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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 3 juin 1871

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1870-1871)

(Présidence de M. Thibaut, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1340) M. de Vrints procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Reynaert donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la Chambre

M. de Vrints présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Par deux pétitions, des habitants de l'arrondissement de Nivelles prient la Chambre de rejeter les augmentations de l'impôt foncier proposées par le gouvernement. »

« Même demande des habitants de Wauthier-Braine. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi qui apporte des modifications aux lois d'impôt.


« M. Delcour demande un congé de quelques jours pour cause d'indisposition. »

« M. de Macar, obligé de s'absenter, demande un congé d'un jour. »

- Ces congés sont accordés.


« Le conseil communal d'Amonines demande que le gouvernement lève la prohibition du bétail à la sortie sur la frontière d'Athus à la mer ou du moins qu'il rende libre la frontière française qui touche à la province de Luxembourg. »

« Même demande des conseils communaux de Meix-devant-Virton, Beausaint, Sainte-Marie, Thiaumont. »

- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.


« Des habitants de Buggenhout demandent que la langue flamande soit, en tout, mise sur le même rang que la langue française. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur des pétitions identiques.


« Le sieur Berte demande une augmentation de traitement pour la gendarmerie. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget de la guerre.

Rapport sur des pétitions

M. Vermeire. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre, au nom de la commission de l'industrie, le rapport sur plusieurs pétitions qui ont été adressées à la Chambre par des bateliers et des négociants, tendantes à obtenir la diminution des droits de navigation sur les canaux.

- Impression, distribution et mise à la suite de l'ordre du jour de la séance de vendredi.

Projet de loi portant le budget du budget du ministère des travaux publics pour l'exercice 1871

Discussion générale

M. Verwilghen. - Messieurs, en prenant pour quelques instants la parole dans cette discussion, je m'empresse de remercier l'honorable ministre des travaux publics de la sympathie et de la bienveillance que, dès son entrée aux affaires, il a manifestées pour les populations et pour les intérêts du pays de Waes.

Au lieu de se borner, comme ses prédécesseurs, à de vaines et stériles promesses, il a posé des actes qui, je l'espère, ne tarderont pas à produire d'heureux résultats pour notre arrondissement ; il a notamment institué une commission chargée d'étudier et d'examiner, sous toutes ses faces, la question si longtemps agitée déjà de l'assainissement de nos polders.

Je ne doute pas que l'honorable ministre ne tienne la main à ce que la commission instituée par lui imprime la plus grande activité à ses travaux et dépose, en temps utile, des conclusions qui permettent de comprendre cet important objet dans la loi des travaux publics qui nous est annoncée comme devant être présentée avant la clôture de la session.

Messieurs, je n'ai garde de revenir sur les considérations si complètes que mon honorable ami M. Van Overloop a développées, dans une de nos dernières séances, en exposant à nouveau la question de l'assainissement des polders.

Je me bornerai simplement à appeler l'attention de la commission instituée par l'honorable ministre, sur un fait qui est de nature à faciliter, selon moi, la solution du problème que l'on a à résoudre.

Depuis quelques mois, le génie militaire exécute des travaux considérables de fortification sur la rive gauche de l'Escaut, notamment dans le polder de Melsele. On construit une digue défensive flanquée d'un fossé large et profond, qui a, si je ne me trompe, une longueur de plus de 2,000 mètres.

Il y aura là un réservoir colossal, dans lequel il sera facile de recueillir toutes les eaux qui proviennent du centre de l'arrondissement et auxquelles le polder de Beveren doit livrer passage.

Pendant tout le temps que la marée monte, le réservoir dont je parle pourrait se remplir, et à marée basse, les eaux recueillies seraient facilement et promptement déversées dans le fleuve. A mon sens, en procédant de cette manière, l'assainissement de toutes nos terres paludéennes serait complètement assuré.

L'honorable ministre des travaux publics n'a eu garde de réfuter l'assertion de mon honorable ami M. Van Overloop, qui a prétendu que, de tous les arrondissements du pays, c'est l'arrondissement de Saint-Nicolas qui a eu toujours le moins à se louer de la sollicitude du gouvernement en matière de travaux publics.

L'honorable ministre a bien fait de ne pas entreprendre une pareille réfutation ; il s'est souvenu de l'adage : A l'impossible nul n'est tenu.

Il nous a bien cité quelques chemins de fer construits dans notre arrondissement, mais aucun d'eux que je sache n'a obtenu du gouvernement la garantie d'un minimum d'intérêt ; les diverses compagnies qui ont construit ces lignes ont dû les entreprendre à leurs risques et périls.

On a encore cité en passant le canal de Stekene, mais l'honorable ministre ignore-t-il que ce canal existe depuis trois siècles ?

Je puis affirmer, sans craindre aucun démenti, que, depuis 1830, aucun travail d'utilité publique n'a été exécuté aux frais du gouvernement dans l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter. Le canal de Stekene dont je viens de parler appartient même à la commune dont je porte le (page 1341) nom et a été construit à ses frais avec le concours des propriétaires riverains.

Ce que je viens de dire des chemins de fer et des canaux, je puis l'étendre même aux voies de grande communication ! Depuis 1830, pas un seul kilomètre de routes n'a été construit par l'Etat dans l'arrondissement de Saint-Nicolas et je ne pense pas qu'on puisse me citer un seul arrondissement dans le pays qui, sous ce rapport, se trouve dans une situation aussi défavorable.

On objectera peut-être que si le gouvernement n'a rien fait, c'est qu'on ne lui a rien demandé. Mais ni la Chambre ni l'honorable M, Wasseige ne peuvent avoir oublié combien de fois déjà, dans cette enceinte, j'ai appelé l'attention du département des travaux publics sur la question, si importante pour nos populations, de l'assainissement des polders.

Il y a deux ans, dans la discussion du budget des travaux publics, j'ai fait ressortir toute l'importance qui était attachée à l'établissement d'une voie de grande communication reliant la grande route d'Anvers à Lille à la route provinciale de Termonde à Hulst.

D'après les ordres de l'honorable M. Jamar des études furent entreprises avec un louable empressement ; l'utilité, l'importance de la route recommandée furent hautement reconnues et le département des travaux publics s'empressa d'offrir un large concours.

Dans l'entre-temps, les huit communes intéressées à la prompte exécution de cette route, qui comptent ensemble une population de 36,000 à 37,000 habitants, adressèrent au conseil provincial des demandes de subsides ; et à la séance du 15 juillet, M. Seghers insista, dans le rapport présenté au conseil sur l'urgence qu'il y avait à prendre en considération les réclamations des conseils communaux de Belcele, Sinay, Kemseke, Saint-Gilles, Stekene, Dackenam, Saint-Paul et de la ville de Lokeren.

L'honorable rapporteur conclut au renvoi des demandes à la députation permanente aux fins d'en compléter l'instruction le plus promptement possible et de solliciter ensuite du département des travaux publics que la chaussée dont il s'agit, qui constitue une voie de grande communication, soit construite par l'Etat avec le concours des communes intéressées.

Les conditions exigées pour que le département des travaux publics intervienne par voie de subsides dans la construction de routes de grande communication nous ont été rappelées l'an dernier dans le rapport présenté par l'honorable M. Descamps.

L'honorable rapporteur nous renvoie au libellé même de l'article 7 du budget.

D'après ce libellé, il faut d'abord que les voies de communication en faveur desquelles le département des travaux publics est sollicité réunissent des routes de grande voirie, servent de raccordement à des sections de chemin de fer, ou aboutissent à des canaux ou à des rivières. Du moment que l'on se trouve dans l'une ou l'autre de ces hypothèses, le département des travaux publics peut donc intervenir par voie de subside.

Eh bien, messieurs, il se fait que la route dont j'entretiens en ce moment la Chambre se trouve à la fois dans les trois hypothèses prévues. En effet, elle réunit d'abord des routes de grande voirie, puisqu'elle aboutit d'une part à Lokeren, à la route internationale de première classe d'Anvers à Lille, et que, d'autre part, elle vient se souder à la route de Termonde à Hulst, autre route internationale ; ensuite elle sert de raccordement à des sections de chemins de fer. A Lokeren, les populations de Stekene et de Sinay pourront se servir plus commodément des lignes de Dendre-et-Waes et d'Anvers à Gand. A Saint-Gilles, elles auront bientôt à leur service la station à peu près achevée sur la section du chemin de fer de Malines à Terneuzen.

Lorsque le chemin de fer d'Eecloo à Gand sera exécuté, une troisième station à Stekene créera à la route un troisième aboutissant à une ligne ferrée.

Enfin, elle aboutit aussi à un canal et à une rivière, car, d'une part, elle touche au canal de Stekene, et, de l'autre, à la Durme.

Ainsi, messieurs, j'avais raison de le dire, la chaussée que je me permets de recommander se trouve à la fois dans les trois hypothèses prévues dans le libellé de l'article 7. De sorte que l'intervention pécuniaire du département des travaux publics se justifierait à un triple point de vue.

Mais, d'après le rapport de l'honorable M. Descamps, une seconde condition est exigée par le gouvernement.

Il faut qu'il soit démontré que la subvention de la province et du département de l'intérieur ainsi que le concours des communes intéressées ne suffisent pas pour couvrir la dépense. Quant aux communes, elles sont toutes prêtes à intervenir pour un tiers dans la dépense totale.

Mais en ce qui concerne la province de Flandre orientale, dois-je rappeler dans quelle fâcheuse situation elle se trouve ? A plusieurs reprises, cette situation a été signalée dans cette assemblée. Il paraît qu'au point de vue du développement de la voirie vicinale, le gouvernement n'intervient pas en faveur de cette province dans la même proportion et dans la même mesure qu'en faveur de certaines autres provinces du pays.

