Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Documentation Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 15 mai 1868

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1867-1868)

(Présidence de M. Dolezµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1277) M. de Moor, secrétaire, procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.

M. Van Humbeeck, secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Moor présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Les membres de l'administration communale et des habitants de Goé prient la Chambre de rejeter le projet de loi qui tend à transférer à Dison le chef-lieu du canton de Limbourg. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet.


« Les sieurs Masquelier, Velhaen et autres membres de l'Association libérale et constitutionnelle de l'arrondissement de Courtrai demandent la révision des dispositions relatives aux attributions des députations permanentes en matière de droit électoral. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur des pétitions relatives au même objet.


« Le sieur Magnier prie la Chambre de s'occuper de sa pétition relative à l'enseignement moyen et adresse à l'assemblée un exemplaire du Journal de Courtrai, contenant un extrait de sa revue satirique, dans lequel il signale les vices du système actuel d'enseignement. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Van Hoorebeke, ancien employé des postes, prie la Chambre de le faire réintégrer, avant la clôture de la session, dans tous ses droits et demande une indemnité. »

- Même renvoi.


« Le sieur Schupert prie la Chambre d'entendre le rapport de la commission sur sa pétition ayant pour objet d'être admis à la pension. »

- Pris pour information.


« M. Crombez, obligé de s'absenter pour affaires urgentes, demande un congé. »

- Accordé.


« M. Anspach s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. »

- Pris pour information.

Rapports sur des pétitions

M. Jacquemynsµ dépose les rapports de la commission permanente d'industrie :

1° Sur une pétition de brasseurs du canton de Wetteren et des communes environnantes.

2° Sur une pétition de raffineurs de sel qui demandent à pouvoir puiser l'eau de mer dans le port de Terneuzen.

3° Sur des pétitions relatives au droit d'accise sur les glucoses.

Rapport sur des demandes en naturalisation

M. Jouretµ présente un rapport sur une demande de naturalisation ordinaire.

M. de Rossius dépose des rapports sur des demandes en naturalisation ordinaire.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports et les met à la suite de l'ordre du jour.

Ordre des travaux de la chambre

M. Bricoultµ (pour une motion d’ordre). - J'ai l'honneur de proposer à la Chambre de bien vouloir porter à son ordre du jour le projet de loi relatif à la séparation et à la délimitation de La Louvière et de Saint-Vaast. Ce projet ayant un caractère d'urgence, je prie instamment l'honorable M. de Macar de déposer son rapport afin que la Chambre puisse statuer sur ce projet avant la clôture de la session.

Le gouvernement doit être d'accord avec l'honorable rapporteur. Il n'y a donc plus de motif à invoquer pour justifier un ajournement.

M. de Macarµ. - Messieurs, la commission nommée pour l'examen de ce projet de loi s'est réunie mardi, mais elle a jugé nécessaire de poser une question à l'honorable ministre de l'intérieur ; la réponse à cette question qui, du reste, est assez importante, n'est pas parvenue encore à la commission ; il m'a donc été impossible de présenter un rapport jusqu'à ce moment. «

MiPµ. - La demande de l'honorable M. de Macar m'a été transmise avant-hier soir ; la réponse est préparée et elle sera remise à la commission pendant la séance.

M. de Macarµ. - Je veux bien m'engager à présenter le rapport dans la séance de demain ; mais, en supposant même que je le fasse, la Chambre ne me paraît pas disposée à s'occuper de ce projet dans la session actuelle.

M. le président. - Dans tous les cas, la Chambre ne peut pas statuer en ce moment, puisque le rapport n'est pas fait.

Projet de loi prorogeant la loi sur les étrangers

Discussion générale

M. Thonissenµ. - Messieurs, l'un des orateurs que vous avez entendus hier a parlé du dépôt tardif du rapport de la section centrale. Je tiens à constater qu'à cet égard aucun reproche ne peut être adressé ni à la section centrale ni à son rapporteur. La section centrale s'étant réunie vendredi dernier, elle me chargea de réclamer quelques renseignements du département de la justice. Ces renseignements m'ayant été communiqués dans la soirée de samedi, mon rapport fut rédigé le dimanche, approuvé le lundi et imprimé le mardi. Il était impossible de marcher plus lestement. Comme l'a dit hier l'honorable M. Guillery, on n'a pas perdu une heure.

Il m'a semblé que l'honorable ministre de la justice était quelque peu surpris de la concision de mon rapport. Cette concision s'explique de la manière la plus simple.

D'abord, j'ai suivi l'exemple du gouvernement ; il m'a semblé qu'à la suite d'un exposé de motifs de quatre lignes un rapport de trois pages in-folio devait suffire.

Ensuite, personne ne s'attendait et ne pouvait s'attendre au débat qui a surgi hier. Les sections s'étaient réunies le 29 avril dernier, et, je dois le dire, elles montrèrent à l'égard de la loi actuelle la plus complète, la plus profonde indifférence. L'une d'elles était composée de deux membres, une autre de trois, une autre de quatre, et la plus nombreuse n'en comptait que sept. Et qu'a-t-on fait dans ces sections ainsi composées ? A-t-on contesté le principe de la loi ? A-t-on indiqué un système nouveau ?A-t-on, au moins, produit un simple amendement ? En aucune manière.

(page 1278) La deuxième section s'est bornée a émettre le vœu que le gouvernement n'attendît plus la fin de la session parlementaire, pour venir demander la prorogation de la loi de 1865.

La troisième section se contenta, elle aussi, de formuler un vœu. Elle désire que la position des étrangers, en Belgique, soit réglée, aussitôt que possible, par une loi complète et permanente.

Vous le voyez, messieurs, pas de proposition, pas d'amendement, pas de système, rien que deux vœux émis par deux sections.

La section centrale se réunit à son tour, et, là encore, le principe de la loi ne fut pas le moins du monde contesté.

Un membre reproduisit le vœu émis par la troisième section, et j'ai transcrit dans mon rapport les motifs qu'il a fait valoir.

Le même membre présenta ensuite un amendement ayant pour but de faire ajouter, dans]l'article premier de la loi du 7 juillet 1865, aux mots : « par sa conduite », ceux-ci : « en Belgique ».

Cet amendement fut accepté par trois voix contre une et une abstention, et je consignai de nouveau dans mon rapport les raisons qui avaient été alléguées par l'auteur de la proposition.

La section centrale admit, en définitive, le projet de loi par quatre voix contre une et une abstention.

Messieurs, il ne faut pas se faire illusion sur l'importance réelle de la loi que nous discutons. Elle ne vaut pas tout le bruit qui se fait autour d'elle.

Depuis le 1er mars 1864 jusqu'au 6 mai 1868, on a expulsé de Belgique 6,324 étrangers, ce qui fait à peu près 1,580 renvois par année.

Savez-vous, messieurs, combien, parmi ces 6,324 étrangers, il y en a qui ont été renvoyés pour motifs politiques ? Le nombre des expulsés de cette catégorie est de deux ! Un en deux ans !

La presque totalité des expulsions ont été effectuées pour des motifs étrangers à la politique.

On a expulsé 501 individus, pour avoir commis en pays étranger des infractions prévues par la loi du 1er octobre 1833 sur les extraditions.

D'autres étrangers, au nombre de 4,679, ont été conduits à la frontière, par la gendarmerie, pour défaut de moyens d'existence ; 1,043 ont été expulsés à la suite de condamnations judiciaires ; enfin 99 ont été renvoyés du pays avec feuilles de route.

En résumé, comme je l'ai déjà dit, sur le nombre de 6,324 individus expulsés, il n'y en a que deux qui l'aient été pour cause politique.

Serait-il possible, messieurs, de refuser au gouvernement, d'une manière absolue, le droit de renvoyer les étrangers qui troublent la tranquillité publique en Belgique ? Il me semble qu'il n'y personne qui oserait le prétendre.

Je me contenterai de citer deux exemples.

Des troubles éclatent dans un district industriel. Un étranger se glisse parmi nos ouvriers. Il les flatte, il les égare, il leur prêche les doctrines les plus détestables et, tout en restant sur la lisière du code pénal, il les pousse à la révolte. Qui soutiendra que le gouvernement ne doit pas posséder la faculté d'expulser ce fauteur d'émeutes ?

Un homme politique quitte son pays. Il arrive en Belgique. Il y jouit de toute la protection de nos institutions nationales. Mais cet homme se met à conspirer, chez nous, contre le gouvernement de sa patrie, et il compromet nos bons rapports avec un Etat voisin. La police belge est avertie. Elle dit à cet étranger que, s'il continue à conspirer, il sera expulsé. Eh bien, cet homme brave le gouvernement belge, il se moque de la police belge ; il continue à conspirer et à nous compromettre.

Qui, encore une fois, viendra prétendre sérieusement que le gouvernement doit être privé du droit de renvoyer ce conspirateur ?

Tout ce qu'il est permis d'exiger avec raison, c'est, comme je l'ai dit dans mon rapport, que l'on accorde des garanties sérieuses à l'étranger contre lequel le droit d'expulsion est exercé, c'est qu'on le mette, autant que possible, à l'abri des erreurs ou même du ressentiment des fonctionnaires chargés de l'administration de la sûreté générale.

Quant à l'arbitraire, vous aurez beau faire ; en cette matière, vous l'aurez toujours dans une certaine mesure. Dès l'instant qu'on admet l'expulsion pour trouble apporté à la tranquillité publique, il faut bien que quelqu'un décide que tel fait est ou n'est pas de nature à troubler la tranquillité du pays. Or, qui doit prendre cette décision ? Faudra-t-il réclamer l'intervention du pouvoir judiciaire et exiger un jugement proprement dit ? Evidemment cela n'est pas possible. Vous ne sauriez charger nos tribunaux de l'exercice de la police administrative. C'est au gouvernement que cette mission doit être confiée, et dès lors l'erreur et l'abui resteront toujours possibles.

Mais, messieurs, est-il bien vrai que les étrangers ne jouissent pas chez nous de garanties suffisantes ? Pour être complètement éclairé à ce sujet, il suffit de lire la loi du 7 juillet 1865. Elle exige la signature du roi, l'intervention du chef de l'Etat et, de plus, une délibération en conseil des ministres, pour l'expulsion du dernier des étrangers. Si l'on veut des garanties plus sérieuses, je ne sais où nous devrons aller les chercher.

Remarquez, en effet, qu'à la délibération du conseil des ministres et à la signature du Roi, il faut encore ajouter le contrôle de l'opinion publique, le contrôle de la presse et le contrôle parlementaire.

A la vérité, il existe des esprits généreux qui voudraient que la Belgique suivît le système appliqué en Angleterre.

Constatons d'abord que le système anglais n'est pas toujours bien compris. Il est très vrai qu'en Angleterre, quand la sécurité publique est compromise par des étrangers, on a recours à un alien bill d'une durée temporaire ; mais plusieurs jurisconsultes anglais enseignent qu'indépendamment de l’alien bill, dès qu'il y a urgence, la couronne peut expulser les étrangers en vertu d'une prérogative qui lui est propre. Quoi qu'il en soit, nous savons que les Anglais se montrent très larges, très tolérants et même trop tolérants vis-à-vis de beaucoup d'étrangers, qui cherchent un refuge dans les îles britanniques.

Admettons un instant que nous voulions suivre cet exemple. Cela pourrait nous valoir beaucoup d'éloges dans les colonnes de la presse démocratique ; mais cela pourrait aussi, dans certaines circonstances, devenir extrêmement dangereux pour nous, le jour où nous aurions fait de la Belgique le repaire de tous les conspirateurs de l'Europe, le jour où nos voisins, justement mécontents, viendraient nous sommer de respecter et de faire respecter chez nous les exigences de l'ordre européen.

Nous pourrions certes élever la voix et protester de toutes nos forces ; mais, en dernier résultat, il n'y aurait d'autre issue pour nous qu'une prompte et humiliante obéissance. C'est cette honte que je veux épargner à mon pays, en donnant au gouvernement les moyens d'écarter le danger, en renvoyant à temps du pays ceux dont la présence pourrait troubler nos relations internationales.

L'honorable M. Coremans a déposé une proposition ayant pour but de faire cesser l'effet de la loi au 1er janvier 1869.

C'est, en réalité, l'ajournement du débat actuel jusqu'au commencement de l'année prochaine.

S'il y avait moyen, messieurs, d'améliorer la loi, je ne demanderais pas mieux, en ce qui me concerne, que d'accepter cet amendement ; mais cet espoir d'amélioration me semble complètement chimérique.

Rappelez-vous, messieurs, que, depuis 1835, c'est la onzième fois que la loi est discutée dans cette enceinte. Est-ce que, dans ces onze débats, dont quelques-uns ont été fort longs, fort passionnés, on a trouvé quelque chose de mieux ? Il y a trois ans, l'honorable M. Van Humbeeck a traité la question avec un rare talent, avec une connaissance parfaite des antécédents, et après une étude approfondie des faits ; mais le système qu'il a présenté n'a pas été jugé praticable par la majorité de la Chambre.

Au 1er janvier 1869, nous serions absolument dans la même position qu'aujourd'hui.

Je ne connais qu'une seule question qui pourrait encore être utilement discutée. Elle a été traitée, au sein de la section centrale, par l’honorable M. Guillery.

L'honorable député de Bruxelles voudrait que le gouvernement dissipât tous les doutes qui existent sur la valeur légale de quelques-unes des dispositions dont on fait l'application aux étrangers, en dehors des prévisions très limitées de la loi du 7 juillet 1865.

Ce n'est pas la première fois que cette question se présente.

En 1865, une section centrale, dont j'avais l'honneur de faire partie avec l'honorable M. Guillery, pria l'honorable ministre de la justice de cette époque de lui indiquer le nombre des individus expulsés depuis un certain nombre d'années. Ce tableau nous fut communiqué, et voici ce qu'il constata, quant aux expulsions ordonnées en vertu de la loi de 1835.

Pour 1864 rien, 1863 rien. 1862 une expulsion, 1861 rien, 1860 rien, 1859 trois expulsions, 1858 rien, (page 1279) 1857 deux expulsions, 1856 deux expulsions, etc.

Cependant, il y avait parmi nous des membres qui avaient connaissance d'expulsions ordonnées en 1864 et en 1863, tandis que le tableau n'en mentionnait aucune. On prit donc des informations et on apprit que, indépendamment de la loi de 1835, successivement maintenue pour devenir plus tard la loi de 1865, le gouvernement se prévalait de plusieurs autres lois, afin d'exercer le droit d'expulsion pour défaut de papiers réguliers et pour défaut de moyens d'existence. Bref, un tableau complet et loyalement dressé par l'honorable M. Tesch vint prouver que, depuis 1855 jusqu'en 1864, on avait expulsé 42,346 étrangers, parmi lesquels les individus renvoyés pour motifs politiques ne formaient qu'une très faible minorité.

Alors la section centrale demanda comment il pouvait se faire qu'on eût expulsé 42,346 étrangers depuis 1835 ; elle pria M. le ministre de la justice de lui indiquer les lois et les décrets dont l'application était faite, en dehors de l'hypothèse spéciale prévue dans la loi de 1835.

M. le ministre de la justice répondit que ces dispositions étaient l'article 9 de la loi du 23 messidor an III ; l'article 3 de l'arrêt-loi du 6 octobre 1830 ; la loi du 22 septembre 1835 ; l'article 272 du code pénal, et l'article 3 de la loi du 3 avril 1848.

Vous aurez remarqué, messieurs, que dans cette énumération figurent la loi du 23 messidor an III et l'arrêté-loi du 6 octobre 1830. Or, je pense, avec l'honorable M. Guillery, que ces deux dernières lois ne sont plus on vigueur.

. Certes, le gouvernement doit avoir le droit de renvoyer les vagabonds, alors même qu'ils n'ont pas encore subi une condamnation judiciaire. Mais le peut-il en vertu de la loi de l'an III et de l'arrêté de 1830 ? C'est une question qui mérite assurément d'être examinée.

La loi du 23 messidor est, à mes yeux, une disposition purement temporaire.

Son titre seul en fournit déjà une preuve convaincante. Ce titre, le voici : Décret qui ordonne aux étrangers nés dans les pays avec lesquels la République est en guerre de sortir de France, s'ils n'y sont pas domiciliés, avant le 1er janvier 1792.

C'est donc la France qui est en guerre avec une partie de l'Europe et qui expulse de son territoire les sujets des puissances ennemies. Tel est le but du décret ; mais, en même temps, ses auteurs s'occupent des étrangers appartenant aux pays qui sont encore en paix avec la France. C'est ce qu'ils font dans les articles 7 et 9.

L'article 7 porte : « Il sera délivré à chaque étranger une carte portant son signalement, et en tête ces mots : hospitalité, sûreté ; on ajoutera, pour les étrangers avec lesquels la République est en paix, le mot fraternité.

L'article 9 va plus loin ; il est conçu dans les termes suivants : « Tout étranger, à son arrivée dans un port de mer ou dans une commune frontière de la République, se présentera à la municipalité ; il déposera son passeport, qui sera renvoyé de suite au Comité de sûreté générale pour y être visé. Il demeurera, en attendant, sous la surveillance de la municipalité, qui lui donnera une carte de sûreté provisoire énonciative de la surveillance, s

Evidemment cette disposition est purement provisoire et en rapport avec l'état de guerre.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - C'est une opinion.

M. Thonissenµ. - Je vous rappellerai, M. le ministre, que j'ai eu l'honneur de vous voir vendredi dernier dans votre cabinet ; je vous ai demandé en vertu de quelles lois les expulsions se faisaient en dehors de la loi du 7 juillet 1865 ; vous m'avez répondu : « Ces lois sont indiquées dans la réponse faite, en 1864, par mon honorable prédécesseur, aux demandes de la section centrale. »

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Me permettez-vous de dire deux mots ?

M. Thonissenµ. - Volontiers.

MjB. - L'honorable M. Thonissen soulève une question qui ne peut pas aboutir. Voici pourquoi : L'honorable membre est d'avis que la loi dont il parle n'est plus en vigueur...

M. Thonissenµ. - Vous ne connaissez pas mes conclusions.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Vos conclusions ne sont pas énoncées dans votre rapport.

L'honorable membre pourrait se borner à lire le discours que l'honorable M. Van Humbeeck a prononcé en 1865, car cet honorable membre a soutenu la même thèse que celle de M. Thonissen, et M. le ministre de la justice d'alors, l'honorable M. Tesch, a soutenu l'opinion contraire.

Si l'honorable M, Thonissen veut que je prenne part à ce débat, je n'aurai qu'à lire le discours de l'honorable M. Tesch.

C'est comme si nous plaidions une question de droit devant les tribunaux : l'un invoquera l'autorité de Demolombe, et l'autre celle de Duranton. Je ne vois pas quelle solution ce débat peut avoir.

M. Thonissenµ. - Ainsi, je me suis rencontré avec l'honorable M. Van Humbeeck, je l'ignorais et je suis flatté de l'apprendre ; j'ai, par contre, pour adversaire, l'honorable M. Tesch, et je le regrette. Mais cela même prouve qu'il existe ici des dissidences parmi les jurisconsultes ; qu'ils ne sont pas d'accord sur la force obligatoire des dispositions dont je viens de parler. Bientôt vous entendrez la conclusion que je déduis de ces dissidences. Pour le moment, je me permets de dire que, malgré l'estime que je professe pour l'opinion de l'honorable M. Tesch, j'ai le droit de ne pas être ici de son avis.

Comment ! l'étranger doit encore aujourd'hui recevoir une carte portant les mots « hospitalité, sûreté, fraternité » ; il doit remettre son passeport à l'administration communale du premier village qu'il rencontre sur sa route, et, en attendant la décision du comité de sûreté générale, il demeure sous la surveillance de la municipalité !

Evidemment cela n'est pas sérieux, cela n'est plus possible aujourd'hui !

J'ai dit, messieurs, qu'on invoque encore un arrêté du gouvernement provisoire du 6 octobre 1830. Mais, ici encore, il suffit de lire le titre pour être convaincu que c'était un décret purement et essentiellement transitoire.

Ce titre, le voici : Mesures de police relatives aux étrangers qui arrivent à Bruxelles.

Quant au décret lui-même, je me contenterai d'en lire trois articles :

« Le gouvernement provisoire,

« Considérant que beaucoup d'étrangers passent en Belgique, les uns avec l’intention honorable d'y porter des secours contre les entreprises du despotisme hollandais, mais d'autres, en grand nombre, pour y chercher des moyens d'existence équivoques, au milieu des embarras inséparables d'un état de transition,

« Arrête :

« Art. 1er. Les commandants de place et ceux des gardes bourgeoises établies dans les communes frontières, ainsi que les chefs de douane, se concerteront avec les autorités civiles pour surveiller l'introduction d'étrangers qui viendraient en Belgique dans un autre but que celui d'y traiter leurs affaires particulières.

« Art. 2. Provisoirement et vu l'urgence, les autorités ci-dessus mentionnées ne permettront l'entrée du pays qu'à ceux qui justifieront des motifs qui les y amènent.

« Art. 3. Tous autres étrangers non munis d'autorisations du gouvernement sont tenus de justifier de leurs ressources ; dans le cas contraire, ils seront renvoyés chez eux. »

C'est cet article 5 que l'on applique encore aujourd'hui. En effet, si on le prend seul, abstraction faite de ce qui précède, on peut essayer de le faire regarder comme une mesure générale ; mais, quand on l'examine dans son ensemble, il est aisé de s'apercevoir qu'il ne prescrit que des mesures provisoires à prendre dans une période de transition.

