(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1864-1865)
(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)
(page 133) M. Van Humbeeck procède à l'appel nominal à une heure et un quart.
M. Thienpont donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
- La rédaction en est approuvée.
M. Kervyn de Lettenhove. - Messieurs, je venais de quitter la séance, lorsqu'un honorable représentant de Bruxelles a adressé hier à M. le ministre de la justice une interpolation fondée sur un passage du discours que j'avais prononcé le 30 novembre.
MpVµ. - C'est une motion d'ordre que vous faites ; ce n'est pas contre la rédaction du procès-verbal que vous prenez la parole ?
M. Kervyn de Lettenhove. - Non, M. le président.
MpVµ. - Je vais mettre aux voix l'approbation de la rédaction.
- La rédaction du procès-verbal est approuvée.
M. Van Humbeeck présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« Des habitant d'Anvers demandent la mise en vigueur des articles du nouveau Code pénal concernant les coalitions. »
- Renvoi à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport.
« Des habitants de Ronquières prient la Chambre d'accorder aux sieurs de Haulleville et Wergifosse la concession d'un chemin de fer d'Anvers à St-Vith par Braine le-Comte. »
- Même renvoi.
« Des orfèvres de Bruxelles demandent la liberté complète du travail d'or et d'argent ou au moins que les orfèvres bijoutiers puissent travailler à tous les titres lorsqu'il s'agit d'exportation. »
- Renvoi à la commission permanente d'industrie.
« L'administration communale de Westendes prie la Chambre d'autoriser la concession d'un chemin de fer direct de Bruges à Furnes et demande qu'une halte soit établie à proximité de Westende au hameau de Kattevalle. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Stercke se plaint d'abus commis au conseil de prud'hommes de Bruxelles. »
- Même renvoi.
« Des habitants de Peronnes et des environs demandent la diminution des droits d'accise sur la bière indigène. »
- Même renvoi.
« Le gouverneur du Hainaut adresse à la Chambre 117 exemplaires de l'annexe au rapport annuel de la députation permanente sur la situation administrative de la province. »
- Distribution aux membres et dépôt à la bibliothèque.
« M. Kervyn de Lettenhove, retenu par une indisposition, demande un congé. »
- Accordé.
MpVµ. - Le bibliothécaire de la Chambre est nommé pour six ans, aux termes du règlement ; ce temps étant sur le point d'expirer, je propose à la Chambre de fixer un jour pour faire une nouvelle élection ; s'il n'y a pas d'opposition, nous mettrons cet objet en tête de l'ordre du jour de jeudi prochain.
- Cette proposition est adoptée.
M. Hymans. - Comme il faudra former des bureaux de scrutateurs pour la nomination du bibliothécaire, je demanderai qu'on mette à la suite de l'ordre du jour de jeudi les demandes en naturalisation dont h Chambre est saisie.
MpVµ. - Nous serons en pleins budgets, nous allons en interrompre la discussion.
M. Hymans. - Je faisais ma proposition pour faire gagner du temps à la Chambre et prendre une décision sur des demandes en naturalisation adressées à la Chambre depuis plus de deux ans.
M. de Vroedeµ. - Je suis chargé de présenter des rapports sur quelques demandes en naturalisation ; j'ai eu la visite de quelqu'un qui tient beaucoup à ce que cet objet soit voté avant la fin de l'année. Je demande qu'il soit placé après les objets actuellement à l'ordre du jour,
MpVµ. - La nomination du bibliothécaire reste à l'ordre du jour de la séance de jeudi, comme premier objet.
M. Hymans propose de mettre à la suite des demandes de naturalisation.
M. Bouvierµ. - Je viens appuyer la proposition de M. Hymans ; plusieurs personnes qui ont demandé la naturalisation nous écrivent des lettres pour que des rapports soient déposés et que la Chambre prenne des décisions sur leurs demandes. Sur les instances d'un étranger qui désire devenir Belge, j'ai déposé un rapport. Il y en a cinq ou six. Comme il y aura nomination de scrutateurs pour l'élection du bibliothécaire, je demande qu'on s'occupe, après, des naturalisations. Cela ne prendra pas un quart d'heure à la Chambre.
