(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1871-1872)
(Présidence de M. Thibaut.)
(page 645) M. Wouters fait l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. Hagemans lit le procès-verbal de la précédente séance ; la rédaction en est approuvée.
M. Wouters présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« M. Le Hardy de Beaulieu demande un congé d'un jour. »
- Accordé.
« M. Hermant demande un congé de quinze jours. »
- Accordé.
« Le sieur Dubus transmet l'adhésion des meuniers de la Flandre occidentale à la pétition de la meunerie belge et copie de la réclamation adressée a M. le ministre des finances par 60 meuniers de la province de Liège. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la libre entrée des denrées alimentaires.
« Le sieur Th. Ivanoff, garde-convoi au chemin de fer de l'Etat, né à Douboro (Russie), demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« Les sieurs Paris-Paris, président et Becquef, secrétaire de l'association des brasseurs belges, adressent vingt pétitions de brasseurs contre le projet de loi relatif à l'accise sur la bière. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi.
« Des secrétaires communaux dans le Brabant proposent des mesures pour améliorer la position des secrétaires communaux. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur des pétitions identiques.
« Des industriels à Sauvenière demandent l'établissement d'une station sur le chemin de fer de Tamines à Landen, au lieu dit : Laid-Culot, à Sauvenière. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur une pétition relative au même objet.
« La chambre de commerce de Verviers adresse 125 exemplaires imprimés de sa lettre à M. le ministre des finances touchant la Banque Nationale et qui forme annexe à son rapport général sur l'année 1870. »
- Distribution et dépôt.
« M. Armand Dauby adresse à la Chambre un exemplaire de la deuxième partie de son ouvrage intitulé : Les Bienfaits de l'instruction. »
- Dépôt à la bibliothèque.
M. le président. - Les chiffres ont été définitivement établis de commun accord entre M. le ministre et la section centrale. La discussion s'ouvre donc sur le tableau joint au rapport de la section centrale.
« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement du personnel des bureaux : fr. 158,200. »
- Adopté.
« Art. 3. Matériel : fr. 36,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Fonds secrets : fr. 13,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Achat de décorations de l'Ordre de Léopold, sans que l'on puisse augmenter ce chiffre par des imputations sur d'autres articles : fr. 10,000. »
- Adopté.
« Art. 6. Autriche-Hongrie : fr. 71,000. »
- Adopté.
« Art. 6bis. Bavière, Wurtemberg, Bade et Hesse Grand-Ducale ; charge extraordinaire : fr. 10,833 30. »
- Adopté.
« Art. 7. Brésil : fr. 30,000. »
- Adopté.
« Art. 8. Chine et Japon : fr. 46,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Danemark, Suède et Norvège : fr. 20,000. »
- Adopté.
« Art. 10. Espagne : fr. 30,000. »
- Adopté.
« Art. 11. Etats-Unis : fr. 30,000. »
- Adopté.
« Art. 12. France : fr. 71,000. »
M. Bouvier. - Messieurs, je ne viens pas. m'opposer à l'adoption du chiffre indiqué au budget pour notre mission diplomatique en France.
Je désirerais que l'honorable ministre des affaires étrangères appelât l'attention de notre ministre près de la république française sur une question qui intéresse au plus haut degré notre agriculture. Je veux faire allusion à la peste bovine. Tout récemment encore, ce redoutable fléau a éclaté de nouveau à Thielt, localité qui avait déjà été si cruellement éprouvée.
On se plaint généralement en Belgique que le gouvernement français ne prend pas de mesures assez énergiques pour combattre le fléau,
Je ne fais pas de reproche à notre cabinet ; le ministre de l'intérieur prend toutes les dispositions nécessaires pour éloigner de notre pays la peste bovine, mais en France il y a beaucoup de relâchement dans l'application des mesures administratives destinées à combattre cette funeste maladie.
En Belgique, les agents de la douane concourent avec la force militaire pour établir un rigoureux cordon sanitaire sur nos frontières.
En France, malheureusement, la force armée ne vient pas en aide aux agents administratifs. Ainsi voilà plus de seize mois que la peste bovine y continue à exercer ses ravages. Il est évident que notre pays souffre énormément de cet état de choses en l'exposant à des sacrifices pécuniaires considérables. J'aime à croire que notre ministre à Paris, l'honorable M. Beyens, fera tous ses efforts pour faire cesser un état si préjudiciable à notre agriculture.
Je vois avec plaisir au banc des ministres un homme qui jouit d'une grande autorité dans la matière agricole ; il doit savoir mieux que moi que le bétail constitue la plus grande richesse de nos populations rurales ; que le bétail c'est le fumier et que le fumier ce sont des récoltes abondantes. En présence de ce qui existe en France, de l'espèce d'apathie qu'on y rencontre pour combattre le fléau qui sera une véritable ruine pour son agriculture, j'appelle toute la vigilance de notre ministre près d'un (page 646) gouvernement ami pour venir en aide à cette grande industrie dont je soutiens en ce moment les intérêts. Je suis convaincu que l’honorable ministre des affaires étrangères secondera ces louables efforts.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Messieurs, l'attention du gouvernement a été appelée depuis longtemps, depuis l'invasion de la peste bovine en France, sur les devoirs qu'il a à remplir.
L'honorable M. Vandenpeereboom s'est, entre autres, chargé de ce soin dans une interpellation adressée au gouvernement il y a quelque temps. Antérieurement à son interpellation, le gouvernement s'était adressé au gouvernement français pour lui signaler certains abus qui existaient en France.
Nous avons donc chargé notre envoyé à Paris d'attirer l'attention toute spéciale du gouvernement français sur les faits dont l'honorable M. Bouvier nous entretient à son tour. Depuis lors, de nouvelles instances ont été faites.
Le gouvernement français fait tout ce qu'il peut pour parer chez lui aux dangers qui le menacent ; mais les autorités locales ne le secondent pas autant qu'elles devraient le faire.
C'est le point sur lequel, tout dernièrement, le gouvernement a encore appelé l'attention du gouvernement français.
Il compte persévérer dans cette voie et continuer à insister pour que, dans tout le cercle qui environne nos frontières, toutes les mesures possibles soient prises en vue d'empêcher la propagation de l'épidémie.
Mais, l'honorable M. Bouvier le comprend, il n'est pas donné au gouvernement d'aller plus loin et de prendre des mesures en France.
M. Bouvier. - Evidemment.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Nous ne pouvons qu'attirer l'attention du gouvernement français sur ce grave objet. Nous n'y avons pas failli et nous n'y faillirons pas à l'avenir.
M. Bouvier. - Je n'ai pas voulu incriminer le gouvernement. En commençant mon discours, j'ai déclaré que M. le ministre de l'intérieur faisait tout ce qu'il était humainement possible de faire pour éloigner la peste de nos frontières.
Je sais très bien que nous n'avons pas juridiction en France. Mais nous disons que nous avons un ministre qui ne peut pas avoir de préoccupations politiques bien grandes, puisque nous sommes un Etat neutre qui n'a d'autre souci que de vivre en paix avec les nations voisines.
Il a principalement pour devoir de soutenir les grands intérêts commerciaux et industriels du pays. Eh bien, je le répète encore, que notre agent diplomatique fasse tous ses efforts pour faire comprendre au gouvernement français que nous avons le plus grand intérêt à éloigner la peste bovine de nos frontières. Et si le gouvernement obtient quelque bon résultat à la suite de ses démarches, qu'il veuille bien le faire connaître par une note insérée au Moniteur, afin de rassurer ainsi nos populations agricoles.
- L'article est adopté.
« Art. 13. Grande-Bretagne : fr. 71,000. »
- Adopté.
« Art. 14. Italie : fr. 46,500. »
M. Rogier. - Messieurs, en lisant ce matin, aux Annales parlementaires, le compte rendu de la séance d'hier, j'y ai remarqué, dans le discours de l'honorable M. Orts, une phrase que je n'ai pas entendue. Je regrette que l'honorable M. Orts ne soit pas présent ; il aurait pu me répondre. J'ai consulté quelques-uns de mes collègues, auxquels cette phrase a également échappé.
Il s'agit, messieurs, de l'interprétation du vote qui a eu lieu sur l'article relatif à la légation de Rome.
D'après le discours de l'honorable M. Orts, le vote affirmatif, le vote de ceux qui se sont prononcés pour le maintien d'un ministre auprès du saint-siège, ce vote aurait été une protestation contre l'unité italienne.
Après avoir dit qu'il fallait que l'opinion de chacun pût être nette, il a divisé les votants en deux catégories : ceux qui voteraient « non » seraient pour le maintien de l'unité italienne ; ceux qui voteraient « oui » protesteraient contre cette unité.
Quant à moi, je ne puis, en aucune façon, accepter une pareille interprétation, et je crois que ceux de mes honorables amis qui ont voté comme moi ont compris leur vote comme j'ai compris le mien.
J'ai fait connaître loyalement les raisons qui m'ont déterminé, dans les circonstances actuelles, a voter pour le maintien de notre ministre près du saint-siège. Ceux qui ont voulu me comprendre ont trouvé mes explications suffisantes.
Quant à protester contre l'unité italienne, moi qui me fais honneur d'avoir concouru, comme ministre des affaires étrangères, à la reconnaissance du royaume d'Italie, vous comprendrez que cela n’a pu un seul instant entrer dans ma pensée.
Je ne retire rien de mon vote ; je le maintiens dans toute son intégrité. Mais je proteste contre la portée qu'on pourrait, après coup, donner à ce vote. Je ne veux pas demander si sur les bancs de la droite, en votant pour le maintien du ministre belge près du saint-siège, on a voulu protester contre l'unité italienne. Mais je suis en droit de demander aux membres du cabinet s'ils acceptent le caractère que l'honorable M. Orts aurait voulu imprimer au vote. Quant à moi, je proteste contre une pareille interprétation. Le maintien du ministre belge près du saint-siège à Rome n'est, sous aucun rapport, à mes yeux une protestation contre l'unité italienne. Voilà ce que je tenais à déclarer de la manière la plus absolue.
M. de Theux, membre du conseil des ministres. - Messieurs, quand j'ai pris hier la parole après le discours de l'honorable M. Orts, j'ai dit que l'Italie pouvait faire ce qui lui convenait, et que nous, nous faisions ce qui nous convenait à nous ; mais je déclare qu'aucun membre du cabinet n'a entendu faire une protestation.
M. Rogier. - Est-ce que les ministres ne s'expliquent pas sur la portée du vote ?
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Il résulte clairement des discours que nous avons prononcés qu'il n'y a eu de notre part aucune protestation contre l'Italie.
M. De Lehaye. - C'est évident.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Nous nous sommes trouvés devant une situation de fait et nous n'avons rien eu à approuver ni à improuver.
J'espère que cette explication satisfera l'honorable M. Rogier.
- L'article est adopté.
« Art. 15. Pays-Bas : fr. 46,500. »
M. de Clercq. - Pas plus que M. Bouvier tout à l'heure, je ne veux m'élever contre le chiffre en discussion en ce moment. C'est également une question qui intéresse l'agriculture qui m'a engagé à prendre la parole.
Je voudrais appeler un moment l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et de la Chambre sur une question qui a été décidée en principe il y a déjà deux ans.
La Chambre se rappellera qu'à cette époque elle a fixé par son vote le travail d'une commission internationale qui avait été appelée à tracer les limites entre la Flandre occidentale et la Zélande. Ce travail ayant été consacré par un vote, il restait un second travail à exécuter ; je veux parler de l'étude de l'endiguement de l'ancien bras de mer qui pouvait être converti en terres arables de première qualité.
Ce travail avait été également confié à une commission internationale ; une fois achevé, il fut soumis aux deux gouvernements ; le gouvernement de notre pays y apporta quelques changements adoptés par le gouvernement hollandais qui même a déjà, paraît-il, voté une somme suffisante pour intervenir dans les frais d'endiguement.
Je demande à l'honorable ministre des affaires étrangères de vouloir bien se mettre en rapport à cet égard avec son honorable collègue, M. le ministre des travaux publics, afin que l'on nous propose dans le plus bref délai possible un crédit suffisant pour arriver à l'exécution de ce grand travail. En effet, il s'agit de 400 à 500 hectares. Remarquez, messieurs, que c'est principalement la Belgique qui y est intéressée. La plus grande partie de cet ancien bras de mer lui est attribuée et c'est elle aussi qui sera chargée d'exécuter le travail ; seulement le gouvernement hollandais interviendra dans les frais au prorata de ses intérêts. J'ai une appréhension et je tiens à la communiquer à la Chambre. Je crains que si nous ne votons pas sans retard le crédit, nous ne perdions un temps précieux.