Il y a quelques instants, l'honorable ministre de la justice me disait : A quoi voulez-vous aboutir ? Le voici : Je veux que la valeur légale des dispositions citées devienne l'objet d'une étude approfondie, parce qu'elle touche au grand principe constitutionnel de la liberté individuelle.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Elle l'a été.

M. Thonissenµ. - Elle l'a été, mais pas suffisamment. Je voudrais qu'elle fût résolue d'une manière définitive et par une loi spéciale. Elle a été tranchée par l'honorable M. Tesch ; mais, quelque estime qu'on puisse avoir pour son talent, il est permis de douter encore et de désirer que la difficulté soit définitivement résolue par une loi.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Elle a été tranchée par une pratique constante de tous les ministres de la justice.

M. Thonissenµ. - Ce n'est pas un grief que j'articule contre vous. J'avoue que tous les ministres de la justice depuis 1835 ont appliqué les lois que j'ai citées ; mais, puisqu'il y a des controverses, je voudrais encore une fois, que celles-ci fussent écartées par le pouvoir législatif lui-même, parce que tout ce qui concerne le grand principe de la (page 1280) liberté individuelle doit être réglé par des lois et non par des opinions ministérielles.

Vous me répondez que depuis 1835 tout le monde a ainsi appliqué la loi ; mais si tout le monde s'était trompé, faudrait-il continuer ? Où conduirait une telle doctrine ?

Vous parlez souvent de progrès, mais en ce moment-ci vous oubliez votre doctrine. (Interruption.)

En somme, je ne demande qu'une seule chose, c'est que la position des étrangers, en dehors de la loi de 1865, soit fixée de manière à dissiper les doutes qui existent au sujet de la légalité des dispositions qu'on leur applique.

Projet de loi érigeant la commune de La Pinte

Rapport de la commission

M. d'Elhoungneµ. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission spéciale qui a examiné le projet de loi tendant à ériger la commune de La Pinte.

Comme cet objet est très urgent, la Chambre pourrait peut-être le mettre à l'ordre du jour.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport et met le projet à l'ordre du jour.

Projet de loi prorogeant la loi sur les étrangers

Discussion générale

M. Van Humbeeck. - La part active que j'ai prise aux discussions de 1861 et de 1865 m'oblige, je pense, à expliquer en quelques mots à la Chambre l'attitude que je compte prendre.

Aujourd'hui, comme il y a trois ans, je crois que des nécessités politiques nous imposent le maintien d'une législation spéciale à l'égard des étrangers ; mais aujourd'hui comme il y a trois ans, je pense que cette législation pourrait recevoir des améliorations notables. En un mot je maintiens dans leur entier les principes que j'ai défendus en 1865 et que j'avais déjà défendus en 1861.

Je ne compte cependant pas rouvrir en ce moment une discussion sur ce terrain. Un pareil débat ne pourrait amener en ce moment aucun résultat pratique et même il ne pourrait avoir une grande influence morale.

Il ne peut amener aucun résultat pratique ; car, depuis trois ans, la composition de la Chambre ne s'est pas modifiée d'une manière sensible.

II ne peut avoir, dans les circonstances actuelles, une grande influence morale, car, il faut bien le reconnaître, l'attention publique est momentanément détournée de l'objet qui nous occupe, si intéressant et si important qu'il puisse être.

J'étais donc prêt à me résigner à une simple protestation, qui se serait formulée dans un vote négatif.

Mais dans cette assemblée d'honorables collègues expriment l'opinion qu'il pourrait, dans le cours de la session prochaine, arriver un moment où ce débat pourrait être rouvert avec quelque utilité ; s'inspirant de cet espoir, ces honorables collègues viennent nous demander de vouloir limiter le délai de la prorogation qui nous est proposée.

Je crois que je dois appuyer ces honorables collègues de mon vote. Je n'examine pas en ce moment si leurs espérances sont appelées à être justifiées, je me borne à constater que si ces espérances venaient à être trompées, il n'y aurait préjudice pour aucun intérêt ; la Chambre en serait quitte pour voter hâtivement dans le cours de la session prochaine une nouvelle prorogation.

Mais si, au contraire, ces espérances devaient être reconnues fondées, j'aurais à me reprocher, en ne les appuyant pas de mon vote aujourd'hui, d'avoir placé ces collègues dans l'impossibilité de saisir une occasion favorable pour défendre des idées qui me sont chères et que je crois appelées à passer tôt ou tard dans la législation.

Cependant je dois ajouter que je n'entends m'associer qu'à des propositions que je puisse considérer comme raisonnables, et je ne pourrai reconnaître ce caractère à celle de l'honorable M. Coremans, s'il ne consent pas à reporter le délai de la prorogation restreinte au moins jusqu'au 1er mars 1869.

S'imaginer qu'avant le 1er janvier 1869, se présentera un moment où la question puisse être utilement discutée, c'est nourrir un espoir qui n'est évidemment pas destiné à se réaliser.

Si donc l'honorable membre tenait à cette date d'une façon absolue, je ne pourrais voter pour son amendement ; il en serait autrement, s'il reportait le délai limité de la prorogation à quelques mois plus loin.

M. Coremansµ. - Messieurs, en présence de l'espèce d'engagement qui a été pris il y a trois ans par l'honorable M. Bara, lorsqu'il déclara qu'il voulait tout autant que l'honorable M. Van Humbeeck la réforme de la loi sur les étrangers, en présence de cet engagement, on aurait pu s'attendre, aujourd'hui que l'honorable M. Bara siège au banc des ministres, à une proposition contenant une amélioration quelconque du régime relatif aux étrangers ; on aurait pu s'attendre, tout au moins, à une codification des différentes dispositions législatives réglant l'état des étrangers en Belgique.

Car ce n'est pas la loi de 1835 seulement, il y a dans l'arsenal des décrets de l'empire plusieurs dispositions que le gouvernement applique encore, quoique abolies, d'après moi, depuis longtemps. A une autre époque cependant, le gouvernement lui-même considérait ces dispositions législatives comme n'étant plus en vigueur. Ainsi, elles n'étaient plus en vigueur, à ses yeux, lorsqu'il proposa la loi du 1er octobre 1833 sur les extraditions, et même la loi qu'il s'agit de proroger aujourd'hui, car, ayant à sa disposition des moyens d'action bien plus considérables que ceux que ces lois lui confèrent, il ne serait pas, je m'imagine, venu amoindrir ses pouvoirs en les présentant.

Quoi qu'il en soit, c'eût été une belle chose que de voir l'honorable M. Bara remplir l'engagement qu'il avait pris, il y a trois ans, d'améliorer la législation sur les étrangers ; le pays lui en aurait su gré. Il n'en a rien fait et, pour ma part, je le regrette beaucoup.

Messieurs, la seule considération sérieuse que l'on fait valoir aujourd'hui pour justifier l'existence et la prorogation de la loi de 1835, de cette loi que tout le monde qualifie d'arbitraire, de vague, de détestable, c'est la considération des devoirs internationaux, des obligations que nous avons vis-à-vis de voisins puissants, et que nous devons remplir, dans l'intérêt même de notre existence nationale.

Je désire cependant constater que ce ne sont pas ces considérations-là qui ont amené dans notre législation cette loi de 1835. C'étaient, à cette époque, des considérations d'ordre intérieur, et pas d'autres, que l'on mettait en avant pour arriver à introduire dans notre législation la loi dont nous nous occupons en ce moment.

Permettez-moi de rappeler brièvement quelques faits qui justifient entièrement cette allégation.

C'était en 1834. L'honorable M. Lebeau était ministre de la justice et l'honorable M. Rogier, je pense, ministre de l'intérieur. Le ministère Lebeau-Rogier lança, le 17 avril 1834, un arrêté qui ordonna l'expulsion de 27 étrangers, la plupart Français, parmi lesquels M. Labrousse ; quelques Polonais et parmi eux Lelewel et quelques Hollandais inconnus.

Grande, messieurs, fut l'émotion que ces expulsions causèrent dans le pays. Cette émotion gagna jusqu'au parlement.

A cette époque, l'esprit de 1830 animait encore la représentation nationale, et l'opinion publique avait des échos puissants dans cette Chambre.

Le ministère eût à justifier bientôt (5 ou 6 jours après la publication de l'arrêté) les dispositions qu'il venait de prendre.

L'honorable M. Lebeau déclara à la Chambre que l'arrêté du 17 avril ne frappait que quelques fauteurs d'anarchie, des gens qui propageaient de mauvaises doctrines, des individus qui colportaient ici les droits de l’homme, brochure où l'on prêchait le suffrage universel. C'était là une horreur aux yeux de l'honorable M. Lebeau et de ses collègues de l'époque.

Une fraction de la Chambre, messieurs, osa ne pas admettre la manière de voir de l'honorable M. Lebeau, et voici, entre autres, ce que disait un honorable membre :

« Quoi ! l'art. 128 de la Constitution à la main, vous dites aux étrangers :

« Venez parmi nous, qui que vous soyez, pourvu qu'aucun crime ne pèse sur vous ; venez parmi nous, vous y jouirez de la plus entière liberté ; venez, apportez vos connaissances et votre industrie ; faites-nous-en profiter ; publiez des écrits, rédigez des journaux si vous le voulez : la presse et la manifestation des opinions sont libres ! » Ils arrivent, ils s'établissent, puis on les chasse impitoyablement et sans aucun avis préalable.

« Messieurs, c'est un horrible guet-apens : mieux eût valu mettre à la frontière des poteaux portant en grandes lettres cet avis qui du moins annoncerait quelque franchise : Etrangers, en dépit de la Constitution, n'entrez pas en Belgique. Si vous avez quelque chose à votre charge, vous serez livrés aux juges que vous fuyez ; si vous êtes sans reproche, vous serez expulsés.

(page 1281) « Ainsi, notre pays, jadis terre libre et hospitalière, deviendra en exécration à tout ce qui porte un cœur généreux. »

Etait-ce un énergumène, un commis voyageur en meeting, tout radical de la pire espèce comme mon honorable ami, M. Coomans ? Ou un libéral avancé comme les honorables MM. Guillery, Couvreur et Le Hardy de Beaulieu, honorables membres que j'espère pouvoir nommer bientôt mes honorables amis ?

Non, c'était... l'honorable M. de Brouckere, une des colonnes du parti ministériel d'aujourd'hui.

A la suite de cette discussion, le gouvernement promit de déposer un projet qui réglerait une fois pour toutes la situation des étrangers.

Quelque temps se passe ; l'honorable M. Ernst succède à l'honorable M. Lebeau. M. Ernst, l'un de ceux qui avaient le plus violemment attaqué l'arrêté du 17 avril 1834, ne se hâtait pas trop de déposer le projet de loi que le gouvernement avait promis.

Le 15 janvier 1835, l'honorable M. de Robaulx lui rappelle la promesse faite, M. Ernst s'engage à donner suite à cette promesse.

Le 12 août 1835, est déposé le projet qui est devenu la loi du 22 septembre 1835.

Le 26 août, la discussion générale s'ouvre. Le premier reproche fait à la loi c'était son caractère inconstitutionnel.

Voici ce que disait à cet égard l'honorable M. Fallon, un de nos anciens présidents :

« La règle constitutionnelle c'est l'assimilation de l'étranger au régnicole, quant à la protection duc à sa personne et à ses biens...

« L'exception ne peut pas étouffer la règle, en la livrant tout entière à l'arbitraire du pouvoir exécutif sans responsabilité et sans contrôle. »

Les Chambres n'ont pas le droit de remplacer la règle par l'exception.

Quant à moi, messieurs, je suis de l'avis de M. Fallon ; j'approuve le principe de la loi de 1835 ; je crois qu'elle est indispensable dans un pays comme le nôtre, qui a pour voisin de grandes puissances toutes disposées à obtenir de nous, même par l'intimidation (comme le gouvernement de Louis-Philippe l'a fait à l'égard de la Suisse), ce que nous refuserions de leur accorder de bon gré.

Aussi, n'étaient les scrupules constitutionnels que je partage avec d'autres membres encore que M. Fallon, je voterais la loi de 1835 ; mais la Constitution, que j'ai promis d'observer, me fait un devoir de refuser mon vote à votre loi.

MM. Liedts, Seron, Gendebien et de Brouckere traitaient également la loi d'inconstitutionnelle et votèrent contre elle.

D'autres honorables membres, et parmi eux les hommes les plus marquants qui ont siégé dans cette enceinte, ont voté, à différentes époques, contre la loi sur les étrangers.

M. Verhaegen, ce libéral sincère, aux convictions profondes, qui vous a répudiés lorsque, de parti libéral que vous étiez, vous vous êtes transformés petit à petit en parti autoritaire et militariste ; M. Delfosse ; M. Castiau, une des brillantes étoiles de notre ciel parlementaire, si je puis m'exprimer ainsi ; M. d'Elhoungne, ce vigoureux athlète à qui, pour le dompter, il a fallu la citadelle de Gand tout entière.

J'espère bien que cet honorable membre me donnera l'appui de son autorité et de son talent ou pour faire proroger la loi à une moindre époque ; ou pour faire tout au moins adopter les améliorations que je voudrais voir adopter par la Chambre et que, pour finir, je vais faire connaître en quelques mots.

Il y a trois ans, messieurs, eut lieu une grande et belle discussion sur la loi de 1835. Divers systèmes ont été exposés par d'honorables membres avec beaucoup de science et un grand désir de faire quelque chose de mieux que la loi de 1835.

Les honorables MM. Van Humbeeck, Guillery, Nothomb, Coomans et Bara firent des efforts généreux, les uns un peu plus, les autres un peu moins, pour faire introduire quelques améliorations dans la loi, mais toutes ces tentatives échouèrent, sauf un amendement de M. Bara, demandant la délibération des arrêtés d'expulsion en conseil des ministres ; toutes ces tentatives, dis-je, échouèrent devant l'inflexibilité de l'honorable M. Tesch.

Parmi tous ces amendements rejetés, on remarquait surtout ceux de MM. Van Humbeeck, et Nothomb qui voulaient que, pour toute expulsion, le gouvernement prît l'avis conforme des chambres du conseil des tribunaux d'arrondissement, ou des chambres de mise en accusation ; ou d'une commission consultative composée des trois premiers présidents ou des trois procureurs généraux de nos cours d'appel. Je ne les reprendrai pas, ne doutant guère que, reproduits par M. Bara, les arguments dont, en 1865, les a combattus l'honorable M. Tesch, ne décident encore la majorité à les rejeter.

Mais il est quelques autres amendements, moins importants, il est vrai, qui n'ont pas été combattus en 1865, d'une mise en vigueur facile et auxquels, je crois, le gouvernement lui-même pourrait se rallier.

Ils constitueraient cependant une double amélioration à la loi de 1835.

Ainsi, dans la loi hollandaise, il est dit que l'étranger qu'on expulse a quinze jours à partir de celui de la signification de l'arrêté pour quitter le pays. Ayons, messieurs, au moins la moitié de la générosité de la loi hollandaise et accordons huit jours à l'étranger que le gouvernement expulse. Huit jours de répit seront un grand service rendu à l'étranger et je ne pense pas que les puissances voisines s'en offensent, surtout si ce délai est inscrit dans la loi. Vous n'aurez, je pense, aucune raison de ne pas accepter ce léger adoucissement à la loi rigoureuse de 1835.

J'ai un autre amendement à présenter. En présence du pouvoir absolu conféré au gouvernement sur des milliers d'individus vivant sur notre sol, avec qui nous sommes tous les jours en relations, à qui nous portons de l'intérêt, en présence, dis-je, de ce pouvoir immense que le gouvernement exerce sur ces individus, disposant de leurs personnes, de leur fortune, de leur liberté, il serait juste, me semble-t-il, que le gouvernement vînt chaque année, au commencement de la session par exemple, nous rendre compte de l'exécution de la loi de 1835.

Le gouvernement n'a certainement pas l'intention d'abuser de la loi de 1835, car j'admets avec lui que c'est toujours une chose pénible que d'avoir à expulser des hommes souvent remarquables, à qui, souvent, on ne peut guère reprocher que des opinions qui n'ont pas triomphé dans leur pays.

Mais le gouvernement, composé d'hommes faillibles comme nous tous, ne peut, me semble-t-il, se refuser à venir nous rendre compte chaque année de l'usage qu'il a fait du pouvoir exorbitant, arbitraire que la loi lui confie, et communiquer à la Chambre les arrêtés d'expulsion qui ont été pris, notamment contre des réfugiés politiques. Que le gouvernement consente à s'expliquer ainsi chaque année et il aura donné à l'opinion publique la satisfaction à laquelle elle a droit.

J'ai formulé ces amendements et j'ai l'honneur de les faire parvenir au bureau.

J'espère que la Chambre voudra y faire un accueil favorable.

M. le président. - Un nouvel amendement est parvenu au bureau ; il est ainsi conçu :

« Au lieu de : « Jusqu'au 1er juillet 1871 » dire : « Jusqu'au 1er mai 1869 ».

« Signé : Van Humbeeck, Dethuin, Couvreur, Hagemans, Guillery. »

L'amendement a été développé par M ; Van Humbeeck ; comme il est signé par cinq membres, il fait partie de la discussion.

M. Coremansµ. - Je m'y rallie.

M. le président. - Le bureau a reçu deux autres amendements, ainsi conçus :

« Au paragraphe 2 de la loi du 7 juillet 1865, au lieu des mots : « un jour franc au moins » mettre : « huit jours francs au moins. »

« Signé Coremans. »

« Ajouter à l'article 7 de la loi du 7 juillet 1865 sur les étrangers :

« Chaque année, au commencement de la session, le gouvernement rendra compte aux Chambres législatives de l'exécution de la présente loi.

« Signé Coremans. »

Ces amendements ont été développés par leur auteur.

- Ils sont appuyés et font, par conséquent, partie de la discussion.

M. Guillery. - Messieurs, dans l'esprit de la loi sur les étrangers, à chaque renouvellement de cette disposition législative, la mission de la Chambre est d'examiner les actes du pouvoir exécutif qui se rattachent à l'exécution de la loi.

Je demanderai à M. le ministre de la justice qu'en répondant aux précédents orateurs, il veuille en même temps donner des explications sur l'exécution des lois autres que les deux lois dont on vient de parler, celle de messidor an III et l'arrêté-loi du mois d'octobre 1830.

Je vois dans le tableau qu'il a fourni à la section centrale que du 17 juillet au 31 décembre 1865, il y a eu 145 arrêtés royaux d'expulsion à charge d'étrangers poursuivis ou condamnés pour l'un des crimes ou (page 1282) délits énumérés dans l'article premier de la loi du 1er octobre 1833 et deux arrêtés royaux d'expulsion à charge d'étrangers compromettant la tranquillité publique pour motif politique, donc deux expulsions politiques.

Quant aux expulsions non politiques, elles ont été successivement de 155 en 18C6, de 156 en 1867 et de 45 du 1er janvier au 6 mai 1868.

Le tableau ajoute en note :

« Il est aussi à remarquer qu'un certain nombre d'arrêtés d'expulsion n'ont pas été exécutés.

« En 1868, un étranger qui troublait la tranquillité publique, a été averti qu'il serait l'objet d'un arrêté d'expulsion s'il ne quittait le pays. Cet étranger n'est plus en Belgique. »

J'attendrai les explications qui seront données au nom du gouvernement avant de traiter la question au fond.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Messieurs, après la séance d'hier, je croyais que l'honorable membre allait venir attaquer les actes du gouvernement. Le rôle qu'il prend est très facile. L'honorable membre annonce qu'il a des abus à faire connaître ; et maintenant il vient demander au gouvernement de vouloir bien lui ouvrir ses dossiers, afin qu'il examine s'il n'y trouvera pas de griefs. (Interruption.)

Voici textuellement les paroles que l'honorable M. Guillery prononçait hier :

« On nous dit : Messieurs, vous ne citez aucun fait, vous n'articulez aucune attaque contre le gouvernement.

« Attendez donc ; un peu de patience ; si nous avons la parole, si nous avons le temps de discuter, si nous sommes certains d'être écoutés avec bienveillance, et de ne pas être exposés à voir clore la discussion, nous aurons à voir, à examiner la conduite du gouvernement. »

Messieurs, il s'agissait donc pour l'honorable membre de parler, et non pas de faire parler le ministre de la justice ; l'honorable membre a dit : « Nous parlerons, si nous sommes certains d'être écoutés avec bienveillance. »

Je crois que la Chambre écoutera l'honorable M. Guillery avec bienveillance ; qu'il signale donc les faits qui, à ses yeux, constituent des griefs à la charge du gouvernement, et alors l'honorable M. Guillery aura justifié l'attitude qu'il a prise hier devant la Chambre, et le pays lui en saura gré.

Maintenant, l'honorable membre s'est mis dans une très fausse position ; il veut que le gouvernement vienne ici avec les dossiers de toutes les expulsions qu'il a décrétées. Il ne se demande pas si par là il ne va pas nuire à certains étrangers auxquels il s'intéresse. Comment ! vous voulez que je dise ici ce qu'ont fait tous les étrangers ; c'est sous prétexte de les protéger que vous désirez que je les dénonce aux gouvernements étrangers et que je compromette peut-être leurs intérêts !

