(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1864-1865)
(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)
(page 731) M. de Moor, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. de Florisone, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Moorµ présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.
« Les sieurs Viane et Debbaut, président et secrétaire d'une société littéraire à Rousbrugge, proposent des mesures pour assurer la sincérité des élections et pour étendre le droit de suffrage. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi sur les fraudes électorales.
« Le sieur de Valensart demande que l'administration forestière permette, pour cette année, aux habitants des communes du Luxembourg de ramasser les feuilles sèches qui se trouvent dans les bois. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des officiers ayant fait partie des anciens régiments de réserve demandent le remboursement des sommes qui leur ont été retenues en vertu d'un arrêté du 6 décembre 1839. »
M. Lelièvre. - J'appuie la réclamation et je demande qu'elle soit renvoyée à la commission des pétitions, avec prière de faire un prompt rapport.
- Cette proposition est adoptée.
« M. David, que des affaires urgentes retiennent chez lui, demande un congé de huit jours. »
- Accordé.
MfFOµ. - Messieurs, je prie la Chambre de vouloir bien fixer le jour de l'examen du projet de loi sur les travaux publics. Si la Chambre pouvait s'en occuper dès demain, je crois que cela serait très utile. Ce n'est pas au point de vue des travaux publics que je parle, mais au point de vue de l'emprunt. Il importe de ne pas perdre les circonstances favorables à la réalisation de cet emprunt.
Peut-être pourrait-on disjoindre la proposition d'emprunt, sauf à prendre tout le temps nécessaire pour examiner la partie du projet de loi relative aux travaux publics.
M. de Brouckere. - Messieurs, je crois que rien ne s'oppose à ce que le projet de loi soit examiné en sections après la déclaration que vient de faire M. le ministre des finances. Chaque section pourra examiner en commençant la question de disjonction.
Ainsi, les sections qui désireraient s'occuper plus ou moins longuement de la partie du projet de loi concernant les travaux publies, demanderont la disjonction et se prononceront sur l'emprunt ; et si plusieurs sections sont d'avis d'en agir ainsi, il y aura un rapport spécial sur la partie du projet qui est relative à l'emprunt.
MpVµ. - La proposition qui est faite consiste à réunir demain les sections pour examiner le projet de loi sur les travaux publics ou tout au moins la partie de ce projet relative à l'emprunt. (Appuyé.)
Comme il n'y a pas d'opposition, les présidents des sections seront invités s les convoquer demain.
Compte rendu des opérations de la caisse d’amortissement
MfFOµ. - Messieurs, en exécution de l'article 16 de la loi du la novembre 1847, j'ai l'honneur de déposer le compte rendu des opérations de la caisse d'amortissement, de dépôts et consignations pendant l'année 1864.
- Impression et distribution aux membres de la Chambre.
MpVµ. - La Chambre est arrivée à l'article 4. Cet article est ainsi conçu :
Art. 4. La décharge de l'accise à l'exportation est fixée comme il suit
« Sucre brut indigène non humide (les 100 kilogrammes) :
« N°8 à 12 exclusivement : fr. 43
« N°12 et au-dessus : fr. 45
« Sucre raffiné (les 100 kilogrammes) :
« En pains : fr. 53 50
« Candis : fr. 57.
« § 2. Le gouvernement peut subordonner la liquidation définitive de la décharge des droits sur le sucre exporté, à la production de la quittance ou de tout autre document officiel délivré à l'entrée du pays limitrophe et établissant la conformité, quant à la quantité et à la classe du sucre, entre les déclarations faites dans les deux pays. »
A cet article se rattachent deux amendements.
Premier amendement :
« La décharge de l'accise à l'exportation est fixée comme suit ;
« Sucre brut indigène non humide, n°8 à 10 exclusivement, 43 fr.
« Idem, n°10 et au-dessus : 45 fr.
« (Le reste comme au projet.)
« F. Bricoult, Ch. Carlier, T'Serstevens. »
Cet amendement a été développé et imprimé.
L'autre a été déposé hier ; il est signé par : MM. Bara, Crombez, Devroede, Allard, Warocqué et J. Jouret. Il ne diffère de l'autre amendement qu'en ceci : au lieu des n°8 à 10, l'amendement propose de dire : « n°8 à 11 exclusivement. »
M. T'Serstevensµ. - Messieurs, au nom des honorables MM. Bricoult et Cartier et au mien, je déclare que nous retirons notre amendement, pour nous rallier à celui qui a été déposé par MM. Bara et consorts
MpVµ. - Le premier amendement est retiré.
M. Dumortier. - Au besoin, je le reprends.
MpVµ. - Le second amendement n'a pas été développé ; un des signataires de l'amendement demande-t-il à le faire ?
M. Bara. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer, d'accord avec plusieurs honorables collègues, un amendement ayant pour but de substituer, à l'article 4 du projet de loi, le n°11 au n°12, de telle sorte que la restitution à la sortie sera de 43 fr. sur le n°11 exclusivement, et à partir du n°11 de 45 fr.
Messieurs, cet amendement est une transaction entre les prétentions de l'industrie sucrière auxquelles voulait donner satisfaction l'amendement de mon honorable collègue, M. Carlier, et le projet du gouvernement.
J'espère que cet amendement sera favorablement accueilli par la Chambre.
Nous ne devons pas nous le dissimuler, l'industrie sucrière est très importante sous un double point de vue. D'abord, au point de vue de l’agriculture, car l'industrie sucrière, quoi qu'on en dise, fait beaucoup de bien à l'agriculture et a augmenté, dans un grand nombre d'arrondissements, la valeur de la terre. D'un autre côté, l'industrie des sucres fournit aux ouvriers des campagnes, pendant l'hiver, un travail qu'ils ne peuvent trouver ailleurs. Sous ce double rapport, cette industrie mérite vos sympathies.
Je ne crois pas que l'amendement qui vous est proposé puisse faire grand tort au trésor. L'honorable ministre des finances est certain que le chiffre de 6 millions sera atteint. Dès lors le sacrifice possible pour le trésor est véritablement insignifiant, quand bien même on admettrait les craintes de l'honorable ministre des finances.
Cet amendement détruit-il l'harmonie de la convention ? En aucune manière. Il est bien dit dans la convention que le rendement doit être de 1,500 grammes ; mais il n'est dit nulle part dans la convention que c'est une condition sine qua non de son acceptation que les 1,500 gr. doivent être mis en rapport avec le n°12.
Du reste si la convention doit être utile aux industries belges, je suis convaincu qu'elle sera aussi très utile à l'industrie anglaise, à l'industrie française et à l'industrie hollandaise. Vous savez combien la Hollande et l'Angleterre sont difficiles, et je suis convaincu qu'elles ont pris toutes leurs mesures pour ne rien perdre a la convention. Elles connaissent la situation de notre industrie et elles ont certainement pris leurs mesures pour lutter contre nous.
Hier encore le ministère et la Chambre ont voté un amendement qui (page 732) permettra aux sucres hollandais en poudre d'être introduits dans le pays. Cet amendement a soulevé des objections de la part des industriels belges et, malgré cela, nous l'avons maintenu pour montrer tout notre désir de voir accepter définitivement la convention et parce que nous croyons qu'il ne peut produire de désavantages pour l'industrie belge, grâce aux précautions que prendra le gouvernement pour empêcher la fraude.
Je crois que, dans ces conditions, nous pouvons parfaitement voter l'amendement déposé, qui, comme je l'ai dit, est une transaction.
M. de Borchgraveµ. - L'amendement de MM. Carlier, Bricoult et T'Serstevens donnait, à mes yeux, une plus entière satisfaction aux réclamations des fabricants de sucre.
J'ai entendu avec peine qu'il était retiré par ses honorables auteurs.
Quoique l'amendement de l’honorable M. Bara ne soit pas aussi favorable aux intérêts des réclamants, par conciliation l'honorable M. Thonissen et moi déclarons nous y rallier.
M. Dumortier. - Messieurs, l'article en ce moment en discussion est, pour les fabriques de sucre indigène, un des plus graves de la loi.
Par l'article 16 de la convention, la prise en charge s'est trouvée élevée de 14 à 15 hectogrammes, ce qui crée pour l'industrie sucrière une charge annuelle et non remboursable de la somme de 800,000 francs. Cette élévation est un fait excessivement grave qui a été combattu non seulement dans cette enceinte mais aussi hors de cette enceinte.
La chambre de commerce de Mons, dans un rapport qui vient de nous être distribué, s'exprime comme suit :
« Nous tenons à constater que si, en France, le conseil supérieur de l'industrie et le corps législatif ont, l'un proposé, l'autre voté sans hésitation la suppression de l'abonnement, ç'a été parce qu'on a reconnu qu'au taux de 1,425 gr., il ne pouvait être avantageux et partant praticable que dans certains départements et dans certaines localités. Les déposants se sont accordés à constater que la betterave la plus riche est celle des pays neufs et que, dans les pays de culture avancée, il ne faut pas compter sur un rendement du jus de betterave en sucre quelque peu supérieur à 1,400 grammes, »
Je tenais, messieurs, à vous donner connaissance de cette partie du rapport de la chambre de commerce de Mons, pour vous faire voir combien est peu satisfaisante pour l'industrie la convention dont il s'agit et qu'hier on vous représentait bien à tort selon moi, comme un bienfait pour l'industrie sucrière.
L'industrie sucrière est double : il y a la fabrication du sucre de betteraves ; il y a le raffinage des sucres ; la fabrication du sucre de betteraves n'avait nul besoin de la convention, elle ne la demandait pas et elle n'y trouve aucune espèce d'avantage ; car certes on ne viendra pas dire que les changements apportés à son régime et qui consistent l'un à élever la prise en charge de 1,400 à 1,500 grammes, l'autre à diminuer le rendement, que ces changements sont pour la fabrication du sucre un avantage. Aujourd'hui l'industrie n'est prise en charge qu'à raison de 1,400 grammes, et elle exporte tous ses produits jusqu'au n°8 au remboursement de 45 francs. L'article actuel lui porte un deuxième coup également très fatal, comme j'avais l'honneur de vous le dire. Dans la situation actuelle, et je prie la Chambre d'y faire attention, dans la situation actuelle, tous les sucres de betteraves secs et blancs jusqu'au n°8, sont exportés à raison de 45 fr. de remboursement ; le projet de loi propose de ne rembourser 45 fr. que sur les sucres au-dessus du n°12 et d'admettre à l'exportation les sucres n°8 à 12 avec un remboursement de 43 fr. c'est-à-dire à 2 fr. de moins que le remboursement actuel. Si c'est là un avantage pour l'industrie sucrière !...
