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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 17 décembre 1867

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1867-1868)

(Présidence de M. Dolezµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 416) M. de Moor, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

Il donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.

La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

Il présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre :

« Le sieur Pascal Mostés, journalier aux Awirs, né à Mouline (Italie), demande la naturalisation avec exemption du droit d'enregistrement. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Le conseil communal d'Enghien se plaint d'une décision de M. le ministre de l'intérieur, qui rejette une réclamation de ce conseil contre la nomination d'office d'une institutrice communale à Enghien. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Tribout demande que le remplaçant de son fils Eloi, tombé au sort l'an dernier, et décédé le 12 de ce mois des suites d'un accident à la station de Thulin, soit libéré du service militaire. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Boom protestent contre les propositions de la commission militaire et demandent que le gouvernement soit invité à présenter un projet de loi qui abolisse le tirage au sort pour la milice. »

« Même demande d'habitants de Stabroeck. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Bruxelles demandent le prompt achèvement des travaux de la nouvelle gare du Midi. »

- Même renvoi.


« Le sieur De Blende demande la réduction du droit d'accise sur la fabrication des glucoses. »

- Renvoi à la commission permanente d'industrie.


« Le sieur Wadeleux prie la Chambre d'abroger l'article 31 de la loi du 21 mai 1819 ou du moins de le rendre inapplicable aux protêts. »

- Renvoi à la commission chargée d'examiner le projet de loi sur les protêts.


« Les habitants de Dison demandent la prompte suppression des jeux de Spa. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget de l'intérieur.


« Des habitants d'Anvers demandent l'abolition des lois sur la milice et des armées permanentes et la réalisation de leurs droits de citoyens. »

- Renvoi aux sections centrales chargées d'examiner les projets de loi sur la milice et sur l'organisation de l'armée.


« Des habitants de Dixmude protestent contre les propositions de la commission militaire et demandent l'abolition du tirage au sort pour la milice et la suppression des armées permanentes. »

- Renvoi aux sections centrales chargées d'examiner les projets de lois sur la milice et sur l'organisation de l'armée.


« Des habitants de la Gleize prient la Chambre de rejeter tout projet d'organisation militaire qui ne tendrait pas à diminuer notablement les charges qui pèsent sur les populations, et de s'opposer notamment à toute augmentation du contingent de l'armée. »

- Renvoi aux sections centrales chargées d'examiner les projets de lois relatifs à l'organisation militaire et au contingent de l'armée.


« Des facteurs de la poste aux lettres à Braine-l'Alleud demandent une augmentation de traitement ou une gratification. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics.


« Le sieur Vandenberghe transmet une pétition de l'assemblée des notaires de l'arrondissement de Fumes priant la Chambre de supprimer l'article 15 du projet de loi sur l'organisation judiciaire ; d'interdire aux greffiers de procéder aux ventes publiques de meubles et effets mobiliers ; de maintenir la prérogative du notariat dans toute l'intégrité de son institution et de limiter l'attribution des huissiers aux ventes publiques de meubles au comptant. »

- Dépôt sur le bureau pendant le vole définitif du projet de loi sur l'organisation judiciaire.


« Par sept pétitions, des habitants de Roulers prient la Chambre de rejeter le projet de loi sur la milice et de ramener à 25 millions le chiffre du budget de la guerre.

« « Même demande d'habitants de Gits. »

- Renvoi aux sections centrales chargées d'examiner le projet de loi sur la milice et le budget de la guerre.


« Par message du 16 décembre le Sénat informe la Chambre qu'il a adopté le budget de la dette publique pour l'exercice 1868. »

- Pris pour information.


« M. David demande un congé d'un jour. »

- Accordé.

Projet de loi accordant des crédits provisoires

Rapport de la commission

M. Hymans. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la commission qui a examiné les crédits provisoires à valoir sur les budgets de dépense de l'exercice 1868.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

M. le président. - Je vous propose, messieurs, de mettre la discussion de ce projet de loi à l'ordre du jour de demain, ainsi que le second vote de la loi d'organisation judiciaire,

- Cette proposition est adoptée.

Projet de loi d’organisation judiciaire

Motion d'ordre

M. Liénartµ. - La Chambre venant de décider qu'elle procédera demain au second vote de la loi d'organisation judiciaire, je crois faire chose utile en signalant, dès aujourd'hui, une modification que je me propose de lui soumettre, parce qu'il y a toujours quelque danger à apporter, séance tenante, des amendements à une loi.

D'après le nouveau mode adopté pour l'élection des membres des tribunaux de commerce, les notables d'aujourd'hui sont remplacés par les commerçants payant, du chef de leur patente, une somme de 42 fr. 32 c.

Je suis bien loin de critiquer cette innovation qui, du reste, était réclamée depuis fort longtemps ; mais comme il est possible, je devrais peut-être dire probable, que les passions politiques se mêleront à ces nominations, ce que, pour ma part, je regrette profondément, mais ce qui est arrivé déjà sous l'ancienne législation, et ce qui se produira plus fréquemment encore sous la nouvelle, je prie instamment le gouvernement de prendre ici les précautions qui assurent ailleurs la sincérité des élections.

Puisque nous sommes entrés en plein dans le système électif, je propose à la Chambre d'ajouter à l'article 37, par analogie de ce qui existe dans la loi communale, un paragraphe qui serait ainsi conçu :

« La patente ne sera comptée aux commerçants qu'autant qu'ils l'aient payée pour l'année antérieure à celle dans laquelle l'élection a lieu. »

Vous voyez tout de suite, messieurs, à quelle fraude j'ai voulu parer, j'ai voulu éviter les commerçants improvisés qui prendraient patente en vue de l'élection.

L'expérience a prouvé...

M. le président. - Je dois faire remarquer à l'honorable M. Liénart que le règlement ne permet pas que, par motion d'ordre, un membre entre dans une discussion sur un objet qui n'est pas à (page 344) l’ordre du jour de la séance et qui vient d'être porté à la séance de demain. Je l'engage donc à ne pas ajouter, pour le moment, d'autres développements à sa proposition. Cette proposition ayant été formulée, la Chambre examinera, demain, si clic est recevable et admissible. Je dis recevable parce que, au second vote, il n'est permis de revenir que sur les dispositions qui ont été amendées. La Chambre aura donc à examiner si la proposition de M. Liénart se trouve dans des conditions qui permettent de l'examiner et de l'accueillir.

Je pense que la Chambre approuve ma manière de voir. Les Annales parlementaires contiendront la proposition de l'honorable M. Liénart, de sorte que la Chambre, après en avoir entendu demain les développements, pourra approuver en connaissance de cause.

M. Liénartµ. - Mon seul but était de faire connaître dès à présent à la Chambre et notamment à M. le ministre de la justice la portée de mon amendement.

M. le président. - Eh bien, vous pourrez demain donner à votre proposition tous les développements que vous jugerez utiles.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Comme il s'agit ici d'une matière toute spéciale, il se pourrait, si la Chambre terminait demain le second vote de la loi d'organisation judiciaire, que le gouvernement ne fût pas en mesure de se prononcer sur la proposition de l'honorable M. Liénart.

Je crois donc qu'il conviendrait de permettre à l’honorable membre de développer dès aujourd'hui sa proposition ; de cette manière, je pourrai d'ici à demain l'examiner et me prononcer.

M. le président. - Si la Chambre y consent, j'accorderai la parole à M. Liénart.

- Plusieurs membres : Oui ! oui !

M. Liénartµ. - Comme je le disais à la Chambre, l'expérience a prouvé que, parmi les moyens d'assurer la sincérité des élections, il n'en est peut-être pas de plus efficace que d'exiger la possession des bases pendant une ou plusieurs années. De cette façon, on déjoue une foule de combinaisons qui se préparent avec aisance la veille de l'élection, mais qui deviennent très difficiles ou presque impossibles lorsque, pour y réussir, il faut les prévoir et les concerter de longue main.