Je puis dire, messieurs, que si l'honorable membre ne parle pas, c'est qu'il n'a rien à dire ; car, enfin, les personnes qui ont été l'objet des mesures de rigueur, l'honorable M. Guillery les connaît, la presse a donné leurs noms. Pourquoi ne nous dit-il pas : Dans cette circonstance, vous avez mal agi ; l'étranger que vous avez expulsé n'avait commis aucun fait répréhensible ; il ne compromettait pas la tranquillité publique. Mais si l'honorable membre ne veut rien préciser. S'il continue à rester dans le vague, je verrai, à mon tour, quelle attitude je dois prendre dans ce débat que je n'ai pas provoqué.

M. Guillery. - Je crois qu'il n'entre pas dans l'intention de M. le ministre de la justice de me reprocher de ne pas l'attaquer, et d'user de prudence dans une matière aussi délicate.

Sans doute, je sais parfaitement à quoi je fais allusion, mais j'ai pris la voie que j'ai adoptée, guidé précisément par le sentiment que vient de développer l'honorable ministre de la justice.

Si M. le ministre me dit qu'il croit, qu'il a la conviction intime que, dans l'intérêt des étrangers, il vaut mieux qu'il n'y ait pas d'explications, qu'on s'exposerait en donnant les explications réclamées à les priver de l'asile qu'ils occupent aujourd'hui, il est évident, messieurs, que je n'irai pas sacrifier des individualités pour une question de principe, et que sous prétexte de modifier, d'améliorer la loi sur les étrangers, je n'irai pas nuire à des personnes honorables. Ainsi il en résultera que nous n'irons pas plus loin.

Je ne vois donc pas qu'il y ait de contradiction à dire que si la discussion est ouverte, nous aurons à examiner la conduite du gouvernement.

Voilà cependant ce que j'ai dit : on verra alors s'il y a des faits à critiquer dans le gouvernement, soit à droite soit à gauche.

Y en a-t-il, je n'en sais rien, mais quant à moi, je déclare que l'honorable ministre de la justice croit qu'il vaut mieux, dans l'intérêt des personnes dont il s'agit, ne pas soulever la question. Je respecte leur position personnelle et par des motifs parfaitement respectables, je m'abstiendrai de discuter la question.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Je n'accepte point la position que me fait l'honorable M. Guillery.

L'honorable membre a lancé hier une attaque dans une phrase peut-être très vague, je l'admets, mais dont le sens n'a échappé à personne, ni ici ni au dehors de cette enceinte. Cette phrase a été si bien comprise qu'elle a été relevée par mon collègue des finances et par les journaux, et il en est qui signalent aujourd'hui les personnes qui ont fait l'objet de mesures de rigueur.

L'honorable membre nous disait hier : Nous discuterons, nous parlerons, si l'on nous écoute avec bienveillance, nous examinerons la conduite du gouvernement.

Aujourd'hui l'honorable membre change de thème ; il nous invite à donner des explications sur tout ce que nous avons fait en matière d'expulsion et il ne précise aucun fait, il n'appelle la lumière sur aucun point du débat. Il veut que nous produisions tous les dossiers de la sûreté publique afin de savoir ce qu'ils contiennent.

Puis-je accepter cette position ? Ce n'est pas à moi à formuler des griefs, je n'ai qu'à me défendre contre les attaques que j'attends. Le prétexte que l'honorable M. Guillery invoque pour ne point parler est vraiment étrange. « Si M. le ministre de la justice croit que des explications peuvent nuire aux étrangers, je m'abstiendrai. » Tel est aujourd'hui le thème de M. Guillery.

Mais est-ce que cette considération retenait hier l'honorable membre lorsqu'il sollicitait la bienveillante attention de la Chambre pour dévoiler les abus commis par le gouvernement !

Je ne suis point de cet avis, messieurs, que la crainte de nuire aux étrangers doive empêcher un député de remplir son devoir, lorsque celui-ci a cru devoir annoncer à la tribune qu'il connaissait des abus.

Evidemment il pourra se faire que par vos révélations vous serez désagréable à certains étrangers, mais par votre altitude courageuse, énergique, vous aurez évité le retour des excès de pouvoir que vous avez à signaler et vous aurez ainsi rendu service à la cause des étrangers en général.

C'est donc un devoir impérieux pour vous de justifier vos attaques, c'est un devoir d'honneur devant lequel M. Guillery ne peut pas reculer.

Il ne suffit pas de venir dire dans cette Chambre qu'on est avancé, qu'on est plus libéral que d'autres ; il ne suffit point de prétendre qu'on a des doctrines qui ont pour elles l'avenir. Quand on prend le rôle d'agresseur, il faut fournir ses preuves.

Nous discuterons tout à l'heure cette doctrine prétendument protectrice des étrangers et nous montrerons que le système qu'a présenté l'honorable M. Van Humbeeck en 1865 constituait pour l'étranger un véritable leurre, ce qui était certes bien loin des intentions loyales de l'honorable membre.

Eh bien, je dis à l'honorable M. Guillery que c'est pour lui un devoir d'honneur de signaler au pays les faits auxquels il a fait allusion hier en avançant que le gouvernement a abusé de la loi sur les étrangers.

M. Guillery. - Vous voyez que le débat devient tout à fait personnel. (Interruption.)

M. le ministre de la justice vient de dire que j'avais attaqué hier le gouvernement ; que j'axais dit qu'il avait abusé de la loi sur les étrangers. Y a-t-il eu un seul mot de semblable dans ce que j'ai dit ? Qu'ai-jet demandé ? J'ai demandé qu'on discutât.

Maintenant M. le ministre me met dans une impasse. Il dit : Si vous m'attaquez, si vous parlez d'un étranger, vous le compromettez et vous l'exposez à être expulsé du pays où il a reçu l'hospitalité. Si vous n'attaquez pas, vous reculez devant ce que vous avez dit hier.

Il trouve ensuite étonnant qu'avant d'attaquer, je demande des explications. Mais il me semble que c'est la marche qu'indique le bon sens.

MfFOµ. - Précisez les faits sur lesquels vous demandez des explications.

M. Guillery. - Vous avez dit vous-même qu'il y avait eu deux expulsions en matière politique, et qu'une personne avait été avertis que si elle ne quittait pas le pays, elle serait expulsée.

Je maintiens la question que j'ai adressée, je demande quels sont les motifs des expulsions. Ce n'est que quand le gouvernement m'aura donné les motifs de ces expulsions que je pourrai apprécier sa conduite. Je ne puis apprécier d'après des articles de journaux qui peuvent s'être trompés. J'ajoute que si le ministre croit convenable, dans un intérêt d'humanité, de ne pas faire connaître les faits, je n'insisterai pas. Mais quant à moi, il m'est impossible de m'expliquer sur les faits, si l'on ne me dit pas ce qui s'est passé, et avant que nous soyons d'accord sur les (page 1283) faits, sur les causes de l'expulsion. Quand vous m'aurez donné les motifs, je pourrai les juger. Jusqu'à présent ce que je sais, je ne le sais que par ouï-dire. Je suppose qu'une personne menacée d'expulsion, vienne me voir, qu'elle m'énonce tels ou tels faits.

Elle peut ne pas être sûre de ces faits ; elle peut s'être trompée elle-même. Donc il faut des explications officielles sur ces faits.

Messieurs, je fais un appel à toute la Chambre : Pourrait-elle juger les faits, sans avoir entendu les parties ? Pourrait-elle dire qu'une expulsion a été juste ou injuste sans avoir entendu les explications du gouvernement ? Ce n'est que quand j'aurai entendu ces explications que je pourrai m'expliquer moi-même.

MfFOµ. - Sur quels faits ?

M. Guillery. - Nous en avons trois ; ce n'est donc pas chose si vague.

Quant aux autres expulsions, j'aurais désiré des explications sur les motifs généraux.

On dit que je demande à M. le ministre de la justice d'ouvrir les dossiers du département.

Je suis convaincu que si je m'étais rendu au ministère et si j'avais demandé à M. le ministre de m'ouvrir les dossiers, il n'aurait rien vu là de contraire aux usages parlementaires et aux relations qui existent ordinairement entre le pouvoir exécutif et le pouvoir administratif. Si j'avais demandé les dossiers, j'aurais fait usage du droit de contrôle parlementaire. Si l'on a fait sonner bien haut l'efficacité du contrôle des Chambres, c'est parce que les Chambres ont le droit de demander à M. le ministre de la justice de voir les dossiers.

Messieurs, je le répète, j'ai fait mon interpellation de la manière la plus loyale. Je n'ai pas dit à M. le ministre de justice, ni aujourd'hui, ni hier, que le gouvernement avait violé la loi, avait méconnu la loi, avait abusé de la loi.

Je veux bien laisser cette question de côté.

Si M. le ministre me dit qu'il ne peut donner des explications, je m'en rapporte à sa loyauté.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - L'honorable membre change complètement de rôle. Il ne peut pas nier qu'hier il a lancé l'attaque ; à que servirait-il de dire : « Nous discuterons la conduite du gouvernement et nous examinerons ! » si c'était pour se taire aujourd'hui ? C'est votre devoir de discuter la conduite du gouvernement et de signaler les abus. Quand l'honorable membre disait : « Nous examinerons la conduite du gouvernement, » il entendait signaler des abus et il ajoutait : « Dans tous les cas, ce que je considère comme fondamental, c'est que l'examen de la conduite du gouvernement doit toujours précéder la discussion de la loi. »

Et aujourd'hui, que fait l'honorable membre ?

Il demande que le gouvernement expose sa conduite, et ainsi l'honorable membre, qui me reproche de le mettre dans une impasse, me place, moi, dans la position la plus difficile ; il dit : « Je réserve mon jugement, je ne me prononce pas ; je ne connais rien. » Eh bien, si vous ne connaissez rien, pourquoi parliez-vous hier ? Dans une matière aussi délicate, vous qui invoquez les rapports entre le gouvernement et la Chambre, si vous aviez des motifs spéciaux pour désirer des éclaircissements relativement à tel ou tel étranger, pourquoi, je le répète, dans une matière aussi délicate, ne pas me demander des renseignements avant de porter le débat dans cette enceinte ?

Je vous aurais fait connaître les motifs qui justifiaient les expulsions faites. Mais vous avez préféré lancer une attaque qui doit avoir du retentissement dans le pays, et vous n'apportez aucune preuve à l'appui de votre accusation. Si donc quelqu'un a manqué aux rapports qui doivent exister entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, ce n'est pas moi.

Maintenant, je ne veux pas laisser à l'honorable membre le bénéfice de l'ambiguïté, je ne veux pas qu'il puisse croire que le gouvernement a eu peur de faire connaître sa conduite. Le gouvernement ne recule pas devant des explications.

Je n'ai point provoqué le débat, mais l'honorable membre, en disant qu'il y a eu deux expulsions et qu'un troisième étranger a été averti, m'a mis dans la nécessité de m'expliquer sur ces faits, ses réticences sont un blâme ; or, je parlerai, tant pis pour ceux que l'honorable M. Guillery a mis en cause ; c'est sur lui que retombe la responsabilité de ce qui en adviendra.

Messieurs, les deux expulsions indiquées au tableau fourni à la section centrale sont antérieures à mon entrée aux affaires ; elles ont eu lieu sous l'administration de mon honorable prédécesseur, M. Tesch, et il faut bien le dire, la loi de 1865 a été faite pour elles.

Quand la Chambre a voté cette loi, elle savait que le lendemain de sa promulgation, certaine personne qui avait suscité des difficultés internationales serait l'objet d'un arrêté d'expulsion. Cette personne, messieurs, se disait « l'apôtre de la jeune république ». Elle avait été condamnée en France à 5 ans de prison pour offense envers le gouvernement français. Cet écrivain s'était réfugié en Belgique et y avait fondé un journal appelé la Rive gauche et dans ce journal il dirigeait ses attaques incessantes contre un gouvernement voisin ; ces attaques étaient de la dernière violence. Tout le monde a connu cet étranger.

L'honorable M. Tesch provoqua un arrêté d'expulsion. Cet acte eut l'approbation du pays tout entier ; dans la presse il ne rencontra guère d'opposition ; l'organe principal de la droite, le Journal de Bruxelles, l'approuva de la manière la plus formelle dans un article du 24 septembre 1863.

Quelques jours après cette expulsion, un autre réfugié politique, attaché aussi à la rédaction de la Rive gauche, ne se contenta plus d'injurier un gouvernement voisin ; il s'attaqua au gouvernement belge et né respecta même pas la personne inviolable de notre souverain.

Voici ce que le sieur Longuet publiait dans la Rive gauche :

« ... En lisant l'arrêté royal (celui qui concerne l'expulsion de M Rogeard), il nous a semblé que nous n'avions pas encore quitté l'empire, qu'à l'exemple de ses mouchards, son image nous suivait jusqu'à Bruxelles, et que nous la voyions, hideuse et brutale, sur cette feuille de papier où s'étale le nom de Léopold.

« Examinons l'arrêté royal, analysons-en le fond et la forme, l'origine et les conséquences.

« Léopold s'adresse d'abord, selon la formule consacrée, à tous présents et à venir. Quant au présent, tout ce qu'il y a en lui d'honnête et de vigoureux flétrit déjà cet acte de faiblesse et de persécution ; et si l'avenir parle de l'arrêté royal qui expulse le nommé Rogeard, ce sera d'un autre style : les rôles seront changés. Ses dédains seront pour le roi, ses respects pour l'écrivain. L'histoire vengeresse dira : « En 1865, Rogeard, l'auteur des Propos de Labienus, fut chassé brutalement par un roi nommé Léopold. »

« En vérité, les professeurs chargés d'instruire les héritiers présomptifs s'acquittent bien mal de cette tâche, ou ces augustes intelligences sont donc bien rétives à la littérature et à la science.

« ... Mais non, Léopold n'a rien oublié ; M. Tesch se doute bien aussi que dans l'avenir sa platitude et son obscurité ne le protégeront pas plus que le Jean de Broc de Courier ou le Boniface de Proudhon. Seulement, le souci de la postérité préoccupe peu ces hommes du pouvoir, qui en recherchent les vanités et les jouissances, mais en dédaignent l’austérité et la gloire.

« Vous êtes bien sévère pour le Roi, nous dira-t-on ; s'il est faible devant Bonaparte, c'est par intérêt de famille. Ne faut-il pas qu'il paye, même de la honte nationale, la protection que le bandit accorde à sa fille bien-aimée, l'impératrice du Mexique ? Léopold est bon père de famille, soit ; mais alors il est mandataire infidèle à la nation. Il a des caresses pour ses enfants, c'est beau ; mais il a des soufflets pour son peuple, c'est humiliant.

« Et venez maintenant, grands patriotes qui avez voté la loi restaurée, parler à la Belgique des dangers qu'elle peut courir. Promenez encore devant ses yeux ce spectre repoussant de l'annexion ; nous, nous lui montrerons votre Roi et ses ministres serrant la main sanglante et inepte qui a mitraillé Paris et écrit la vie de César ! Et nous crierons bien haut, sûrs d'être compris de tous : L'annexion est faite ! »

Voilà, messieurs, les infamies qu'on a publiées dans la Rive gauche. L'honorable M. Guillery, qui lit les journaux, devait savoir que les causes d'expulsion des réfugiés Rogeard et Longuet étaient indiscutables. L'article continue en ces termes :

« Par l'arrêté du 15 juillet, qui inaugure cette série de lâches concessions promises à Bonaparte, Léopold a perdu ce renom de fermeté et de sagesse qu'on lui avait fait jadis... »

- Plusieurs membres. - C'est une indignité !

- De toutes parts. - Assez, assez !

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Voilà, messieurs, les faits pour lesquels l'expulsion a eu lieu...

MfFOµ. - Et voilà ce qu'on nous accuse d'avoir fait.

M. le ministre de la justice (M. Bara). ... aux applaudissements de tout le pays. Longuet a voulu faire une espèce de meeting pour (page 1284) obtenir une protestation contre la mesure dont il avait été l'objet, et le méprit public lui a répondu.

Les deux autres faits, messieurs, se sont passés sous mon administration.

Un réfugié espagnol est venu en Belgique. II était accompagné d'un grand nombre de ses compatriotes.

Le gouvernement espagnol se plaignit. Il accusa ce réfugié de menées et de conspiration. Le gouvernement belge résista au gouvernement espagnol et refusa des mesures de rigueur.

Le gouvernement espagnol prétendait que les hommes qui se trouvaient en Belgique formaient une troupe armée de conspirateurs qui, à un moment donné, se dirigeraient sur l'Espagne.

L'Espagne prétendait qu'il y avait continuellement chez ce réfugié politique des conciliabules, dans lesquels on préparait un soulèvement contre le gouvernement établi. Nous avons toujours dit que les preuves étaient insuffisantes.

J'ai fait appeler ce réfugié dans mon cabinet et je lui ai demandé de justifier la présence d'autant de réfugiés se groupant autour de sa personne.

Il m'a répondu : Ce sont des malheureux que je soutiens parce qu'ils sont dans la misère.

Je lui ai demandé ce que signifiaient ces allées et venues d'étrangers, arrivant de tous les coins de l'Europe pour conférer avec lui. Il m'a répondu : Ce sont des amis qui viennent saluer le général. Je lui ai demandé s'il conspirait et je lui ai fait remarquer qu'il était impossible pour nous qui étions en relation d'amitié avec l'Espagne, de tolérer sur le sol belge des étrangers qui prépareraient la chute d'un gouvernement ami. Le général m'a répondu qu'il ne poserait pas en Belgique d'actes de conspiration, et nous avons dit à l'Espagne : Nous ne pouvons prendre aucune mesure de rigueur contre le général Prim, puisqu'il ne conspire pas contre vous.

L'événement est venu prouver que l'Espagne avait raison. Tous les hommes qui se trouvaient ici étaient des conspirateurs que le général Prim avait à solde et qui sous sa direction devaient quelque temps plus tard chercher à pénétrer en Espagne les armes à la main.

Pour le prouver, ai-je besoin de me servir de rapports secrets ? mais Bon ; j'ai les aveux mêmes des personnes qui ont trempé dans cette affaire, des personnes auxquelles nous avons dit que leur conduite compromettait la tranquillité publique.

Voici, en effet, ce que disait le général Prim dans le mémoire justificatif qu'il a publié après les événements. Je le prends dans un journal qui, ce matin même, nous accusait d'avoir expulsé à tort le général Prim :

« Je suis parti le 7 de Bruxelles, le mouvement devant avoir lieu le 15 ; j'ai traversé la France pour m'embarquer dans un de ses ports, et je me suis rendu aux portes d'une de nos villes les plus importantes, où j'ai séjourné pendant quarante-huit heures, après avoir touché les côtes d'Afrique.

« Ce n'est pas ma faute si les militaires assermentés, qui étaient en nombre suffisant et placés dans des positions avantageuses pour entraîner dans le mouvement le reste de l'Espagne, ont manqué à leur parole. Ce n'est pas ma faute si, me voyant forcé de revenir à Marseille, le 20 et me trouvant le 22 à la frontière de la Catalogne, j'ai rencontré les forces du gouvernement là où je complais trouver celles qui devaient m'attendre. Ce n'est pas ma faute si les libéraux des provinces de Tarragone. Lerida et Barcelone se sont vus dans l'impossibilité de venir à ma rencontre, comme était convenu dans la prévision de ce qui est arrivé. Enfin, ce n'est pas ma faute si, malgré mes efforts et ceux des dignes amis qui m'ont accompagné pendant douze jours (jusqu'au 4 septembre), il nous a été impossible de réunir une petite troupe pour tâcher d'opérer notre jonction avec les braves de Barcelone et de Tarragone, desquelles nous étions éloignés de quarante lieues.

« Que ceci reste consigné pour l'honneur de ceux qui, en entrant en Espagne, ont vu que la promesse faite à Gérone et à Lérida n'avait pas été tenue. Que l'on prenne acte de ce fait pour la gloire des braves qui auraient mieux aimé aller recevoir leur général que combattre les forces très nombreuses qui les harcelaient. Qu'on sache ceci enfin, à la honte des militaires qui n'ont pas tenu leur parole d'honneur, à l'opprobre des hommes qui ont promis sur la frontière ce qu'ils n'ont pas été capables d'accomplir plus loin ! »

Et ce qui prouve que le complot s'est tramé Bruxelles, c'est la phrase suivante du manifeste :

« Ai-je besoin de vous dire que mon départ de Bruxelles eut lieu d'accord avec mes amis les plus intimes, et qu'avec eux aussi il fut fait élection de l'endroit vers lequel je devais me diriger. Il est inutile d'ajouter que nous avions combiné la manière d'entrer en Catalogne. »

A la fin de son mémoire justificatif, le général Prim disait :

« Je ne me serais pas placé dans une situation révolutionnaire si les cris de l'opinion publique avaient été écoutés en Espagne. Cette situation je ne l'abandonnerai pas un seul jour avant que les gouvernements successifs aient cessé d'être en Espagne les bourreaux de leur patrie et le scandale de l'Europe. »

Nous n'avons pas à juger les causes, mais le général Prim déclare qu'il continuera à conspirer sur le sol belge, à comploter la chute du gouvernement de son pays.