L'avantage de la convention, c'est de mettre le raffinage à même de se relever, et sous ce rapport la betterave y a un intérêt indirect, mais la convention ne lui donne aucun avantage direct et elle rend sa position beaucoup plus mauvaise qu'elle ne l'est aujourd'hui.
L'article actuel n'est pas fait en exécution de la convention, il est fait contrairement à la convention. Que porte en effet la convention ? Elle dit à l'article premier, quelles seront à l'avenir les bases du remboursement.
L'article premier de la convention pose des principes qui doivent, dans tous les pays contractants, servir de base à la loi qui sera portée sur les sucres.
L'article premier indique le minimum de rendement des sucres et il donne le numéro d'après le type hollandais.
Dans l'article 2, que vous avez voté, qu'a fait M. le ministre des finances ? Il a exécuté la convention.
Dans les calculs qu'il a posés il a établi qu'en dessous du n°6 les sucres pourraient entrer avec le droit de 40 fr. 50 ; du n°7 au n°10, 43 fr., du n°10 au n°15, 45 fr, ; du n°15 au n°18, 46 fr.
Veuillez remarquer, messieurs, que d'après la déclaration du ministre ces chiffres sont, à quelques centimes près, en corrélation exacte avec le rendement annoncé à l'article premier de la convention internationale, puis viennent les calculs des chiffres.
Ainsi ce qui est conforme à la convention, ce n'est point l'article 4 qu'on discute en ce moment, c'est l'article 2. L'exposé des motifs et les notes à l'appui vous en donnent la démonstration la plus évidente.
Or, si, comme le dit l'honorable ministre des finances, ce calcul est exact, s'il est en corrélation avec l'article premier de la convention, comment se fait-il que l'article 4 puisse être en corrélation avec cet article ?
Voilà ce que je ne puis comprendre !
Il est évident que si, les deux articles étant différents, l'un d'eux est en corrélation avec l'article premier de la convention, l'autre ne l'est pas. Or, que porte l'article 4 ?
Au lieu d'établir le chiffre au-dessous du n°7 a fr. 40.50, il supprime 7 catégories. Ici on dit du n°8 au n°12, fr. 43, du n°12 et au-dessus, 45 fr., de manière que l'échelle est complètement renversée et qu'elle l'est au détriment des fabriques indigènes pour l'exportation et cela précisément dans les catégories qui servent le plus à l'exportation et qui, d'après les données de M. le ministre des finances, données que je n'accepte en aucune manière comme types, doivent servir de bases à l'impôt.
Je me demande comment il se fait qu'on puisse admettre de pareilles choses lorsqu'on affiche les principes du libre échange et de l'économie politique ; comment on peut avoir deux poids et deux mesures, les uns pour l'entrée, les autres pour la sortie.
Voyons les conditions ?
Voici deux négociants ; l'un introduit en France 300,000 kil. de sucre de 3 types, l'autre a fabriqué dans le pays 300,000 kil. de 3 types.
Les sucres des deux côtés sont en entrepôt. Qu'arrivera-t-il ? C'est que le négociant qui introduit les sucres étrangers doit les faire sortir aux conditions de l'article 2, tandis que le négociant qui aura du sucre indigène ne pourra pas le faire sortir aux mêmes conditions.
Je ne comprends pas cette manière de faire. Si l'on veut faire du libre échange, qu'on le fasse en entier ; je ne puis admettre un libre échange renversé.
Si vous comparez les deux tarifs, quelle est la conséquence ? C'est que tous les sueres de betterave étant pris en charge à 45 fr., quelle que soit la qualité, il en résulte que lorsque les sucres français ou étrangers quelconques de basse qualité entreront en Belgique, ils jouiront d'une prime de fr. 4 50 et que les sucres de seconde qualité jouiront d'une prime de 2 francs au préjudice des sucres indigènes.
Est-ce là du libre échange ? Est-ce là de l'économie politique ? On va plus loin ; les sucres au-dessous du numéro 8 sont prohibés à la sortie. Je conçois qu'autrefois, quand les sucres n'avaient point de types et que, quelle que fût leur couleur, ils recevaient une décharge de 45 fr., je conçois, dis-je, que M. le ministre ne laissait pas sortir les sucres de basse qualité avec la décharge alors accordée par la loi,
Mais cette loi est tombée. Nous avons maintenant l'échelle des types. Eh bien, je dis qu'il n'est pas logique de laisser sortir les sucres de basse qualité à 45 fr. Pour être conséquent avec vous-même, vous devez établir la corrélation entre les deux articles. Si vous ne le faites pas, vous frappez d'une nouvelle verge l'industrie nationale, vous la frappez en lui faisant payer 45 fr. de droit alors qu'à la sortie vous ne remboursez qu'à 43 fr. C'est un impôt de 2 fr. que vous frappez sur le travail national.
Je n'aurais jamais pu croire qu'un pareil système pût être présenté dans un parlement et je ne crois pas qu'un tel système soit présenté dans aucun pays ; il ne le sera certainement pas en France.
MM. Carlier, Bricoult et T'Serstevens avaient présenté un amendement qui du moins rentrait quelque peu dans la disposition de l'article 2. Le point de départ du remboursement était le n°10, comme il l'est dans l'article 2, et là du moins, si les sucres de basse qualité étaient prohibés, justice était rendue en établissant l'égalité contre l'importation et l'exportation.
Comment se fait-il que ces honorables membres aient retiré leur amendement pour se borner à un seul numéro ? Je leur demanderai d'abord : connaissent-ils ce que c'est que le numéro, savent-ils quelle différence il y a entre le n°11 et le n°12 ? Cette différence est tellement imperceptible que c'est à peine si elle est saisissable, de manière qu'en définitive, ils ne font rien pour l'industrie.
Il ne faut pas s'imaginer que c'est là une transaction ; c'est un véritable sacrifice de l'industrie nationale ; c'est un véritable sacrifice au profit de l'industrie étrangère, au profit du système du minimum qu'on veut (page 733) maintenir envers et contre tous et qu'à défaut de moyens réguliers, on comble en puisant dans la poche des fabricants de sucre. C'est un sacrifice de 1,400,000 francs que vous exigez de l'industrie nationale pour n'avoir pas de déficit.
Voilà tout le système de cette loi. On a commencé par prendre 800,000 francs en écartant la prise en charge à 1,400 grammes, prise en charge fixée d'après tous les règlements français, non pas, comme l'a dit hier encore M. le ministre des finances, sur le n°12, qui est un sucre mélangé de mélasse, mais sur le premier type qui est le n°16 à 18. Les documents français, la loi, tout est là pour le prouver et l'exposé des motifs présenté par M. Smits en 1842, est encore là pour nous prouver que c'est le premier type français qui doit servir de base à l'impôt.
Quant au n°12, est-ce le premier type ? Non, c'est le quatrième ; il n'est connu en France que sous le nom de « bonne quatrième. » Avec ce numéro je comprends que vous arriviez à 1,500 grammes, mais en faisant payer 8 à 10 p. c. de mélasse comme si c'était du sucre.
Mais si le n°12 n'est point le type de la prise en charge, il est du moins, d'après la convention, la base du droit.
Eh bien, cette base du droit que comprend-elle ? Précisément les n°10 à 14.
« Le droit à percevoir dans les fabriques de sucre abonnées sera le droit auquel seront soumis les sucres exotiques des n°10 à 14. »
Voilà ce que porte l'article 16, page 23 du projet de loi.
MfFOµ. - Donc douze.
M. Dumortier.µ. - Donc douze, me dit M. le ministre des finances.
En vérité, messieurs, je croyais que je parlais ici devant une assemblée sérieuse. Comment ! quand la convention vous dit que la base du droit sera le droit auquel seront soumis les sucres exotiques des numéros 10 à 14, vous viendrez prétendre que cela équivaut au numéro 12 ! Que signifient ces mots « des numéros 10 à 14 ? » Mais évidemment que l'on fait de ces numéros une catégorie ; et en effet, vous le dites clairement à l'article 2. Pourquoi donc ne pas reconnaître que tel est également le sens de l'article 4 du projet ? Si vous ne le faites pas, vous mettrez encore une fois la convention de côté.
Relisons encore une fois l'article 16 :
« Le droit à percevoir dans les fabriques de sucre abonnées sera le droit auquel seront soumis les sucres exotiques des n°10 à 14. »
Maintenant, je prends le projet de loi ; à quel droit sont soumis les n°10 à 14 ? Les n°10 à 14 et même le n°15 sont soumis au droit de 45 francs. Par conséquent, vous ne pouvez pas, sans violer la convention, refuser à ces n°10 à 14 l'exportation à un autre droit que celui qui est perçu à l'entrée. - Eh bien, c'est précisément ce qu'avait demandé l'honorable M. Carlier, car son amendement n'était autre chose que l'exécution stricte de la convention.
Je prie mes honorables collègues de jeter les yeux sur la phrase finale du premier paragraphe de l'article 16, et ils verront qu'il est de toute évidence que ce sont les n°10 à 14 qui doivent servir de base, et non pas le n°12, comme le dit M. le ministre des finances.
Quand vous scindez cela, quand vous refusez cette décharge, alors que vous-mêmes l'établissez comme prise en charge, vous violez la convention au détriment du fabricant belge.
Je dis donc que l'honorable M. Carlier n'avait fait que rentrer dans les termes les plus clairs de la convention, en présentant son amendement.
Vous avez déclaré que votre n°12 était un type. J'admets pour un instant votre raisonnement ; mais, si votre n°12 est un type, c'est un centre pour les numéros voisins, et vous ne pouvez pas en faire une limite. Le milieu, c'est 12. Tous les numéros se rattachent à des centres. Il en est ainsi, par exemple, des n°10 à 14.