La situation faite à la Flandre orientale peut se résumer en ces termes : cette province a, dès à présent, épuisé les crédits ordinaires des exercices 1870-1871 ; elle a même entamé son exercice de 1872 à concurrence de 14,000 francs.

Comme le département de. l'intérieur ne dispose actuellement que d'un million pour la voirie vicinale, il en résulte que la part normale attribuée à la Flandre orientale ne s'élève qu'à 118,000 francs.

Or, pendant la dernière session, le conseil provincial a eu à s'occuper de 154 demandes nouvelles de routes vicinales à construire. On a fait dresser le devis, estimatif de ces nombreux travaux et l'on a constaté qu'il s'élève à 2,700,000 francs.

Si donc la part d'intervention du gouvernement n'était point augmentée dans une forte proportion, il en résulterait que l'exécution d'une quantité de nouvelles routes vicinales se trouverait indéfiniment ajournée.

En effet, les subsides que le département de l'intérieur aurait encore à allouer du chef de travaux de pavage en voie d'exécution et déjà subsidiés par la province comportent une somme d'environ 600,000 francs et absorbent les exercices 1870 à 1874 et en partie 1875. Ajoutez à cela les subventions qui devraient être accordées aux 134 projets nouveaux, vous trouverez une somme de 900,000 francs, de telle sorte que l'intégralité de sept à huit exercices suivants serait engagée, ce qui nous mènerait jusqu'en 1883 !

Il faut certes rendre justice à l'honorable ministre et reconnaître qu'il a eu mille fois raison en demandant à la législature, immédiatement après son entrée au ministère, un crédit extraordinaire d'un million pour activer l'exécution des voies de grande communication.

Grâce à ce premier million, auquel j'espère voir succéder plusieurs autres, il y aura moyen d'imprimer une vive impulsion à des travaux restés depuis longtemps en souffrance.

Il y aura moyen de compléter rapidement le grand réseau de routes vicinales dont le conseil provincial de la Flandre orientale a eu à s'occuper dans sa dernière session et dont la construction était malheureusement entravée par l'impossibilité d'obtenir, de la part de l'Etat, un concours financier proportionné à celui que la province était toute prête à accorder.

M. de Montblanc. - A l'occasion de la discussion du budget des travaux publics, je me vois obligé de renouveler les réclamations que j'ai déjà faites, dans le cours de la dernière session, relativement à l'état des travaux de canalisation de la Mandel. II y a là une situation qui appelle la sérieuse attention de M. le ministre des travaux publics. La première section du canal de Roulers à la Lys, celle qui fait l'objet de ma réclamation, n'atteint pas 7 kilomètres de parcours, et il y aura bientôt huit ans qu'on y travaille ; en vertu de son contrat, l'entrepreneur devait avoir terminé en juillet 1867, nous voici en 1871, l'entreprise restant toujours inachevée, et les remontrances du gouvernement sans effet.

A côté d'une pareille situation qui justifie d'elle-même l'intervention que je réclame, il y a cette autre considération, que le gouvernement ne doit pas perdre de vue, c'est l'intérêt exceptionnel que pourrait offrir le transport par voie navigable, en présence des majorations de tarifs dont le réseau de la Flandre est menacé. Il importe que le canal de Roulers soit entièrement livré à la circulation dans un bref délai.

L'honorable ministre a déjà accueilli, avec une bienveillance dont je le remercie, les démarches faites récemment à ce sujet ; mais je crois pouvoir assurer que les mesures qui ont dû être prises n'ont amené jusqu'aujourd'hui aucune amélioration à la lenteur des travaux. Je demande des mesures efficaces et le prompt achèvement du canal. Je signale également à l'attention de M. le ministre le retard qui est apporté à la mise en adjudication de la machine alimentaire du canal, pour laquelle un crédit a été voté il y a un an.

M. L. Visart. - Messieurs, je désire à mon tour adresser quelques réclamations à M. le ministre des travaux publics, au sujet des travaux commencés depuis si longtemps au port et aux accessoires du port de Nieuport. Il y a quelques années, plusieurs crédits ont été votés pour ces travaux. L'ensemble de ces crédits est de 1,500,000 francs, dont 900,000 francs sont employés ou engagés. 600,000 francs environ restent donc encore disponibles. Je ne demanderai donc aucun crédit au gouvernement, du moins en ce moment, pour la ville de Nieuport. Il ne s'agit, que d'employer utilement les sommes dont on dispose encore.

(page 1342) Les travaux d'amélioration du port de Nieuport pourraient tire poussés beaucoup plus activement qu'ils ne le sont actuellement.

Menés pour le moment avec une lenteur désespérante, ils menacent de ne jamais finir, car les réparations deviennent nécessaires avant l'achèvement complet de l'entreprise. Nieuport réclame spécialement l'établissement d'un bassin à flot. S'il était établi l’endroit occupé actuellement par l'arrière-port, la dépense serait relativement peu considérable. Je prie donc instamment M. le ministre de presser l'exécution de ces travaux d'où dépend non seulement la prospérité, mais l'existence même de la ville de Nieuport comme port de mer.

Puisque je parle du canton de Nieuport, je signalerai aussi à la bienveillante attention de M. le ministre des travaux publics les faits qui suivent.

Depuis plusieurs années, les fermiers de Wulpen, Ramscappelle, Avecappelle et Pervyse près Nieuport souffrent beaucoup de l'infiltration dans leurs terres des eaux salées de l'arrière-port de Nieuport. Je sais qu'il serait impossible de supprimer le mal dans sa racine, mais on peut y remédier dans une certaine mesure, en fournissant aux terres des eaux douces à prendre dans les canaux. Il faudrait ouvrir complètement l'écluse qui donne l'eau douce à cette contrée, ainsi que le déversoir, et fermer au même moment, pendant quelques jours, les petites écluses du canal de Passchendaete à Nieuport. De cette façon, la contrée dont je parle pourrait avoir l'eau douce qui lui est nécessaire.

Avant de finir, je tiens à dire quelques mots d'une question qui n'intéresse qu'indirectement l'arrondissement de Fumes que j'ai l'honneur de représenter dans cette Chambre. Le conseil communal de Loo, commune très importante de l'arrondissement de Dixmude, mais à une demi-lieue à peine de celui de Furnes, a adressé une requête au gouvernement pour obtenir un bureau de perception de la poste aux lettres. L'institution de ce bureau est d'une utilité, je dirai même d'une nécessité incontestable. J'espère que M. le ministre des travaux publics fera droit aux justes réclamations des habitants de la commune de Loo et de ses environs.

M. Bara. - Messieurs, je désire présenter quelques observations au sujet de la station de Tournai. Les faits dont j'ai à entretenir la Chambre, ont une certaine importance, non pas au point de vue technique, mais au point de vue des relations que les administrations communales doivent avoir avec l'administration centrale.

Messieurs, en 1864, on s'est occupé, au ministère des travaux publics, du déplacement de la station de Tournai et c'est ce département qui a lui-même indiqué la nécessité de ce déplacement.

En effet, messieurs, pour qui connaît cette station, elle est complètement insuffisante ; elle expose les citoyens à de nombreux dangers, et est un embarras pour l'exécution des divers services.

Après de nombreuses négociations, la ville s'entend avec le gouvernement ; il est décidé que la station sera placée entre la porte de Morelle et la porte du Château. Les plans sont envoyés par la ville à l'administration centrale.

Une lettre du ministre des travaux publics, du 16 juillet 1867, y apporte des modifications et enfin le conseil communal, à l'unanimité moins une voix, adopte les plans proposés par le gouvernement. Des travaux étaient nécessaires pour ménager les communications entre la station et la ville.

Le gouvernement fait avec la ville de Tournai une convention par laquelle la ville devait supporter certains frais relatifs à l'exécution de ces travaux.

Le ministre des travaux publics approuve la convention le 15 février 1870. Un premier crédit de 500,000 francs avait déjà été employé pour établir la station, et le gouvernement postula un second crédit de 500,000 francs qu'il obtint de la législature.

Les premiers 500,000 francs ont été dépensés et, lors de l'arrivée de M. Jacobs au ministère des travaux publics, l'honorable ministre fit mettre en adjudication certains travaux de terrassement à la nouvelle station. Cette adjudication a lieu le 18 juillet 1870 et est remise au 14 septembre 1870. A cette date, une soumission fut acceptée. On se mit à l'œuvre, mais M. Wasseige succéda à M. Jacobs et tout changea. M. Wasseige déclare que son opinion n'est pas faite, et l'honorable ministre prétend que la question doit être traitée à nouveau et il se réserve de l'examiner.

J'appelle l'attention de la Chambre sur ce point ; je vais démontrer en droit et en fait que M. Wasseige ne peut changer ce qui a été fait.

Il y a d'abord une décision de l'administration, du ministère des travaux publics décrétant que la station sera placée à l'endroit que j'ai indiqué. Le plan a été envoyé à l'administration communale de Tournai et c'est alors qu'est intervenue la convention suivante :

« Entre les soussignés Louis Delwart, conseiller représentant la ville de Tournai, d'une part ; Adolphe Willems, ingénieur, chef du service des voies et travaux des lignes du Sud-Ouest, représentant l'administration des chemins de fer de l'Etat, d'autre part, il a été convenu ce qui suit :

« Art. 1er. Les abords de la station de Tournai seront aménagés conformément aux indications en rouge au plan ci-joint.

« Art. 2. Les parties de la voie publique teintées en bistre au plan seront exécutées par les soins et aux frais de l'Etat, qui se chargera également de les entretenir pendant une année, à l'expiration de laquelle il en fera remise à l'administration communale.

« Art. 3. Le relèvement de la route de Renaix se fera par les soins et aux frais de l'Etat, qui aura à s'entendre, à cet effet, avec l'administration provinciale, après avoir entendu l'administration communale.

