(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1867-1868)
(Présidence de M. Dolezµ.)
(page 1221) M. de Moor, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à deux heures et quart et donne lecture du procès-verbal de la séance précédente.
- La rédaction en est approuvée.
Il présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.
« Le sieur Depret, brigadier de douanes pensionné, demande un secours. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« M de Maere, retenu à la campagne pour une affaire urgente, demande un congé de quelques jours. »
- Accordé. »
« M. Van Hoorde, obligé de s'absenter, demande un congé. »
- Accordé.
« M. Liénart, retenu chez lui pour affaire urgente, demande un congé d'un jour. »
- Accordé.
« M. De Fré, retenu pour un service public, demande un congé d'un jour. »
- Accordé.
M. Vander Doncktµ. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi ayant pour objet d'ouvrir des crédits au ministère des finances.
- Impression, distribution et mise à la suite de l'ordre du jour.
MfFOµ. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre un projet de loi qui autorise le gouvernement à aliéner certains biens domaniaux.
Je prie la Chambre de vouloir bien renvoyer ce projet à la section centrale qui a été chargée de l'examen du budget des finances : il y aurait plus de promptitude dans la solution à donner à cette affaire. Au surplus, l'objet est sans importance.
- La proposition de M. le ministre des finances est mise aux voix et adoptée.
M. Lelièvreµ. - Le budget en discussion donne lieu à l'examen de la question de savoir si l'Etat peut faire, sur les routes, des plantations sans être obligé à réparer le dommage qui en résulte pour les propriétés contiguës.
A mon avis, il est certain que l'Etat ne peut, par son fait, nuire aux terrains voisins et que s'il use du domaine public de manière à occasionner un préjudice aux propriétés privées, il est tenu à la réparation consacrée par les principes du droit commun et il est responsable des conséquences dommageables résultant de ses actes.
Le gouvernement, pas plus que tout particulier, ne peut se soustraire à cet ordre de choses fondé sur l'équité.
Je n'ai pas même besoin d'examiner si l'Etat est obligé d'observer un distance quelconque du terrain voisin en ce qui concerne les plantations.
En tout cas, l'administrateur du domaine publie ne peut s'en servir de manière à causer un tort direct et matériel à la propriété voisine, et à ce point de vue, j'estime que l'Etat doit réparer le tort résultant de ce que les terrains voisins des plantations sont frappés de stérilité sur une grande étendue et éprouvent même une notable dépréciation.
En admettant avec la section centrale que le domaine public ne puisse être affecté, au profit de la propriété voisine, de la servitude de conserver une distance pour les plantations, le principe de responsabilité en ce qui concerne le préjudice causé, reste toujours intact et dès lors on ne peut dénier au propriétaire voisin le droit à une juste indemnité, à raison du tort qu'il éprouve.
En ce qui concerne certaines questions intéressant l'arrondissement que je représente plus particulièrement dans cette enceinte, je recommande à M. le ministre de faire en sorte qu'il soit procédé, dans un bref délai, à l'exécution des travaux du chemin de fer de Jemeppe-sur-Sambre à la Meuse. Une nouvelle société vient de se constituer. J'espère donc qu'il pourra être donné suite à une œuvre importante d'utilité publique, qui est attendue avec impatience depuis plusieurs années.
Les bateliers réclament la suppression des impôts dont ils sont frappés. Personne ne méconnaît la justice de ces réclamations. La branche de l'industrie dont il s'agit est dans un état de souffrance qui appelle l'attention particulière du gouvernement et réclame des mesures immédiates. Je recommande à la sollicitude du gouvernement les graves intérêts qui sont agités en cette matière.
Enfin, je signale à M. le ministre la nécessité d'améliorer la position des facteurs des postes. La rémunération qu'ils reçoivent n'est pas en harmonie avec les pénibles fonctions qu'ils doivent remplir.
Ce sera acte de justice que de prendre en considération une situation qui doit nécessairement être modifiée, dans l'intérêt des employés que je recommande à la bienveillance du gouvernement.
Du reste, je me réfère aux observations que j'ai déduites dans une autre occurrence, relativement à la nécessité d'exécuter, sans délai, les travaux de la canalisation de la Meuse. Je ne répéterai pas les observations que j'ai exposées à ce sujet, pour hn pas abuser des moments de la Chambre, qui est pressée de clore la discussion générale du budget. Je ne puis qu'appeler l'attention de M. le ministre sur l'urgence des mesures qui intéressent sur ce point, au plus haut degré, la province de Namur.
MtpJµ. - Avant de répondre aux membres qui ont pris la parole dans nos deux dernières séances et qui ont présenté plusieurs observations d'un grand intérêt sur des questions qui éveillent à un haut degré la sollicitude du gouvernement, je désire rencontrer d'une manière concise certaines parties du rapport de la section centrale sur lesquelles M. Descamps s'est appesanti.
La question de la réforme des tarifs a tout d'abord attiré l'attention de la section centrale, mais la discussion ne tarda pas à démontrer aux partisans aussi bien qu'aux adversaires de cette importante mesure qu'avant de la juger définitivement il convenait d'attendre les résultats d'un essai fait dans des conditions normales.
Je pense, messieurs, avec l'honorable M. Descamps que le moment n'est pas venu de discuter la question des tarifs.
L'expérience commencée en 1866 s'est poursuivie dans des conditions qui ne permettraient pas d'en apprécier utilement les résultats ni d'en discuter la valeur.
Les fléaux qui ont marqué l'année 1866 ont jeté dans les produits de l'exploitation des chemins de fer une perturbation dont il est impossible de méconnaître l'importance.
En 1867, l'exposition de Paris a amené, au contraire, un mouvement exceptionnel dont l'appréciation exacte est difficile sinon impossible. Les chiffres par lesquels se traduisent certaines parties du mouvement du chemin de fer indiquent des variations anormales et sur lesquelles une discussion sérieuse ne saurait s'établir.
Ainsi, en 1865, les voyageurs internationaux produisent 2,700,000 fr. et ce chiffre s'abaisse en 1866, à 1,900,000 fr., pour remonter en 1867 à 2,800,000 francs.
D'une part, un abaissement de 800,000 francs, de l'autre, un accroissement de près d'un million, alors que la progression moyenne, pendant la période quinquennale de 1861 à 1865, ne dépasse guère 130,000 francs.
(page 1222) Au reste, bien que fondée depuis 30 ans, l'industrie des chemins de fer tâtonne encore en matière de tarifs.
Ce que j'appellerai la science des péages est loin d'avoir des formules dont l'application ne donne lieu à aucun mécompte.
Il y a dans cette question, pour l'Etat surtout, à côté de la préoccupation du produit la considération si grave de l'utilité.
Ce sont ces éléments qu'il s'agit de concilier dans une juste mesure.
Personne ne voudrait voir l'Etat n'envisager l'arme puissante qu'il a dans ses mains que comme un instrument fiscal, mais personne non plus, j'imagine, ne songe à vouloir en faire un moyen indirect de protection pour l'industrie et le commerce de certaines parties du pays au détriment du trésor et des droits des contribuables.
Quel sera le taux du péage qui donnera à la fois la plus grande somme d'utilité et le produit normal que l'Etat s'étant fait entrepreneur de transport doit retirer de cette industrie.
C'est le problème dont l'expérience tentée par mon honorable prédécesseur hâtera la solution.
Cette expérience, les compagnies de chemins de fer ne l'eussent point tentée. Elles ont fait des chemins de fer non par patriotisme ou par philanthropie, mais pour gagner de l'argent et elles cherchent naturellement à en gagner le plus possible avec la plus petite dépense possible ; c'est l'exploitation avec les péages élevés et une perte d'utilité considérable pour les populations. L'Etat tente aujourd'hui avec des tarifs réduits de développer au contraire toute l'utilité que les chemins de fer peuvent avoir pour le développement de la richesse publique.
Laissons, comme le dit si justement l'honorable rapporteur de la section centrale, laissons l'essai s'accomplir d'une manière normale.
Les compagnies qui accusent, bien à tort, les nouveaux tarifs de leur avoir créé une situation difficile dont la cause est ailleurs, profiteront de l'enseignement qui en sortira.
En attendant, loin d'exercer une pression sur elles, je me prêterai bien volontiers à toutes les expériences qu'elles voudront faire en matière de tarifs, jusqu'au moment où la lumière sera faite sur les résultats de la réforme.
J'espère, pour ma part, qu'ils ne tromperont pas l'espoir de ceux qui y ont applaudi.
La section centrale reproduit le vœu émis en 1867, de voir les ingénieurs résider dans les arrondissements mêmes auxquels ils sont attachés.
Ce vœu me semble en tous points légitime. En effet, il est évident que, résidant au centre de leur circonscription, les ingénieurs d'arrondissement sont à même de mieux remplir les devoirs multiples qui leur incombent que s'ils habitent le chef-lieu de la province.
On objecte, à la vérité, que leur présence au chef-lieu de la province permet aux ingénieurs ordinaires de conférer plus facilement avec leur chef immédiat, mais cet argument même plaide en faveur de la mesure réclamée, car s'il est désirable de favoriser les rapports des ingénieurs avec leur ingénieur en chef, il est encore plus important qu'ils soient en position de donner verbalement des instructions aux conducteurs, surveillants et cantonniers qui leur sont adjoints et d'entretenir des relations avec les autorités de la localité principale de leur sphère d'action ; enfin, il est évident que, résidant au centre de leur service, ces ingénieurs sont plus à même d'exercer une surveillance efficace sur l'exécution des travaux qui leur sont confiés.
Je partage donc la manière de voir de la section centrale et je prescrirai l'application de la mesure aux cas, peu nombreux d'ailleurs, que présente l'organisation actuelle.
La fréquence des explosions de générateurs à vapeur semble démontrer à la section centrale l'insuffisance des moyens prescrits par le gouvernement pour prévenir ces terribles accidents.
C'est dans un surcroît de précautions, en augmentant et en renforçant encore la réglementation en cette matière, que la section centrale pense que l'on trouvera les moyens de rendre ces accidents moins nombreux et moins terribles.
Il m'est impossible de me rallier à l'avis de la section centrale.
Il ne faut point perdre de vue que la plupart du temps ces redoutables accidents doivent être attribués à l'inexpérience ou à l'imprudence des personnes appelées à surveiller les appareils et à les mettre en mouvement.
Je pense au contraire qu'en cette matière, la réglementation actuelle trop méticuleuse crée à l'industrie belge des entraves que l'Angleterre a fait disparaître depuis longtemps.
En France, le décret du 25 janvier 1865 a modifié d'une manière presque radicale le règlement de 1843 qui offre beaucoup d'analogie avec celui qui régit actuellement la matière en Belgique.
Une très grande liberté est laissée aujourd'hui en France au fabricant et à l'industriel pour l'emploi des appareils mus par la vapeur.
C'est, à mon avis, la voie dans laquelle nous devons entrer à notre tour.
Un ingénieur des mines a été envoyé en France pour y étudier les conséquences de l'application de la nouvelle loi adoptée le 25 janvier 1865, pour l'établissement et la surveillance de chaudières à vapeur.
Celte loi, très libérale en faveur de l'industrie, supprime à peu près toutes les formalités qui étaient exigées, pour l'établissement des machines à vapeur ; il ne faut aujourd'hui qu'une simple déclaration adressée à l'autorité administrative. Les chaudières sont classées en trois catégories et des conditions générales sont déterminées pour leur établissement, indépendamment des appareils de sûreté dont ils doivent être munis. Ces générateurs sont soumis, avant d'être mis en activité, à certaines épreuves, comme garantie de leur bonne construction et de la qualité des matériaux employés.
Le gouvernement belge est édifié sur les résultats de l'application de la loi française et, sans pouvoir déclarer qu'il y a lieu d'adopter dans tous ses détails le même mode, je n'hésite point à dire que nos règlements doivent recevoir des modifications sérieuses non dans le sens de restrictions nouvelles, mais dans un sens complètement opposé.
Une commission spéciale d'ingénieurs et d'industriels est instituée pour étudier toutes les questions qui se rattachent aux machines à vapeur et les améliorations à introduire dans ce service.
Sur l'initiative de quelques ingénieurs et industriels, on vient de publier une brochure intitulée « Catéchisme des chauffeurs » ; les observations et les conseils que contient ce travail sont sages et peuvent être très utiles. Elles sont le résultat de la science appliquée à l'industrie.
On ne saurait trop en propager la publication parce que, comme je viens de le dira, la plupart des accidents proviennent de l'ignorance ou de l'incapacité des chauffeurs.
La section centrale insiste sur la nécessité de hâter la confection de la carte générale des mines. L'on ne peut malheureusement avancer avec la rapidité désirée par les industriels. Ce travail, dont l'exécution exige une exactitude mathématique, rencontre à chaque pas de grandes difficultés, par suite des irrégularités nombreuses constatées dans les plans des travaux qui doivent servir d'éléments pour sa constitution. Mais nous pouvons affirmer que les fonctionnaires chargés de la carte générale des mines y mettent tout le zèle et toute l'activité possible, en même temps que tous les soins minutieux que réclame la mission qui leur est confiée.
Les missions à l'étranger, reconnues si urgentes dans ces dernières années et qui ont permis à quelques ingénieurs des mines de visiter les centres industriels les plus importants de la Grande-Bretagne, de l'Allemagne et de la France, sont subsidiées au moyen d'économies réalisées sur les indemnités de déplacement des ingénieurs. Il est possible que pour l'exercice prochain cette ressource soit tarie, et dès lors le département des travaux publics se trouvera dans l'impossibilité de maintenir le système de missions qu'il a adopté récemment et qui reçoit avec raison l'approbation de la section centrale.
Je compte solliciter de la Chambre, au budget prochain, un crédit qui nous permettra de subventionner régulièrement à l'avenir les missions scientifiques à confier à quelques fonctionnaires.
L'Angleterre est un pays où surgissent chaque année de grandes et importantes inventions, et nous devons nous tenir au courant des progrès qui s'y réalisent, pour être en Belgique les premiers à les adopter.
Les Etats-Unis sont un pays plus fécond encore en découvertes industrielles de toute espèce. II importe également de connaître constamment les améliorations qui s'y produisent.
Il est essentiel enfin de connaître toutes les mesures prises dans les pays qui nous entourent pour améliorer la situation matérielle et morale des classes laborieuses et hâter ainsi la solution de ce grand problème du travail dont l'importance s'affirme chaque jour davantage.
Des doutes ont été émis sur le point de savoir si le remaniage des rails constitue une opération régulière en présence de l'article 16 de la loi sur la comptabilité de l'Etat, et s'il ne serait pas plus conforme à la loi de porter en recettes la valeur estimative des vieux rails et en dépenses le coût total des rails qui doivent les remplacer.
Personne ne conteste le profit qui résulte d'une opération dont la légalité seule paraît douteuse. L'article 16 de cette loi est ainsi conçu :
a Les ministres ne peuvent faire aucune dépense au delà des crédits ouverts à chacun d'eux.
(page 1223) Ils ne peuvent accroître par aucune ressource particulière le montant des crédits affectés aux dépenses de leurs services respectifs.
« Lorsque quelques-uns des objets mobiliers ou immobiliers à leur disposition ne peuvent être remployés et sont susceptibles d'être revendus, la vente doit être faite avec le concours des préposés des domaines et dans les formes prescrites. Le produit de ces ventes est porté en recette au budget de l'exercice courant. »
Cette disposition a toujours été interprétée en ce sens qu'il était interdit aux ministres de faire emploi des sommes à provenir de la vente d'objets hors d'usage et non susceptibles de remploi.
Aucun doute n'est possible à cet égard, puisque, immédiatement après la discussion de la loi, un échange d'explications a eu lieu sur cet objet, pendant la discussion du budget.
M. Mast de Vries, rapporteur de la section centrale, ayant fait remarquer que les sommes pétitionnées pour billes et rails lui semblaient insuffisantes, eu égard au prix des billes, le ministre déclara que l'insuffisance était plus apparente que réelle, attendu que l'on comptait sur le remaniage des vieux fers.