Maintenant, je ne pense pas qu'on puisse objecter sérieusement qu'il ne s'agit ici que d'un corps électoral restreint et composé de commerçants parfaitement honorables. Tout le monde sait qu'en fait de fraudes électorales, les grands coupables ne sont pas les petits électeurs ; mais les chefs de parti, ceux qui préparent et dirigent les élections.

Et s'il fallait un exemple à l'appui de ce que je viens de dire, je citerais ce qui s'est passé à l'association libérale et union constitutionnelle de Bruxelles, qui, par surcroît de précaution, j'aime à le croire, vient d'adopter des formalités principalement destinées à empêcher cette création ou cette immixtion d'un grand nombre d'électeurs à la veille d'une élection.

A cet effet, exiger la possession de la base électorale pendant une ou plusieurs années me semble, je le répète, un moyen utile dont l'application à la matière spéciale qui nous occupe ne pourrait qu'engendrer d'excellents résultats.

M. Lelièvreµ. - Il est un objet sur lequel j'appelle l'attention de M. le ministre de la justice, c'est celui relatif aux ventes publiques déférées aux greffiers. D'après ce qui a été décidé au premier vote, il est défendu à ces officiers ministériels de procéder aux ventes immobilières, lorsqu'elles n'ont pas lieu au comptant. Or, je pense que dans l'intérêt des vendeurs il faut autoriser les greffiers à accorder aux acheteurs certains délais de payement. Des ventes au comptant se font ordinairement à vil prix. Pour que les objets soient portés à leur juste valeur, il est nécessaire de faire crédit aux amateurs.

Je recommande cette observation à l'examen de M. le ministre de la justice.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Messieurs, mon attention a déjà été appelée sur ce point. J'ai annoncé à la Chambre, il y a plusieurs jours, que je présenterais un amendement pour faire droit à l'observation de l'honorable préopinant.

M. le ministre de la justice (M. Bara). - Voici l'amendement de M. Liénart :

« La patente ne sera comptée au commerçant qu'autant qu'il l'ait payée pour l'année antérieure à celle dans laquelle l'élection a lieu. »

Si on ne s'y oppose pas, l'amendement sera imprimé et distribué, sauf à la Chambre à en examiner la recevabilité au fond dans la séance de demain. (Assentiment.)

Projet de loi relatif à la vente d’une caserne à la cille de Bruxelles et allouant un crédit au budget du ministère de la guerre

Discussion générale

M. le président. - La discussion générale est ouverte.

M. Lelièvreµ. - Je ne proposerai qu'une seule observation sur le projet. Il concerne une vente relative à une expropriation pour cause d'utilité publique. Sous ce rapport, j'estime que l'intervention de la législature n'était pas même nécessaire.

Quoi qu'il en soit, je conçois la présentation du projet dans le but de faire cesser tout doute que peut soulever la question.

Du reste, dans mon opinion la vente ne doit pas donner lieu aux droits d'enregistrement, l'article 24 de la loi du 17 décembre 1835, concernant l'expropriation pour cause d'utilité publique, étant entièrement applicable à la ville de Liège, la vente volontaire remplace, dans l'espèce, l'expropriation, et doit jouir du même bénéfice.

Telle est l'observation que je crois devoir fane relativement à l'exécution du projet, lorsqu'il aura été adopté par les pouvoirs publics.

M. Bouvierµ. - Messieurs, le gouvernement soumet à notre sanction la vente faite par lui à la ville de Liège, de la caserne du Pont-Maghin pour le prix de 92,000 francs. Un crédit de pareille somme nous est demandé pour des constructions nouvelles à affecter au service auquel était destinée la caserne dont il s'agit.

D'après une lettre émanant du département de la guerre, et qui est annexée au rapport de la section centrale, une estimation préalable a été faite, et le chiffre de 92,000 francs ne sera pas dépassé. Je demanderai qu'il soit procédé à une adjudication publique et que le cahier des charges contienne une clause renfermant un forfait absolu. De cette façon ni le gouvernement ni la législature ne seront trompés dans leur attente et nous aurons la certitude que le crédit de 92,000 francs sollicité ne sera pas dépassé.

MfFOµ. - Messieurs, l'honorable M. Lelièvre a demandé si la ville de Liège aurait à supporter les frais d'enregistrement et de transcription du chef de la vente qui lui est faite de l'immeuble dont il est question dans le projet. Il y a une loi qui exempte, dans certains cas, du payement de ces droits. Si cette loi est applicable au cas actuel, la ville de Liège profitera naturellement de l'exemption ; si, au contraire, la loi n'est pas applicable, la ville restera dans le droit commun.

L'honorable M. Bouvier désirerait que, par une exception toute particulière, il y eût une clause qui garantit que la dépense résultant de la construction d'une nouvelle caserne en remplacement de l'immeuble qu'il s'agit d'aliéner, ne sera pas supérieure à 92,000 francs.

Je ne pense pas, messieurs, qu'il y ait lieu d'imposer cette condition. Je ne connais pas les plans ni les projets du département de la guerre ; mais celui-ci prendra les mesures nécessaires pour que le crédit mis à sa disposition ne soit pas dépassé. Il l'a du reste déjà déclaré.

- La discussion générale est close.

Discussion des articles

Articles 1 et 2

La Chambre passe à la délibération sur les articles.

« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à vendre à la ville de Liège, au prix de 92,000 fr., la propriété domaniale sise en cette ville qui est connue sous le nom de Caserne du Pont-Maghin. »

- Adopté.


« Art. 2. Un crédit spécial de pareille somme de 62,000 fr. est alloué au ministère de la guerre, pour la construction de bâtiments militaires destinés à remplacer la propriété à vendre. »

-Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par api et nominal sur l'ensemble du projet de loi, qui est adopté à l'unanimité des 77 membres présents.

Ce sont :

MM. Hagemans, Hayez, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Lambert, Landeloos, Lange, Le Hardy de Beaulieu, Lelièvre, Liénart, Lippens, Moreau, Muller, Nélis, Orban, Orts, Rogier, Royer de Behr, Sabatier, Snoy, Tack, Tesch, Thienpont, Thonissen, T'Serstevens, Ernest Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vandermaesen, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Van Wambeke, Vilain XIIII, Vleminckx, Wouters, Allard, Ansiau, Bara, Beeckman, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Broustin, Bruneau, Carlier, Coomans, Couvreur, Crombez, de Coninck, de Haerne, de Kerchove de Denterghem, E. de Kerckhove, Delaet, de Lexhy, d'Elhoungne, de Liedekerke, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, (page 345) de Rossius, Descamps, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, Dewandre, de Zerezo de Tejada, Elias, Frère-Orban, Funck et Dolez.

Rapports sur des pétitions

Conclusions de la commission d’industrie sur des pétitions relatives à la législation sur les bières.

La commission propose le renvoi à M. le ministre des finances.

- Ces conclusions sont adoptées.


Conclusions de la commission d’industrie sur des pétitions ayant pour objet de demander une réduction sur la patente des meuniers.

La commission propose le renvoi à M. le ministre des finances.

- Ces conclusions sont adoptées.

Projet de loi relatif au régime postal

Discussion générale

M. le président.- Le gouvernement se rallie-t-il aux amendements proposés par la section centrale ?

MtpVSµ. - En général oui, M. le président, mais pas d'une manière absolue. Je pense toutefois qu'il serait bon d'ouvrir la discussion sur le projet de la section centrale.

M. Lelièvreµ. - Je dois applaudir au projet, qui renferme de notables améliorations au régime en vigueur et réalise un progrès incontestable.

Je dois cependant proposer quelques observations, sur lesquelles j'appelle l'attention du gouvernement.

D'après la loi du 1er mai 1849, les tribunaux de simple police sont compétents pour connaître des contraventions relatives au régime postal. Je désire savoir si les infractions réprimées par le projet ne seront pas déférées aux tribunaux correctionnels. Je pense qu'il en est ainsi dans l'esprit du projet. En ce cas, il existerait une dérogation au régime établi par la loi de 1849, et pour qu'il ne puisse s'élever à cet égard aucun doute, je désire que M. le ministre veuille bien nous donner quelques explications.