« Art. 4. La partie du boulevard comprise entre la route de Renaix et la ligne GH sera établie par les soins de l'Etat, qui se chargera des acquisitions de terrains ainsi que des travaux de terrassements et de pavage.

« L'entretien de ces travaux sera assuré également par les soins de l'Etat pendant un terme d'une année, à l'expiration de laquelle ils seront remis à l'administration communale, à l'exception de la partie de pavage abcd, qui continuera à être entretenue aux frais de l'Etat.

« Art. 5. L'administration communale interviendra comme suit dans les dépenses à résulter de l'établissement du boulevard.

« Elle payera :

« 1° 7,500 francs pour frais d'acquisition de la moitié des terrains du boulevard. (Le chiffre de 7,500 francs n'est qu'approximatif, les acquisitions n'étant pas terminées.) Il est établi comme suit : [détail non repris dans la présente version numérisée].

« 2° 20,815.33/2, pour la moitié de la dépense résultant d'un remblai de 24,902 mètres cubes, effectué par l'entrepreneur Mestrez ;

« 3° 5,056.47/2 très approximativement pour la moitié de la dépense résultant du déblai effectué par la société du chemin de fer de Péruwelz à Tournai ;

« 4° La moitié de la dépense à faire ultérieurement pour raccorder le boulevard à la route de Renaix relevée ;

« 5° La moitié des dépenses à faire, le cas échéant, pour l'entretien des travaux de terrassements pendant le terme d'une année.

« Art. 6. Les versements à faire par la commune ne pourront être inférieurs à 15,000 francs, sauf pour parfait payement des travaux d'établissement ou de ceux d'entretien ; ils auront lieu endéans le mois sur la production des pièces dressées par l'ingénieur chef de service des voies et travaux du chemin de fer et constatant l'import des dépenses faites en acquisitions de terrains ou en travaux effectués.

« Art. 7. Les pavages auront une largeur de 5 mètres pour le boulevard, la rue CD et la rue AD, et 3 m.50 pour les rues DB, DE et D'E' ; ils seront exécutés conformément aux profils indiqués au plan, avec pavés à provenir du démontage du chemin actuel pour la rue D'E' et pour les autres rues, à l'exception des 70,000 pavés provenant de l'adjudication du 23 juin dernier, avec pavés à provenir exclusivement des carrières prescrites par le cahier des charges n°141 de 1865 pour l'entretien des rues de grande voirie de la ville de Tournai, mais après avoir toutefois utilisé pour le pavage des rues NP, DE et DB, les pavés, susceptibles de remploi à provenir du démontage des pavages MRST et UST.

« Si, dans l'avenir, il était reconnu nécessaire d'élargir ces pavages, l'administration communale aurait à supporter entièrement la dépense de cet élargissement.

« Art. 8. L'appropriation de la partie non hachurée de la place de stationnement se fera conformément aux indications d'un plan que la commune soumettra préalablement à l'approbation du département des travaux publics.

« L'intervention de l'Etat, dans les frais à résulter de cette appropriation, consistera dans l'acquisition des terrains et l'exécution des terrassements et pavages à l'exclusion des trottoirs et des plantations.

« Art. 9. L'entretien de la place de stationnement sera à charge de la ville, sauf ce qui est prévu à l'article 4 pour la partie de pavage abcd.

(page 1343)

« Art. 10. Les trottoirs seront établis en cendrées avec bordure en pierre de taille, conformément aux profils indiqués au plan.

« Les trottoirs opposés à celui qui contourne le terre-plein de la station seront établis et entretenus par l’administration communale aux frais des propriétaires riverains.

« Les trottoirs contournant le terre-plein de la station seront établis et entretenus par les soins et aux frais de l'Etat.

« Art. 11. L'établissement et l'entretien des plantations du boulevard seront entièrement à charge de la ville.

« Art. 12. La présente convention ne sortira ses effets qu'après avoir reçu l'approbation de l'administration communale et celle de M. le ministre des travaux publics.

« Fait en triple a Tournai, le 16 novembre 1869.

« A. Willems, L. Delwart.

« Vu et approuvé par le conseil communal de la ville de Tournai, en séance du 4 décembre 1869.

« L'échevin ff. de bourgmestre, président, Fontaine.

« Par le conseil : Le secrétaire, Wattier,

« Approuvé n°479/486 B, Bruxelles, le 15 février 1870, Le ministre des travaux publics, A. Jamar. »

Après cette convention, qu'arrive-t-il ? La ville de Tournai se met en mesure de l'exécuter et paye 19,000 francs à l'Etat. Je demande, messieurs, si dans des circonstances de ce genre, il est permis au ministre des travaux publics de dire qu'il retire sa parole, qu'il laisse protester la signature de ses prédécesseurs, et qu'il n'exécutera pas ce que M. Jacobs a exécuté lui-même ? Car, le 12 juillet 1870, M. Jacobs mettait en adjudication pour 137,000 francs de travaux de terrassement.

En matière d'administration, il ne peut y avoir de différence entre un ministère libéral et un ministère catholique. Il y a une signature, il y a un engagement pris par les prédécesseurs du ministre actuel, et les engagements de ce genre doivent être nécessairement tenus. Eh bien, messieurs, la ville de Tournai verse entre les mains du trésor la somme nécessaire pour la construction des voies de communication. Que fait le gouvernement, quand il a compté l'argent ?

Il dit : « Nous examinerons à nouveau. » Mais vous ne pouvez pas vous dégager de cette convention ; vous l'avez signée, et si vous ne voulez pas l'exécuter, vous serez sujet à une action devant les tribunaux de la part de la ville de Tournai.

Messieurs, j'appelle encore l'attention de l'honorable ministre des travaux publics sur ce qui pourrait résulter d'un pareil changement. Voilà un plan qui est publié partout, voilà un plan de station qui est exposé à toutes les vitrines de librairie de la ville de Tournai, qui est exposé à l'administration communale, qui est indiqué comme devant être réalisé, sur lequel la ville fait une convention qu'elle exécute et que le gouvernement exécute ! Eh bien, les propriétaires agissent en conséquence, ils font des achats ; cela dure un certain temps, et après cela, on vient dire que tout est à refaire ! Cela n'est pas possible..

Messieurs, ce n'est pas là de la bonne administration. (Interruption de M. Dumortier.)

Je n'ai pas à examiner si la station de Tournai est convenablement située ; je parlerai en fait tout à l'heure, mais je dis qu'en droit vous ne pouvez pas revenir sur ce qui a été fait, à moins de prétendre que ce que le gouvernement signe est un chiffon de papier qu'on peut déchirer du jour au lendemain, et qu'on ne peut avoir de confiance dans la signature d'un ministre.

En fait, cela est-il possible ? Je n'irai pas entretenir la Chambre de la question de savoir, comme va le faire l'honorable M. Dumortier tout à l'heure, si une station doit être mise là ou là. Mais quels sont les plus compétents pour dire où une station doit se trouver ? C'est l'administration des chemins de fer et c'est la ville où la station doit être. L'administration des chemins de fer a émis l'avis, et de longue date, que la station doit être là où on l'a placée. Il n'y a pas eu divergence à cet égard, et je suis convaincu que M. le ministre des travaux publics ne vous apportera pas d'opinion contraire et que les fonctionnaires qui ont émis un avis le maintiennent.

Quant à la ville, le conseil communal, à l'unanimité moins une voix, celle du frère de l'honorable M. Dumortier, a admis le projet. M. Wasseige a reçu une députation qui comptait des catholiques et des libéraux, et qui lui a fait connaître que le conseil communal maintenait, de la manière la plus complète, son opinion.

Donc ni variation dans l'opinion de l'administration centrale et des ingénieurs, ni variation dans l'opinion des représentants de la ville. Il n'y a qu'un ministre changé et tout doit être modifié. Et encore son prédécesseur, l'honorable M. Jacobs, avait approuvé les plans. Et pourquoi ? Il faut bien le dire, parce que l'honorable M. Dumortier, qui se prétend ingénieur, qui prétend mieux savoir que les ingénieurs où une station doit se trouver, veut que la station ne soit pas déplacée. Il prétend qu'une station doit être à rebroussement. Les ingénieurs ont démontré que c'était là une opinion détestable. Je ne discuterai pas ce point avec lui ; cette question n'est pas de la compétence de la Chambre. Mais je dirai à M. le ministre des travaux publics : Vous avez l'opinion de votre administration ; vous avez le vœu de la ville. Vous avez une convention que vous avez exécutée. Vous êtes lié et continuez à observer le contrat qui vous lie.

Je prie donc M. le ministre de donner suite aux résolutions qui ont été convenues et qui forment un véritable contrat entre lui et la ville de Tournai. Il ne peut pas différer davantage.

Le gouvernement a encore à sa disposition près de 400,000 francs. Il y a eu un premier crédit de 500,000 francs qui a été dépensé ; et 137,000 francs sur un second crédit de 500,000 francs ont aussi été dépensés. Si l'on changeait la position de la station, ce serait 637,000 fr. que l'Etat aurait dépensés en pure perte.

M. Dumortier. - Où allez-vous chercher ces 637,000 francs ! Ils n'existent que dans votre imagination.

M. Bara. - Le premier crédit de 500,000 francs a été dépensé en achat de terrains et terrassements. Si cela n'est pas, M. le ministre le dira, mais il ne me démentira pas ; et en outre, le 14 septembre, une entreprise de 137,000 francs a eu lieu, ce qui fait 637,000 francs.

On a obtenu en 1868 un premier crédit de 500,000 francs, qui a été dépensé, et en 1870 on a voté un second crédit de 500,000 francs sur lequel on a dépensé 137,000 francs. Cela fait bien 637,000 francs, qui seront jetés à l'eau, si l'honorable M. Dumortier parvient à avoir raison. Cela n'est pas possible ; cela ne sera pas. (Interruption.).

