nous n'avons pu rien dire.
De même que le professeur avait été blâmé sans avoir été entendu, de même qu'on nous a refusé les pièces, on a prononcé la clôture pour nous empêcher de le défendre.
Tous mes efforts ont échoué.
J'avais espéré, au commencement de la séance, que la majorité voudrait bien m'entendre ; elle l'a refusé.
Le mal est fait ; je ne puis que vous montrer quelles sont les accusations qu'on dirige contre nous.
« M. Kinet, ose-t-on écrire, chargé d'instruire et de moraliser la jeunesse, a poussé l'impudence, le cynisme et l'oubli de ses devoirs, jusqu'à conduire ses élèves dans des établissements suspects. Voilà ce que l'honorable M. Drion nous a appris, et MM. de Rossius et Pirmez prennent toujours le parti d'un tel fonctionnaire. C'est honteux, c'est scandaleux. »
Ainsi, nous sommes représentés comme prenant toujours sous notre protection celui qui corrompait la jeunesse ; nous sommes les protecteurs-nés de cette démoralisation.
Quand il s'agit de nous défendre contre cela, on nous ferme la bouche.
Eh bien, messieurs, dans toutes ces allégations, il n'y a pas un mot de vrai. Ce que nous avons soutenu, ce qui est vrai, c'est que jamais ce professeur ne s'est rendu coupable d'un pareil fait, c'est qu'il est en butte a une accusation dépourvue de tout fondement.
S'il eût été coupable, nous l'eussions flétri, et j'ose dire que jamais, pendant mon passage au ministère, je n'ai rien toléré qui s'écartât de la plus sévère retenue.
Je crois, messieurs, que la majorité serait bien mieux inspirée si elle laissait continuer la discussion ; on nous jugerait, mais on nous jugerait après nous avoir entendus. Je voulais faire entendre cette protestation.
M. Drion. - Messieurs, je maintiens tout ce que j'ai dit hier.
J'affirme qu'à deux reprises différentes, M. Kinet a conduit ses élèves dans deux cabarets suspects. J'affirme que dans l'enquête qui a eu lieu et à laquelle M. Kinet a été appelé, M. Kinet a avoué qu'il avait conduit ses élèves dans ces cabarets ; mais, ainsi que je l'ai dit hier, il s'est excusé en disant qu'il ignorait que ces maisons eussent une mauvaise réputation.
Je répète, en terminant, que je maintiens tout ce que j'ai dit hier.
M. de Rossius. - Messieurs, les déclarations réitérées de l'honorable M. Drion m'autorisent à vous faire entendre une protestation nouvelle, elles m'y autorisent d'autant plus que, dans ce débat, vous n'êtes plus seulement devant un professeur que je persiste à qualifier d'honorable, mais encore devant deux membres de cette Chambre indignement calomniés par votre presse.
Ce qui se passe en ce moment prouve combien est malheureuse la tactique de la droite, de prononcer des clôtures sans que la discussion ait pu porter sur les pièces qui permettraient d'apprécier le débat en connaissance de cause.
Y a-t-il rien de plus étrange que le spectacle auquel la Chambre assiste ? Un membre de l'assemblée fait partie du bureau administratif de Gosselies ; il vient vous affirmer des faits qu'il prétend avoir été recueillis dans une enquête ; et l'on nous refuse la production de cette enquête ?
M. Dumortier. - On vous en a lu des passages hier.
M. de Rossius. - Eh bien, je viens vous faire connaître ce qu'il y a de vrai dans les accusations formulées par l'honorable M. Drion, membre du bureau administratif de Gosselies.
Pourquoi l'enquête a-t-elle été décidée ?
Pourquoi M. le ministre de l'intérieur d'alors a-t-il envoyé un haut fonctionnaire de son administration sur les lieux pour prendre des renseignements ? II s'agissait de décider entre le bureau administratif et le directeur de l'école moyenne sur des points déterminés.
Des accusations avaient été formulées par le bureau administratif contre le directeur, ces accusations avaient déterminé le bureau à prononcer un blâme qui avait amené une protestation. De là l'enquête. Je possède le blâme, et j'ai lu la protestation. Voulez-vous savoir ce que renferme ce blâme ?
Voici le procès-verbal officiel de la séance du bureau. Que dit-il sur les promenades faites dans les cabarets suspects ?
« Il est encore, dit le bourgmestre accusateur, un dernier point sur lequel je désire appeler votre attention.
« Des personnes dignes de foi m'ont assuré que le jeudi et le dimanche, au lieu de consacrer à la promenade les quelques heures de récréation que les principes d'hygiène recommandent d'accorder aux élèves, MM. les professeurs-surveillants, chargés de les accompagner, trouvent bon de s'arrêter dans un café quelconque. Ils y passent des heures entières à jouer au billard et aux cartes, exercice qu'ils jugent sans doute infiniment supérieur à la promenade en plein champ, mais qu'il ne nous est pas possible de considérer ainsi. Il est évident, messieurs, que ces choses se font avec l'assentiment de M. le directeur, et s'il en était autrement, il lui serait impardonnable de l'avoir ignoré jusqu'aujourd'hui. »
Voilà toute l'accusation sur cette question des cabarets suspects. Est-elle moins puérile que l'autre accusation, celle du Te Deum dont il a été question hier ?
M. Drion. - M. Kinet reconnaît lui-même que tout cela est vrai.
M. Pirmez. - Donnez-nous l'enquête. (Interruption à droite.)
M. de Rossius. - Je ne suis pas pressé de voir clore ce débat ; je veux bien que M. Drion m'interrompe.
M. Dumortier. - Allons-nous recommencer la discussion d'hier ? Elle a été close.
M. le président. - M. de Rossius, je vous en prie, ne recommençons pas la discussion, restons dans les limites de la motion d'ordre.
M. de Rossius. - Il y a une chose véritablement étonnante.
Dernièrement, la Chambre a eu la patience d'écouter pendant deux heures un membre de la majorité donnant lecture d'un long factum qui émanait d'un incendiaire... (Interruption.)
(page 710) Et quand je prends la parole pour défendre non seulement un fonctionnaire honorable, injustement accusé et condamné, mais encore l'honorable M. Pirmez et moi-même qui sommes l'objet d'odieuses attaques, M. le président m'invite à abréger. Voilà voire justice ! (Interruption.)
M. le président. - Vous avez la parole, M. de Rossius, mais je vous demande de vous renfermer dans la motion d'ordre et de ne pas rouvrir un débat qui est clos.
M. de Rossius. - Je dis que M. Drion a grossi les faits ; que, dans le blâme infligé par le bureau, il ne s'agit pas de cabarets suspects ; que l'accusation porte sur des promenades interrompues par un repos très naturel pris au cabaret, et que dès lors elle est insignifiante.
M. Drion. - Je demande la parole.
- Voix à droite. - Laissez donc ! (Interruption.)
M. de Rossius. - Voulez-vous maintenant écouter la réponse du directeur ?
« Le troisième grief, écrit-il au bureau administratif, me concerne plus spécialement, mais ma justification n'en sera pas plus difficile. L'autorisation de s'arrêter dans un café pendant les promenades a été introduite ou continuée par mon prédécesseur ; il y avait même plus : les élèves, une fois sortis de la ville, étaient libres d'aller à leur guise dans tel endroit qui leur plaisait, avec la seule condition de se retrouver dans un lieu fixé à une heure déterminée. C'était là, messieurs, un abus excessivement grave que j'ai fait disparaître immédiatement. Toutefois, comme cette liberté d'allure devait plaire aux jeunes gens, il eût été très maladroit de ma part de leur retirer d'un coup tous les petits avantages auxquels ils tenaient. C'est pourquoi je leur ai maintenu l'autorisation d'entrer, entre deux promenades d'une heure et d'une heure et demie chacune, dans un café honnête pour s'y rafraîchir en été, pour s'y réchauffer en hiver. Cette autorisation a toujours a été restreinte à trois quarts d'heure ou une heure, et la surveillance n'a jamais fait défaut.