En effet, l'article premier de la convention porte en accolade les n°10 à 14 ; il en fait un groupe dont le rendement est fixé à 85 kilog.
C'est donc encore une fois se mettre à côté de cette convention que de combattre l'amendement proposé par l'honorable M. Carlier. La convention, dans deux de ses articles, parle, ordonne. Vous nous parlez de l'exécution de la convention ; commencez par l'exécuter vous-même.
En résumé, je demande que les conditions soient les mêmes à l'entrée qu'à la sortie. Mais si cette disposition n'est pas acceptée, je demande subsidiairement que l'amendement de l'honorable M. Carlier soit voté, parce que cet amendement n'est que l'exécution franche et sincère de la convention.
MpVµ. - L'amendement de M. Carlier est retiré.
M. Dumortier. - Je le reprends.
MpVµ. - Rédigez votre proposition, et faites-la parvenir au bureau,
MfFOµ. - Messieurs, si l'on voulait suivre l'honorable préopinant, les discussions seraient interminables : s'il me fallait rencontrer de nouveau toutes les observations qu'il vient de présenter après les avoir déjà si souvent reproduites, il serait nécessaire de recommencer toute cette discussion.
Que vient-il, en effet, de dire encore à la Chambre, dans le long discours qu'il a prononcé ? Précisément tout ce qu'il avait dit et répété antérieurement et tout ce que je crois avoir complètement réfuté.
M. Dumortier. - Vous n'avez rien réfuté du tout.
MfFOµ. - Oh ! vous ne l'admettrez pas, je le sais parfaitement ; vous ne reconnaîtrez certainement pas que les objections que j'ai cru devoir opposer à vos arguments eussent quelque valeur, je le veux bien. Mais je ne suis pas obligé de les reproduire sans cesse ; mes paroles n'ont pas l'avantage de vous convaincre ; je ne suis pas convaincu par les vôtres. Eh bien, que la discussion entre nous s'arrête là. Je ne me crois nullement tenu de démontrer de nouveau qu'il n'y a absolument aucune analogie à établir entre les droits à l'entrée et la restitution à la sortie.
M. Dumortier. - Démontrez cela.
MfFOµ. - Je l'ai déjà démontré à satiété. Je vous ai dit que les deux cas, entre lesquels vous établissez une complète analogie, sont précisément des contraires ; que l'un est l'antipode de l'autre. J'ai fait comprendre non pas à l'honorable M. Dumortier mais à la Chambre que, dans le premier cas, il s'agit d'un impôt à verser au trésor, tandis que, dans le second cas, on cherche au contraire à puiser dans la caisse de l'Etat. Quelle analogie voulez-vous donc établir, entre des faits aussi diamétralement opposés ?
Je ne reviendrai pas davantage sur la question de la prise en charge à 1,500 grammes : nous n'en finirions pas ; le sujet est épuisé et l'article est voté par la Chambre. Les observations de l'honorable membre, au sujet de cette énormité, comme il l'appelle, n'auraient quelque valeur que s'il avait établi l'impossibilité de produire 1,500 grammes de sucre du n°12. Toute la question était là. Or, à l'exception de l'honorable M. Dumortier, on est généralement d'accord pour reconnaître ques cette production peut être atteinte. Le projet de loi porte à l'article 4 :
« Art. 4. La décharge de l'accise à l'exportation est fixée comme il suit :
« Sucre brut indigène non humide (les 100 kilogrammes) :
« N°8 à 12 exclusivement : fr. 43
« N°12 et au-dessus : fr. 45
« Sucre raffiné (les 100 kilogrammes) :
« En pains : fr. 53 50
« Candis : fr. 57. »
Nous avons dit que cette disposition était l'exécution loyale de la convention.
Quelques membres ont pensé d'abord que l'on pouvait, sans porter atteinte à l'esprit dans lequel la convention a été formulée, descendre même jusqu'au sucre n°10, pour obtenir la restitution d'une somme de 45 francs, comme si ce même sucre n°10 avait été réellement soumis à un droit de 45 francs.
Cependant, les honorables auteurs de l'amendement primitif l'ont retiré.
Maintenant au lieu d'appliquer la restitution des 45 fr. aux sucres des n°8 à 10, on propose de l'appliquer seulement aux n°8 à 11. Tel est l'objet d'un nouvel amendement présenté par l'honorable M. Bara et quelques-uns de ses collègues.
Il est évident, messieurs, et je ne fais aucune difficulté à le reconnaître, que la substitution du n°11 au n°10 atténue dans une certaine mesure les objections que j'ai présentées contre la première proposition. Le nouvel amendement, combiné avec le maintien du minimum que les honorables membres entendent loyalement ne pas supprimer, n'aura pas les inconvénients de cette première proposition.
Le trésor n'a donc plus dans la question qu'un intérêt relativement assez minime, et dès lors je n'aurais guère de motifs, en me plaçant au point de vue exclusif ds cet intérêt, de combattre l’amendement.
Mais, à mon avis, cet amendement est de nature à compromettre le sort de la convention, et à donner ailleurs des griefs contre la sanction de cet acte international par l'une ou l’autre des parties contractantes. En effet, messieurs, l'impôt de 45 fr. établi sur les n°10 à 11, on pouvait comprendre que l'on restituât l'intégralité de ce droit sur le n°12 qui est la moyenne de la série ; mais c'est beaucoup trop de demander le même avantage pour le n°10. L'inconvénient est moindre lorsque l’on ne va que jusqu'au n°11, mais encore c'est là une dérogation au (page 734) système de la loi, c'est une innovation qui n'est pas en harmonie avec la convention. C'est donc dans l’intérêt de la convention elle-même, de cet acte qui, quoi qu'en dise l'honorable M. Dumortier, est très favorable aux fabricants de sucre, que je ne puis me rallier à l'amendement.
Messieurs, je puis annoncer à la Chambre une nouvelle qui est peut-être de nature à faire retirer l’amendement. Jusqu'à présent, nous avions seulement l'espérance que la France supprimerait le droit de 2 francs qu'elle impose à l'entrée du sucre de betterave, eh bien, je suis informé officiellement que la France consent à la suppression de ce droit. Or, c'est la un avantage plus considérable que celui que l'on espère obtenir par l'adoption de l'amendement présenté par les honorables MM. Bara et consorts.
M. Dumortier. - Où est l'avantage si vous prenez ces 2 fr. aux industriels ?
MpVµ. - M. Dumortier vient de faire parvenir au bureau l'amendement suivant :
« Au-dessous du n°7, 40 fr. 50.
« Du n°7 au n°10 exclusivement 43 fr.
« Du n°10 au n°15 exclusivement 45 fr.
« Du n°15 au n°18 exclusivement 46 fr.
« Subsidiairement je reprends l'amendement de M. Carlier. »
M. Dumortier. - Messieurs, je demandais à M. le ministre des finances, quel était le si grand avantage qu'il nous présentait, en disant que la France supprimait son droit de 2 fr. Evidemment, ce serait un avantage, si cette suppression de droit n'était immédiatement compensée par une perte égale.
MfFOµ. - Laquelle ?
M. Dumortier. - Laquelle ? Je vais vous le dire.
La France supprime donc le droit d'entrée de 2 fr. et la Belgique supprimera de son côté son droit de 1 fr. 20 c., qui, sur le marché intérieur, était une garantie d'une certaine valeur pour l'industire nationale.
Que vous l'approuviez ou que vous ne l'approuviez pas, c'est une autre affaire. Mais vous conviendrez que c'était un avantage qui était accordé à l'industrie nationale et qui se trouve supprimé.
D'un autre côté, quel est l'avantage pour les sucriers indigènes de voir la France supprimer un droit de 2 francs à l’importation, si à la sortie M. le ministre des finances leur prend le même chiffre ? Comment, aujourd'hui, quand ils exportaient du n°10, du n°11, du n°8, ils obtenaient la restitution à 45 fr. et vous ne voulez plus leur donner que 43 fr. ! Mais, de 43 à 45 fr., il y a 2 fr. d'écart, de manière que vous faites tourner au profit du trésor seul l'avantage que la France fait aux fabricants de sucre de betterave. Ne vous vantez donc pas de cet avantage, vous prenez ce que la France nous donne ; et vous appelez cela un avantage pour les fabricants de sucre ? Mais c'est une plaisanterie.
M. le ministre drs finances croit avoir répondu aux objections que nous avons eu l'honneur de vous présenter, en citant qu'à l'entrée et à la sortie les deux cas sont tout à fait différents, que d'un côté l'on se présente pour payer au trésor, que d'un autre côté l'on se présente pour être remboursé par le trésor. Cela ne touche en rien à la question.
La convention internationale a-t-elle, oui ou non, déclaré que les n°10 à 14 doivent former une catégorie entre eux ? L'a-t-elle déclaré à l'article premier et à l'article 16 ? Et la convention internationale a-t-elle, oui ou non, déclaré que cette catégorie sera remboursée au drawback de 85 kil. après le raffinage ?
Si donc la convention elle-même l'a réglé ainsi, si dans l'article premier en exécution de ces chiffres, vous avez fixé l'entrée à 45 fr., vous ne devez pas être illogique, vous ne devez pas refuser la décharge au même taux. Vous avez tenu compte de la prise en charge, et en fixant votre prise en charge à 15 hectogrammes, vous avez abaissé considérablement le type qui servait à la fabrication du sucre de betterave. Au moyen de cet abaissement, vous arrivez, par voie de calculs, à établir que les chiffres que vous donnez dans l'article 2 sont en corrélation exacte avec la convention.
Eh bien, quels sont ces chiffres en corrélation exacte avec la convention ? C'est que les n°10 à 15 représentent un droit de 45 fr. Or, s'ils représentent un droit de 45 fr., peu importe qu'il s'agisse de l'entrée ou de la sortie, vous devez tenir compte de cette condition qui se trouve dans la convention.
Il importe peu que l'industrie se présente avec des sucres pour payer des droits ou pour être remboursée de ces droits ; cela ne change rien à la vérité, et la vérité est qu'aux termes des articles 1 et 16 de la convention, les n°10 à 15 représentent un droit de 45 fr., et que vous ne pouvez refuser, à la sortie, ce droit de 45 fr. sans violer la convention elle-même, sans la mettre de côté.