Dans ces conditions, pouvions-nous permettre au général Prim de continuer à résider en Belgique ? Il conspire sur le sol belge, puis après sa défaite, il déclare qu'il continuera à conspirer contre le gouvernement de l'Espagne. N'avions-nous pas le droit de dire au général qu'il abusait de l'hospitalité que la Belgique lui avait accordée ?

Du reste, les compagnons du général avouent eux-mêmes que c'est à Bruxelles que le complot a été tramé. Je tiens en main un récit fait par le général de la Torre des événements auxquels il a pris part. Ce document est écrit en espagnol ; il est daté de Bruxelles, 4 novembre 1867.

M. de la Torre, maréchal de camp, ancien député appartenant au parti démocratique, raconte qu'il a assisté à une réunion de progressistes et de démocrates qui a eu lieu à Bruxelles le 5 juillet 1867, et dans laquelle on a arrêté le programme de l'insurrection, programme dont le premier acte stipulait la chute des Bourbons.

Désigné par le général Prim pour occuper le poste de capitaine général de Valence, il atteignit cette ville après un voyage long et périlleux ; mais au moment décisif les personnes sur le concours desquelles il avait compté, ne tinrent pas leurs engagements. Après d'inutiles efforts pour les entraîner, il se rendît à Alicante, où il ne fut pas plus heureux. De là il passa à Oran, d'où il est revenu à Bruxelles.

Le général dela Torre termine son manifeste par un exposé des griefs de son parti contre le gouvernement de la reine et par un appel à la révolution.

Ainsi donc, le général de la Torre constate dans cette pièce que le 5 juillet il y a eu à Bruxelles une réunion pour arrêter le plan de l'insurrection.

Eh bien, je le demande, pouvions-nous tolérer de pareils faits ? Mais que dirions-nous, si demain, dans un pays voisin, on allait organiser une bande pour envahir la Belgique ? Que dirait-on si des Belges s'en allaient en Espagne, à Rome, en France ou ailleurs, dresser un plan d'insurrection, recruter des troupes pour venir attaquer le gouvernement belge ? Mais ce serait la violation la plus manifeste des bons rapports qui doivent régner entre toutes les nations !

Nous avons à remplir envers nos voisins des devoirs de bonne amitié et nous ne pouvons pas admettre que des étrangers puissent impunément venir, sur notre propre sol, compromettre nos rapports internationaux.

Est-ce que l'honorable M. Guillery professe des doctrines différentes des nôtres ? Pas le moins du monde, messieurs. Voici ce qu'il disait, ici même, dans la séance du 15 janvier 1861 :

« J'admets qu'un étranger compromettrait la Belgique, s'il profitait de son séjour dans le pays pour correspondre avec ceux qui veulent renverser un gouvernement étranger, s'il allait, par exemple, 3 ou 4 fois par mois à l'étranger sous un déguisement et qu'il rentrât ensuite en Belgique. »

Ainsi, d'après l’honorable membre, le seul fait d'une correspondance contre un gouvernement étranger suffit pour autoriser l'expulsion.

Eh bien, il s'agit d'un étranger qui avait recruté, soldé des troupes sur le sol belge pour aller fomenter une révolution dans un autre pays ! Et c'est sur un pareil fait que l'honorable membre nous demande une explication ?

Est ce que d'autres membres de la gauche ont professé des opinions différentes ?

En 1859, les honorables MM. Goblet et Guillery ont fait une interpellation à propos d'un colonel hongrois auquel le gouvernement avait interdit l'entrée de la Belgique. Et que disait M. Goblet ?

« Que l'on empêche les réfugiés de conspirer chez nous contre la puissance qui les a expulsés. »

Eh bien, qu'avait fait le général Prim ? Il avait conspiré contre la puissance qui l'avait expulsé.

(page 1285) Et l'honorable M. Guillery parlant dans le même sens s'exprimait ainsi : « Il ne s'agit pas d'un homme qui est allé faire un coup de tête, qui est allé soulever son pays, qui a médité une révolution. »

Eh bien, c'est parfaitement le cas du général Prim. Il avait quitté son pays natal ; il était venu conspirer chez nous la chute des Bourbons ; il avait soldé ici des hommes pour exécuter son plan d'envahissement de l'Espagne.

Vous étiez donc d'accord avec le gouvernement ; vous allez même plus loin que lui, car vous admettez que rien qu'une correspondance de la part d'un étranger avec ses compatriotes suffit pour justifier l'expulsion.

Et M. Goblet ajoutait :

« Certes, nous ne voulons pas que notre pays serve d'asile à tout le monde, à des hommes qui ne veulent user de l'hospitalité qu'on leur accorde ici que pour s'y préparer à jeter le trouble dans leur pays. »

Voilà donc pour le général Prim.

Messieurs, le dernier fait est certainement celui pour lequel il n'y aura qu'une approbation unanime dans le pays. Je ne pense pas que quelqu'un ose même se lever pour prétendre que le gouvernement eût dû hésiter un instant à expulser l'étranger dont je vais m'occuper.

Un Français, le sieur Vésinier, avait été expulsé de Suisse pour ses menées, ce qu'il annonce dans une proclamation qu'il a adressée aux habitants du canton de Genève, proclamation qui, paraît-il, n'a pas produit beaucoup d'effet, puisque l'ordre d'expulsion a été maintenu.

« Citoyens, disait-il dans sa proclamation, j'ai été expulsé du canton de Genève par arrêté du conseil d'Etat du 30 mars, ainsi conçu.... Après cette décision j'ai été arrêté, conduit par la police jusqu'à Coppet sans avoir eu le temps de faire mes préparatifs de départ et je n'ai pu obtenir que trois jours pour venir régler mes affaires, devant quitter le canton lundi prochain. »

« .. Je ne suis pas réfugié français ainsi que le prétend l'arrêté d'expulsion, étant compris dans le décret d'amnistie du 15 août 1859, j'ai un passeport parfaitement en règle.

« J'invoque le droit international qu'ont tous les étrangers des pays amis ou alliés de la Suisse de résider sur le sol helvétique.

« Je m'adresse à tous les citoyens souverains et libres ; je me place sous leur protection afin qu'ils fassent respecter dans ma personne le droit violé. Comme je me suis adressé au gouvernement fédéral, je me place sous la protection des institutions libérales de la Suisse, persuadé que, dans un pays libre, l'autorité cédera devant l'opinion publique à laquelle je fais appel. »

Cet écrit est daté de Genève, 13 avril 1861.

L'appel à l'opinion publique resta sans effet et le gouvernement fédéral laissa exécuter l'arrêté du conseil d'Etat.

Il arrive plus tard en Belgique, et il y inaugure son entrée par la publication d'un livre scandaleux, qu'on poursuit du chef d'offense à la personne d'un souverain étranger, mais qu'on aurait mieux fait de poursuivre du chef d'atteinte à la morale publique et aux mœurs. Certes, il n'y a rien de plus ignoble, en fait d'écrits lubriques, que l'ouvrage auquel je fais allusion.

Cet ouvrage est tellement immonde que le parquet, chargé d'instruire l'affaire, n'a pas voulu initier le jury aux choses ordurières qui s'y trouvaient. Je mets le livre à la disposition des membres de la Chambre. (Longue interruption.)

Messieurs, pour faciliter la vente de l'ouvrage, cet honnête réfugié avait commencé par le mettre sous le nom d'une femme, madame Rattazzi. On sait pourquoi ce nom devait exciter la curiosité publique.

Madame Rattazzi a naturellement protesté de toute complicité dans un écrit semblable.

Le sieur Vésinier fut condamné par la cour d'assises du Brabant à dix-huit mois d'emprisonnement. Si, après sa libération, il eût été immédiatement expulsé, le gouvernement certes n'eût pas eu besoin de justification, il aurait suffi du simple fait d'une condamnation à dix-huit mois d'emprisonnement pour des faits aussi immoraux passés en Belgique, pour qu'aux yeux des plus difficiles, l’arrêté d’expulsion fût parfaitement légitime.

Mais, messieurs, le gouvernement n'attachant aucune importance à cet homme, crut qu'on pouvait le laisser en Belgique. Qu'arriva-t-il ? Cet homme, qui n'est pas ouvrier, entre dans la société internationale qu'il dirige et dont il tient la plume ; et là, messieurs, il prétend imposer sa volonté à toute la classe ouvrière de la Belgique, instruire nos ouvriers, leur inculquer ses principes économiques, se faire professeur d'émeute, de condition et de morale.

Vous savez, messieurs, quels tristes événements ont éclaté dans le bassin de Charleroi, et cet étranger, qui n'a rien à faire avec notre pays, cet étranger qui avait été chassé de la Suisse, qui sortait de prison pour faits immoraux, va-t-il nous laisser tranquilles, va-t-il nous laisser surmonter les difficultés qui se présentent devant nous ? Pas le moins du monde.

Il agit de sa plume et de sa personne et il vient jeter de l'huile sur l'incendie qui a éclaté.

C'est lui, messieurs, qui inspire l'adresse de l'Association internationale des travailleurs, que vous connaissez et où les doctrines les plus incroyables sont professées.

Il importe de lire ces doctrines, non, messieurs, pour justifier l'expulsion de Vésinier, elle n'a pas besoin de justification, mais pour expliquer dans quelles circonstances elle a été faite et pour prémunir la société contre les tendances de certains individus qui n'ont rien de commun avec la classe ouvrière et qui vivent d'agitation et d'excitation au désordre. (Interruption.)

D'abord dans le manifeste, Vésinier prétend que nos troupes ont massacré les bouilleurs de Charleroi.

Ce n'est pas forcées par une dure nécessité que nos troupes ont fait usage de leurs armes, c'est pour le plaisir de massacrer, pour le plaisir de tuer.

Voilà ce qu'il constate, lui qui n'a rien vu, et alors qu'il est établi par l'instruction judiciaire que nos troupes n'ont fait usage de leurs armes qu'après avoir essuyé des coups de feu.

Voici en quels termes s'exprime le manifeste de l’Internationale :

« Nos frères, les ouvriers houilleurs du bassin de Charleroi, se sont mis en grève à la suite d'une nouvelle réduction de 5 p. c. sur leurs salaires, que leurs patrons voulaient leur imposer arbitrairement. La gendarmerie et la troupe envoyées sur les lieux les ont brutalement chargés et fusillés à bout portant : une dizaine d'entre eux ont été tués roide, et une vingtaine grièvement blessés ; il y a parmi les morts des épouses et des mères, qui n'ont pas trouvé grâce devant les égorgeurs.

« Jamais, dit l’Etoile belge, journal dévoué jusqu'à l'insulte aux auteurs de ce massacre, jamais on n'avait vu spectacle plus douloureux : une malheureuse femme qui voulait arracher son mari des rangs des forcenés (c'est ainsi qu'on appelle les ouvriers victimes du massacre), a eu le sein traversé, elle est morte ainsi que son époux. Quant au transport des cadavres, c'était navrant. Une malheureuse dont le mari avait succombé voulait absolument monter sur la charrette où était son corps ; les mères, les filles pleuraient...»

« Voilà quelles sont les atrocités accomplies sur nos frères sans armes, qui refusaient de travailler à prix réduits, pour ne pas mourir de faim avec leurs familles. Ils n'avaient pas de pain, leurs exploiteurs leur ont mis du plomb dans le ventre. La gloire des héros de Montigny et de Gilly a égalé celle des bouchers de Mentana. Nos malheureux frères sont couchés dans la tombe sur laquelle pleurent leurs femmes et leurs enfants désespérés et mourant de faim. L'ordre règne dans le bassin de Charleroi comme en Pologne et à la Jamaïque. »

Par ce tableau on espérait, comme lors des funèbres journées de juin ou l'on promenait les cadavres des victimes dans les rues de Paris, on espérait, iîs-je, ajouter encore un nouvel aliment au désordre qui existait déjà dans le bassin de Charleroi.

« L'Association internationale des Travailleurs flétrit et dénonce avec la plus profonde indignation ces atrocités ; elle les signale à tous les travailleurs du monde et aux honnêtes gens de toutes les classes sociales ; elle voue au mépris public et noie d'infamie les égorgeurs et les assassins qui s'en sont rendus coupables et elle assure ses frères, les ouvriers du bassin de Charleroi, de son appui, de son dévouement et de son concours le plus énergique dans la malheureuse position qui leur est faite. »

Plus loin, messieurs, il explique le but de l'Internationale et il dit : Sa devise est un pour tous et tous pour un.

« L’Association internationale poursuit un but sublime : l'émancipation des travailleurs, l'abolition du prolétariat, l'extinction du paupérisme et de la misère, et, par la suite, la destruction du salariat et de l'exploitation. Elle est basée sur les grands principes humanitaires : Liberté, égalité, fraternité et solidarité.

« Elle travaille à les mettre en pratique ; à faire triompher la justice et le droit ; à établir le bien-être universel, le bonheur entre tous les hommes, pour que l'humanité tout entière soit une grande fédération de travailleurs libres, égaux et frères, échangeant et consommant équitablement leurs produits ; elle étudie les grandes questions, les problèmes (page 1286) de l'économie politique et sociale, afin de les résoudre et de les appliquer selon les lois de la science et les principes de la justice ; elle cherche à répandre l'instruction et le bien-être parmi tous les ouvriers ; elle les moralise, non pas en préconisant des dogmes ou des croyances basées sur des révélations, des légendes ou des mythes, mais en divulguant les lois de la matière et les principes de saine philosophie matérialiste, rationaliste et positiviste.

« Sa devise étant un pour tous et tous pour un entre les travailleurs, elle a dû nécessairement se préoccuper vivement et douloureusement des événements terribles qui viennent de s'accomplir près de Charleroi ; son attention était depuis longtemps fixée de ce côté, surtout depuis la malheureuse affaire de Marchienne. Elle avait constaté que la crise industrielle actuelle, comme toutes celles qui l'ont déjà précédée, est le fait de la féodalité financière et minière qui exploite à discrétion et à merci les ouvriers de ce malheureux pays. L'amour désordonné du lucre des grands propriétaires de mines et d'usines, leur imprévoyance, leur concurrence à outrance, l'oblitération complète de leur sens moral produite par le sybaritisme ; leur fausse science économique et anarchique, destructive de tout ordre social, opposée à toutes les lois de la production, de la consommation, de l'échange et de l'équitable distribution des produits et contraire à toutes les notions de justice : voilà quelles sont les causes premières de la terrible crise qui vient d'avoir lieu.

« Les détenteurs monopoleurs, les accapareurs illicites du sol et du sous sol, des instruments de travail et du capital social, sont aussi ceux qui font les lois, ceux qui disposent de la fortune et de la force publiques, qui règnent et qui gouvernent ; car ils ont aussi escamoté la souveraineté du peuple au moyen du suffrage restreint et de la corruption électorale.

« L'administration de la chose publique est tout entière dans leurs mains ; non seulement ils règlent arbitrairement et selon leur bon plaisir les rapports entre la production et la consommation, entre le capital et le travail ; mais encore ce sont eux qui font les traités internationaux, ceux sur le commerce, la navigation, les transports, les douanes, etc., selon leurs caprices et leurs convenances, et contre l'intérêt et les besoins dés travailleurs qu'ils réduisent à la misère, à la mendicité et au désespoir.

« Eh bien, quand ils ont créé cette anarchie économique, sociale et politique ; quand ils ont amené cette situation désastreuse par leur système criminel ; quand ils ne peuvent plus soutenir la concurrence étrangère ; quand ils ont encombré leur place, faute de moyens d'écoulement ou à la suite d'une crise politique qu'ils ont souvent provoquée et dont ils sont, dans tous les cas, les complices responsables ; au lieu de faciliter la vente de leur houille en baissant leurs prix, en cherchant des débouchés, en diminuant les transports et par tous les moyens intelligents et honnêtes ; que font-ils, ces loups cerviers de l'autocratie minière, de la féodalité financière ?

« Ils diminuent arbitrairement la production, ils ne font plus travailler leurs serfs, attachés à la mine comme ceux des seigneurs féodaux à la glèbe, que deux ou trois jours par semaine. Ils les mettent ainsi dans l'impossibilité absolue de subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles. Mais ce n'est pas encore assez que d'avoir réduit de moitié le travail de leurs ouvriers : comme leurs stocks ne s'écoulent pas et que leurs intérêts sont en souffrance, ces malthusiens harpagons ne veulent ni perdre, ni voir diminuer leurs dividendes ; ils se coalisent, ils s'entendent tous entre eux comme larrons en foire. Ces détrousseurs d'ouvriers réduisent les salaires de 5 p. c sans diminuer d'autant le prix de leur houille, et si les malheureux prolétaires, dont le salaire est déjà plus que de la moitié insuffisant, refusent d'accepter cette réduction arbitraire et odieuse, s'ils se mettent en grève, s'ils vont dans chaque mine dire à leurs camarades d'imiter leur exemple, de refuser de travailler à prix réduit, de se joindre à eux pour résister à l'oppression des capitalistes et des monopoleurs qui veulent les faire mourir de faim, alors voici ce qui se passe :

« Les féodaux de la finance s'adressent aux oligarques de la politique, nommés et choisis par eux et par leurs feudataires censitaires ; ils les convient à venir mettre leurs serfs à la raison. la caste exploiteuse, égoïste et cruelle est prévoyante, elle a enrégimenté, discipliné d'autres prolétaires jeunes et vigoureux ; elles les a revêtus d'uniformes, armés, hiérarchisés, soumis à l'obéissance passive, et dressés au massacre des ouvriers leurs frères. C'est avec l'aide de ces esclaves-soldats qu'elle a accompli les fusillades de Montigny.

« Tels sont les nouveaux crimes dont les hauts barons de la féodalité houillère viennent de se rendre coupables.

« Ceux qui possèdent tout, qui font tout, ne sont-ils pas les seuls responsables ?... ne sommes-nous pas fondés à leur demander compte des massacres qu'ils viennent d'accomplir dans le Hainaut ? Ne pouvons nous pas leur dire : Caïns, qu'avez-vous fait de vos frères ? Car l'eau de l'Océan ne suffirait pas à effacer les taches sanglantes qui souillent les mains et les fronts des bourreaux.

« C'est en présence de la situation horrible que ces faits odieux viennent de créer, que nous nous adressons aux ouvriers du bassin de Charleroi et que nous leur disons :

« Frères ! venez à nous, acceptez, dans votre malheur, la main fraternelle que nous vous tendons ; l’Association internationale des Travailleurs, quoique jeune encore, est déjà puissante et nombreuse ; elle compte ses membres par centaines de mille ; elle a des ramifications partout. Nous vous avons dit quel est son but : elle veut affranchir l’humanité de l'odieuse exploitation de l'homme par l'homme ; elle ne veut plus que vos sueurs engraissent vos oppresseurs pendant que la famine vous ronge et qu'elle dévore vos femmes et vos enfants ; elle ne veut plus que vos patrons vous retiennent de 1 à 5 pour cent sur vos salaires sous prétexte de former une caisse de prévoyance et qu'ils accumulent ainsi les millions à vos dépens, en vous laissant mourir de faim en temps de crise ou en recommandant à la charité publique vos familles lorsque vous êtes tués par centaines dans la mine, asphyxiés par le feu grisou ou écrasés par un éboulement ; elle ne veut plus que vos porions, complices de vos patrons, absorbent chaque semaine vos salaires, en vous forçant d'acheter chez eux, à des prix exorbitants, les objets de consommation et d'habillement dont vous avez besoin ; elle ne veut plus qu'ils vous poussent aux excès alcooliques afin de mieux vous extorquer le prix de vos sueurs et de vous abrutir en faisant de vous des espèces de péons, toujours endettés, dépendants et esclaves de leurs exploiteurs ; elle ne veut plus qu'on vous tienne plongés dans l'ignorance de vos droits et de vos devoirs ; que l'on fasse de vous une matière corvéable, exploitable et taillable à merci ; elle ne veut plus qu'on réduise vos salaires d'une manière de plus en plus inique, que l'on vous pousse aux derniers termes de l'exaspération et du désespoir ; elle ne veut plus que l'on vous égorge périodiquement quand vous demandez du travail ou du pain et que ceux qui échappent à la mort soient enchaînés comme des brigands, attachés à des pieux comme des bêtes féroces et emprisonnés arbitrairement ; pendant que d'autres d'entre vous, sans travail, sont traités comme des gens sans aveu, comme des vagabonds et séquestrés dans des dépôts de mendicité où ils sont soumis au travail forcé. Il est temps d'apporter un remède efficace à toutes ces misères et à tous ces maux.

« Elle vous dit : vous avez le droit pour vous. L'homme qui travaille doit avoir la jouissance complète de ses produits. La matière brute, le sous-sol, pas plus que le sol n'appartiennent aux monopoleurs et aux accapareurs. Les privilèges iniques qui les leur concèdent sont nuls de plein droit.

« Pas plus que l'air, la lumière du soleil et l'eau, la terre et la houille n'appartiennent aux compagnies minières : elles sont à la collectivité humaine et doivent être exploitées à son profit. Le produit net du travail des générations passées n'appartient pas à quelques privilégiés, mais à tous. Tous vos maux, vos misères, vos souffrances et votre désespoir proviennent de ce que l'on a violé les grands principes d'ordre, de droit et de justice primordiale.

« Quand vous vous êtes mis en grève, vous avez bien fait ; vous aviez raison ; vous avez exercé un droit et accompli un devoir. Loin de vous désavouer, nous venons vous soutenir et vous donner des conseils. » (Interruption.)