« Jamais non plus, messieurs, la promenade n'a fait défaut : il est vrai qu'un jour, par un temps de pluie froide, le surveillant a passé dans un café un temps plus considérable que le temps réglementaire. Mais c'était à mon insu et ordre a été immédiatement donné de ne plus enfreindre, à l'avenir, mes premières et seules prescriptions. Il y a là autre chose que de tolérer un abus.
« Au surplus, messieurs, je suis le premier et, dirait-on, le seul intéressé à la prospérité du pensionnat. Or, il ne me paraît pas que, jusqu'à présent du moins, j'aie travaillé à sa ruine. Au contraire, le nombre toujours croissant des élèves qui, d'octobre 1868 à cette date, s'est élevé de 8 à 49 semble donner complètement raison à mes soins et à ma direction. »
Voilà la réponse du directeur. Certes, il est très innocent ce fait de s'arrêter, entre deux promenades, dans un cabaret.
M. Drion. - Pas dans la ville de Gosselies.
M. de Rossius. - Mais dans le blâme, il n'est pas question de la ville de Gosselies. (Interruption.)
Comment ne comprenez-vous pas, M. Drion, que dans cette discussion l'impartialité vous trace des devoirs, tout au moins celui de ne pas m'interrompre ? (Interruption.)
M. Bara. - Laissez parler un accusé.
M. de Rossius. - Eh bien, je vous le demande, qu'y a-t-il de repréhensible dans ce fait, reproché à M. Kinet ?
Mais, messieurs, les chefs des établissements religieux eux-mêmes autorisent le repos dans les cabarets pendant les promenades de leurs élèves. Ce repos est de coutume chez les jésuites. Mais les élèves, à Gosselies, ont joué au billard ! Est-ce un crime, messieurs ? Mais il y a des billards dans tous les grands établissements religieux. (Interruption.)
Messieurs, je tenais à faire connaître à la Chambre l'accusation vraie, l'accusation réelle du bureau administratif contre le directeur, M. Kinet. Vous voyez qu'elle se réduit à bien peu de chose.
Je vous ai donné lecture du blâme ; M. Drion a-t-il d'autres pièces ? Qu'il les fasse connaître. Je vous ai lu aussi la réponse du directeur. C'est plusieurs mois après le blâme et après la protestation que le ministre de l'intérieur d'alors, l'honorable M. Kervyn, a envoyé sur les lieux l'un de ses inspecteurs pour apprécier la valeur de ces reproches.
Les Annales parlementaires n'ont pas encore publié la séance d'hier. Je n'ai donc pu lire les extraits de l'enquête citée par M. le ministre de l'intérieur ; mais je me rappelle que cet inspecteur a pris une conclusion qui est accablante pour l'honorable M. Kervyn : M. Vinçotte a déclaré qu'il lui était impossible de demander autre chose qu'un déplacement ; il a déclaré qu'une condamnation n'était pas possible, il a déclaré implicitement que cette condamnation serait injuste. Celle condamnation injuste, il s'est trouvé un ministre de l'intérieur pour la prononcer.
M. Bouvier. - Voilà de la charité chrétienne et de la tolérance !
M. Drion. - Je demande la parole.
- Voix à droite. - Non ! non ! la clôture !
M. Bouvier. - Laissez donc parler un de vos amis, nous sommes plus tolérants que vous.
M. Drion.- Messieurs, c'est le 24 décembre 1870 que nous avons infligé un blâme à M. Kinet.
L'enquête a eu lieu le 28 mai.
M. Kinet se moquait si bien de nous que, peu de temps après, au mois de juin, alors qu'il avait été blâmé par nous et par l'inspecteur, il conduisait encore les enfants dans un des deux cabarets suspects dont j'ai parlé hier.
M. de Rossius, vous m'avez dit hier que je suis un petit homme. Vous me permettrez de vous adresser un petit compliment.
Devant le pays et devant l'univers, je proclame que vous êtes un grand homme.
Mais quelque grand que vous soyez, je n'ai pas à vous rendre compte de mes actes comme membre du bureau administratif de Gosselies.
Les membres du bureau administratif sont nommés par le gouvernement, sur la présentation des conseils communaux. Le gouvernement doit renfermer son choix dans les candidats présentés.
Je ne dois donc rendre compte de mes actes qu'au corps électoral de Gosselies, qui m'a nommé son mandataire. J'attends son verdict avec confiance et je vous prouverai, à l'époque des élections communales, que toute la population de Gosselies a approuvé ma conduite et celle de mes collègues.
M. Muller. - Messieurs, j'avais demandé, pour pouvoir discuter en parfaite connaissance de cause, d'après les chiffres officiels, la remise de la discussion du projet de loi dont la Chambre aborde en ce moment l'examen.
Les renseignements que M. le ministre de l'intérieur a transmis à la Chambre ne satisfont qu'imparfaitement à l'une des parties de ma demande.
J'aurais voulu avoir le tableau de la population au 31 décembre 1870, non seulement pour pouvoir examiner l'ordre de la classification nouvelle, en ce qui concerne la répartition des conseils communaux, mais aussi en ce qui concerne l'attribution aux divers cantons provinciaux des mandataires que les états de population de 1870 leur attribueraient.
Messieurs, je ne me plains pas du gouvernement. Sans doute, M. le ministre de l'intérieur ne m'aura pas bien compris ou il lui aura été impossible de satisfaire immédiatement à mon désir.
Je disais, messieurs, dans cette même séance d'avant-hier, que la base sur laquelle reposaient les projets de lois dont il s'agit pouvait et devait, selon moi, donner lieu à une discussion sérieuse.
Nous lisons dans l'exposé des motifs du projet de loi relatif à la dissolution et à la nouvelle répartition des conseils provinciaux :
« Prenant en considération l'augmentation de la population et les vœux émis par plusieurs conseils provinciaux, nous pensons, messieurs, qu'il est opportun de mettre la composition des conseils provinciaux en harmonie avec les résultats du recensement décennal qui a été fait en 1866.
« Ce recensement est, à notre avis, la seule base d'après laquelle on puisse officiellement constater l'état de la population. »
Eh bien, messieurs, dans mon opinion, prendre en 1872, pour unique base d'une nouvelle répartition des conseils provinciaux et des conseils communaux, le recensement de 1866, c'est évidemment s'appuyer sur des faits qui n'existent plus, c'est procéder à une répartition contraire à la vérité, et ce n'est pas ainsi, messieurs, qu'on a agi jusqu'ici.
Telle n'était pas la pensée du Congrès national lui-même, car lorsqu'il a fait pour la première fois la répartition des représentants et des sénateurs, annexée à son décret du 3 mars 18531, il a été arrêté en conséquence du dernier recensement général fait en 1829, qui donnait pour le royaume 4,064,209 habitants et d'une majoration de 15,791 habitants pour 1850, faisant un total de 4,080,000 habitants.