M. le ministre des finances vient de dire qu'il ne pouvait accepter l’amendement, parce que ce serait compromettre la convention. Mais s'il y avait quelque chose de nature à compromettre la convention, ce serait de ne pas exécuter la convention, et vous ne l'exécutez pas, je le démontre. M. le ministre s'est bien gardé de répondre à cela. Il préfère se tenir dans des généralités, vous effrayer en disant : Si vous votez cet amendement, la convention sera rejetée. C'est plus facile que de discuter.
Mais je le prie de rencontrer les chiffres de la convention et notamment les articles 1 et 16. Tous deux déclarent que les n°10 à 14 sont une série unique et d'après les calculs présentés par M. le ministre lui-même, cette série unique représente le droit de 45 fr. Or, si vous établissez ce droit à l'entrée, vous ne pouvez, sans une profonde injustice, refuser le remboursement de ce même droit à la sortie.
Car refuser aux industriels à la sortie le remboursement sur le taux auquel vous recevez, c'est évidemment sortir de vos principes de libre échange, c'est sortir de vos principes d'économie politique, c'est puiser dans la poche des contribuables pour arriver à couvrir votre minimum, et cela n'est pas permis.
Comment ! lorsque je suis venu vous demander la prise en charge au moyen, de l'exercice au moyen du travail en entrepôt, vous vous y êtes refusé. Vous parlez encore de primes. Mais où sont les primes quand les industriels eux-mêmes, dans leur pétition, vous demandent la faculté de pouvoir se soumettre à l'exercice ? De prime il n'y en a pas.
Vous savez fort bien que votre prise en charge de 1,500 grammes ne peut être admise comme moyenne en Belgique, qu'il y aura des déficits considérables dans les mauvaises années, que ces déficits s'élèveront à 200 et 500 grammes, que des pertes énormes atteindront les fabricants, et non contents de les avoir frappés de cette perte, vous leur refusez la plus souveraine justice ; c'est d'être remboursés à la sortie comme le serait un industriel étranger qui viendrait mettre des sucres dans un entrepôt du pays.
MfFOµ. - Plus qu'ils n’auront payé.
M. Dumortier. - Plus qu'ils n'auront payé ! Vous osez dire cela. Mais alors dites que votre convention est un mensonge, que votre convention est une fausseté. Est-ce que par hasard le travail fait par les commissaires du gouvernement n'est pas sérieux ? Comment ! plus qu'ils ne payent ? Mais vous avez remboursé jusqu'à 45 fr. non seulement pour les numéros 10 à 14, mais vous avez remboursé 45 fr. pour le 9, pour le 6 et pour le 7.
Eh bien, ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Il s'agit seulement de conserver à l'entrée les mêmes conditions qu'à la sortie, et si c'est plus qu'ils ne payent, je vous dirai que lorsque vous laissez entrer des sucres étrangers dans ces conditions, vous leur donnez une faveur égale à votre plus qu'ils n'ont reçu.
Les conditions d'entrée et de sortie doivent être les mêmes ; c'est la stricte justice ; et s'il n'en est pas ainsi, qu'est-ce que vous faites ? Vous abandonnez tous vos principes, et j'aurat souvent l'occasion de vous le reprocher ; j'aurai souvent occasion de vous rappeler ce que vous aurez fait. Si vous voulez du libre échange, faites-en, mais fates-en loyalement, sincèrement, honnêtement. Ne venez pas, sous prétexte de libre échange et sous prétexte de convention, accordée des primes à l'étranger au préjudice de l’industrie nationale. Ne venez pas tuer l'industrie nationale au profil du trésor public qui sera singulièrement indemne au moyen de toutes ces primes que vous prélevez sur l'industrie.
Je crois, messieurs, qu'il n'est pas possible de faire une objection sérieuse contre l'amendement présenté par l'honorable M. Carlier. Cet amendement est l'exécution littérale de l'article premier et de l’article 6 de la convention, exécution qui se trouve confirmée par la déclaration que l'honorable ministre des finances a insérée dans l'article 2 et par les calculs de chiffres qui y sont annexés. Vous qui voulez toujours la convention, commencez par l'exécuter. Si vous l'exécutez contre les fabricants de sucre, exécutez-la également dans les dispositions qui sont en leur faveur.
Vous reconnaissez vous-mêmes que le droit est de 45 fr. à l'entrée et encore une fois vous ne pouvez pas refuser de faire le remboursement au même taux.
J'ajouterai, messieurs, que ces chiffres doivent être soumis à une révision, qui sera faite par la même commission internationale.
Je maintiens, messieurs, l'amendement de M. Carlier ; il est commandé par la convention, et ne pas la voter ce serait consacrer la violation de cette convention que vous ne cessez de vanter.
(page 735) M. Jacquemyns. - Messieurs, je viens combattre l'amendement de l'honorable M. Dumortier par des raisons tirées des chiffres ; je vais les présenter en très peu de mots.
L'honorable M. Dumortier préférerait l'exercice, mais si l'exercice était adopté, il faudrait admettre pour l'accise sur le n°12 le chiffre de 45 fr., et un chiffre inférieur pour le n°10. Telle est la base de notre système pour l'abonnement.
J'ei eu l'honneur de dire déjà à la Chambre que je ne prévoyais pas une très longue durée pour la loi actuelle, je crois que ce serait se faire illusion que de compter que la loi actuelle pourrait durer un très grand nombre d'années.
La législation des sucres a varié 17 fois en 24 ans et je ne prévois pas qu'elle soit irrévocablement fixée même par la loi actuelle en présence de la convention, à cause de la nécessité de grouper les divers types.
Il y a entre le n°7 et le n°18, 11 types différents ; il est, sous le rapport pratique, impossible de régler le droit d'accise et la décharge, pour chaque type isolément. Il faut donc les grouper.
La convention internationale a fait un groupement provisoire, la législation française en a fait un autre, la législation anglaise en a fait un autre encore, et il est indispensable de ne point perdre de vue ces circonstances, qui pourraient d'ailleurs varier dans la suite.
Telles qu'elles se présentent aujourd'hui, elles nous imposent un groupement pour la décharge ; l’intérêt de notre industrie nous en impose un autre pour l'accise.
Les deux n'ont de commun que d'être également conformes à la convention internationale.
Je m'attache pour le moment exclusivement à celui qui a été fait pour la décharge. Dans toutes les discussions qui ont eu lieu jusqu'à présent, la majorité de cette Chambre a adopté comme base de l'abonnement pour les fabriques de sucres de betteraves 1,500 grammes du n° 12 en moyenne au droit de 45 fr., et je puis dire dès lors qui si l'exercice était adopté, le n°12 payerait 45 fr. et le n°10 payerait moins de 45 fr.
Il faut donc, au point de vue de la décharge, classer les types de manière que le n°12 soit le plus bas de l'un des groupes, et cela est d'autant plus important qu'en France et en Angleterre le droit sur ce numéro est le même que sur les n°11 et 10.
Admettrions-nous que le gouvernement pût payer une décharge de 45 fr. pour le n°10 ? Je dis que non. En admettant que l'amendement de M. Carlier, repris par M. Dumortier, soit adopté, voyons-en les conséquences. Du type n°8 au n°16 ou 17, le rendement diffère de 81 à 87 p. c. Si l'on suit une méthode d'intercalation pour déterminer le rendement numéro par numéro, on arrive à cette conséquence que la différence est d'environ 1 p. c. entre le n°10 et le n°11, entre le n°11 et le n°12.
Par conséquent admettant un industriel qui ait d'une part 100,000 kil. de n°12 à exporter et d'autre part 102,000 kilogrammes de n°10, je dis que ces quantités sont équivalentes. D'après le classement de la convention, il faudra admettre que les deux quantités produisent le même rendement. Eh bien, pour les 102,000 kilogrammes en sucre n°10 l'Etat devrait payer fr. 45,900, et pour les 100,000 kilog. de n°12 le gouvernement payerait 45,000 francs. Mais dans les pays voisins on percevra par contre des droits proportionnels aux poids, et si ces quantités équivalentes sont importées en France, le gouvernement français percevra pour 100,000 kilogrammes de n°12, la somme de 42,000 fr., et pour 102,000 kilogrammes de n°10, il exigera 42,840 fr.
Ainsi le gouvernement belge payera 900 fr. de plus dans un cas qui dans l'autre, le gouvernement français percevra 840 fr. de plus dans un cas que dans l'autre, et la différence pour le fabricant de sucre de betteraves sera de 60 fr. seulement.
Il peut être commode pour les fabricants de sucre de betteraves de pouvoir exporter du n°10 aux mêmes conditions que le n°12, mais ils n'y trouvent financièrement parlant qu'un avantage très insignifiant.
Si le gouvernement belge alloue la même décharge pour le n°10 que pour le n°12 sur les 900 fr. dont je viens de parler, il n'y a que 60 fr. qui tourneront au profit du fabricant de sucre de betteraves indigène et il y aura 840 fr, qui tourneront au profit du trésor français.
Ainsi l'amendement de l'honorable M. Dumortier consiste en ceci : il propose au gouvernement belge d'effectuer des payements considérables dont les 93/100 tourneraient au profit du trésor français et 7/100 seulement au profit des fabricants belges.
M. Dumortier. - Quand on paye ses dettes, on remplit son devoir.
M. Jacquemyns. - Voilà, messieurs, les motifs que j'avais à opposer à cet amendement.
M. Carlier. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour soutenir l'amendement qui vous a été présenté par l'honorable M. Bara et pour répondre particulièrement au grief presque unique que M. le ministre des finances a cru devoir articuler contre cet amendement.
Dans les nombreux discours que l'honorable ministre des finances a cru devoir prononcer dans cette enceinte à l'appui du projet de loi, il a, à mainte reprise, articulé contre les partisans de mon amendement primitif et je dirai en même temps contre les partisans de l'amendement que l'honorable M. Bara vient de faire paraître, le reproche de s'attacher beaucoup plus à certains détails du projet de loi qu'aux avantages marqués que la convention assure aux fabricants de sucre indigène.