Cette réponse ayant provoqué quelques observations de la part de M. Garcia, le ministre lui répondit en ces termes : « L'honorable préopinant s'est élevé contre le remaniage des rails, qu'il considère comme une opération irrégulière. Cet honorable membre est dans l'erreur.
« Je me souviens d'avoir vu dans la loi de comptabilité une disposition portant que tout objet hors d'usage et non susceptible de remploi sera vendu à la diligence de l'administration des domaines. La législature ne s'oppose donc pas à ce que l'administration fasse emploie de matériaux susceptibles d'être remployés.
« Pour le remaniage, nous avons des contrats qui obligent les fournisseurs à nous livrer une quantité déterminée de rails neufs pour une quantité déterminée de rails vieux.
« C'est là la marche que nous continuerons à l'avenir. Je crois que cette marche est régulière, puisque je la vois sanctionnée par la loi sur la comptabilité. »
En réponse au ministre, M. David félicite l'administration de ne pas vendre les vieux rails et de réaliser à son profit le bénéfice à résulter du remaniage.
Ces déclarations, au moment où la loi de la comptabilité venait d'être votée sont péremptoires et ne permettent aucun doute sur la véritable interprétation de l'article 16. Ce qui le prouve surabondamment, c'est que la cour des comptes n'a jamais élevé aucune objection depuis plus de 22 ans que le remaniage est pratiqué par l'administration.
La section centrale insiste enfin sur l'utilité d'un essai des billes en fer substituées aux billes en bois.
La commission spéciale qui a été chargée en 1867 de l'étude des divers systèmes jusqu'alors, employés, a proposé, au mois de septembre dernier, de placer, à titre d'essai, dans les voies de l'Etat :
1° 1,200 traverses Vautherin fabriquées par l'usine de Montigny avec un système d'attache imaginé par M. l'inspecteur général Cabry.
2° 1,200 traverses du système de Couillet.
3° 1,200 traverses Vautherin avec attaches du système de M. Legrand de Mons.
Depuis lors, de nouveaux systèmes d'attache se sont produits. Ils sont encore en ce moment soumis à l'examen de la commission spéciale.
C'est particulièrement sur la question du mode d'attache que s'exerce la sagacité des inventeurs, et c'est là, en effet, le côté le plus délicat de la question des traverses métalliques.
Un autre point important a été soulevé par le rapport de la commission spéciale.
Il paraît, et cela s'explique, que les traverses métalliques ne se comportent pas également bien avec toute espèce de ballast : le ballast en pierre ne convient guère ; le ballast trop léger a aussi ses inconvénients. Le ballast en cendres de forges éveille certaines appréhensions à cause de l'oxydation qu'il favorise.
La commission a proposé de faire les essais dont il est parlé ci-dessus, en employant comme ballast du gravier de Buysingen ou de Millemorte.
Il n'est pas à espérer que nous nous trouvions d'ici à longtemps en position de pouvoir généraliser l'emploi d'un ballast qui coûte, sur les lieux de provenance, plus de deux francs le mètre cube.
A mon sens, pour qu'un essai puisse présenter des résultats réellement utiles et pratiques, il convient qu'il soit fait avec le ballast que nous employons habituellement et auquel nous sommes bien forcés de nous tenir, c'est-à-dire avec le ballast en cendres.
Il y aura lieu de vérifier également jusqu'à quel point il est possible de descendre, pour les traverses métalliques, en dessous de la longueur communément admise pour les billes en bois (2 m 60). A cet effet, on pourrait expérimenter les traverses d'essai avec des longueurs de 2 m 60, 2 m 40 et 2 m 20.
Plusieurs ingénieurs se sont montrés disposés à aller assez loin dans la voie de la réduction, et c'est là évidemment un point important, au point de vue de la dépense de construction.
Dans cet ordre d'idées, l'expérience que nous comptons faire avec les 3,600 traverses nous éclairerait surtout sur les effets du ballast et des dimensions des traverses ; les essais faits par d'autres compagnies compléteraient les renseignements que nous recueillerons directement, soit sur ces deux points, soit sur le mode d'attache.
J'arrive, messieurs, aux observations présentées par un grand nombre de membres.
La première question dont se sont occupés MM. Moncheur et Thibaut est celle de la canalisation de la Meuse en amont de Namur jusqu'à la frontière française.
La loi du 8 juillet 1865 a alloué au département des travaux publics un premier crédit pour la construction des trois premiers des dix barrages nécessaires à la canalisation de cette partie de la rivière. Avant de mettre la main à l'œuvre, le gouvernement a cru nécessaire de connaître le projet du gouvernement français quant à la canalisation de la partie française de ce fleuve, et notamment entre Givet et Sedan qui présente le plus d'intérêt pour l'industrie belge.
Malheureusement la réponse du gouvernement français n'a point été aussi satisfaisante que nous l'espérions. Les ouvrages exécutés à diverses reprises entre Verdun et Sedan ont eu pour effet de donner à cette section un tirant d'eau de 1 m 30, et de Sedan à Givet l'intention de la France est de se borner à donner un tirant d'eau de l m 60. Le gouvernement ajoutait, en outre, qu'il ne lui était pas possible de déterminer dès à présent l'époque à laquelle les travaux pourraient être entrepris.
En présence de ces dispositions du gouvernement français, fallait-il continuer à donner à la Meuse de Namur à Givet un mouillage de 2 m 10, qui est celui de ce fleuve en aval de Namur ?
Telle était la question dont le gouvernement a dû faire une étude attentive. L'ingénieur qui en était chargé m'a adressé il y a quelque temps un rapport sur ce point qui a été soumis aux délibérations du comité des ponts et chaussées.
Le comité pense, avec l'ingénieur en chef de la province de Namur, qu'il est sage de continuer à adopter le même système que celui suivi entre la fonderie de canons et l'embouchure de la Sambre. Toutefois, au sein du comité, des hommes très compétents ont cherché à faire prévaloir le système opposé. Ils insistaient tout au moins pour adopter à partir de Dinant le même mouillage que sur la partie française, afin que si un transbordement était nécessaire, il pût s'opérer dans cette ville.
Aussitôt que j'aurai terminé l'examen de cette question, ce qui ne saurait tarder, je ferai mettre la main-à l'œuvre.
L'honorable M. Moncheur a critiqué l'arrêté royal du 23 octobre 1865, qui interdit le lavage direct des minerais à l'eau courante des rivières ou des canaux administrés par l'Etat. Il me demande d'en suspendre l'exécution. Il pense que c'est sans raison que nous apportons à l'industrie une entrave qui ne justifie point les inconvénients suffisamment constatés du système actuel.
Suivant lui, l'argile délayée, transportée dans la Meuse, est entraînée vers la mer ou ne forme dans le thalweg de la rivière que des dépôts si peu importants que le sillage du moindre bateau en opère la dilution et les disperse.
L'expérience a prouvé le contraire. La canalisation des rivières, en supprimant à peu près toute la vitesse du courant, a pour effet de faire déposer promptement les matières plus pesantes que l'eau et l'œil découvre facilement la limite de la zone jaunie par l'argile délayée dans le lavage du minerai.
Au reste, je dois faire observer à l'honorable membre que les dispositions qu'applique l'arrêté royal aux rivières et canaux administrés par l'Etat, sont prescrites pour les cours d'eau non navigables ni flottables dans la province de Namur depuis 1839, dans la province de Luxembourg depuis 1840, dans celle de Hainaut, depuis 1843, et la mesure a été approuvée par tous les conseils provinciaux, sauf par le conseil provincial de la Flandre occidentale, qui l'a repoussée comme pouvant gêner le rouissage. Je consens à faire un nouvel examen de la question, mais je doute qu'il aboutisse au résultat désiré par M. Moncheur.
(page 1224) L'honorable membre s'est plaint enfin du relèvement de tarif opéré par l'arrêté du 2 janvier de mon honorable prédécesseur et qui pour le transport des houilles n'augmente la taxe que de cinq centimes par lieue à partir de la onzième lieue, sans excéder jamais cinquante centimes, et en maintenant à 35 lieues un prix moyen de trois centimes par tonne-kilomètres et de deux centimes 40 à 50 lieues. Jusque maintenant ces moyennes avaient donné lieu à des observations à cause de leur insuffisance réelle ou supposée suivant l'appréciation des esprits qui les jugent ; mais on n'avait pas encore pensé à en critiquer l'exagération.
La nécessité du relèvement était incontestable et il laisse encore le tarif de l'Etat belge notablement au-dessous de la moyenne des tarifs adoptés par les autres exploitations tant du pays que de l'étranger. C'est là, sans doute, la meilleure situation que l'industrie d'un pays ait le droit de réclamer de l'Etat se faisant entrepreneur de transport.
L'honorable M. Van Hoorde nous a entretenus de sujets qui sont familiers à la Chambre et notamment de l'embranchement de Libramont à Bastogne et de la compagnie du Luxembourg, le delenda Carthago de l'honorable membre.
On ne peut, sans injustice, ne point tenir compte à cette compagnie des efforts qu'elle fait pour remplir ses engagements. Il y a, à l'heure qu'il est, sur les chantiers 355 ouvriers et 160 waggons et camions. La longueur totale de la section est de 28,940 mètres, et la longueur des déblais à profondeur est de 7270 m et celle des remblais à hauteur de 7940, ensemble 15,210. On a exécuté 300,000 mètres de terrassements et 1,235 de maçonneries.
Si l'on tient compte de la crise financière et de la situation fâcheuse qu'elle crée aux compagnies de chemins de fer, il me semble, je le répète, qu'il faut avoir égard aux efforts de la compagnie du Luxembourg.
Quant au bureau de poste de Fauvillers, ainsi que j'ai eu l'honneur de le dire au Sénat, l'établissement de ce bureau est l'objet d'un nouvel examen.
La création de ce bureau nous occasionnera une dépense assez considérable et les correspondances de cette localité n'ont aucune importance. S'il n'était point possible de créer ce bureau, l'administration introduirait cependant des améliorations dans ce service, en y plaçant un facteur en relais.
L'honorable membre demande la construction de la section de la route de Houffalize à la frontière prussienne, comprise entre cette frontière et la station de Gouvy.
On a adjugé récemment les travaux de construction de la station de cette route comprise entre Slerpigny et la station de Gouvy parce que cette section a été reconnue la plus utile. La dépense s'élève environ à 100,000 francs. On ne pourra s'occuper de la section demandée par M. Van Hoorde qu'après l'achèvement de celle en cours d'exécution.
Quant à la route de Herbaimont à Houffalize, elle sera décrétée prochainement, mais les travaux ne pourront être adjugés à présent, attendu que la situation des fonds dont on dispose ne le permet pas.
L'honorable M. Van Hoorde affirme que mon prédécesseur n'a pas rempli la promesse qu'il lui avait faite de consacrer 300,000 francs à la construction de routes dans l'arrondissement de Bastogne dans le crédit d'un million consacré au Luxembourg.
Cette promesse a été remplie et au delà, mais j'avoue, pour ma part, que ce parti pris de l'honorable membre de méconnaître toujours les intentions et les actes du gouvernement est bien fait pour décourager la meilleure volonté.
L'honorable M. Beeckman a présenté à la Chambre des considérations assez développées sur la situation fâcheuse de certains propriétaires riverains dont les terrains auraient perdu depuis quelques années 50 p.c. de leur valeur par la privation de la fertilisation qu'amenait le retour des inondations hivernales. Dans ces dernières années, le gouvernement a fait exécuter des travaux destinés à obvier aux inondations intempestives causées par les eaux de la Dyle et du Démer. On se plaint aujourd'hui qu'avec ces inondations intempestives on ait perdu le bienfait des inondations fertilisantes.
C'est la reproduction des plaintes que fait surgir, dans un grand nombre de cas analogues, l'antagonisme des intérêts de la navigation et de l'agriculture.
Ici, comme presque toujours, l'initiative des propriétaires trouverait à s'exercer de la manière la plus utile et la plus féconde par la constitution de wateringues éclairant le gouvernement sur la réalité et la nature des intérêts engagés dans ces questions et prêtant un concours matériel et efficace aux mesures prises en vue de sauvegarder leurs intérêts.
Une seule wateringue a été organisée dans la vallée du Démer, c'est celle qui porte le nom de wateringue de Schuelensbroeck.
L'honorable membre demande la suppression du passage à niveau à l'entrée de la gare de Louvain. Les passages à niveau, dit l'honorable membre, sont du reste jugés et condamnés.
Je me rallie bien volontiers à ce jugement, mais je demande à l'honorable membre les moyens de l'exécuter toujours et dans tous les cas, et je lui promets, s'ils sont praticables, de faire disparaître avec le passage à niveau de Louvain ceux qui entravent d'une manière si fâcheuse la circulation dans l'agglomération bruxelloise.
Quant à la station de Diest, j'examinerai ce qu'il sera possible de faire pour éviter les inconvénients qu'a signalés l'honorable M. Beeckman.
Après nous avoir entretenus de la Meuse et du pont de Dînant et d'Hastière, l'honorable M. Thibaut a renouvelé deux observations faites l'année dernière. L'honorable membre demande la franchise de port entre les administrations communales et les architectes provinciaux.
Je ne vois pas de grands inconvénients à ce que les échanges de pièces de service se continuent par l'intermédiaire des commissaires d'arrondissement et des bourgmestres et j'en vois beaucoup à étendre l'exercice du droit de contreseing, dans lequel de nombreux et fréquents abus ont été constatés.
Au lieu d'augmenter le nombre déjà si considérable de franchises de port octroyées, il conviendrait de le restreindre et la Chambre sera sans doute de mon avis en apprenant que le nombre de pièces de correspondances expédiées en service par la poste s'élève à près de 6,000,000.
Le service de malle-poste entre Dinant et Rochefort, dont a parlé l'honorable membre, était un service de nuit, peu utile par conséquent au service des voyageurs, mais qui avait été établi principalement pour l'échange des dépêches postales avec les bureaux de poste de la ligne de Jemelle à Arlon.
Ces dépêches sont acheminées par chemin de fer depuis le mois d'août 1866 et la dépense de 10,000 francs pour le maintien de la voiture entre Dinant et Rochefort n'était pas suffisamment justifiée.
Quant au double service entre Dinant et Ardenne, il ne nous coûte que 3,285 fr. et des considérations sérieuses en justifient l'organisation.
Entre Beauraing et Dinant, trois services en voiture sont en correspondance à Dinant avec les trains du chemin de fer. Un quatrième service relie Beauraing à la station de Grupont.
Au point de vue de la transmission des correspondances l'organisation actuelle suffit largement aux besoins du service.
L'honorable M. Jouret s'est occupé d'abord d'une question à la solution de laquelle il a depuis longtemps consacré les efforts d'un zèle intelligent ; je veux parler de la canalisation de la Dendre, dont MM. Descamps et de Naeyer ont également entretenu l'assemblée. Ces travaux peuvent être considérés comme terminés et rien n'empêcherait l'industrie d'en retirer les fruits que devrait produire ce travail qui n'a point coûté moins de 9 millions, si ce n'était la décision judiciaire qui doit intervenir dans le procès qu'ont signalé les honorables membres. Nul ne regrette plus que moi les incroyables retards qui ont été apportés à la solution de ce différend, retards qui nous ont obligés à dépenser 3,000 fr. pour faire passer un bateau dragueur de l'amont à l'aval de Lessines.
J'étais résolu, messieurs, à prendre des mesures énergiques pour mettre un terme à cette fâcheuse incurie, mais je puis annoncer avec satisfaction aux membres qui s'intéressent à la canalisation de la Dendre que, par suite d'un accord qui est intervenu, le 9 de ce mois, entre le département des travaux publics et ses adversaires dans cette affaire, rien ne s'oppose plus à ce que nous prenions possession de l'emprise, et nous pourrons enfin terminer les derniers travaux de la canalisation de la Dendre.
L'administration communale de Lessines a demandé la cession d'excédants de terrain, qui ont été acquis pour la canalisation de la Dendre, à l'effet d'y établir un quai d'embarquement, une place publique et un marché.
Cette demande est dans ce moment soumise à une instruction dont le but est de s'assurer si ces excédants n'ont plus d'utilité pour l'Etat dans l'intérêt des travaux de canalisation de la rivière.