Or, le temps qui nous reste est à peine suffisant pour achever ce travail dans le courant de cette session. Je tiens à vous citer à cet égard un exemple qui prouvera combien avec vérité en cette matière on peut appliquer ce dicton : time is money. A quelque distance de là, un propriétaire avait également à endiguer un polder. On lui avait dit : Mais vous ne pourrez pas finir en temps utile. Lui ne se le tint pas pour dit. Il prit jusqu'à mille ouvriers ; il acheva dans de bonnes conditions et en temps opportun le travail qu'il avait entrepris. Il sema du colza et dès la première année il en récolta pour une somme de 185,000 francs. C'était un produit et de l'argent trouvés puisqu'on gagnait une année.
Vous voyez, messieurs, combien l'agriculture a intérêt à voir achever ce travail dans un bref délai. Il y a encore un autre intérêt en cause : c'est celui de la santé publique.
Combien de fois la Chambre n'a-t-elle pas retenti des plaintes qui s'élevaient contre les causes des fièvres paludéennes !
(page 647) Les émanations de ces eaux marécageuses viendront nécessairement à disparaître, en même temps que le sol se trouvera fertilisé.
Je dois ajouter un mot pour vous convaincre de l’utilité que nous avons à achever promptement ce travail. Je veux parler de la question de propriété. Au sujet de la question de propriété, il existe des contestations ; dès que ces terrains seront rendus à l'agriculture, acquérant une véritable valeur, la question de propriété fera à son tour un grand pas : l'intérêt est le mobile des actions. La mise en valeur excitera naturellement cet intérêt.
Cette question de propriété ne doit pas être discutée ici ; elle a été, à certains égards, tranchée, en Hollande, en faveur du gouvernement de ce pays sur des contestations de même nature.
Mais, je le répète, ce n'est pas ici le lieu pour discuter ces questions ; c'est toutefois un troisième intérêt qui est également en jeu ; et à ces différents égards, je crois pouvoir recommander en toute confiance cette importante affaire à M. le ministre des relations étrangères, en le priant de conférer avec son honorable collègue des travaux publics, afin d'aboutir très prochainement à un résultat on ne peut plus désirable pour les deux pays.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - En1869, un projet de délimitation entre les Pays-Bas et la Belgique a été conçu en vue de déterminer exactement à qui devait revenir certaine partie du polder de Zwyndrecht. Une convention intervint à cet effet. La commission qui fut ensuite nommée pour procéder à l'endiguement a fourni son travail. Le projet qu'elle a élaboré a donné lieu, de la part de.la Belgique, à quelques observations qui ont été accueillies par le gouvernement des Pays-Bas. Le projet définitif nous a été communiqué. Aujourd'hui il est soumis au département des travaux publics et j'attends sa décision pour procéder à la ratification et faire mettre immédiatement la main à l'œuvre. La solution de cette affaire ne dépend donc pas exclusivement de mon département ; je réitérerai mes instances auprès de mon collègue des travaux publics afin d'arriver a une solution aussi prompte que possible.
- L'article 15 est adopté.
« Art. 16. Portugal : fr. 20,000. »
- Adopté.
« Art. 17. Prusse et empire d'Allemagne : fr. 71,000. »
- Adopté.
- L'article 18, Rome, 26,000 francs, a été adopté hier.
Art. 19. Russie : fr. 71,000. »
- Adopté.
« Art. 20. Turquie : fr. 52,970. »
M. d'Hane-Steenhuyse. - La Chambre remarquera que, parmi les fonctionnaires belges résidant à Constantinople, il se trouve un consul général chancelier. C'est le seul consul général, du reste, qui fasse partie d'une légation.
Je fais mes réserves au sujet du traitement de cet agent, parce que je me propose de formuler tout à l'heure une proposition relativement aux traitements de tous les consuls, quand nous en viendrons au chapitre III.
Si l'augmentation que j'ai l'intention de proposer à ce chapitre, pour les consuls, était adoptée par la Chambre, le consul général de Constantinople y serait naturellement compris.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Messieurs, je ne dirai qu'un mot en réponse à l'honorable M. d'Hane, qui me prévient qu'il a des développements plus considérables à donner au chapitre des Consulats.
Il y a effectivement une question relative, à notre consul général à Constantinople, laquelle motive une explication que je donnerai lorsque l'honorable M. d'Hane aura fait connaître sa proposition.
- Adopté.
« Art. 21. Indemnités à quelques secrétaires et attachés de légation : fr. 27,000. »
M. Lefebvre. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi portant dissolution des conseils communaux et révision de la classification des communes.
- Impression et distribution et mise à l'ordre du jour après le projet de loi portant dissolution et nouvelle répartition des conseils provinciaux.
« Art. 22-. Traitements des agents consulaire et indemnités à quelques agents non rétribués : fr. 254,000. »
M. d'Hane-Steenhuyse. - Messieurs, les membres de cette Chambre qui y siègent depuis plusieurs années se rappelleront que ce n’est point pour la première fois que je prends la parole dans le but de défendre les intérêts de nos consuls à l’étranger.
Depuis cette époque, je le reconnais, les différents ministres qui se sont succédé au ministère des affaires étrangères ont augmenté quelque peu les traitements de ces utiles fonctionnaires ; mais, je dois le déclarer immédiatement, cette augmentation est réellement illusoire, et je pense que nous devons, dans ce moment, et plus que jamais, prendre une décision formelle et donner à ces agents le rang qui leur convient et qu'il importe de leur donner, au point de vue des relations commerciales de la Belgique avec les pays étrangers.
A cette occasion, messieurs, je me suis étonné aussi de voir qu'en Belgique il n'y eût pas un ministère spécial s'occupant de commerce, d'agriculture, d'industrie et de navigation.
Je disais, en 1869, que ce serait là, évidemment, l'une des administrations les plus importantes du pays.
Voici, messieurs, comment je m'exprimais à cet égard :
« Je me suis souvent demandé pourquoi, dans un pays neutre comme le nôtre, dont l'existence doit être entièrement, et je dirai même exclusivement, consacrée à l'industrie et au commerce, il n'existe pas de ministère de l'agriculture et du commerce ? Aujourd'hui les ministres de l'intérieur et des affaires étrangères ont, chacun dans son département, quelques bureaux qui s'occupent de ces branches importantes de la prospérité publique, alors qu'il faudrait les réunir dans une seule main ; de cette manière, il y aurait unité d'action, et le ministre de l'agriculture et du commerce aurait certes à diriger l'une des administrations les plus importantes, sinon la plus importante de toutes.
« Le système actuel est défectueux, parce qu'il ne permet pas de combiner, avantageusement pour le pays, ces importants rouages dont le jeu, soumis à une direction unique, aurait pour la Belgique les plus heureux résultats. Je voudrais voir le titulaire du département des affaires étrangères dirigeant en même temps l'agriculture, l'industrie, le commerce et la navigation ; ce fonctionnaire aurait ainsi à surveiller, en les combinant, les divers éléments de la prospérité, publique matérielle ; il favoriserait à la fois la production à tous les points de vue, et il préparerait au loin des débouchés où pourraient s'écouler nos produits ; le travail national à tous les degrés et sous toutes les formes aurait ainsi la régularité et l'unité qui lui font défaut aujourd'hui. »
Je ne m'appesantirai pas, messieurs, sur cette question, parce qu'il n'y a point pour elle malheureusement de solution immédiate à lui donner ; je me borne à l'indiquer de nouveau à la Chambre et je reprends la question des consulats.
Dans le discours que j'ai prononcé en 1869, messieurs (et j'engage beaucoup les membres qui tiennent à se mettre au courant de nos relations extérieures à le relire), dans ce discours, dis-je, j'ai fait ressortir longuement l'importance que doivent avoir nos consuls à l'étranger, la nécessité d'augmenter leur traitement et la nécessité aussi d'avoir autant que possible des consuls belges rétribués.
J'ai expliqué alors pourquoi cette nécessité existe, et m'appuyant de l'autorité des auteurs les plus considérables en ces matières, j'ai prouvé qu'il était indispensable que le pays fût représenté autant que possible, à l'étranger, par des nationaux au lieu d'avoir, en grande partie, des consuls étrangers eux-mêmes à la Belgique.
Il est un fait évident, je le reconnais, c'est que la Belgique ne peut pas grever son budget des affaires étrangères au point d'avoir des consuls rétribués, partout où elle possède aujourd'hui des agents consulaires. Mais je pense qu'il y a beaucoup à faire, et que, dans les principaux centres commerciaux, tant en Europe que dans les autres parties du monde, il faut des consuls belges rétribués ; je dis, de plus, que pour atteindre ce but il faut augmenter le budget des affaires étrangères d'une somme assez considérable.
Eh bien, messieurs, franchement, pour ceux qui ont voyagé, pour ceux qui savent combien, dans les pays transatlantiques, dans les Indes, en Australie, partout au delà des mers, la vie est chère et combien il est difficile pour nos fonctionnaires de se tenir à la hauteur de leurs collègues dans ces différents pays ; pour ceux-là, dis-je, il est évident que les traitements qu'ont aujourd’hui nos consuls et nos ennuis généraux sont, pardonnez-moi le mot, parfaitement ridicules.
Ainsi, le budget porte qu’il y aura des agents, consuls ou consuls généraux, en Australie, dans l’Inde anglaise, en Perse, dans la Californie, à la Havane, dans la Valachie, à la Nouvelle-Orléans, au Chili, en (page 648) Egypte, dans le Maroc, en Algérie, et puis un agent à Cologne ; or, comment la Belgique paye-t-elle ces fonctionnaires ?
En Australie, elle donne à son consul 18,000 francs ; et remarquez, messieurs, que nous n'avons dans tous ces pays qu'un seul agent, tandis que les autres puissances que je vais citer en ont plusieurs. En Australie, l'un des consuls français, qui se trouve où réside le nôtre, à 35,000 francs.
Dans l'Inde anglaise, où la vie est d'une cherté excessive, notre agent a encore 18,000 francs. L'agent français a 55,000 francs.
En Perse, la France dépense pour ses agences 72,000 francs ; un seul des consuls anglais a 39,000 francs. Notre consul a toujours 18,000 francs.
En Californie, l'agent français a 50,000 francs ; l'agent anglais, 40,000 francs ; le nôtre, 18,000 francs.
A la Havane, la France donne 40,000 francs ; l'Angleterre, 30,000 fr. ; la Belgique, 18,000.
Dans la Valachie, la France dépense 40,000 francs ; l'Angleterre, 37,000 et la Belgique, 14,000 francs.
A la Nouvelle-Orléans, 30,000 francs pour la France ; 15,000 francs pour la Belgique ; l'Angleterre, elle, dépense au delà de 250,000 francs pour ses agents aux Etats-Unis.
Au Chili, 35,000 francs pour la France ; 36,250 francs pour l'Angleterre et 15,000 pour Ia Belgique.
La France alloue 45,000 francs à son agent à Alexandrie ; l'Angleterre, 65,000 et la Belgique, 15,000.
Au Maroc, l'agent français reçoit 32,000 francs ; l'Anglais, 40,000 et le Belge, 9,000.
A Alger, notre consul a 8,000 francs, alors que le consul anglais reçoit 20,385 francs !
Eh bien, messieurs, il est vraiment (permettez-moi le mot), il est vraiment pitoyable d'envoyer des agents à l'étranger avec de pareils traitements, et je ne m'étonne que d'une chose, c'est que le gouvernement puisse encore en trouver.
J'avoue franchement que je ne voudrais pas représenter la Belgique dans un de ces pays, avec le traitement que le gouvernement donne à ses agents. Non seulement, il est impossible d'y représenter dignement notre pays, mais il est même impossible d'y vivre, à moins que l'agent n'y pourvoie au moyen de sa fortune personnelle. Mais que doivent faire alors ceux qui n'ont point de fortune ? Ils doivent y mourir de faim !
Pourquoi envoyons-nous des agents à l'étranger ? C'est non seulement pour y défendre nos nationaux, pour régler les différends qui peuvent surgir entre ceux-ci, mais c'est aussi afin que, par leur influence, nos consuls parviennent à nous procurer des relations plus directes, plus suivies, plus sérieuses ; or, je le répète, ces agents n'ayant qu'à peine de quoi vivre, il leur est impossible de représenter efficacement leur pays et d'acquérir l'influence qu'ils doivent exercer.
Je ne veux pas refaire le discours que j'ai fait dans le temps sur ce sujet, mais je prendrai cette fois une. conclusion ; aussi ai-je formulé une proposition ainsi conçue et que je dépose sur le bureau de la Chambre :
« CHAPITRE III. Consulats
« Amendement à l'article 3 : J'ai l'honneur de proposer à la Chambre d'augmenter de 100,000 francs les chiffres des traitements des agents consulaires.