- La proposition est adoptée.
M. Kervyn de Lettenhove. - J'avais demandé la parole à propos de la rédaction du procès-verbal, conformément à l'usage de la Chambre, parce que je désirais signaler une inexactitude que j'avais remarquée dans les Annales parlementaires. A la séance d'hier, au moment où je venais de quitter mon banc, un honorable représentant de Bruxelles a adressé une interpellation à M. le ministre de la justice, en se basant sur un passage du discours que j'ai prononcé le 30 novembre.
L'inexactitude contre laquelle je réclame consiste seulement dans l'emploi d'un mot.
L'honorable M. Funck en citant les paroles que j'avais prononcées, les a reproduites en m'attribuant le terme de « régime cellulaire » tandis qu'il résulte des Annales parlementaires de la séance du 30 novembre, que j'ai ici, que je m'étais servi des mots « système cellulaire ». Dans ma pensée il y a une certaine différence entre ces deux expressions. Je comprends parfaitement que le mot « régime cellulaire » s'applique à l'ensemble des actes qui régissent la vie pénitentiaire du condamné, mais, lorsque j'employais le mot « système », j'entendais parler uniquement du lieu où s'accomplit la détention.
Voici en effet comment, quelques lignes plus loin, je développe mon opinion :
« Je comprends fort bien l'emprisonnement séparé pour les prévenus, mais je ne puis admettre que l'accusé, réputé innocent jusqu'à l'heure de sa condamnation, soit enfermé dans une cellule semblable à celle qui reçoit le coupable, ni qu'on lui fasse porter, comme je l'ai vu moi-même, l'ignoble capuchon qui est en quelque sorte la livrée du crime subissant l'isolement et la honte. »
Je sais très bien, messieurs, qu'un article du règlement de la prison d'Anvers porte que pour certaines catégories de détenus il y aura des cellules spéciales, mais cela ne me suffit point, et je persiste à repousser pour ma part toute communauté dans le caractère extérieur de la détention entre le coupable et l'accusé, entre le criminel et le malheureux emprisonné par suite de dettes ou d'amendes.
Du reste, messieurs, en signalant un état de transition dont il faut se hâter de sortir, il n'était pas dans ma pensée d'adresser un reproche ni à l'administration supérieure du département de la justice qui tempère par un emploi plus fréquent et plus intelligent du droit de grâce les rigueurs du système cellulaire, ni aux administrations spéciales des prisons qui apportent, dans l'exercice de leurs difficiles fonctions, un zèle auquel je me suis toujours plu à rendre hommage.
MpVµ. - Les paroles que vient de prononcer l'honorable M. Kervyn figureront aux Annales parlementaires et serviront de rectification.
MpVµ. - Le premier objet à l'ordre du jour, ce sont les prompts rapports.
M. Bouvierµ (pour une motion d’ordre). - Je crois qu'il n'y a pas de péril en la demeure pour discuter les prompts rapports.
MpVµ. - C'est l'affaire de cinq minutes. Pendant le temps que vous mettez à parler, M. Bouvier, les prompts rapports seront terminés.
M. Bouvierµ. - S'il n'y a que cinq minutes, cela n'en vaut pas la peine.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition sans date, des ouvriers de Bruxelles demandent une loi qui abroge toute répression de la coalition comme telle et qui punisse simplement la menace et la violence.
Même demande d'habitants de Gand, d'Anvers et autres localités.
Des ouvriers de Gand demandent la mise en vigueur des articles du nouveau Code pénal concernant les coalitions.
Même demande d'ouvriers dans le Brabant.
(page 134) Messieurs, il y a toute une catégorie de demandes de cette nature qui émanent des ouvriers de Gand, de Bruxelles, d'Anvers et de différentes localités.
Toutes ces pétitions sont imprimées, elles ont toutes le même but et sont conçues à peu près dans les mêmes termes. Votre commission, messieurs, m'a chargé de vous proposer de comprendre dans un même rapport les quelques pétitions de même nature qui sont parvenues à la Chambre et qui par la suite pourraient encore lui être adressées sur le même objet.
Par conséquent, messieurs, j'ai l'honneur de vous proposer de les comprendre toutes dans un même rapport qui sera fort court.