Remarquez que cette donnée du Congrès a été suivie dans les divers projets qui ont été soumis à la législature, et elle a été appliquée à la dernière répartition des conseillers provinciaux qui a eu lieu par la loi du 29 février 1860. Je lis dans l'exposé des motifs :
« Le recensement date de 1856 : mais comme depuis lors et jusqu'au 31 décembre 1858, il a été officiellement constaté dans la population du royaume un accroissement de 93,736 habitants, il est rationnel de tenir compte de cet accroissement et d'adopter pour base de la nouvelle (page 711) classification les états de population de 1858, lesquels ont également servi de base à la dernière répartition des représentants et des sénateurs. »
Lorsque ce projet fut soumis à la discussion de la Chambre des représentants, il ne s'éleva pas l'ombre d'une objection, et l'honorable M. de Naeyer, qui prit la parole, disait : « Je n'ai pas d'observation à faire sur l'exposé des motifs. Ses principes me paraissent conformes aux notions de l'équité et parfaitement raisonnables. Je pense qu'il y a lieu de les adopter. Mais il s'est glissé dans l'application une légère anomalie quant à la province de Flandre orientale... »
Et le vote a eu lieu à l'unanimité des 75 membres présents.
On prenait, en 1860, les derniers états de population connus, comme je demanderai que l'on prenne actuellement les derniers états de population connus, qui sont ceux de 1870, et qui sont en possession de M. le ministre de l'intérieur.
Si le système que le gouvernement propose était adopté, il aurait des conséquences extrêmement graves, et il est si peu conforme à l'esprit du Congrès que, sans aucune contestation, quand il s'agit des listes des éligibles au Sénat, depuis 1830 jusqu'à ce jour, avant comme après la loi qui a précédé le recensement de 1856, on a toujours, à mesure que la population d'une province s'accroissait de 6,000 âmes, augmenté en conséquence le nombre des éligibles au Sénat.
Ainsi, messieurs, si vous vous en rapportiez exclusivement au recensement de 1866, la liste des éligibles au Sénat ne devrait contenir que 800 noms, tandis qu'elle en contient de 8235 à 825.
Messieurs, si vous appliquiez aux éligibles au Sénat la règle que vous voulez faire sanctionner aujourd'hui, vous seriez conséquents dans vos innovations, mais prenez-y garde, vous donneriez au premier corps de la législature un caractère encore plus aristocratique que celui qu'on lui a déjà reproché, car les citoyens qui y figureraient ne s'accroîtraient qu'après une période de douze années, y compris les deux années qui sont nécessaires, au minimum, pour le contrôle des opérations du recensement.
Permettez-moi, messieurs, de vous citer, sur la question que je soulève, l'opinion d'un ancien membre de cette Chambre, qui a marqué par son talent et sa haute autorité et dont tous, à quelque parti que nous appartenions, nous devons regretter l'absence sur nos bancs ; c'est l'honorable M. Devaux. Voici ce qu'il disait, dans la séance du 7 avril 1859, en répondant à l'honorable M. De Decker, qui soutenait que le recensement de 1856 devait exclusivement servir de base à la répartition des représentants et des sénateurs.
« M. Devaux. - L'honorable M. de Decker soutient que parce qu'un recensement a été fait en 1856, il faut le prendre comme unique base de la répartition des représentants et des sénateurs, cette répartition se fit-elle six ou huit ans après.
« Comme cela s'est vu dans d'autres circonstances, il aurait pu arriver que la loi de répartition fût ajournée pendant 5, 6, 7 ou 8 ans, et au bout de 8 ans vous auriez dit : « Il faut prendre pour base lapopulation de 1856, bien que tout le monde sache que depuis lors elle s'est accrue de deux à trois cent mille âmes.
« M. de Decker. - Je n'aurais pas dit cela.
« M. Devaux. - Ainsi, dans la pratique, vous auriez reculé devant l'application de votre, principe, preuve que ce principe est faux.
« Pourquoi la Chambre a-t-elle voulu un recensement ? Afin d'avoir, pour la répartition des représentants, la base la plus exacte possible, la plus rapprochée de la réalité.
« Sans cela, on se serait borné aux renseignements ordinaires puisés dans les registres de l'état civil et dans les registres qui constatent les changements de domicile et de résidence.
« Et que vous propose-t-on ? De vous en rapporter à cette base unique à une époque où il est certain qu'elle n'est plus vraie. On voulait la base la plus exacte et on vous demande d'en adopter sciemment une qui, de l'aveu de tous, est fausse.
« Le recensement doit servir de base unique quand la répartition se décrète immédiatement après ; mais s'il s'écoule plusieurs années, il faut compléter les résultats du recensement par les changements que constatent les registres de l'état civil et ceux des résidences. »
Eh bien, je partage complètement cet avis, qui est d'accord avec tous les précédents de la législature.
Maintenant, j'arrive à l'application, en ce qui concerne les conseils provinciaux.
N'ayant pas de renseignements complets pour l'année 1870, je n'ai pas eu la possibilité de présenter de nouveaux chiffres complets, car ceux qui servent de point de départ au projet de loi, et qui remontent à 1866 devraient être modifiés si l'on prenait les états de population de 1870 comme base supplémentaire.
Mais voici la situation actuelle en ce qui concerne les deux cantons de Liège, arrondissement dont je suis l'un des représentants.
Le canton de Liège avait, au 31 décembre 1866, d'après le recensement décennal, 134,365 habitants.
En 1867, il en avait 137,983, en 1868 141,535, en 1869 141,535.
En 1870, - j'ai demandé le renseignement ce malin au département de l'intérieur, - la population était de 145,648 habitants. Ces deux cantons réunis auraient donc droit à 17 conseillers, sur le pied de 1 par 8,500 habitants, chiffre diviseur pour la province, et il lui resterait une fraction en plus de 1,118 habitants ; eh bien, au lieu de 17 conseillers, le projet ne lui en attribue que 16.
Dans la Flandre occidentale, je prends ici la statistique de 1869 parce que je ne possède pas celle de 1870, on laisse le canton de Menin à deux conseillers ; or, ce canton, au 31 décembre 1869, comptait 35,257 habitants ; l'excédant dépassant la moitié du chiffre du diviseur qui est 10,000, Menin devrait avoir trois conseillers au lieu de deux. Même résultat écherait à Dixmude, canton auquel on n'attribue que deux conseillers, tandis que, d'après sa population de 25,411 habitants, il aurait droit à trois.
On attribue à Gand quatorze conseillers ; la population au 31 décembre 1869 étant de 145,592 habitants, ce canton aurait droit à quinze conseillers puisqu'il a un excédant de 5,392 habitants.
Bruxelles avait, au 31 décembre 1869,171,277 habitants ; on lui assigne 14 conseillers, tandis que ce canton aurait droit à 15 conseillers.
Ixelles est maintenu à 5 conseillers, alors que sa population, au 31 décembre 1869, s'élevant à 69,044 habitants, lui donne droit à 6 conseillers et qu'il lui reste, en outre, une fraction de 144 habitants.
Molenbeek-Saint-Jean est porté à 5 conseillera ; sa population, au, 31 décembre 1869, était de 67,745 habitants ; ce canton a un excédant de 10,245 habitants et devrait, par conséquent, avoir 6 conseillers, d'après le chiffre du diviseur pour la province de Brabant, qui est de 10,500.
J'arrive au Hainaut. Charleroi est porté à sept conseillers ; le canton avait, au 31 décembre 1869, 84,265 habitants ; j'ignore quelle était la population au 31 décembre 1870, mais, selon toute probabilité, l'excédant actuel doit approcher de la moitié du diviseur, soit 5,750.
Boussu est maintenu à quatre conseillers ; ici la situation devrait être également vérifiée pour 1870, car il serait possible que ce canton ait droit à un cinquième conseiller ; il comptait, en,1869, 50,.714 habitants.
Voilà, messieurs, quelques exemples de modifications qu'entraînerait avec raison la base de la population de 1870.