« Ces traitements seraient répartis comme suit :
« 25,000 fr. : Australie, Inde anglaise, Perse, Californie, Havane, Nouvelle-Orléans, Chili, Egypte ;
« 20,000 fr. : Valachie, Maroc, Algérie ;
« 6,500 fr. : Cologne.
« Soit 266,500 fr., au lieu des 172,300 francs portés au budget. »
Je parfais les 100,000 francs demandés en augmentant de 6,000 francs le traitement du consul général chancelier à Constantinople. Ce poste est renseigné à l'article 20, chapitre II, Légation.
Ici prend naturellement place l’observation que j'ai faite tantôt, lorsqu'il s'est agi de la légation de Turquie.
Le consul général chancelier réside à Constantinople ; son traitement est porté au chapitre des Légations ; cet agent doit évidemment profiter de l'augmentation proposée par mon amendement ; il en profiterait jusqu'à concurrence de 6,000 francs, ce qui porterait son traitement à 16,000 francs.
M. le président donne lecture de l'amendement de M. d'Hane et il demande à cet honorable membre s'il entend comprendre les divers postes de son article, soit dans le texte du budget sur lequel la Chambre discute et vote, soit dans les développements du budget.
M. d'Hane-Steenhuyse. - Je les proposerai dans les développements.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Le gouvernement ne peut se rallier à l'amendement proposé par M. d'Hane.
L'honorable M. d'Hane se plaint de l'exiguïté des traitements accordés à nos agents consulaires. Je partage, dans une certaine mesure, les sentiments qui ont déterminé M. d'Hane à formuler son amendement.
Je conviens que les traitements de nos consuls sont excessivement faibles, eu égard aux services que nous rendent ces agents ; mais mon intention est de faire une étude aussi approfondie, aussi complète que possible, des attributions, des droits de nos agents consulaires et des propositions de l'honorable M. d'Hane.
Je me suis déjà occupé très sérieusement de ces questions ; toutes mes sympathies sont acquises au développement du commerce belge et le département des affaires étrangères a déjà fait quelque chose en faveur de ce développement. Ce ne sont que des projets, qui demandent à être étudiés plus profondément avant de recevoir une solution.
Il y a une grande difficulté que je dois signaler : c'est celle de recruter un corps consulaire capable, c'est-à-dire connaissant les besoins et les nécessités du commerce et de l'industrie. Les jeunes gens qui entrent dans le corps consulaire sans expérience aucune ne peuvent pas arriver de prime saut à une position de consul général ; il faut que le pays sache, avant de leur donner ces attributions, quelles sont leurs capacités et jusqu'à quel point leurs études peuvent avoir des résultats sérieux pour le commerce et les intérêts généraux de la Belgique.
Je voudrais faire étudier la question de savoir s'il ne serait pas utile d'avoir des élèves-consuls faisant un apprentissage au département des affaires étrangères pour y acquérir l'habitude des affaires et se renseigner sur les besoins du commerce.
Je crois que cette mesure serait très utile et porterait des fruits prompts et qui auraient des résultats pour le commerce et l'industrie belges. C'est une question qui est à l'étude, comme je l'ai dit à la Chambre, et j'en pousserai le travail avec la plus grande vigilance.
Je rectifierai une légère erreur qui a été commise par l'honorable M. d'Hane-Steenhuyse..
Le gouvernement a senti que la position de notre consul au Maroc était exceptionnelle et il l'a portée de 9,000 à 12,000 francs. J'ai accordé cette amélioration dans la limite des ressources de mon budget, mais je ne puis aller au delà. Le gouvernement ne peut pas se prononcer ainsi, séance tenante, sur les appointements à donner à nos consuls. Il faut connaître l'utilité et la grandeur des services qui peuvent être rendus par notre corps consulaire avant de modifier ses traitements, comme le demande l'honorable M. d'Hane-Steenhuyse.
Voilà pourquoi le gouvernement ne s'est pas rallié à l'amendement qui a été présenté. Les appointements de nos consuls sont, il est vrai, trop faibles, mais ils sont en rapport avec les traitements de tout notre corps diplomatique.
C'est un ensemble qu'il n'est pas utile, je pense, de rompre en ce moment. Le gouvernement doit rester dans certaines limites, tout en améliorant certaines positions au fur et à mesure que la nécessité de le faire sera constatée. On doit avoir égard aux services exceptionnels qui nous sont rendus, et le gouvernement ne demandera pas mieux que de faire droit, dans les limites du possible, aux exigences de l'honorable M. d'Hane-Steenhuyse lorsque la justesse en serait reconnue.
M. d'Hane-Steenhuyse. - Je remercie l'honorable ministre des affaires étrangères, comme j'ai remercié dans le temps ses honorables prédécesseurs, chaque fois qu’ils ont augmenté quelque peu les traitements de nos agents consulaires à l'étranger. Mais je suis au regret de ne pouvoir partager la manière de voir qu'il vient de développer et je pense, sans trop m’avancer, que s'ils doivent attendre que les études dont parle M. le ministre des affaires étrangères soient terminées, nos agents consulaires ne verront pas de sitôt s'augmenter d'une manière efficace les traitements qui leur ont été alloués jusqu'ici.
(page 649) Il faut étudier la question, nous dit l'honorable ministre. Mais, messieurs, il me semble que cette question est parfaitement étudiée. Il faut, dit l'honorable ministre, l'étudier au point de vue de la situation à donner à ces agents. Mais, messieurs, nous avons des agents : ils existent, ils ne sont pas à créer, et ce qui est parfaitement constaté, c’est qu'ils n'ont pas de quoi vivre convenablement. Je crois donc que la question est suffisamment étudiée à ce point de vue comme à tous les autres.
Je veux bien que M. le ministre des affaires étrangères étudie la question de savoir s'il y a lieu d'envoyer un consul à San-Francisco plutôt qu'au Chili, au Chili plutôt qu'au Cap ; ce sont évidemment là des points que peut discuter le département des affaires étrangères. Mais pendant que l'honorable ministre les examine avec une sollicitude à laquelle je rends hommage d'ailleurs, il est évident que nos agents consulaires sont dans une position désastreuse, et ils n'ont pas le temps d'attendre le résultat de ces études. En voulez-vous la preuve ? Vous la trouverez dans un fait que j'ai cité déjà en 1869.
Notre consul général au Chili avait alors un traitement de 12,000 francs ; ce traitement vient d'être élevé à 15,000 francs. C'est très bien. Mais à cette époque, et sans avoir l'honneur de connaître le fonctionnaire dont question, j'ai dit à la Chambre que le logement seul devait lui coûter 6,000 francs et que, par conséquent, il ne lui restait que 6,000 francs pour subvenir aux besoins les plus pressants de la vie et pour représenter dignement la Belgique !
Eh bien, pour tout ceux qui ont visité les anciennes colonies espagnoles, les Indes, etc., et qui savent ce que coûte la vie dans ces contrées, c'est au moins 25,000 francs qu'il faudrait à nos consuls pour être en position de représenter convenablement la Belgique. Avec ce qu'ils ont aujourd'hui, ils ne peuvent que porter atteinte au prestige de notre pays. Je ne veux, en m'exprimant ainsi, que me servir d'une expression aussi modérée que possible.
L'honorable ministre nous dit : Il faut trouver des hommes capables. Sans doute, mais ici nous tournons dans un véritable cercle vicieux. Evidemment, il faut des hommes capables, mais quand vous avez mis la main sur de pareils hommes, il faut les rémunérer d'une manière convenable ; il faut leur donner de quoi faire usage de leurs capacités à l'étranger. Et si vous ne donnez pas à vos fonctionnaires à l'étranger de quoi y vivre honorablement, vous n'aurez jamais d'hommes capables.
Ceux que vous avez en ce moment sont entrés dans la carrière à une époque déjà éloignée, alors qu'ils pouvaient espérer que l'augmentation se ferait progressivement et qu'à la fin de leur carrière ils seraient arrivés à une position convenable.
Il n'en a point été ainsi. Leurs traitements sont restés fixés à des taux ridicules et je n'oserais les indiquer s'ils n'étaient imprimés au budget.
Je crois donc, messieurs, que l'étude dont parlait tout à l'heure l'honorable ministre est faite et que toutes les questions qu'il pourrait poser à son département ne nous avanceraient pas d'un iota.
Tout le monde est d'accord que nos agents à l'étranger sont trop peu payés. Le remède consiste à les payer mieux, et c'est pour cela que j'ai fait ma proposition.
L'honorable ministre nous a dit qu'il serait assez d'avis de nommer des élèves-consuls, qui pourraient au département même, se mettre au courant des affaires.
Je ne partage pas son opinion. Si ces jeunes gens doivent faire des études, c'est à l'étranger, à San Francisco, à Sidney, aux Indes, et non pas rue de la Loi.
Que M. le ministre des affaires étrangères me permette de le lui dire, j'ai beaucoup voyagé et je puis lui certifier que toutes les études que les élèves-consuls feront au département des affaires étrangères ne leur serviront à rien lorsqu'ils se trouveront dans le cas d'exercer leurs fonctions à l'étranger.
Mais, je ne saurais assez le répéter, lorsqu'on envoie un agent belge au loin, on doit lui donner de quoi soutenir son rang.
Ainsi, il s'est passé dernièrement encore un fait très curieux à ce sujet. Un élève-consul a été nommé consul au Japon. On lui a alloué 2,500 ou 3,000 francs, je ne sais plus au juste.
Or, il faut savoir que le trajet au Japon coûte plus que cette somme !
Je crois donc que, loin d'étudier encore cette question, comme le propose M. le ministre, la chambre ferait acte de justice et de bonne administration en adoptant ma proposition et en faisant à nos agents à l'extérieur une position digne de la Belgique et qui leur permette de s'occuper efficacement des intérêts de notre commerce, de notre industrie et de notre navigation.
M. Bouvier. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour protester contre le langage de l'honorable membre qui vient de s'asseoir lorsque je l'ai entendu dire que nos agents sont mal rétribués, qu'ils meurent littéralement de faim.
Dans l'intérêt de la dignité de notre pays, je repousse une pareille assertion,
La preuve, messieurs, que nos agents ne manquent pas de pain, c'est que tous les postes sont occupés ! Je relève cependant, dans le discours que vient de prononcer l'honorable membre, des considérations qui sont vraies et que j'accepte.
Je pense qu'il y a lieu dans une certaine mesure d'augmenter les traitements de la plupart de nos consuls. Mais quel est le premier juge de la nécessité de cette augmentation ?. Il me semble que c'est le gouvernement.
L'honorable membre arrive dans cette enceinte avec un amendement en quelque sorte improvisé, qui augmente, si j'ai bien compris sa proposition, l'allocation de plus de 100,000 francs ; il s'imagine que sans examen préalable, sans même que le chiffre proposé ait été discuté en sections, nous puissions adopter au pied levé un pareil amendement. Cela n'est pas possible.
M. Muller. - Il y a interversion de rôles.
M. Bouvier. - L'honorable M. Muller me fait une observation très juste : c'est qu'on intervertit les rôles dans cette enceinte : c'est la majorité qui se substitue en quelque sorte aux fonctions du gouvernement.
M. De Lehaye. - La majorité ! Il y a un seul membre qui fait cette proposition.
M. Bouvier. - Le gouvernement a demandé certaines augmentations ; nous les avons votées parce que nous avons pu juger de leur nécessité en parfaite connaissance de cause.
Je ne dis pas, et je le répète, qu'il n'y ait pas de consuls généraux dont le traitement soit trop faible ; j'engage même vivement M. le ministre à examiner la question sans retard et à ne pas leur donner de l'eau bénite de cour : c'est sans doute ce que craint l'honorable M. d'Hane.
J'espère que l'année prochaine l'honorable ministre fournira à la Chambre un travail complet et je l'engage également à examiner s'il n'y a pas lieu d'augmenter le nombre des consuls rétribués dans les villes commerciales les plus importantes.
L'honorable ministre faisait remarquer dans son discours que les traitements des consuls généraux doivent se trouver en rapport avec ceux de notre corps diplomatique. Je l'admets ; mais je reste convaincu que les consuls généraux rendent souvent plus de services à l'industrie et au commerce du pays que certains de nos ambassadeurs.
M. d'Hane-Steenhuyse. - Je demande la parole.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Messieurs, j'aurai été bien mal compris par l'honorable M. d'Hane ou je me serai bien mal exprimé.