D'un autre côté, le paragraphe 2 de l'article 11 renferme évidemment une erreur, il énonce l'article 6 de la loi du 15 mai 1849 qui a été abrogé par la loi du 4 octobre 1867. Les expressions dont il s'agit doivent évidemment être remplacées par l’énonciation suivante : ‘L’article 85 du code pénal. »

Enfin j'estime qu'il y a lieu d'appliquer aux contestations concernant les objets transportés par la poste une disposition analogue à celle de l'article premier de la loi du 16 juillet 1849 relativement aux transports par chemins de fer, c'est-à-dire d'attribuer aux tribunaux de commerce la connaissance des contestations relatives aux transports par la poste. En effet, l'Etat qui se charge des transports fait acte de commerce, quel que soit le moyen employé à cet effet.

Il est donc naturel de déférer les affaires de cette nature à la juridiction consulaire qui expédie d'ailleurs les causes avec plus de célérité et avec une réduction notable de frais. Le principe écrit dans la loi du 16 juillet 1847 est d'ailleurs la conséquence des principes admis en matière commerciale. Sous ce rapport il doit être étendu à tous transports quelconques.

Il y aurait d'ailleurs anomalie à ne pas appliquer aux transports par la poste les règles relatives aux transports par chemins de fer. Telles sont les considérations qui justifient les amendements que j'ai l'honneur de déposer.

M. le président. - Je demanderai à M. Lelièvre de vouloir bien rédiger son amendement et le faire parvenir au bureau.

M. de Brouckere. - Messieurs, il y aurait, je crois, une notable amélioration à introduire dans l'administration des postes, si cette amélioration ne présente pas des obstacles insurmontables. Je vais l'expliquer.

Aux heures indiquées pour relever les lettres dans les bornes-postes, un facteur arrive avec la clef, ouvre la borne-poste et en retire avec la main et en les prenant par poignées les lettres déposées ; il les met dans une portefeuille dont il est porteur ; vous avez tous vu maintefois cette opération et vous aurez pu remarquer combien elle rend facile l'enlèvement de lettres dont on a intérêt à s'emparer et même la perte d'un certain nombre de lettres, surtout quand cette opération se fait le soir. Et remarquez-le, messieurs, cette opération se renouvelle des milliers de fois dans une année. Dans d'autres pays les choses se pratiquent tout autrement ; le facteur a une boîte fermée à clef, boîte dont il n'a pas la clef et cette boîte s'adapte soit contre un bâtiment, soit contre un mur, soit dans une borne. Lorsque le moment de relever les lettres arrive, il prend la boîte fermée qu'il avait déposée à sa visite précédente, il la remplace par la boîte fermée et vide, et il porte au bureau central de poste la boîte qu'il a ainsi relevée.

De cette manière tout détournement de lettre est impossible ; toute perte l'est également.

Je ne sais pas pourquoi ce mode ne s'introduirait pas en Belgique, puisqu'il se pratique ailleurs sans qu'on y ait vu d'inconvénients que je sache.

Je demanderai à M. le ministre des travaux publics s'il ne croit pas possible sinon d'introduire immédiatement le système que je préconise, au moins de faire vérifier s'il ne serait pas praticable en Belgique. Je crois qu'il constituerait une très grande amélioration. Remarquez que je n'ai parlé que des villes.

Dans les campagnes, surtout dans certaines communes il y a des bornes-postes.

Par qui sont-elles ouvertes ? Par un conducteur de voiture. Ce conducteur passe par un village, descend de son siège, va prendre les lettres et les porte au bureau central sans qu'aucun contrôle soit possible. Il a tout le temps qui le sépare de la commune où il a pris les lettres jusqu'au bureau central pour les examiner et pour s'emparer de celles dont il lui convient de s'emparer, s'il n'est pas un honnête homme.

Je le répète, je voudrais qu'il fût porté remède à cet état de choses, à moins que M. le ministre ne démontre que ce n'est pas possible.

M. Lambertµ. - Messieurs, l'an dernier j'ai eu l'honneur de soumettre quelques observations à l'honorable ministre des travaux publics à raison du service des postes dans les campagnes.

Je dois dire, messieurs, que par suite d'échanges d'idées dans des conversations, il a été fait droit à beaucoup de ces observations. Cependant, messieurs, il en est une sur laquelle j'attirerai encore l'attention de M. le ministre des travaux publics.

Ce qui manque le plus dans les campagnes, c'est le moyen de correspondre en un seul jour.

Les lettres arrivent bien, mais on ne peut y avoir réponse le même jour.

J'estime, messieurs, qu'on arriverait à corriger ce très grand inconvénient en employant, comme moyen postal, chaque fois qu'il peut être employé, le service du chemin de fer. Malheureusement ce moyen n'est pas usité et véritablement, je ne me rends pas compte des motifs pour lesquels on ne l'emploie point.

Dans tous les actes de concession, il est stipulé que l'administration des travaux publics pourra requérir l'usage du chemin de fer à l'effet d'opérer les distributions des postes. Ce moyen n'est nullement employé en ce qui concerne les localités que je connais.

Il est de toute évidence que si l'on voulait user des services des chemins de fer pour faire les distributions des postes, on aurait donc la vitesse et surtout le retour.

Le moyen pratique me paraît excessivement facile. Il suffirait de faire accompagner le train de poste, si je puis m'exprimer ainsi, par un distributeur de poste qui verserait le long de son parcours le sac aux lettres et qui le reprendrait au retour. Quel est l'état actuel des choses ? Nous voyons le malheureux piéton partir par tous les temps, à une heure déterminée, faire sa tournée ; mais.il ne repasse pas dans les endroits où il a passé d'abord. Il en résulte, pour les commerçants, les intéressés, un grand inconvénient. Tel qui reçoit une lettre le matin ne peut y répondre dans la journée. Aussi voit-on des choses extraordinaires et qui déjà ont été signalées l'an dernier par M. Thibaut.

Cet honorable membre vous a signalé plusieurs faits très remarquables. A mon tour, je pourrais citer aujourd'hui des sections de communes qui, pour correspondre avec le chef-lieu, sont obligées de mettre trois jours.. (Interruption.) Il n'y a pas d'exagération le moins du monde. Ce que je dis est réel. On voit des sections de communes qui, pour correspondre avec le chef-lieu communal, sont obligés de mettre deux fois et parfois même trois fois 24 heures.

Il me paraît nécessaire de remédier à cet état de choses : je ne demande pas qu'on y remédie immédiatement, car les moyens doivent être étudiés et coordonnés.

Mais enfin on pourrait sans inconvénients, je pense, arriver sans retard à une amélioration de l'état de choses actuel.

L'année dernière je parlais sur le sujet qui m'occupe en ce moment et j'avais l'honneur de signaler au ministre des travaux publics une chose que j'avoue ne pas comprendre.

(page 346) Je disais l'an dernier que lorsqu'on envoyait un télégramme qui devait être porté par express, ce télégramme coûtait excessivement cher et que je ne concevais pas l'utilité de faire payer à celui qui se servait de ce mode, une espèce d'accusé de réception ; je disais alors que l'administration du télégraphe est exactement dans la position de l'administration des postes.

Lorsque nous déposons une lettre au bureau des postes, c'est pour qu'elle parvienne à domicile, et ce soin regarde l'administration. Or, quand il s'agit de télégrammes, voici à quelles formalités on est assujetti. Je suppose que vous faites partir un télégramme pour une localité qui se trouve au delà du dernier bureau télégraphique ; il y a lieu à un express ; vous croyez peut-être que tout est fini quand le télégramme est arrivé à destination : point ; il faut qu'on paye une somme plus ou moins forte pour avoir la preuve que le télégramme est remis à sa destination.

Je ne comprends pas cette manière de procéder.

Je me suis déjà élevé contre ce système et je le fais encore aujourd'hui, parce que je n'en reconnais pis l'utilité.

Si vous l'appliquez en grand, il devient onéreux pour les populations et il me semble que nous ne pouvons pas tolérer plus longtemps ce que je considère comme un véritable abus.