Je termine mes observations en demandant l'ajournement de la discussion du projet de loi, non pas à un long délai, mais jusqu'à ce qu'on ait pu établir quels seraient le nombre et la répartition des conseillers dans chaque province, d'après la population de 1870. Il ne faudrait pas quarante-huit heures pour faire ce travail.
Messieurs, si ma proposition était adoptée, je demanderai que la Chambre donne à cet acte la signification que la répartition nouvelle se fera d'après la population du 31 décembre 1870.
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - Toute la. discussion roule sur le point de savoir pourquoi le gouvernement s'est arrêté au recensement de 1866 plutôt qu'aux états de population au 31 décembre.1870, comme base des nouvelles classifications proposées.
Sous ce rapport, les explications ne seront pas difficiles à donner.
Le recensement de 1866 a été opéré avec toutes les garanties légales prescrites dans le but d'obtenir l'état le plus exact possible de la population.
Les états de population, messieurs, présentent toujours des incertitudes qui, à diverses reprises, ont été signalées et reconnues même par la Chambre.
Lorsque en 1864 l'honorable M. Orts s'appuyait sur les états de population existant à cette époque, pour réclamer l'augmentation du nombre des membres de la représentation nationale, on rappela les nombreuses erreurs qui s'y rencontraient et ces erreurs furent confirmées par le recensement de 1866.
J'ai sous les yeux quelques différences constatées entre les chiffres accusés par les états de population et ceux du dernier recensement décennal, et je crois qu'il serait utile de les communiquer à la Chambre.
Selon le recensement de 1866, la population du pays s’élevait, au 31 décembre de cette année, au chiffre de 4,827,833 habitants, c'est-à-dire (page 712) à un chiffre inférieur de 263,780 habitants a celui qu'établissent les états de population.
L'expérience démontre que les états de population indiquent toujours une population sensiblement supérieure au chiffre réel du nombre des habitants, à celui du recensement.
En présence du fait général que j'indique, je me suis demandé quelles pouvaient être les causes de cette différence.
Il y en a une qui est bien facile à saisir et qui est, je pense, admise par tout le monde.
Dans les états de population on trouve sans doute, un élément certain et qui consiste dans l'excédant des naissances nouvelles à ajouter aux chiffres précédemment constatés.
Mais il y a aussi un élément incertain et fautif. C'est que les états de population, s'ils constatent, en général, assez régulièrement les mutations qui s'opèrent d'une commune à une autre, ne portent pas les radiations qui ont lieu au départ ; il résulte de ce chef des différences très notables.
Les documents statistiques établissent que ces différences sont annuellement de 6,000 à 9,000, ce qui fait, pour une période de dix ans, un écart de 60,000 a 90,000.
Il est donc incontestable, messieurs, que les états de population laissent beaucoup à désirer quant à l'exactitude et nous avons cru qu'ils n'offraient pas une base suffisamment sûre pour un travail de cette importance.
Il y a plus, messieurs. J'ai parcouru les relevés de population dressés pour 1866, l'année même du recensement, et en les comparant avec les données fournies par le recensement, je trouve, le même jour et à la même heure, une population différente.
Ainsi, à Malines, au mois de décembre, la population était, selon le recensement, de 34,210 ; et d'après les états de population, elle était portée à 36,126 : différence, 1,916 habitants en trop.
Dans le Brabant, je prends comme exemple la commune de Schaerbeek : le recensement constatait une population de 18,710 habitants, tandis que les états de population indiquaient 19,895 âmes et présentaient, par conséquent, un excédant de 1,185 habitants.
Mais, je prie la Chambre de remarquer que, dans les localités où il existe surtout une population flottante, la différence est beaucoup plus forte.
Ainsi, à Ixelles, le recensement a constaté une population de 23,210 habitants et les états de population de la même année une population de 26,745 habitants, soit un excédant de 3,535 habitants.
A Molenbeek-Saint-Jean, même observation : là, au lieu de 24,333 habitants, chiffre fixé par le recensement, les états de population portent le nombre des habitants à 27,542 âmes, soit, encore une fois, un excédant de 3,209.
M. Muller. - Où est la vérité ?
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - Permettez, je vais arriver à la conclusion.
M. Crombez. - Qui a raison, des états de recensement ou des états de population ?
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - Ainsi, messieurs, il y a, dans la plupart des communes, un chiffre de population différent constaté par le recensement et par les états de population, le premier donne une population de beaucoup inférieure à celle des états de population. L'écart, pour l'année 1866, est de 163,780 habitants !
Voilà, messieurs, des chiffres officiels, exacts et qui établissent, ce me semble, qu'en adoptant pour base le recensement, nous prenons une base certaine et présentant des garanties que n'offrent pas les états de population.
M. Crombez. - Voilà la question.
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - C'est vrai, mais on ne peut nier que le recensement et les états de population, indiquent une population bien différente.
- Des membres. - Où est la vérité ?
M. Crombez. - Où est la vérité ? Voilà la question.
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - Où est la vérité ? Messieurs, je vais vous répondre, mais laissez-moi insister sur ce point, que les états de population renferment des erreurs et que ces erreurs proviennent d'une cause permanente qui est toujours la même.
Il n'y a pas de doute, messieurs, qu'elles ne soient du côté des états de population ; cela a été reconnu par les Chambres à différentes époques.
Toujours et dans toutes les circonstances, en 1856, lorsqu'on a proposé la loi sur le recensement, en 1866, lorsque le dernier recensement décennal a été opéré, il a été reconnu que les états de population ne présentent pas toutes les garanties désirables.
Sinon, messieurs, pourquoi le législateur aurait-il introduit et maintenu le principe du recensement décennal ?
Voici, messieurs, où réside cette cause permanente d'erreurs : je crois qu'on ne peut le contester et que cela est généralement reconnu. Comme je le disais tout à l'heure, les états de population renferment un élément certain par la constatation des naissances ; mais il en est un autre, souvent erroné et qui résulte des doubles emplois.
Lorsqu'un habitant se rend dans une autre commune pour y fixer son domicile ou sa résidence, il s'y fait ordinairement inscrire tandis que souvent son nom n'est point rayé des registres de population de la commune qu'il quitte.
Les erreurs provenant des doubles emplois sont si nombreuses que, selon la statistique, la différence s'élève annuellement, comme je l'ai dit déjà, de 6,000 à 9,000 ; par conséquent, dans la période décennale du recensement, elle atteint le chiffre de 60,000 à 90,000.
Le gouvernement a donc eu raison de prendre, pour base de la répartition des conseillers provinciaux, le résultat du recensement.
- Un membre. - Cinq ans après.
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - Veuillez suivre, messieurs, avec quelque attention les résultats acquis sous ce rapport.
Voici le tableau des augmentations successives qui se sont produites dans la composition des conseils provinciaux (successivement : répartition de 1836, de 1860 et répartition proposée en 1872 :
Anvers : 46 56 58
Brabant : 57 69 73
Flandre occidentale : 64 68 69
Flandre orientale : 73 77 80
Hainaut : 61 72 76
Liége : 50 63 67
Limbourg : 46 40 40
Luxembourg : 45 41 41
Namur : 43 52 55
L'honorable M. Muller propose d'ajourner la discussion du projet de loi jusqu'à ce que le gouvernement ait produit les états de population de 1870.
Cependant, en prenant pour base la population établie par le recensement de 1866, le gouvernement reste fidèle aux principes de l'exposé des motifs de la loi du 2 juin 1856.
La connaissance exacte de la population, disait l'exposé des motifs, est indispensable pour l'exécution d'un assez grand nombre de lois civiles et politiques.