J'ai dit que la question devait être étudiée, que personne ne pouvait se prononcer immédiatement, en complète connaissance de cause, sur la question que soulevait ici, un peu à l'improviste, l'honorable membre.
Je suis loin de prétendre qu'il n'y a rien à faire pour améliorer le sort de nos consuls. J'ai déclaré à la Chambre que toute ma sollicitude était appelée sur ce point, et que mon intention était d'étudier jusqu'où nous devions aller pour obtenir de ces agents tous les services que l'on peut exiger d'eux dans l'intérêt du commerce et de l'industrie. C'est une étude que je fais faire et qui n'est pas terminée jusqu'à présent.
L'honorable M. d'Hane-Steenhuyse combat l'idée que j'ai émise de faire faire à nos consuls des études préparatoires. J'ai dit que ces études auraient un but utile si elles avaient lieu dans une certaine mesure au département des affaires étrangères. Mais ces études ne se feraient pas seulement au département dont je suis le chef, des lèves-consuls seraient détachés auprès de nos consuls dans les pays étrangers ; là, ils feraient un apprentissage utile et se renseigneraient complètement sur les besoins de notre commerce extérieur, sur les mesures utiles à prendre dans l'intérêt de notre industrie.
C'est dans ce sens que je veux que les études se fassent, et c'est dans ce sens aussi que doit être entendue la pensée que j'ai exprimée précédemment ; cette mesure a une importance plus grande que vous ne le croyez peut-être, parce qu'il est très difficile de recruter un corps consulaire capable, réunissant les conditions et les connaissances nécessaires pour rendre tous les services que nous sommes en droit d'en exiger.
M. d'Hane-Steenhuyse. - Je ne comprends réellement pas comment l'honorable M. Bouvier puisse dire que ma proposition arrive a abrupto, sans préparation aucune. Elle existe depuis 1869. L'honorable (page 650) M. Bouvier faisait partie de la Chambre et il a pu entendre alors les développements que j'ai donnés comme mes autres honorables collègues. Je n'ai donc rien proposé d'inattendu aujourd'hui, et la proposition que je fais en ce moment est moins étendue encore que celle que je faisais en 1869.
J'ajouterai que M. le ministre des affaires étrangères a eu la gracieuseté de me dire, il y a quelques jours, que de temps à autre il relisait quelques-uns des passages de ma proposition d'alors ; l'honorable ministre savait donc à peu près quelle est l'organisation que je veux donner à notre corps consulaire et il sait parfaitement quelles sont mes vues à cet égard. Je n'ai donc surpris que l'honorable M. Bouvier.
Si j'ai demandé la parole une troisième fois, c'est pour répondre à l'honorable M. Bouvier que je n'ai rien dit qui soit de nature à ridiculiser nos agents à l'étranger.
M. Bouvier. - Vous avez dit qu'ils meurent de faim.
M. d'Hane-Steenhuyse. - Mais, mon Dieu, on en a dit autant lorsqu'il s'est agi d'augmenter les traitements de fonctionnaires d'autres départements !
Un de nos agents, qui réside dans une contrée transatlantique, m'a dit que, recevant 12,000 francs et devant en dépenser 30,000, il déplorait une pareille situation ; ne peut-on point dire alors d'un homme qui se trouve dans cette position qu'il meurt de faim ? Ce n'est d'ailleurs là qu'une figure que tout le monde, sauf M. Bouvier, a comprise.
M. Bouvier. - C'est une mauvaise figure.
M. Sainctelette. - Messieurs, le recueil de nos rapports consulaires est un excellent document, plein des renseignements les plus utiles, mais il ne traite que de ce qui se passe à l'étranger.
L'année dernière, j'ai appelé l'attention du département des affaires étrangères sur la question de savoir s'il n'y aurait pas lieu de faire en Belgique une publication en sens inverse, destinée à nos consuls et aux-négociants étrangers.
Les rapports de nos consuls mettent nos commerçants parfaitement au courant de ce qui se fait à l'étranger, mais malheureusement il n'est aucune publication qui informe nos consuls et les négociants étrangers des progrès continus et des modifications incessantes de notre état industriel.
Il serait facile de faire des rapports des chambres de commerce une sorte de résumé, d'annuaire du commerce et de l'industrie de la Belgique, dans le genre de celui qu'avait si bien commencé M. Romberg, lorsqu'il était directeur général du commerce et de l'industrie au ministère de l'intérieur. Cet annuaire serait envoyé à nos consuls et libéralement distribué à l'étranger.
Si je suis bien informé, les renseignements que nos consuls reçoivent aujourd'hui sur le mouvement industriel et commercial du pays sont extrêmement restreints. Même lorsqu'ils quittent le pays avec une éducation économique et commerciale complète, nos agents sont vite distancés, tant les faits se modifient rapidement. Une fois partis, on les tient dans l’ignorance complète, de ce qui se passe dans le pays qu'ils représentent. Et puis, je crois que nos consuls doivent être instruits, non pas seulement des faits commerciaux et industriels du pays, mais un peu aussi de la situation générale ; ils devraient, par exemple, avoir pour mission d'attirer sur nos établissements d'instruction l'attention de la jeunesse des pays où ils exercent leurs fonctions. Mais pour cela ils n'ont pas les éléments nécessaires et il est utile qu'on les leur fournisse.
M. Vermeire. - Messieurs, je ne m'oppose pas à l'examen des propositions qui sont faites par les honorables MM. d'Hane et Sainctelette. Cependant, je crois qu'il faut distinguer entre les consuls. Il y a des consuls qui font des affaires considérables dans les places où ils exercent leurs fonctions ; et pour ceux-là le consulat n'est qu'un accessoire ; il y en a d'autres qui sont envoyés directement par le gouvernement, ce sont ces derniers consuls qui rendent le plus de services.
Quant aux consulats gérés par des agents qui font leurs propres affaires, ce n'est souvent qu'un commis, qui donne de rares renseignements au gouvernement ainsi qu'au public.
Pour moi, je suis convaincu que celui qui veut faire de bonnes affaires ne doit pas nécessairement s'adresser aux consuls, mais doit avoir d'autres correspondants qui puissent mieux le renseigner, d'autant plus que les consuls les renseignent le plus souvent sur les affaires en général.
Je dois cependant ajouter que les consuls belges à l'étranger se montrent très dévoués lorsqu'on s'adresse à eux. Mais de là à prendre l'initiative, il y a loin. D’ailleurs cette initiative ne pourrait être utile que si elle était appropriée au commerce et surtout à l'industrie.
Je crois que les consuls, dans les pays européens, ne peuvent que difficilement, dans l'état actuel des choses, donner des renseignements utiles ; il n'y a que ceux qui se trouvent dans lis pays transatlantiques qui peuvent réellement nous renseigner sur ce qui s'y passe. Mais, en général, je crois que nos industriels seront peu tentés d'y envoyer en consignation des marchandises ou plutôt le produit de leur fabrication ; les événements qui se sont produits dans d'autres temps sont suffisants pour les en éloigner.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - L'honorable M. Sainctelette a rendu un juste hommage aux travaux de nos consuls ; le Recueil consulaire est, en effet, remarquable sous bien des rapports.
La mesure que propose, l'honorable membre a déjà été, en partie, réalisée cette année. J'ai fait imprimer le Recueil consulaire à un nombre d'exemplaires suffisant pour pouvoir en envoyer à tous nos consuls. Jusqu'ici il n'y avait guère que quelques consuls qui recevaient ce Recueil et encore ne le recevaient-ils qu'à des époques indéterminées.
Il est donc satisfait, en partie, au désir de l'honorable M. Sainctelette.
Quant à faire un recueil plus complet et qui contiendrait des extraits des rapports des chambres de commerce, je n'y vois pas d'inconvénients, et je prendrai bonne note de l'observation de l'honorable membre.
- L'amendement de M. d'Hane-Steenhuyse est mis aux voix ; il n'est pas adopté.
L'article est ensuite mis aux voix et adopté.
« Art. 23. Frais de voyage des agents du service extérieur et de l'administration centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses : fr. 70,500. »
M. Thonissen. - Il y a deux ans, j'ai eu l'honneur de faire partie de la section centrale chargée de l'examen du budget des affaires étrangères. Alors comme aujourd'hui, si ma mémoire ne me trompe, il y avait à l'article 23 un crédit de 70,500 francs pour « frais de voyage des agents du service extérieur et de l'administration centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses. »
Comme le chiffre me paraissait très élevé, je demandai la production d'un état détaillé indiquant la somme payée à chacun de nos diplomates ayant changé de résidence.
J'appris ainsi, à mon grand étonnement, qu'aujourd'hui encore on applique un tarif dressé il y a trente à quarante ans, c'est-à-dire à une époque où l'on voyageait en poste ou en diligence, à une époque où les voyages coûtaient le double ou le triple de ce qu'ils coûtent actuellement.
Je trouvai notamment qu'on avait payé - pour ne citer qu'un exemple - une somme de 7,000 à 8,000 francs à un consul général qui s'était transporté de Pétersbourg à Alexandrie. Ce voyage était, en effet, long et coûteux il y a trente ou quarante ans ; mais, aujourd'hui, il n'est ni très fatigant, ni très difficile, ni très coûteux.
On prend le chemin de fer de Saint-Pétersbourg à Varsovie ; dans cette ville, on prend une autre voie ferrée jusqu'à Trieste ; là on s'embarque à bord de l'un des paquebots de la Méditerranée, et quelques jours après, on se trouve à Alexandrie. Or, il me semble que, pour un tel voyage, la somme que j'ai indiquée plus haut est trop élevée. En réalité, on peut faire ce voyage pour quelques centaines de francs.
L'honorable M. d'Anethan me promit, à cette occasion, de soumettre le tarif des frais de déplacement à une révision sérieuse. Je dois croire que, jusqu'à présent, celle révision n'a pas eu lieu, puisque le même chiffre de 70,500 francs figure toujours au budget. Je n'en fais un reproche ni à l'honorable d'Anethan, ni à son honorable successeur, mais je prie ce dernier de bien vouloir, à son tour, soumettre ce tarif à un examen attentif.
Il est évident qu'aujourd'hui les frais de voyage sont beaucoup moins élevés qu'il y a quarante ans et que, par conséquent, il n'est pas raisonnable de maintenir un tarif rédigé en vue de besoins et de conditions entièrement différents.
Je me souviens qu'en dehors de cette Chambre quelqu'un me fit remarquer que certains diplomates trouvaient dans l'indemnité qu'ils recevaient pour frais de voyage une sorte de supplément d'appointements, une sorte de compensation pour l'insuffisance de leur traitement,
Messieurs, si les traitements sont insuffisants, qu'un les augmente ; c'est une question à examiner ; mais il faut de la sincérité en tout, et on ne doit pas, par une voie indirecte, augmenter des traitements qui son fixés par la loi.
En un mot, je n'entends nullement faire ici acte d'opposition ; je (page 651) demande seulement que la promesse faite par l'honorable baron d'Anethan soit réalisée.
Si un nouvel examen prouve que le tarif n'accorde pas des sommes trop élevées, tout sera dit ; mais si, au contraire, comme cela pourrait arriver, on constate que ce tarif doit être modifié au bénéfice des contribuables, j'espère que l'honorable ministre des affaires étrangères proposera lui-même, à son prochain budget, une diminution du crédit qu'on demande aujourd'hui.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - L'observation de l'honorable M. Thonissen porte sur ce fait que certains frais de voyage lui ont paru exagérés.
La Chambre, messieurs, doit tenir compte d'une chose ; c'est que dans les frais de voyage sont comprises bien des dépenses qui ne constituent pas des frais de voyage proprement dits.
Ainsi, un membre du corps diplomatique doit changer de résidence ; mais il n'est pas seul : il a une famille, un personnel qu'il ne peut pas laisser derrière lui ; il a son mobilier qui doit l'accompagner en tout ou en partie, enfin il a souvent, pour obtenir une résiliation de bail, à payer un dédit plus ou moins considérable, tandis que dans sa nouvelle résidence il ne parvient fréquemment à se loger convenablement qu'à des conditions très onéreuses.
Si l'on tient compte de ces diverses circonstances, on reconnaîtra que les indemnités de déplacement ne sont nullement exagérées.
Je suis loin de m'opposer à un nouvel examen du tarif ; cet examen sera fait et une révision aura lieu si elle est jugée nécessaire.
M. Thonissen. - Je ne demande pas autre chose.
- L'article est adopté.