Vous connaissez tous l'objet de ces demandes : c'est que les nouveaux articles du Code pénal relatifs à la coalition soient mis immédiatement en vigueur en attendant que le nouveau Code pénal puisse être sanctionné.
La commission, messieurs, conclut au renvoi pur et simple à M. le ministre de la justice.
M. Van Humbeeck. - Messieurs, il y a quelques jours, un débat a déjà eu lieu sur la question soulevée par les pétitionnaires.
M. le ministre de la justice a eu l'occasion de se prononcer sur leurs réclamations.
Je ne veux pas entamer aujourd'hui un débat sur le fond de la question. Je regrette de ne pouvoir, à cet égard, partager l'opinion exprimée dans cette enceinte par M. le ministre de la justice. Je crois qu'on peut aller plus loin que la Chambre n'est allée dans le projet de code pénal actuellement soumis aux délibérations du Sénat. Mais M. le ministre de la justice a manifesté qu'il ne lui répugnerait pas trop de prier le Sénat d'entamer immédiatement l'examen des articles du nouveau Code pénal relatifs aux coalitions et de mettre ces articles en vigueur au moyen d'une loi spéciale.
Le moyen que M. le ministre indique comme un moyen auquel il pourrait peut-être se rallier, je voudrais qu'il prît l'engagement formel de l'employer ; nous aurions ainsi l'occasion de proposer une extension à la portée de ces dispositions.
M. le ministre de la justice n'est pas à son banc. Mais je crois qu'il n'est pas dans l'intention de la Chambre de rester dans une incertitude indéfinie sur le parti que le gouvernement prendra à l'égard de la question des coalitions : pour laisser au ministre le temps de donner une réponse définitive sans que nous paraissions surprendre sa décision, je proposerai de modifier les conclusions de la commission et d'ordonner le renvoi des pétitions à M. le ministre de la justice avec demande d'explication.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Je me rallie à cette proposition.
- Les conclusions ainsi modifiées sont adoptées.
MpVµ. - La discussion générale est ouverte.
M. Braconier. - Messieurs, dans le courant de cette année, le gouvernement, satisfaisant aux vœux manifestés dans cette enceinte, ainsi que par toutes les chambres de commerce du pays, a apporté une réforme importante dans le tarif du transport des marchandises par le chemin de fer de l'Etat.
Cette réforme a été parfaitement accueillie par le pays, non seulement parce qu'elle avait pour conséquence une diminution des frais de transport, mais encore en ce qu'elle permettait à M. le ministre des travaux publics de supprimer le tarif et les traités spéciaux contre lesquels tant de réclamations s'étaient élevées et qui, il faut le dire, présentaient très souvent des anomalies étranges, et même une certaine apparence d'injustice envers diverses localités du pays.
Messieurs, le gouvernement n'a qu'à s'applaudir des résultats qu'il a obtenus par l'application de ces nouveaux tarifs. Ils ont dépassé toutefois les espérances, même de ceux qui, comme moi, croyaient qu'une diminution des frais de transport était le moyen le plus sûr pour arriver à une augmentation des recettes. En effet, nous trouvons dans une des notes préliminaires qui accompagnent le projet de budget des travaux publics, les résultats obtenus pendant les trois premiers mois de la mise en application du nouveau tarif.
C'était pendant ces mois que l'on devait compter naturellement avoir une réduction des recettes ; et au contraire nous voyons que la recette est supérieure de 157,000 fr. à celle des mois correspondants de 1863.
L'expérience est donc faite Le procès des réductions des frais de transport est gagné.
Mais, messieurs, si j'applaudis aux résultats obtenus par les chemins de fer de l'Etat, je suis obligé de signaler les graves difficultés qui s'élèvent par suite des relations des chemins de fer concédés avec les lignes de l'Etat.
La plupart des compagnies, et surtout les compagnies les plus importantes, ont refusé d'adhérer au tarif de l'Etat.
Que s'ensuit-il ? C'est que les industriels, les commerçants et les populations en général, desservies par ces chemins de fer concédés, se trouvent dans une situation beaucoup plus défavorable que celle où ils se trouvaient avant la mise en vigueur du nouveau tarif. Vous allez le comprendre aisément.