Il reste disponible 500,000 francs, moins 137,000 francs ; mais, de plus, la compagnie d'exploitation doit fournir 150,000 francs pour son entrée dans la station de Tournai. De telle sorte que le gouvernement a en main 400,000 à 500,000 francs et nous ne pouvons plus avoir de travaux. Trois ou quatre ouvriers travaillent. Je demande si c'est raisonnable. Vous avez dépensé 637,000 francs et vous abandonnez les travaux. Pourquoi ? Pour satisfaire l'honorable M. Dumortier. Cela n'est pas sérieux.

Si l'honorable ministre veut déplacer la station, qu'il en prenne la responsabilité, qu'il le dise. Si l'honorable M. Dumortier triomphe, qu'il triomphe immédiatement, que le gouvernement prenne une résolution. Voilà un temps infini que cette situation dure. On a achevé la station de Charleroi ; on a achevé la station de Mons. Quant à la station de Tournai, l'honorable M. Dumortier empêche qu'on y fasse rien. Cela ne peut continuer ainsi.

Il est un autre point que je signale à l'attention du gouvernement. Il existe, par suite de la construction du chemin de fer de Hainaut-Flandres, un passage à niveau près de la porte de Morelle, extrêmement dangereux. Déjà deux personnes ont été tuées.

Dès le mois d'octobre de l'année dernière, on a demandé à M. le ministre des travaux publics de vouloir bien faire mettre en adjudication les travaux devant supprimer le passage à niveau ; M. le ministre a répondu à l'administration communale de Tournai que le retard provenait de la députation permanente.

La députation permanente a de suite envoyé les plans, et au mois d'avril une députation du conseil communal de Tournai est venue trouver M. le ministre des travaux publics, qui a promis de mettre cet ouvrage en adjudication dans le plus bref délai.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Je n'ai pas. dit cela.

M. Bara. - Un rapport que j'ai en main dit le contraire. Au surplus, il n'y a pas de contestation sur l'utilité de ce travail. Je demande donc pourquoi on laisse subsister ce passage à niveau qui présente les plus grands dangers ? Je prie le gouvernement de vouloir bien ordonner le plus tôt possible une adjudication.

(page 1344) Avant de finir, permettez-moi de dire un mot au sujet de la canalisation de l’Escaut.

Par suite de cette canalisation, certains égouts de la ville ne peuvent plus se décharger dans l’Escaut à cause de l’élévation des eaux. Déjà sous l’ancienne administration, l’attention du gouvernement a été appelée sur cet objet, et le gouvernement a promis une enquête et a reconnu que les frais de ce travail lui incombaient.

Je prie donc l’honorable ministre des travaux publics de vouloir bien mettre cette question à l’étude et de la faire résoudre le plus tôt possible.

M. Dumortier. - Messieurs, il y a beaucoup à répondre à ce que vient de dire l'honorable membre. Il s'est placé à deux points de vue : il dit qu'en droit, la station, dont il a toujours été l'un des rares protecteurs, doit être exécutée parce qu'il y a un contrat. Eh bien, messieurs, savez-vous ce que c'est que ce contrat ? C'est un acte dressé pour certains travaux à construire, et en vertu de cet acte la station est décrétée, elle est faite ! Si on raisonne ainsi au palais de justice, je n'y comprends plus rien.

Quel est l'historique de la question ? Certaines personnes, agissant dans leur propre intérêt, ont voulu faire transférer la station à l'autre extrémité de la ville. A peine ce projet fut-il connu, une foule de pétitionnaires se sont adressés à la Chambre pour demander le maintien de la station actuelle, et en tête de ces pétitionnaires figuraient les propres cousins germains de l'honorable membre qui vient de parler.

Cette pétition demandait ce que toutes les villes recherchent aujourd'hui, une station intérieure.

Depuis lors, de nouvelles pétitions nous sont parvenues chaque année pour demander le maintien de la station actuelle. Dernièrement encore, nous en avons reçu une qui était signée par 500 ou 600 électeurs.

L'an dernier, une pétition dans le même sens avait été adressée au conseil communal de Tournai ; elle portait les signatures de plus de quatre cents électeurs qui demandaient que si l'on voulait absolument déplacer la station, elle fût transférée sur un autre emplacement qu'ils indiquaient. Eh bien, le conseil communal n'a pas même examiné celte demande.

Les habitants ont pétitionné et la raison en est simple. Les personnes qui ont conçu l'étrange projet contre lequel on proteste veulent déplacer le centre industriel de Tournai.

La ville de Tournai est séparé en deux par l'Escaut, une partie se trouve sur la rive droite, l'autre sur la rive gauche ; la rive gauche est le côté commercial de la ville ; eh bien, on veut mettre la station à la rive droite, ce qui serait la ruine de tous les habitants qui ont créé des établissements sur l'autre rive. (Interruption.)

C'est là une chose certaine, le jour où vous aurez établi la station de l'autre côté de la ville, en dehors de la ville, vous aurez ruiné un grand nombre d'habitants, parce que vous aurez diminué la valeur de leurs habitations, de leur commerce et de leur industrie. Et c'est pour cela que les pétitionnaires réclament.

Et, remarquez-le, messieurs, la dernière pétition émane précisément des gens qui seraient ruinés par le déplacement de la station. Or, je crois que l'opinion de cinq cents pères de famille vaut bien celle de cinq ou six conseillers communaux. Ce ne sont en réalité que des intérêts privés qui réclament le déplacement de la station. (Interruption.) Ceux qui la demandent ne le feraient pas s'ils n'avaient des fours à chaux là où il s'agirait de placer la station et je les nommerai s'il le faut, parce que je veux remplir mon mandat.

Ce sont tous les habitants de Tournai qui réclament contre la spoliation qu'on veut faire de leur fortune et de la fortune de leurs enfants.

Je suis bien obligé de le dire, mais depuis le commencement de cette affaire on a procédé par le mensonge.

Je n'ai pas ici en ce moment, mais j'ai fait chercher chez moi des documents qui prouveront à l'évidence que c'est par le mensonge qu'on a procédé jusqu'ici et que le conseil communal a été trompé. On est venu lui dire : Le ministre veut le déplacement de la station et vous devez le voter. Or, quelques jours après le ministre répondait : Puisque le conseil communal veut le déplacement de la station, j'y consens. Ainsi le ministre ne consentait que parce que le conseil communal le demandait, et le conseil communal n'avait voté que par suite d'un mensonge. (Interruption.) Ces faits sont patents, ils sont consignés dans les documents publiés par la ville elle-même.

J'invoque l'opinion de tous ceux qui connaissent la ville de Tournai et je suis certain qu'ils vous diront que ce que, l'on fait est use véritable indignité. Non seulement on favorise les intérêts de quelques faiseurs, mais on a rendu les abords de Tournai impossibles; la porte du Château est devenue un véritable coupe-gorge, plus aucune route directe n'y mène, il faut traverser un véritable labyrinthe pour y arriver; à la porte de Morelle ; on a établi un passage à niveau tellement dangereux que, non pas deux personnes, comme l'a dit M. Bara, mais trois personnes y ont été écrasées.

Et maintenant que veut-on faire? On veut établir un passage à une hauteur de 18 à 20 pieds au-dessus des chemins de fer; c'est-à-dire qu'on veut, comme à Neuchâtel, créer un véritable précipice. Et tout cela, pourquoi ? Pour donner satisfaction aux intérêts de quelques spéculateurs dont nous n'avons pas à nous occuper ici.

Mais, nous dit-on, le conseil communal de Tournai, représentant légal de la ville est hostile au projet que je défends. Pour moi, messieurs, il y a un représentant légal bien autrement respectable, ce sont les 500 à 600 électeurs, constituant la grande majorité du corps électoral, qui, au nom de la justice, demandent le maintien de la station actuelle.

A chaque instant, vous nous parlez de la souveraineté du peuple. Respectez-la donc quand elle se manifeste d'une façon aussi imposante et vient vous demander de lui rendre justice.

Messieurs, la station de Tournai est une station à rebroussement ; et l'honorable M. Bara ignore, sans doute, que, dans l'intérêt de la célérité des services, les stations à rebroussement sont les plus utiles, les seules mêmes qui permettent les convois de vitesse.

En effet, messieurs, lorsqu'un convoi de vitesse arrive à Tournai, à peine les voyageurs à destination de Tournai en sont-ils descendus, qu'une nouvelle locomotive, préparée d'avance et parfaitement alimentée, prend le convoi à l'arrière et se dirige vers sa destination ; tandis qu'avec un train direct, il y aurait des temps d'arrêt d'une dizaine de minutes pour renouveler l'eau et le charbon de la locomotive. Les stations à rebroussement sont d'une utilité tellement évidente et si bien reconnue aujourd'hui, qu'on n'en fait plus d'autres dans toutes les localités qui sont dans la situation de celle de Tournai.

Oh ! je le sais, à une autre époque, lorsqu'il fallait placer locomotive et tender sur une plate-forme pour les changer de position, les stations à rebroussement offraient de grands inconvénients ; mais nous n'en sommes plus là aujourd'hui. Dès l'arrivée d'un train, une locomotive vient le prendre à l'arrière pendant qu'on détache celle qui a amené le convoi;, de sorte qu'il n'y a pas la moindre perte de temps pour les voyageurs.

Il est à remarquer, d'ailleurs, qu'à Tournai on doit, en tout état de cause, changer de locomotive et de personnel pour entrer en France. Mais tout cela n'est pas la question ; la question essentielle, la seule question même, c'est que la ville tout entière proteste et réclame, et que la dépense qu'on va faire sera, non pas de 500,000 à 600,000 francs, comme le dit l'honorable M. Bara, mais de 2,000,000 à 3,000,000 de francs.