« Art. 24. Perception des droits de chancellerie, à Paris. Personnel : fr. 8,240. »
Pety de Thozée, rapporteurM. Santkin. - Vous avez remarqué, messieurs, que diverses améliorations ont été introduites dans la rédaction du budget que nous discutons. C'est ainsi que les légations sont classées par ordre alphabétique, et les allocations pour diverses remises, fondues en un seul crédit.
Mais il reste encore un pas à faire dans la voie de la méthode ; quelques textes pourraient être mieux coordonnés.
Au chapitre II, article 20, « légation de Turquie », figurent les traitements d'un consul général chancelier, d'un premier et d'un second drogman, de deux khavass et d'un capou-oglan ; tandis qu'au chapitre V, intitulé : « Dépenses diverses relatives aux légations et aux consulats », sont portées la perception des droits de chancellerie à Paris, ainsi que la rémunération des services de quinze drogmans et khavass employés dans des résidences en Orient.
Il serait à la fois plus simple et plus rationnel de transférer, au chapitre V, tout le personnel spécial à certaines légations. On y inscrirait les traitements du consul général chancelier, des deux drogmans et des agents subalternes de la mission de Constantinople, de même que pour la France, on y porte la perception des droits de chancellerie, savoir : 8,240 francs pour le personnel et 360 pour frais divers.
Mais ce dernier texte de 360 francs n'est-il pas un peu maigre dans un budget ministériel ? Ne pourrait-on grouper les articles 24 et 25, si l'on n'aime mieux reporter cette mince allocation à l'article 27, comme le propose une note insérée à la page 8 du rapport de la section centrale ?
Nous appelons l'attention du département des affaires étrangères sur ces observations de. détail que nous signalons en passant.
- Adopté.
« Art. 25. Perception des droits de chancellerie, à Paris. Frais divers : fr. 360. »
- Adopté.
« Art. 60. Traitement d'un drogman et indemnités à divers employés dans des résidences en Orient : fr. 18,150. »
M. Vleminckx. - Messieurs, M. le ministre des affaires étrangères a bien voulu déposer sur le bureau la liste des titres de noblesse accordés par les cabinets précédents.
Je prie la Chambre de vouloir bien ordonner l'impression de cette liste.
Il ne peut en résulter aucun inconvénient puisque en définitive tous les noms des personnes qui ont obtenu des titres vont être publiés dans l'Almanach royal.
La liste est longue à lire, et il est difficile de retenir ce qu'elle renferme.
- Adopté.
« Art. 27. Frais de correspondance de l'administration centrale avec les agences, ainsi que des agences entre elles ; secours provisoires à des Belges indigents ; achat et entretien de pavillons, écussons, timbres, cachets ; achat, copie et traduction de documents ; frais extraordinaires et accidentels : fr. 75,620. »
- Adopté.
« Art. 28. Missions extraordinaires, traitements d'inactivité et dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 47,000. »
- Adopté.
« Art. 29. Chambres de commerce : fr. 16,000. »
M. de Smet. - Je crois devoir appeler l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur une question qui se rattache à nos relations internationales avec le royaume des Pays-Bas.
Il s'agit d'une baisse extraordinaire des eaux du canal de Gand à Terneuzen, qui donnera lieu à une fermeture du port de Gand dans le courant de cette année pendant six semaines, soit du Ier mai au 15 juin.
Cette longue interruption de la navigation est nécessaire, dit-on, pour l'exécution de certains travaux de maçonnerie sur la partie néerlandaise de ce canal, entre Selzaete et Terneuzen.
Elle se fait en vertu d'une convention conclue il y a quelques années entre la Belgique et les Pays-Bas, convention qui a eu pour but de réduire la fréquence des chômages de la navigation et des baisses d'eau du canal. Sous ce rapport, elle donna lieu à une immense amélioration pour la situation du port de Gand. Mais si, à l'époque où la mesure fut prise, une interruption de la navigation était déjà reconnue comme une entrave au développement du commerce maritime de Gand, il en est tout autrement dans l'état actuel des choses, la navigation à vapeur étant devenue si active, qu'un chômage de quelques jours seulement jette une perturbation générale dans nos relations avec la Hollande, l'Angleterre, etc.
Je n'hésite pas à le dire, une fermeture de notre port durant plus de six semaines occasionnerait une perte immense au commerce gantois, car il est à remarquer que, dès le commencement du mois de mai, nous avons un grand nombre d'arrivages de la Baltique et les capitaines de navires refusent de prendre charge pour Gand dans la crainte de se voir arrêter à Terneuzen et de devoir y séjourner longtemps.
Je me permettrai donc de soumettre à M. le ministre les questions suivantes :
N'y aurait-il pas moyen d'obtenir du gouvernement néerlandais que la baisse des eaux, en 1872, n'ait pas lieu et soit reculée jusqu'au moment où il pourrait en être fait usage pour l'exécution de l'ensemble de tous les travaux de démolition et de reconstruction d'ouvrages d'art qu'entraînera l'amélioration projetée du canal ?
En cas de réponse négative de la part du gouvernement néerlandais, ne pourrait-on pas obtenir tout au moins que la baisse des eaux soit réglée de manière à permettre que la navigation puisse avoir lieu par intermittences tous les dix ou quinze jours ?
En admettant cette dernière combinaison, qui a déjà été mise en pratique il y a quelques années, on diminuerait toujours, dans la mesure du possible, les pertes et inconvénients immenses qu'éprouvera le commerce gantois.
M. Dansaert. - Messieurs, dans la discussion du précédent budget des affaires étrangères, l'honorable M. d'Anethan manifesta l'intention de faire étudier la question du mode de nomination des membres des chambres de commerce.
Un arrêté ministériel du 28 janvier 1872 institua une commission chargée d'examiner les divers points relatifs à cette question. Une année entière s'est écoulée depuis la nomination de cette commission et d'après le rapport de la section centrale, tout ce temps aurait été employé par la commission à réunir des renseignements, sans avoir décidé aucune question de principe
Je voudrais que M. le ministre nous dise si l'on peut espérer que la commission pourra présenter bientôt un rapport ou si la question a eu l'honneur d'un enterrement de première classe.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Messieurs, l'honorable préopinant demande si la question du mode de nomination des chambres de commerce a eu les honneurs d'un enterrement de première classe, Je puis lui dire que non.
(page 652) La commission instituée pour examiner relie question s'est occupée très activement de la solution des problèmes qui lui étaient soumis.
Il lui a fallu un certain temps pour se procurer tous les renseignements dont elle a besoin, niais depuis lors elle a eu plusieurs réunions qui ont déjà donné des résultats sur certaines questions posées. Au mois de novembre et même au mois de janvier, la commission s'est encore réunie ; il ne lui reste plus aujourd'hui que deux points à éclaircir et je promets de faire tous mes efforts pour que ces points soient élucidés le plus tôt possible. Mon honorable prédécesseur s'était non pas prononcé mais avait penché vers la nomination des chambres de commerce par voie élective.
Messieurs, les différents modes de nomination des chambres de commerce ont donné lieu à beaucoup de critiques.
Dans le système de nomination actuel, il y a évidemment des abus. Le corps se perpétue toujours par lui-même. Il est rare que le roulement soit interrompu de manière à y faire entrer tous les intérêts qui n'y sont pas représentés. La double présentation par les chambres de commerce et par les députations permanentes n'offre donc pas, sous ce point de vue, la latitude qu'on pourrait désirer pour la constitution de ces corps.
Le système électif offre d'autres inconvénients. La commission a longuement discuté sur les bases qu'il faudrait adopter pour fixer le cens électoral donnant droit d'élection pour les chambres de commerce. Après un travail très long, on a éliminé certaines catégories, et après avoir passé en revue les chiffres de 20, de 25, de 30, de 42 fr. 52 c, on s'est trouvé encore devant de très grandes difficultés : c'est que certaines industries, telles que, pour n'en citer que quelques-unes, les tourbières, les carrières, les mines, etc., absorbent en telle quantité, dans certaines régions, le corps électoral qu'elles sont parfaitement maîtresses de la situation.
On a préconisé un autre système auquel je crois ne pouvoir adhérer en aucune occurrence : c'est la nomination directe des chambres de commerce par le gouvernement. Je crois que ce système présente de tels inconvénients, que personne ne s'y ralliera.
Quant à moi, je voudrais voir porter l'étude de la question sur un autre terrain qui est pour moi le seul sérieux : c'est le terrain de la liberté, c'est la suppression des chambres de commerce. Je suis amené à dire cela, sans me prononcer d'une manière absolue. Je n'ai pas encore eu le temps d'étudier cette question assez à fond et je n'ai pas pu réunir des données assez certaines pour avoir une opinion fixée. Mais dans un pays comme la Belgique, qui jouit de tant de libertés, de la liberté de la presse, de la liberté d'association, etc., où tous les groupes d'industrie peuvent se faire représenter par des pétitions, des associations et par des syndicats qu'ils peuvent former entre eux, ils ont tous les moyens désirables de faire valoir leurs droits et même d'éclairer le gouvernement. Je crois que c'est là la véritable solution de la question.
Je dirai donc à l'honorable M. Dansaert que la commission continue son travail et que j'appellerai son attention sur le point que je viens de signaler, c'est-à-dire la suppression des chambres de commerce. Je serais heureux de venir à la Chambre avec une solution en ce sens.
M. Vermeire. - Messieurs, nous avons étudié toutes les questions qui se rattachent aux chambres de commerce, mais nous n'avons pas même de rapport à faire : un sténographe a recueilli tous les discours qui ont été prononcés et je crois que, par l'impression de ce travail, la Chambre sera édifiée sur tout ce qu'a fait la commission.
M. le ministre des affaires étrangères a parlé du système qui consiste à faire élire les membres des chambres de commerce... (Interruption.)
Je demande d'abord : Que sont les chambres de commerce ? Sont-ce des corps délibérants ? Ou sont-ce des corps consultatifs auxquels le gouvernement s'adresse et en qui il doit avoir toute confiance ? Sur quoi les chambres de commerce sont-elles particulièrement consultées par le gouvernement ?
Messieurs, il est un fait certain c'est que quand les chambres de commerce ont été établies, c'était principalement pour être consultées par le gouvernement lorsqu'il s'agissait de faire des traités de commerce avec l'étranger.
Eh bien, je me demande, si les chambres de commerce étaient nommées par un élément autre que par le gouvernement, ces corps seraient-ils encore de nature à inspirer une confiance entière ; s'ils pourraient encore répondre parfaitement au but pour lequel elles sont instituées.
Les chambres de commerce ne peuvent répondre utilement aux demandes du gouvernement qu'en s'appuyant sur les faits.
Il est malheureusement vrai que certaines chambres de commerce, il y a quelques années, sont sorties du rôle qu'elle n'auraient pas dû quitter. Est-ce à dire que les chambres de commerce ne rendent pas des services réels au gouvernement ?.
Si les chambres de commerce devraient être le produit de l'élection, elles ne resteraient pas des chambres de commerce, elles deviendraient des corps politiques.
Or, les chambres de commerce ne sont ni ne peuvent être des corps politiques ; ce sont des corps purement consultatifs qui donnent leur avis sur ce qui convient dans l'intérêt industriel et commercial du pays.
Je crois que les chambres de commerce n'ont plus leur importance d'autrefois, parce qu'à mesure que nous entrons dans la liberté commerciale, à mesure aussi avons-nous moins de réclamations à faire auprès du gouvernement.
J'ai dit tout à l'heure quelle était la mission qui était attribuée à nos chambres de commerce.
Eh bien, je demande s'il est de l'intérêt général que ces chambres soient nommées autrement qu'elles ne le sont aujourd'hui.
Mais, dit M. le ministre, les chambres de commerce tournent dans un cercle vicieux. Ce sont presque toujours les mêmes éléments qui s'y trouvent.
C'est possible ; mais quand cela serait, croyez-vous que quand vous aurez introduit dans les chambres de commerce d'autres éléments, que pour cela les intérêts seront mieux représentés ?
Ceux qui se sont voués à l'étude des questions commerciales et économiques pendant des années ne peuvent-ils pas, sous ce rapport, rendre plus de services que ceux qui n'ont jamais fait de pareilles études ?
Je crois donc qu'avant de prendre une décision, le gouvernement fera bien d'examiner toute les considérations qui plaident en faveur de la nomination par l'élection ou de la nomination directe par le gouvernement.
Si la nomination se fait par l'élection, qui seront les électeurs ? seront-ce les industriels et les négociants payant 42 francs de patente ?
Dans ce cas, les chambres de commerce seraient composées par des électeurs qui payeraient autant que l'on paye pour être électeur aux Chambres.
Comparant les chambres de commerce aux tribunaux de commerce, que voyons nous ? Que dans tel endroit les tribunaux de commerce sont élus par les commerçants, qu'on appelait autrefois les notables.