Il est vraisemblable que rien ne s'opposera à ce que nous concédions la jouissance gratuite de ces excédants à la ville de Lessines pour en faire l'emploi en vue duquel elle sollicite cette concession.
L'honorable M. Jouret s'est occupé enfin du rachat des embranchements du canal de Charleroi. Il importe tout d'abord que je rectifie une (page 1225) erreur involontaire de l'honorable membre. Il est complètement inexact de dire qu'en 1865 le gouvernement s'était engagé à comprendre le prix de ce rachat dans un emprunt prochain.
Loin qu'il en fût ainsi, mon honorable prédécesseur avait donné à l'honorable membre des raisons si péremptoires sur la nécessité de laisser au gouvernement toute liberté dans l'examen de cette question que l'honorable M. Jouret n'hésita pas à retirer l'amendement qu'il avait proposé et qui consacrait le principe de ce rachat. L'honorable M. Jouret reconnaissait également qu'importante et utile déjà, la solution qu'il demandait ne deviendrait impérieuse que le jour où l'ouverture du chemin de fer direct de Bruxelles à Charleroi viendrait offrir au bassin de Charleroi des conditions de transport plus favorables.
Le gouvernement s'est engagé à examiner la question avec maturité aussitôt que le moment serait venu. Notre intention étant d'imprimer une vive impulsion à la construction du chemin de fer de Bruxelles à Charleroi, nous pensons que l'heure est venue de donner à cette question des embranchements du centre une solution convenable et nous sommes disposés à entier en pourparlers avec la société des embranchements pour en opérer le rachat. M. le ministre des finances a chargé use commission de l'examen très délicat de cette affaire.
J'espère que de son côté la société s'associera aux vues du gouvernement et qu'il sera possible d'aboutir à un accord sur le prix du rachat et de pouvoir ainsi dans un avenir peu éloigné, quand nous inaugurerons le chemin de fer de Bruxelles à Charleroi, réduire les péages dont se plaignent aujourd'hui les industriels du centre et les bateliers.
L'honorable M. Jouret a rattaché à cette question des embranchements la situation de notre industrie houillère et il semble s'inquiéter de ce que nous ferons un jour de nos 90,000 ouvriers bouilleurs et de leurs familles.
L'honorable membre s'est rendu, sans le vouloir, l'écho et le complice de doléances exagérées à dessein et dont il est facile de faire justice.
Les chiffres qu'il a cités sont exacts, mais les craintes qu'ils lui inspirent ne sont point réfléchies. Si nous avons importé, en 1867, un demi-million de tonnes de charbon de la Ruhr, alors qu'en 1865, nous n'en avions importé que 75,000, la cause en est tout entière dans le renchérissement extraordinaire du charbon dans les premiers mois de 1867 qui a permis au charbon de la Ruhr de pénétrer exceptionnellement sur certains marchés.
Si à la même époque notre exportation fléchissait de 400,000 tonnes, c'est qu'il a fallu pourvoir à des besoins intérieurs impérieux qui se révélaient par la hausse des prix.
Mais si notre importation a fléchi en 1867 sous l'empire de ces causes favorables aux producteurs des bassins houillers, mais si fâcheuses pour l'industrie métallurgique, il est à remarquer que le chiffre de l'exportation de 1867 dépasse de 8 p. c. celui de 1864, de 23 p. c. celui de 1863 et de 24 p. c. celui de 1862.
Voilà la situation vraie et elle ne justifie en rien les alarmes de l'honorable membre.
L'honorable M. Le Hardy de Beaulieu est revenu sur deux questions dont il a déjà entretenu la Chambre.
La halte de Florival et l'embranchement de la Lasnes destiné à relier directement Wavre à la capitale.
Depuis le mois de mai 1861, la halte de Florival a donné lieu à une correspondance active entre le département des travaux publics et la compagnie de l'Est-Belge et du Grand-Central.
Toutes les propositions faites à la compagnie ont été repoussées et le directeur du Grand-Central nous écrivait, le 15 janvier 1867 : L'établissement de la halle de Florival n'est réclamé par aucun intérêt sérieux et l'administration de la compagnie ne peut trouver dans le développement du trafic qu'amènerait la création de la halte, une compensation suffisante aux dépenses de premier établissement et d'exploitation auxquelles elle serait astreinte.
II est à remarquer qu'il n'a jamais existé à Florival ni à Archenne, une halte décrétée ou autorisée par le gouvernement. La compagnie y a établi, en 1855, une voie d'évitement pour l'usage de l'usine Oldenhoven.
Le gouvernement n'avait pas même été consulté à ce sujet.
Supprimée en 1861, au mois d'avril, par suite de l'incendie de l'usine, cette voie fut rétablie, aux frais de M. 0ldenhoven, en vertu d'un arrêté ministériel du 23 novembre 1861, et pour l'usage de son établissement qui venait d'être reconstruit.
Des habitants d'Archenne et des communes environnantes ont demandé au propriétaire de l'usine de pouvoir faire usage de son évitement pour y recevoir leurs marchandises : cette demande a été accueillie moyennant une indemnité.
Ils ont également obtenu du Grand Central l'arrêt de quelques convois à Florival et l'établissement d'une distribution de coupons, mais les résultats n'ayant pas répondu à l'attente de la compagnie, ces arrêts ont été supprimés.
Depuis lors, le gouvernement a vainement insisté auprès du Grand Central pour qu'il convertisse la gare privée de Florival en halte publique.
M. Oldenhoven consent à faire le sacrifice de la moitié de ses dépenses de construction de son évitement ; la commune d'Archenne offre l'abandon gratuit des terrains nécessaires pour l'agrandissement de la halle. La compagnie du Grand Central persiste dans son refus.
La ligne a été reçue par le gouvernement comme complète et sans réserve.
Le gouvernement n'a pas le droit d'agir d'autorité pour obliger la compagnie à l'établissement d'une halte qui n'a été prévue ni dans les cahiers des charges, ni dans la discussion et l'examen des plans et projets soumis au ministre pendant la construction de la ligne.
Il en est autrement, messieurs, quant à la réclamation de la ville de Wavre. Son droit à mon sens est incontestable, et je viens de le rappeler de la manière la plus nette et la plus précise à l'administration du chemin de fer du Luxembourg en l'invitant à me faire connaître quelles sont les intentions de la compagnie à cet égard.
Il faut que les obligations imposées à la compagnie par les divers actes qui constituent la concession soient exécutées ou que tout au moins l'organisation des trains et l'établissement des tarifs placent la ville dans la situation où elle se trouverait si elle était reliée à Bruxelles.
Quant au chemin de Bruxelles à Luttre, je remercie l'honorable membre de la confiance qu'il témoigne dans les promesses que j'ai eu l'occasion de faire récemment. Cette confiance, que l'honorable baron Snoy ne partage que faiblement, ne sera pas trompée. Une première brigade d'ingénieurs et conducteurs prend les dispositions préliminaires à la construction entre Bruxelles et Braine-l'Alleud, une seconde brigade fait le même travail entre Braine et Nivelles. Dès la semaine prochaine, nous serons en mesure de traiter pour l'achat des terrains avec les propriétaires qui seraient disposés à ne pas attendre l'expropriation, et les incrédules auront ainsi une occasion de s'assurer de la sincérité de nos promesses.
C'est de l'Yser et du canal de Loo que l'honorable M. Van Renynghe s'est occupé, et l'honorable membre a constaté avec satisfaction que des mesures vont être prises pour mettre un terme aux inondations qui désolent la vallée de l'Yser. Des travaux ont été adjugés, le 24 février dernier, moyennant la somme de 464,000 fr., et l'on procède avec activité à l'acquisition à l'amiable des terrains nécessaires pour entamer très prochainement les travaux adjugés et les poursuivre d'une manière régulière.
L'honorable M. Wouters ne sait s'il doit se féliciter des travaux qui s'exécutent en ce moment à la station de Louvain ou s'il doit les regretter. Il peut s'en féliciter sans hésitation, car ces travaux, tout en remédiant aux inconvénients sérieux que présentait l'intérieur des bâtiments des recettes, n'apportera ni changement ni retard à l'exécution des projets arrêtés en principe pour la station de Louvain, qui s'exécuteront aussitôt que nous aurons à notre disposition les ressources nécessaires.
L'honorable M. Wouters signale à la Chambre les demandes de crédit d'un demi-million pour la démolition des fortifications de Charleroi et de 6,000,000 fr. pour d'autres travaux publics et verrait du mauvais vouloir de notre part dans un ajournement des travaux de la station de Louvain.
Je lui répète que l'administration des chemins de fer regrette cet ajournement aussi vivement que lui. Quant aux crédits dont il a parlé, je dois lui faire observer que la dépense pour Charleroi nous sera promptement remboursée par la vente des terrains que la démolition des fortifications rendra disponibles, et quant au crédit de 600,000 fr., il est destiné à terminer certains travaux ou à liquider des dépenses imprévues que nous avons dû faire, et parmi ces travaux figurent pour 350,000 fr. le chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain.
L'honorable M. Wouters a exprimé le désir de voir annexer un bureau (page 1226) télégraphique au bureau des postes de l'intérieur de la ville et d'organiser un service postal à la station.
Trois villes seulement, Anvers, Gand et Liège, sont dotées d'un bureau télégraphique central, installation que justifie un mouvement de correspondance hors de toute proportion avec ce que fournit la ville de Louvain.
Je dois faire observer à l'honorable membre que le bureau de dépôt qu'il demande subsidiairement fonctionne déjà à la perception des postes, je ferai examiner si les moyens de transport dont il dispose sont suffisants. Le nombre de télégrammes acceptés au dépôt de Louvain ne se serait élevé en 1867 qu'à 238.
Enfin, l'honorable membre demande une gare des marchandises au centre de la ville et, parmi les arguments qu'il invoque, il indique cet établissement comme un moyen de lutter avantageusement contre les messageries Van Gend.
Je dois lui faire observer qu'une convention conclue avec cette dernière administration a mis depuis un an un terme à cette concurrence.
L'honorable M. Jonet a insisté sur la nécessité de mettre énergiquement la main à l'œuvre pour le chemin de fer de Luttre. Nous sommes complètement d'accord sur ce point.
Quant au chemin de fer de ceinture de Charleroi et de Luttre à Charleroi, les projets de tracé sont à l'étude et pourront être approuvés bientôt. Je veillerai à ce que le société des bassins houillers n'apporte aucun retard dans l'exécution de ses engagements.
Quant à l'embranchement dit : de la Planche, au sujet duquel l'honorable membre m'a remis différentes notes, je suis heureux de lui apprendre qu'après bien des péripéties nous sommes près d'aboutir au résultat désiré.
L'honorable M. Van Iseghem a recommandé à la sollicitude du gouvernement la construction 1° d'une route partant du hameau Walraversyde sur la route d'Ostende à Nieuport et aboutissant à Slype au canal de Nieuport.
Les demandes des administrations communales de Leffinghe, de Wilskerke et de Slype sont soumises en ce moment à l'avis du gouverneur et de l'ingénieur en chef de la Flandre occidentale.
Quant à l'embranchement de route du pont de Plasschendaele à Breedene sur la route d'Ostende à Bruges, l'affaire est soumise à l'examen du conseil permanent consultatif des travaux publics.
J'attends enfin des renseignements du gouverneur et de l'administration des ponts et chaussées pour statuer sur la demande de subside de la commune d'Ichtegem.
L'organisation des trains entre Bruxelles et Ostende est l'objet de la sollicitude de l'administration. L'honorable membre critique le passage par Malines du train express de 5 heures de Bruxelles à Ostende. Je dois lui faire observer que ce train se confond à Malines avec le train international d'Allemagne et avec le train postal d'Anvers pour l'Angleterre.
Il existe au surplus un train via Alost partant à 5 h. 50 m. et qui, s'il n'est pas express, a cependant des allures accélérées tout au moins jusqu'à Gand.
M. Tack se plaint de manœuvres qui. interrompent la navigation sur la Lys et occasionnent des inondations dans le bassin de la haute Lys. Des manœuvres ont été faites, en certains moments, aux barrages d'Astene et de Nevele du canal de dérivation de la Lys, dit canal de Schipdonck, dans le but de favoriser l'irrigation des terrains situés en amont desdits barrages et notamment des prairies de la wateringue de Nevele, Vosselaere, Meygem et Bachte-Maria-Leerne.
Ces manœuvres n'ont été opérées qu'à certaines époques de crues moyennes.
En les autorisant, le département des travaux publics a spécialement recommandé de tenir strictement la main à ce qu'on ne les opère qu'avec la plus grande circonspection, et de manière à ne pas nuire à la navigation, à ne pas gêner la marche des usines supérieures et à ne pas produire des inondations qui seraient fâcheuses.
Le gouvernement doit, autant que cela est possible sans froisser aucun intérêt important, favoriser des irrigations fertilisantes dans une vallée aussi intéressante, au point de vue de la richesse du pays, que celle de la Lys.
Le temps m'a manqué depuis que M. Tack a signalé à l'attention de la Chambre les inconvénients qui, d'après lui, seraient résultés des manœuvres dont il s'agit, pour vérifier s'il y a eu des abus ou de fâcheux résultats de ces manœuvres.
le compte me faire renseigner d'une manière précise a cet égard et prendre des mesures pour éviter le renouvellement des inconvénients qui me seraient signalés.
L'honorable M. Zerezo de Tejada nous a développé des théories sur l'utilité des canaux dont je ne méconnais point la valeur, et le gouvernement leur a donné depuis longtemps une consécration éclatante, en Campine surtout, où des dépenses considérables ont été faites pour transformer l'agriculture et le commerce de cette partie du pays.
L'honorable membre me demande de lui préciser l'époque à laquelle le gouvernement fera mettre la main au canal de Saint-Job in t'Goor. Je ne puis que confirmer à l'honorable membre les déclarations que je lui ai faites, que cette question était une de celles qui recevraient une prompte solution.
Quel inconvénient, dit l'honorable membre, y aurait-il à donner, dans une année de quasi-disette, du travail à un grand nombre de bras sans emploi, à distribuer beaucoup de salaires à de pauvres gens qui n'ont pas de quoi vivre ?
Il n'y aurait à tout cela que de grands avantages, messieurs, et c'est une des faces de la question spéciale qui nous occupe. Il y a eu l'hiver dernier beaucoup de souffrances dans les régions dont a parlé l'honorable M. de Zerezo et le travail a manqué. Il y manquera peut-être encore dans quelques mois, tandis qu'à ce moment de l'année où la fenaison va commencer, les bras manquent.
Je ne dis pas qu'il faille ajourner dans cet unique but à l'hiver prochain les travaux de terrassement qui soustrairont un grand nombre d'ouvriers aux étreintes de la misère, mais l'honorable membre reconnaîtra qu'il y a là cependant une considération bien digne de la sollicitude du gouvernement.
Quoi qu'il en soit, je le répète, le canal de Saint-Job in t' Goor ne sera pas oublié.
Quant à la Grande-Nèthe, dont l'honorable membre a parlé en si bons termes, je tiendrai la main à ce que les études commencées soient poursuivies avec activité, mais, dans cette question encore, des associations de wateringues hâteraient singulièrement la solution des problèmes qu'elle comporte.
L'honorable baron Snoy s'est occupé à son tour de la station de Florival et de l'embranchement de la Lasne. Il a trouvé une solution à cette dernière question, qu'il ne lui est pas possible d'indiquer aujourd'hui. Quand le moment sera venu, si d'ailleurs cette solution satisfait aux intérêts engagés dans cette question, je lui prêterai volontiers mon concours.
Quant à l'exécution du chemin de fer de Luttre, l'honorable membre n'ose y compter. Je pense que des faits prochains ne tarderont pas à convaincre l'honorable membre, quelle que soit son incrédulité.
J'examinerai, messieurs, la situation de Genappe et ce qu'il est possible de faire pour cette localité au point de vue des communications.
L'honorable M. Hagemans se préoccupe avec raison de l'exécution du chemin de Frameries à Chimay avec embranchement de Beaumont à Thuin ; ce chemin de fer devait être terminé en avril dernier, mais ce délai était trop court. La société des Bassins-Houillers, qui a repris cette concession, a achevé la section de Frameries à Bonne-Espérance, s'occupera sans aucun doute de compléter ses obligations. S'il en était autrement, je promets à l'honorable membre de l'y contraindre.