M. Coomans. - Je placerai ici deux ou trois observations générales parce qu'elles ne se rattachent directement à aucun article du projet de loi.

Il me semble que, dans les grandes agglomérations, où beaucoup de boites secondaires sont établies, les lettres passent dans trop de mains ; qu'en conséquence, le contrôle et la répression des abus sont extrêmement difficiles.

J'ai vu fonctionner en Allemagne un système que, après y avoir bien réfléchi, je dois recommander à l'honorable ministre des travaux publics. Les lettres sont relevées dans toutes les boîtes secondaires sans qu'elles passent entre les mains des agents chargés de les recueillir.

Il y a, dans des niches construites ad hoc, des boîtes qui reçoivent les lettres déposées par le public ; ces boîtes sont fermées à clef et ouvertes au bureau central.

M. Bouvierµ. - C'est ce que M. de Brouckere vient de dire.

M. Coomans. - Je l'apprends avec plaisir et j'aime à croire que l'honorable M. de Brouckere ne sera pas fâché que je vienne appuyer ce qu'il a dit.

Avec ce système, il n'y a plus qu'un seul agent responsable, celui qui ouvre toutes les boîtes.

Il en est à peu près de même en Hollande pour la récolte des bulletins électoraux.

Puisque l'honorable M. de Brouckere a aussi recommandé ce système, je n'en dirai pas davantage, persuadé qu'il l'aura fait beaucoup mieux que je ne le pourrais moi-même. J'espère que cet accord engagera l'honorable ministre à faire droit à notre réclamation, ou, tout au moins, à la réfuter si elle ne lui paraît pas fondée.

Je ne sais pas, messieurs, pourquoi on défend aux agents inférieurs de la poste de recevoir en route les lettres que le public retardataire serait disposé à leur remettre. Si vous avez assez de confiance dans un agent pour lui permettre d'aller faire la récolte des lettres dans les diverses boîtes de sa circonscription, pourquoi ne lui permettez-vous pas de recevoir sur son passage, bien entendu sans s'attarder, sans faire aucun détour, les lettres que certaines personnes n'auraient pas eu le temps de jeter dans les boîtes ?

L'autre jour encore, je sors d'ici avec deux lettres, j'oublie de les déposer dans une salle attenant à la nôtre, j'arrive au coin de la rue Royale juste au moment où le facteur fermait la boîte, après en avoir enlevé les lettres. Il avait encore son portefeuille ouvert. Je veux y joindre les deux miennes, il me dit que cela ne se faisait pas, que cela lui était strictement défendu.

Vraiment, messieurs, je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas dans quel intérêt une pareille interdiction est prescrite aux facteurs de la poste.

A la campagne, l'inconvénient que je signale est très grave. S'il était permis aux facteurs de recevoir des lettres sur leur passage, bien des gens ne seraient pas forcés de faire un détour parfois considérable pour déposer leurs lettres à la poste.

M. Bouvierµ. - Cela est permis dans les campagnes.

M. Coomans. - Tant mieux ; mais, si cela est, ce doit être une innovation assez récente, et si cette innovation a été reconnue possible dans des campagnes, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas l'étendre aux villes ; les facteurs des villes sont certainement aussi honnêtes que les facteurs ruraux.

Maintes fois, messieurs, j'ai entendu dire et j'ai constaté personnellement qu'une surtaxe du droit de poste était exigée pour un surcroît presque insensible de poids. Je pourrais vous montrer un assez grand nombre de missives qui m'ont été adressées et qui ont donné lieu à une surtaxe pour un surcroît de poids ou pour une différence d'appréciation entre l'expéditeur et les agents de la poste qui n'excédait pas un quart de gramme.

Il ne s'agit pas ici seulement d'une perte d'argent ; il s'agit aussi perte de temps : il est arrivé que des domestiques n'étant pas autorisés a payer un supplément de port, le facteur est retourné avec sa lettre parce qu'il lui était de 20 ou 30 centimes pour un excédant de près d'un quart de gramme.

Remarquez bien, messieurs, qu'on peut avec la meilleure foi du monde se tromper d'un quart de gramme ; tous les pèse-lettres ne sont pas également justes, ils ne sont pas tous également infaillibles ; et puis il est arrivé aussi que la poste marquait un quart de gramme de plus pour des lettres qui ne pesaient pas 10 grammes lorsqu'elles ont été expédiées.

Celte différence d'un quart de gramme peut tenir à l'état de l'atmosphère. Qu'une lettre pesant 10 grammes soit envoyée à la poste par un temps humide et son poids aura bientôt augmenté d'un quart de gramme. Cela s'explique parfaitement et cela m'a été affirmé du reste par des hommes parfaitement compétents.

Messieurs, il me semble qu'il faudrait, en cette matière, comme en beaucoup d'autres, un peu de tolérance. Pourquoi ne pas dire, par exemple, tout au moins aux agents de la poste qu'il n'y aura lieu à surtaxe que lorsque la différence sera d'au moins un demi-gramme à trois quarts de gramme ?

Vous avez des tolérances en tout, même un peu en matières politiques ; je ne vois pas pourquoi vous n'en montreriez pas un peu aussi dans une matière ainsi controversable que celle-ci.

Je puis attester personnellement, et je suis bien sûr de n'être point seul dans ce cas, que des lettres bien ou mal pesées ont été surtaxées à la poste, quoique l'on fût de bonne foi de part et d'autre. La différence peut tenir, je le répète, à l'exactitude plus ou moins grande du pèse-lettre ou, comme je viens de le dire, à l'état de l'atmosphère ou même à une distraction commise d'un côté ou de l'autre.

Dans tous les cas, il devrait être permis aux facteurs de laisser la lettre surtaxée au domicile du destinataire au lieu de lui prescrire de l'emporter.

Messieurs, j'ai encore à présenter une remarque. J'avoue que depuis quelques années on a fait beaucoup en faveur des journalistes ou plutôt en faveur du public, qui est plus intéressé que les journalistes eux-mêmes à la prompte et exacte distribution des journaux. Mais il est encore un progrès, non petit, que je recommande à l'honorable ministre des travaux publics : c'est de supprimer le timbre des journaux. Ce timbrage, dont l'utilité est légère, pour ne pas dire contestable, prend beaucoup de temps. Tous les hommes pratiques en conviendront.

Quelques bureaux de poste, surtout ceux des grandes villes, par suite du développement de la presse, sont surchargés de besogne, souvent aux mêmes heures, et s'ils étaient débarrassés de ce timbrage, l'expédition des journaux se ferait bien plus vite et, chose singulière ! plus régulièrement.

Veuillez remarquer que les agents de la poste s'entendent avec les employés des journaux pour classer les journaux dans un certain ordre, afin d'en faciliter l'expédition.

Les journalistes recommandent fort à leurs employés de se conformer, sous ce rapport comme sous bien d'autres, à tous les désirs manifestés par les agents de la poste ; car, nous devons le dire, ce service se fait exemplairement en Belgique.

Maintenant, quand le classement a été soigneusement opéré dans les bureaux des journaux - le fait que je signale est survenu tout récemment dans plusieurs bureaux de ma connaissance - quand ce classement est opéré, il arrive que des agents très inférieurs de la poste, qui sont chargés du timbrage, déclassent le tout, involontairement, si vous voulez, mais maladroitement, et sont cause de maintes erreurs dans l'expédition.

Les journaux devraient pouvoir être expédiés tels ou à peu près tels qu'on les remet à la poste.

Je conçois qu'il y a quelque utilité à timbrer les lettres ; cette opération leur donne une date fixe ; mais la date fixe du journal est en (page 347) tête du journal même. Le timbrage est inutile ; il n'offre aucune garantie ou il n'en offre guère, et il présente de graves inconvénients.

Je me bornerai à ces remarques. C'est notre devoir et notre intérêt de les prendre en sérieuse et impartiale considération.