Voilà les écrits que cet homme lance au milieu des ouvriers !

Et croyez-vous qu'il recule devant l'aveu de paternité de ces appels à l'émeute et au désordre ? Non, messieurs. Il déclare lui-même, le lendemain de son expulsion., qu'il a été expulsé parce qu'il était de l’Internationale et parce qu'il avait pris part à la rédaction du journal la Cigale, d'où sont extraits les passages que je viens de lire. Il reconnaît lui-même qu'il a pris une part active à la fondation de la société l'Internationale et vous venez de voir les beaux principes que professe cette société. Il y a plus : Vésinier est allé lui-même dans le bassin de Charleroi, pour tâcher d'y organiser une section de l'Association internationale.

Et, ici je rencontre l'amendement prétendument humanitaire et certainement démocratique de l'honorable M. Coremans ; il fallait donner à Vésinier huit jours pour continuer ses menées. Il fomentait une émeute et il fallait lui dire : « Continuez pendant huit jours. »

M. Coremansµ. - Cette disposition existe en Hollande.

(page 1287) M. le ministre de la justice (M. Bara). - Je n'en crois rien, cela est sujet à vérification, mais en Suisse on ne lui a pas laissé trois jours, on l'a fait reconduire à la frontière par la police.

Messieurs, si l'on pouvait reprocher quelque chose au gouvernement, ce serait d'avoir usé d'une trop grande longanimité, de n'avoir pas fait usage de la loi assez tôt, car l'expulsion aurait pu avoir lieu après la publication de cet immonde écrit dont je vous ai parlé. Mais non, on a attendu, et ce n'est que quand Vésinier s'est immiscé dans nos troubles intérieurs pour y jeter de nouveaux aliments, que le gouvernement a dit : La coupe est pleine, notre devoir est d'agir.

Maintenant, je demande si de pareils faits sont susceptibles de provoquer une attaque de n'importe qui.

Je pense, messieurs, que les actes du gouvernement ne peuvent être l'objet d'aucune espèce de critique et j'attendrai les observations de l'honorable M. Guillery sur les faits que je viens de rappeler.

Quant à la loi, je demande que la Chambre la vote. Elle est indispensable au maintien de l'ordre en Belgique II est inutile de le cacher puisque le fait est public, l’Internationale se propose de tenir un congrès d'ouvriers en Belgique, au mois de septembre prochain ; eh bien, je demande à la Chambre de ne pas affaiblir l'arme que le gouvernement a entre les mains.

L'honorable M. Coremans a dit que j'avais promis d'améliorer la loi ; l'honorable membre n'a pas lu mon discours de 1865. J'ai dit : Quant à tous ces étrangers qui se plaignent de la loi, qu'ils retournent dans leur pays et qu'ils commencent par réformer leur propre législation. C'est aux apôtres de l'humanité à réviser la loi votée en 1849 par l'assemblée nationale et qui accordait aux préfets le droit d'expulser les étrangers.

Nous avons vu voter cette loi sans aucune observation par tous ces apôtres de la liberté et du droit naturel qui se trouvaient alors à la tête d'une grande nation, et l'on voudrait que nous, petit peuple, nous bravions l'Europe en permettant aux étrangers de faire de la Belgique le foyer de toutes les conspirations !

Il est bien facile à un étranger de venir faire en Belgique ce qu'il n'ose pas faire dans son pays, mais je dis que ce n'est pas un rôle digne. Je dis qu'on ne peut pas appeler la foudre sur ceux qui donnent l'hospitalité.

Je dis qu'il n'est pas digne d'hommes qui se disent libéraux de chercher à compromettre un des derniers pays libéraux de l'Europe, un petite nation qui sait se faire respecter des autres, mais qui sait aussi remplir ses devoirs envers elles. (Interruption.)

M. Jacobsµ. - L'honorable ministre de la justice vient de prouver qu'il n'y a aucun inconvénient à entrer publiquement dans tous les détails des expulsions opérées par le gouvernement belge ; il pouvait demander le comité secret, il ne l'a pas fait.

J'en tire un argument en faveur d'un des amendements de mon honorable collègue, M. Coremans, le rapport annuel qu'il demande sur l'usage fait par le gouvernement de la loi de 1855.

- Une voix. - Il n'y a aucun inconvénient à cela.

M. Jacobsµ. - S'il n'y a aucun inconvénient à cela, qu'on adopte la proposition.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Vous n'avez pas compris.

M. Jacobsµ. - Puisqu'on n'a pas trouvé d'inconvénient à justifier les trois actes dont il a été question, il n'y en a pas davantage à rendre un compte annuel de l'usage que fait le gouvernement de la loi relative aux expulsions.

Le second amendement de mon honorable collègue porte à huit jours le délai d'un jour franc accordé à l'étranger pour régler ses affaires.

Après avoir narré le fait Vésinier, on s'est demandé : Que serait-il arrivé si l'on avait permis au sieur Vésinier de rester huit jours de plus en Belgique î

Remarquez qu'il s'y trouvait depuis des années déjà. Les bases de l'ordre social n'eussent pas été ébranlées en Belgique par une prolongation de huit jours.

Je n'entends pas blâmer le gouvernement de l'usage qu'il a fait de la loi en cette circonstance. Mais franchement on eût tardé huit jours au lieu d'un que l'état des choses n'eût guère été empiré.

Pas plus que l'honorable M. Guillery, je na blâme la conduite tenue par le gouvernement dans les trois affaires dont il a été rendu compte, mais ces trois faits constituent-ils toute la situation ?

L'honorable M. Guillery a cité un fait notoire, celui du général Prim, dans lequel il n'a pas été porté d'arrêté d'expulsion ; on l'a évité en prévenant le général que s'il ne quittait pas le sol belge, il serait expulsé.

Il se peut qu'il y ait un grand nombre de cas de ce genre que nous ignorons.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Ce cas est parfaitement isolé.

M. Jacobsµ. - Il est isolé depuis votre avènement, soit. Mais en a-t-il été de même sous votre prédécesseur ?

Je pourrais citer plusieurs cas, dont l'un se rapporte à l'époque où une polémique assez vive avait lieu relativement aux fortifications d'Anvers, en 1859.

J'en tire un nouvel argument en faveur de la demande d'un rapport annuel sur les mesures prises à l'égard des étrangers.

Hier, l'honorable M. Guillery a-t-il prétendu que la conduite du gouvernement devait soulever de nombreuses critiques ? En aucune façon, et je m'étonne qu'il ait été si mal compris sur le banc des ministres.

Voici ce qu'il a dit : « Si la discussion s'ouvre, nous verrons si votre conduite est à l'abri de tout reproche. » Savait-il ce que ses 123 collègues pensaient de l'exécution de la loi ?

L'honorable ministre des finances nous conseillait hier de renvoyer cette discussion au budget de la justice. J'admets ce renvoi en ce qui concerne l'application de la loi ; je ne l'admets pas sur le fond de la loi, sur les réformes à y introduire.

Une discussion sérieuse, ajoutait-il, serait impossible lors de la rentrée des Chambres au 1er janvier : l'examen des budgets ne nous en laisserait pas le temps. Est-elle moins impossible en ce moment ?

Nous avons voté hier dix projets de lois sans avoir pu en approfondir aucun.

Le rapport sur le projet relatif aux étranger ne nous a été distribué qu'il y a vingt-quatre heures.

Il y a bien des questions à soulever ; par exemple, la codification de toutes les dispositions légales qui concernent les étrangers, point développé par l'honorable M. Thonissen. J'ai entendu dire aussi qu'il n'y a rien de changé. Mais, dans l'intervalle de la loi.de 1865 et de l'époque actuelle, nous avons révisé la loi sur l'extradition.

Nous l'avons étendue à un très grand nombre de cas, de sorte que, aujourd'hui, sans en avoir l'air, nous modifions la loi de 1835 ? puisqu'elle se combine avec la législation en matière d'extraditions.

Il y a là un changement qui mériterait discussion.

La majorité de la Chambre a décidé hier qu'elle ne voulait pas laisser le gouvernement désarmé.

Mais est-il nécessaire de l'armer pour un laps de trois ans ? Ne suffit-il pas d'un an, d'une prorogation de la loi jusqu'à la session prochaine ?

Nous voulons que, dans le cours de cette session prochaine, le projet de loi, déposé en temps utile, suivi d'un rapport en temps opportun, permette de se livrer à une discussion fructueuse.

J'engage la Chambre à adopter cette proposition ; le gouvernement sera armé mais il ne le sera que pendant le temps strictement nécessaire pour se livrer à une discussion sérieuse qui, dans l'état actuel des choses, est impossible.

Je l'engage à adopter aussi les amendements si anodins proposés par M. Coremans,

M. le ministre de la justice (M. Bara). - On paraît s'étonner ; de la manière dont le projet a été présenté et de la rapidité avec laquelle nous voulons le faire voter.

M. Guillery s'écriait hier : « C'est le lendemain du jour où le rapport a été déposé qu'on nous force à discuter, qu'on cherche à opprimer la minorité ! » Eh bien, messieurs, j'ai fait faire des recherches sur les précédents relatifs à la loi des étrangers ; cette loi a été prorogée dix fois. Et vous allez voir quand les projets ont été présentés, quand les rapports ont été déposés et quand a eu lieu la discussion.

En 1838, la présentation a eu lieu le 17 février 1838, le rapport a été déposé le 25 février, la discussion a eu lieu le 9 mars.

Je ferai remarquer que j'ai déposé le projet le 22 avril et que nous sommes au 15 mai.

En 1841, la présentation a eu lieu le 26 novembre, le rapport a été déposé le 10 décembre, la discussion et le vote ont eu lieu le 14.

En 1844, la présentation a eu lieu le 9 décembre, le rapport a été déposé le 20, le vote a eu lieu le 21.

En 1849, la présentation a eu lieu le 22 février, le rapport a été déposé le 27 février, la discussion et l'adoption ont eu lieu le 1er mars.

En 1852, la présentation a eu lieu le 29 janvier ; le rapport est déposé le 5 février, la discussion et le vole ont eu lieu le 6 février.

(page 1288) En 1855, fsus un ministère que M. Jacobs voudra bien reconnaître très soucieux des droits des étrangers, la présentation a eu lieu le 13 février, le rapport est déposé le 26, la discussion et le vote ont lieu le 28.

En 1858, la présentation a lieu le 19 janvier ; le rapport a été déposé le 2 février, la discussion et le vote ont eu lieu le 3.

Vous le voyez messieurs, c'est encore le projet actuel qui a occupé la Chambre le plus de temps. Si l'on en excepte le projet de 1863, à l'occasion duquel on a discuté à nouveau les principes, toutes les prorogations ont été obtenues de la Chambre en une séance.

Je crois donc que tous les arguments de M. Jacobs, qu'il est impossible de voter, que le rapport n'a été fait qu'hier, que tous ces arguments ne tiennent pas. La sollicitude de M. Jacobs pour les intérêts publics est tellement grande, qu'hier il a proposé l'ajournement du vote de telle sorte que nous nous trouverions au mois de septembre sans aucune espèce de loi contre les excès commis par les étrangers.

L'honorable membre demande maintenant si on ne peut pas adopter l'amendement de M. Coremans. C'est impossible, parce que la mesure qu'il propose est illibérale et antidémocratique ; elle est hostile à l'étranger, elle méconnaît ses intérêts à telle enseigne que beaucoup d'étrangers demandent qu'on ne prenne pas d'arrêté à leur égard et quittent volontairement le pays.

Ainsi, le général Prim, ainsi le sieur Vésinier sont partis volontairement ; ils n'ont pas voulu d'arrêté. Et vous exigez qu'on vous produise les dossiers ! Mais si vous vouliez des explications, pourquoi n'usez-vous pas de votre droit d'interpellation ?

Maintenant, messieurs, croyez-vous que l'étranger soit dépourvu des garanties ? Mais s'il est victime d'un acte arbitraire, soyez bien persuadé qu'il réclamera par la presse ; il agira comme l'ont fait certaines personnes : il ira demander l'intervention de quelque représentant pour exposer ses griefs et tâcher d'obtenir le retrait de la mesure dont il est l'objet.

L'étranger n'est donc pas sans garantie. Mais ne venez pas, sous prétexte de le protéger, proposer des mesures antilibérales, antidémocratiques et plus nuisibles qu'utiles à l'étranger. Quelle utilité, en effet, y a-t-il à exposer qu'un homme a fait un acte coupable, qu'il a ourdi des menées de nature à nuire au pays ? N'est-ce pas un stigmate que vous lui imprimeriez au front et par lequel vous l'exposeriez à ne plus trouver d'asile nulle part ?

Cet amendement, dicté par de vieux préjugés contre l'étranger lui serait donc extrêmement nuisible ; et, par conséquent, il faut le repousser.

M. Couvreurµ. - Je ne retiendrai pas longtemps l'attention de la Chambre ; l'état de ma santé ne me le permet pas. J'aurai peut-être quelque peine à me faire entendre, aussi, ne me suis-je levé que pour faire mes réserves quant à la conduite que le gouvernement a tenue dans l'affaire du général Prim.

Le grand argument en faveur de la mesure rigoureuse qui a été prise contre un homme qui honore son pays, qui l'a servi dans les positions les plus élevées, qui a conquis tous ses grades, non dans les antichambres du palais de Madrid, mais sur les champs de bataille, au péril de sa vie, pour la conquête et la consolidation des principes constitutionnels, d'un homme qui, à ces différents titres, méritait des égards particuliers et exceptionnels, ce grand argument, dis-je, c'est le fait de sa conspiration contre son gouvernement sur le sol belge, au mépris de l'engagement qu'il aurait pris de ne pas agir de la sorte pendant son séjour en Belgique.

Cet engagement a-t-il eu le caractère absolu que lui assigne M. le ministre de la justice ? Je voudrais pouvoir en douter.

J'admets, et. c'est ce qui peut expliquer la divergence d'appréciation, que le général ait déclaré que, dans son action contre son gouvernement, il éviterait de compromettre les relations de la Belgique avec l'Espagne ; mais qu'il ait fait une déclaration par laquelle il aurait abdiqué son rôle de chef de parti, j'avoue qu'une pareille déclaration me paraît impossible de sa part. Les actes mêmes qui ont été incriminés peuvent recevoir une explication parfaitement compatible avec cette attitude.

Le général, dit M. le ministre de la justice, formait ici, en Belgique, les contingents avec lesquels il a plus tard envahi son pays ; ces hommes étaient à sa solde, à sa discrétion, voilà la preuve flagrante de sa culpabilité.

Mais, messieurs, n'oublions pas que le général Prim était sorti d'Espagne accompagné de deux régiments entièrement dévoués à sa personne. Ces hommes trouvèrent du travail, des secours en France, en Allemagne, en Italie, mais lorsqu'ils apprirent la présence en Belgique de leur général, d'officiers sous lesquels ils avaient servi, quoi de plus naturel que leur désir de venir les rejoindre, avec l’espoir d'améliorer leur propre position, ou de souffrir avec leurs chefs, d'être plus près d'eux, de stimuler leur zèle à recommencer la lutte contre le gouvernement espagnol ?

Je ne vois là rien qui puisse être reproché au général Prim. Au contraire, j'incline à croire que plus d'une fois ces hommes ont gêné le général, obligé qu'il était de subvenir à leurs besoins, de les caser, de les protéger ; car notez que, pour tenter une opération, il n'avait pas besoin de les avoir sous la main. Ce n'était certainement pas avec eux qu'il combinait les opérations qu'il projetait. Il y avait tout avantage pour lui à les laisser là où ils avaient trouvé du travail et où il pouvait leur transmettre ses ordres avec plus de sécurité que s'il les réunissait en Belgique, où il était exposé à éveiller l'attention du gouvernement sur ses menées.

Reste le second point : les conciliabules des officiers. Ici, je l'avoue, je me trouve en présence d'un aveu du général de la Torre d'après lequel il y aurait eu, à Bruxelles, à la veille de l'expédition, une réunion où l'on en aurait arrêté les derniers détails. Soit, c'est un fait isolé, un fait répréhensible si l'on veut, mais il ne s'ensuit pas encore que toute la conspiration ait été tramée en Belgique, contrairement aux engagements pris par le général Prim et dans des conditions qui fussent de nature à compromettre nos relations avec l'Espagne.

Mais, enfin, admettons que le général Prim ait été aussi coupable que l'affirme l'honorable ministre de la justice, je persiste à croire que dans le jugement de ses actes il fallait tenir compte de deux circonstances, qui ont été trop oubliées par le gouvernement.

La première de ces considérations c'est le régime qui domine en Espagne et que le général Prim a tenté de renverser, régime que je ne veux pas caractériser longuement, mais qui est tel, en fait, qu'il n'est pas un pays civilisé, et la Belgique moins qu'aucun autre, où ce régime pourrait s'établir sans soulever les plus violentes protestations.

Je dis que vis-à-vis d'un coreligionnaire politique, nous étions tenus à quelques ménagements et que s'il est coupable, lui, d'avoir conspiré contre l'ordre de choses en vigueur en Espagne nous sommes tous ses complices.

Nos délibérations parlementaires, nos libertés publiques sont pour la cour de Madrid une conspiration permanente. Cela est si vrai, que le langage de notre presse, ses jugements sur les affaires d'Espagne ont été plus d'une fois l'objet de dénonciations officielles de la part du gouvernement espagnol, comme le résultat d'une entente coupable, comme une violation flagrante des devoirs internationaux.

Voilà une considération qui aurait dû engager le gouvernement à faire preuve de quelque indulgence envers le général Prim.

Une seconde considération plus puissante encore, c'est que, lorsque le général Prim a été obligé de quitter la Belgique, il venait d'y rentrer en vaincu, en vaincu éclairé par l'échec qu'il venait de subir et d'autant plus décidé à ne pas recommencer de sitôt la tentative qui venait de se terminer si malheureusement pour lui, qu'il l'avait subie comme une nécessité, bien plus qu'il ne l'avait cherchée.

La Belgique étant séparée de l'Espagne par toute la largeur de la France, qui veille en premier lieu à la sécurité des frontières de sa voisine, je ne vois pas pourquoi dans cette circonstance, sans compromettre le moins du monde nos relations avec l'Espagne, nous ne pouvions pas maintenir debout les droits de l'hospitalité, malgré les torts antérieurs que pouvait avoir eus le général Prim envers la Belgique et cela à l'exemple de la France elle-même.

Il ne faut pas oublier en effet, messieurs, que la plupart des compagnons du général Prim étaient partis non de Belgique, mais de France ; c'est de la France qu'ils sont sortis pour faire leur expédition, ils y sont rentrés, et cependant le gouvernement français n'a pas jugé nécessaire d'être aussi sévère que le gouvernement belge. Il s'est borné à prendre contre ces émigrés vaincus certaines mesures de précaution provisoires, sans soulever aucune espèce de protestation de la part du gouvernement espagnol.

Si le gouvernement belge avait agi de même, je suis persuadé qu'après un certain temps, le gouvernement espagnol se fût résigné à laisser le général Prim vivre en paix à Bruxelles ; il eût compris que le passé était pour lui-même une garantie que le vaincu, surveillé de près désormais pendant son séjour à Bruxelles, n'eût plus songé à y renouveler ses entreprises.

Depuis que le général Prim est réfugié en Angleterre, a-t-il songé à (page 1289) y organiser une. nouvelle expédition contre le gouvernement de son pays ? Y a-t-il eu de la part de l'Espagne des réclamations adressées au gouvernement anglais ? Aucune.

Ce que l'Angleterre a fait, nous pouvions le faire sans nous exposer plus qu'elle à une rupture avec la cour de Madrid.

Messieurs, mon intention n'est pas de blâmer la conduite que le gouvernement a tenue. La situation était délicate et le général Prim n'est pas resté peut-être a l'abri de tout reproche, il n'a peut-être pas suffisamment respecté notre hospitalité, mais il revenait en suppliant, et dans des conditions qui pouvaient, à mon avis, permettre au cabinet libéral de se montrer envers ce réfugié plus indulgent qu'il ne l'a été.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Messieurs, je ne puis me rallier à ce que l'honorable membre vient de dire ; il ne blâme pas la conduite du gouvernement ; mais le gouvernement, selon lui, aurait pu être un peu plus indulgent.

Messieurs, le général Prim m'a déclaré qu'il ne posait pas en Belgique d'actes de conspiration.

Evidemment, si le général Prim m'avait déclaré qu'il conspirait, j'aurais dû proposer son expulsion.

J'ai appelé son attention sur deux faits bien évidents, sur le grand nombre d'Espagnols qu'il avait réunis autour de lui, et sur les conciliabules qui se tenaient chez lui, et il m'a donné des explications qui pouvaient paraître satisfaisantes.

Messieurs, nous sommes en bonnes relations avec l'Espagne, nous n'avons pas à nous occuper de la cause que défendait le général Prim.

L'honorable M. Couvreur trouverait-il bon que les réfugiés de l'ancien royaume de Naples fissent des invasions continuelles dans cette partie de l'Italie, en empruntant le territoire des Etats pontificaux ; et le gouvernement italien n'aurait-il pas raison de demander au gouvernement romain des explications si on organisait contre lui des expéditions sur ce territoire ?... (Interruption.)