Je prendrai pour exemple un fait qui se passe dans l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter dans cette enceinte. Le centre industriel de Liège est desservi par deux lignes principales ; la ligne de l'Etat et le chemin de fer de Liège à Namur, qui appartient à la compagnie du Nord.
La compagnie du Nord n'a pas accepté le tarif de l'Etat, et l'ancien tarif mixte est resté en vigueur. Ainsi les industriels desservis par la ligne de Namur à Liège ne profitent nullement des réductions faites et se trouvent dans une position bien plus mauvaise qu'auparavant, car leurs concurrents, desservis par la ligne de l'Etat, profitent de ces réductions.
Je comprends, pour ma part, que, lorsque le nouveau tarif a été publié, les compagnies aient manifesté certaines craintes sur les résultats financiers que produirait ce tarif. Je comprends qu'elles se soient dit qu'il était dangereux pour elles d'entrer de prime abord dans cette voie.
Voici le raisonnement qu'elles ont pu faire, raisonnement parfaitement juste, parfaitement fondé. Avant les résultats obtenus par l'application de ces tarifs, les compagnies pouvaient se dire : « L'Etat envisage la question de la diminution des frais de transport sous deux points de vue différents : d'abord sous le point de vue de l'augmentation de la prospérité publique, car la diminution des frais de transport augmente les relations et la prospérité générale ; d'un autre côté, l'Etat doit aussi envisager la question au point de vue des revenus du chemin de fer de l'Etat et se dire : Si nous arrivions à une réduction de recettes, cette réduction serait largement compensée par le bien-être général répandu dans le pays ; mais nous, compagnie privée qui ne pouvons avoir en vue que l'intérêt de nos actionnaires, nous ne pouvons faire un semblable raisonnement.
Voilà, messieurs, ce que les compagnies ont dû se dire, et c'était très juste ; mais aujourd'hui le résultat qu'a obtenu le gouvernement, par l'application du nouveau tarif, n'est-il pas là pour leur ouvrir les yeux et pour démontrer que, loin que ce soit une diminution de recettes qu'on leur demande, c'est plutôt une augmentation de revenus qu'on leur offre ? J'espère que les compagnies le comprendront.
Je dois ajouter, messieurs, que ces raisons que donnaient les compagnies, étaient les raisons données au grand jour ; mais je pense qu'il y avait aussi là-dessous quelques raisons particulières.
Voici, par exemple, le raisonnement que font certaines compagnies : « Nous avons sur notre ligne des sections où l'on ne peut nous faire concurrence d'aucune manière, des localités qui n'ont d'autre moyen de communication que notre chemin de fer ; pourquoi diminuerions-nous le tarif pour ces localités-là ? Nous maintiendrons là le maximum, mais, en revanche, nous réduirons les prix pour les localités où nous rencontrons la concurrence, soit d'une voie navigable, soit d'un autre chemin de fer. »
Cela rentre donc complètement dans les conditions des tarifs spéciaux que la Chambre a condamnés l'année dernière et que M. le ministre des travaux publics a condamnés lui-même, en disant que ces tarifs et ces traités n'avaient eu qu'une seule raison d'être, que c'étaient uniquement des essais faits dans le but d'établir sur des bases sûres et rationnelles un tarif uniforme.
Messieurs, il y a là une double question qui se présente. D'abord, le gouvernement peut-il interdire aux compagnies d'établir des tarifs et des traités spéciaux, et dans l'affirmative, doit-il l'interdire ?
Je pose ces questions sans vouloir les résoudre.
Je crois que la première question peut dépendre des termes du cahier des charges des diverses compagnies.
Quant à la seconde, je n'oserais pas me prononcer, parce que les conséquences qu'elle serait de nature à entraîner, pourraient être très graves.
Je crois cependant qu'il y a à distinguer deux genres de transports à tarifs spéciaux. Il faut, par exemple, distinguer les tarifs spéciaux qui ne sont faits que dans le but de faire concurrence à une autre voie de (page 135) transport du pays. Il y a ensuite des tarifs spéciaux qui sont faits en vue de pouvoir exporter des produits du pays à l'étranger.