En effet, dans les prévisions des auteurs de la loi de 1856, on n'avait pas seulement en vue la répartition delà représentation nationale, mais on voulait établir une règle générale applicable aux lois civiles et politiques.
Quant aux conseils provinciaux, il n'y a pas de disposition dans la Constitution qui détermine, comme pour les Chambres, la base de la répartition. Le législateur a toute latitude sous ce rapport.
La loi provinciale ne fixe aucune époque pour procéder à la révision de la répartition.
Le gouvernement, en vous proposant de faire celle-ci d'après la population établie par le recensement de 1866, a choisi la base la plus sûre, la plus impartiale et la plus régulière.
Le recensement de 1866 permet, en outre, au gouvernement d'augmenter le nombre des conseillers provinciaux dans des proportions raisonnables, sans donner à ces corps administratifs une extension exagérée.
En 1860, la population avait considérablement augmenté ; aussi le législateur fut-il admis à augmenter le diviseur pour déterminer la répartition des conseillers dans les diverses provinces ; nous avons maintenu le diviseur adopté par nos prédécesseurs.
Le projet de loi repose donc, messieurs, sur une base certaine. Le gouvernement, déterminé par un sentiment de conciliation et de justice, a fait ce qui était en son pouvoir pour obtenir l'assentiment unanime de la Chambre.
M. Bergé. - Je dirai quelques mots en réponse à ce que vient de dire M. le ministre de l'intérieur.
(page 713) Le gouvernement préfère la base du recensement à cette des états de la population constatée aux registres ; il trouve qu'il y a des erreurs dans ces états de population en comparant les résultats qu'ils donnent avec ceux donnés par les recensements.
Ilien n'est plus difficile que de connaître le chiffre vrai, réel de la population d'une localité. C'est incontestable.
Mais où sera la vérité, entre la population donnée par les registres de l'état civil et les registres de la population, ou bien le recensement ? Il peut y avoir des erreurs de part et d'autre ; et, en effet, les différences qui existent entre le recensement et les tableaux de la population sont sensibles, nombreuses ; ce qui prouve qu'il y a erreur quelque part.
Mais cette erreur où est-elle en réalité ? N'oublions pas que le recensement ne constitue pas toujours un très bon moyen de constater la population. Dans des recensements, vous aurez toujours une population inférieure à celle qui existe de fait.
Et si vous aviez dans les registres de la population une surcharge, vous aviez ici un déficit et ce déficit proviendra de différentes causes.
D'abord, ces recensements produisent certaines craintes aux yeux de populations plus ou moins ignorantes, qui ont peur d'être frappées de nouveaux impôts ; elles croient qu'elles ne doivent déclarer leur locataire que dans l'unique but, pour le gouvernement, de prélever de nouveaux impôts.
La garde civique y est aussi pour quelque chose. Dans les villes où il y a une garde civique, il est incontestable qu'on hésite à faire certaines inscriptions sur les tableaux, de peur qu'on ne révèle ainsi l'existence de personnes pouvant être astreintes au service.
Il y a, ensuite, des personnes qui ont des résidences à l'étranger ; je parlerai notamment de certains artistes, qui, ayant leur domicile à Bruxelles, par exemple, sont obligés de quitter la Belgique pendant une partie de l'année ; d'autres personnes qui, pour leur commerce, sont obligées de quitter momentanément la ville qu'ils habitent, sans pour cela vouloir changer de domicile.
Eh bien, ces personnes ont été généralement omises. Dans quelques familles, on a procédé à l'inscription ; dans d'autres, on ne l'a pas fait. Voilà déjà certaines causes d'erreurs. Ces causes sont multiples et nous ne pouvons pas prétendre que les résultats du recensement sont plus exacts que ceux des registres de population. Il y a incontestablement des erreurs, puisque ces deux chiffres ne correspondent pas, mais il est impossible de se prononcer avec certitude en faveur du recensement plutôt qu'en faveur des états de population.
M. Malou, ministre des finances. - Cette question a été agitée plusieurs fois dans cette Chambre. Selon moi, elle peut avoir quelque]importance lorsqu'il s'agit de fixer le nombre des membres des deux Chambres législatives ; mais il m'est très difficile de comprendre en quoi elle aurait une valeur quelconque dans le cas actuel. Et voici pourquoi :
On a hésité, en préparant le projet de loi, sur le point de savoir si l'on augmenterait ou non le diviseur fixé en 1860.
En supposant, un instant, admis le principe préconisé par l'honorable M. Muller, il suffirait à la Chambre d'augmenter d'une ou deux centaines le diviseur pour faire disparaître l'effet de l'amendement. (Interruption.)
Il disparaîtrait complètement quant à la fixation du nombre des conseillers provinciaux.
M. Muller. - Mais pas quant à la répartition par canton.
M. Malou, ministre des finances. - Comment se fait cette répartition ? A raison d'une fraction de 10,000 ou par 7,000 habitants suivant les provinces.
Je ne pourrais pas voir de suite combien de déplacements s'opéreraient par ce changement ; mais je n'hésite pas à dire d'avance, ayant vu les chiffres, que ce résultat serait tout à fait insignifiant.
Ainsi dans les cantons, et la plupart n'ont que 8,000, 10,000 ou 12,000 habitants, il n'arriverait peut-être pas une fois sur cinquante qu'il y aurait une fraction suffisante pour faire adopter un chiffre plutôt qu'un autre.
Il y a discordance entre les états de population et le recensement. On nous dit : Où est la vérité ; où est l'erreur ?
Et d'abord, lorsqu'on a ordonné le recensement, pourquoi l'a-t-on fait ?
Pourquoi s'oblige-t-on tous les dix ans à dépenser 600,000 à 700,000 fr. et quelquefois un peu plus ?
C'est sans doute parce qu'il est intéressant et utile de constater réellement quelle est la population et parce qu'on a toujours pensé qu'il n'y avait d'autre moyen d'y arriver que le recensement.
Or, aujourd'hui, si l'on nous dit que le recensement contient des erreurs, je demanderai pourquoi le faire, pourquoi dépenser tous les dix ans 700,000 ou 800,000 francs.
M. Muller. - Aussi, a-t-on posé sérieusement la question de savoir s'il fallait faire des recensements.
M. Malou, ministre des finances. - La loi a décidé qu'on en ferait. Et c'est en vertu de la loi qu'ont eu lieu les recensements de 1856 et de 1866.
Messieurs, il est impossible d'affirmer qu'il n'y a absolument aucune omission dans les recensements, mais ce qu'il faudrait prouver, c'est que les états de population sont plus près de la vérité que les recensements.
Or, je vais établir le contraire.
Ainsi qu'on nous l'a dit, il y a des locataires, des gardes civiques, des absents non déclarés. Je pourrais ajouter : il y a quelques domestiques qu'on dissimule.
Mais, messieurs, d'après les chiffres que je vais vous indiquer, vous verrez qu'il y a une cause beaucoup plus puissante d'erreur dans les états de population.
C'est pour saisir la population réelle qu'on a pris la date du 31 décembre. Les bulletins de recensement, qui contiennent des renseignements très nombreux, renferment une colonne pour indiquer ceux qui sont accidentellement absents.
J'ai fait dresser ce matin un état indiquant les résultats des recensements de 1856 et de 1866, pour toutes les communes de plus de 10,000 âmes.
La différence entre les états de population et les chiffres constatés au recensement est comme suit.
Je ne lirai pas tous les chiffres, mais prenons nos grandes villes et nos grandes communes :
A Anvers, je trouve, d'après le recensement, qu'il manquait 6,000 habitants sur 117,000.