Aujourd'hui il y a des tribunaux de première instance qui jugent en matière commerciale, comme le tribunal de Termonde ; croyez-vous que le tribunal de Termonde, jugeant en matière commerciale, ne rende pas de jugements aussi bons que le font les tribunaux de commerce eux-mêmes ? Je prétends, moi, que ces jugements doivent être meilleurs, parce que les avocats et les juges connaissent, en même temps que le droit commercial, les autres droits, et conséquemment sont plus à même de formuler de bons jugements.
Si vous adoptez ce système, vous vous heurterez à des obstacles tellement nombreux, que je défie le gouvernement de le mettre en pratique. De deux choses l'une : ou vous aurez des chambres de commerce aristocratiques, ou elles seront si démocratiques qu'elles ne représenteront plus du tout le commerce.
Pour exercer les fonctions de membre d'une chambre de commerce, on ne doit pas avoir une ambition excessive ; on ne doit pas s'exagérer l'importance de ce corps purement consultatif.
Il est important que les membres de ces chambres connaissent bien le commerce ou l'industrie et qu'ils aient quelques notions de l'économie politique. Sans ces connaissances, les membres de ces chambres ne seraient pas à même d'émettre de bons avis.
Telles sont les raisons qui me font souhaiter que nos chambres de commerce soient composées de personnes à vues élevées et prêtes, en toute circonstance, à défendre le commerce et l'industrie du pays.
- L'article 29 est mis aux voix et adopté.
« Art. 30. Frais divers et encouragements au commerce : fr. 42,800. »
- Adopté.
« Art. 31. Services de navigation à vapeur entre Anvers et les ports étrangers ; remboursement des droits de pilotage, de phares et fanaux (crédit non limitatif) : fr. 25,000. »
- Adopté.
« Art. 32. Personnel actif et sédentaire, en disponibilité aux deux tiers de solde, en non-activité et non replacé : fr. 379,586. »
M. Van Iseghem. - Dans la séance d'avant-hier, l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu a dit entre autres : « Tandis que notre matériel est étroit, bas, écrasé, n'offrant aucun confort aux passagers, n'offrant même, pendant les gros temps, qu'une sécurité très relative, il existe (page 653) depuis longtemps en Amérique des bateaux d'une puissance très grande, qui sont de vrais palais flottants offrant tout le confort qu'on puisse désirer en voyage tant par le mauvais que par le beau temps ; comme je le disais tout à l'heure, ils ont en outre cet avantage d'avoir une vitesse de sept lieues à l'heure. »
Je regrette beaucoup que mon honorable ami ne soit pas présent à la séance en ce moment ; mais comme ses paroles pourraient nuire à notre service de bateaux à vapeur entre la Belgique et l'Angleterre, je ne puis les laisser passer sans y présenter des observations.
Notre système de navires a été copié sur celui des navires qui font le service entre Boulogne et Folkestone, mais nous y avons apporté d'importantes améliorations. Nos navires sont beaucoup mieux construits que ceux qui font le service entre Calais et Douvres. Le pont de nos navires est de 2 1/2 pieds plus élevé que celui des navires qui font le trajet sur la France ; à bord de nos navires, l'arbre est au-dessous du pont, tandis qu'à bord des navires sur Calais et Boulogne, l'arbre est au-dessus ; il en résulte, que l'aménagement intérieur est plus élevé et beaucoup meilleur, et, de plus, la vague a moins de prise. Ce qui est encore un avantage pour les voyageurs, car, en mauvais temps, ils sont moins mouillés sur le pont qu'à bord des autres navires.
La moyenne de la durée de la traversée entre Ostende et Douvres, depuis l'établissement du nouveau service, est de 1 heures 20 minutes ; ce résultat est certainement très satisfaisant.
Nos navires sont parfaitement bien construits, très propres à la navigation entre la Belgique et l'Angleterre et ils présentent toute la sécurité possible ; ils font même l'admiration de tous les connaisseurs. On ne peut pas perdre de vue que nous avons, en hiver, souvent de très mauvaises mers dans les parages entre Ostende et Douvres, par exemple entre les bancs de Dunkerque. A cette hauteur, il y a des vagues très courtes qui font énormément travailler les navires, il faut donc des bâtiments résistant à toutes les tempêtes, car on part presque par tous les temps.
Il n'y a pas longtemps, un personnage français qui jouit d'une grande autorité dans la marine se trouvait à bord ; la mer était mauvaise, le vent debout, tempête du nord-ouest avec une extrême violence. Ce personnage proposa au commandant de modérer la marche de son navire. Le commandant lui répondit : Mon navire est excellent ; je parviendrai à arriver à temps dans le port de Douvres ; et il l'a fait.
Maintenant, messieurs, si on apporte un changement à nos navires, si on en modifie la largeur, il faut nécessairement aussi en modifier la profondeur et la longueur ; pour que les exigences de l'équilibre soient parfaitement observées, il faut aux navires une grande stabilité.
Les navires ne doivent pas seulement entrer dans les ports d'Ostende et de Douvres, mais aussi, en cas d'accident, ils doivent pouvoir entrer à Nieuport, à Gravelines, à Dunkerque et à Folkestone, des ports peu profonds.
L'honorable M. Le Hardy de Beaulieu a dit aussi qu'en Angleterre on était à la recherche d'un autre système qui présentait une grande amélioration.
Je ne demande pas mieux que de voir introduire en Belgique un système perfectionné, mais je le crois impossible.
Je me tiens au courant du progrès de la navigation, jusqu'ici je n'ai rien vu de nouveau qui pourrait être applicable à notre service.
L'honorable membre a fait peut-être allusion à un projet gigantesque que l'on examine en ce moment en Angleterre.
Il s'agit d'embarquer sur de grands bacs ou pontons les convois venant de Londres et de leur faire traverser la Manche pour les débarquer ensuite en France.
Un nouveau port devrait être construit à l'ouest de Douvres pour rembarquement, et un autre à Andreselle à l'ouest du cap Grisnez, pas loin de Calais, pour le débarquement.
Si un pareil projet doit être exécuté, il coûtera au moins 50 millions, et sera-t-il praticable ?
Nos navires font des traversées aussi rapides que ceux qui transportent les dépêches et voyageurs de Holyhead et Kingston ou pour mieux dire entre Liverpool et Dublin. Ces derniers ont une longueur de 112 mètres, 2,200 tonneaux et 700 chevaux de force, ils font 14.50 milles en moyenne, les nôtres ont une longueur de 67 mètres, 650 tonneaux et 220 chevaux et ils font 14.35 en moyenne, donc peu de différence.
L'honorable membre a dit aussi qu'aux Etats-Unis il y a des steamers qui font 22 milles à l'heure tandis que les nôtres n'en font qu'environ 15.
Il y a lieu de faire remarquer d'abord que les milles américains sont des State milles de 1,622 mètres, tandis que nos milles ont 1,852 mètres, donc ils sont plus longs.
Nos navires, messieurs, présentent de grands avantages ; ils ne tirent que sept pieds d'eau, qu'on ne peut pas dépasser. Ils sont tous construits sur le même modèle, les rechanges et les chaudières peuvent être embarqués indistinctement à bord de tous les navires. Je crois donc que pour le moment nous devons maintenir le système actuel.
Si cependant on découvrait des navires d'une marche supérieure, qui pourraient être employés au service entre Ostende et Douvres, acceptés par des marins compétents, je le répète, je serais très heureux de voir que le gouvernement les adoptât.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Messieurs, je n'entrerai pas dans les détails techniques que l'honorable préopinant, beaucoup plus compétent que moi, vient de vous donner. Je tiens seulement à dire à la Chambre que les navires qui font le service des malles entre Ostende et Douvres sont les meilleurs qui soûl connus, et c'est pour l'industrie belge un honneur que je tiens à lui rendre : ces navires sont construits dans les chantiers de la Société Cockerill, et je suis heureux de le proclamer bien haut dans cette enceinte.
Messieurs, dans l'idée émise par l'honorable M. Le Hardy, une chose m'a frappé. Il nous a dit : En Amérique, il y a des bateaux d'un modèle connu, à fond plat, qui sont des espèces de maisons flottantes et que je me permettrai d'appeler des Léviathans, qui sont de la force de douze ou quinze cents chevaux et qui peuvent transporter 1,500 personnes.
Mais nous n'avons pas besoin de cela. Nos relations entre l'Angleterre et la Belgique sont connues. Que ferions-nous de navires qui transporteraient en quinze traversées le nombre de passagers que nous devons transporter en un an ? Et puis, rien ne nous prouve que ces bateaux soient dans des conditions à supporter des mers aussi « dures » que celles qui se produisent parfois sur nos côtes. Ce sont des bateaux de rivières.
Mais il y aurait encore un autre inconvénient à l'adoption du modèle de ces bateaux. Outre la somme considérable qu'ils coûteraient, nous devrions avoir au budget une dépense supplémentaire dont on ne peut pas se rendre compte.
Il y a une règle dont on ne peut se départir : il faut qu'il y ait rapport entre le contenant et le contenu, et pas un de ces bateaux ne pourrait entrer ni dans nos ports ni dans aucun des ports de refuge de la Manche.
Ces motifs me paraissent suffisants pour ne pas insister davantage sur l'idée de M. Le Hardy de Beaulieu.
Notre matériel est bon ; il répond à toutes les exigences du service ; nos bateaux ont une rapidité au moins égale à celle des autres transports ; tenons-nous-en donc à ce que nous avons, et souvenons-nous que le mieux est souvent l'ennemi du bien.
L'honorable M. Le Hardy a soulevé une autre question et je tiens à en dire un mot, parce que je la crois vraie et utile. L'honorable M. Le Hardy a, à différentes reprises, demandé dans cette enceinte, le transfert, du département des affaires étrangères au département des travaux publics, de tout ce qui touche aux transports.
Eh bien, messieurs, il a raison : ces deux services ressortissant à deux départements occasionnent des retards très longs, des dépenses supplémentaires très grandes, un manque complet d'unité. Je ne. dirai pas qu'il y a entre les deux départements des tiraillements ; les meilleurs rapports existent ; mais il résulte de l'état actuel des choses des lenteurs dont le service est toujours la victime. Ainsi, pour ne vous citer qu'un exemple., une modification dans les heures de départ de chemin de fer exige des modifications dans les heures de départ et d'arrivée des bateaux à vapeur, et ce n'est pas une affaire aussi simple qu'on pourrait le croire, puisqu'il s'agit de deux ordres de service différents ressortissant à deux départements différents.
Je citerai encore le service des feux, phares et fanaux. La partie des bâtiments relève du département des travaux publics et le département des affaires étrangères y figure, comme la vestale antique, pour entretenir les feux.
Si donc la Chambre partageait ma manière de voir, je crois que le transfert du service de la marine au département des travaux publics présenterait un grand avantage au point de vue de la promptitude dans le service et de l'économie.
M. Bouvier. - Comptez-vous prendre cette mesure ?
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Si je suis encouragé par la Chambre.
- Des membres. - Certainement ! certainement !
M. Pety de Thozée, rapporteur. - Messieurs, la section centrale n'a pas discuté la question posée par l’honorable M. Le Hardy de Beaulieu, et je ne puis dire quel accueil elle eût fait à cette proposition.
Pour ma part, je l'appuie sans réserve, et j'ai été charmé d'entendre la déclaration que vient de faire l'honorable ministre des affaires étrangères.
(page 654) Mais j'engage le gouvernement à étudier la question, en se plaçant à un point de vue plus large ou du moins plus général. Ce n'est pas seulement l'article 32, relatif aux paquebots à vapeur, que je voudrais distraire du budget des affaires étrangères, mais tout le chapitre VIII, concernant la marine.
Comment les services devront-ils être réorganisés ? Quelques-uns ne trouveront-ils pas mieux leur place au ministère de l'intérieur qu'au département des travaux publics ? La solution de ces questions ne peut être improvisée. C'est quand des propositions seront faites par le gouvernement, - à l'occasion des budgets de 1873, j'espère - que nous discuterons utilement les détails de la réforme administrative qu'a demandée l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu.
Puisque j'ai la parole, permettez-moi, messieurs, d'ajouter un court post-scriptum au rapport de la section centrale, et de vous rappeler que, par suite des événements qui troublaient la France, c'est par la Belgique que la malle des Indes a été expédiée pendant quinze mois, d'octobre 1870 à janvier 1872.
Le trajet de Londres à Brindisi se faisait en 77 heures, par Ostende, Verviers, Munich et Ala.