L'honorable membre a appelé mon attention sur le système actuel de recolement des coupons de voyageurs par les gardes et sur les considérations d'humanité qui devaient engager l'administration à y renoncer et à y substituer le régime adopté en France ou en Angleterre.
Cette réforme est sur le point d'être introduite. Le contrôle se fera très prochainement à la descente des trains sur une partie du réseau et cette pratique sera généralisée aussitôt que toutes nos gares seront pourvues de clôtures convenables.
Je puis rassurer également l'honorable M. Descamps, au sujet des deux chemins de fer dont il m'a parle. Je veillerai à ce que les concessionnaires remplissent leurs obligations en ce qui concerne Enghien à Renaix et Saint-Ghislain à Ath. Quant à cette dernière ligne, il n'y a pas eu de décisions nouvelles du département des travaux publics. Le concessionnaire ayant voulu s'écarter des prescriptions formelles de la loi, nous avons rappelé.
Le bras de la Dendre qui traverse Ath et dont l'honorable membre a entretenu la Chambre, soulève des questions de principe très délicates que l'honorable membre a indiquées et que je ne puis résoudre encore. J'examinerai cette affaire avec l'attention qu'elle mérite et je m'efforcerai de lui donner une solution qui concilie les intérêts de la ville d'Ath et ceux de l'Etat.
(page 1227) M. Delaet a proposé le dépôt sur le bureau d'une pétition des habitants de Schelle demandant un bureau de poste. Cette pétition, datée du mois de mars, est devenue sans objet. Ce bureau, décrété depuis longtemps, commencera ses opérations aussitôt que nous nous serons mis d'accord avec le ministre de la guerre sur la question du local.
L'honorable M. Delaet nous a signalé une fois de plus la situation fâcheuse des installations du chemin de fer à Anvers. Nul ne s'en plaint plus vivement que nous, et je joins mes doléances très énergiques à celles du commerce anversois ; mais elles doivent s'adresser à l'administration communale d'Anvers qui a rendu impossible la solution qui devait sauvegarder les intérêts du commerce anversois et celle du service de l'exploitation des chemins de fer en disposant des terrains propres à l'établissement d'une station convenable.
Celte assertion est erronée, dit l'honorable M. Delaet, la ville d'Anvers a fait des aménagements très convenables en vue d'un déplacement du chemin de fer.
La vérité est que l'administration communale, se préoccupant uniquement, comme l'a dit l'honorable M. Delaet, du détournement du railway, avait fait faire un plan d'ensemble par un ingénieur dont je ne conteste pas le talent, mais qui était complètement étranger aux nécessités qu'engendre une bonne exploitation des chemins de fer dans une localité comme Anvers.
Ce projet comprenait la dérivation du canal de la Campine, le déplacement d'une écluse, la construction d'une nouvelle écluse à l'Escaut, en dehors du détournement du chemin de fer et du déplacement de la station.
Vous supposez, messieurs, que pour l'élaboration de ce projet, qui intéressait tout autant l'Etat que la ville d'Anvers, l'administration communale demanda, la participation du gouvernement. En aucune manière ; le plan fut élaboré et soumis au conseil sans que le gouvernement en eût en quelque sorte connaissance.
Quand plus tard les vices de cette étrange manière d'agir furent apparents, quand le département des travaux publics déclara que les défauts du plan de M. Van Bever le rendait absolument inadmissible, il fallut en revenir à une commission composée de fonctionnaires du département des travaux publics et de délégués de l'administration communale.
Cette commission fut instituée, le 15 février 1865 et le 12 octobre elle adoptait un plan qui devait doter Anvers d'installations modèles au point de vue du service des chemins de fer et des établissements maritimes et faisait disparaître par le détournement du chemin de fer les inconvénients dont se plaignait la ville d'Anvers.
Mais pendant que la commission terminait son travail, la ville d'Anvers traitait avec M. Ybry et lui cédait les terrains qui étaient nécessaires à l'exécution du plan, devenu impossible en présence des exigences du nouveau propriétaire.
Le commerce d'Anvers sait donc parfaitement quel est l'auteur de la situation déplorable dont lui et nous gémissons également.
L'honorable M. de Lexhy, de même que M. de Macar, insistent pour que les concessionnaires du chemin de fer d'Hesbaye-Condroz soient mis en demeure de remplir leurs obligations. Je leur donne volontiers cette assurance. Je pense que l'heure est venue d'en finir avec les concessionnaires qui, n'étant pas en situation de remplir leurs engagements, sont un obstacle à ce que d'autres personnes viennent, dans de meilleures conditions souvent, sauvegarder des intérêts compromis par l'inaction fâcheuse de ces concessionnaires.
Ainsi, je n'ai pas hésité à soumettre au Roi l'arrêté de déchéance de la concession primitive de Malines-Terneuzen restée inerte jusqu'à ce moment. Le projet de loi qui vous est soumis assure l'exécution de cette ligne avec cette différence capitale que les nouveaux concessionnaires construiront cette ligne avec 6,500,000 fr. au lieu de 16 millions. Les hommes honorables avec qui j'ai signé une convention pour cette affaire ouvrent une voie nouvelle où ils seront suivis sans doute par tous ceux qui se réjouissent de pouvoir employer leurs capitaux non seulement d'une manière utile pour eux, mais féconde encore pour le commerce et l'industrie du pays.
Les haltes dont a parlé l’honorable M.de Lexhy seront l'objet d'un examen attentif du département, et je promets à l'honorable membre de ne point perdre de vue ses recommandations au sujet des stations de Waremme et de Fexhe.
Je suis heureux de pouvoir annoncer à l'honorable M. de Brouckere que les négociations entre la ville et l'Etat pour des travaux à exécuter en commun ont abouti. Les dépenses estimées à 700,000 fr. seront supportées par moitié par la ville et par l'Etat qui acquittera sa participation par moitié en 1869 et en 1870.
Quant aux affaires qui intéressent les communes de l'arrondissement de l'honorable membre, il sait que j'hésite d'autant moins à faire droit à ses demandes qu'elles sont toujours empreintes de tant d'équité et de modération que l'on aurait mauvaise grâce à ne point les accueillir.
En dehors de la Dendre, l'honorable M. de Naeyer a signalé, avec l'honorable M. Jouret, la nécessité d'améliorer les relations de la capitale avec Lessines, Grammont et Ninove. Je chercherai dans l'organisation des trains à partir du 1er juin à satisfaire aux désirs qui me sont exprimés.
Quant aux stations d'Okegem et de Grimberghe, je suis heureux de pouvoir annoncer à MM. de Naeyer et Van Wambeke que des ordres sont donnés pour leur établissement. Quant aux stations de Smissenhoek et Moerbeke, elles font l'objet de négociations avec le concessionnaire de Braine-le-Comte à Gand.
Je suis en communauté de sentiments avec M. de Naeyer, et je m'en applaudis chaque fois que cela m'arrive, sur le terrain des intérêts matériels, sur l'importance de boeren-treinen et sur l'intérêt qu'il y a à les multiplier par l'établissement de stations rurales. C'est un principe admis au département des travaux publics, et de 1864 à 1867, quarante-huit de ces stations ont été créées. Il importe de remarquer cependant qu'à ne considérer que l'intérêt de l'exploitation des chemins de fer, l'opération est souvent onéreuse, ce ne sont point seulement les frais de premier établissement qui sont considérables, mais surtout les frais d'entretien et d'exploitation qui laissant souvent un déficit d'autant plus long à combler que pendant longtemps le trafic des stations nouvelles s'alimente au détriment du trafic de stations anciennes. Mais le chemin de fer, je le répète, ne saurait être seulement un instrument fiscal aux mains de l'Etat, et c'est au profit des intérêts ruraux que recommande M. de Naeyer qu'il importe de s'en souvenir.
L'honorable M. Gerrits m'a demandé des indications à propos de la concession du chemin de fer demandée par MM. Chauchet et Bennett.
Je dois dire, messieurs, qu'il n'a pas dépendu du département des travaux publics que la concession ne fut accordée.
En effet dès le mois d'avril 1867, mon honorable prédécesseur avait écrit à MM. Chauchet et Bennett que, moyennant deux conditions qu'il indiquait, un projet serait présenté par lui pour que la concession leur fût accordée. Mais jusque, dans ces derniers temps MM. Chauchet et Bennett ne s'étaient occupés en aucune façon de réaliser les conditions prescrites par mon honorable prédécesseur.
L'une d'elles est encore inexécutée à l'heure qu'il est. Il s'agissait, messieurs, d'obtenir la certitude que le gouvernement hollandais était décidé à octroyer à MM. Chauchet et Bennett la concession de la partie du chemin de fer située sur le territoire hollandais, et il fallait ensuite donner des explications sur la constitution financière de la compagnie. J'ai reçu il y a quelques jours à peine les indications sur la constitution financière de la société et je dois dire dès maintenant que le capital indiqué par les demandeurs en concession comme étant nécessaire à la construction de la ligne est beaucoup trop élevé, et qu'il faudra modifier ces conditions de leur programme s'ils veulent obtenir la concession.
L'honorable M. David a présenté à la Chambre des considérations au sujet des tarifs dans l'examen desquelles l'heure n'est point venue d'entrer.
Quant à l'établissement d'un service de voiture entre Verviers et Thimister à côté de ceux qui existent, je n'ose point prendre vis-à-vis de l'honorable membre des engagements formels à cet égard. Thimisitr a aujourd'hui deux distributions par jour.
Dès les premiers jours de mon entrée au département des travaux publics, j'ai reçu la visite d'une députation de l'administration communale de Nieuport qui venait m'engager à assister à l'inauguration du chemin de Nieuport à Dixmude. A cette occasion, j'ai promis aux magistrats communaux de ne point perdre de vue la question si importante pour cette ville des travaux qui doivent en quelque sorte la régénérer.
J'ai tenu ma promesse. Je suis en possession de trois projets sur lesquels le comité des travaux publics va se prononcer prochainement. L'un de ces projets comporte un bassin à flot, un avant-port d'échouage avec quai pour bateaux à vapeur et bateaux-transport, un port d'échouage pour la pêche, une estacade d'ouest et un système de chasses étagées créé par deux bassins.
La dépense serait de 10 millions, mais la dépense pour les travaux dont l'urgence est reconnue ne s'élève qu'à trois millions. Ces travaux comprennent l'estacade et la jetée basse de l'estocade d'ouest, le bassin de chasse d'aval avec son écluse à douze passages.
Ces travaux seraient exécutés à l'aide de l'excédant de crédits disponibles, soit 1,280,000 francs et d'un nouveau crédit de 1,720,000 francs.
(page 1228) J'ai fait imprimer les développements explicatifs de ces trois projets afin de hâter l'examen du comité des ponts et chaussées.
M. de Kerckhove nous a entretenus de quatre questions.
Il voudrait demander un crédit supplémentaire pour améliorer la position des ouvriers de l'arsenal.
La position des ouvriers de l'arsenal, messieurs, a été, je le reconnais, très fâcheuse dans le courant de l'hiver. Il nous a fallu réduire la durée du travail ; mais, je me hâte de le dire, cette réduction de durée de travail ne s'est traduite en définitive que par une réduction de 32 fr. sur le salaire moyen des années précédentes. Heureusement il y a eu une compensation à cette réduction de salaire.
Grâce au concours actif du directeur de l'arsenal, qui n'est pas seulement un homme d'une grande intelligence, mais qui est aussi un homme d'un grand cœur, les ouvriers ont formé une association coopérative dont les résultats dépassent toutes les espérances.
Certains chefs de famille ont réalisé sur l'achat du combustible et des denrées alimentaires une économie de quinze francs par mois.
Il m'est impossible cependant de me rallier à la proposition de l'honorable M. de Kerckhove.
Je ne pourrais demander à la Chambre d'améliorer la position des ouvriers de l'arsenal sans lui demander également d'améliorer la position de tous les agents du département, et je dois dire qu'il y a parmi eux des agents qui sont dans une situation bien plus précaire que celle des ouvriers de l'arsenal, mais ils ont partagé avec toutes nos classes ouvrières les dures épreuves que la cherté des vivres avait fait subir à toutes nos populations.
M de Kerckhove m'a parlé également de l'établissement créé à Malines par un industriel. Mon bon vouloir ne peut pas se traduire en fait, la loi de comptabilité m'empêche absolument de donner a des établissement privés des commandes, qui doivent seulement être attribuées aux usines du pays, par le sort des adjudications.
M. de Kerckhove a demandé aussi la création d'un bureau de poste à Boisschot. Je dois avouer que la commune de Boisschot n'a pas assez d'importance pour permettre l'érection d'un nouveau bureau de poste.
Je chercherai, par une combinaison, à améliorer le service postal de cette commune.
L'honorable M. de Kerckhove m'a enfin parlé d'une question qui me tient fort à cœur ; la question de' voyages à prix réduits pour permettre aux enfants de se rendre aux établissements d'instruction. J'avoue que cette question me tient d'autant plus à cœur que des mesures que j'ai prises récemment m'ont paru fort dures à exécuter.
La Chambre sait qu'à plusieurs reprises des réclamations se sont produites dans cette enceinte contre l'abus qui était fait du billet de libre parcours.
Mon honorable prédécesseur s'était engagé vis-à-vis de la Chambre à porter remède à cet abus et, comme toujours, il a tenu sa promesse.
L'arrêté pris par lui le 27 décembre au moment de quitter le département a modifié d'une manière complète la situation contre laquelle s'élèvent de vives réclamations.
Parmi les abus disparus aujourd'hui, était le parcours gratuit de 200 ou 300 enfants de fonctionnaires et d'agents, qui profitaient de certains trains pour se rendre à l'école de la ville ou de la commune voisine.
Il m'a été fort pénible de supprimer ces voyages ; je cherche un moyen de permettre à ces enfants de continuer leurs utiles voyages, sans rien faire cependant de contraire aux intentions de la Chambre et à l'arrêté de mon honorable prédécesseur ; le moyen consiste à créer un service d'abonnement qui permette, non seulement à ces enfants-là, mais à tous les autres enfants qui seraient dans la même situation, de se rendre à l'école la plus voisine.
L'honorable M. Carlier m'a fait remarquer que l'organisation des trains entre Mons et Bruxelles était assez vicieuse, puisque entre 9 heures du matin et 1 heure il n'existait pas de train, et que dans le courant de l'après-midi, un délai de trois heures existait également entre eux.
Je puis annoncer à l'honorable membre qu'à partir du 1er juin, l'organisation sera modifiée, et que, pour les trains du matin tout au moins, il y aura une situation meilleure, en ce sens qu'à 10 h. 30 m. du matin, il y aura un train.
L'honorable M. Carlier nous a parlé également de l'intérêt qu'il y avait pour certaines communes de l'arrondissement qu'il représente, de voir concéder un chemin de fer de Dour à Quiévrain.
Des considérations très sérieuses et dont j'aurai probablement l'occasion d'entretenir la Chambre dans un délai plus ou moins rapproché, sont un obstacle à ce que le gouvernement accorde cette concession. Il faudra donc, pour desservir les intérêts très respectables des populations des communes citées par l'honorable M. Carlier, il faudra donc que nous recherchions un moyen autre que celui qui a été indiqué par l'honorable membre.
L'honorable M. Elias a prononcé un discours que je n'ai pas jusqu'ici trouvé au Moniteur. Il m'est donc impossible de répondre aujourd'hui à ce discours ; mais j'aurai probablement l'occasion de le faire dans la séance de demain. J'espère que la nuit aura porté conseil à mon honorable ami ; samedi dernier, l'atmosphère était très chargée d'électricité pendant le discours de l'honorable membre ; je pense que c'est sous l'influence de cette atmosphère que l'honorable membre a dirigé contre l'administration des ponts et chaussées des accusations qu'il aura peut-être trouvées exagérées le lendemain et qu'il aura affaiblies dans son discours.