C'était un territoire limitrophe, médit l'honorable M. Couvreur ; mais cet argument n'a aucune valeur ; cela n'a pas empêché le général Prim et ses compagnons de se montrer sur la frontière d'Espagne...

M. Couvreurµ. - Ils sont partis de France.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Tous les généraux et la plupart des hommes sont partis de Belgique.

L'honorable membre dit que les faits sont inexacts. Mais les faits sont avancés par le général Prim lui-même ; il dit qu'il a tout organisé à Bruxelles, et le général de la Torre dit que c'est dans la réunion du 5 juillet que le plan de l'attaque a été dressé. Voici de plus un écrit publié par M. Louis Blairet, pour répondre aux accusations dont le général Prim était l'objet. J'y trouve le passage suivant :

« Pendant plus d'un an il s'occupa activement de réunir tous les éléments qui devaient lui assurer le succès, et si le mouvement fut ajourné jusqu'au mois d'août 1867, c'est faute d'entente entre les différents chefs du parti progressiste et du parti démocratique. Prim se réservait la direction générale du mouvement. » Et plus loin il ajoute :

« Tout étant ainsi déterminé, chacun vint prendre les ordres à Bruxelles et tous allèrent à leur poste désigné. » (Interruption.)

El l'on vient dire que ce n'est pas sur le sol belge que l'expédition a été organisée !

Mais je prie l'honorable membre de remarquer que le général Prim ne s'en défend pas ; c'est son titre de gloire ; il serait mécontent si l'on disait le contraire ; il prétend qu'il a tout organisé, qu'il a tout prévu et que, s'il a échoué, ce n'est pas sa faute. Ainsi donc il n'y a pas de doute, la conspiration a été ourdie sur le sol belge.

- La discussion générale est close.

Discussion des articles

Article premier

M. Hagemans. — En présence des explications qui ont été données parle gouvernement, je n'insiste pas, pour ma part, sur l'amendement que j'ai signé et je retire en conséquence ma signature.

M. le président. - L'amendement reste donc signé par MM. Van Humbeeck, Dethuin, Couvreur et Guillery.

L'article premier du projet du gouvernement était ainsi conçu :

« Art. 1er. La loi du 7 juillet 1865, relative aux étrangers, est prorogée jusqu'au 17 juillet 1871. »

La section centrale propose de modifier cet article comme suit :

« Art. 1er. La loi du 7 juillet 1865, relative aux étrangers, est prorogée jusqu'au 17 juillet 1871, avec les modifications suivantes :

« A l'article premier, les mots : « en Belgique », sont ajoutés aux mots : « par sa conduite », et la date du 5 avril 1868 est substituée à celle du 1er octobre 1833. »

La proposition du gouvernement, modifiée par M. le ministre de la justice, dans fa séance d'hier, porte :

« Art. 1er. La loi du 7 juillet 1865, relative aux étrangers, est prorogée jusqu'au 17 juillet 1871, avec la modification suivante :

« A l'article premier, la date du 5 avril 1868 est substituée à celle du 1er octobre 1833. »

Vient ensuite l'amendement au même article premier de MM. Van Humbeeck et autres membres. Il tend à dire au lieu de : « jusqu'au 1er juillet 1871 », ceci : « jusqu'au 1er mai 1869. »

Viennent ensuite les deux amendements de détail, proposés par M. Coremans.

Je crois qu'il faut d'abord mettre aux voix la proposition de la section centrale, par cela même qu'elle porte sur le délai de prorogation le plus étendu. C'est la pratique suivie en pareille occurrence.

Je crois donc devoir mettre d'abord aux voix le paragraphe premier de l'article premier de la section centrale.

M. Jacobsµ. - Il me semble que le vote doit porter seulement sur les mots :

« La loi du 7 juillet 1865, relative aux étrangers, est prorogée jusqu'au 17 juillet 1871. » Sans ajouter : « avec les modifications suivantes ».

Le deuxième voie portera précisément sur le point de savoir si l'on y apportera des modifications. (Adhésion.)

- Plusieurs membres. - L'appel nominal ?

Il est procédé au vote par appel nominal sur les mots : « La loi du 7 juillet 1865, relative aux étrangers, est prorogée jusqu'au 17 juillet 1871. »

87 membres sont présents.

64 adoptent.

23 rejettent.

En conséquence, cette première partie de l'article premier est adoptée.

Ont voté l'adoption :

MM. Rogier, Sabatier, Schollaert, Tack, Thienpont, Thonissen, T'Serstevens, Van Cromphaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Vilain XIIII, Warocqué, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Bara, Braconier, Bricoult, Broustin, de Baillet-Latour, de Brouckere, De Fré, de Haerne, de Kerchove de Denterghem, Delcour, De Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de. Rongé, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, de Vrière, Dewandre, d'Ursel, Frère-Orban, Hagemans Hymans, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret. Julliot, Lange, Lebeau, Lesoinne, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Pirmez et Dolez.

Ont voté le rejet :

MM. Royer de Behr, Van Humbeeck, Verwilghen, Vleminckx, Coomans, Coremans, Couvreur, David, de Coninck, Eugène de Kerckhove, Débet Dethuin, Funck, Gerrits, Guillery, Hayez, Jacobs, Landeloos, Lelièvre, Nothomb, Orts, Preud'homme et Reynaert.

« Art. 1er. La loi du 7 juillet 1865, relative aux étrangers, est prorogée jusqu'au 17 juillet 1871.

M. le président. - Il y a un amendement de la section centrale qui consiste à rédiger l'article comme suit :

« La loi du 7 juillet 18H5, relative aux étrangers, est prorogée jusqu'au 17 juillet 1871, avec les modifications suivantes :

« A l'article premier, les mots : « en Belgique », sont ajoutés aux mots : « par sa conduite », et la date du 5 avril 1868 est substituée à celle du 1er octobre 1853. »

Il y a un autre amendement présenté par M. le ministre de la justice, consistant à rédiger l'article de la manière suivante :

« La loi du 7 juillet 1865, relative. aux étrangers, est prorogée jusqu'au 17 juillet 1S71, avec la modification suivante :

« A l'article 1er, la date du 5 avril 1868 est substituée à celle du 1er octobre 1833. »

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Messieurs, les mots « par sa conduite en Belgique » ne peuvent être admis par la Chambre.

On a voulu introduire cet amendement en 1861. En 1864, sur une simple observation qui a fait reconnaître le défaut capital de l'amendement, il n'en a plus été question.

L'honorable M. Van Humbeeck avait, en 1865, présenté un autre amendement consistant à dire : depuis son établissement en Belgique.

(page 1290) M. Van Humbeeck. - Pendant son séjour en Belgique.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Oui ; mais voyons quels seraient les résultats, d'ure pareille disposition.

Un étranger va à quelques lieues de la frontière exciter les ouvriers, l'armée à la révolte.

Il n'a pas commis ce fait en Belgique et vous ne pourriez l'expulser. Pareil système n'est évidemment pas soutenable.

- La réduction de la section centrale est mise aux voix, elle n'est pas adopté.

L'amenderont proposé par le gouvernement est mis aux voix et adopté.

M. le président. - Par suite de la résolution de la Chambre, l'amendement de MM. Van Humbeeck et consorts a l'article premier vient à tomber.

Nous avons à voter maintenant sur les amendements de l'honorable M. Coremans.

Il y a un premier amendement ainsi conçu : « A l'article 3, paragraphe 2, de la loi du 7 juillet 1865, au lieu des mots : « Un jour franc au moins », mettre : « Huit jours francs au moins. »

- L'amendement est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

M. le président. - Il y a un second amendement ainsi conçu :

« Ajouter à l'article 7 de la loi du 7 juillet 1865 le paragraphe suivant :

« Chaque année, au commencement de la session, le gouvernement rendra compte aux Chambres législatives de l'exécution de la présente loi. »

- L'amendement est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

Article 2

« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »

- Adopté.

Second vote des articles et vote sur l’ensemble

- L'article premier, amendé, est soumis à un second vote ; il est définitivement adopté.


Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble.

83 membres y prennent part.

64 membres répondent oui.

15 membres répondent non.

4 membres s'abstiennent.

Ont répondu oui :

MM. Rogier, Royer de Behr, Sabatier, Tack, Thienpont, Thonissen, T’Serstevens, Van Cromphaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Vilain XIIII, Warocqué, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Bara, Braconier, Bricoult, Broustin, de Baillet-Latour, de Brouckere, De Fré, de Kerchove de Denterghem, De Lexhy, d’Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, de Vrière, Dewandre, d’Ursel, Frère-Orban, Hagemans, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Julliot, Landeloos, Lange, Lebeau, Lesoinne, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Pirmez, Preud’homme et Dolez.

Ont répondu non

MM. Reynaert, Van Humbeeck, Verwilghen, Vleminckx, Coremans, Couvreur, David, de Coninck, Eugène de Kerckhove, Delaet, Funck, Gerrits, Guillery, Hayez et Jacobs.

Se sont abstenus :

MM. Dethuin, Lelièvre, Nothomb et Orts.

En conséquence le. projet, est adopté ; il sera transmis au Sénat.

M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont priés de faire connaître les motifs de leur abstention.

M. Dethuinµ. - Je n'ai pas voté contre la loi parce que je reconnais la nécessité de mesures répressives contre les étrangers qui abuseraient de l'hospitalité belge pour troubler l'ordre intérieur du pays et compromettre les relations amicales que l'intérêt national nous commande de conserver avec les gouvernements étrangers.

D'un autre, côté, messieurs, je crains que la loi ne soit parfois appliquée d’'une façon arbitraire contre des hommes politiques étrangers qui n'auraient commis dans leur patrie que la seule faute de défendre courageusement la cause de la liberté.

Je connais assez les sentiments généreux de l'honorable ministre de la justice pour être convaincu qu'aussi longtemps qu'il sera au pouvoir, cette loi sera toujours interprétée d'une façon large et libérale, mais les ministres se suivent et ne se ressemblent pas. Les lois restent. Je crains l'avenir, et voilà pourquoi mon vote n'a pu être affirmatif.

M. Lelièvreµ. - Je me suis abstenu parce que le droit d'expulsion, conféré au gouvernement, n'a pas été subordonné à des garanties propres à sauvegarder les intérêts des étrangers.

M. Nothomb. - Je me suis abstenu parce que j'aurais voulu trouver maintenant l'occasion d'améliorer la loi dans le sens des observations que j'ai présentées lors de la dernière discussion en 1865. D'un autre côté, une loi en cette matière étant nécessaire, je n'ai pu voter contre.

M. Orts. - Je n'ai pas voulu voter contre, parce que je reconnais qu'une loi est nécessaire, et je n'ai pas trouvé dans les trois cas dont il a été question des raisons de me défier du gouvernement ; je n'ai pas voulu voter pour, parce que je suis d'avis que la terme assigné à la loi est trop éloigné.

Ordre des travaux de la chambre

- Des membres. - A demain !

- D'autres membres. - Continuons !

- Voix nombreuses. - Non ! non ! à ce soir !

M. le président. - Je consulte la Chambre...

MfFOµ. - D’honorables membres demandent que l'on continue la séance...

- Une voix. - C'est impossible...

MfFOµ. - Permettez : je ne propose rien ; je ne fais que rapporter ce que j'entends dire autour de moi. D'honorables membres désirent que l'on continue : je suppose bien que d'autres ont un désir contraire...

M. Wasseige. - Nous n'avons pas dîné hier pour deux jours...

MfFOµ. - ... Sans doute pour la raison que donne l'honorable membre ; il y a plusieurs de nos collègues qui demandent à avoir une séance du soir... après avoir dîné ; d'autres demandent à avoir une séance demain. Eh bien, je crois qu'il est à craindre que nous ne soyons pas en nombre demain...

- De toutes parts. - Si ! si !

MfFOµ. - Il serait fâcheux que nous ne fussions pas en nombre lors de la prochaine séance, car on serait obligé de rappeler la Chambre pour voter certains crédits, qui sont absolument nécessaires pour satisfaire à des engagements de l'Etat.

Je demande donc que, quelle que soit la résolution que prenne la Chambre, on prenne l'engagement de se trouver en nombre, soit ce soir, soit demain.

Je me borne à faire remarquer que si l'on fixait une séance pour ce soir, on pourrait probablement en finir ; il ne s'agit plus que d'un certain nombre d'appels nominaux.

- L'assemblée, consultée, décide qu'elle se réunira ce soir à huit heures.

La séance est suspendue à cinq heures et un quart.

La séance est reprise à 8 heures et un quart.

M. le président. - Je dois faire connaître à la Chambre que M. Hagemans, forcé de partir, a demandé un congé pour la séance de ce soir.

- Ce congé est accordé.

Projet de loi allouant un crédit au budget du ministère de l’intérieur

Vote de l’article unique

La discussion générale est ouverte. Personne ne demandant la parole, l'assemblée passe à la discussion de l'article unique, ainsi conçu :

« Article unique. Il est ouvert au département de l'intérieur un crédit de cent quatre-vingt-dix mille francs (190,000 fr.), applicable aux dépenses résultant de la participation des producteurs belges à l'Exposition universelle de Paris.

« Ce crédit sera prélevé sur les ressources ordinaires du budget de 1868 et formera l'article 66bis du chapitre XIII du budget du ministère de l'intérieur pour ledit exercice. »

- L'article est adopté.


Il est procédé à l'appel nominal.

70 membres y prennent part.

65 membres répondent oui.

5 membres répondent non.

En conséquence, la Chambre adopte ; le projet de loi sera transmis au Sénat.

(page 1291) Ce sont :

MM. Royer de Behr, Tack, Thibaut, Thienpont, Van Cromphaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maescn, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Braconier, Bricoult, Broustin, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, de Kerchove de Denterghem, E. de Kerckhove, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, Frère-Orban, Funck, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Ont répondu non :

MM. Coremans, d'Ursel, Hayez, Jacobs et Kervyn de Lettenhove.

Projet de loi augmentant le nombre des notaires de résidence à Bruxelles

Discussion générale

M. Van Renynghe. - Messieurs, je saisis avec empressement cette occasion pour demander à M. le ministre de la justice s'il ne soumettra pas bientôt à la Chambre un projet de loi sur le notariat, conformément aux promesses qu'il a faites dans la séance du 13 novembre dernier, en déclarant « que le gouvernement a reconnu la nécessité de mettre le nombre des notaires en rapport avec le chiffre de la population et des affaires, non seulement à Bruxelles, mais encore dans les divers autres arrondissements du pays ; que les études à ce sujet étaient presque achevées et qu'un projet de loi pourrait probablement être soumis aux Chambres dans le courant de la présente année. »

Le besoin de modifications importantes à la loi sur le notariat se fait sentir vivement, surtout dans l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter.

Le mémoire remarquable adressé à M. le ministre de la justice par la chambre de discipline des notaires de l'arrondissement d'Ypres et dont un exemplaire a été remis à chaque membre de cette Chambre et du Sénat, mérite d'être mûrement examiné et de fixer l'attention la plus sérieuse du gouvernement.

Il prouve à l'évidence que le notariat, dans cet arrondissement, se trouve dans une position très critique et qu'il est très urgent d'y porter remède.

Pour ne pas abuser des moments de la Chambre, je ne relèverai pas les puissants motifs qui sont très clairement développés dans ce mémoire : mais je conjure M. le ministre de la justice de faire droit, le plus tôt possible, aux justes réclamations qui y sont formulées, le président.

- La parole est à M. Tack.

M. Tack. - Je voudrais adresser la même question à M. le ministre de la justice.

M. Broustinµ. - Messieurs, l'exposé des motifs du projet de loi actuellement en discussion nous fait connaître qu'aux termes de l'article 31 de la loi du 25 novembre an XI le nombre des notaires est déterminé de manière que dans les villes de 100,000 âmes et au-dessus, il y ait un notaire au plus par 6,000 habitants.

D'après cette base, et en supposant que la population de Bruxelles soit de 189,537 habitants, il ne pourrait y avoir au plus que 31 notaires à cette résidence.

Mais la population réelle de la capitale, au 31 décembre 1866, est de 169,686 ; en se conformant à la loi de ventôse, le nombre des notaires à Bruxelles devrait être de 28. Il y en a 30 aujourd'hui, en vertu de la loi de 1848 ; en portant ce nombre à 37, il y aura une augmentation réelle de 9 notaires, comparativement à celui qui doit exister en vertu de la loi organique.

Je ne viens pas combattre les propositions du gouvernement ; mais j'accomplis un devoir en l'engageant à ne pas se presser de déférer au désir que semble manifester la section centrale lorsqu'elle dit, par l'organe de son honorable rapporteur :

« Peut-être eût-il été désirable d'avoir un projet plus complet, applicable aux autres arrondissements. »

La loi de ventôse est la meilleure qui ait été faite sur l'institution du notariat. Ses dispositions sont combinées de manière à procurer au gouvernement le moyen d'augmenter ou de diminuer le nombre des notaires selon les besoins des populations.

Pour les villes de 100,000 âmes et au-dessus, vous avez une proportion d'un notaire par 6,000 âmes ; pour les campagnes, vous avez un maximum de 5 notaires par canton ; et il appartient au gouvernement de fixer les résidences de ces fonctionnaires de manière à satisfaire à la fois aux besoins des habitants et à ceux du notaire.

L'expérience acquise dès avant la loi de ventôse avait démontré aux législateurs de l'an XI combien il est important d'assurer aux notaires un bien-être convenable pour qu'ils puissent dignement remplir leurs fonctions.

A l'appui de ce que je dis, voici comment s'exprimait le conseiller d'Etat Real pour justifier la limitation du nombre des notaires.

« Les connaissances déjà acquises (celles des effets désastreux du trop grand nombre de notaires) permettent de penser qu'en respectant les limites tracées par la loi, le gouvernement pourra déterminer une fixation assez étendue pour qu'elle suffise aux besoins des administrés, mais assez limitée pour que l'homme probe et instruit, qui voudra se livrer aux longues études que l'état de notaire exige, puisse le faire avec l'espoir d'y trouver un honnête existence. »

Que le gouvernement se garde donc de céder aux influences de l'envie et de la jalousie qui le poussent à augmenter le nombre des notaires sous prétexte que ces fonctionnaires occupent des fonctions privilégiées qui les conduisent à la fortune et les rendent millionnaires en quelques années, comme l'insinue M. Rutgeerts, professeur de notariat à Louvain dans une récente brochure.

Moi qui suis dans le notariat depuis 42 ans, et notaire à Bruxelles depuis 19 ans, je puis attester, sans crainte d'être démenti, que le notariat ne rend pas millionnaire celui qui l'exerce. Les notaires peuvent certes acquérir une certaine aisance, mais se faire millionnaire par l'exercice de leur profession, c'est une illusion.

Certes, il existe des notaires jouissant d'une certaine fortune ; mais ceux que cette fortune offusque ne tiennent pas compte de son origine. Ils ignorent ou feignent d'ignorer que les notaires jouissaient déjà d'un certain patrimoine lorsqu'ils sont entrés dans la carrière ; il n'en peut être autrement, car les longues années de stage et celles passées ensuite dans les résidences rurales, sont des années d'épreuves et de sacrifices, qui se subissent par la perspective d'une position meilleure ; position qui ne s'acquiert le plus souvent qu'à l'âge de 30 ans, qui est l'âge où l'homme doit avoir jeté les fondements de sa fortune, s'il ne veut pas misérablement végéter avec sa famille.

Le tribun Favard, dans son rapport au tribunat, disait : « Une profession ne peut être bien remplie qu'autant que celui qui s'y adonne trouve dans son exercice honnête, intelligent et assidu, des moyens d'existence pour lui et sa famille ; le désœuvrement traîne à sa suite l'ignorance, la misère et les vices. »

Mais, nous dit-on, le nombre d'actes et celui des affaires vont sans cesse croissants à Bruxelles, de 1860 à 1867 le nombre d'actes s'est élevé de 9,390 à 12,449.

Voilà donc trois mille actes de plus en faveur de 1867. On ajoute que la somme des droits d'enregistrement payés par les 30 notaires de Bruxelles s'est élevée en 1866 à 1,835,695.

La moyenne des actes pour chaque notaire est de 376 ; la moyenne des droits est de 61,189 fr. 83 c.

Si on porte le nombre des notaires à Bruxelles à 37, chacun d'eux a la chance de recevoir encore 305 actes et de payer 49,613 fr. 38 c. au fisc. Ce qui revient à dire que l'augmentation laissera encore une large marge au bien-être de chacun des 37 notaires.

Mais il y a acte et acte. Les nombres relevés par la statistique comprennent des actes qui, à eux seuls, constituent un tout et d'autres qui complètent des actes qui ne sont que le commencement d'une affaire. Tels sont les procès-verbaux d'inventaire et de réception d'enchères.

Un inventaire, une vente publique exigent une série de procès-verbaux qui comportent aussi une série de numéros ; mais les procès-verbaux d'enchères ne sont que peu ou point rémunérés.

Il n'en est pas moins vrai que tous ces procès-verbaux font une masse qui enfle extraordinairement le nombre d'actes. Cette masse peut être évaluée au 1/6 des actes relevés par la statistique. La moyenne étant par chaque notaire de 305, si vous en déduisez un sixième, soit 50, vous trouverez que la moyenne en perspective pour chaque notaire sera de 255 et non de 305.