Le transport de ces correspondances, par les paquebots à vapeur entre Ostende et Douvres et par le chemin de fer belge, était la source d'avantages de diverses natures pour le pays.
Le produit postal, composé d'un droit de transit fixé à 20 centimes par 30 grammes de lettres et à 80 centimes par kilogramme d'imprimés et d'échantillons, a donné les sommes suivantes au trésor :
En 1870, depuis le 5 octobre, 43,120 fr. 55
En 1871, approximativement 356,531 fr. 88
En 1872, dernière malle venant des Indes 3,200 fr. 60.
Soit, ensemble 402,873 fr. 03.
En recettes de chemin de fer, l'Etat a perçu 1,258,562 fr. 5 c, suivant les relevés détaillés des divers services : - voyageurs, bagages et colis postaux, - que nous demandons la permission d'insérer en note, aux Annales parlementaires, ainsi que d'autres renseignements intéressants communiqués par le gouvernement trop tard pour être publiés dans le rapport de la section centrale.
C'est le 6 janvier dernier, que la malle des Indes a traversé la Belgique pour la dernière fois.
L'itinéraire est maintenant par Calais, Paris, Modane ; et la durée du trajet de 55 h. 20 m. On part de Londres, le vendredi à 8 h. 40 m. du soir, pour arriver à Brindisi, le lundi, à 4 heures du matin. Pour le retour, il faut de 55 h. 43 m. à 58 h. 20 m.
On ne peut guère espérer que le service de la malle des Indes soit rétabli par la Belgique, avant que le percement du mont Saint-Gothard ouvre une voie nouvelle, d'un parcours aussi direct, aussi prompt que par le mont Cenis. Sans doute, cet événement est encore trop éloigné pour qu'il soit possible de prévoir, dès aujourd'hui, si la question sera résolue en faveur de la Belgique. Mais le gouvernement, nous n'en doutons pas, ne négligera rien pour obtenir ce résultat. Les revenus que ce transit vaudra au trésor belge ne sont pas le seul avantage que le pays retirera du passage de la malle des Indes.
M. Van Iseghem. - M. le ministre des affaires étrangères nous a donné de bonnes raisons pour le transfert du budget des affaires étrangères au département des travaux publics du service des transports de la marine. Mais le budget des affaires étrangères contient, outre les transports (les bateaux à vapeur et le pilotage), les écoles de navigation, les caisses de prévoyance pour la pêche, les commissariats maritimes et l'éducation pratique des marins. Je demanderai à M. le ministre des affaires étrangères s'il n'y aurait pas lieu de conserver à son département certains de ces services qui ne sont passés dans les attributions de la marine que depuis une couple d'années ; si l'on ne pourrait pas les ajouter à la division du commerce ; car ils n'ont rien de commun avec les transports ?
Je demanderai a M. le ministre des affaires étrangères s'il ne pourrait pas présenter, dans la session actuelle, le crédit qu'il a annoncé pour la construction d'un nouveau steamer : la Chambre a déjà connaissance de cette question, par l'exposé des motifs et par le rapport de la section centrale, qui ont été présentés dernièrement ; il faut un an pour la construction d'un nouveau steamer.
Je demanderai aussi qu'il ajoute à ce crédit ceux des travaux nécessaires et indispensables pour le chantier de réparation à Ostende.
Je me joins à l'honorable ministre pour déclarer que les bateaux que la société Cockerill a fournis ont parfaitement réussi et qu'ils présentent toutes les garanties possibles, tant sous le rapport de la sécurité que sous celui de la rapidité.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - Je croyais qu'il résultait clairement de mes paroles que mon intention était de transférer au département des travaux publics tous les services de la marine qui s'occupent des transports.
A raison des difficultés que j'ai signalées en ce qui concerne les phares et fanaux, ces établissements seraient également compris dans la mesure dont il s'agit. Nous sommes donc d'accord sur ces points.
En me décidant à faire ce transfert, je suis dominé, messieurs, par un sentiment d'ordre et d'intérêt public ; car ce n'est pas sans un vif regret que le chef d'un département se sépare d'une administration chez laquelle il a trouvé le zèle et le dévouement les plus étendus qu'il puisse attendre de ses collaborateurs. J'éprouve le besoin de dire à la Chambre que les intérêts les plus sérieux ont pu seuls me déterminer à proposer une semblable mesure,
J'ajoute qu'il y a eu entente préalable entre les deux départements.
L'honorable membre me demande si je compte présenter avant peu un projet de loi pour la construction d'un septième steamer qui est indispensable pour le service des malles.
Oui, messieurs, j'ai l'intention de soumettre un projet de loi le plus tôt possible à la Chambre. Mais si je n'ai pas réalisé cette intention jusqu'à présent, c'est que j'ai voulu présenter un projet plus complet, de commun accord avec mon honorable collègue du département des travaux publics, et c'est là une preuve de plus de la vérité des paroles que j'ai tantôt prononcées.
Pour que le service des malles se fasse dans de bonnes conditions, il faut sept steamers : nous n'en avons que cinq construits d'après le type admis comme modèle. Le sixième est un bateau construit d'après l'ancien système et qui ne présente pas les garanties nécessaires. C'est un bateau (page 655) allongé, pourvu d'une machine beaucoup trop lourde. Pour le mettre dans un état convenable, il faudrait dépenser une somme considérable. Une machine neuve ne coûterait, à elle seule, pas moins de 80,000 francs. Il vaut donc mieux construire un nouveau steamer, indépendamment de celui pour l'acquisition duquel la Chambre vient de voter un crédit.
Messieurs, il est indispensable de comprendre, dans le projet de loi dont je parle, la création d'un chantier à Ostende.
Quand l'administration de la marine doit faire effectuer des réparations à un bateau, quand, par exemple, les coques doivent être nettoyées, on était obligé précédemment d'envoyer les navires à Anvers, et chacune de ces opérations coûtait 1,800 francs. Il résultait de là des dépenses et des retards considérables.
Aujourd'hui, on les envoie à Folkestone. La dépense est moindre, mais la perte de temps est plus grande.
Les réparations à faire aux machines sont assez fréquentes, et cela se comprend sans peine, nos navires faisant ensemble 1,560 traversées par an sans les services extraordinaires.
Donc, messieurs, je compte, avant peu, avoir l'honneur de proposer à la Chambre un crédit comportant les sommes nécessaires, d'une part, à la construction d'un nouveau bateau et, d'autre part, à la création d'un chantier où se feront les réparations urgentes.
- L'article 32 est adopté.
« Art. 33. Personnel : fr. 27,072. »
M. d'Hane-Steenhuyse. - Je ne demande à dire que deux mots.
Il y a quelque temps, une pétition a été lue dans cette Chambre et renvoyée à M. le ministre des affaires étrangères, pour instruction, relativement au passage d'eau entre Anvers et la Tète-de-Flandre.
Je me permets de recommander tout spécialement cette pétition à M. le ministre des affaires étrangères et de le prier de faire en sorte que le service se fasse le plus tôt possible le matin et le plus tard possible le soir.
- L'article est adopté.
« Art. 34. Personnel. Traitements d'activité et de disponibilité : fr. 199,266. »
- Adopté.
« Article. 35. Personnel. Traitements : fr. 42,094. »
- Adopté.
« Art. 36. Personnel : fr. 19,380.”
- Adopté.
« Art. 37.. Subsides aux caisses de prévoyance des pêcheurs et encouragements à l'éducation pratique des marins : fr. 52,945. »
- Adopté.
« Art. 38. Remises à divers agents du service des malles-postes, du pilotage et de la police maritime et vacations aux sauveteurs (crédit non limitatif) : fr. 900,000. »
- Adopté.
« Art. 39. Dépenses diverses : fr. 1,015,104.
« Charge extraordinaire : fr. 165,400. »
M. Van Outryve. - Messieurs, dans une note communiquée à la section centrale, M. le ministre des affaires étrangères nous expose les motifs pour lesquels nous ne voyons pas figurer au budget de 1872 le crédit de 2,000 francs qui jusqu'ici avait été réservé tous les ans à la caisse de prévoyance des pêcheurs de Blankenberghe. Voici comment s'exprime M. le ministre :
« Cette institution (la caisse d'épargne des pêcheurs de Blankenberghe) n'existe plus en fait. La caisse, par suite d'un déficit considérable, doit être réorganisée. Sa situation précaire est due à des causes diverses, dont la principale réside dans la participation aux secours de personnes non affiliées à la caisse et qui eussent dû être secourues par le bureau de bienfaisance.
« Le gouverneur de la Flandre occidentale a soumis des propositions pour la réorganisation de la caisse des pêcheurs de Blankenberghe.
« Il a été reconnu que cette réorganisation n'est possible que si l’Etat intervient pour apurer la dette de la caisse. Une somme de 24,000 francs serait nécessaire à cet effet.
« La législature sera saisie ultérieurement d'un projet de loi spécial à cet égard, »
II résulte de cette note que des faits de la nature la plus grave ont été commis ; il en résulte qu'une caisse d'épargne, largement subsidiée par le gouvernement et sur laquelle le gouvernement avait par conséquent des droits de surveillance incontestables, a été dilapidée, on ne sait ni par qui, ni dans quel but ; au moins M. le ministre ne nous donne aucun renseignement à cet égard.
Il est à remarquer qu'il ne s'agit pas ici d'irrégularités ou d'abus commis incidemment dans l'administration de la caisse ; l'importance du déficit prouve à l'évidence qu'il y a eu un parti pris de distraire systématiquement de leur destination les fonds de la caisse. Je n'examine pas où sont allés ces fonds, s'il ont été attribués au bureau de bienfaisance, ou s'ils ont passé ailleurs. Cette question ne peut avoir aucune importance. En effet, la caisse, alimentée par les subsides du gouvernement et par les cotisations des pêcheurs, constituait la propriété exclusive de ces derniers, et tout acte qui a eu pour objet d'en distraire n'importe quelle part, ne peut, ce me semble, porter d'autre nom que celui de détournement commis au détriment du patrimoine et de l'épargne du pauvre.
En présence de ces faits, je comprend parfaitement que M. le ministre des affaires étrangères n'ait pas inséré dans son budget ce crédit de 2,000 francs qui y figurait les années précédentes ; il n'était pas possible, en effet, de confier de nouveaux fonds à des administrateurs qui venaient de se montrer incapables de les gérer convenablement. Il n'y avait qu'un parti à prendre et c'est, je suis heureux de le constater, celui auquel s'est arrêté M. le ministre. La caisse sera donc réorganisée dans un bref délai et les pêcheurs de Blankenberghe ne resteront pas indéfiniment les victimes des abus qui viennent d'être signalés.
Il y a ici un intérêt d'humanité qui engagera, je l'espère, la Chambre, à voter sans hésiter les 24,000 francs qui seront nécessaires à la réorganisation de la caisse. Pour le gouvernement, cette somme n'est qu'une bagatelle, mais elle devient relativement importante, si on l'envisage au point de vue des misères qu'elle est appelée à soulager dans cette population si courageuse et si intéressante des pêcheurs de Blankenberghe.
Mais, messieurs, nous avons quelque chose de plus à faire.
Aujourd'hui que des rapports officiels viennent constater que les subsides du gouvernement ont été enlevés à leur destination pour être dépensés on ne sait comment, nous avons le droit et le devoir de rechercher les diverses responsabilités qui peuvent être engagées dans cette triste affaire.
Je demanderai donc à M. le ministre des affaires étrangères s'il ne conviendrait pas, avant de nous proposer le projet de loi qu'il a bien voulu nous annoncer, d'ouvrir une enquête à cet égard ?
Il sera indispensable, au moment où nous aurons à voter sur le crédit de 24,000 francs que nous avons demandé, que nous connaissions d'une manière précise la nature des abus qui peuvent avoir été commis.
Ces renseignements permettront à la Chambre de prendre les mesures nécessaires pour qu'à l'avenir nous n'ayons plus, au moins pour ce qui regarde la caisse d'épargne des pêcheurs de Blankenberghe, à nous occuper de scandales de cette, nature.
M. Van Iseghem. - Les 2,000 francs dont parle l'honorable M. Van Outryve d'Ydewalle, n'ont pas été retranchés du budget. Il se trouve à ce sujet une explication dans le rapport, page 18. « 2,000 francs sont chaque année réservés pour la caisse de Blankenberghe ; mais elle ne touchera de subside que lorsqu'elle sera reconstituée. » Par conséquent, les 2,000 francs sont maintenus dans le budget et font partie de l'article 37.
Le gouvernement toutefois ne délivrera pas de mandat aussi longtemps que cette caisse de prévoyance ne sera pas reconstituée.