M. de Macar a traité d'une manière complète une question que d'autres orateurs n'avaient fait qu'effleurer, celle de l'emploi de pierres étrangères dans la construction de nos édifices et l'honorable, membre a porté contre le gouvernement un véritable acte d'accusation contre des tendances que l'on ne saurait trop blâmer si elles étaient réelles, mais qui n'ont jamais existé, ni dans l'esprit de mon honorable prédécesseur, ni dans le mien.
La pierre bleue du pays a l'inappréciable avantage d'avoir, au point de vue de la résistance, une supériorité incontestable sur la pierre de France, à moins d'avoir recours à des pierres d'une valeur plus considérable que le petit granit, comme les calcaires de Sainte-Ylic dans le Jura et certains calcaires de la Bourgogne.
Au point de vue de l'art monumental, la pierre bleue a été de tout temps pour nos architectes un élément dont nos plus splendides monuments indiquent la valeur.
L'église Notre-Dame, dont les cinq clochers sont un souvenir si cher aux enfants de Tournai, l'église Sainte-Waudru à Mons, l'église Saint-Jacques, et le palais des Princes-Evêques, à Liège, et tant d'autres édifices dont le nom m'échappe, sont construits en pierre bleue et font l'admiration des voyageurs et des artistes.
Mais à côté de ces monuments d'un caractère et d'un style qui s'accommodent des qualités propres au petit granit, il en est d'autres, comme les hôtels de ville de Bruxelles, de Louvain et de Gaud, qui ont été construits en pierre blanche.
Des considérations sérieuses ont guidé nos ancêtres dans le choix des matériaux qu'ils employaient.
La situation des carrières a été une de ces considérations sans doute, mais leur grande préoccupation est d'assurer à l'œuvre de l'artiste, tout l'effet qu'elle peut produire. Adoptant la pierre bleue pour les monuments qui saisissent l'œil par l'agencement de grandes lignes et dont les saillies se détachent vigoureusement, ils donnent la préférence, au contraire, à la pierre blanche pour les façades fouillées par le ciseau de ces habiles ouvriers du moyen âge et dont la finesse et la richesse d'ornementation ne ressortent qu'à l'aide des jeux de lumière et d'ombre que la pierre bleue absorbe d'une manière complète au lieu de les refléter comme la pierre blanche.
Pour les constructions du moyen âge, à Bruges, on faisait venir à grands frais des pierres blanches de l'Allemagne, d'où, par parenthèse, sont venues également les pierres qui ont servi à édifier la colonne du Congrès.
Les Halles et l'église Saint-Martin, à Ypres, ont été en grande partie, si pas même en entier, construites en pierre de France, ainsi que l'hôtel de ville de Courtrai, qui a été construit au XVIème siècle.
Faut-il aujourd'hui, dans un but de protection industrielle dont je vous montrerai tout à l'heure le danger, priver nos artistes de la faculté de choisir pour leurs œuvres les matériaux les plus propres à réaliser les conceptions de leur génie ? Nul ne le soutiendrait sans doute. Quant au parallèle que l'honorable M. de Macar a établi entre les pierres blanches et les pierres bleues, il pèche par un point essentiel, en ce qu'il indique comme étant propres à toutes les pierres blanches des défauts très sérieux que présentent certains de ces matériaux dont l'emploi devrait être proscrit avec soin.
Il existe, dans le pays même, des pierres blanches d'excellente qualité, parmi lesquelles je citerai la pierre de Grimberghe. de Baelegem, de Goberlange. Malheureusement ces carrières sont épuisées ou ne fournissent plus, comme celle de Goberlange, que des pierres d'une épaisseur de 25 à 30 centimètres.
(page 1229) Il ne restera probablement aucun doute dans l'esprit de l'honorable M. de Macar sur ce point quand je lui aurai dit qu'un maître de carrières de Gubertange, dans une maison récemment construite par lui, a fait ses consoles de balcon en pierre de France.
Quoiqu'il en soit, j'ai prescrit d'une manière spéciale l'emploi des pierres de Gobertange, chaque fois qu'il serait possible de les utiliser et pour la restauration de la porte de Hal le cahier des charges prescrit l'emploi des pierres de Grimberghe.
Il faut bien cependant, quand la bonne exécution artistique du monument en dépend, recourir aux pierres blanches étrangères. L'on suppose à tort qu'en autorisant l'emploi de la pierre blanche nous cherchons seulement à réaliser une économie au détriment de l'industrie nationale. Notre préoccupation principale, je le répète, est de permettre la meilleure réalisation possible des conceptions de nos artistes et de nos ingénieurs.
Cette préoccupation me semble mériter l'attention de la Chambre, et le souci de l'opinion que les générations futures auront des monuments que nous leur léguerons doit occuper une place à côté de l'intérêt légitime que nous portons tous à la prospérité de toutes les industries du pays.
Quant aux causes par lesquelles l'honorable M. de Macar cherche à expliquer la préférence accordée à la pierre blanche par les fonctionnaires du département des travaux publics, j'ai été étonné, je l'avoue, de les lui voir reproduire.
A l'affirmation que l'emploi de la pierre blanche est préféré parce que les études qu'elle rend nécessaires sont moins longues que pour l'emploi de la pierre bleue, mon honorable prédécesseur a répondu déjà avec beaucoup de raison que les architectes et les ingénieurs de l'Etat n'ayant à consacrer au service du gouvernement qu'un nombre d'heures déterminé, il leur était indifférent d'employer leur temps à faire des études pour la pierre blanche ou le petit granit.
Je ne saurais admettre davantage la seconde raison, qui consiste à dire que les monuments en France étant construits en pierre blanche, on peut s'en inspirer plus facilement en employant les mêmes matériaux. Je repousse cette pensée, non seulement pour les ingénieurs et les architectes du département des travaux publics, mais pour tous nos artistes.
Il serait difficile, en effet, de justifier ce grave reproche de n'avoir point au même degré que les artistes français le génie créateur et de n'être que des contrefacteurs plus ou moins habiles.
Je proteste contre cette assertion. Soit dans la restauration de nos monuments, soit dans la création d'édifices nouveaux, nos architectes ont prouvé qu'ils occupent une place distinguée dans cette pléiade d'artistes de tous genres qui ont fait à l'école belge moderne une réputation que personne ne lui conteste plus à l'étranger.
M. de Macar, comme complément de son discours, nous a lu une lettre de quelques exploitants de carrières qui protestent contre deux de mes allégations au Sénat.
J'ai dit que le trafic d'un embranchement de 1,200 à 1,300 mètres reliant quelques carrières de Soignies au chemin de fer s'était élevé en quelques années de 5,000 à 10,000 waggons. On ne conteste pas l'exactitude de ces chiffres, mais on réplique que le transport de la chaux et du combustible occupe une place importante dans ce dernier chiffre ; on fait ressortir le développement de l'industrie houillère, bien plus considérable que celle des maîtres de carrière.
Qu'ai-je voulu dire ? Que cette dernière industrie n'avait point cessé de prospérer. Personne ne s'en applaudit plus que moi et n'est plus disposé que moi à saisir toutes les occasions de concourir au développement de sa prospérité.
En fait, l'emploi de la pierre blanche par l'administration des ponts et chaussées a été si exceptionnel que l'on citerait difficilement deux occasions dans lesquelles on en a fait emploi. Quant à l'administration des chemins de fer, les grandes stations du Nord et du Midi sont en petit granit et ce n'est guère qu'à Liège, à Namur et à Mons que l'on a fait usage de la pierre blanche.
L'emploi de la pierre bleue, mariée à la brique, convient, dans la plupart des cas, à nos bâtiments des stations, et j'ai donné l'ordre à l'ingénieur chargé de la construction de la nouvelle ligne de Bruxelles à Charleroi, de projeter ces constructions avec ces matériaux.
J'avais dit également au Sénat que l'emploi de la pierre bleue était si bien dans les intentions du département des travaux publics que nous construisions en pierre bleue la gare de Charleroi, bien que l'emploi de la pierre blanche nous eût amené une économie de 60,000 francs.
MM. les maîtres de carrières contestent l'exactitude de ce chiffre en le déclarant impossible. La vérité est, qu'entre les bâtiments de Tournai et de Charleroi, qui sont de même importance et projetés l'un en pierre blanche et l'autre en pierre bleue, la différence exacte quant aux pierres est de 67,815 ; la dépense pour Charleroi était estimée à 181,703 fr. et pour Tournai à 113,190. C'est sur ces chiffres extraits des métrés des bâtiments de Tournai et de Charleroi que se basait mon assertion dont, on le voit, il n'y avait pas lieu de contester l'exactitude.
Je n'ai point reçu sans regret d'assez nombreuses pétitions d'ouvrier conçues de façon à me faire supposer que des indications fort erronées leur ont été données sur cette question. Ces pétitions réclament en effet contre des pratiques fâcheuses qui ne tendraient à rien moins qu'à ruiner l'industrie des maîtres de carrières belges au profit des maîtres de carrières étrangers.
Il est dangereux, dans les temps de crise industrielle que nous traversons, de ne point détruire, au lieu de les accréditer, des idées aussi fausses, et qui représentent le gouvernement non seulement comme insensible aux misères de nos classes laborieuses, mais comme les aggravant par des dispositions injustifiables.
L'heure est mal choisie pour parler du travail national sacrifié au travail étranger. L'intérêt bien entendu des maîtres de carrières, devrait les engager à tenir un autre langage et les rendre attentifs à la tentative suprême que font en ce moment les protectionnistes à la tribune française.
Nous aurions mauvaise grâce, en effet, à éveiller l'attention de nos voisins sur cette question. Quelques chiffres vous prouveront, messieurs, dans quelle situation se trouve, par rapport aux échanges internationaux, l'industrie des carrières.
En 1858, nos importations des produits de toute nature des carrières étrangères s'élevaient à 57,000 tonnes, et nos exportations à 165,000 tonnes.
En 1866, le chiffre des importations descendait à 49,000 tonnes alors que celui de nos exportations s'élevait à 382,445.
En 1866, nous importons pour 1,300,000 francs, nous exportons pour 10 millions.
Voilà ce qu'il importe de dire bien haut à nos ouvriers qui seraient les premières victimes des mesures qui proscriraient de parti pris certains matériaux étrangers, mesures qui seraient bientôt suivies des plus fâcheuses représailles.
M. de Theuxµ. - J'ai l'honneur de proposer à la Chambre de fixer à mercredi prochain la discussion du rapport de M. le ministre de l'intérieur sur la statistique générale.
M. le ministre de l'intérieur avait demandé qu'on ne fixât pas cette discussion à la séance de ce jour, parce qu'il devait s'absenter, mais il a ajouté qu'il n'avait aucune objection à la fixation d'un autre jour.
Je crois qu'il est de la plus haute convenance que cette discussion puisse avoir lieu en temps utile.
Je propose de fixer cette discussion à mercredi prochain.
MfFOµ. - Nous ne nous opposons pas à ce qu'on fixe à mercredi ou à un autre jour la discussion du rapport relatif au recensement. Cependant, il serait peut-être utile de laisser achever le budget des travaux publics.
M. de Theuxµ. - Cela nous mènerait trop loin.
MfFOµ. - Il me semble que le résultat serait à peu près le même.
M. le président. - N'avons-nous pas l'espoir de terminer le budget demain ?
MfFOµ. - Il est probable que la discussion sera promptement terminée. La discussion générale a porté en grande partie sur les articles. Je ne pense donc pas qu'à l'occasion des articles on se livre à des discussions spéciales. On pourrait peut-être commencer dès mercredi la discussion dont parle M. de Theux.
M. de Theuxµ. - Il est à peu près certain que la discussion générale du budget des travaux publics sera terminée aujourd'hui. Eh bien, quel inconvénient y aurait-il à interrompre le vote des articles ? Absolument aucun.
Je prie la Chambre de vouloir bien adopter ma proposition.
MtpJµ. - Je crois qu'au point où en est arrivée la discussion, on peut avoir raisonnablement l'espérance de terminer demain. Comme l'a fait remarquer mon honorable collègue des finances, nous avons abordé l'examen des (page 1230) articles dans la discussion générale, et il n'est pas probable que les articles donnent lieu à de grandes discussions.
D'un autre côté, il y aurait de sérieux inconvénients à ajourner le vote du budget.
M. Jacobsµ. - Je ne vois pas qu'il y ait des inconvénients à scinder la discussion du budget, s'il n'est pas terminé à la séance de demain. Mais tout le monde comprendra que la discussion qui portera sur la question de statistique et qui pourrait être irritante, ne serait pas très bien placée dans la séance de jeudi, par exemple.
- Une voix. - Pourquoi ?
M. Jacobsµ. - Je laisse à l'intelligence de mes collègues le soin de le deviner.
M. de Brouckere. - Mon intelligence ne devine pas.
M. le président. - La proposition de M. de Theux est de fixer cette discussion à mercredi.
MfFOµ. - Fixons-la après le budget.
M. le président. - Il y aurait un moyen de tout concilier. Si les honorables orateurs qui sont encore inscrits voulaient bien concentrer les observations qu'ils ont encore à soumettre, nous finirions certainement le budget demain.
Je propose de décider que la discussion sera fixée à mercredi si le budget est terminé.
- Cette proposition est adoptée.
M. Jacquemynsµ. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale sur un crédit de 190,000 francs pour le département de l'intérieur.
- Ce rapport sera imprimé et distribué et l'objet qu'il concerne mis à la suite de l'ordre du jour.
M. Notelteirsµ. - Je m'étais proposé de parler aux articles, mais comme la discussion générale continue, je crois mieux faire et je serai plus court, en prenant la parole en ce moment.
J'ai écouté avec un vif intérêt le discours de mon honorable ami, M. de Zerezo, qui nous a entretenus, vendredi dernier, des besoins de la Campine et des justes réclamations que cette partie intéressante du pays est en droit de faire valoir auprès du gouvernement.
Les dépenses que réclament les besoins signalés par l'honorable membre ne sont pas considérables. Elles sont bien minimes en comparaison de celles que le gouvernement fait avec tant d'empressement et de générosité en d'autres matières, utiles sans doute, mais, à coup sûr, moins impérieusement nécessaires.
La question des Nèthes traitée par mon honorable ami est vitale pour les localités riveraines. Je ne répéterai pas les considérations que, pour ma part, j'ai eu l'honneur de présenter ici à plusieurs reprises. Il m'est pourtant impossible de ne pas y revenir au moment de la discussion du budget.
Je crois devoir le faire, en outre, à cause de la réponse peu encourageante donnée par l'honorable ministre aux demandes de M. de Zerezo. Il est bon sans doute de recommander la création de wateringues ; j'ai fait l'éloge de ces institutions ; mais il est inutile de le dire : la matière première des wateringues, «'est l'eau. L'honorable M. Nothomb a déjà donné cette réponse, il y a un an, à l'honorable M. Vanderstichelen, alors ministre des travaux publics.
Les deux Nèthes confluent à Lierre, elles y rencontrent la marée et s'y jettent dans la basse Nèthe formée de leur confluent.
La Petite-Nèthe est canalisée. Elle appartient à l'Etat. Sa transformation en canal a causé d'énormes pertes aux prairies. Quelques travaux peu importants ont amélioré la situation, sans la rendre cependant satisfaisante.
Quant au canal lui-même, ses écluses sont trop étroites, elles sont en très mauvais état. J'engage le gouvernement à examiner si le moment n'est pas venu de les élargir, pour les mettre en rapport avec celles du canal de la Meuse à l'Escaut et de rendre ainsi possible le passage d'un canal dans l'autre.
La Grande-Nèthe n'est pas canalisée. Son maintien et son amélioration comme voie navigable, comme voie d'écoulement et comme moyen d'irrigation sont indispensables. Cette nécessité a été démontrée dans cette enceinte à diverses reprises par plusieurs orateurs, et l'obligation d'y pourvoir incombe à l'Etat à un triple titre.
D'abord en vertu des règles de la justice distributive et de la loi générale qui attribuent à l'Etat les rivières navigables et flottables.
En second lieu : à cause de l'abandon complet dans lequel l'Etat a laissé la rivière pendant plus d'un demi-siècle, abandon qui a causé tant de torts aux riverains.
Et enfin, du chef de la loi spéciale du 8 mars 1858.