A Bruxelles, on trouve que 31,000 manquent à l'appel.
A Gand, on en trouve 10,900 ; à Ixelles, 2,500, c'est une bagatelle ; à Molenbeek-Saint-Jean, 3,000 ; à Mons, 5,800 ; à Namur, 4,500 ; à Seraing, 3,900 sur une population de 23,300 habitants, d'après les registres de population, réduite à 19,400 d'après les résultats du recensement.
M. Muller. - C'est l'année du choléra.
M. Malou, ministre des finances. - C'est l'année du choléra, dit-on ; c'est très vrai, messieurs, mais je tiens ici le chiffre des naissances et des décès en 1866, et dans l'ensemble du royaume malgré le choléra...
M. Muller. - Un certain nombre d'habitants avaient fui et n'étaient pas revenus.
M. Malou, ministre des finances. - Mais au 31 décembre 1866, le choléra avait cessé son œuvre de destruction ; c'est alors que le recensement a été fait et cependant les chiffres restent tels que je les ai définis, Je dis donc que ces différences si considérables dans les grandes communes et dans les communes où il y a une forte population flottante ne peuvent s'expliquer par aucune des causes qu'on a indiquées tout à l'heure.
J'ai fait faire un relevé général et je trouve que, dans toutes les communes où il y a moins, la différence totale est de 9 1/4 p. c. du total de la population.
On me dit que le recensement a constaté, dans certaines villes, des erreurs en plus. Eh bien, parmi toutes ces communes, il n'y en a qu'une seule où l'erreur en plus dépasse trois chiffres, c'est-à-dire où il y a une erreur de plus de mille. Partout ailleurs ce sont des chiffres insignifiants et ceux-là sont parfaitement explicables.
Messieurs, ces faits me paraissent établir clairement que l'on prendrait un guide qui vous induirait en erreur si l'on adoptait les états de population comme exprimant la vérité de la situation à un moment donné.
Le recensement, au contraire, par les formalités dont il est entouré, par la manière et l'instantanéité de la constatation, est le seul mode de connaître quelle est réellement la population.
Messieurs, je parle un peu contrairement à mon rôle naturel, celui de ministre des finances. Car, en exagérant leur population, certaines communes tombent d'une classe dans une autre, pour laquelle il y aurait une aggravation d'impôt. La vérité doit aller avant le fisc, et certainement ceux qui invoquent les états de population parce qu'ils auraient un ou deux conseillers communaux de plus, ne les récuseront pas quand je serai forcé de les transférer à une autre classe pour les patentes ou la contribution personnelle. Je fais cette réserve comme ministre des finances pour rentrer dans mon rôle, puisque j'en suis un instant sorti.
Je résume ces observations en quelques mots : il est très probable que sur l'ensemble de la population du royaume, constatée par le recensement, il peut y avoir quelques omissions ; mais, la vérité est qu'à chaque (page 714) recensement, on constate ce fait que les exagérations de population portent sur les grandes villes, sur les localités populeuses, notamment sur celles dont la population est très flottante. Ainsi Seraing présente une situation tout à fait exceptionnelle ; Seraing sur la rive droite de la Meuse ; Jemeppe, Tilleur et d'autres agglomérations sur la rive gauche. Beaucoup d'habitants, sans avertir l'autorité, sans se faire inscrire, vont d'une de ces localités dans l'autre ou dans d'autres localités du bassin de Liège, et ils restent inscrits à Seraing. On comprend donc facilement que là il y ait des causes permanentes d'erreurs très fortes, et que la tenue des registres des populations, alors même qu'on voudrait la faire soigneusement, ne présente pas d'exactitude.
M. le président. - La parole est à M. Kervyn de Lettonie e.
M. Kervyn de Lettenhove. - Je la cède à M. Muller.
M. Muller. - Le gouvernement s'est étayé de la supériorité, au point de vue de l'exactitude, des recensements décennaux sur les états de population annuels.
Les motifs qu'il a donnés ne m'ont pas convaincu. Ainsi, lorsqu'on signale de grandes disproportions entre le recensement décennal qui a eu lieu en 1866, et les états de la population de 1865, il faut d'abord tenir compte du déficit qui a dû résulter à la fin de 1866, dans les communes qui ont subi l'invasion du choléra et qu'un assez grand nombre de familles avaient quittées sans y être rentrées avant le 31 décembre. De là une cause d'omissions dans les déclarations, indépendamment des réticences inspirées par la crainte de vexations fiscales ou autres.
Si j'ai bonne mémoire, les naissances n'ont excédé, en 1866, les décès que de 6,000, chiffre rond, ce qui confirme la situation tout à fait exceptionnelle que je viens de signaler. (Interruption.)
Le recensement décennal vous inspire pleine confiance ; mais comment se fait-il que, après chacun des deux recensements de 1856 et de 1866, après que les registres de la population eurent été rectifiés, conformément à ces recensements, comment se fait-il, dis-je, que les première, deuxième et troisièmes' années suivantes on constate un accroissement de population anomal incroyable, qui ne s'explique pas par l'excédant des naissances sur les décès et des immigrations sur les émigrations ? Ne résulte-t-il pas des omissions du recensement décennal ?
Ainsi, en 1867, on accuse 69 mille et des habitants de plus qu'en 1866.
L'excédant des naissances en 1867 a été de 50,000 à 51,000. Il y a eu un excédant d'immigrations sur les émigrations d'environ 2,000 et alors, si le recensement de 1866 est exact, comment la population a-t-elle pu obtenir 69,000 habitants de plus qu'en 1866, si ce n'est par la réparation d'une partie des omissions commises alors ?
J'admets qu'il doit y avoir des erreurs des deux côtés, dans l'un et l'autre mode de constatation. Mais M. le ministre de l'intérieur n'a pas répondu à l'objection que j'ai faite et que je reproduis : Est-il plus rationnel de prendre le recensement de 1866, sur lequel cinq ans ont passé, que le chiffre de la population de 1870 ? Le recensement de 1866 est-il plus rapproché de la vérité que le chiffre de 1870, alors que, depuis 1866, il y a une augmentation continue et successive qui doit atteindre aujourd'hui plus de 250,000 habitants ?
Puisque le gouvernement n'est pas lié, puisque M. le ministre de l'intérieur n'a pas, relativement aux conseils provinciaux et communaux, la même objection à présenter que son parti a faite dans le temps au sujet de la répartition des membres de la Chambre des représentants et du Sénat, pourquoi l'honorable ministre ne prend-il pas le chiffre qui doit nécessairement se rapprocher le plus de la vérité ?
Vous avez pris le recensement de 1866 ? Avec ce recensement, jusqu'à quelle époque cela vous conduira-t-il, pour que nous espérions obtenir une répartition ultérieure des conseillers communaux et des conseillers provinciaux ?
Pour les conseils provinciaux, on le fera quand le gouvernement et la Chambre le voudront, et cela ne sera pas de sitôt, chacun le sait.
Pour les conseils communaux, ce sera en 1884, puisque c'est au bout de douze ans que la loi communale prescrit la révision des classifications.
N'est-il pas, je le demande, plus rationnel, plus conforme à la raison, au bon sens et à l'équité, de décider que les états de population de 1870 serviront plutôt de base que le recensement de 1866, qui n'est plus qu'un document suranné quant à l'application ?
L'honorable M. Malou m'a dit : Mais cela ne changerait rien à la répartition des conseillers provinciaux ; on pourrait alors élever le chiffre diviseur pour certaines provinces.
Je déclare ne pas m'opposer à ce que, dans la répartition que vous feriez, vous augmentiez fie part ou d'antre votre diviseur. Vous l'avez déjà fait... (Interruption de M, le ministre des finances.)