Je crois, messieurs, que nous avons répondu par des faits bien mieux que par des paroles à ce reproche de M. le ministre et que nous avons répondu de façon à lui faire abandonner cet argument pour tout le reste de la discussion.
En effet, messieurs, dans la séance d'hier, mes bons amis qui siègent sur ces bancs ont donné, en votant l'amendement proposé par le gouvernement et la section centrale à l'article 3, la preuve du désir sincère qu'ils éprouvaient de maintenir la convention internationale dont nous nous occupons en ce moment.
A l'heure qu'il est, messieurs, si j'abandonne l'amendement que j'ai cru devoir soumettre à la Chambre pour me rallier à celui de mon honorable ami, M. Bara, c'est évidemment que je suis mû par la pensée de maintenir pour nos fabricants et nos raffineurs les avantages qu'ils doivent rencontrer dans la convention.
Ces avantages je ne les énumérerai plus, la discussion a été bien longue déjà et l'on peut trouver cette énumération dans l'un des précédents discours de l'honorable M. Jacquemyns qui les a fait ressortir avec beaucoup de talent après avoir étudié la question sous toutes ses faces.
Mais, l'honorable ministre, comme je le disais en commençant, articule contre l'amendement de l'honorable M. Bara ce grief que cet amendement est destiné à faire avorter la convention. Je ne crois pas que ce grief soit fondé et je ne pense pas que l'amendement en discussion puisse, s’il est admis, entraîner le rejet de la convention par l'une ou l'autre des trois autres puissances qui y ont apposé leurs signatures.
Eu effet, messieurs, du moment que dans nos délibérations relatives aux actes internationaux qui nous sont soumis, nous apportons toute la sincérité et toute la loyauté nécessaires, je crois que nous pouvons compter rencontrer une réciprocité parfaite dans le parlement britannique, dans le corps législatif de France et dans les chambres hollandaises.
Eh bien, si j'arrive à démontrer que l'amendement proposé est complément d'accord non seulement avec l'esprit, mais encore avec la lettre de la convention, je crois que j'aurai démontré non seulement pour vous, mes honorables collègues qui voulez bien me faire la faveur de m'écouter, mais encore pour les membres des corps délibérants de France, d'Angleterre et de Hollande qui auront à se prononcer ultérieurement sur la même convention, que l'amendement qui apporte à notre loi belge une légère modification, n'apporte aucune modification à la convention, qui reste, je le répète, d'accord avec la lettre et l'esprit de la convention.
J'arrive, messieurs, à ma démonstration. Elle est aussi courte que facile. Elle a été ébauchée par l'honorable M. Dumortier et se trouve tout entière dans l'article 17.
Ce texte dit en effet :
« La restitution ou la décharge des droits ne sera accordée aux sucres bruts indigènes au-dessous du n°10, provenant de fabriques abonnées, que pour une quantité réduite proportionnellement aux rendements fixés par les articles 1er et 3. »
Que veut dire ce texte ? Evidemment, messieurs, que toutes les parties contractantes ont considéré que, jusques et y compris le n°10, on pouvait avoir la restitution complète des droits sans que cette restitution complète impliquât aucune prime à la sortie des sucres de l'un ou l'autre pays contractant.
Donc nos lois intérieures peuvent accorder une restitution plus forte sans violer la lettre ni l'esprit de la convention.
La convention ne subit aucune atteinte, elle reste entière, et, selon moi, nous pouvons voter l'amendement de l'honorable M. Bara, sans crainte de voir l'une ou l'autre partie contractante s'armer de cet amendement pour refuser de consacrer la convention.
L'honorable ministre dans les divers discours qu'il a prononcés a reproché à certains partisans de mon amendement, à moi peut-être, je n'ai cependant pas entendu mon nom dans le reproche qu'il leur a fait, (page 736) de créer entre les articles 2 et 4 du projet une analogie qui n'existe pas.
Je viens, messieurs, déclarer que je n'ai jamais rencontré entre les articles 2 et 4 aucune analogie.
L'honorable M. Jacquemyns a énuméré, je l'ai dit tout à l'heure, les avantages que présente pour notre travail national la convention qui est en discussion.
Eh bien, j'estime que parmi les avantages que cette convention doit présenter, il faut ranger la disposition de l'article 2 du projet de loi dans la partie qui fait précisément l'objet des attaques de M. Dumortier. Il est inutile qu'une des parties contractantes fasse ressortir tous les avantages qu'elle rencontre dans une convention, alors que cette convention n'est pas signée par toutes les parties. Je ne fournirai pas une ample démonstration de ce que j'avance ; elle résulte de ceci : que les droits fixés par l'article 2 sont les droits qui doivent être payés à l'entrée et que les droits fixés à l'article 4 sont ceux à restituer à la sortie. Or, il est évident que si l'on charge les numéros 10 et 11 à leur entrée plus fort qu'on ne pourrait le faire si l'on restait dans les termes de l'article 4, c'est à l'avantage de nos fabricants.
MfFOµ. - C'est un droit protecteur.
M. Carlier. - Je m'étonne que M. Dumortier, qui a accordé à l'étude de ce projet tant de temps et tant de zèle, n'ait pas remarqué ce que j'ai l'honneur de lui signaler.
M. Dumortier. - C'est un droit protecteur, celui qui vous prend de l'argent dans votre poche ?
M. Carlier. - C'est dans la poche des autres qu'on le prend.
M. Dumortier. - Pardon ?
M. Carlier. - M. Dumortier que j'ai longtemps rencontré pour ami dans la thèse que je défende, n'est pas en complète harmonie avec moi dans les moyens invoqués à l'appui de mon amendement.
C'est ainsi que, parlant de mon amendement, M. Dumortier en est revenu à l'article premier du projet de loi ; mon amendement ne se rattache en rien à l'article premier.
M. Dumortier nous disait tout à l'heure que le négociant étranger qui aurait introduit en Belgique des sucres n°10 et 11 en payant le droit de 45 fr. pourrait toujours faire sortir ou réexporter ses sucres en obtenant la restitution des 45 fr., j'ai vainement lu et relu laconvention et le projet, je ne rencontre nulle part la justification de cette assertion.
M. Dumortier. - J'ai parlé des sucres en entrepôt.
M. Carlier. - Les sucres en entrepôt ne sont introduits que transitoirement ; ils se trouvent dans les mêmes conditions que s'ils étaient encore dans les pays de provenance ; à la sortie, on leur restitue le droit qu'ils ont payé à leur entrée, mais il n'y a là aucun détriment pour nos fabricants.
Mais je parle des sucres réellement importés dans le pays. La loi ne leur accorde pas la restitution de tout ce qu'ils ont payé, elle ne leur accorde qu'une restitution égale à celle qu'obtiendraient les sucres indigènes, et en fût-il autrement je demanderai s'il y a moyen de reconnaître le sucre étranger pour le faire sortir avec la restitution de 45 fr. alors que nos sucres n'obtiendraient qu'une restitution de 43 fr. Je ne crois pas que ce moyen existe.
J'ai dit que je prenais la parole pour soutenir l'amendement de M. Bara et j'ai rencontré le seul argument que l'honorable ministre des finances avait cru devoir opposer à la présentation de cet amendement. Puisque j'ai la parole, je vais me permettre de produire quelques raisons à l'appui de cet amendement.
L'honorable ministre a exposé à diverses reprises à la Chambre qu'en accordant la restitution de 45 fr. au n°12 exclusivement, il avait accordé la restitution à un type moyen, qu'en effet, prenant le type 10 à 14 le type moyen était évidemment le type n°12.
Autant en droit qu'en fait, je crois que cette thèse se présente de manière à être repoussée par la Chambre.
En fait, d'abord, comment les fabricants obtiennent-ils le type n°12 ; de quelle façon obtiennent-ils les divers types qui résultent de leur fabrication ? Dès le début de la fabrication, le jus de la betterave contient plus de sucre, il est plus facile à travailler et l'action des turbines sur le jus s'opère d'une manière plus avantageuse, de telle sorte que dès le début, le fabricant obtiendra assez aisément des sucres de types supérieurs au n°14.
Mais plus tard il n'obtiendra plus que des n°13, 12, 11 et 10. Evidemment si le fabricant est assez riche et possède des locaux assez vastes pour pouvoir conserver à sa disposition les diverses fabrications qui auront amené la production de ces divers types, il pourra réunir tous les types et arriver à faire, par le mélange, du type n°12, et il obtiendra la restitution de 45 fr. parce que l'opération de moyenne que l'honorable ministre met sur le papier, le fabricant l'a opérée matériellement et il arrivera ainsi à obtenir réduction complète des 45 francs tout aussi bien sur les types n°10 et 11 que sur les types n°12, 13 et 14.
N'est-il pas évident que si en fait les négociants riches, disposant de capitaux suffisants, peuvent arriver à ce résultat, nous devons chercher à l'atteindre pour ceux qui ne se trouvent pas dans des conditions aussi avantageuses ?
Voilà pour le fait.
L'honorable ministre déclare qu'il sait très bien que le n°12 est un type moyen et qu'il a choisi ce numéro précisément parce qu'il est le type moyen des diverses fabrications.
Eh bien, je me demande, pourquoi alors que M. le ministre établit sa moyenne entre le n°11 et le n°14 de façon à arriver au type n°12 et cela au détriment du fabricant, au passif du fabricant, il n'établit pas aussi une autre moyenne à l'avantage, à l'actif du fabricant.
Puisque l'honorable ministre accorde aux fabricants une restitution de 45 francs sur le type n°12, une restitution de 43 francs sur les types inférieurs au n°12, pourquoi ne leur accorde-t-il pas une restitution plus grande sur les types n°13, 14 et sur tous les types supérieurs ?
Evidemment, messieurs, si l'on accordait aux fabricants une restitution de 47 francs pour les n°13 et 14, de 45 francs pour le n°12, de 43 francs pour les n°10 et 11, il y aurait une moyenne à établir, et, de même que le gouvernement pourrait dire : Le type 12 est le type moyen, il pourrait dire aussi la restitution de 45 francs est la restitution moyenne. Mais on n'agit pas ainsi, et j'en conclu qu'on ne laisse au gouvernement que les membres inférieurs des différents termes qui doivent concourir à établir la moyenne, et qu'on n'accorde rien à ce qui constitue les membres inférieurs du calcul.