La somme contributive de 222,500 francs imposée à forfait à la province, aux communes et aux propriétaires intéressés a été intégralement versée dans les caisses de l'Etat ; il est donc juste et naturel que les intéressés jouissent de la réalisation effective des avantages en raison desquels cette contribution insolite leur a été imposée.
Ici, j'ai à placer une remarque spéciale relative à un droit acquis à la ville de Lierre.
J'ai dit tantôt que les deux Nèthes confluent devant la ville de Lierre, y rencontrent la marée et s'y jettent dans la basse Nèthe.
Cette situation critique a occupé l'attention spéciale des ingénieurs qui ont arrêté les projets des travaux dont la loi du 8 mars 1858 décrète l'exécution.
Parmi ces projets décrétés, se trouve celui de barrages destinés, en cas de grandes crues, à isoler complètement des eaux des Nèthes l'intérieur de la ville.
Les ingénieurs avaient jugé ce travail indispensable pour conjurer le péril de la situation exceptionnellement critique du confluent.
Cependant, ce travail spécial n'a pas reçu d'exécution ; il reste de ce chef dans les caisses de l'Etat une somme de 140 mille francs.
Cette somme, produit des contributions déterminées par la loi du 8 mars 1858, appartient évidemment, par droit acquis, aux besoins de la ville de Lierre. Dans une des séances du mois de février 1867, l'honorable M. Vanderstichelen, alors ministre des travaux publics, n'a pu s'empêcher de reconnaître l'évidence du droit acquis.
Si le travail spécial n'a pas été exécuté, c'est, sans doute, que le gouvernement a voulu consulter l'expérience.
Aujourd'hui, messieurs, l'expérience a parlé.
La situation de la ville de Lierre s'aggrave. Elle pâtit de tous les travaux d'amélioration qui ont pour but d'activer l'écoulement des eaux supérieures, et de maintenir les eaux montantes de la rivière dans ses digues.
Un fait est manifeste depuis quelque temps : la marée monte habituellement à Lierre à un niveau beaucoup plus élevé que de coutume. L'inondation des rues de la ville devient beaucoup plus fréquente, et la marée se fait sentir plus au loin en amont que ci-devant.
L'administration communale de Lierre s'est adressée à plusieurs reprises au département des travaux publics, pour signaler le mal, et pour obtenir l'exécution du travail décrété.
Je recommande ces justes demandes à l'honorable ministre des travaux publics, et je le prie d'y donner sans retards ultérieurs une solution favorable ; le décrètement de l'ouvrage dont je viens de parler date d'il y a dix ans.
Encore une remarque sur le régime habituel des eaux des Nèthes à Lierre.
On y retient beaucoup trop longtemps les eaux au printemps : on devrait tirer les écluses au plus tard le 15 mars, et commencer la baisse annuelle de la Petite-Nèthe un peu plus tôt que d'habitude ; l'on devrait fixer cette baisse vers la fin du mois de mai. Ces modifications seraient salutaires aux prairies et je ne vois pas d'objection à cette réforme.
Messieurs, encore deux mots.
J'appuie les recommandations faites par mon honorable ami M. de Kerckhove au sujet du service des postes dans la commune de Boisschot, et j'ai à faire une réclamation au sujet du même service dans la ville de Lierre.
Il est peu de villes en Belgique ayant un territoire aussi étendu. Avec sa banlieue, elle compte 10 mille habitants, et j'ose estimer le mouvement des recettes de son bureau de poste à 80 mille francs par an.
Et cependant ces 10,000 habitants et ce territoire si étendu n'ont que trois boîtes à lettres et le bureau des postes est fermé de midi à trois heures.
Je remarque, dans des localités bien moins importantes, que les boîtes y sont très soignées, bien plus multipliées, et que le bureau principal y est ouvert toute la journée.
Je trouve que la ville de Lierre a droit à ces améliorations dans le service. Je recommande la chose à l'honorable ministre. Je lui recommande (page 1231 aussi la commune de Berlaer, canton de Lierre. L'importance de cette commune lui donne droit, je pense, à deux distributions par jour.
M. d'Hane-Steenhuyseµ. - Mes honorables collègues M. de Zerezo et Notelteirs ont fait valoir au sujet de la Nèthe trop de considérations pour que je veuille encore abuser des moments de la Chambre en venant en produire d'autres.
Je me permettrai seulement d'appuyer sur quelques-unes d'entre elles.
Tout le monde sait, messieurs, que la Nèthe a été déclarée navigable et flottable par un décret de Marie-Thérèse. Sous le gouvernement hollandais, la Nèthe fut donnée à la province par arrêté du 19 décembre 1819. En 1854, le gouvernement reprit cette rivière à sa charge, mais à la condition de faire intervenir la province, la commune et les propriétaires riverains dans les frais d'entretien.
Cependant, le gouvernement prenant à sa charge cette rivière, devait aussi, d'après la législation sur la matière, entretenir cette voie navigable.
En 1858, la Chambre décréta l'exécution de travaux d'amélioration à la Grande Nèthe.
L'article premier du projet de loi portait que : « les dépenses à résulter de l'exécution des travaux à entreprendre dans le but d'améliorer, au double point de la navigation et de l’écoulement des eaux, le régime de la Grande Nèthe seront supportés par l'Etat, par la province d'Anvers et les communes et les propriétaires intéressés.
« Sont acceptées les offres faites, tant en leur nom qu'au nom des communes et propriétaires intéressés, par le conseil provincial d'Anvers, lesquelles offres s'élèvent, pour la province d'Anvers, à la somme de 222,500 fr. »
Ainsi que l'ont dit nos honorables collègues, tous les intéressés ont rempli religieusement les engagements qu'ils avaient contractés.
Les 222,500 fr. ont été versés et deux buts ont été atteints par les travaux exécutés aujourd'hui, c'est-à-dire qu'on a régularisé l'écoulement des eaux de la Grande Nèthe et qu'on a de cette manière amélioré jusqu'à un certain point la navigation, bien qu'à de certaines parties de l'année elle soit rendue difficile par la rapidité du courant.
Mais il y a un troisième point que le gouvernement semble perdre de vue complètement et qui a rapport à des intérêts de premier ordre pour cette partie de la province d'Anvers.
Je veux parler des irrigations.
On se plaignait, dans le temps, des inondations qui mettaient en péril les récoltes de foin et de regain.
Mais aujourd'hui après les travaux que le gouvernement a fait exécuter, les irrigations sont devenues impossibles ; par ce fait, les propriétés riveraines de la Grande Nèthe ont perdu, 40, 50 et même 60 p. c. de leur valeur ; les actes notariels sont là pour le prouver.
Il s'est présenté des circonstances, fort tristes il est vrai, j'entends parler de la peste bovine, où l'on a senti la nécessité d'avoir de bons pâturages pour y entretenir le bétail indispensable à la consommation du pays. Or, je crois qu'il faut prendre en sérieuse considération les services que peuvent rendre à cet égard les rives de la Nèthe.
Je pense donc, messieurs, que le gouvernement devrait compléter immédiatement les travaux en rendant possibles les irrigations. L'un des moyens d'arriver à ce but, indiqué par les ingénieurs et les hommes compétents, consiste à établir de distance en distance, le long de la Nèthe, des ponts à barrage.
De cette manière on pourrait retenir les eaux, à de certains moments, les laisser séjourner provisoirement sur les terres et puis leur faire reprendre le lit de la rivière.
Du reste, ce système n'est pas, si je ne me trompe, repoussé par le gouvernement, et je crois que l'ancien ministre des travaux publics, l'honorable M. Vanderstichelen, a reconnu que le moyen était bon.
Il faudrait, messieurs, si le système que j'indique était adopté, établir 5 ponts, savoir à Boisschot, à West-Meerbeek, à Zoerle-Parwys, à Itegem, puis enfin à Oosterloo.
La, dépense a été évaluée à cette époque de 150,000 à 160,000 fr.
Il est évident, messieurs, qu'en exécutant les travaux dont j'ai parlé, il ne pouvait entrer dans les intentions du gouvernement de rendre impossibles les irrigations, situation qui doit, chacun le comprendra, causer un grand préjudice aux propriétés riveraines.
Il s'agit donc d'assurer l'exécution de ce troisième point et de compléter le travail dans ce sens.
Mais, dit l'honorable ministre des travaux publics d'aujourd'hui, comme le disait aussi l'honorable M. Vanderstichelen, les intéressés ne font pas ce qu'ils devraient faire ; ils devraient constituer des wateringues, et alors le gouvernement saurait à qui parler et pourrait faire des propositions dans le sens d'un arrangement.
Mais, l'honorable M. Notelteirs l'a fort bien fait remarquer, pour constituer des wateringues, il faut avant tout la matière première, c'est-à-dire de l'eau ; or, comme c'est précisément l'eau qui manque et que les réclamations ont pour but de prier le gouvernement d'assurer les irrigations sur ces terrains, je crois que le devoir du gouvernement est de faire étudier sans retard la question et je ne doute pas que des wateringues ne se constituent immédiatement.
Pour preuve de ce que j'avance à cet égard, je tiens ici une pétition qui m’a été remise, avec prière de la déposer sur le bureau de la Chambre ; et puisque je suis occupé à en faire le rapport, je prierai la Chambre de vouloir en décider dès maintenant le renvoi à l’honorable ministre des travaux publics.
Voici, messieurs, cette pétition qui déclare que certains intéressés sont décidés à se constituer en wateringue, et je ne doute pas que devant une pareille décision, attestée parfaitement d'ailleurs par une foule de signatures, le gouvernement ne se décide à mettre la main à l'œuvre le plus tôt possible.
La pétition est ainsi conçue :
« Les soussignés, propriétaires des prés et pâturages, dans les communes d'Heyst-op-den-Berg, Boisschot et Itegem, de l'arrondissement de Malines et des communes d'Hulshout et Oosterwyck-Houtvenne, de l'arrondissement de Turnhout (province d'Anvers), ont l'honneur de vous exposer avec respect que, par suite des travaux de rectification, d'approfondissement et d'endiguement, exécutés à la Grande Nèthe, en vertu de la loi du 8 mars 1858, qui déclare cette rivière domaine de l'Etat, leurs propriétés ont perdu plus de la moitié de leur valeur productive, par suite de la suppression des irrigations dont ces terres étaient favorisées, avant l'exécution de ces travaux.
« Le chemin de halage exécuté par l'Etat a supprimé aussi les orifices des canaux irrigateurs existants, nommés laeken, qui permettaient aux eaux de venir arroser et fertiliser leurs prés et pâturages.
« L'Etat a enlevé ainsi à ces propriétés le bénéfice de l'irrigabilité qui leur donnait une grande partie de leur valeur.
« C'est afin de réparer ce dommage notable que les soussignés ont l'honneur de demander :
« 1° L'autorisation de se constituer en wateringue, en conformité de la loi de 1846 et des arrêtés royaux des 9 décembre 1847 et 10 août 1856.
« 2°" L'exécution d'un pont à barrage sur la Grande-Nèthe, sans lequel toute wateringue est impossible, pour fournir les eaux qui y seront nécessaires.
« Si les soussignés sollicitent de M. le ministre et de la législature la formation de la wateringue et la construction du barrage, c'est qu'il est démontré aujourd'hui, à l'évidence, que c'est par suite des travaux d'approfondissement, de rectification, d'endiguement et de la fermeture des canaux irrigateurs ou laeken, que l'irrigabilité a été supprimée par l'Etat.
« Ils prient donc la législature de vouloir accorder les fonds nécessaires pour exécuter le barrage réclamé, ou de prélever cette somme sur le crédit encore existant et voté par la loi du 8 mars 1858 ; ce fonds, d'ailleurs, a été constitué en partie par les propriétaires riverains réclamants, à l'aide d'une contribution extraordinaire, qui a été levée, pendant cinq années consécutives, sur les terres en souffrance, dans le but de les améliorer et non de les placer dans des conditions bien inférieures à celles où elles se trouvaient avant l'exécution des travaux effectués par l'Etat.
« En terminant, les soussignés rappellent respectueusement à M. le ministre des travaux publics que, dans la discussion qui eut lieu à la Chambre des représentants, en 1867 (séance du 20 février), son honorable prédécesseur, sur les représentations de MM. Nothomb, de Mérode et Coomans, a reconnu qu'il restait m travail à faire pour compléter ce que l'Etat avait commencé à la Grande-Nèthe.
« Depuis cinq années que ces travaux sont commence, les soussignés, propriétaires des prés et pâturages indiqués, ont perdu plus de la moitié des produits de leurs terres. Cette situation est réellement désastreuse, il ne serait pas équitable de la prolonger davantage.
« Ils se flattent de l'espoir que M. le ministre et les membres de la législature feront droit à leurs justes demandes, et ils leur présentent l'expression de leur haute considération.
« (Suivent les signatures)é
(page 1232) Voici donc, messieurs, une pièce officielle qui atteste qu'il est certain que les habitants des propriétés riveraines interviendront dans cette question des irrigations.
J’ose espérer que l’honorable ministre des travaux publics voudra bien étudier la question et présenter à la législature une demande de crédit qui permettra d’assurer le service des eaux de la Grande-Nèthe et les irrigations des propriétés riveraines.
M. le président. - La Chambre consent-elle au renvoi de cette pétition, en dehors du règlement ?
- Le renvoi est ordonné.
M. d’Hane-Steenhuyseµ. - Maintenant, messieurs, qu'il me soit permis de dire deux mots en réponse à l'honorable ministre des travaux publics pour ce qui touche au déplacement de la station d'Anvers.
L'honorable ministre, répondant à une interpellation de M. Delaet, a pris une position que je laisse à chacun le soin d'apprécier ; tout le monde en comprendra aisément le but et la pensée.
Je crois devoir rectifier certaines assertions de l'honorable ministre. A l'en croire, les choses se sont passées à Anvers tout autrement que partout ailleurs ; à l'en croire, c'est de la ville d'Anvers que dépend le détournement du chemin de fer, et l'établissement d'une station commerciale et c'est en vain que le gouvernement se joint au commerce pour obtenir ces deux faveurs. C'est le contraire qui est vrai : la ville et le commerce s'adressent en vain au gouvernement, de qui seul le détournement du chemin de fer et l'établissement de la station commerciale dépendent.
La ville d'Anvers, en soumettant ses plans au gouvernement, n'a fait qu'exprimer un vœu en ce qui concerne le détournement ; je puis donc repousser le reproche adressé à cette ville ; il n'est pas mérité.
Ce qui est vrai, c'est que la ville d'Anvers a consulté le gouvernement et lui a fait part de ses intentions quant à tous les travaux qu'elle avait entrepris. Ce qu'il y a de vrai aussi, c'est que lorsque le gouvernement a décrété la station commerciale et la gare de manœuvre, le 31 mai 1866, la ville d'Anvers n'avait pas été consultée préalablement sur ce projet.
Messieurs, depuis 1863, alors que l'ancienne administration existait encore, des correspondances très suivies, incessantes, ont été engagées entre la ville d'Anvers et M. le ministre des travaux publics, au sujet de l'emplacement et des installations de la station, et de tout ce qui se rattache à cette branche importante du service public.
Le plan de transformation des terrains militaires a été soumis officiellement à l'avis de M. le ministre des travaux publics, en ce qui concerne le chemin de fer, par lettre du 8 décembre 1864 ; et ce n'est qu'après la réponse de M. le ministre des travaux publics, du 19 du même mois, que le conseil communal a délibéré sur ce plan.
Il est à remarquer que lorsqu'il s'est agi du déplacement du chemin de fer et de tous les travaux qui s'y rattachent, il a été bien entendu que c'était un simple vœu qu'émettait le conseil communal.
En 1865, ainsi que l'a rappelé tantôt M. le ministre des travaux publics, une commission mixte fut nommée, le gouvernement décida que la commission n'émettrait qu'un avis, qu'elle n'aurait à prendre aucune espèce en résolution, cette résolution ne pouvant être prise que par le département des travaux publics et le conseil communal, c'est-à-dire après accord entre ces deux autorités.
Cependant, messieurs, par arrêté royal du 31 mai 1866, on déclara d'utilité publique l'exécution d'une gare de manœuvre et d'une station commerciale, et je le répète, le conseil communal n'en avait pas été prévenu.