Quand je dis « vous », j'entends parler de la Chambre ; cette confusion que vous me prêtez n'a rien, je pense, qui doive vous être désagréable.
Qu'on élève donc le diviseur, une grave objection n'en restera pas moins debout, et ce que l'on doit vouloir, c'est que la répartition entre les cantons d'une même province se fasse sur un pied d'égalité d'après leur population respective à l'époque où elle a lieu.
Je vous ai cité les cantons de Liège, de Bruxelles, d'Ixelles, de Molenbeek, de Gand, de Dixmude, de Menin, de Charleroi, de Boussu, comme ayant droit, selon toute probabilité, à un conseiller de plus, d'après la répartition qui serait faite d'après les états de population de 1870 ; il en est, à coup sûr, d'autres dans le même cas. Ce n'est donc pas une réponse plausible et concluante que de prétendre que cela ne changerait rien. En surélevant vos diviseurs, votre travail n'en devrait pas moins être modifié en plusieurs points.
Adoptez une règle égale pour tous, c'est mon vœu ; mais ne prenez pas comme base de votre répartition une population dont le chiffre n'est plus que mensonger aux yeux et de l'aveu de tous.
M. Kervyn de Lettenhove. - Je n'ai pas l'intention de m'occuper des questions de détail sur lesquelles s'est appesanti l'honorable préopinant.
Il me paraît qu'il y a dans ce débat une considération qui le domine : c'est qu'il faut avant tout rechercher l'égalité de la répartition dans la représentation des cantons aux conseils provinciaux.
Or, si le chiffre de la population doit être fixé par les autorités locales des cantons, plus ou moins éclairées, plus ou moins vigilantes dans l'exécution de ce travail, il est évident qu'on ne trouvera pas les mêmes garanties que celles que présente le recensement fait d'une manière uniforme sous les auspices de l'Etat, et entouré de conditions toutes spéciales d'exactitude.
Il dépendrait même, messieurs (et j'appelle sur ce point votre attention), de certaines autorités locales d'arriver, en grossissant les chiffres, à se donner dans le conseil provincial une part de représentation plus considérable que celle à laquelle elles auraient droit. S'il peut en être ainsi, il est évident que la justice, que l'égalité que nous avons en vue, ne seraient point atteintes.
J'ajouterai que la supériorité des garanties attachées au recensement est admise depuis si longtemps par le législateur que, lorsqu'il s'est occupé de l'élection législative, la plus importante de toutes, il a inscrit dans la loi du 2 juin 1856 une disposition formelle, en vertu de laquelle le recensement doit servir de base à la répartition des élus à désigner soit pour le Sénat, soit pour la Chambre des représentants.
Et lorsque, tout à l'heure, l'honorable M. Muller faisait allusion à un débat qui a eu lieu dans cette enceinte, il y a quelques années, relativement au nombre des représentants et des sénateurs, il me semble qu'il y avait là même un exemple que nous pouvons invoquer pour démontrer combien sont inexactes et incertaines les bases qu'on cherche dans les états de population.
En effet, messieurs, lorsque en 1866 on a pris pour base de la répartition du nombre des représentants et des sénateurs l'état de population du 31 décembre 1865, on est arrivé à cette affirmation, en ce qui touche notamment l'arrondissement de Bruxelles, que la population s'élevait à 523,000 habitants.
Or, l'année suivante, le recensement démontrait que la population n'était que de 480,000 habitants, c'est-à-dire qu'il y avait une erreur de 43,000 habitants.
Et ce qui est bien plus étrange encore, c'est que lorsque en 1867 on faisait un nouvel état de population, état qui reposait sur les mêmes bases que celui de 1865, on ne constatait plus qu'une population de 496,000 habitants, c'est-à-dire une population inférieure d'environ 27,000 habitants à la population constatée le 31 décembre 1865.
Il convient d'ajouter que c'est d'après cet état inexact, deux fois condamné, et par le recensement et par l'état de population de 1867, qu'a eu lieu la nouvelle répartition des représentants et des sénateurs de l'arrondissement de Bruxelles, répartition en vertu de laquelle un sénateur et un représentant de la capitale sont venus siéger dans l'enceinte législative, au mépris d'une disposition constitutionnelle formelle qui porte que les chiffres de 40,000 et de 80,000 âmes déterminent les bases de la représentation nationale.
M. Pirmez. - Ce fait a été parfaitement expliqué dans la discussion.
(page 715) M. Malou, ministre des finances. - Le fait sur lequel se base l'argument principal de l'honorable M. Muller n'est pas exact.
Ainsi, voici ce qui en est : la progression moyenne de la population étant, par exemple, de 42,000, on trouve que cette progression est de 65 à 67,000 par année d'après les états de population, et c'est le recensement qui vient rétablir les choses comme elles sont.
Voilà ce qui résulte des états que j'ai lus tout à l'heure et du chiffre même que l'honorable M. Muller vient de produire.
Ainsi, l'honorable membre nous dit : Comment expliquez-vous qu'après chaque recensement il y ait une augmentation très considérable ? En 1867 il y a eu une augmentation de 69,000 et l'excédant des naissances sur les décès n'était que de 57.
M. Muller. - De 51.
M. Malou, ministre des finances. - Soit ! cela fait donc 17,000. Eh bien, c'est là l'erreur que le recensement peut avoir donnée et rien de plus.
Et, en effet, je prends les années antérieures ; je prends les années 1867 et 1868 comparées et je trouve 63,830 comme augmentation de population.
Ainsi, entre les années antérieures au recensement et l'année qui a immédiatement suivi, il n'y a qu'une différence de progression de 6,000 à peu près.
L'argument, d'après cela, me semble manquer de base. (Interruption.)
Vous ne saisissez pas et je comprends qu'il soit difficile de saisir de prime abord lorsqu'on discute sur des chiffres.
Vous dites : Si le recensement ne contenait pas d'erreurs en moins, comment expliqueriez-vous l'immense accroissement de population qui se manifeste dans chaque année qui suit le recensement ?
Je prouve qu'en 1867 l'augmentation accusée par les états de population est sensiblement la même que celle qui existait avant le recensement.
Il me semble que c'est répondre d'une manière bien nette au fait produit.
M. Muller. - Si le fait était exact.
M. Malou, ministre des finances. - D'après les chiffres officiels de la population, il y avait, au recensement de 1860, 4,827,000 âmes (je néglige les centaines). En 1868, il y en avait 4,961,800 et en 1867 4,897,000. Différence 63,800
Ainsi, la progression constatée en 1867, d'après le recensement, est sensiblement la même que celle constatée dans l'année antérieure au recensement.
J'espère, messieurs, avoir fait saisir cette fois la réponse que j'oppose à l'argument de l'honorable M. Muller.
M. Lelièvre. - Je crois devoir proposer une observation qui me paraît mériter l'attention du gouvernement.
Celui-ci propose de continuer les députations permanentes fonctionnant actuellement jusqu'à l'installation des députations élues par les nouveaux conseils.
Pour moi, j'estime que les députations actuelles ne doivent conserver leurs fonctions que jusqu'à l'installation des nouveaux conseils.
En effet, il peut arriver que des membres des députations actuelles ne soient plus réélus comme membres des conseils futurs. Or, il est impossible, ce me semble, que ces membres siègent encore après l'installation des nouveaux conseils dont ils ne peuvent être les délégués.
Du reste, le principe que je veux faire prévaloir a été adopté dans le projet de loi relatif à la dissolution des conseils communaux. En effet, les bourgmestres et échevins ne continuent leurs fonctions que jusqu'à l'époque de l'installation des nouveaux conseils.