Parmi les arguments que j'avais cru devoir présenter d'abord à l'appui de mon amendement se trouvait celui-ci : c'est que pour les exportations qui se font par la frontière française, notamment l'amendement qui arrêtait au n°12 la restitution du droit intégral, contenait un principe extrêmement fâcheux pour nos nationaux ; qu'en France on n'accordait l'entrée des sucres saus leur faire payer une surtaxe de deux francs, que si le type était inférieur au type 13 ; que, dès lors, nos sucres, qui ne pouvaient obtenir la restitution intégrale du droit payé en Belgique que sur le type 12, auraient extrêmement de difficultés à se faire admettre en France, sans payer la surtaxe de 2 francs, parce que la différence qui existe entre les types 12 et 13 étant extrêmement difficile à saisir, il n'y avait là qu'un passage extrêmement étroit, très périlleux, très difficile à franchir par nos fabricants, pour faire admettre leurs types en France en franchise de cette surtaxe de 2 francs.
C'était un moyen que je croyais de nature à motiver, de la part de nombreux membres de la Chambre, un vote favorable à l'amendement que j'avais présenté.
La déclaration que vient de faire M. le ministre des finances réduit à néant cet amendement.
L'honorable M. Dumortier n'a pas voulu le reconnaître ; je ne dirai pas que j'aurai plus de loyauté que l'honorable membre, mais je crois pouvoir dire que j'admettrai plus aisément ce que dit M. le ministre à cet égard, Mon argument était fondé sur l'existence de la surtaxe de deux francs ; cette surtaxe étant venue à disparaître, mon argument disparaît nécessairement.
En résumé, les divers arguments que j'ai présentés à l'appui de mon amendement lorsque je l'ai développé d'abord et ceux que je viens d'avoir l’honneur de produire à l'appui de l'amendement de l'honorable M. Bara me paraissent concluants en faveur de ce dernier argument. Je crois qu'il ne nuit en rien au maintien de la convention. De plus, M. le ministre des finances a déclaré, et je rappelle cette déclaration en terminant, que cet amendement ne pouvait causer aucun préjudice au trésor. Ces raisons détermineront, j'espère, la Chambre à admettre cet amendement.
- Plusieurs membres. - Aux voix !
MfFOµ. - Je comprends l'impatience de la Chambre. Je serai donc très bref dans la réponse que je vais faire aux observations des honorables préopinants.
Je répète ce que vient de rappeler tout à l'heure l'honorable M. Carlier, qu'au point de vue du trésor, cette question n'offre pas un grand intérêt, le minimum étant maintenu. Seulement, cela est de nature à amener d'une manière plus prompte un déficit, et, partant, l'application de la sanction du minimum, c'est-à-dire la réduction de la décharge ; cela est incontestable.
Cette question peut donc intéresser certaines branches d'industrie également engagées dans la question, Mais l'intérêt du trésor étant (page 737) suffisamment garanti, ce n'est pas sur ce point que je me suis particulièrement appesanti, pour déclarer que je ne pouvais me rallier aux amendements présentés. C'est l'intérêt de la convention même que j'ai invoqué.
A cet égard, les honorables membres nous disent : Mais nous attachons, comme vous, un grand prix au succès de la convention ; nous l'avons prouvé dans la séance d'hier, en accueillant l'amendement introduit par le gouvernement au paragraphe 5 de l'article 3, et qui est de nature à donner satisfaction à certain vœu émis par un pays voisin.
Mais, messieurs, je crois qu'on a admis hier l'amendement, parce qu'on a été convaincu, par les raisons que j'ai données, qu'il n'y avait pas d'inconvénients à l'adopter. Et, en effet, quel inconvénient pourrait-il offrir ?
D'après le projet de loi (et ceci n'est pas contesté), le n°18 est admis au droit de 46 francs. Quel a été l'objet de l'amendement ? De permettre d'introduire les n°19 et 20 avec une surtaxe, c'est-à-dire avec un droit plus élevé, proportionnellement à la richesse saccharine que contiennent ces numéros.
M. de Naeyer. - Quel est le rendement de ces n°19 et 20 ?
MfFOµ. - Il dépend de leur richesse saccharine. J'ai dit que le minimum de la surtaxe serait de 2 p. c. ; c'est donc un droit d'entrée supérieur de 2 p. c. au moins à celui qu'auront à payer les sucres n°18. Le chiffre est à déterminer ; le taux dépendra de la richesse saccharine des n°19 et 20.
Par conséquent ce qu'on a permis de faire pour le n°18, pourquoi craindre qu'on le fasse aussi pour les numéros supérieurs ? Et, dès lors, je ne serais pas reçu à invoquer l'admission de cet amendement pour prouver qu'on a eu l'intention d'accorder une concession dans l'intérêt de l'admission de la convention.
Mais, disent encore les honorables membres, nous ne croyons pas que l’amendement blesse l'esprit ou le texte de la convention ; voyez, dit l’honorable M. Carlier ; l'article 17 de la convention nous donne complètement raison.
L'article 17 porte ceci :
« La restitution ou la décharge des droits ne sera accordée aux sucres bruts indigènes au-dessous du n°10, provenant de fabriques abonnées, que pour une quantité réduite proportionnellement aux rendements fixés par les articles 1er et 3. »
Donc, dit l'honorable membre, il est admis qu'on peut accorder une décharge entière au-dessus du n°10.
Mais cet argument évidemment n'est pas admissible : il est interdit, par l'article 17 de la convention, d'accorder une décharge au n°10, si ce n'est une décharge réduite. Mais c'est qu'on est parti de la supposition qu'on accordera aux numéros supérieurs une restitution calculée dans la proportion du droit établi conformément à l'article 16. (Interruption.) C'est le numéro moyen qui a dû être pris pour base ; par conséquent on n'est pas en harmonie avec la convention quand on veut accorder la restitution intégrale au-dessous du numéro 12 ; il faut n'accorder alors, en dessous du n°12, qu'une restitution moindre. L'inconvénient est naturellement atténué par l’amendement puisque l'on substitue le n°11 au n°10 ; cela est incontestable ; mais il ne subsiste pas moins ; le vice manifeste que j'ai signalé continue d'exister.
L'honorable M. Carlier, messieurs, a reconnu que le droit est en effet, établi sur le n°12, et que par conséquent la restitution ne devrait être opérée que dans les termes du projet de loi.
Mais il dit : Ce que vous faites sur le papier ne peut pas être fait aussi commodément en fabrique : il arrive qu'un fabricant produit des numéros supérieurs même au n°14, et s'il pouvait garder toute sa production, il opérerait un mélange pour ramener tous ses produits au n°12, faisant ainsi en réalité ce que vous avez fait fictivement par les dispositions de la convention, et il obtiendrait alors la restitution intégrale du droit.
Mais il n'en est pas ainsi. Cela ne pourrait être fait que par les fabriques assez riches pour produire des quantités considérables et qui auraient aussi des magasins assez vastes pour y mettre tous leurs produits. (Interruption.)
Voilà l'objection ; et voici ma réponse : En supposant que quelques fabricants qui auraient produit les numéros les plus élevés, voulussent se défaire de leurs sucres, ils ne vendront certes pas ces numéros aux mêmes prix que les numéros les plus bas ; par exemple, ils ne donneront pas le n°14 au même prix que le n°7. Cela est tout au moins probable. Ainsi, sur le marché général, l'opération que l'on dit impossible à faire éventuellement par les fabricants, se fera nécessairement ; c'est dès lors une nouvelle justification de la proposition du gouvernement,
- La clôture est demandée.
M. Dumortier. - (Contre la clôture) ... Messieurs, il est impossible de laisser sans réponse les objections qui viennent d'être présentées par l'honorable ministre des finances. D'un autre côté, j'ai quelques mots à répondre à l'honorable M. Carlier. Je demande à la Chambre de ne pas clore le débat. L'article est important.
- Des membres. - Aux voix !
La clôture est mise aux voix et est prononcée.
MpVµ. - Je vais mettre aux voix les amendements en commençant par ceux qui s'éloignent le plus du projet de loi.
M. Dumortier. - Je retire mon amendement principal et je me borne à reprendre l'amendement de M. Carlier, qui est en rapport direct avec la convention.
MpVµ. - Je mets cet amendement aux voix.
Que ceux qui sont pour cet amendement veuillent bien se lever...
- Des membres se lèvent.
M. Dumortier. - Je demande l'appel nominal.
MpVµ. - Il faut cinq membres.
M. Dumortier. - Vous ne pouvez pas vous refuser à l'exécution du règlement.
MpVµ. - J'avais commencé l'épreuve ; vous deviez parler plus tôt ; du reste, vous étiez seul pour demander l'appel nominal.
Maintenant que ceux qui ne sont pas pour l'amendement veuillent bien se lever.
- L'amendement n'est pas adopté.
M. Dumortier. - M. le président, faites la contre-épreuve.
MpVµ. - Je viens de la faire, et j'ai proclamé le résultat du vote.
Je mets maintenant aux voix l'amendement de MM. Bara, Crombez, Devroede, Allard, Warocqué et J. Jouret.
- Des membres. - L'appel nominal !
- Il est procédé à cette opération. En voici le résultat :
98 membres répondent à l'appel nominal.
1 membre (M. Dumortier) s'abstient.
60 répondent oui.
37 répondent non.
En conséquence, l'amendement est adopté.
Ont répondu oui : MM. de Mérode, de Moor, de Rongé, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Theux, Devroede, de Woelmont, d'Hane-Steenhuyse, Dolez, Dubois, d'Ursel, Elias, Funck, Giroul, Goblet, Hayez, Hymans, Janssens, J. Jouret, M. Jouret, Landeloos, Large, Lelièvre, Lippens, Magherman, Mascart, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Reynaert, Rodenbach, Sabatier, Thonissen, T'Serstevens, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Iseghem, Van Renynghe, Van Wambeke, Warocqué, Allard, Ansiau, Bara, Beeckman, Bouvier-Evenepoel, Bricoult, Carlier, Crombez, de Baillet-Latour, de Bast, de Borchgrave, de Brouckere, de Coninck, de Florisone, de Kerchove, Delaet, Delcour, de Liedekerke et de Macar.