Il est vrai, je me hâte de le dire, que la commission mixte avait examiné ce point ; mais elle ne l'avait adopté que provisoirement et très conditionnellement (note de bas de page non reprise dans la présente version numérisée) ; elle voulait voir si ces nouvelles installations ne mettraient pas obstacle au détournement du chemin de fer, et à combien s'élevait le coût de ces travaux ainsi que des changements que proposait M. le ministre des travaux publics.
L'arrêté royal parut ; la commission mixte ne fut pas au préalable saisie des études supplémentaires qui devaient être faites et qui devaient lui donner tous ses apaisements.
Ces renseignements ont donc été recueillis, ainsi que la commission mixte l'avait demandé, mais, je le répète, ils n'ont pas été soumis à la commission qui, du reste, n'a plus été réunie depuis le mois d'octobre 1865.
La ville d'Anvers n'a pas disposé de ses terrains sans l'approbation du gouvernement. M. le ministre de l'intérieur, auquel l'administration communale avait envoyé un projet de convention avec les plans à l'appui, a soumis ces pièces à son collègue du département des travaux publics ; peu de temps après, M. le ministre des travaux publics envoya à l'administration communale un cahier d'observations, mais dans lequel ne se trouvait aucune remarque au sujet du chemin de fer, ni aucune indication touchant ce que le ministre comptait faire, quant aux terrains nécessaires à l'établissement de la station commerciale et de la gare de manœuvre.
Enfin, le 11 octobre 1865, parut l'arrêté royal portant approbation de la convention qui cédait les terrains à la société immobilière.
Je le répète, c'est seulement le 31 mai 1866 que parut l'arrêté royal décrétant d'utilité publique la gare commerciale et la gare de manœuvre.
On devait donc parfaitement savoir, au département des travaux publics ainsi qu'au ministère de l'intérieur, que la ville avait aliéné ses terrains. On avait eu antérieurement le temps nécessaire pour se mettre d'accord sur les terrains à emprendre pour le détournement du chemin de fer.
Cependant une chose curieuse s'est produite à l'occasion de l'arrêté royal dont je viens de parler et qui décrète d'utilité publique la station commerciale : c'est qu'il fut considéré comme nul et non avenu ; et voici pourquoi : le gouvernement avait oublié probablement de faire à ce sujet l'enquête de commodo et incommodo ; averti par les délégués de l'administration communale qui faisaient partie de la commission mixte, que ces terrains reviendraient à une somme d'environ 4 millions, le gouvernement fit faire une expertise, il fit évaluer ces terrains par un géomètre juré, le résultat fut qu'ils coûteraient 5 millions.
Ce chiffre, à ce qu'il semble, parut trop élevé à M. le ministre des travaux publics, et il ne donna pas suite à l'arrêté royal du 31 mai.
Le gouvernement ayant connaissance de ce qui se faisait à Anvers, ayant sous les yeux le plan de l'ingénieur accepté par le conseil communal et envoyé à l'avis de M. le ministre, des travaux publics, s'il avait voulu s'arranger, aurait parfaitement pu s'entendre en temps utile quant aux terrains à conserver pour l'établissement de la nouvelle station.
Quoi qu'il en soit, que la ville d'Anvers fît elle-même l'appropriation des terrains ou qu'elle la confiât à une société, dans tous les cas, les terrains ont une même valeur ; le prix qu'ils valent, le gouvernement aurait dû le payer, et si le gouvernement croit que la compagnie concessionnaire en exagère la valeur, il lui reste un moyen bien simple, c'est d'exproprier. L'expertise judiciaire fixera l'exacte valeur des terrains.
Permettez-moi, messieurs, de finir par une simple remarque. De deux choses l'une : ou le travail que nous demandons est nécessaire, et dans ce cas il faut l'exécuter, dût-il coûter 5 millions ; ou il est inutile, et alors il faut y renoncer, coûtât-il beaucoup moins.
Quiconque s'est occupé de cette question, quiconque connaît Anvers sait que ce détournement du chemin de fer est indispensable, et je profite même de la présence de M. le ministre de la guerre pour dire à la Chambre que le magnifique travail topographique de l'état-major belge, a marqué sur le plan d'Anvers le détournement du chemin de fer tel que l'indiquait dans son plan l'ingénieur de la ville.
Je crois, messieurs, avoir démontré à la Chambre qu'il n'y a rien à reprocher à l'administration communale de la ville d'Anvers. Elle se serait mise très volontiers d'accord avec M. le ministre et j'en appelle aux souvenirs de l'honorable M. Vanderstichelen ; le collège s'est rendu plusieurs fois dans son cabinet pour discuter cette question, et même, en dernier lieu, il s'est rendu auprès de l'honorable M. Jamar pour lui parler du détournement du chemin de fer. L'honorable M. Jamar a demandé au collège de vouloir faire faire, par l'ingénieur de la ville, un travail explicatif et a promis d'étudier la question, après quoi la (page 1233) commission mixte pourrait reprendre ses opérations. Si jusqu'aujourd'hui ce travail n’est pas encore parvenu à M. le ministre, ce n'est pas encore à la ville d'Anvers qu'il doit s'en prendre, mais l'ingénieur est tombé malade il y a plus d'un mois et il vient seulement d'entrer en convalescence. Il pourra donc, dans un temps donné, satisfaire au désir exprimé par l’honorable ministre.
MfFOµ. - Messieurs, les faits relatifs au déplacement de la station de la ville d'Anvers se trouvent constatés par une correspondance, et par conséquent il est facile d'établir la vérité. Je pense qu'il y a certaines inexactitudes dans l'exposé qui a été fait tout à l'heure par l'honorable M. d'Hane, et mon honorable collègue, M. le ministre des travaux publics, ne manquera pas de les rectifier.
Mais je dois faire remarquera la Chambre que, depuis les actes fâcheux qui avaient justement soulevé les plaintes du département des travaux publics, et dont la responsabilité retombe sur l'administration communale, des circonstances nouvelles se sont produites.
Le gouvernement a annoncé l'intention de disposer des terrains de la citadelle du Sud en même temps qu'il faisait connaître ses projets quant aux fronts intérieurs de la citadelle du Nord. Eh bien, nous pensons qu'il y a quelque moyen de trouver là les éléments d'une solution satisfaisante des difficultés qui se sont présentées. En ce moment on étudie un projet d'appropriation des terrains de la citadelle du Sud, et j'espère que le résultat de cet examen sera de nature à satisfaire aux grands et véritables intérêts de la ville d'Anvers. Je regrette que le terme si rapproché de la clôture de la session ne laisse pas le temps nécessaire pour mûrir et coordonner les idées qui se sont fait jour et pour arrêter un travail d'ensemble qui aurait pu être communiqué à la Chambre.
Les terrains de la citadelle du Sud, comme on le sait, sont très considérables ; ils comprennent plus de 100 hectares, situés le long de l'Escaut, par conséquent, éminemment propres aux établissements commerciaux. Des établissements maritimes considérables peuvent y être créés, bassins, docks, entrepôts, entrepôt franc, peut-être ; tout ce qui est nécessaire, en un mot, pour assurer le développement de plus en plus grand du commerce d'Anvers. Les quais et les bassins actuels seront bientôt insuffisants et le domaine que nous possédons acquiert ainsi de jour en jour une plus grande valeur.
Sur ces mêmes terrains, à côté des établissements maritimes, on pourra établir une station qui, utile à la généralité des habitants, assurera d'une manière complète le service des nouveaux établissements maritimes qui s'y trouveront ; au moyen de certaines modifications au tracé du chemin de fer, on les raccorderait avec les établissements maritimes actuels. Telles sont les idées générales que l'on étudie en ce moment et dont la réalisation répondrait, sans doute, aux plus vastes espérances de la ville d'Anvers, Nous pensons que jusqu'à ce que ce projet ait pu être mûri et étudié dans ses détails, il sera nécessaire de mettre un terme aux récriminations, parfaitement injustes au surplus, au sujet du déplacement de la station.
Le gouvernement est bien déterminé à disposer des terrains de la citadelle du Sud et à préparer les projets que j'indique, et qui doivent donner toute leur valeur à cette propriété. Il me semble que les vues que je viens exposer sont de nature à donner pleine et entière satisfaction à la ville d'Anvers.
MtpJµ. - Messieurs, il y a un point sur lequel je désire qu'il ne reste aucun doute dans l'esprit de la Chambre.
L'honorable M. d'Hane disait tout à l'heure que personne ne se trompait sur le mobile qui m'avait porté à parler de la situation d'Anvers comme je l’avais fait tout à l'heure. Il me semble que ce mobile est très naturel. J'ai répondu à un discours de l'honorable M. Delaet, qui semblait accuser le gouvernement de la situation dont se plaignent à la fois le commerce d'Anvers et l'administration des chemins de fer.
L'honorable M. d'Hane déclare que dans mes allégations il en est une qui est erronée, à savoir que l'administration communale d'Anvers a fait ce que n'eussent point manqué de faire les autres administrations communales du pays ayant à s'occuper d'un projet aussi important que celui que j'ai indiqué. Il déclare que l'administration communale s'est mise d'accord avec l'Etat et, en temps utile, a demandé son concours.
Messieurs, il y a des pièces qui prouvent la sincérité de mes allégations.
C'est par une circonstance toute fortuite que le département des travaux publics a appris l'existence de ce projet.
Il demanda vers la fin de 1864 l'assentiment de la ville d'Anvers à la construction de quelques voies derrière l'entrepôt de cette ville et voici un extrait de la réponse qu'il reçut sous la date du 8 décembre 1864 du collège des bourgmestre et échevins :
« Nous ne saurions vous dissimuler, M. le ministre, qu'en l'état où en est arrivée l'étude du plan général d'appropriation des terrains militaires, votre proposition nous embarrasse sérieusement.
« D'un côté, il nous serait agréable de pouvoir vous obliger ; mais, d'autre part, les intérêts de la ville qui sont en jeu sont si majeurs que le gouvernement lui-même, nous en sommes convaincus, se fera un devoir d'en tenir compte.
« Vous n'ignorez pas, M. le ministre, que le plan général de votre ingénieur comporte le détournement du chemin de fer, le déplacement de la station des voyageurs, une station commerciale, une gare de manœuvre, l'adjonction de nouvelles lignes, de grands espaces réservés au quai du Rhin et du Kattendyk, pour une station à transit et pour l'organisation d'un service d'exportation de charbon.
« Ces diverses questions se trouvant détaillées dans un mémoire annexé au plan, nous croyons pouvoir nous borner, M. le ministre, à vous adresser ces documents, avec prière de vouloir bien les examiner avec toute la bienveillance que mérite ce magnifique ensemble de combinaisons heureuses. »
Vous le voyez, messieurs, le plan avait été complètement terminé en l'absence de toute participation de l'Etat. Vous venez d'entendre par la dépêche de l'administration communale elle-même quelle était l'importance des travaux dont l'exécution incombait à l'Etat.
Mon honorable prédécesseur répondit à cette communication par une dépêche du 19 décembre, dans laquelle se trouve le paragraphe suivant :
« D'après l'opinion unanime des fonctionnaires que j'ai consultés, le plan de M. l'ingénieur Van Bever ne réalise point, pour les établissements maritimes considérés dans leurs rapports avec les chemins de fer, les améliorations auxquelles le commerce a droit de s'attendre ; il présente, au contraire, des défauts tellement graves que son adoption doit être considérée comme absolument inadmissible. »
Puis également celui-ci :
« Vous jugerez sans doute aussi que le conseil communal ne pourrait, quant à présent, s'occuper utilement de ce projet d'ensemble. »
Nonobstant ces indications si précises du département des travaux publics, le conseil communal d'Anvers discuta la proposition, dans ce même mois de décembre, et si l'on se rapporte au compte rendu, fait par le Précurseur, des séances du conseil, il ne fut pas même question dans cette séance de la lettre que le collège échevinal venait de recevoir du ministre des travaux publics.
Puis-je, messieurs, prouver d'une manière plus complète la sincérité de mes allégations ?
II y a en outre, pour indiquer à la chambre quel esprit animait les délégués de l'administration communale, un fait qu'il me suffira de lui citer. C'est que ce furent les membres de la commission qui avaient adopté, le 12 octobre 1865, le plan de M. Vandersweep qui firent, en 1866, un rapport à l'administration communale pour combattre ce projet et pour engager cette administration à y faire opposition.
Il y a là, messieurs, des faits précis qui ne laisseront aucun doute sur le fondement de mes allégations.
M. Jacobsµ. Il ne me faudra que quelques instants pour rectifier les allégations erronées de l'honorable ministre des travaux publics.
Il nous a fourni la preuve lui-même que, dès8, le collège échevinal d'Anvers a communiqué à son département le plan soumis au conseil communal, avec un mémoire explicatif de l'ingénieur de la ville d'Anvers à l'appui.
C'est en janvier 1865 que ce plan est adopté provisoirement par le conseil communal et le 29 mars il fait un appel aux sociétés financières de toute l'Europe, appel connu du gouvernement comme de l'univers entier, puisqu'il a été publié par les principaux journaux financiers.
Le cahier des charges annexé à l'appel aux sociétés portait textuellement cette réserve :
« L'exécution des travaux indiqués au plan, en ce qui concerne la dérivation du canal de la Campine et le détournement du chemin de fer dépend du gouvernement, et à cet égard la ville ne prend aucun engagement. »
(page 1234) Le cahier des charges donnait, en outre, aux compagnies « la faculté de présenter toutes les modifications qu'elles croiraient utiles, tant dans leur intérêt que dans celui de la ville. »
Il leur était accordé jusqu'au Ier juin pour faire des offres.
Le 28 juillet 1865, le conseil communal adopta les conventions provisoires conclues entre le collège échevinal et M. Ybry, par rapport à la vente des terrains des anciennes fortifications. Un arrêté royal du 11 octobre les approuva.
Vous le voyez, messieurs, avant la décision définitive, dès 1864, le gouvernement connaissait les projets de l'administration communale anversoise. II n'en a rien ignoré, il les a même approuvés.
Est-ce leur décrétement qui a entravé l'établissement d'une station commerciale ? Non, la preuve en est dans cet arrêté royal du 31 mai 1866, qui décrète l'exécution de cette station, lorsque depuis près d'un an déjà la ville d'Anvers avait vendu ses terrains à la compagnie immobilière.
Un an après la vente, vous décrétez la station et aujourd'hui vous viendrez prétendre que, si nous ne l'obtenons pas, c'est parce que nous avons vendu les terrains militaires sans vous consulter !
Depuis vous avez renoncé à donner suite à l'arrêté royal ; vous l'avez appris à la ville d'Anvers par lettre du 5 janvier 1867 ; vous y avez renoncé parce que, vérification faite, vous avez constaté que la station commerciale coûterait plus cher que vous ne l'aviez pensé.
C'est donc une question d'argent ; c'est donc parce que vous ne voulez pas dépenser, pour les installations du chemin de fer à Auvers, au delà d'une telle somme, et que cette somme est insuffisante, c'est pour cela que nous n'aurons pas notre station commerciale ; la faute n'en incombe point au conseil communal.
Ce point me paraît vidé.
Deux mots maintenant en réponse à M. le ministre des finances.
Depuis quelque temps déjà un journal d'Anvers, doté parfois de la primeur des nouvelles qui s'élaborent dans les bureaux ministériels, avait fait entrevoir la transformation de la citadelle du Sud en station. Ce journal n'était, il est vrai, pas moins énigmatique que M. le ministre des finances.
D'ordinaire nous ne recevons confidence des projets de MM. le ministres que lorsqu'ils se traduisent eu projets de loi. Puisqu'aujourd'hui l'on s'est départi de cette règle en nous fournissant quelques explications sur la transformation de la citadelle du Sud, je demanderai à l'honorable ministre des finances de vouloir bien être un peu plus précis, de vouloir bien, avant la fin de la session, ou communiquer ses plans à la Chambre, ou nous donner quelques détails un peu plus circonstanciés.