Mais en ce qui concerne les notaires de Bruxelles en particulier, il est à remarquer encore qu'ils sont dans une position tout exceptionnelle. Et en effet, l'agglomération bruxelloise se compose et de la ville et de sept faubourgs ; les relations des habitants de celle agglomération donnent naissance à nombreuses affaires, qui commencent dans les faubourgs pour se terminer dans la ville.

Or, les notaires des faubourgs ne peuvent instrumenter à Bruxelles.

(page 1292) Pour ne pas entraver ces affaires, les notaires de Bruxelles prêtent leur ministère à leurs confrères des faubourgs ; il en résulte que le nombre d'actes relevé à charge des notaires de la capitale en comprend une certaine quantité qui ne leur rapportent rien.

Cette quantité est en moyenne de 789 pour les 30 notaires ou de 26 par notaire.

Déduisant de la moyenne des actes reçus par chaque notaire de Bruxelles, qui est de 305, la moyenne des actes passés pour les confrères voisins soit 26, il reste finalement 281 actes par notaire de Bruxelles, soit 279.

Mais, dit-on encore, chaque notaire de Bruxelles verse une somme de 61,189 fr. 83 c. dans les caisses de l'Etat pour droits d'enregistrement. Cela veut-il dire que chaque notaire recueille un bénéfice équivalent aux droits qu'il paye au fisc ? Je ne crois pas qu'une pareille pensée puisse venir à l'esprit d'un homme sérieux. En effet, chacun le sait, les ventes d'immeubles sont les transactions dont les honoraires sont tarifés au taux le plus élevé. Eh bien, supposons un instant que la somme de 61,189 fr. 83 c. représente celle des droits de mutation. L'honoraire du notaire étant égal en moyenne au 1/10 des droits d'enregistrement sur les ventes d'immeubles, il en résulte que chaque notaire de Bruxelles reçoit en moyenne 6,118 fr. d'honoraires.

Eh bien, messieurs, croyez-vous que ce soit là un traitement exorbitant pour un notaire de Bruxelles ?

A la vérité, certains de ces fonctionnaires reçoivent plus que la moyenne de 305 actes ; il y en a même qui atteignent le chiffre de 700 actes. Mais à ces heureux notaires, nous avons à en opposer plus d'un tiers, qui ne passent pas 300 actes par an ; et dont l'émolument n'atteint réellement pas la moyenne de 6,000 francs.

En présence de ces résultats obtenus, chacun de nous comprendra le danger qu'il y a d'augmenter inconsidérément le nombre des notaires, sous prétexte que les notaires existants, s'enrichissent outre mesure.

Si je vote en faveur de la loi, c'est parce que je comprends la difficulté de la position des notaires de canton et des nombreux candidats notaires, qui tous aspirent au but qu'ils se sont proposé ; c'est-à-dire à obtenir enfin une place de notaire à Bruxelles pour les uns, dans les cantons pour les autres.

M. Notelteirsµ. - Messieurs, avant de nous présenter le projet de loi en discussion, on aurait dû, à mon avis, saisir la Chambre du projet de loi qui doit régler le ressort des notaires.

Les notaires de Bruxelles, et généralement les notaires des ressorts de cour d'appel, ont des avantages extrêmement considérables sur les notaires de canton ; ces avantages grandissent outre mesure par la facilité actuelle des communications ; le chemin de fer attire toutes les affaires lucratives dans les grands centres. C'est là un tort énorme causé aux notaires de canton, et qui mérite d'être pris en sérieuse considération.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Messieurs, l'honorable M. Van Renynghe a demandé au gouvernement d'examiner la question de la réduction des notaires dans certains arrondissements ; le gouvernement se livrera à cette étude, mais évidemment il ne peut prendre aucun engagement.

Il examinera de même la question de savoir s'il faut établir l'unité de ressort pour les notaires de Bruxelles et pour ceux des faubourgs ; mais il ne peut non plus prendre aucun engagement à cet égard.

- Personne ne demandant plus la parole, la discussion est close.

Vote de l’article unique

L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« Article unique. Par dérogation à l'article 31 de la loi du 25 ventôse an XI et à la loi du 26 décembre 1848, le nombre des notaires de résidence à Bruxelles pourra être porté à trente-sept.

- Il est procédé à l'appel nominal.

71 membres sont présents.

66 répondent oui.

4 répondent non.

1 (M. Notelteirs) s'abstient.

En conséquence, la Chambre adopte. Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont répondu oui :

MM. Royer de Behr, Tack, Van Cromphaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Braconier, Bricoult, Broustin, Coremans, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, de Kerchove de Denterghem, E. de Kerckhove, de Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, Frère-Orban, Funck, Guillery, Hayez, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Ont répondu non :

MM. Thibaut, Thienpont, Van Overloop et d'Ursel.

M. le président. - Le membre qui s'est abstenu est invité à faire connaître les motifs de son abstention.

M. Notelteirsµ. - Je me suis abstenu, parce qu'il m'a paru qu'il eût été beaucoup plus naturel de régler d'abord le ressort et ensuite le nombre des notaires.

Projet de loi allouant des crédits au budget du ministère des travaux publics

Discussion générale

M. le président. - La discussion générale est ouverte.

M. de Terbecq. - Messieurs, dans son projet de loi de crédits spéciaux, M.le ministre des travaux publics demande une somme de 1,800,000 francs, pour amélioration du régime de la Dendre, y compris les travaux à exécuter à Termonde.

D'après l'exposé des motifs et les renseignements que j'ai recueillis, une partie de ce crédit, soit 150,000 francs, est destinée à la construction d'une écluse en amont de la ville de Termonde pour la décharge des eaux par le fossé au nord ouest de la place ;

A la reconstruction du batardeau militaire, établi à l'extrémité de ce fossé près de l'Escaut ;

A l'amélioration du cours de la rivière dans la traverse de la ville ;

A la construction d'une écluse à sas au confluent de la Dendre et de l'Escaut.

Par ces divers travaux, Termonde ne sera plus exposée à ces inondations qui, à la suite des hautes marées, surviennent à différentes époques de l’année, dans la plupart des rues de cette ville, et causent des pertes et de grands dommages à plusieurs maisons, dont les caves se trouvent presque toujours inondées.

J'espère que tous les travaux à exécuter pour la canalisation entière de la Dendre seront bientôt terminés, et je voterai avec empressement le projet de loi du gouvernement.

M. Wasseige. - Je viens protester encore une fois contre le mode suivi par le ministère dans la présentation de ces projets de loi pour travaux publics aux derniers jours d'une session. Déjà plusieurs fois j'ai fait ces protestations, qui n'ont guère été écoutées, et le ministère est retombé cette fois encore dans son péché d'habitude.

Eh bien, je ne puis blâmer trop haut un semblable système. Comment, en effet, juger de la nécessité absolue et surtout de la nécessité relative des travaux que l'on nous propose. Il y aurait bien de choses à dire sur ce projet ; il sera cependant voté, je n'en doute pas, grâce à une coalition d'intérêts habilement ménagés... (Interruption) et dans un moment dont chacun saisit l'opportunité.

Après une simple et rapide lecture du projet de loi, il est cependant une seule observation que je crois devoir faire.

J'ai trouvé un crédit demandé pour construction de trois ponts sur la Meuse, deux dans la province de Liège, et la construction du pont de Dinant dont il ne reste plus que moitié.

Une chose m'a frappé, c'est qu'entre Namur et Givet, il n'existe qu'un seul pont, ou un demi-pont sur la Meuse. Cependant les rives de la Meuse sont habitées par des populations nombreuses et industrielles ; un chemin de fer existe sur la rive droite et ces populations ne profitent pour ainsi dire pas des avantages de ce chemin de fer, par suite de l'absence de pont qui ne leur permet pas de se mettre en communication avec le railway.

Sur une longueur de 30 kilomètres, il n'existe pas de pont, et je ne crois pas que cet état de choses se rencontre sur un autre point du parcours de la Meuse.

- Des membres. - Si, si !

M. Wasseige. - Non, je ne crois pas que vous rencontriez ailleurs 30 kilomètres de parcours sans un seul pont.

J'appelle sur cet état de choses l'attention sérieuse et bienveillante de l'honorable ministre des travaux publics. Je le prie de prendre en (page 1293) considération ces observations que je suis obligé d'écourter eu égard au moment où nous discutons le projet.

M. Lelièvreµ. - Il m'est impossible de ne pas faire remarquer que l'arrondissement qui m'a conféré l'honneur de le représenter plus particulièrement dans cette enceinte reste presque entièrement étranger aux œuvres d'utilité publique pour lesquelles le crédit est demandé. J'espère que le gouvernement ne négligera aucune occasion de réparer cette omission et que quand il s'agira de travaux qui seront exécutés par la ville de Namur, il voudra bien accorder à celle-ci les subsides nécessaires pour la mettre à même de pourvoir à des ouvrages utiles. C'est dans cette confiance que je voterai le crédit demandé.

M. Vermeireµ. - J'appuie les considérations présentées par mon honorable collègue, M. de Terbecq. Il me semble qu'il est nécessaire de faire des travaux à Termonde, au commencement de la ville et d'y placer des portes à sas. Si ces portes sont établies, les eaux de l'intérieur de la ville pourront constituer des bassins naturels ; et, de cette manière encore, la navigation sera considérablement améliorée. Aujourd'hui, les bateaux venant du Haut-Escaut peuvent très difficilement passer à la marée basse.

MtpJµ. - Ainsi que j'ai eu l’honneur de l'annoncer à la Chambre dans la discussion du budget des travaux publics, dans le procès qui, seul, empêchait de terminer les travaux de la Dendre dans la traverse de Lessines, une transaction est intervenue, par suite de laquelle nous avons pris possession de quelques ares de terre formant l'objet du litige.

Nous allons terminer les travaux dans la traverse de Lessines en même temps que quelques travaux de dragage qui restent à exécuter.

J'espère que dans un avenir prochain l'industrie et le commerce retireront les fruits si impatiemment attendus de ce magnifique travail.

Quant aux observations des honorables députés de Termonde, j'en ai pris bonne note et je donnerai tous mes soins à cette affaire.

Je cherche en vain dans le projet de loi la coalition machiavélique dénoncée à la Chambre par l'honorable M. Wasseige.

Je suppose que l'honorable membre n'a pas eu le temps de lire l'exposé des motifs du projet, car il aurait vu qu'il s'agit, en définitive, de régularisations de crédit et de crédits complémentaires pour des travaux dont la Chambre a décidé depuis longtemps le principe et l'exécution. Il n'y a donc rien dans le projet qui ressemble à une coalition.

Quant aux lacunes que l'honorable membre a signalées en ce qui concerne les ponts sur la Meuse, il y a un moyen très simple d'y remédier ; c'est que les communes s'entendent pour établir des ponts par voie de concession de péages ; le gouvernement interviendra volontiers par des subsides, comme il le fait aujourd'hui pour d'autres ponts concédés à l'aide des crédits sollicités par le projet de loi.

Discussion des articles

Article premier, paragraphes 1 à 12

« Art. 1er. Il est ouvert au département des travaux publics des crédits spéciaux à concurrence de 5,900,655 fr., pour solder les dépenses à résulter des travaux énumérés ci-après :

« 1° Pont et chaussées.

« Routes et bâtiments civils.

« 1. Reconstruction du pont de Dinant sur la Meuse, et construction de deux nouveaux ponts sur le même fleuve et de deux ponts sur l'Ourthe : fr. 500,000. »

- Adopté.

« 2. Continuation des travaux de restauration et d'amélioration du palais des anciens princes de Liège : fr. 250,000. »

- Adopté.

« 3. Prolongement du nouveau mur orné, établi le long du jardin du Palais royal de Bruxelles, dans la rue Bréderode, jusqu'à la porte du palais : fr. 90,000. »

- Adopté.

« B. Travaux hydrauliques et chemins de fer en construction.

« 4. Amélioration du régime de la Dendre, y compris les travaux à exécuter à Termonde : fr. 1,800,000. »

- Adopté.

« 5. Canalisation de la Mandel, depuis la Lys jusqu'à Roulers : fr. 300,000. »

- Adopté.

« 6. Solde de créances résultant de la construction du chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain : fr. 360,000. »

- Adopté.

« 7. Achèvement du port de refuge à Blankenberghe : fr. 240,000. »

- Adopté.

« 8. Continuation des travaux de défense de la côte contre l'action de la mer : fr. 100,000. »

- Adopté.

« 9. Agrandissement du bassin d'échouage des bateaux pêcheurs, à Ostende : fr. 480,000. »

- Adopté.

« 10. Embarcadères à établir le long du quai du Rhin, à Anvers : fr. 120,000. »

- Adopté.

« 11. Reconstruction des parties écroulées des musoirs du chenal de l'écluse maritime à Anvers : fr. 260,000. »

- Adopté.

« 12. Travaux d'amélioration de l'écoulement des eaux de la Senne, de l'amont vers l'aval de la ville de Bruxelles : fr. 60,000. »

- Adopté.

Article premier, paragraphe 13

« 13. Renforcement de la grande digue de mer devant Ostende : fr. 150,000. »

M. Van Iseghem. - Je ne doute pas que vous n'ayez lu dans le rapport de mon honorable ami, M. Vleminckx, la note concernant le danger que présente la grande digue de mer d'Ostende.

Ce danger a été reconnu depuis longtemps ; en 1863, une commission mixte a examiné l'état de cette digue, et elle a trouvé que le moyen le plus efficace pour la renforcer était le comblement du fossé Nord.

Le gouvernement, par son exposé des motifs, reconnaît cette nécessité, mais parle en même temps de maçonner au ciment la partie ouest de la digue et semble même donner la préférence à ce dernier travail.

- Plusieurs membres. - Aux voix ! aux voix !

M. Van Iseghem. - Laissez-moi parler, l'objet est important. Je ne viens pas solliciter d'augmenter le crédit. Je demande simplement que l'on comble, avant tout, le fossé nord de la ville au lieu de donner la préférence aux travaux de renforcement. Ces travaux présentent toutefois un caractère utile, mais ils ne peuvent être faits qu'après le comblement du fossé.

Pour maçonner la digue au mortier de ciment, il faudra l'ouvrir. Si une tempête devait éclater pendant ce travail, cela présentera le plus grand danger ; ce danger n'est pas du côté extérieur, mais provient du déferlement des vagues, qui se jettent continuellement dans les fossés pendant les mauvais temps ; les vagues enlèvent le talus intérieur qui est simplement en terre gazonnée, et c'est par suite de cet affaiblissement que la sécurité de la digue est compromise. C'est donc l'intérieur qu'il faut garantir avant tout.

Cette position est connue de tout le monde ; aussi si une rupture devait arriver, comme nous en avons été menacés l'hiver dernier, non seulement la ville d'Ostende, mais toute une partie de la Flandre occidentale serait inondée.

La population ostendaise en est très inquiète. Elle a vu le danger et il faut prendre des mesures sérieuses avant l'hiver. Je demanderai donc de nouveau à l'honorable ministre des travaux publics, de vouloir bien employer le crédit de 150,000 fr., par préférence, à combler le fossé nord de la ville d'Ostende et avec ce qui restera de disponible de faire l'autre travail indiqué dans l'exposé des motifs.

J'espère que l'honorable ministre- voudra bien me répondre d'une manière affirmative et me dire que l'on mettra la main à l'œuvre dans un bref délai.

MtpJµ. - Messieurs, la nécessité d'assurer la sécurité non seulement de la ville d'Ostende, mais d'une partie de la province n'est méconnue par personne.

Le gouvernement demande aujourd'hui un crédit de 150,000 francs non point pour travaux déterminés d'une manière précise, mais en vue de travaux destinés à renforcer la grande digue de mer devant Ostende.

Le résultat que le gouvernement a en vue peut être obtenu de deux manières : soit en reconstruisant le revêtement extérieur de la digue, en le maçonnant en mortier de ciment, soit en comblant les fossés.

Si rien ne s'oppose à ce que nous ayons recours au second moyen : le comblement du fossé, c'est à ce mode que nous donnerons la préférence.

- L'article est adopté.

Article premier, paragraphes 14 à 23

(page 1294) « 14. Etablissement d'une branche de raccordement entre le canal de Bruges à Gand et le bassin de commerce de cette dernière ville : fr. 8,670. »

- Adopté.

« 15. Travaux destinés à relier les charbonnages et établissements industriels sur la rive droite de la Meuse, à l'aval de Liège, avec le canal de Liège à Maestricht : fr. 11,718. »

- Adopté.

« 16. Construction du canal de dérivation de la Lys, de Deynze à la mer du Nord : fr. 14,000. »

- Adopté.

« 17. Amélioration de la Senne : fr. 16,267. »

- Adopté.

« 18. Approfondissement de la Sambre : fr. 40,000. »

- Adopté.

« 2° Chemin de fer.

« 19. Construction, à Ostende, sur le nouveau quai des bateaux à vapeur, d'un bâtiment destiné aux services de la douane et du chemin de fer : fr. 150,000. »

- Adopté.

« 20. Construction de 9,600 mètres de hangars et établissement de 4,800 mètres courants pour remisage de voitures à voyageurs : fr. 520,000. »

MtpJµ. - Messieurs, je propose un simple changement de libellé. Je propose de remplacer le libellé par le suivant :

« Construction de hangars et dépendances pour remisage de voitures à voyageurs. »

- Cet amendement est adopté.

« 21. Construction, à Bruxelles (nord), d'une remise pour 42 machines avec voies et dépendances : fr. 330,000. »

- Adopté.

« 22. Construction, à Courtrai, d'une remise pour locomotives : fr. 55,000. »

- Adopté.

« 23. Agrandissement, pour 6 locomotives en plus, de la remise d'Anvers : fr. 45,000. »

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Ces crédits seront couverts au moyen de bons du trésor. »

- Adopté.

Second vote des articles et vote sur l’ensemble

Le paragraphe 20, ayant été amendé, est soumis à un second vote ; il est définitivement adopté.

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

72 membres y prennent part.

69 membres répondent oui.

2 répondent non.

1 membre s'abstient.

En conséquence, la Chambre adopte. Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont répondu oui :

MM. Royer de Behr, Tack, Thibaut, Thienpont, T'Serstevens, Ernest Vandenpeereboom, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Braconier, Bricoult, Broustin, Coremans, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, De Fré, de Kerchove de Dentergem, Eugène de Kerckhove, de Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, de Zerezo de Tejada, d'Ursel, Frère-Orban, Funck, Guillery, Hayez, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Kervyn de Lettenhove, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Orts, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Ont répondu non :

MM. Vander Donckt et Julliot.

S'est abstenu :

M. Wasseige.

M. le président. - M. Wasseige est prié de faire connaître les motifs de son abstention.

M. Wasseige. - Mon abstention est une protestation contre le peu de sérieux de la discussion qui vient d'avoir lieu et contre le mode trop souvent suivi par le ministère dans la présentation tardive des projets les plus importants.

Projet de loi qui autorise le gouvernement à aliéner des biens domaniaux

Discussion des articles

La discussion générale est ouverte ; personne ne demandant la parole, elle est déclarée close et l'assemblée passe aux articles.

Articles 1 et 2

„Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à aliéner, par voie d'adjudication publique, les biens domaniaux désignés dans l'état annexé à la présente loi, sous les numéros 1, 2 et 3. »

- Adopté.


« Art. 2. Les biens repris sous les n°4 et 5 pourront être vendus à main ferme, aux conditions indiquées pour chacun de ces articles dans l'état susmentionné. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

75 membres y prennent part.

Tous répondent oui.

En conséquence, la Chambre adopte ; le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ce sont :

MM. Rogier, Royer de Behr, Tack, Thibaut, Thienpont, T'Serstevens, Van Cromphaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Braconier, Bricoult, Broustin, Coremans, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, De Fré, de Kerchove de Denterghem, Eugène de Kerckhove, de Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, de Zerezo de Tejada, d'Ursel, Frère-Orban, Funck, Hayez, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Orts, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Projet de loi relatif à la concession d’un chemin de fer de Malines par Saint-Nicolas à la frontière des Pays-Bas

Discussion générale

M. le président. - Un amendement, proposé par MM. Vermeire, de Terbecq et Van Cromphaut, est parvenu au bureau, Il est ainsi conçu :

« Le gouvernement est autorisé à accorder :

« 1° et 2° (comme au projet) ;

« 3° A concéder, à des conditions analogues, un chemin de fer partant de Termonde, passant par Hamme, et se reliant à la ligne ci-dessus. »

L'un des auteurs de cet amendement désire-t-il le développer ?

M. Vermeireµ. - L'amendement que j'ai l'honneur de présenter avec mes honorables collègues de la députation de Termonde, n'a pas besoin, je pense, d'être développé. Déjà en 1862, lorsque le gouvernement a présenté un projet de loi, autorisant l'exécution de divers travaux d'utilité publique, nous avons présenté un amendement à peu près analogue et la Chambre y avait fait bon accueil. Cet amendement avait pour objet d'autoriser le gouvernement à concéder, aux mêmes conditions que le chemin de fer principal, un chemin de fer de Termonde à Saint-Nicolas passant par Hamme.

Nous ne faisons donc que reproduire la même disposition en demandant que le gouvernement soit autorisé à concéder à des conditions analogues à celles de la ligne principale, un chemin de fer de Termonde à Saint-Nicolas, passant par Hamme.