Il tà savoir si l'Etat veut consacrer deux à trois millions de francs dans l'intérêt de quelques personnes qui spéculent et ruiner la ville. Les ingénieurs l'ont dit en ma présence dans le bureau de l'honorable M. Vanderstichelen, c'est une dépense de deux à trois millions.

Les réclamations qui nous arrivent émanent de toutes les sources, de libéraux comme de catholiques.

Le gouvernement manquerait à tous ses devoirs si, pour satisfaire à quelques exigences passionnées, pour faire les affaires de quelques personnes qui ont fait des spéculations sur ces terrains, il venait ruiner les habitants de Tournai.

Vous parlez d'un contrat qui a une importance de 137,000 francs. Mais il y a un autre contrat dont vous ne parlez pas, en vertu duquel la ville a payé à l'Etat 100,000 francs, lui a donné tous les terrains et a fait la dépense du grillage en fer qui entoure la station.

C'est une dépense de 300,000 francs faite par la ville. Cela prouve combien vos idées ont peu de fondement.

Je dis donc qu'il s'agit d'une question de la dernière importance. Il importe de savoir si le commerce de toutes les rues qui conduisent vers la ville existera oui ou non, car du côté de la place et de toutes les grandes rues, il n'y aura pas une voie aboutissant à la station.

Et ne dites pas qu'il y aura une rue allant vers la cathédrale. La pente dans cette direction sera tellement forte que les chariots ne pourront y passer. La station sera à vingt pieds au-dessus du niveau de la ville. Allez-vous faire des degrés pour y arriver ?

Rien n'a été calculé. Il n'y a en jeu que l'avidité de quelques personnes qui ont spéculé sur le déplacement de la station.

(page 1345) Messieurs, je suis peiné de voir M. Bara, dont j'ai toujours reconnu l'intégrité en matière d'argent, se faire l'avocat de ces mauvaises spéculations qu'il ignore peut-être, mais qu'il doit connaître.

Encore une fois, messieurs, huit pétitions ont été signées ; or, si vous preniez l'ensemble de ces pétitions, vous y verriez la signature de toutes les familles électorales de Tournai.

Les parents de ceux qui votent au conseil communal, pour le déplacement de la station, ont fait chercher les pétitions, tant ils trouvent ce déplacement préjudiciable à la ville.

Ils ont demandé à apposer leur signature sur des pétitions qui ne leur avaient pas été présentées. Tout le monde reconnaît que ce déplacement est inique et est de nature à causer un préjudice considérable à la ville.

On ne pose pas d'actes semblables, messieurs ; il s'agit d'une dépense de 2 millions et demi ; eh bien, avant de faire une telle dépense, le gouvernement doit y regarder à deux fois ; rien, du reste, n'est engagé. Personne ne peut contester cela, pas plus qu'on ne pouvait le faire lorsqu'il s'est agi de la station actuelle, qui a coûté à la ville la somme de 300,000 francs.

Le gouvernement doit considérer deux choses : l'intérêt du trésor public d'une part, et l'intérêt des habitants d'un autre côté.

Quand les habitants réclament et que huit pétitions successives ont été présentées à cette Chambre et au conseil communal pour le maintien de la station actuelle, maintien qui éviterait au moins 2,000,000 de dépense au gouvernement, je dis qu'il y a lieu d'examiner l'objet dont il est question. Il s'agit de l'intérêt du commerce et de celui des habitants.

J'ai la ferme confiance que M. le ministre des travaux publics examinera la chose avec toute la maturité et la justice qu'elle exige.

M. Bara. - J'en demande pardon à la Chambre, mais je désire dire encore quelques mots sur cette affaire. Bien que la Chambre paraisse ne pas partager l'opinion de M. Dumortier en matière de chemins de fer et de stations, l'opposition de l'honorable membre a une très grande influence et il pourrait se faire que la question qui nous occupe ne fût pas, grâce à lui, résolue d'ici à longtemps.

L'honorable membre est venu jeter dans le débat un élément que je regrette ; il a parlé d'intérêt privé.

Je ne sais si l'honorable M. Dumortier a fait allusion à ce qui me concerne...

M. Dumortier. - J'ai dit, au contraire, que j'étais peiné de voir un homme dont l'intégrité m'est connue se faire l'avocat de mauvaises spéculations.

M. Bara. - Je ne suis donc pas en cause et j'ajoute : ni mes amis politiques non plus.

Vous savez parfaitement, M. Dumortier, que la station de Tournai est réclamée aussi bien par mes adversaires politiques que par mes amis.

M. Dumortier. - Par un seul.

M. Bara. - Par un 1res grand nombre, que je pourrais vous citer.

Vous faites toujours des allusions à des spéculations que je ne connais pas, que personne ne connaît ; mais à qui faites-vous ces allusions ? Révélez ces spéculations et nommez les spéculateurs. Est-ce à un de vos amis ou à un de vos adversaires politiques que vous vous adressez ?

M. Dumortier. - Vous le savez fort bien.

M. Bara. - Je ne sais absolument rien et votre langage me fait supposer même que vous voulez désigner un membre de votre parti.

Au surplus, je dis que le langage de l'honorable M. Dumortier est une injure à l'adresse du conseil communal de Tournai et de l'administration des travaux publics, qui ont arrêté les plans exécutés, pour lesquels on a déjà dépensé 637,000 francs.

Comment ces plans ont-ils été arrêtés ? Ils se sont faits par un accord de l'administration communale de Tournai et du gouvernement.

Ainsi donc, l'administration centrale, les directeurs, les inspecteurs, tous les ingénieurs se sont trouvés d'accord avec l'administration communale, composée de vingt et un membres, pour favoriser, au détriment de la ville, des spéculations de terrains. Du reste, je ne sais vraiment pas où ces spéculations seraient possibles !

C'est l'administration centrale elle-même qui vient signaler la nécessité de changer la station ; c'est elle qui déclare que si l'on ne veut pas changer la station, elle ne reliera Tournai à sa voie directe que par un raccordement.

L'administration a prévenu la ville qu'elle ferait une station en dehors de son enceinte. (Interruption de M. Dumortier.) Certainement ; comment voulez-vous exécuter autrement le chemin de fer d'Anvers à Douai ? Vous devez continuer de l'autre côté de Tournai ; vous auriez donc un chemin de fer international faisant le tour de la ville, un chemin de fer de ceinture ! Est-ce sérieux ?

M. Dumortier vient prétendre que la ville est hostile au projet de déplacement.

Si ce que dit M. Dumortier était exact, M. Dumortier aurait pu obtenir satisfaction dans les élections.

Quantité d'élections ont eu lieu depuis l'époque où la station est commencée.

M. Dumortier annonçait, en 1868, que, du moment que l'on prendrait la pioche pour construire la station de Tournai, ce serait presque une révolution dans cette ville.

On a fait des achats de terrains et des terrassements pour 637,000 francs, ce qui n'est pas du tout, comme le prétend mon honorable adversaire, un nivellement des fortifications ; c'est un terre-plein pour asseoir la station, et il n'y a pas eu de réclamations. Vous avez eu des élections ; avez-vous renversé les conseillers communaux qui avaient voté dans le sens contraire à vos opinions sur la station ? On ne s'en est pas occupé.

On s'est occupé du clérical et du libéral, mais pas de la station de Tournai. On a même nommé un de vos amis membre du conseil communal et il était partisan de la nouvelle station. Vous pouviez en choisir d'autres, puisque vous prétendez que cette question était si importante. Mais un de vos amis, favorable à la station nouvelle, a été élu. Vous ne pouvez donc pas prétendre que les électeurs de Tournai sont contraires à cette station. Mais vous avez vraiment une prétention incroyable ! Vous prétendez représenter la ville de Tournai contre son conseil communal et ses députés et vous voulez que votre opinion l'emporte sur la leur.

Peut-on admettre que, parce que M. Dumortier s'est mis dans la tête que la station doit rester à la place où elle est, qu'elle doive y rester éternellement ? Et faut-il que la ville de Tournai reste dans cette situation un temps infini, parce que M. Dumortier est l'ami de M. Wasseige ? Voilà pourtant la position qu'on nous fait.

M. Jacobs avait donné suite à ce qui avait été arrêté ; il avait adjugé les travaux. Il est vrai que l'honorable M. Jacobs est de la jeune droite, tandis que MM. Dumortier et Wasseige sont de la vieille droite. M. Dumortier veut des stations à rebroussement ; soit, chacun son goût ; mais si l'administration des chemins de fer ou la ville, de Tournai n'en veulent pas !...

M. Dumortier. - Ne parlez pas de la ville de Tournai, parlez des pétitions.

M. Bara. - D'abord, je n'ai pas examiné ces pétitions, je crois qu'elles ne sont pas ce que vous dites ; je suis convaincu qu'il y a beaucoup à en rabattre ; du reste, on sait comment on signe des pétitions. Evidemment, quand vous voulez déplacer une station, il y a des personnes qui sont lésées, qui font opposition et qui signent les pétitions ; mais cela ne représente pas l'opinion publique, et vous ne pourrez jamais soutenir que vous avez plus de valeur que le conseil communal de Tournai qui a envoyé, il n'y a pas un mois, une députation auprès du ministre des travaux publics pour déclarer qu'elle persistait dans toutes ses résolutions et qu'elle en réclamait l'exécution la plus prompte possible.

Pouvez-vous détruire l'importance de ces manifestations légales de l'opinion publique ? Non, c'est impossible, et si on le faisait, ce serait un outrage fait à l'administration communale de Tournai, ce serait se mettre au-dessus des personnes qui ont mandat pour défendre ses intérêts, ce serait faire fi des décisions d'un corps constitué. A-t-on des raisons pour changer ce qui a été fait ? Non, et d'aucune espèce. Moi, j'ai des raisons pour faire avancer ces travaux.