M. Bouvierµ. - Messieurs, il y a quelques années, lors de la discussion du budget des travaux publics, j'ai eu l'honneur de suggérer une idée à l'honorable ministre ; elle consistait à adapter aux voitures publiques faisant le service postal une boîte à lettres à chacune d'elles, de telle façon que les riverains pussent jouir en quelque sorte d'un bureau de poste ambulant. Cette idée est aujourd'hui pratiquée en Allemagne. (Interruption.)

- Une voix. - Elle est pratiquée en Belgique.

M. Bouvierµ. - Si elle est déjà pratiquée dans notre pays, elle ne l'est pas, du moins, dans la province de Luxembourg ; je voudrais qu'elle y fût immédiatement introduite. Dans notre province de Luxembourg, nous n'avons pas le bonheur de posséder un grand nombre de lignes ferrées ; nous n'en avons qu'une seule, celle du Grand-Luxembourg.

Par suite de cet état de choses, je prierai l'honorable ministre des travaux publics de bien vouloir, avec son obligeance habituelle, faire droit à notre demande. Cette innovation chez nous ne coûterait rien au trésor public.

Je suis également d'avis de voir adopter l'idée émise par l'honorable M. de Brouckere, qui est déjà pratiqué à l'étranger, et qui consiste à récolter les lettres à l'aide de boîtes destinées à cet usage. J'espère que l'honorable ministre fera profit de cette bonne idée dont la réalisation ne coûtera pas non plus grand-chose au trésor.

MtpVSµ. - Messieurs, j'éprouve une extrême difficulté à parler ; je prierai la Chambre de me permettre d'être très bref dans ma réponse aux observations des honorables préopinants ; j'aurais demandé l'ajournement de cette discussion, si je n'avais craint que la Chambre ne manquât de matériaux.

L'honorable M. Lelièvre a parlé entre autres de la compétence des tribunaux qui seront appelés à juger les diverses infractions prévues dans le projet de loi. J'aurai l'honneur de répondre à l'honorable membre, à mesure que les articles qui s'occupent de ces infractions seront soumises à vos délibérations.

Les honorables MM. de Brouckere et Coomans ont suggéré l'idée d'imiter ce qui se pratique en Prusse pour la levée des lettres. Je n'ai pas perdu cet objet de vue et je pense que nous pourrons introduire prochainement ce système qui fonctionne ailleurs avec succès.

L'honorable M. Lambert a demandé pourquoi on ne faisait pas un usage plus fréquent du chemin de fer pour la prompte expédition des lettres.

Messieurs, il faut distinguer entre le chemin de fer de l'Etat et les chemins de fer des compagnies concessionnaires. En ce qui concerne les compagnies concessionnaires, elles ne peuvent pas se charger du transport des lettres. Celles qui accepteraient des lettres contreviendraient à l'arrêté de prairial an IX. La poste a le monopole du transport des lettres.

Mais précisément pour arriver au but indiqué par l'honorable M. Lambert, nous introduisons dans le projet de loi une nouvelle catégorie de lettres, les lettres exprès. Ces lettres ne seront pas manipulées par des agents étrangers à la poste, mais la poste se réserve d'user de tous les moyens pour les faire parvenir promptement à destination.

L'honorable M. Coomans a parlé de l'extrême rigueur que met l'administration à imposer la surtaxe, du chef d'excédant de poids des lettres. Je connais, dit l'honorable membre, des exemples nombreux de surtaxes pour un quart de gramme ; messieurs, il continuera à en être ainsi et nécessairement il doit en être ainsi.

L'honorable membre voudrait, si je l'ai bien compris, que l'on admît une tolérance. Messieurs, quelle serait cette tolérance ? Le poids de la lettre simple est porté par notre projet de loi de 10 à 15 grammes. Je suppose que l'on stipule qu'il y aura une tolérance d'un gramme.

M. Coomans. - D'un demi-gramme.

MtpVSµ. - Mettez un gramme. En fait, le poids de la lettre simple pourrait donc être de 16 grammes, à 16 grammes et un quart ou à 16 grammes et un dixième, il faudra bien appliquer la surtaxe. La même réclamation surgira.

Cela revient à dire qu'il faut une limite ; la limite étant indiquée par la loi, cette limite dépassée, l'agent de la poste doit appliquer la surtaxe, quelque faible que soit l'excédant.

On me fait remarquer avec raison que le poids de la lettre simple étant sensiblement augmenté, étant augmenté de 50 p. c. cet inconvénient, qui existera toujours, sera notablement atténué.

L'honorable M. Coomans a entretenu également la Chambre de l'inconvénient qu'il trouve à timbrer les journaux. Il s'agit, si je ne me trompe, des journaux qui ne sont pas affranchis au moyen du timbre-poste.

M. Coomans. - On les timbre tous.

MtpVSµ. - On les timbre tous. Eh bien, c'est une précaution que l'on prend au profit du public. Le timbrage des journaux comme celui des lettres permet au destinataire de constater que son journal ou que sa lettre lui a été remise à l'heure voulue. C'est un avantage évident pour le public.

Enfin, quant à la demande de l'honorable M. Bouvier au sujet de boîtes à appliquer aux voilures qui effectuent le transport des dépêches, c'est une mesure que j'avais déjà reconnue utile et pratique dans la discussion de mon budget et qui recevra prochainement une première application

M. Bouvierµ. - Je vous en remercie, M. le ministre.

MtpVSµ. - L'honorable M. Bouvier a dit avec raison que dans les campagnes les facteurs sont autorisés à recueillir les lettres qu'on veut bien leur confier. On leur permet même de prendre des lettres chargées, mais sous la responsabilité de l'envoyeur.

L'honorable M. Coomans demande pourquoi il n'en est pas de même en ville. C'est également dans l'intérêt du public. C'est qu'il est toujours plus sûr de mettre ses lettres à la boîte que de les confier en passant au facteur.

M. Coomans. - C'est l'affaire du public.

MtpVSµ. - J'admets qu'il n'y a qu'une nuance. Je veux bien examiner la chose. L'administration est parfaitement désintéressée.

M. Dewandre, rapporteurµ. - 'honorable M. Lelièvre a demandé si, dans l'opinion de la commission, les peines comminées par le projet de loi devaient être appliquées par les tribunaux correctionnels ou par les tribunaux de simple police. Il n'est pas douteux, dans l'opinion de la section centrale, que c'est par les tribunaux correctionnels, et c'est pour cela qu'elle a proposé aux articles11H et 15 d'indiquer comme minimum de l'amende 26 fr. au lieu de 25 fr. que porte le projet du gouvernement.

L'honorable M. Lelièvre a demandé aussi s'il ne faudrait pas, dans l'article 11 du projet de loi, substituer à l'indication de l'article 6 de la loi du 15 mai 1849, l'article 85 du code pénal, relatif aux circonstances atténuantes.

L'observation de l'honorable M. Lelièvre est juste, l'article 85 du code pénal ayant remplacé l'article 6 de la loi du 15 mai 1849.

Enfin l'honorable M. Lelièvre a demandé s'il ne conviendrait pas de déférer aux tribunaux de commerce les contestations relatives aux transports qui se font par la poste, comme on a déféré à ces tribunaux les contestations relatives aux transports qui se font par chemin de fer.

L'attention de la section centrale n'a pas été attirée sur ce point ; mais je trouve qu'il serait rationnel d'assimiler, quant à la compétence, ces deux espèces de transport.

Messieurs, je saisirai l'occasion de la discussion générale de ce projet pour présenter quelques observations à M. le ministre des finances, sur l'inexactitude des chiffres de la note qu'il a remise à la section centrale du budget des voies et moyens, sur les résultats obtenus jusqu'à présent par la réforme postale.

M. le ministre des finances a remis cette note pour établir que la réforme postale n'avait pas donné les résultats qu'on en attendait, que le trésor était encore en perte par cette réforme, et qu'enfin soit le produit total de la poste, soit le produit des lettres n'atteignait pas encore 2 millions, chiffre fixé par la loi de 1849 comme la limite au delà de laquelle le gouvernement était autorisé à étendre à tout le royaume la taxe uniforme de 10 centimes.