Je ne veux pas m'occuper en ce moment de la gestion ; je dirai seulement que cette question a déjà été débattue il y a quelques années dans cette Chambre.
Les armateurs et les pêcheurs ne payaient pas à la caisse la même redevance que les autres pêcheurs du littoral. Je pense même que les pensions étaient aussi un peu plus élevées qu'ailleurs.
Au lieu de soutenir uniquement les pêcheurs, on a donné également des subsides à des artisans et à des personnes qui n'appartenaient pas à la pêche. Ce sont les motifs de la mauvaise situation financière de cette caisse ; l'administration n'a pas pris à temps les mesures nécessaires. Un tiers de la prime était réservé à la caisse de prévoyance. Cette somme a fait défaut. Par contre, on a accordé un subside à la suite de la suppression de la prime de 2,000 francs à la caisse de prévoyance de (page 656) Blankenberghe comme aux autres caisses du littoral, à l'exception de celle d'Ostende, qui n'a rien eu.
Nous avons eu le courage d'augmenter nos ressources ; c'est à cause que les intéressés dans la pêche d'Ostende ont pris à temps des mesures efficaces, se sont imposés, que le gouvernement a refusé de nous donner un subside.
Ce qui arrive est on ne peut plus malheureux pour les pêcheurs de Blankenberghe.
Je demande également à M. le ministre des affaires étrangères de bien vouloir nous présenter un projet pour réorganiser la caisse, mais je me demande si le pays doit payer le déficit de 24,000 francs qu'on demande pour reconstituer cette caisse ? C'est une question à examiner. Veut-on donner une prime à une mauvaise gestion ?
M. Bouvier. - Mais cela n'est pas à examiner. Je refuse de donner cette somme.
M. Van Iseghem. - Je le répète : les 2,000 francs dont parle M. Van Outryve n'ont pas été retranchés du budget.
M. d'Aspremont Lynden, ministre des affaires étrangères. - La question de la caisse de Blankenberghe est très embrouillée ; la débrouiller n’est pas chose facile, , vu que cette situation dure depuis nombre d'années. Pour mettre immédiatement la Chambre à même du l'apprécier, je crois que le plus simple est de lire le rapport qui a été fait sur cette question par le fonctionnaire qui, grâce à sa position, est le mieux à même de la bien connaître et de la bien juger, par M. le commissaire de l'arrondissent.
« Caisse de Blankenberghe
« Bruges, le 17 juin 1871.
A M. le gouverneur de la Flandre occidentale.
« M. le gouverneur.
« Comme suite à votre lettre du 29 avril dernier, 3ème direction, n044,759B, j'ai l'honneur de vous transmettre les pièces concernant la situation et la réorganisation de la caisse de pêcheurs à Blankenberghe.
« Il résulte de ces divers documents que les pensions arriérées à payer au 31 décembre 1870 s'élèvent à la somme de fr. 24,270-27, à savoir :
« Déficit du compte de 1868, fr. 1,255 77
« Payements à effectuer sur 1867 fr. 3,360 50, sur 1868 fr. 6,326, sur 1869 fr. 6,664 et sur 1870 fr. 6,664.
« Ensemble, fr. 24,270 27.
« Afin d'apurer cette dette, la commission administrative de ladite caisse propose pendant une période de cinq ans et ce à commencer de 1871 :
« A. Une intervention annuelle du gouvernement de 2,500 fr., soit fr. 12,500 »
« B. La quote-part des armateurs à raison de 20 francs par bateau sur 18 bateaux ou 960 francs par an, soit fr. 4,800.
« C. La quote-part des pêcheurs 2 francs par bateau ; sur 26 payes, soit 50 centimes par homme et par paye : fr. 12,480.
« D. Le comité des secours verserait les sommes restées disponibles sur les souscriptions recueillies en faveur des victimes de la tempête du 2 décembre 1867, fr. 9,000.
« Ensemble... fr. 38,780.
« En déduisant de cette somme les pensions dues sur les années 1867 à 1870, soit fr. 24,270 27, il resterait un boni final de fr. 14,509 73.
« Pendant cette même période, la commission propose de supprimer le payement de tous secours et pensions, ceci à l'effet de reconstituer le fonds de la caisse de prévoyance. Pendant ce laps de temps, le bureau c'e bienfaisance veillerait à subvenir aux familles les plus nécessiteuses. A partir de 1876, le service des pensions fonctionnerait à nouveau sur les bases indiquées ci-après :
« 1° Ressources
« A. Intervention annuelle des armateurs : fr. 960 ;
« B. Intervention annuelle des pêcheurs : fr. 2,496
« C. Intervention annuelle du gouvernement : fr. 2,500.
« En tout indépendamment de h somme de fr.14,509 73 mentionnée plus haut, fr. 5,956.
« Les pensions, en prenant pour base les modifications proposées dans le projet de règlement ci-joint, s'élèveraient à fr. 3,464. »
« De manière que les ressources seraient supérieures aux charges de fr. 492.
« Comme vous le voyez, M. le gouverneur, l'administration de Blankenberghe propose de disposer, pour réorganiser la caisse de prévoyance, de la somme de 9,000 francs, reliquat des souscriptions recueillies en faveur des victimes de la tempête du 2 décembre 1867.
« En raison des motifs que j'ai fait valoir dans mon rapport du 6 août 1869, n°12014, je ne puis me rallier à cette proposition. Cette somme a une affectation spéciale ; on ne peut la détourner de sa destination et l'administration du bureau de bienfaisance, bien qu'elle ait accédé a l'aliénation de ce capital, manquerait, selon moi, à ses devoirs si elle n'en réclamait pas la remise définitive dès qu'il s'agirait de la verser dans la caisse de prévoyance.
« Celle-ci ne se réorganisera peut-être pas ; son existence pourrait n'être que de courte durée et dans ces conditions, l'éventualité d'un nouveau sinistre exige hautement que cette somme soit remise en mains sûres et officielles.
« La combinaison proposée peut d'ailleurs s'effectuer sans le concours de ce capital, attendu qu'il ne doit former qu'un fonds de réserve.
« Le projet me semble devoir subir en outre quelques modifications.
« En payant par annuités et à partir de la réorganisation, comme on le propose, les pensions échues de 1867 à 1871, on arrive un peu tard pour soulager les misères endurées pendant cette période. Quant aux misères de 1871 à 1873, on ne s'en inquiète pas ; le bureau de bienfaisance y pourvoira.
« Cette combinaison me paraît peu heureuse et n'avoir d'autre but que de greffer la nouvelle institution sur sa devancière.
« Il vaudrait mieux déclarer ouvertement que, par suite d'un déficit de 24,000 francs, la caisse de prévoyance est anéantie et proposer d'en constituer une nouvelle sur les bases du projet, mais en affectant les ressources nouvelles aux pensions courantes ; les chiffres inscrits au projet resteraient les mêmes, à part le boni final de 14,509 fr. 75 c. constituant le fonds de réserve et qui serait réduit des 9,000 francs dont nous avons parlé plus haut.
« Il faudrait soumettre, les anciens comptes de gestion à la plus large publicité afin que les pêcheurs pussent s'assurer que les payements des pensions n'ont été arrêtés qu'au moment où ils ont eux-mêmes cessé de contribuer à la caisse ; ils devront reconnaître qu'ils n'ont aucun droit à une pension échue.
« Cette publicité est essentielle ; non seulement la population des pêcheurs est hostile à toute mesure de prévoyance, j'en ai dit les motifs dans mon rapport précité ; mais en outre elle nourrit contre l'institution qu'il s'agit de relever un sentiment de méfiance, malheureusement trop justifié par le désordre qui a présidé à son administration et la débâcle qui en a été la suite.
« L'emploi de ces mesures contribuera peut-être à faire renaître la confiance et à permettre à la caisse de fonctionner, mais je crains que l'administration de Blankenberghe ne se fasse illusion et n'arrive pas à déterminer les pêcheurs à accepter une convention quelconque et elle ne doit pas compter à cet effet sur l'influence des armateurs auprès des hommes d'équipage. En 1867, ils aurait pu intervenir utilement et ils n'en ont rien fait.
« En résumé, je persiste a croire que si le gouvernement qui, autrefois, comme je crois l'avoir démontré précédemment, faisait tous les frais de la caisse, ne consent pas, au même titre, à se charger de combler le déficit (24,000 francs), il ne faudra pas songer à maintenir cette institution. Le déficit liquidé, il serait possible de la réorganiser d'une manière sérieuse et durable en adoptant les bases du projet.
« Le commissaire d'arrondissement,
« (Signé) Goupy de Beauvolers. »
Si les conclusions de ce travail étaient admises, le gouvernement aurait un contrôle direct et permanent sur l'institution dont il s'agit. C'est dans ces conditions qu'il étudiera la question.
- L'article 39 est mis aux voix et adopté.
« Art. 40. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 2,300. »
- Adopté.
(page 657) « Art. 41. Secours à des fonctionnaires, employés, marins et agents sans nomination, à leurs veuves ou enfants, qui, sans avoir droit à la pension, ont des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 3,000. »
- Adopté.
« Art. 42. Créances arriérées des exercices antérieurs et dont la liquidation n'a pu être effectuée sur le budget de l'année à laquelle elles se rapportent : fr. 3,000. »
- Adopté.
« Art. 1er. Le budget du ministère des affaires étrangères est fixé, pour l'exercice 1872, à la somme de 4,323,870 fr. 30 c, conformément au tableau ci-annexé. »
- Adopté.
« Art. 2. Les fonds qui, à la clôture de l'exercice 1871, resteront disponibles sur les articles 25, 27 et 28, pourront être transférés au budget de 1872. »
- Adopté.
Il est procédé au vote, par appel nominal, sur l'ensemble du projet de loi.
87 membres y prennent part.
85 répondent oui.
2 répondent non.
En conséquence, le projet de loi est adopté.
Il sera renvoyé au Sénat.
Ont répondu oui : MM. Sainctelette, Simonis, Snoy, Tack, Tesch, Thienpont, Thonissen, Van Cromphaut, Vandenpeereboom, Vanden Steen, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Outryve d'Ydewalle, Van Overloop, Verbrugghen-, Vermeire, Verwilghen, Léon Visart, Vleminckx, Wasseige, Wouters, Ansiau, Balisaux, Bara, Beeckman, Biebuyck, Boucquéau, Boulenger, Bouvier, Cornesse, Crombez, Cruyt, d'Andrimont, Dansaert, de Baillet-Latour, de Borchgrave, de Clercq, de Dorlodot, De Fré, de Haerne, de Kerckhove, Delaet, Delcour, De Lehaye, de Lhoneux, de Liedekerke, de Macar, de Montblanc, de Muelenaere, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Smet, de Theux, Dethuin, de Vrints, de Zerezo de Tejada, d'Hane-Steenhuyse, Drion, Drubbel, Dumortier, Elias, Frère-Orban, Guillery, Hagemans, Hayez, Jacobs, Jamar, Lefebvre, Lescarts, Magherman, Mascart, Mouton, Mulle de Terschueren, Muller, Notelteirs, Nothomb, Pety de Thozée, Rembry, Reynaert, Rogier et Thibaut.
Ont répondu non :
MM. David et Demeur.
M. Reynaert. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau un rapport sur une demande de naturalisation ordinaire.
- Impression et distribution.
M. le lieutenant-général Guillaume, ministre de la guerre. - Je prie la Chambre de vouloir bien maintenir à l'ordre du jour du commencement de la séance de demain le projet de loi relatif à l'expropriation du local de la Cambre.
M. Bouvier. - Je pense qu'après le projet d'installation de l'académie militaire pourraient venir les rapports de pétitions ?
M. le président. - Après le projet relatif à l'installation de l'académie militaire à la Cambre, on pourrait mettre à l'ordre du jour les projets de loi relatifs à la demande en grande naturalisation des sieurs Carpentier de Changy qui a été prise en considération par les deux Chambres et ensuite les pétitions.
M. Pety de Thozée. - Si la Chambre discute demain des rapports de pétition, je vous demanderai, messieurs, de mettre à l'ordre du jour non seulement les deux projets de lois conférant la grande naturalisation aux sieurs Carpentier de Changy, mais aussi la prise en considération de huit demandes de naturalisation ordinaire, dont le feuilleton est distribué depuis quinze jours.
M. le président. - On mettra à l'ordre du jour : en premier lieu, le projet relatif à l'installation de l'académie militaire, en second lieu, le projet de loi relatif à des demandes en grande naturalisation et ensuite les feuilletons de pétitions. S'il reste un peu temps après la discussion de ces différents objets, on pourra s'occuper des feuilletons de naturalisation ordinaire.
- La séance est levée à 5 heures.