J'appelle sur ce point toute l'attention de M. le ministre des travaux publics. Je crois que la question est très grave et qu'elle entraînerait des conséquences que je ne puis même apprécier ; il faudrait pour cela être muni de documents très nombreux et se livrer à une étude toute spéciale de l'affaire.
Messieurs, je suis convaincu que la Chambre tout entière comprend l'importance de la question que j'ai soulevée, car l'état de choses actuel établit deux catégories de commerçants et d'industriels, ceux qui ont le bonheur de se trouver sur une ligne de l'Etat, et ceux dont les établissements sont desservis par des chemins de fer concédés.
Ces derniers industriels ont contribué aussi bien que les autres à la construction du chemin de fer de l'Etat, et ils ont droit à la même sollicitude.
Je prie donc M. le ministre des travaux publics de faire ce qui est possible pour arriver à une solution de cette affaire, dans l'avenir le plus prochain, car la position de certains industriels est insoutenable, par suite de cette différence dans les frais de transport.
J'ai la certitude, par suite de renseignements particuliers, qu'il n'a pas dépendu de l'honorable ministre que les choses se soient passées autrement. Il a fait tout ce qui était en son pouvoir pour amener les compagnies à adopter son tarif et à entrer en arrangement avec lui. Il n'a pas réussi : ce qui n'est pas une raison pour se décourager. J'espère qu'il pourra arriver à une solution prochaine.
Messieurs, puisque j'ai la parole, j'en profiterai pour appeler également l'attention de l'honorable ministre sur la surveillance à exercer par le gouvernement envers les chemins de fer concédés, tant au point de vue de la sécurité des voyageurs que de la bonne organisation du service.
Beaucoup de compagnies semblent avoir oublié les obligations qui leur sont imposées par leur cahier des charges ; beaucoup de compagnies, par exemple, ont des bâtiments de station provisoires, qui existent depuis un grand nombre d'années, où les voyageurs sont loin d'être abrités convenablement.
Je crois qu'il est du devoir du gouvernement de veiller à ce que les compagnies remplissent leurs obligations à cet égard.
J'appellerai également l'attention de M. le ministre des travaux publics sur un travail qui me paraît présenter beaucoup d'utilité.
Il existe entre la station des Guillemins et la Meuse une vole de chemin de fer, pour décharger les marchandises et les transborder soit des waggons dans des bateaux soit des bateaux dans des waggons. Mais cette voie aboutit à un quai très étroit où l'espace manque et qui est continuellement encombré.
Je crois qu'il y aurait lieu d'examiner s'il ne serait pas utile d'établir un quai de déchargement convenable et spacieux. Si le travail que je réclame était fait, les industriels de la vallée de la Meuse pourraient en grande partie se passer du chemin de fer du Nord pour transporter leurs produits au chemin de fer de l'Etat et de cette façon ils pourraient profiter de l'abaissement des tarifs.
Je recommanderai encore à M. le ministre des travaux publics la mise en adjudication immédiate des trois derniers barrages qui restent à exécuter à la Meuse entre Chokier et Namur. Cette mesure est des plus urgentes, car elle avancerait d'un an l'exécution des travaux, et en second lieu, elle permettrait aux entrepreneurs de faire leurs approvisionnements d'avance et dans de meilleures conditions.
Il y a donc intérêt pour la prompte exécution du travail, en même temps que pour le trésor, à ce que cette adjudication ait lieu dans le plus bref déai possible.
M. Bouvierµ. - Dans notre dernière session, j'ai eu l'honneur de présenter à M. le ministre des travaux publics plusieurs observations ; ces observations sont restées sans réponse. Je ne viens pas reprocher à l'honorable ministre de n'y avoir pas répondu : il est habituellement trop courtois, trop poli pour l'avoir fait avec intention. Mais la dernière session a été coupée en deux ; nous avons eu, avant la dissolution, le commencement de la discussion du budget des travaux publics ; l'autre partie de cette discussion a eu lieu après la dissolution. Tout le monde était si pressé d'en finir, que la seconde partie de cette discussion a été en quelque sorte enlevée au pas de course.