Eh bien, je dis à l'Etat : « Vous êtes lié par un contrat. » Ce contrat dit : « Les abords de la station de Tournai seront aménagés conformément aux indications ci-jointes. »

Le plan est donc arrêté contractuellement entre la ville et l'Etat. C'est une décision définitivement prise. On l'exécute, la ville paye sa part dans les frais et vous déclarez qu'il n'y a pas de contrat d'engagement !

M. Dumortier croit m'embarrasser en me disant : « Il y a un autre contrat dont vous ne parlez pas. La ville a dépensé 300,000 francs pour l'ancienne station. » Eh bien, réclamez du ministre ces 300,000 francs, puisqu'il fait une nouvelle station. Comme vous avez une grande influence sur l'honorable ministre des travaux publics, réclamez auprès de lui.

Voilà un service qu'il peut rendre ; au lieu de combattre la création de la nouvelle station, qu'il réclame les 300,000 francs de l'ancienne station. Voilà où il témoignera de l'intérêt pour la ville qu'il a représentée dans le temps.

(page 1346) M. Dumortier. - Pour amoindrir la position de la ville, n'est-ce pas ? Merci ! Timeo Danaos et dona ferentes.

M. Bara. - Vous pouvez être utile à la ville. Vous ne le voulez pas. Quand le gouvernement veut dépenser 2 millions et demi à 3 millions pour la nouvelle station, ce que je crois, d'ailleurs, exagéré, vous vous y opposez ; vous dites : On ne doit pas dépenser autant ; Tournai ne mérite pas cela. Et quand je demande les 300,000 francs de l'ancienne station, vous ne voulez rien faire. Ainsi, vous prétendez, d'une part, que l'on veut trop dépenser pour Tournai, et d'autre part, vous ne voulez pas réclamer 300,000 francs que vous prétendez lui être dus. Ce n'est pas bien ; vous devriez vous souvenir que vous avez été député de Tournai.

M. Dumortier. - Vous pouviez réclamer ces 300,000 francs pour Tournai et vous ne l'avez pas fait.

M. Bara. - Je ne l'ai pas fait par une raison bien simple : c'est que je ne crois pas que ces 500,000 francs sont dus, et comme je ne me suis pas permis de dire qu'ils sont dus, je ne les ai pas réclamés. Mais vous voudriez faire croire aux Tournaisiens qu'ils sont dus et vous ne voulez pas les réclamer. S'ils sont dus, comme vous avez voix au chapitre, tâchez de nous les faire obtenir. (Interruption.)

Je dis donc qu'il y a un contrat et je demande au gouvernement s'il veut le faire exécuter. Il me paraît impossible qu'il ne le veuille pas. Il me paraît impossible que le gouvernement ait dépensé 637,000 francs dans une entreprise, qu'il ait préparé le terrain de la station, qu'il ait démoli les fortifications, qu'il ait fait un terre-plein, qu'il ait pris des arrangements avec la Société d'exploitation, et qu'il vienne dire ensuite : On ne fera pas la station,

Mais, je le répète, si le gouvernement ne veut pas faire cette station, qu'il en prenne la responsabilité et qu'il fasse une autre station. Il est clair que nous ne pouvons rester dans la situation actuelle. Quant aux particuliers qui seront lésés par la décision que prendra M. le ministre, ils feront ce qu'ils voudront, mais la ville de Tournai ne peut rester dans cette situation.

Quant au passage à niveau, j'insiste pour que M. le minière des travaux publics prenne une décision. Comme vous le dit l'honorable M. Dumortier, plusieurs malheurs sont déjà arrivés. Je crois que cela est assez grave pour qu'on ne diffère pas plus longtemps l'exécution de ce travail.

M. Dumortier. - Messieurs, l'honorable M. Bara vous dit deux choses qui se combattent. Il me dit : Pourquoi, si ce que vous avancez est l'expression de l'opinion publique, les électeurs ont-ils renvoyé au conseil communal les partisans de cette station ? Et puis il vous dit : Les élections ont été faites et l'on ne s'est pas occupé de la question de la station. Eh bien, voilà pourquoi on a renvoyé les mêmes hommes au conseil communal. Vous donnez vous-même la réponse à votre question.

M. Bara. - La décision était prise et mise à exécution lorsque les élections ont eu lieu.

M. Dumortier. - Vous avez donné le motif de ce qui s'est passé ; vous vous êtes condamné vous-même.

Mais je m'insurge contre le conseil communal !

Savez-vous qui s'insurge ? Ce sont les habitants de Tournai. Vous dites que j'ai eu quelque malheur dans cette question. J'en ai eu un seul, c'est de n'être pas assez écouté, alors que j'étais l'organe sincère et énergique de toute la ville. Vous ne parviendrez pas à faire envoyer ici en faveur de la nouvelle station des pétitions semblables à celles que nous avons reçues.

Vous oubliez que huit pétitions nous ont été envoyées, et ce n'étaient pas des pétitions signées par quatre, cinq ou six personnes, c'étaient des pétitions signées par des centaines d'électeurs. Tout le monde est contraire, est hostile à cette nouvelle station ; il n'y a qu'une voix dans la ville ; et, je le répète, je regrette franchement que l'honorable M. Bara, qui est digne de soutenir une meilleure cause, vienne défendre un projet aussi véreux que celui du déplacement de la station. Allez demander à Lille, allez demander à Gand, allez demander à toutes les autres villes si elles entendent abandonner leurs stations établies dans l'intérêt des habitants pour en faire une dans un intérêt différent. Demandez aux députés de Gand s'ils consentiraient à supprimer la station à rebroussement qu'ils possèdent ? Faites la même question à Lille, qui vient de dépenser 800,000 fr. pour sa station intérieure.

La ville de Tournai est dans une situation telle, qu'on arrivait à la station en quelques minutes et que, si on la déplace, il faudra parcourir une distance d'une demi-lieue. La meilleure de toutes les stations est celle qui est la plus rapprochée du domicile de chacun et l'honorable M. Anspach a eu une grande pensée quand il a voulu créer à Bruxelles une station centrale.

Quant aux 300,000 francs dont on a parlé, ce n'est pas le gouvernement qui les a dépensés ; ils ont été dépensés pour la société Hainaut-Flandres. (Interruption.)

Les terrains vaudront beaucoup plus qu'ils ne valent aujourd'hui.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Je commence par déclarer que, quant à moi, la question de la station de Tournai n'est pas une question politique et que, pour prendre une décision, je ne me laisserai pas influencer par l'amitié qui m'unit à l'honorable M. Dumortier ; j'examinerai l'affaire au point de vue de l'intérêt public et je prends l'engagement de la résoudre uniquement à ce point de vue.

L'administration du chemin de fer réclame une station plus grande et plus commode que celle dont elle dispose actuellement ; elle veut une station qui réponde convenablement à des besoins qui augmentent tous les jours ; si elle a d'abord pensé au déplacement, c'était seulement à cause de l'insuffisance de la station actuelle et si celle-ci pouvait, dans de meilleures conditions et à meilleur marché, être agrandie dans des proportions convenables, l'administration des chemins de fer se considérerait comme ayant tout ce que son service exige.

Mais d'autres intérêts se trouvent en cause et vous voyez, messieurs, par la vivacité du débat, combien ils ont de valeur. Ces intérêts, le gouvernement doit également les sauvegarder ; non seulement il doit rechercher tout ce qui peut améliorer l'exploitation de ses chemins de fer, mais il doit aussi ne rien négliger pour que la ville de Tournai et tous ses habitants n'aient pas le droit de se prétendre lésés.

Eh bien, messieurs, j'ai, à cet égard, des doutes sérieux ; si, d'un côté, l'administration communale appuie le déplacement, de l'autre côté, de nombreuses pétitions demandent que la station soit conservée sur l'emplacement actuel ; de plus, d'autres pétitionnaires réclament également pour que la nouvelle station, si le projet doit en être maintenu, ne soit pas élevée a l'endroit que lui assignent les plans dont l'honorable M. Bara demande l'exécution.

Ce sont ces pétitions, si nombreuses, qui m'ont ébranlé. Ce ne serait pas la première fois, dans une question de cette nature, qu'une administration communale se serait trompée de la meilleure foi du monde.

Pour m'éclairer et sortir d'indécision, je me propose d'instituer un comité mixte en dehors de tous les partis qui divisent Tournai sur cette question.

Ce comité, dans lequel la ville elle-même sera représentée, m'apportera j'espère, la lumière que je demande.

J'imprimerai à ses délibérations la plus grande célérité et je déclare à l'honorable M. Bara qu'immédiatement après que le rapport me sera parvenu, une résolution sera prise et les travaux de la station de Tournai seront continués avec activité.

On vous a parlé, messieurs, de sommes énormes dépensées à la station de Tournai et qui devraient commander irrévocablement la conduite du gouvernement.

Je crois qu'il y a là erreur ou exagération de la part de l'honorable M. Bara.

Les sommes dépensées à la station de Tournai ne l'ont été que pour, acquisition et nivellement de terrains. Rien n'a été dépensé pour la station elle-même. Si celle-ci était maintenue là où elle se trouve, les terrains acquis deviendraient disponibles, ils seraient vendus et il est probable qu'il n'y aurait point de perte ou, tout au moins, que la perte serait minime.

Quant au passage à niveau dont a parlé l'honorable membre, si je n'ai pas fait exécuter les travaux sollicités pour mettre ce passage à l'abri de tout danger, c'est qu'il se pourrait qu'il fût rendu inutile par les changements éventuels que recevra la situation des lieux.

Ce serait, dans ce cas, de l'argent jeté et puisque l'honorable M. Bara tient, avec raison, à ce que le gouvernement ne fasse pas de dépenses inutiles, il comprendra pourquoi je n'ai pas donné plus tôt satisfaction à la demande qu'il vient de reproduire.

Je le répète, messieurs, il est à peu près indifférent au gouvernement que la station soit maintenue à son emplacement actuel ou qu'elle soit déplacée.