J'ai déjà, l'année dernière, à l'occasion de la discussion du budget des voies et moyens, indiqué l'inexactitude des chiffres dont il s'agit ; je suis forcé d'y revenir, puisque, dans la nouvelle note présentée cette année à la section centrale, les mêmes erreurs sont commises.

La note commence par établir, et c'est le premier argument invoqué pour s'opposer à l'extension à tout le royaume de la taxe uniforme de (page 348) 10 centimes ; la note, dis-je, commence par indiquer que, par suite de la reforme, la recette de la poste aux lettres en 1865 a été, relativement à ce qu'aurait été le produit s'il n'y avait pas eu de réforme, un déficit de 154,427 francs ; et pour établir ce chiffre, cette note raisonne ainsi : la moyenne de l'augmentation du produit des recettes, de 1831 à 1847, était de 120,000 fr. par an.

Si l'on applique cette moyenne aux années postérieures jusqu'en 1865, on constate que le produit de la poste en 1865 aurait été de 154,427 fr. plus élevé qu'il ne l'a été réellement.

Messieurs, ce point de départ est inexact. Il n'est pas vrai que de 1831 à 1847, le produit de la poste s'augmentait de 120,000 francs par an. Il suffit d'une simple division pour obtenir cette moyenne, et en faisant cette division, l'on trouve que l'augmentation était de 107,000 fr. seulement dans la période de 1830 à 1847.

Mais il est à remarquer qu'en 1840, les limites de la Belgique ont été modifiées et qu'en conséquence on ne peut prendre d'une manière absolue le produit des années antérieures à 1840, pour fixer la moyenne du produit de la poste en Belgique. Il est plus rationnel de prendre les années postérieures à 1840, c'est-à-dire les années 1841 à 1847.

Eh bien, si je prends le produit de ces années dans le tableau même que nous a fourni le gouvernement, je trouve que l'augmentation moyenne était de 80,000 fr. Si je refais avec ce chiffre le calcul de la note présentée par le gouvernement, je trouve qu'au lieu d'un déficit de 154,427 fr. en 1865, la réforme postale nous donne un excédant de 372,573 fr. pour l'année 1865 ; c'est-à-dire que, grâce à la réforme postale, le produit de la poste aux lettres, en 1865, a été de 372,573 fr. plus élevé qu'il n'aurait été sans cette réforme.

Donc, le premier argument qu'on nous oppose pour repousser la demande d'extension à tout le royaume de la taxe de 10 centimes, n'est pas fondé.

On en invoque un second fondé sur ce que le produit net de la poste n'aurait pas encore atteint deux millions.

Vous savez que la loi de 1849 a autorisé le gouvernement à étendre à tout le royaume la taxe à 10 centimes, lorsque le produit net de la poste aurait atteint 2 millions.

Pour prouver que ce chiffre n'est pas atteint, le gouvernement commence par établir, dans la note qui nous a été remise, la dépense totale de la poste aux lettres, et il dit, par exemple : En 1865, les dépenses de la poste, libellées aux différents budgets, s'élève à 3,576,928 francs. Mais il y a d'autres dépenses nécessitées par la poste que celles qui sont libellées au budget.

Il y a la dépense de fabrication des timbres-poste qui s'élève à 100,000 francs ; les frais de traction des bureaux ambulants sur les chemins de fer ; ces frais s'élèvent, dit-il, à 310,000 francs ; il faut encore y ajouter le service des malles-postes de Douvres à Ostende, et de ce chef la note dont il s'agit porte au compte de la poste, une somme de 339,006 francs.

J'ai eu assez de peine, messieurs, à trouver ce chiffre de 339,006 fr., à découvrir comment le service des postes était entraîné, à raison de l'emploi des malles-postes de Douvres à Ostende, à une dépense de 339,006 fr. et j'ai été assez étonné de trouver que ce chiffre avait été pris en quelque sorte au hasard dans le budget des affaires étrangères, que c'est tout simplement l'un des articles de ce budget, l'article 31 qui comprend le personnel des bateaux à vapeur de Douvres à Ostende et, en outre, le personnel de plusieurs autres services de la marine, ainsi celui des services spéciaux, celui des constructions et réparations maritimes, et même le personnel en disponibilité et en inactivité.

Ainsi on a pris presque au hasard dans le budget des affaires étrangères un article des 339,000 francs, qui comprend des dépenses complètement étrangères à la poste, et l'on a transporté ce chiffre de 339,006 fr. dans les comptes de la poste, pour en grever le passif de ce service.

Evidemment, cette manière de calculer n'est pas sérieuse et je ne puis pas admette le chiffre dont il s'agit ; mais, enfin, je suppose qu'on l'admette et l'on arrivera ainsi à une dépense totale, pendant l'année 1865, de 4,325,934 francs. La recette totale pour cette année 1865 ayant été de 6,106,847 francs, le produit net de la poste n'est, dit-on, que de 1,780,913 francs.

J'admets pour un moment tous les chiffres du gouvernement, y compris même l'article de 339,006 fr. du budget des affaires étrangères ; mais je dis au gouvernement : Si vous portez au débit du service des postes les 310,000 fr. que vous supposez être le coût des frais de traction et d'entretien des bureaux ambulants, il est parfaitement juste que vous portiez au crédit de ce compte le transport de vos lettres et dépêches de service, transport que la poste fait gratuitement. Je constate que la poste a transporté en 1867 5,153,720 lettres de service ; une partie de ces lettres devraient être taxées à 20 centimes, mais en ne les comptant qu'à 10 centimes, ce transport représente pour la poste une somme de 515,153 fr. Comme d'autre part le gouvernement reconnaît en se fondant sur les calculs qu'il produit lui-même, que le produit net de la poste a été de 1,780,913 fr., si j'ajoute à ce chiffre celui de 515,1553fr. que je viens d'indiquer, le produit net total de la poste sera de 2,296,066 fr., pour l'année 1865.

Mais, dit M. le ministre, on n'a eu en vue dans la loi de 1849 que le produit du transport des lettres seulement. Eh bien, messieurs, d'après les chiffres du gouvernement, le produit du transport des lettres seules a rapporté brut 5,273,016 francs. Pour trouver ce que ce transport a coûté, il faut diviser la dépense totale des postes par le nombre d'objets transportés, y compris les journaux et les imprimés, car le transport d'un journal ou d'un imprimé quelconque coûte autant que le transport d'une lettre.

Je prends encore ici les chiffres du gouvernement et je trouve que le prix de revient du transport d'une lettre est de 5 centimes ; or en multipliant par 5 centimes le nombre des lettres transportées, nombre qui est de 24,530,688 en 1865, je trouve que la dépense totale du transport des lettres a été de 1,226,534 francs. Le produit brut des lettres étant de 5,273,016 francs, il en résulte que le produit net est de 4,046,482 fr.

J'ai cru devoir attirer sur ces chiffres l'attention de la Chambre et de M. le ministre des finances. S'il fait vérifier ces chiffres, il trouvera que les chiffres qui lui ont été fournis et qui ont formé son principal argument pour contester la demande de la taxe uniforme de 10 centimes, que ces chiffres, dis-je, sont inexacts.

M. Coomans. - Par malheur, messieurs, il y a à opposer à l'honorable M. Dewandre un argument décisif, c'est que le budget de la guerre ne permet d'en réduire aucun autre.

L'honorable ministre des travaux publics semble disposé à croire que le timbrage de journaux offre au public une garantie telle, qu'il est nécessaire de le conserver au prix d'un grand surcroît de besogne imposée aux agents postaux. Je ne puis me rendre sur ce point. Cette garantie, je ne la vois guère. Le public lit l'heure à laquelle la feuille a été déposée à la poste, mais voilà tout.