Ont répondu non : MM. de Naeyer, de Terbecq, de Vrière, Dewandre, Dupont, Frère-Orban, Grosfils, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Julliot, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Moreau, Mouton, Muller, Orban, Orts, Pirmez, Rogier, Royer de Behr, Tack, Tesch, Thienpont, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Nieuwenhuyse, Van Overloop, Vermeire, Vilain XIIII, Braconier, Debaets, de Decker, De Fré et Ernest Vandenpeereboom.
MpVµ. - M. Dumortier, qui s'est abstenu, est prié, aux termes du règlement, de faire connaître les motifs de son abstention.
M. Dumortier. - Messieurs, après tous les durs sacrifices qui sont imposés par cette loi à la fabrication des sucres indigènes, à cette grande industrie nationale, je n'ai pas cru devoir accepter en mon nom l'aumône d'un numéro. Voilà pourquoi je me suis abstenu.
M. Goblet. - M. Dumortier a-t-il la prétention de représenter ici l'industrie du sucre de betterave ?
M. de Moorµ. - Vous êtes orfèvre, M. Josse.
M. de Brouckere. - Au nom de la fabrique de M. Dumortier.
M. Dumortier. - Je ne suis pas fabricant. Je parle ici au nom de tous les industriels et je suis autorisé à parler en leur nom.
MpVµ. - Je vais mettre aux voix le second paragraphe de l'article 4.
M. Dumortier. - Je demande la parole.
MpVµ. - La discussion a été close.
M. Dumortier. - Je demande la parole pour une motion d'ordre.
(page 738) Je ne vois pas dans la loi une mesure qui me semble indispensable et qui existe dans toutes les lois semblables.
On admet l'entrée au moyen de types et la sortie au moyen de types. Mais s'il y a des contestations entre l'importateur ou l'exportateur et les agents du fisc, qui décidera ?
MfFOµ. - Les tribunaux.
M. Dumortier. - Encore faut-il le dire.
En France et en Hollande, il y a, de par la loi, des commissions nommées pour régler les différends.
Les numéros du sucre de betterave, surtout entre les numéros 10 et 12, sont tellement voisins les uns des autres qu'il faut des experts extrêmement habiles pour ne pas les confondre. Des contestations peuvent surgir à chaque instant.
En France, la loi établit des commissions dont fait partie le tribunal de commerce, dont font partie telles ou telles autorités pour régler les différends en cas de contestation entre l'administration fiscale et les déclarants.
Je demande comment, en Belgique, seront réglés ces différends.
MfFOµ. - Je demande que la disposition du paragraphe 2 soit appliquée au transit. Je propose donc de dire : « La justification dont parle le paragraphe précédent est également applicable en cas de transit. »
M. Dumortier. - J'ai demandé comment devaient être réglées les contestations.
MfFOµ. - Je vous ai répondu : En cas de contestation, il faut bien se pourvoir devant les tribunaux. C'est ce qui se fait pour toutes les contestations eu matière de douane et d'accise.
M. Dumortier. - Mettez-le dans la loi. (Interruption.) Messieurs, il faut s’expliquer. Nous faisons une loi, il faut la faire sérieusement.
Il n'est pas question ici de procès ; il s'agit seulement de contestations. On conteste si tel sucre se rapporte à tel numéro. Va-t-on, pour régler ces contestations, recourir à des instances, à des plaidoyers, à des jugements ?
MfFOµ. - Si vous ne pouvez vous mettre d'accord ? Evidemment on cherchera d'abord à se mettre d'accord.
M. Dumortier. - Je voudrais bien savoir comment on cherchera à se mettre d'accord.
En France et en Hollande, il y a une commission qui prononce et qui décide sur le numéro réel qui doit être attribué à tel ou tel sucre. Ici qu'arrive-t-il ? C'est qu'en réalité les fabricants sont à la merci des employés du fisc. Je demande si telle est l'intention de la Chambre.
Je suis vraiment étonné que dans une loi pareille il n'y ait pas, comme dans la loi qui vient d'être présentée en Hollande, et dans la loi française, un moyen de régler les différends qui peuvent se présenter.
Il y a plus ; il y a une disposition qui va suivre, dans laquelle on établit des pénalités contre le fabricant qui aura fait une fausse déclaration, et ces pénalités vont jusqu'à l'emprisonnement ; or des déclarations quant au numéro ne sont pas de fausses déclarations, c'est une appréciation. Les n°10, 11 et 12 sont tellement voisins les uns des autres, qu'il suffit d'une légère humidité dans le transport depuis la fabrique jusqu'au bureau de douane pour faire changer le sucre d'un numéro. Voulez-vous frapper les industriels de pénalité, les mettre en prison pour des choses pareilles ?
Je déclare qu'une disposition manque dans la loi. Qu'il y ait dans la loi des dispositions qui garantissent les intérêts du trésor, je le veux bien ; mais il faut aussi une disposition pour empêcher que les industriels soient traînés en prison comme des malfaiteurs, parce que le sucre aura subi l'effet de l'humidité dans le transport. Je suppose qu'on transporte du sucre vers la frontière de France par un temps de brouillard ; je suis certain qu'il baissera d’un numéro. Vous devez prévoir les conséquences qu'il peut en résulter.
MfFOµ. - Si l'on peut être agréable à l'honorable M. Dumortier en nommant une commission pour décider les contestations, je ne m'y oppose nullement. Je consens à nommer cette commission. Je ne sais si l'honorable membre trouvera dans cette commission une garante plus grande que dans les tribunaux.
Messieurs, laissons les contestations auxquelles cette loi peut donner lieu, sous l'empire des principes généraux du droit. Il n'y a pas en cette matière plus de difficultés qu'en toute autre. Si l'on présente des sucres à l'exportation, et si une contestation s'élève sur le point de savoir si ces sucres sont bien conformes au type déclaré, on essayera de se mettre d'accord. Si l'on n'y parvient pas, on se présentera devant les tribunaux qui nommeront des commissaires pour décider si ces sucres sont conformes au type.
L'honorable membre parle d'autre chose qui n'est pas en discussion.
M. Dumortier. - Cela y viendra.
MfFOµ. - Nous attendrons que cela vienne pour nous expliquer.
M. Delaetµ. - Je ne vois pas pourquoi la Belgique ne pourrait pas adopter une mesure bien simple qui trouvera son application en Hollande. Du moment que les types seront introduits, il sera créé en Hollande deux commissions de trois experts assermentés pour décider, en cas de contestation. L'une de ces commissions siégera à Amsterdam, l'autre à Rotterdam ; je crois même, mais je n'en suis pas certain, qu'il y aura appel d'une commission à l'autre. Ainsi sans tribunaux, sans frais judiciaires, sans perte de temps, nos voisins, qui certes sont aussi pratiques que nous, mettront fin à beaucoup de contestations.
C'est là une institution excellente et que je recommande à toute l'attention de M. le ministre des finances.
- Le paragraphe 2 de l'article est mis aux voix et adopté.
Le paragraphe additionnel proposé par M. le ministre des finances est également adopté.
L'ensemble de l'article est adopté.
« Art. 5. Lorsque le déficit constaté dans les recettes à la fin d'un trimestre n'est pas couvert par la répartition mentionnée à l'article 6 de la loi du 18 juin 1849, le minimum de recette du trimestre suivant est augmenté de la somme qui manque, et ainsi de suite, de trimestre en trimestre, jusqu'à ce que l'intégralité du déficit soit recouvrée. »
MpVµ. - A cet article, s'applique un amendement qui vient d'arriver au bureau. Cet amendement est ainsi conçu :
« Nous proposons de modifier l'article 5 de la manière suivante :
« L'accise sur le sucre de canne et le sucre de betterave ne devra plus à l'avenir produire un minimum de recettes.
« (Signé) : Delaet, Hayez, Dubois, de Borchgrave, Van Renynghe, Vander Donckt, de Theux, Thonissen, de Mérode, Debaets, d'Hane-Steenhuyse, de Muelenaere, de Woelmont, Delcour, Notelteirs, Coomans, Janssens, Magherman, Nothomb, Landeloos, Beeckman, de Ruddere, de Liedekerke, Royer de Behr, de Coninck, de Smedt, Reynaert. »
(page 739) M. Delaetµ. - Déjà mon honorable ami M. Jacobs a développé l'amendement supprimant le minimum ; je m'abstiendrai donc de le faire après lui ; mais un fait nouveau s'est produit, et c'est uniquement sur ce fait que je désire attirer votre attention.
Je n'ai pas réussi hier à faire comprendre à la majorité de cette Chambre combien l'amendement à l'article 3 était dangereux pour la recette et par conséquent pour l'industrie. Ce danger est d'autant plus grand, que le sucre de Java numéros 19 et 20 est exclu désormais du marché anglais et qu'il le sera très probablement du marché français, si les prévisions de la Hollande se réalisent, de sorte qu'il n'y aura plus en Europe pour ce sucre d'autres march »s réguliers que la Hollande et la Belgique.
Les types 19 et 20 de Java ne sont pas dans le commerce depuis très longtemps en très grande abondance. L'outillage dans les colonies ne permettait guère jusqu'ici de les produire avec avantage ; mais depuis quelque temps on y a introduit le procédé Monclar et ce procédé, d'après un homme très compétent, M. Ruele, de Rotterdam, le même qui a appelé l'attention du gouvernement hollandais sur l'inconvénient qu'il y avait à divers points de vue, mais surtout pour l'Etat comme propriétaire de sucres, à admettre la convention sans stipuler pour les n°19 et 20, ce qui l'exposerait à perdre un million ou un million et demi de florins, 2 ou 3 millions de francs ; eh bien, d'après M. Ruele, le procédé Monclar permettrait de produire même du n°24, le n°28 étant considéré comme le prototype du sucre raffiné.