Si son projet prenait corps, nous pourrions apprécier jusqu'à quel point nous pouvons compter voir s'élever une station commerciale sur ces terrains, jusqu'à quel point le détournement du chemin de fer se rattache à ce plan, jusqu'à quel point il se prête au développement de nos établissements maritimes. Il ne serait pas moins intéressant de savoir si c'est le gouvernement qui se chargera de créer ces nouveaux établissements, ou bien si l'honorable ministre des finances a trouvé l'amateur à raison de 18 millions qu'il attendait au mois de janvier !
Je désire donc, si cela ne contrarie pas trop M. le ministre des finances, qu'avant la fin de la session il nous donne des détails plus circonstanciés sur les projets du gouvernement par rapport à la citadelle du Sud.
MfFOµ. - Je suis vraiment étonné du ton de l'honorable membre. Je croyais tout au moins qu'il allait me remercier de l'annonce que j'avais faite que le gouvernement se préoccupait d'un intérêt important pour Anvers ; loin de là, c'est une occasion pour l'honorable membre de manifester son mécontentement.
M. Gerritsµ. - Nous sommes très heureux.
MfFOµ. - Vous êtes très heureux !... Personne ne s'en serait douté, en entendant le discours de l'honorable M. Jacobs ; mais enfin, si vous êtes heureux, j'en suis extrêmement content. C'est la première fois qu'un sentiment de satisfaction nous est témoigné par la députation d'Anvers.
M. Gerritsµ. Nous voudrions être plus heureux encore, et c'est pour cela que nous désirons avoir du certain.
MfFOµ. - J'ai dit et je répète que le gouvernement a pris la résolution de disposer des terrains de la citadelle du Sud ; que dans ce moment, au département des finances qui possède ce domaine, une commission composée de délégués de divers départements ministériels étudie le moyen d'en tirer le meilleur parti possible, dans l'intérêt des finances de l'Etat et dans l'intérêt de la ville d'Anvers. (Interruption.)
Permettez-moi ; ne vous inquiétez pas...
M. d’Hane-Steenhuyseµ. - Nous sommes très tranquilles.
MfFOµ. - C'est notre affaire...
- Un membre. - C'est l'affaire du pays.
MfFOµ. - Laissez moi donc achever ma phrase : c'est notre affaire d'arrêter un plan, un projet, C'est de cela que nous nous occupons ; je vous fais connaître ce qui se passe en ce moment ; et au lieu de paraître contrariés, il faudrait bien plutôt nous remercier, puisque vous devez trouver dans nos paroles une nouvelle preuve des intentions qui animent le gouvernement d'exécuter les résolutions qu'il a annoncées à la Chambre.
Eh bien, je vous indique quelques idées générales, je donne les grandes lignes de l'avant-projet qui s'élabore ; il n'y n là rien de mystérieux, sur quoi nous ayons à donner d'autres explications aujourd'hui ou demain.
Avec la disposition projetée des terrains de la citadelle du Sud, il est clair que l'établissement d'une station sur cet emplacement est de nature à donner une grande valeur à cette propriété domaniale, et par conséquent, à provoquer les offres des compagnies pour la réalisation de nos projets. L'établissement d'une station donne aux terrains qui l'avoisinent un prix considérable. Les constructions sont inévitables, indispensables...
M. Jacobsµ. - C'est une très bonne spéculation.
MfFOµ. - Félicitez-vous de cette bonne spéculation.
M. Jacobsµ. - Nous vous en félicitons.
MfFOµ. - Je vous en remercie.
Il est incontestable que la ville d'Anvers aura besoin d'établissements maritimes ; vous avez 1,800 mètres de quais le long de l'Escaut, l'étendue des terrains disponibles permet de créer des établissements maritimes considérables, tout ce qui est de nature à assurer le développement du commerce d'Anvers.
Voilà ce que nous rêvons pour cette ville, voilà le résultat auquel nous voulons arriver, pendant que vous nous faites de l'opposition...
- Un membre. - Elections !
MfFOµ. - L'honorable membre, qui s'y connaît, m'interrompt par le mot : « Elections ! » Je crois, en effet, que c'est un peu en vue des élections qu'on a parlé, qu'on a fait des reproches au gouvernement, et vous comprenez parfaitement bien que nous ne sommes pas disposés à nous taire, pour laisser méconnaître ou incriminer nos intentions et pour jouer ainsi le jeu de nos adversaires.
M. Jacobsµ. - Et faire des coups de théâtre.
MfFOµ. - Je ne sais où sont les coups de théâtre. Mais si vous pouviez en faire à votre profit, vous en abstiendriez-vous ? (Interruption.)
Je reprends donc. Nous avons fait connaître, lors de la reconstitution du cabinet, les projets que nous voulions exécuter, et les conditions qui nous semblaient les rendre pratiques. Ils sont subordonnés à la réalisation des terrains de la citadelle du Sud. Nous indiquons aujourd'hui les idées générales d'un avant-projet d'appropriation, conçu en vue de donner à ces terrains la plus grande valeur possible, ce qui est bien le meilleur moyen d'accroître les chances de succès de nos combinaisons. Créer des bassins et des docks, placer à côté d'eux une station, relier les établissements maritimes nouveaux à ceux qui existent déjà, ce sout là des mesures qui paraissent propres à faire atteindre notre but. Au Nord, des installations de chemins de fer seront indispensables pour le service des établissements maritimes...
M. d’Hane-Steenhuyseµ. - Vous laissez subsister la station actuelle ?
MfFOµ. - Je ne décide absolument rien. Ce n'est pas à moi de dire ce que sont les nécessités, les exigences de l'exploitation du chemin de fer. Mais il me semble qu'il faut bien une station pour le service des bassins, de l'entrepôt, en un mot pour les besoins du commerce. Ce que j'indique, c'est qu'il y aurait une station sur les terrains de la citadelle du Sud, et que les établissements situés aux deux extrémités de la ville seraient reliés entre eux. Voilà ce que nous cherchons à réaliser.
Eh bien, quand nous aurons consacre une partie des terrons à des (page 1235) établissements maritimes, et qu'une autre partie sera affectée à une station, n'aurons-nous pas donné une immense valeur au reste de la propriété ? Cela n'est-il pas évident ? N'est-ce pas ainsi que l'opération deviendra pratique pour une compagnie ? N'est-ce pas ainsi qu'elle sera possible ?
Nous ne trouverons pas d'amateurs, dites-vous, au chiffre de dix-huit millions. J'ai fait remarquer déjà, dans une autre circonstance, combien étaient difficiles les évaluations des propriétés de ce genre, dans les conditions où elles ont été faites. Indépendamment de toute autre cause, les estimations peuvent varier singulièrement, selon qu'on se place au point de vue d'une réalisation prochaine ou d'une réalisation plus ou moins éloignée. Il y a d'ailleurs, comme j'en ai fait aussi l'observation, une marge assez grande entre les produits que nous espérons de la vente de divers domaines militaires, et les sommes qui sont nécessaires pour exécuter les travaux que nous avons projetés Nous ne pouvons, en tout cas, mieux faire que de chercher à porter ces terrains à leur plus grande valeur.
Reportez donc à vos commettants l'expression des bons sentiments du gouvernement et dites-leur quels sont les projets qu'il voudrait accomplir dans l'intérêt de la ville d'Anvers.
M. Rogierµ. - Messieurs, comme ancien représentant d'Anvers, j'ai recueilli avec grande satisfaction les paroles de M. le ministre des finances et je le félicite de n'avoir pas hésité à répéter, dans la discussion qui vient de s'engager, les déclarations qu'il avait faites au début de la session.
J'étais, pour ma part, plein de confiance dans ses premières déclarations, mais il n'en était pas de même ailleurs.
Tous les jours, je lisais dans les journaux d'Anvers qui combattent le gouvernement que c'étaient des paroles en l’air, de belles promesses qui n'étaient pas sérieuses, que M. le ministre des finances était opiniâtrement résolu à ne rien faire pour Anvers.
J'espère, messieurs, qu'aujourd'hui les honorables représentants d'Anvers auront foi dans les déclarations réitérées de M. le ministre et qu'ils reporteront à leurs commettants la conviction et la satisfaction dont, selon moi, ils doivent être pénétrés.
A première vue, il me semble que la combinaison indiquée par M. le ministre des finances est de nature à donner pleine satisfaction à tous les intérêts grands et petits, ainsi qu'à tous les vœux raisonnables de la ville d'Anvers. Et si j'ai un regret à exprimer, c'est que les études ne soient pas encore assez avancées pour que l'honorable ministre des finances puisse nous présenter un projet de loi avant la fin de la session.
Quoi qu'il en soit, je crois qu'aujourd'hui il n'est plus un seul homme de bonne foi qui puisse mettre en doute la sincérité et l'efficacité des déclarations du gouvernement.
Quant à moi, je le répète, comme ancien représentant d'Anvers, ayant toujours pour cette grande et belle cité des sentiments de sympathie et de reconnaissance, je ne puis que remercier l'honorable ministre des finances des déclarations qu'il vient de réitérer au nom du gouvernement, et j'espère que les représentants actuels d'Anvers se joindront à moi (s'ils ne le font pas aujourd'hui, ils le feront plus tard), pour remercier le gouvernement des grandes résolutions qu'il vient d'annoncer.
M. Jacobsµ. - Le gouvernement me paraît avoir une grande soif de remerciements, et l'honorable M. Rogier se hâte un peu d'adresser les félicitations demandées.
M. Rogierµ. - Demandées ! Ce n'est pas à moi qu'elles ont été demandées, c'est à vous.
M. Jacobsµ. - C'est vrai...
M. Rogierµ. - Je suis parfaitement indépendant.
M. Jacobsµ. - Vous eus parfaitement indépendant. Nous aussi : et, si l'on nous demande des félicitations, on peut bien vous en demander de même.
Nous attendrons, nous, pour remercier le gouvernement, tout en lui sachant gré dès à présent des intentions qu'il énonce, quelque nuageuses qu'elles soient. (Interruption)... Mais vous dites vous-mêmes que vous rêvez pour Anvers un brillant avenir.... (Nouvelles interruptions.)
Nous attendrons que vous ayez cessé de rêver, que vous nous apportez une réalité ; jusque là nous pouvons vous savoir gré de vos intentions ; c'est trop exiger que de vouloir de suite des remerciements, comme si vous nous aviez déjà tout donné.
Anvers, selon l'honorable M. Rogier, obtient tout ce qu'elle demande. L'honorable membre se trompe.
M. Rogierµ. - J'ai dit : Ce qu'elle peut raisonnablement désirer.
M. Jacobsµ. - Ce qu'elle peut raisonnablement désirer ! C'est une question d'appréciation sur laquelle nous pouvons différer.
En ce qui concerne la démolition de la citadelle du Sud d'Anvers, et sa vente, je ferai remarquer à la Chambre, pour qu'on ne nous fasse pas trop débiteurs de M. le ministre des finances et du gouvernement, que c'est là une question décidée depuis longtemps en principe ; dès 1864 elle l'était pour M. le ministre de la guerre, qui négociait avec des amateurs ; dès 1864 elle était pour l'honorable M. Dechamps, lorsqu'il fut sur le point d'arriver au pouvoir ; cette question, en un mot, n'était plus qu'une question de temps.
Evidemment, nous savons gré au gouvernement de ne plus en retarder sa solution. Il eût pu l'entraver encore ; il n'eût pu l'empêcher.
Du moment qu'il se décide à la vente, son intérêt, plus que celui d Anvers, lui conseille de tirer des terrains le parti le plus fructueux ; y placer une station, y mettre des bassins, est sans contredit l'une des affectations les meilleures, au point de vue du trésor.
Quant à la citadelle du Sud donc, si les intentions de M. le ministre des finances se réalisent, nous obtiendrons satisfaction. Mais, en face de la citadelle du Sud, il y en a une autre, et je serais charmé que M. le ministre des finances voulût bien nous annoncer, à cet égard, la réalisation prochaine, non seulement de ses promesses, mais de ses promesses complètes et augmentées, comme certaines feuilles anversoises nous le font entrevoir, et comme j'espère qu'un jour elles se réaliseront.
MfFOµ. - L'honorable M. Jacobs se déclare à peu près satisfait en ce qui concerne la citadelle du Sud. Mais il est quitte de reconnaissance, parce que c'est une affaire assez vieille dont beaucoup d'autres s'étaient occupés... même de la station, à ce qu'il paraît. Je m'attendais bien à cela. Cela ne m'étonne pas du tout. Mon opinion n'a pas varié sur les causes de l'opposition qui nous est faite ; elles sont purement politiques, et l'on serait bien malheureux si l'on n'avait pas quelque prétexte pour se plaindre du gouvernement. On est donc à peu près satisfait quant à la citadelle du Sud. Mais la citadelle du Nord !
J'ai dit tantôt et je ne puis que répéter que le gouvernement tiendra les engagements qu'il a pris devant la Chambre ; qu'il tiendra la promesse qu'il a faite de démolir les fronts intérieurs de la citadelle du Nord.
M. Coomans. - D'examiner, avez-vous dit.
MfFOµ. - Permettez. J'ai dit en effet, au moment où j'annonçais la constitution du cabinet, que le ministre de la guerre s'était engagé à examiner si les fronts intérieurs pouvaient être démolis et remplacés par un mur crénelé. Depuis, M. le ministre de la guerre a clairement fait connaître son opinion ; il a déclaré à la Chambre que les fronts intérieurs peuvent disparaître. Il s'occupe des moyens de réaliser ce projet. Cela ne peut être improvisé. Il faut d'ailleurs que d'autres travaux soient faits pour que ceux-là puissent être exécutés.
Lorsque le moment sera venu, lorsque l'exécution des projets sera devenue possible, les promesses du gouvernement s'accompliront sans restriction ni réserve. Ceci n'est pas nuageux, j'imagine.
M. Jacobsµ. - Messieurs, puisque nous en sommes aux explications et que M. le ministre des finances devient de moins en moins nuageux, je lui demanderai encore, d'abord si, dans l'examen auquel il s'est livré et qui a abouti déjà à la substitution du mur crénelé aux fronts intérieurs, il ne comprendra pas la disparition même de ce mur crénelé qu'il pourrait bien sacrifier à son tour ; en deuxième lieu, si ce mur crénelé, en supposant qu'il s'édifie, sera, dans ses projets, précédé, comme les fronts intérieurs en terrassement, d'une zone de servitudes du côté de la ville ?
MfFOµ. - Le petit colloque qui s'est établi est assez étrange. Non seulement il nous faudrait entrer dans tous les détails d'un projet qui est à l'étude ; mais il nous faut répondre encore à diverses autres questions. C'est là une petite stratégie à laquelle je me prête bien volontiers.
L'honorable membre n'est pas complètement satisfait quoique je devienne de moins en moins nuageux. II désire savoir si l'on ne pourrait pas dire encore quelque chose quant au mur crénelé. Ne pourrait-on y renoncer ? Nous sommes, en vérité, en si bonnes dispositions que nous ne nous refusons pas à faire examiner cette question.
(page 1236) L'honorable membre sera peut-être satisfait de ma réponse. Mais ce n'est pas assez. L'honorable membre veut tout savoir. Que deviennent, dit-il, les servitudes intérieures ? Je rappellerai, d'abord, quant à la question des servitudes, que nous avons déjà fait connaître nos intentions. II y a longtemps que nous avons soumis une proposition à la Chambre, ayant pour objet de consacrer, dans la zone des servitudes, le droit pour le propriétaire d'entretenir, de réparer, de reconstruire même les édifices qui s'y trouvent, dans les conditions actuelles.
A cette occasion, nous avons également proposé de réduire les servitudes de la citadelle du Nord, et de les limiter à une esplanade s'étendant jusqu'au Vortche-Schyn. (Interruption.) Le rapport fait sur ce projet réserve le point de savoir si l'esplanade peut exister à titre de servitude ou si elle doit faire l'objet d'une acquisition par l'Etat. Le gouvernement aurait bien le droit d'acquérir une esplanade, si son droit de servitude n'était pas reconnu. Il n'y a pas lieu, par conséquent, de discuter ici cette question.
Je crois que ceci doit enfin satisfaire l'honorable membre.
- La séance est levée à 5 heures et un quart.