Cette station est, il est vrai, à rebroussement et quoique je puisse ne pas reconnaître aux stations à rebroussement tous les avantages qu'a énumérés l'honorable M. Dumortier, ces stations n'ont cependant pas, selon moi, les graves inconvénients que plusieurs leur attribuent, pour les besoins de la cause, peut-être. Si elles ont au moins l'avantage d'être des stations intérieures donnant des facilités aux habitants de la ville, il faut à mon avis, les maintenir.

La station de Gand et d'autres, qui sont à rebroussement, se trouvent dans ce cas.

(page 1347) Je suis donc disposé à chercher par un examen ultérieur et très prompt quel est le véritable intérêt de la ville de Tournai et c'est la seule raison qui me fasse hésiter encore.

Je l'avoue, et vous devez partager mon avis, entre un conseil communal et un millier de réclamants, il y a lieu d'hésiter ; mais, je le répète, je ferai en sorte que cette hésitation ne soit pas longue et aussitôt qu'une solution sera intervenue, je prends l'engagement de la faire exécuter immédiatement.

Je ferai examiner, d'un autre côté, les observations de l'honorable M. Bara touchant les travaux de l'Escaut.

M. Bara. - Messieurs, je regrette beaucoup pour la ville de Tournai la réponse que vient de faire l'honorable ministre des travaux publics, car il est évident que nous avons perdu notre procès devant lui.

Il est un point essentiel, important, qui touche à la moralité de l'administration et au respect des droits acquis.

Il y a une convention qui liait le gouvernement envers la ville de Tournai et au bas de laquelle figure la signature de l'honorable M. Jamar. Celle de M. Jacobs y est engagée également.

M. Jacobs, ministre des finances. - Pas du tout.

M. Bara. - Vous avez approuvé une soumission de 137,000 francs.

M. Jacobs, ministre des finances. - Je suis arrivé au département des finances le 5 août,

M. Bara. - L'adjudication a eu lieu au mois de juillet. Comme il y avait une différence entre le devis et le prix demandé, vous n'avez pas approuvé.

Un nouveau devis a été dressé et au mois de septembre l'adjudication a été approuvée.

C'est donc vous qui avez fait mettre les travaux de terrassement en adjudication. (Interruption.) Il s'agissait de nivellement des terre-plein ; une des grandes dépenses de l'établissement des stations,- c'est le nivellement ; eh bien, vous avez fait pour 637,000 francs de dépenses de nivellement et d'achat de terrains. Vous dites que vous allez revendre, est-ce possible ? Est-ce que vous pouvez revenir sur ce qui est exécuté ?

Vous avez donc signé une convention ; la ville a versé l'argent qu'elle devait, elle a tracé des plans, fait des rues, des achats et ventes ont été réalises, et vous voulez revenir sur tout cela ! Je le répète, cela est-il possible ?

Je demande à toutes les grandes villes, je demande à toules les communes si l'administration peut se permettre de pareils faits ; si, après avoir signé un plan contractuellement avec une ville, après avoir indiqué des rues et des travaux à faire, on peut venir dire : Nous remettons tout en question !

Je ne parle pas de la question judiciaire, je parle de la question de droit vis-à-vis du gouvernement.

L'honorable ministre des travaux publics nous dit : Je nommerai un comité pour examiner l'affaire. Je ne suspecte pas ses intentions, mais nommer un comité, c'est mettre notre droit en question.

La ville ne pourra se faire représenter dans ce comité. Elle abdiquerait des droits acquis.

Vous avez touché de la ville 19,000 francs pour les travaux des abords du chemin de fer, et vous venez nous dire après cela : La station ne sera plus là !

Je comprendrais cela si la ville consentait, mais quand la ville ne consent pas, quand elle délibère à nouveau, quand elle fait des démarches spéciales pour obtenir le maintien de ce qui a été décidé, vous ne le pouvez pas. Vous êtes tenu par contrat.

M. Dumortier. - Vous imaginez un contrat qui n'existe pas.

M. Bara.- Le contrat n'existe pas ! Mais j'en ai donné lecture tout à l'heure, il est tout entier dans mon premier discours.

Voilà donc la convention faite. Le gouvernement s'exécute ; il fait des travaux pour 637,000 francs et la ville, de son côté, paye les 19,000 francs qu'elle avait promis.

Et après cela l'honorable M. Wasseige vient nous dire : Je recommence tout ; je soumettrai la question à un comité dans lequel la ville de Tournai sera représentée.

Mais, messieurs, il est évident que la ville de Tournai n'acceptera pas l'invitation de se faire représenter dans ce comité : elle ne pourrait le faire sans compromettre tout à la fois sa dignité et ses droits.

Ce n'est pas tout encore : M. le ministre des travaux publics vient nous dire : Je ne fais pas procéder à l'adjudication du passage à niveau parce qu'il peut se faire qu'il faille modifier le tracé de la ligne de Hainaut et Flandres. Ainsi, pour satisfaire l'honorable M. Dumortier, non seulement on détruirait tout ce qui a été fait quant à la station ; mais il pourrait arriver qu'on dût modifier le tracé du chemin de eir de Hainaut et Flandres, il pourrait arriver même que les travaux de redressement de la route qui aboutit à la porte du Château eussent été faits en pure perte.

Eh bien, je vous demande, messieurs, si cela est possible, si une telle situation peut être faite à la ville de Tournai. J'en fais juge la Chambre et le gouvernement.

L'honorable ministre des travaux public est de bonne foi, j'en suis bien convaincu ; mais quand il vous parle de la création d'un comité pour examiner de nouveau la question, il est évident qu'il ne s'est nullement préoccupé de la question de droit. Il m'est impossible de croire que lorsqu'il aura examiné de près la convention, il ne reconnaisse pas qu'il ne saurait être question de nommer un comité et de revenir sur des résolutions arrêtées et déjà suivies d'exécution.

M. Dumortier. - Ce que l'honorable M. Bara appelle la question de droit est tout bonnement une question de chicane. (Interruption.)

Comment ! messieurs, mais depuis quand donc l'accessoire emporte-t-il le principal Depuis quand donc un contrat portant sur un point tout à fait secondaire pourrait-il avoir pour effet de trancher la question principale ? Je dis que cela serait souverainement ridicule, et je le répète : ce n'est point là une question de droit ; c'est une question de chicane.

Vous parlez toujours de l'intérêt de la ville à avoir la station là où vous voudriez qu'elle fût placée. Mais si cet intérêt est si grand et si réel, pourquoi donc la ville de Tournai n’a-t-elle pas encore percé les rues qui doivent conduire à la nouvelle station ? Pourquoi ? Je vais vous le dire, messieurs : c’est que, pour faire ces travaux, la ville aurait du s’imposer des dépenses de plusieurs centaines de mille francs, un million peut-être ; c'est que, par conséquent, elle devrait recourir à un emprunt et créer de nouvelles charges communales pour en payer les intérêts.

Or, on veut pouvoir dire aux électeurs, qui ne manqueront pas de crier : C'est le gouvernement qui l'a voulu ; c'est le gouvernement qui nous oblige à vous imposer de nouveaux centimes additionnels.

On dit et on répète : C'est pour satisfaire M. Dumortier que le ministère agit de la sorte. Vaines déclamations que tout cela ! M. Dumortier est ici l'interprète fidèle des sentiments de la majorité des habitants de Tournai ; et ce qui le prouve ce sont les pétitions que vous avez reçues.

Croyez-vous donc que j'aurais eu le pouvoir de provoquer un pareil pétitionnement s'il n'y avait pas ici en cause les intérêts d'une foule de petits électeurs qui ne veulent pas, après tout, être lésés au profit de quelques grands spéculateurs ?

C'est grâce à ces pétitions, d'ailleurs, que sous le ministère précédent on n'a jamais osé faire ce que vous réclamez aujourd'hui du ministère actuel.

M. Bara. - Mais on a dépensé plus de 600,000 francs.

M. Dumortier. - On réclame de l'honorable M. Wasseige une choie devant laquelle ses prédécesseurs ont reculé.

M. Bara. - Mais ils ont déclaré le contraire à la Chambre.

M. Dumortier. - La ville de Tournai a aujourd'hui une station à sa convenance, qui est à proximité des quartiers du centre. Et qu'allez-vous faire ?

Vous venez parler de spéculateurs ; eh bien, je n'en veux pas ; je déplore seulement que les spéculateurs qui possèdent une fortune dans un endroit où ils se sont établis, arrivent à être ruinés par voire déplacement de la station.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Je ne reviendrai sur la question relative à la station de Tournai que pour déclarer que la cause défendue par l'honorable M. Bara n'est définitivement perdue ni en fait en droit. Je ferai examiner et j'examinerai la chose aux deux points de vue.

J'arrive maintenant, messieurs, aux observations qui m'ont été faîtes par l'honorable M. Hermant, député de Charleroi.

Il a appelé mon attention sur une question pleine d'actualité. La ville de Paris est rouverte aux expéditions et il est probable que le besoin d'y recevoir du charbon se fera particulièrement sentir ; dans cette prévision, l'honorable membre craint que le matériel dont dispose l'administration du chemin de fer de l'Etat ne soit pas suffisant pour les transports importants, qui vont se diriger vers la capitale de la France.

Je dirai à M. Hermant que l'administration a pris ses précautions ; que déjà elle s'est adressée au chemin de fer du Nord pour savoir si cette compagnie croyait être en mesure de fournir le matériel nécessaire.

Cette compagnie a répondu affirmativement en disant que 4,000 à 5,000 waggons se trouvant à La Villette, seraient remis à sa disposition et que 2,000 waggons neufs vont être construits.

J'espère donc que les expéditions se feront dans de bonnes conditions Vous savez que ce sont les compagnies françaises qui fournissent le matériel nécessaire aux expéditions de charbon qui se font de Belgique vers leurs lignes respectives.