Je crois que M. le ministre des travaux publics n'en était pas fâché... (Interruption)... en ce sens qu'il a pu donner tout son temps à l'examen des nombreuses affaires ressortissant à son département.
Quant à nous, messieurs, nous serions très heureux de recevoir tout à l'heure une réponse aux observations que nous allons présenter.
Comme il va probablement s'organiser un steeple-chase de réclamations à l'occasion du budget des travaux publics, qu'il me soit permis d'élever la voix dans cette enceinte, non pas pour jeter une note harmonieuse et conforme au rapport de la section centrale, mais pour faire entendre une note quelque peu discordante qui ne fera peut-être pas plaisir à l’honorable ministre ; mats enfin l'intérêt de mon arrondissement le réclame, l'exige, le veut ainsi.
Si je vous disais que, dans mon arrondissement, il n'existe pas de chemin de fer... (Interruption.) J'ai réclamé à ce sujet, mais on ne m'a rien accordé. C'est justement parce que je n'ai pas de chemin de fer dans mon arrondissement que je viens en réclamer un à cor et à cri.
Hier, l'honorable ministre nous disait, répondant à une observation d'un de nos collègues, que si l'on dressait la carte des chemins de fer en Belgique et des concessions demandées pour en établir, ce serait un véritable pâté. Je suppose qu'il a voulu dire un pâté noir, car si c'était un gâteau, je vous assure que j'en demanderais ma part.
Ainsi c'est un pâté d'encre qui se trouve sur cette carte. Si l'honorable ministre des travaux publics veut avoir l'extrême obligeance, comme il l'a dit hier, de tracer une carte de tous les chemins de fer exécutés et de toutes les concessions demandées, je suis convaincu qu'il ne trouverait pas la moindre parcelle d'un pâté d'encre en ce qui concerne l'arrondissement de Virton, car il n'y existe pas un seul chemin de fer.
Cependant notre arrondissement est riche, très riche, très fertile ; je suis convaincu que si le ministre des travaux publics déclarait du haut de la tribune que le gouvernement garantit un minimum d'intérêt...
M. de Naeyer. - Puisque vous êtes riche, vous pouvez vous passer d’une garantie d’intérêt.
M. Bouvierµ. - Parce que dans votre arrondissement vous avez toute espèce de chemin de fer !
M. de Naeyer. - Sans garantie d'intérêt.
M. Bouvierµ. - C'est possible, mais cette garantie d'un minimum d'intérêt ne serait que nominale ; vous en avez la preuve dans le chemin de fer du Grand Luxembourg. Le minimum d'intérêt a d'ailleurs été accordé pour plusieurs autres concessions ; vous avez eu le bonheur de voir la Dendre canalisée ; si vous voulez joindre votre voix à la mienne, pour faire obtenir une faveur semblable à mon arrondissement, le jour où vous voudrez faire un voyage en touriste dans le Luxembourg, vous recevrez les félicitations de tous les habitants de l'arrondissement de Virton.
Il ne faut pas être si égoïste ; quand le gouvernement vous a donné toute satisfaction pour votre arrondissement, il faut avoir le cœur plus large, plus grand, plus généreux et ne pas refuser de compatir au sort de mes commettants. Parce que vous avez partout des chemins de fer, vous êtes satisfaits ; j'allais dire, le mot ne serait peut-être pas parlementaire, j'allais dire repus.
M. de Naeyer. - Ajoutez donc, de chemins de fer ne coûtant rien aux contribuables.
M. Bouvierµ. - Je vous répète que la garantie ne sera que nominale, elle fera les capitaux sur les lignes garanties.
Au lieu de favoriser le Luxembourg, messieurs, que fait-on ? Ici ce n'est pas le ministre des travaux publics, c'est son collègue, le ministre de l'intérieur, que j'interpelle. Nous avions dans son budget une allocation de 30,000 fr. pour distribution de chaux à prix réduit ; elle a été biffée d'un seul trait de plume. (Interruption.)
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Il ne fallait qu'un trait de plume.
M. de Moorµ. - Comme pour la pêche, il eût mieux valu diminuer le crédit d'année en année ; c'eût été plus sage et plus équitable.