Cette garantie est faible puisque le journal a une date fixe. Puis, messieurs, ne vaut-il pas mieux que le journal ne soit pas timbré plutôt que de n'être pas remis au destinataire, en temps utile ? Or, c'est ce qui arrive à chaque moment. J'ai pris des renseignements chez des hommes initiés à cette partie du service postal et ils vous diront que maintes fois des milliers de journaux n'ont pas pu être expédiés parce qu'on n'avait pas le temps de les timbrer. Le journaliste n'envoie sa feuille qu'à la dernière heure. C'est tout naturel ; il veut avoir les dernières nouvelles, et voulant toujours perfectionner son journal, au point de vue de la nouveauté, il arrive souvent que les feuilles sont remises à la poste trop tard pour pouvoir être timbrées avant le départ. Je suis persuadé que j'exprime ici l'opinion unanime, d'abord du public que je ne connais pas parfaitement, puis celle des journalistes, dont je suis très sûr, enfin celle des agents de la poste, dont je suis plus sûr encore.

Les agents de la poste ne demandent pas mieux que de ne pas timbrer ; cela n'a pas besoin de démonstration ; quant aux journalistes, ils ne demandent pas mieux que de ne pas avoir leur journal timbré.

Quant au public, l'important pour lui c'est de recevoir son journal à heure fixe et le plus promptement possible.

Messieurs, je reconnais avec l'honorable ministre qu'il serait difficile de faire droit à la demande, cependant fondée, que je lui avais faite d'user d'une certaine tolérance quant à la surtaxe à cause du poids. Je crois qu'il serait difficile d'insérer cette tolérance dans la loi, car la tolérance viendrait s'ajouter au chiffre officiel, mais je ne vois pas pourquoi il ne serait ni juste ni possible de recommander une certaine tolérance aux agents postaux, au moins dans les cas douteux.. Je puis affirmer que j'ai vu des lettres dont le poids était exact d'après les ustensiles que nous avions sous la main, qui pesaient exactement 10 ou 20 grammes....

Je n'affirme pas que le pèse-lettre qui marquait un quart de gramme en plus n'avait pas raison physiquement et légalement. C'est possible, mais l'expéditeur était de bonne foi même au point de vue de la connaissance de la loi et, dans ce cas, je crois qu'il faudrait user d'un peu de tolérance.

M. le ministre a fait une objection, que je ne puis admettre, à une demande qui lui a été présentée, à savoir : de faire servir le chemin de (page 349) fer et d'autres services particuliers, au transport des lettres et des journaux.

Je ne puis, a dit l'honorable ministre, vous accorder cela. C'est contraire à la loi de prairial.

Messieurs, il me déplaît d'entendre encore invoquer la loi de prairial contre des demandes formulées par le bon sens même, alors que les principales parties de cette loi ne sont plus observées. Il a été reconnu ici même par l'honorable M. Vanderstichelen lui-même, si je ne me trompe, que la loi de prairial était devenue inapplicable en plusieurs de ses parties.

Cette loi défend à quiconque de transporter une lettre ou un journal. Elle défend également d'insérer des lettres ou des journaux dans des paquets.

Or, si la loi de prairial était une loi sérieuse, une vraie loi, presque tous les Belges seraient en contravention hebdomadairement.

Il a été reconnu même par l'honorable ministre de la justice qu'il n'y avait pas lieu d'exécuter la loi de prairial en ce qui concerne le transport des journaux, qu'il devait être permis aux particuliers et aux entrepreneurs de diligences, etc., de transporter des journaux à domicile, infraction grave à la loi de prairial.

Du reste, messieurs, s'il est permis d'après la loi de prairial, que je connais un peu, de transporter des lettres chargées, pourquoi pas d'autres ?

L'honorable ministre vient de vous dire qu'il prendra des mesures pour que les lettres dont la poste peut se croire directement responsable, soient transportées le plus promptement et le plus utilement possible par toutes les voies.

Il a mille fois raison. Je ne vois pas pourquoi ce système ne serait pas appliqué à toutes les lettres et aux journaux, pourquoi le gouvernement, par un scrupule dont il fait fi lui-même, parce qu'en définitive le bon sens domine tout, ne se servirait pas des entreprises privées, des chemins de fer concédés pour faire remettre plus vite aux intéressés les papiers qui leur sont destinés.

Messieurs, cette objection n'est positivement pas sérieuse.

Si vous faites exécuter la loi de prairial, à quoi je ne vous engage pas, faites-la exécuter loyalement, pleinement et, dés ce jour-là, c'en est fait de la presse en Belgique, car le grand développement qu'elle a pris est incompatible avec la loi de prairial.

Du reste, il serait excessivement facile de modifier ou de supprimer cette loi de prairial. Je n'y tiens pas du tout, et si elle empêche la distribution des lettres et des journaux, comme le déclare le gouvernement lui-même, faisons-en bonne et prompte justice. II y a assez d'autres lois de prairial en Belgique.

MtpVSµ. - Messieurs, je ne sais pas si je me suis bien fait comprendre de l'honorable M. Coomans au sujet du transport des lettres par les chemins de fer concédés.

J'ai dit que ces chemins de fer ne pouvaient manipuler les lettres, accepter la charge de les transporter avec l'obligation de les remettre au destinataire et le droit d'encaisser le port. Mais je n'ai pas dit que l'administration des postes ne se servît pas des chemins de fer concédés pour le transport des lettres.

Messieurs, si l'on abandonnait tout cela aux compagnies, qu'est-ce que le public y gagnerait ?

Que ce soit la poste qui reçoive le dépôt des lettres ou que ce soit un chef de station, qu'est-ce que cela fait ? Et pourvu que la lettre arrive, qu'importe au destinataire que ce soit par un chef de station d'une compagnie concessionnaire ou par l'administration disponible de la poste ?

C'est donc en faveur du public que la poste doit continuer ce monopole.

M. Coomans. - Si elle va aussi vite que les autres.

MtpVSµ. - Evidemment elle va aussi vite et elle va plus sûrement.

Dans tous les cahiers des charges de concessions de chemins de fer, la poste s'est réserve le droit d'user des convois de la société pour le transport des lettres. Elle peut même imposer à la société la charge d'instituer des convois ad hoc.

Maintenant est-ce que l'honorable membre s'imagine que pour 10 ou 20 centimes une compagnie va organiser un service pour faire distribuer les lettres plus fréquemment qu'elles ne sont distribuées par la poste ?

Le public, messieurs, a tout à perdre au système préconisé par l'honorable M. Coomans et absolument rien à gagner.

Voilà la vérité.

M. Lambertµ. - Messieurs, si je prends encore une fois la parole dans la discussion générale, c'est pour rectifier une erreur commise par l'honorable ministre des travaux publics en ce qui me concerne. Il m'a prêté une intention que je n'ai jamais eue.

Lorsque je préconisais tout à l'heure l'emploi du chemin de fer pour la distribution des lettres dans les cantons ruraux, il n'est nullement entré dans ma pensée de substituer les compagnies au service de l'Etat. J'ai voulu dire que, tout en respectant les droits de l'Etat, il y avait lieu de profiter de toutes les clauses permettant à l'Etat de requérir l'emploi d'un train de chemin de fer à l'effet d'activer la distribution des lettres.

Cela se fait sur certaines lignes et pas sur d'autres. Quelquefois sur la même ligne vous voyez qu'on emploie le chemin de fer en aval et pas en amont.

Parlant de ce qui est à ma connaissance, je citerai un fait assez extraordinaire, c'est que le service postal en aval de Dinant se fait à l'aide du chemin de fer et qu'il ne se fait pas de la même manière en amont.

Voilà l'état de choses contre lequel je m'élève. Ce que je désire, c'est qu'on fasse mettre dans les stations un piéton, comme on dit vulgairement, qui attendrait le retour des lettres répondant aux lettres qu'il aurait apportées le matin. Il me semble que ce moyen est pratique, parce que je n'ai pas étudié la question comme doivent le faire ceux qui sont chargés du service, mais je recommande l'idée à M. le ministre des travaux publics, parce que je crois que ce qui se fait du côté droit peut se faire du côté gauche.

- La discussion générale est close.

M. le président. - M. Lelièvre a fait parvenir au bureau les amendements suivants :

« Art. 2 § 2, au lieu de l'article 6 de la loi du 15 mai 1849, dire : L'article 85 du code pénal.