L'honorable membre a, en second lieu, exprimé le désir de voir définir d’une façon plus nette qu'elles ne le sont actuellement les obligations imposées à chaque société sous le rapport de la fourniture du matériel des transports.

(page 1348) Cette question, en effet, est très intéressante, et je voudrais aussi la voir clairement résolue ; ce serait peut-être le moyen d’éviter des réclamations fréquentes et nombreuses.

L'administration n'a pas été jusqu'à présent sans le comprendre et elle a même déjà agi en conséquence. En effet, des négociations ont été entamées dans ce but avec les compagnies du chemin de fer rhénan et du Nord français, qui sont les deux plus grandes sociétés avec lesquelles nous soyons en rapport.

Ces négociations ont été interrompues par la guerre. J'espère qu'elles pourront être reprises prochainement.

En ce qui regarde les sociétés belges, l'affaire a beaucoup moins d'importance, et les conventions actuellement existantes paraissent suffire, sauf certaines améliorations qu'il serait désirable d'y apporter et qui feront l'objet de ma sollicitude.

L'honorable M. Hermant a également parlé de la situation de la station de Châtelineau en se plaignant de ce que rien n'a encore été fait pour étendre les voies intérieures de cette station.

L'honorable membre perd peut-être de vue que les 1,750,000 francs accordés récemment pour des travaux d'aménagement et pour le développement des garages ne sont pas encore dépensés.

Je compte bien en consacrer une partie à la station de Châtelineau.

Il est à remarquer, cependant, que les travaux à exécuter sur ce point doivent être faits de commun accord avec la compagnie du Grand-Central. Des négociations sont entamées avec cette société. Les travaux seront commencés aussitôt que l'entente aura été obtenue.

L'honorable M. Hermant réclame le rétablissement d'une commission mixte, qui avait été instituée par mon prédécesseur en 1869, et dans laquelle se trouvaient représentés les industriels charbonniers de l'arrondissement de Charleroi et même des arrondissements de Mons et de Liège.

Cette commission avait été créée pour l'étude d'une question spéciale, celle de savoir quelle devait être l'importance numérique de nos waggons à charbon pour répondre à toutes les demandes de la production et de la consommation.

La question a été vidée, le rôle de la commission était donc fini et cette dernière a été dissoute.

Je prends bien volontiers l'engagement, pour le cas où de pareilles questions se produiraient encore, d'appeler dans les conseils de l'administration les représentants des industries intéressées.

Mais, quant à instituer une commission permanente, vous comprendrez que cela est impossible.

On ne peut placer à côté d'un pouvoir responsable un pouvoir irresponsable et participant néanmoins à la gestion des affaires publiques.

D'ailleurs, si l'industrie charbonnière avait le droit de faire partie d'une commission mixte, l'industrie métallurgique et toutes les industries du pays auraient le même droit. Ce serait une véritable cacophonie, à laquelle je ne puis consentir. Mais chaque fois qu'une question spéciale devra être traitée, je m'entourerai des lumières qui pourront m'être utiles, en convoquant les représentants de l'industrie en cause et en provoquant leurs avis.

Les conducteurs des ponts et chaussées ont trouvé, dans cette enceinte, de nombreux et chaleureux défenseurs, parmi lesquels M. Hermant, je dois le dire, brille au premier rang.

Comme M. Julliot l'a dit hier : c'est une affaire d'administration. Je réclame pour l'administration l'initiative des mesures à prendre. La Chambre appréciera ensuite et jugera nos actes.

Je dois reconnaître que les conducteurs des ponts et chaussées se trouvent dans une position assez exceptionnelle pour justifier la bienveillance que la Chambre leur témoigne.

Leur carrière est plus bornée que celle de la plupart des fonctionnaires, qui peuvent du premier échelon monter jusqu'au dernier ; cependant, elle ne l'est pas autant qu'ont bien voulu le dire ceux qui ont pris leur défense. En effet, en subissant un examen, il est toujours permis aux conducteurs des ponts et chaussées de devenir ingénieurs ; ils peuvent concourir avec les sous-ingénieurs, jusqu'à concurrence du sixième des places vacantes.

Quoi qu'il en soit, mes intentions sont excellentes en faveur de cette catégorie de fonctionnaires.

Je me propose d'augmenter le cadre des conducteurs principaux et de porter leur nombre de 20 à 30 ; il est probable aussi que je fixerai un minimum et un maximum de traitement pour les conducteurs principaux et peut-être agirai-je de même à l'égard des conducteurs de première classe.

Je me réserve de fixer ce maximum et ce minimum, et de demander par amendement que l'on inscrive au budget de 1872 la somme qui sera reconnue nécessaire à l'application des décisions qui auront été prises dans cet ordre d'idées ; alors vous pourrez apprécier si la chose a été faite convenablement, et exercer sur nos actes un contrôle auquel je ne tenterai pas de me soustraire.

Quant aux frais de déplacement, c'est aussi, et plus encore une affaire d'administration. Si, pour certains conducteurs, la somme de 200 francs est insuffisante, pour d’autres, elle peut être trop forte. Je me réserve donc de combler par mesures spéciales et individuelles les déficits là où ils seront constates.

L'honorable M. de Lhoneux vous a entretenus de la reprise par l'Etat des routes concédées de Huy à Stavelot et de Huy à Tirlemont, pour arriver à la suppression des barrières établies sur ces routes.

L'honorable membre vous a mis au courant de tous les rétroactes de l'affaire et la Chambre a pu comprendre que la question soulevée appelle de mûres réflexions. Les concessionnaires des routes dont il s'agit voudraient, en définitive, se faire rembourser les capitaux employés à la construction de ces routes, ce qui conduirait à faire intervenir l'Etat dans une dépense assez considérable.

Cependant les routes concédées doivent, pour la plupart, revenir à l'Etat, à l'expiration de la concession. Jusqu'à présent, celles qui sont passées dans le domaine public n'ont rien coûté au trésor.

Pour les routes auxquelles s'appliquent les observations de l'honorable M. de Lhoneux, la question a déjà été soulevée en 1867.

L'affaire a été transmise au ministre des finances, qui y est le plus intéressé, puisque c'est lui qui, le cas échéant, demande les crédits nécessaires à l'exécution du contrat de rachat. Aujourd'hui même j'écris de nouveau à mon honorable collègue pour appeler son attention sur cette question, que je veux bien soumettre à un nouvel examen.

Je fais observer cependant que cette première concession en provoquerait inévitablement d'autres, ce qui conduirait à une dépense très considérable, au moyen de laquelle il serait plus conforme à l'intérêt général de construire des routes nouvelles.

D'autres membres ont fait, dans la présente séance, des observations que je vais rencontrer très succinctement.

L'honorable M. Verwilghen a parlé d'une route qu'il a appelée lui-même chemin de grande communication, et qui, précisément pour cela, ne doit pas être construite aux frais du trésor ; mais si, d'après la jurisprudence administrative, cette route se trouve dans les conditions voulues, et l'honorable membre paraît l'avoir établi à l'évidence, le département des travaux publics peut intervenir à l'aide d'un subside.

Seulement je me permettrai de lui indiquer la marche qu'il doit suivre pour arriver aux lins qu'il se propose.

Le chemin de grande communication doit être décrété par la députation permanente ; ce caractère étant établi, le département de l'intérieur, les communes, la province et le département des travaux publics concourent, chacun pour sa part respective, à la création de la voie. Je promets à l'honorable membre que, si telle est bien la situation pour le chemin dont il vous a entretenus, il peut compter sur le subside le plus large qu'il me sera possible d'accorder.

L'honorable. M. de Montblanc a appelé mon attention sur le canal de la Mandel. Il sait l'intérêt que je porte à son arrondissement et combien je suis désireux de voir s'achever promptement ce canal. Il en a eu, il y a peu de temps, une preuve évidente ; car j'ai autorisé le navigation sur une section de ce canal, pour satisfaire au vœu des habitants dont l'honorable membre s'était rendu l'organe.

Quant à l'autre section, je sais que l'entrepreneur exécute fort mal les clauses de son cahier des charges.

Des mises en demeure successives lui ont été adressées par correspondance administrative et devant son inaction ou sa négligence, j'ai dû lui faire notifier l'ordre d'avoir à cesser l'exécution de son entreprise. L'on avise, en ce moment, aux mesures à prendre pour assurer la prochaine et prompte continuation des travaux.

Quant à la machine d'alimentation, M. Maus, inspecteur général des ponts et chaussées, est chargé d'en préparer les plans ; il m'a annoncé que ces plans seront prochainement prêts à être mis à exécution. Toutefois, tant que le canal n'est pas achevé, je ne crois pas que la machine puisse rendre de grands services.

L'honorable M. L. Visart a parlé de Nieuport. Il a dit que, sur les 1,500,000 francs qui ont été accordés pour travaux à faire à ce point de la côte, 900,000 francs sont dépensés et qu'il reste à faire des travaux importants. Puisqu'il y a des fonds disponibles, je verrai quels sont les travaux à ordonner et j'appliquerai le crédit de la manière qui paraîtra la plus conforme à l'intérêt général.

L'honorable membre a aussi parlé de filtrations auxquelles il faudrait porter remède. Je ferai examiner la question.

Quant au bureau de Lauwe, j'ai fait dresser un tableau général de toutes les localités qui, par leur situation, par le nombre des lettres qu'elles expédient et qu'elles reçoivent, sont en droit de réclamer un bureau de poste ou ont des titres à l'obtenir.

Si Lauwe se trouve dans cette position, je n'hésiterai pas à lui donner la satisfaction que réclame l'honorable membre.

Je crois avoir répondu, messieurs, à toutes les observations de détail qui ont été faites jusqu'à présent.

- La discussion générale est close.

La séance est levée à quatre heures et un quart.