Par les mêmes motifs, il est évident, à mon avis, que les membres actuels des députations sont sans qualité pour siéger, du moment que les nouveaux conseils provinciaux auront été installés. Il y a donc lieu de faire subir au projet une modification en ce sens.
M. Rogier. - Je demanderai si M. le ministre de l'intérieur ne pourrait pas fournir, pour les conseils provinciaux, un tableau analogue à celui qui nous a été distribué, ce matin même, pour la classification des communes en prenant pour base, la population constatée par le recensement en 1866 et par les registres de l'état civil en 1870.
Ce serait très court.
M. Malou, ministre des finances. - Ce serait très long, au contraire ; il faudrait faire le relevé de la population de toutes les communes.
M. Rogier. - Pourquoi de toutes les communes ? Il suffit de faire le relevé de la population de chaque canton. En tous cas je demande à M. le ministre des finances s'il entre dans les vues du gouvernement de s'en tenir strictement aux résultats du recensement de 1866 et je le demande surtout en ce qui concerne la composition des conseils communaux.
Quant à moi, je ne saurais considérer comme juste ni rationnel le fait de s'en rapporter exclusivement à la population telle qu'elle a été constatée par le recensement en 1866. Cinq années se sont écoulées depuis lors ; il s'est opéré, dans cette période, des changements notables dans la population d'un assez grand nombre de communes, et il est impossible, selon moi, de ne pas tenir compte de ces changements.
Le recensement de 1866 ne représente plus exactement aujourd'hui la population réelle du pays : il est des communes qui, par l'augmentation de leur population depuis 1866, ont droit à une augmentation de représentation et peuvent même la réclamer aux termes de la loi communale, qui déclare (article 29) que la classification des communes s'établit sur les états de population.
Voilà pour les communes qui ont droit à une augmentation. Que dirai-je, messieurs, des communes qui seraient frappées d'une sorte de déchéance si l'on s'en rapporte au recensement de 1866 ? Ainsi la commune de Tournai, qui a aujourd'hui une population bien supérieure à celle de 1866, la ville de Tournai, si l'on s'en rapporte à sa population telle qu'elle résulte du dernier recensement, se verra privée de deux conseillers, alors que sa population, constatée au 31 décembre dernier, dépasse de beaucoup le chiffre voulu pour avoir le nombre de conseillers qui lui est attribué aujourd'hui.
Il serait souverainement injuste de faire descendre certaines communes de la position qu'elles occupent, en s'en référant à une population qui remonte à 1866, et alors que, depuis cette année, leur population s'est accrue dans une proportion considérable. A toutes les époques, MM. les ministres, il a toujours été tenu compte des augmentations de population qui ont été constatées officiellement après le recensement.
J'aime à croire que MM. les ministres voudront suivre les précédents et ne pas frapper de déchéance les communes qui ont le droit tout au moins de conserver leurs conseillers ; qu'ils tiendront compte, en un mot, dans la répartition qui doit se faire, tant pour les provinces que pour les communes, de l'augmentation de population qui s'est produite depuis 1866.
J'insiste donc pour qu'il soit fourni pour les provinces un tableau analogue à celui qui nous a été remis, aujourd'hui même, pour les communes.
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - L'honorable M. Rogier demande que je lui fournisse un tableau de la population des divers cantons. Je puis le faire, mais ce tableau est long ; il serait difficilement imprimé pour la séance de demain.
L'honorable M. Rogier a appelé également l'attention du gouvernement sur les communes qui verraient réduire le nombre des conseillers communaux actuellement existant, par suite d'une diminution de la population, en suivant le recensement de 1866, alors que les états de population de 1870 établissent une augmentation du nombre des habitants.
J'espère pouvoir donner à l'honorable membre une réponse qui le satisfera. Il n'y a que cinq ou six communes qui se trouvent dans ce cas.
Le gouvernement consent à ce que ces communes conservent le rang qu'elles occupent aujourd'hui.
Ainsi, la ville de Tournai et la ville de Namur, restant dans la classe qu'elles occupent actuellement, conserveront, la première, vingt et un conseillers, et la seconde, dix-neuf.
Nous leur appliquerons le principe proposé pour la répartition des conseillers provinciaux dans les cantons où le nombre des conseillers devrait diminuer si l'on s'en tenait à la rigueur des chiffres.
Nous respecterions, pour ces cinq ou six communes, les positions acquises.
Cette déclaration répondra, je n'en doute pas, à l'amendement proposé par MM. Rogier, Crombez et Bara, dont M. le président a donné lecture au commencement de la séance.
M. Muller. - Je demande à M. le ministre de l'intérieur s'il ne pourrait pas fournir les tableaux pour les provinces. Il me semble que cela n'imposerait pas une grande besogne à ses bureaux,
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - Je suis prêt à les déposer, mais je crains qu'ils ne soient point imprimés.
M. Boulenger. - Les exposés de la situation des provinces donnent tous l'état de la population au 31 décembre 1870.
M. Delcour, ministre de l'intérieur. -.Messieurs, la population au 31 décembre 1870 est connue ; j'ai sous la main le tableau de cette (page 716) population, ainsi que la répartition des membres des conseils provinciaux faite d'après cette base. Je puis l'indiquer immédiatement à la Chambre. Comme le tableau est long, au lieu de le faire imprimer, je le déposerai sur le bureau, où chacun de vous, messieurs, pourra en prendre connaissance. Ce dépôt ne donnera lieu à aucun retard, et la Chambre pourra reprendre la discussion du projet de loi dans la séance de demain. Nos travaux continueront sans interruption.
M. Muller. - Je ne veux, en aucune façon, enrayer les travaux de la Chambre. Je dis, seulement, qu'ayant ces tableaux à sa disposition, il serait facile à M. le ministre de signaler les cantons qui obtiendraient, dans le chiffre de leurs conseillers, en prenant pour base les états de population de 1870, une augmentation que ne leur accorde pas le tableau annexé au projet de loi.
M. Delcour, ministre de l'intérieur. - Comme j'ai eu l'honneur de le dire tout à l'heure, il sera impossible d'imprimer le tableau en entier pour demain ; mais si la Chambre veut se contenter d'un tableau de comparaison, à l'instar de celui qui a été distribué ce matin pour la classification des communes, je tâcherai qu'il vous soit distribué demain.
- De toutes parts. - Très bien !
M. Delaet. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre le rapport de la section centrale, qui a été chargée d'examiner le projet de loi ouvrant un crédit de 750,000 francs au département de la guerre, pour l'amélioration du pain de munition.
- Impression, distribution et mise à la suite de l'ordre du jour.
- Des membres. - A demain !
M. le président. - L'ordre du jour de demain est fixé ainsi qu'il suit :
1° Vote définitif des titres VI et VII du livre premier du code de commerce ;
2° Dissolution et nouvelle répartition des conseils provinciaux ;
3° Révision des états de classification des communes et dissolution des conseils communaux ;
4° Révision du code de commerce (le litre de la Lettre de change et les autres titres qui ont déjà été portés à l'ordre du jour).
M. Van Humbeeck. - M. le ministre de la justice a annoncé qu'il ne pourrait probablement pas être présent à la séance ; je crois donc qu'il serait inutile de commencer demain le titre de la Lettre de change. II vaudrait mieux prendre les premiers titres du code de commerce.
M. le président. - J'ai indiqué l'ordre du jour tel qu'il a été primitivement fixé, mais il n'est pas à craindre que nous arrivions demain au titre de la Lettre de change.
- La séance est levée à 5 heures.