La Belgique recevra donc désormais beaucoup de ce sucre ; d'abord parce qu'il est, comme article de grand commerce, un produit presque nouveau, sinon tout à fait nouveau à Java, ensuite parce que les autres marchés lui sont fermés en Europe, et que dans les Indes il n'y a que la Perse et une partie de l'Australie où il puisse se placer.
J'ai établi que ces sucres n°19 et 20 sont employés sur le marché intérieur à des usages très divers et très nombreux, et que par conséquent la consommation peut en devenir considérable. Pourtant vous ne le frapperez pas dans l'avenir parce qu'il sera placé sous la protection et la sauvegarde d'une condition que la diplomatie hollandaise a pour ainsi dire imposée au gouvernement belge... (Interruption.) Oui, imposée de la même façon et par le même mode auxquels a recours M. le ministre des finances pour nous imposer toutes les conditions de la loi, lorsqu'il nous dit que si telle ou telle disposition n'était pas admise, la convention pourrait bien ne pas être adoptée par nos cocontractants. Tout à l'heure encore M. le ministre des finances a usé de ce moyen sur la Chambre ; il a pensé que puisque l'expédient avait si bien agi sur lui, ministre, il agirait tout aussi efficacement sur cette assemblée.
- Un membre. - La preuve c'est l'adoption de l'amendement de M. Bara.
M. Delaetµ. - Ce sont là deux choses tout à fait distinctes. Je n'aurais pas même accepté l'amendement de M. Bara, parce que cet amendement n'a pas de base rationnelle ; mais je l'ai adopté parce que notre vote d'hier me fait craindre de ne point obtenir de vous la suppression du minimum et que j'ai voulu diminuer autant qu'il était en moi le préjudice que l'importation des numéros 19 et 20 de Java doit causer à l'industrie betteravière.
Or, la contestation entre le gouvernement et l'opposition portait sur la question de savoir si le n°10 serait substitué au n°12 et sous ce rapport l'amendement de M. Carlier valait beaucoup mieux que celui de M. Bara.
Je disais donc, messieurs, que maintenant vous avez un troisième élément qui viendra diminuer vos recettes, les types 19 et 20 dont vous avez voté hier l'admission. Ce sucre contribuera peut-être plus que les deux autres à diminuer vos recettes et pourtant vous ne l'atteindrez pas, vous n'avez nul moyen de l'atteindre et vous ferez payer le déficit par le sucre de betterave et le sucre raffiné.
Ainsi, le minimum, injuste en principe, est devenu doublement injuste depuis hier.
Je dis que le minimum est injuste, et pourquoi ? M. le ministre des finances prétend que la consommation est de 15 millions de kil. Il n'y a aucune base sérieuse, aucune base d'observation et d'expérience qui vous permette d'affirmer que la consommation de la Belgique monte à tel chiffre.
On nous dit ; En Hollande la consommation est de 4 kilog. et au-delà ; nous sommes excessivement modérés en n'évaluant notre consommation qu'à 3 kilog. 2 dixièmes par tête. Eh bien, messieurs, permettez-moi de vous dire que pour quiconque connaît les mœurs de la Belgique et de la Hollande, ce rapport de 3/4 à l'unité est exagéré de beaucoup. La Belgique est un des pays qui consomment le moins de sucre. La population, en général, ne prend pas de thé. Le thé est la boisson habituelle des Hollandais, ne se prenant pas sans sucre, la plus forte partie de la consommation de la Hollande est due à l'usage de ce liquide.
Une autre boisson, anglaise celle-là, mais qui a été introduite depuis quelque temps en Hollande et s'y généralisa rapidement, c'est le grog. (Interruption à gauche.)
Ces messieurs tiennent sans doute à prouver qu'ils se dispensent volontiers d'étudier les éléments des lois qu'ils votent ? Nous avons à nous occuper ici des bases de la consommation. Vous riez quand on vous parle de grog et de thé ; pourquoi ne riez-vous pas aussi quand ou vous parle de sucre ?
Je dis donc que ces deux genres de consommation absorbent de fortes quantités de sucre. D'autre part, la Hollande a une très grande fabrication de liqueurs fines qui s'exportent dans l'Europe entière. Cette industrie exerce, elle aussi, une influence très marquée sur la consommation.
En Belgique, au contraire, presque toutes les liqueurs fines nous viennent du dehors ; ou de la France, ou de la Hollande, ou de la Suisse.
Messieurs, si vous voulez bien défalquer les quantités de sucre absorbées par les boissons habituelles de la Hollande, mises en comparaison avec les boissons habituelles de la Belgique, vous verrez que le rapport ne peut être de 3/4 à l'unité et que si nous consommons la moitié de la quantité de sucre qui est nécessaire à la Hollande, ce sera le maximum que nous pourrons atteindre. Il y a maintenant la question de la prime.
On a dit : Il y a une prime dans cette industrie, cette prime, nous devons la faire disparaître.
Je ne crois pas, messieurs, qu'il y ait encore une forte prime dans le système qui nous est soumis. Pour les raffineurs, il n'y en a certainement plus.
Cette année-ci l'exportation a été réduite à 2 millions, et c'est là, soit dit en passant, un des brillants effets de cette belle loi dont M. le ministre des finances vantait naguère les conséquences heureuses pour l'industrie belge.
Non seulement M. le ministre reconnaît d'une part qu'au type n°12 il ne peut plus y avoir de grands excédants, mais d'autre part la convention prescrit qu'il sera fait des expériences pour déterminer un rendement moyen, lequel sera accepté par tous les contractants comme moyenne réelle.
Si l'honorable ministre des finances tient à avoir les 6 millions je crois que quand même toute l'industrie serait exercée, il n'y a d'autre moyen que d'élever l'accise, et je ne crois pas qu'il veuille recourir à ce moyen.
Pour ma part, j'aurais à l'examiner très sérieusement avant d'y consentir.
Du reste en renonçant au minimum tel qu'il est établi par la loi et tel que l'explique l'exposé des motifs, le gouvernement ne renoncera pas à grand-chose.
Voici, en effet, ce que nous dit le gouvernement à l'article 6 : « Un exemple précisera la portée de l'article 6. » Supposons qu'à la fin d'un trimestre le déficit de la recette soit de 300,000 francs, et que pendant les quatre derniers trimestres on ait exporté ou déposé en entrepôt, savoir : 8,000,000 de kilogrammes de sucre brut de betterave, et 16,000,000 de kilogrammes de sucre raffiné : la réduction totale de la décharge pour les deux espèces de sucre sera de 1 fr. 50 c. (50 X 300,000/100,000), et cette réduction sera répartie, savoir : 50 centimes sur la décharge des sucres bruts de betterave, et 1 franc sur la décharge de sucre raffiné. »
Il s'agit, messieurs, de retrouver 500,000 fr.
Or sur un trimestre, en divisant par 4 les chiffres invoqués, vous avez 2 millions de kilogrammes de sucre de betterave. Vous avez d’autre part 4 millions de kilog. de sucre raffiné.
(page 740) 50 centimes sur 2 millions font 10,000 fr. Un franc sur 4 millions fait 40,000 fr. Il y a donc en recette 50,000 fr., et en déficit réel restant à récupérer 250,000 fr.
Je suppose même faisant une large concession, que ces quantités de 8 et 16 millions soient atteintes en un seul trimestre.
Dans ce cas vous aurez 200,000 fr. de recette et il restera toujours 100,000 fr. de déficit.
La loi, telle qu'elle est, ne fonctionnera donc que très imparfaitement au point de vue fiscal.
Dans un an, dans deux ans au plus, elle sera à refaire, parce qu'elle ne sortira pas les effets qu'en attend le gouvernement.
Je crois, messieurs, qu'en présence d'une double question de justice, en présence surtout du régime nouveau dans lequel nous allons entrer et où nous allons avoir un troisième concurrent, non prévu, quand la loi a été présentée et placée sous la protection spéciale de la diplomatie hollandaise, il faut laisser la consommation faire son œuvre, supprimer les primes dans l'industrie le plus possible et de concert avec tout le monde, mais aussi ne pas venir frapper cette industrie quand on affirme ne vouloir atteindre que la seule consommation.
- (page 738) L'amendement est appuyé. Il fait partie de la discussion.
- Plusieurs membres. - Aux voix !
MpVµ. - Nous avons d'abord l'amendement qui consiste à remplacer l'article 5 par la rédaction suivante :
« L'accise sur le sucre de canne et sur le sucre de betterave ne devra plus, à l'avenir, produire un minimum de recette. »
- L'amendement est mis aux voix par appel nominal.
99 membres y prennent part.
40 répondent oui.
59 répondent non.
En conséquence la Chambre n'adopte pas.
Ont répondu oui : MM.de Mérode, de Naeyer, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, de Woelmont, d'Hane-Steenhuyse, Dubois, Dumortier, d'Ursel, Hayez, Jacobs, Janssens, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Lelièvre, Magherman, Notelteirs, Nothomb, Reynaert, Rodenbach, Royer de Behr, Tack, Thienpont, Thonissen, T'Serstevens, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Overloop, Van Renynghe, Van Wambeke, Beeckman, Debaets, de Borchgrave, de Conninck, de Decker, Delaet, Delcour et de Liedekerke.
Ont répondu non : MM. de Moor, de Rongé, de Vrière, Devroede, Dewandre, Dolez, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Giroul, Goblet, Grosfils, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Mascart, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Orban, Orts, Pirmez, Rogier, Sabatier, Tesch, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vermeire, Vilain XIIII, Warocqué, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Bricoult, Carlier, Couvreur, Crombez, de Baillet-Latour, de Bast, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Kerchove, de Macar et Ernest Vandenpeereboom.
« Art. 5. Lorsque le déficit constaté dans les recettes à la fin d'un trimestre n'est pas couvert par la répartition mentionnée à l'article 6 de la loi (page 739) du 18 juin 1849, le minimum de recette du trimestre suivant est augmenté de la somme qui manque, et ainsi de suite, de trimestre en trimestre, jusqu'à ce que l'intégralité du déficit soit recouvrée.
- Adopté.
MpVµ. - Il y a un amendement à l'article 6 ; il sera imprimé et distribué. (A demain !)
- La séance est levée à 4 heures trois quarts.