« Après l'article 33 du projet, article 34 du projet de la section centrale, énoncer la disposition suivante :

« Les tribunaux de commerce connaîtront de toutes les contestations relatives au transport des objets par la poste. »

- Ces amendements sont appuyés, ils font partie de la discussion.

Discussion des articles

Article premier

« Art. 1er. il y a quatre espèces de lettres :

« 1° La lettre ordinaire ;

« 2° La lettre exprès ;

« 3° La lettre recommandée ;

« 4° La lettre chargée, avec valeur déclarée.

« L'administration n'accorde aucune indemnité pour la perte des lettres ordinaires, exprès ou recommandées.

« Elle n'est responsable des lettres chargées que jusqu'à concurrence de la somme déclarée. »

M. de Naeyerµ. - Je crois que la lettre recommandée dont parle le projet de loi est destinée à remplacer ce qu'on appelle aujourd'hui la lettre chargée. Or, déduis la législation actuelle, la perte d'une lettre chargée donne lieu à une indemnité de 50 fr. Il n'en sera plus de même pour la lettre recommandée.

MtpVSµ. - Non, il n'y aura pas d’indemnité pour la perte d'une lettre recommandée.

M. de Naeyerµ. - Il n'y a donc aucun recours sérieux à exercer de la part des expéditeurs ?

MtpVSµ. - Aucun.

M. de Naeyerµ. - Il n'a plus de garanties quoique le contenu de la lettre recommandée, indépendamment de toute valeur proprement dite, puisse avoir une grande importance et que sa perte soit de nature à entraîner la lésion d'intérêts très sérieux.

MtpVSµ. - Voici le système de la loi : Il y a 4 catégories de lettres :

La lettre simple dont le poids est porte de 10 à 15 grammes ;

La lettre exprès qui n'existe pas aujourd'hui ; la lettre exprès est la lettre qui, moyennant une certaine surtaxe, sera remise au destinataire aussitôt l'arrivée du courrier ;

La lettre recommandée, qui est la lettre à laquelle l'envoyeur attache une certaine importance, mais qui ne contient pas de valeurs au porteur, ou du moins qui est censée ne pas contenir de telles valeurs. Pour satisfaire au vœu de l'envoyeur, il suffit d'entourer le transport de cette lettre de certaines garanties.

Ces garanties résultent de la délivrance du récépissé à l'expéditeur et de la remisé du reçu par le destinataire.

Enfin il y a la lettre contenant des valeurs au porteur, c'est la lettre chargée.

(page 350) La lettre recommandée n'étant pas censée contenir des valeurs facilement négociables, il n'y a pas lieu, en cas de perte, à payer une indemnité à l'expéditeur ou au destinataire. La lettre chargée étant seule censée contenir des valeurs promptement échangeables, emporte seule le payement d'une indemnité.

Nous avons donc des catégories diverses de lettres pour les divers intérêts qui se présentent, mais, ainsi que le disait l'honorable M. de Naeyer, la lettre recommandée ne donne pas lieu, en cas de perte, au payement d'une indemnité.

M. Royer de Behr. - Je crois qu'il serait indispensable, je ne sais si cela entre dans les intentions de M. le ministre, que la lettre recommandée ne fût remise au destinataire que contre sa signature, ainsi que cela se fait pour les lettres chargées.

C'est la seule garantie qu'il puisse y avoir.

M. de Naeyerµ. - Il résulte des explications de l'honorable ministre des travaux publics que la perte d'une lettre recommandée ne donnera lieu à aucune indemnité parce qu'elle est censée ne pas renfermer de valeurs. Mais il en est de même aujourd'hui pour la lettre chargée ; il y a même une disposition formelle qui défend d'y enfermer des valeurs.

Je crois donc que ce motif ne justifie pas la disposition du projet qui porte qu'en cas de perte la lettre recommandée ne donnera pas lieu à indemnité.

M. le président. - Présentez-vous un amendement, M. de Naeyer ?

M. de Naeyerµ. - Non, M. le président.

M. Tack. - Je ne vois pas trop pourquoi on payerait une indemnité du chef d'une lettre recommandée, qui, d'après la loi, ne peut contenir aucune valeur.

Pour le transport des valeurs, il y a la lettre chargée ; celle-ci présente une garantie complète, elle réalise un grand progrès ; ci-devant l'indemnité était restreinte à un chiffre fixe, désormais elle sera en rapport avec la valeur transportée.

D'autre part, la lettre recommandée a sa raison d'être ; on en fera utilement usage pour fixer sa date ; le récépissé sera pour l'expéditeur un moyen de preuve vis-à-vis du destinataire.

- L'article est adopté.

Article 2

« Art. 2. Par dérogation à l'article premier de la loi du 22 avril 1849, sont considérées comme lettres simples celles dont le poids n'excède pas 15 grammes.

« Les lettres de 15 à 30 grammes inclusivement payent deux fois le port ; celles de 30 à 50 grammes, trois fois le port ; celles de 50 à 100 grammes, quatre fois le port, et ainsi de suite en ajoutant un port de 50 en 50 grammes.

- Adopté.

Article 3

« Art. 3. Sont qualifiés exprès les lettres et autres objets de correspondance, comportant un caractère d'urgence, dont les expéditeurs voudront faire opérer la remise immédiate à domicile.

Lesdits objets et lettres supporteront, indépendamment du port ordinaire dont ils seront passibles en raison de leur nature, une taxe spéciale de distribution dont le taux et les conditions de payement seront réglés par le gouvernement. »

M. Coomans. - « Dont les expéditeurs voudront faire opérer la remise immédiate à domicile. »

Il ne s'agit, je pense, que des grands centres de populations et de certains centres voisins des bureaux de poste.

MtpVSµ. - De tout le pays.

M. Coomans. - Ainsi, pour quelques centimes vous ferez expédier une lettre exprès à une ou deux lieues...

M. le président. - Voyez le deuxième paragraphe, M. Coomans.

M. Coomans. - « Lesdits objets et lettres supporteront, indépendamment du port ordinaire dont ils seront passibles en raison de leur nature une taxe spéciale de distribution dont le taux et les conditions de payement seront réglés par le gouvernement. »

J'avais lu cela, mais cette prescription ne répond pas clairement à mon observation. Je demande de nouveau jusqu'à quelle distance du bureau d'arrivée on fera remettre les lettres.

MtpVSµ. - A toute distance.

M. Coomans. - Même à une distance de deux et trois lieues ? C'est sur ce point que je voudrais une réponse bien formelle.

Remarquez bien, messieurs, que je ne suis nullement contraire à l'interprétation de l'honorable ministre des travaux publics, mais il importe de savoir s'il sera permis d'expédier à plusieurs lieues pour quelques centimes.

MtpVSµ. - On traitera la lettre exprès comme la dépêche télégraphique. La lettre exprès comporte tout d'abord la taxe de la lettre simple ; on la traite d'abord comme si c'était une lettre simple ; puis il y aura une taxe spéciale pour la remise de la lettre au destinataire. L'article donne au gouvernement le droit de fixer cette taxe. La lettre exprès sera portée au domicile à quelque distance que ce soit. Seulement, messieurs, on comprend que l'indemnité, pour cette remise à domicile, augmentera en raison de la distance ; mais on pourra faire remettre des lettres exprès dans toutes les parties du pays comme on remet aujourd'hui des dépêches télégraphiques.

M. Coomans. - Je commence enfin à comprendre ; mais voici encore une difficulté : ces lettres seront donc plus favorisées que les dépêches télégraphiques ? Aujourd'hui on ne porte pas les dépêches télégraphiques à toutes les distances. (Interruption.) Je vous demande un million de fois pardon, puisqu'on refuse le transport d'une dépêche télégraphique, parce que le point de destination est trop éloigné, (Interruption.)

Est-ce une erreur ? Soit. Vous portez les dépêches télégraphiques à toutes les distances, bien ; vous allez en faire autant pour les lettres exprès, bien encore.

- L'article 3 est mis aux voix et adopté.

- Plusieurs membres. - A demain !

- La séance est levée à 4 1/2 heures.