Je ne crois pas avoir besoin de démontrer l'utilité de ce chemin de fer ; il me suffira de dire qu'il est destiné à traverser un pays extrêmement industriel et agricole ; il est donc assuré d'un trafic important et certainement suffisant pour donner toute satisfaction à ceux qui en entreprendraient l'exploitation.

Je crois, messieurs, pouvoir me borner à ces courtes considérations.

- L'amendement est appuyé. Il fait partie de la discussion.

M. Van Cromphautµ. - Messieurs, je viens donner tout mon appui aux considérations que vient de faire valoir mon honorable ami, M. Vermeire, en faveur de l'ouverture d'une nouvelle ligne de chemin (page 1295) de fer destiné à desservir la partie la plus importante de l'arrondissement qui m'a fait l'honneur de m'envoyer dans cette enceinte. Mon honorable ami a développé avec tant de lucidité l'utilité de cette nouvelle voie ferrée, déjà si longtemps en projet, qu'il ne me reste qu'à former le vœu que la Chambre daigne accepter notre amendement comme l'honorable ministre des travaux publics a bien voulu l'accepter de son côté. Je remercie toutefois l'honorable M. Jamar de sa haute bienveillance à l'égard d'une population nombreuse, active, industrielle, commerciale et agricole, restée si longtemps privée du bienfait répandu dans tout le pays, c'est-à-dire, son rattachement au réseau des chemins de fer en Belgique. L'importante commune de Hamme, celle de Waesmunster et autres, verront bientôt naître une grande prospérité au milieu de leurs populations intelligentes. Un demandeur en concession des plus sérieux est prêt à faire immédiatement le versement du cautionnement, et d'après des renseignements qui nous ont été donnés, on mettra sans aucun retard la main à l'œuvre, de manière à pouvoir espérer une très prompte exécution des travaux.

MtpJµ. - Messieurs, le gouvernement se rallie à l'amendement présenté par l'honorable M. Vermeire.

Ainsi que l'honorable membre l'a dit à la Chambre, l'amendement reproduit un des paragraphes de l'article 3 de la loi du 31 mai.

Cet article était ainsi conçu :

« Art. 3. Le gouvernement est autorisé à concéder :

« B. 2° Un chemin de fer partant de Termonde, passant par Hamme et se reliant à la ligne de Malines à Saint-Nicolas. »

La déchéance de la concession primitive du chemin de fer de Malines à Saint-Nicolas ayant été prononcée, nous ne pouvons plus attribuer au sieur Lancelot la concession du chemin de fer reliant Termonde par Hamme à la ligne ci-dessus.

Il y a donc lieu, ainsi que le demande l'honorable membre, d'autoriser le gouvernement d'une manière générale à concéder cette ligne à des clauses analogues à celles qui ont été stipulées dans la concession qui fait l'objet de la loi actuelle.

Mais l'amendement proposé par M. Vermeire devrait former le deuxième paragraphe de l'article au lieu du troisième.

- La discussion est close.

Vote de l’article unique

On passe au vote des paragraphes de l'article unique du projet da loi.

« Article unique. Le gouvernement est autorisé :

« 1° A concéder, aux clauses et conditions stipulées dans une convention conclue le 4 mai 1868, un chemin de fer de Malines, par Saint-Nicolas, à la frontière des Pays-Bas, dans la direction de Hulst. »

- Adopté.


M. le président. - Sous ce numéro (2°) vient l'amendement présenté par MM. Vermeire et consorts, amendement qui est ainsi conçu :

« A concéder, à des conditions analogues, un chemin de fer partant de Termonde, passant par Hamme et se reliant à la ligne ci-dessus. »

- Adopté.


« 3° A restituer à la société anonyme dite : Compagnie du chemin de fer international de Malines à Terneuzen, les cautionnements de deux cent soixante-quinze mille francs et de soixante-quinze mille francs, ensemble trois cent cinquante mille francs (fr. 350,000) déposés pour l'obtention des concessions des chemins de fer de Malines à Saint-Nicolas et de Saint-Nicolas à la frontière des Pays-Bas, octroyées en exécution des lois des 12 août 1862 et 31 mai 1863, concessions dont la déchéance a été prononcée. »

- Adopté.


La Chambre décide qu'elle procédera, séance tenante, au vote du projet de loi.

Elle confirme l'amendement qu'elle a adopté au premier vote.

Il est procédé au vote par appel nominal sur le projet de loi ; il est adopté à l'unanimité des 69 membres présents. Il sera transmis au Sénat.

Ont voté :

MM. Rogier, Royer de Behr, Tack, Thibaut, Thienpont, T'Serstevens, Van Cromphaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Bricoult, Broustin, Coremans, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, De Fré, de Kerchove de Denterghem, Eugène de Kerckhove, de Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, de Zerezo de Tejada, d'Ursel, Hayez, Hymans Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Projet de loi allouant un crédit au budget du ministère des affaires étrangères

Vote de l’article unique

M. le président. - L'article unique du projet est ainsi conçu :

« Article unique. Il est ouvert au département des affaires étrangères un crédit supplémentaire de deux cent soixante-quinze mille sept cent quarante francs quatre-vingt-seize centimes.

« De cette somme, quatre mille cinq cents francs seront ajoutés à l'article 3 ;

« Deux mille quatre-vingt-seize francs quarante-neuf centimes à l'article 22 ;

« Trois mille trois cent cinquante-deux francs soixante-dix-sept centimes à l'article 27 ;

« Deux cent soixante-cinq mille cent soixante-six francs soixante-dix-huit centimes à l'article 42, et

« Six cent vingt-quatre francs quatre-vingt-douze centimes à l'article 45 du budget de 1867.

« Le crédit dont il s'agit sera couvert au moyen des ressources ordinaires. »

- Personne ne demandant la parole, il est procédé au vote par appel nominal.

70 membres répondent à l'appel.

67 votent pour le projet.

3 votent contre.

Ont répondu oui :

MM. Rogier, Royer de Behr, Tack, Thibaut, Thienpont, T'Serstevens, Van Cromphaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Bricoult, Broustin, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, De Fré, de Kerchove de Denterghem, Eugène de Kerckhove, de Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, d'Ursel* Frère-Orban, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Ont répondu non :

MM. Coremans, Hayez et Jacobs.

En conséquence le projet de loi est adopté ; il sera transmis au Sénat.

Projet de loi érigeant la commune de Maisières

Discussion des articles

Articles 1 et 2

« Art. 1er. La commune de Nimy-Maisières, province de Hainaut, es divisée en deux communes distinctes, sous les noms, l'une de Nimy l'autre de Maisières.

« La ligne de démarcation, indiquée par un liséré rouge au plan annexé à la présente loi, est tracée sur le terrain, à partir du territoire de la commune de Masnuy-Saint-Jean, par le chemin des Brognons, la ruelle à Cailloux, la route de Mons à Bruxelles, le fossé qui sépare la pièce de terre indiquée au plan, sous le n°312, de celles portant les n°313, 314 et 315, la partie du chemin auquel ce fossé aboutit jusqu'au pont d'Embersoeul, le ruisseau de ce nom, en descendant son cours, la petite Halnette, en remontant jusqu'à l'écluse, appelée pont Venterre, enfin la rivière la Haine, aussi en remontant jusqu'au territoire de la commune d'Obourg. »

M. le président. - La commission propose d'attribuer à Nimy les propriétés reprises au plan, sous les n°311, 312, 361 et 362.

Le gouvernement ne s'est pas rallié à cette proposition.

- La proposition de la commission est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.

L'article premier, tel qu'il est proposé par le gouvernement, est mis aux voix et adopté.


« Art. 2. Le cens électoral et le nombre de conseillers à élire dans les communes de Nimy et de Maisières seront déterminés par l'arrêté royal fixant le chiffre de leur population. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi, qui est adopté à l’unanimité des 69 membres présents.

(page 1296) Ce sont :

MM. Rogier, Royer de Behr, Tack, Thibaut, Thienpont, T'Serstevens, Van Cromphaut, Ernest Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem) Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Bricoult, Broustin, Coremans, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, De Fré, de Kerchove de Denterghem, Eugène de Kerckhove, de Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Vrière, d'Ursel, Frère-Orban, Hayez, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Ordre des travaux de la chambre

M. Allard, questeur (pour une motion d’ordre). - Messieurs, puisque nous sommes encore en nombre, je propose à la Chambre de décider qu'après la présente séance, nous nous ajournerons jusqu'à convocation de notre honorable président.

- Cette proposition est adoptée.

M. Orts. - Messieurs, je ferai remarquer que nous avons décidé de nous occuper du projet de loi portant séparation du hameau de La Pinte de la commune de Nazareth, bien que ce projet ne figure pas à notre ordre du jour. C'est là un objet que nous devons vider avant de nous séparer.

Projet de loi érigeant la commune de Fourbechies

Discussion des articles

Articles 1 et 2

„Art. 1er. Le hameau de Fourbechies est séparé de la commune de Froidchapelle, province de Hainaut, et érigé en commune distincte sous le nom de Fourbechies.

« Les limites séparatives sont fixées conformément à la ligne indiquée par les lettres A, D, C, D, au plan annexé à la présente loi. Cette ligne est tracée sur le terrain par le chemin de Rance à FroidchapelIe,le ruisseau de Grançon en laissant le moulin du sieur Trigant sur le territoire de Froidchapelle, le chemin de Froidchapelle à Vergnies. »

- Adopté.


« Art. 2. Le cens électoral et le nombre des conseillers à élire dans ces communes seront déterminés par l'arrêté royal fixant le chiffre de leur population. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé à appel nominal. 69 membres y prennent part.

Tous répondent oui.

En conséquence, la Chambre adopte. Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont voté :

MM. Rogier, Royer de Behr, Tack, Thibaut, Thienpont, T'Serstevens, Van Cromphaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Bricoult, Broustin, Coremans, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, De Fré, de Kerchove de Denterghem, E. de Kerckhove, de Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Vrière, d'Ursel. Frère-Orban, Hayez, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jonet,' Jouret, Julliot, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Projet de loi portant règlement définitif du budget de l’exercice 1862

Discussion des articles

La discussion générale est ouverte ; personne ne demandant la parole, elle est déclarée close et l'assemblée passe aux articles.

Paragraphe premier. Fixation des dépenses

Articles 1 et 2

« Art. 1er. Les dépenses ordinaires et extraordinaires de l'exercice 1862, constatées dans le compte rendu par le ministre des finances, sont arrêtées, conformément au tableau ci-annexé, à la somme de cent septante-sept millions quatre-vingt-deux mille deux cent quatre-vingts francs soixante centimes : fr. 177,082,280 60

« Les payements effectués et justifiés sur le même exercice sont fixés à cent septante-six millions cent cinquante-trois mille trois cent soixante-cinq francs vingt-neuf centimes : fr. 176,153,365 29

« Et les dépenses restant à payer ou à justifier à neuf cent vingt-huit mille neuf cent quinze francs trente et un centimes : 928,915 31

« Savoir :

« Ordonnances en circulation et à payer, fr. 813,400 31

« Dépenses à justifier et à régulariser sur des ordonnances d'ouverture de crédit liquidées sur le budget du ministère de l'intérieur, fr. 115,515.

« Total : fr. 928,915 31. »

- Adopté.


« Art. 2. La somme de cent quinze mille cinq cent quinze francs (115,515 francs), sortie des caisses de l'Etat en vertu d'ordonnancés d'ouverture de crédit liquidées sur le budget du ministère de l'intérieur, et pour laquelle la justification a été produite après la clôture de l'exercice, sera portée définitivement en dépense,

« Savoir :

« 1° Au compte général de l'administration des finances de l'année 1864, à concurrence de cinq cent quinze francs (515 francs) ;

« 2° Au même compte de l'année 1865, à concurrence de cinquante mille francs (50,000 francs) ;

« 3° Au même compte de l'année 1866, à concurrence de soixante-cinq mille francs (65,000 francs). »

- Adopté.

Paragraphe II. Fixation des crédits

Articles 3 à 5

« Art. 3. Il est accordé au ministre des financés, sur l'exercice 1862, pour couvrir les dépenses effectuées au delà des crédits ouverts pour les services ordinaires du budget, par les lois des 8 mai et 30 décembre 1861, 12 et 17 mars, 10 mai, 4, 6, 8, 9 et 28 août, 26 décembre 1862, 30 mai et 1er juin 1863, un crédit complémentaire de cinq cent quatre mille vingt-six francs trois centimes (504,026 fr. 3 c.)

« Savoir :

« Dette publique.

« Chapitre III. Fonds de dépôt.

« Art. 26. Intérêts à 4 p. c. des cautionnements versés en numéraire dans les caisses du trésor, par les comptables de l'Etat, les receveurs communaux et les receveurs des bureaux de bienfaisance, pour sûreté de leur gestion, et par des contribuables, négociants ou commissionnaires, en garantie du payement de droits de douane, d'accises, etc. : fr. 23,143 72

« Art. 27. Intérêts des consignations (loi du 26 nivôse an XIII), ainsi que des cautionnements assimilés aux consignations par l'article 7 de la loi du 15 novembre 1847 : fr. 24,987 74

« Ministère des affaires étrangères.

« Chapitre IX. Marine.

« Art. 38. Remises à payer au personnel actif du pilotage et aux agents chargés de la perception des recettes des divers services de la marine : fr. 9,046 29

« Art. 39. Payement à faire à l'administration du pilotage néerlandais, en vertu des traités existants du chef du pilotage et de la surveillance commune ; restitution des droits indûment perçus, et pertes par suite des fluctuations du change sur les sommes à payer à Flessingue : fr. 3,286 06

« Art. 46. Primes d'arrestation aux agents ; vacations et remises aux experts et commis chargés de la surveillance de l'embarquement des émigrants : fr. 1,583 74.

(page 1297) « Ministère des finances.

« Chapitre III. Administration des contribuions directes, douanes et accises.

« Art. 17. Remises proportionnelles et indemnités : fr. 20,546 39

« Chapitre IV. Administration de l'enregistrement et des domaines.

« Art. 30. Remises des receveurs ; frais de perception : fr. 40,724 45

« Art. 31. Remises des greffiers : fr. 5,395 65.

« Non-valeurs et remboursements.

« Chapitre premier. « Non-valeurs.

« Art. 5. Non-valeurs sur le droit de débit des boissons alcooliques : fr. 3,887 50

« Chapitre II. Remboursements.

« Art. 10. Contributions directes, douanes et accises. Remboursements du péage sur l'Escaut : fr. 358,864 68

« Art. 12. Trésor public. Remboursements divers : fr. 12,560 01

« Total : fr. 504,026 03. »

- Adopté.


« Art. 4. Les crédits montant à deux cent vingt-neuf millions huit cent soixante-sept mille quatre cent cinquante francs trente-deux centimes (229,867,450 fr. 32 c), ouverts aux ministres conformément au tableau A ci-annexé, colonne 4, pour les services ordinaires et spéciaux de l'exercice 1862, sont réduits :

« 1° D'une somme de trois millions trois cent seize mille huit cent soixante-sept francs onze centimes (fr. 3,316,867 11 c.) restée disponible sur les crédits ordinaires, et qui est annulée définitivement ;

« 2° D'une somme d'un million deux mille cent soixante francs cinquante-quatre centimes (1,002,160 fr. 54 c.) représentant la partie non dépensée à la clôture de l'exercice 1862, des crédits ordinaires grevés de droits en faveur des créanciers de l'Etat et transférée à l'exercice 1863 en vertu de l'article 30 de la loi du 15 mai 1846 sur la comptabilité ;

« 3° D'une somme de quarante-huit millions neuf cent septante mille cent soixante-huit francs dix centimes (48,970,168 fr. 10 c. ), non employée au 31 décembre 1862 sur les crédits alloués pour des services spéciaux, et transférée à l'exercice 1863, en exécution de l'article 31 de la loi sur la comptabilité.

« Les annulations et transferts de crédits montant ensemble à cinquante-trois millions deux cent quatre-vingt-neuf mille cent nonante-cinq francs soixante-quinze centimes (53,289,195 fr. 75 c.) sont et demeurent répartis conformément au tableau A, colonnes 10,11 et 12. »

- Adopté.


« Art. 5. Au moyen des dispositions contenues dans les deux articles précédents, les crédits du budget de l'exercice 1862 sont définitivement fixés à la somme de cent septante-sept millions quatre-vingt-deux mille deux cent quatre-vingts francs soixante centimes (177,082,280 fr. 60 c.) égale aux dépenses liquidées et ordonnancées à charge de l'exercice, d'après le même tableau A, colonne 5. »

- Adopté.

Paragraphe III. Fixation des recettes

Article 6

« Art. 6. Les droits et produits constatés au profit de l'Etat, sur l'exercice 1862, s'élevant, d'après le tableau B, colonne 4, à la somme de cent soixante-cinq millions, trois cent quarante mille deux cent quatre-vingt-trois francs vingt centimes et demi : fr. 165,340,283 20 1/2

« augmentés des fonds affectés à des dépenses spéciales, restés disponibles au 31 décembre 1861, et montant à un million quatre-vingt-trois mille neuf cent quarante-huit francs nonante-huit centimes : fr. 1,083,948 98

« Ensemble fr. 166,424,232 18 1/2

« et diminués :

« a. De la partie non employée au 31 décembre 1862, des fonds affectés à des dépenses spéciales et dont le transfert à l'exercice 1863 a lieu en vertu de l'article 31 de la loi sur la comptabilité, cette partie non employée s'élevant à neuf cent trois mille huit cent quinze francs soixante-neuf centimes : fr. 903,815 69

« b. D'une somme de trente francs nonante-huit centimes demeurée sans emploi sur le crédit alloué par la loi du 20 décembre 1851, pour la dérivation de la Meuse, et portée en recette au profit du trésor en 1863 : fr. 30 98

« Ensemble : fr. 903,846 67

« sont, par suite, définitivement fixés à cent soixante-cinq millions cinq cent vingt mille trois cent quatre-vingt-cinq francs cinquante et un centimes et demi : fr. 165,520,385 51 1/2.

« Les recouvrements effectués sur le même exercice, jusqu'à l'époque de sa clôture, sont fixés à cent soixante-quatre millions cinq cent trente-sept mille neuf cent quatorze francs cinquante-deux centimes et demi : fr. 164,537,914 52 1/2

« en y comprenant la somme de cent quatre-vingt mille cent deux francs trente et un centimes pour la partie des fonds spéciaux provenant de l'exercice 1861, et rattachée au présent exercice 1862,

« Et les droits er produits restant à recouvrer à neuf cent quatre-vingt-deux mille quatre cent septante francs nonante-neuf centimes : fr. 982,470 99. »

- Adopté.

Paragraphe IV. Fixation du résultat général du budget

Article 7

« Art. 7. Le résultat général du budget de l'exercice 1862 est définitivement arrêté, ainsi qu'il suit :

Dépenses fixées à l'article premier : fr. 177,082,280 60

Recettes fixées à l'article 6 : fr. 164,537,914 52 ½ ;

augmentées conformément à la loi décompte de l'exercice 1861, de l'excédant de recettes de cet exercice : fr. 28,669,462 44

« Ensemble : fr. 193,207,376 96 1/2

« Excédant de recette réglé à la somme de : fr. 16,125,096 36 ½.

« Cet excédant de recette est transporté en recette extraordinaire au compte de l'exercice 1863. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble.

68 membres y prennent part.

Tous répondent oui.

En conséquence, le projet de loi est adopté ; il sera transmis au Sénat.

Ont voté :

MM. Rogier, Royer de Behr, Tack, Thibaut, Thienpont, T'Serstevens, Van Cromphaut, Ernest Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Bricoult, Broustin, Coremans, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Coninck, De Fré, de Kerchove de Denterghem, Eugène de Kerckhove, De Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Vrière, d'Ursel, Frère-Orban, Hayez, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Projet de loi érigeant la commune de La Pinte

Discussion des articles

Articles 1 et 2

La discussion générale est ouverte ; personne ne demandant la parole, l'assemblée passe à la discussion des articles.

« Art. 1er. Le hameau de La Pinte est séparé de la commune de Nazareth et érigé en commune distincte, sous le nom de La Pinte.

« Les limites séparatives sont fixées conformément au liséré vert tracé sur le plan annexé à la présente loi. »

- Adopté.


« Art. 2. Le cens électoral et le nombre des conseillers à élire dans ces communes seront déterminés par l'arrêté royal fixant le chiffre de leur population. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé a l'appel nominal.

65 membres y prennent part.

57 membres répondent oui.

8 membres répondent non.

En conséquence, la Chambre adopte ; le projet de loi sera transmis M Sénat.

Ont répondu oui :

MM. Rogier, Thibaut, T'Serstevens, Ernest Vandenpeereboom, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verwilghen, Vleminckx, Watteeu, Allard, Anspach, Bara, Bricoult, Broustin, Couvreur, David, de Baillet-Latour, De Fré, Eugène de Kerckhove, de Lexhy, d'Elhoungne, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Vrière, Dewandre, d'Ursel, Frère-Orban, Hayez, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Lebeau, Lelièvre, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Preud'homme, Reynaert et Dolez.

Ont répondu non :

MM. Royer de Behr, Thienpont, Van Cromphaut, Vilain XIIII, Wasseige, Wouters, Coremans et de Coninck.

Ajournement de la chambre

M. le président. - Conformément à la résolution que vous avez prise tout à l'heure, messieurs, la Chambre s'ajourne jusqu'à convocation ultérieure.

- La séance est levée à dix heures et un quart.