M. Bouvierµ. - Pour Ostende, M. le ministre des affaires étrangères a été plus bienveillant, il n'a pas agi comme vous le faites vis-à-vis de nous, il n'a pas biffé d'un seul trait de plume la prime pour les pêcheurs d'Ostende, c'est par gradation qu'il la supprime.
Vous auriez pu faire la même chose pour la province de Luxembourg, vous ne l'avez pas fait. Pour nos rivières, messieurs, que pensez-vous qu'on ait fait ? Quel subside avons-nous obtenu pour l'arrondissement de Virton ? Rien ; quoique ce ne soit pas moi seul qui vienne réclamer dans cette enceinte, je ne suis que l'écho des vœux de la chambre de commerce d'Arlon.
Jusqu'à présent nous n'avons pas obtenu un seul centime pour améliorer le cours de nos rivières et éviter ces inondations qui occasionnent tant de désastres à une population agricole ; cependant je vois qu'on est très large pour d'autres fleuves et rivières ; je citerai la Meuse, la Sambre, l'Escaut, la Dendre, M. de Naeyer ; et même jusqu'à la Mandel qu'on n'a pas oubliée, l'Yser, etc.
Mais pour notre arrondissement il y a beaucoup de zéros, non après l'unité, mais avant l'unité.
Ainsi, pas de chemin de fer, pas d'amélioration du cours des (page 136) rivières ; nous avions une allocation pour distribution de chaux, l'allocation a disparu du budget.
Vous croyez que c'est tout ? Détrompez-vous, je ne suis qu'au milieu de mon Odyssée. Je veux vous faire connaître tous les malheurs de mon arrondissement.
Le conseil provincial, ce n'est pas moi, monsieur le ministre, a exprimé le vœu dans plusieurs sessions successives qu'un service postal fût établi entre Virton et Florenville, avec une distribution dans la commune de Gérouville. Malgré toutes les réclamations faites jusqu'à ce jour, les vœux exprimés par le conseil provincial, qu'avons-nous, obtenu ? Toujours zéro, rien, rien, toujours rien.
Il est vrai que je crois qu'après la discussion de ce budget, nous parviendrons à obtenir une simple perception de poste non pas à Gérouville, quoiqu'on l'ait demandée, comme je viens de le dire, pour cette localité, mais pour une autre très rapprochée de celle-ci, Jamoigne, qui ne l'avait pas demandée ; mais enfin nous l'acceptons, car nous avons besoin de perceptions de poste et j'accepterai de très grand cœur les petites choses - puisque nous ne pouvons en obtenir de grandes - que le gouvernement voudra bien nous accorder. Mais ce n'est pas tout.
Toujours le conseil provincial du Luxembourg, émettant des vœux constamment répétés, a demandé une des choses les plus simples qu'il soit possible de réclamer à un gouvernement.
Messieurs, je n'ose presque pas dire ce qu'il a demandé : car, quand vous entendrez ce vœu si humble, presque si naïf, que ce provincial a formulé, vous me direz : Est-il possible que dans un siècle de progrès, dans ce siècle de civilisation, dans ce siècle du télégraphe et de la vapeur, on vienne encore demander...
Je vous le laisse deviner. Je n'ose presque pas dire le mot, car je vois déjà se produire l'hilarité au sein de cette Chambre. Elle a émis le vœu d'obtenir un transport de dépêches par voiture, entre Etalle et Habay-la-Neuve... une simple patache, messieurs, une patache en plein XIXème siècle.
Et vous croyez peut-être que le gouvernement nous a accordé cette patache ?
Nous sommes encore occupés à la demander en ce moment. Vous allez croire sans doute que cette patache (interruption) coûtera beaucoup d'argent au gouvernement. Pas le moins du monde, ce service ne coûterait rien du tout, absolument rien, pas un centime.
Il y a aujourd'hui un piéton qui fait le service entre Etalle et Habay. Ce piéton reçoit une petite allocation.
Eh bien, messieurs, un entrepreneur, homme honorable et solvable, a demandé au gouvernement d'établir une voiture pour le transport des dépêches et en même temps des voyageurs, sans exiger d'autre crédit que celui alloué au piéton.
Le gouvernement, messieurs, n'a pu accéder à cette demande et je vais vous en dire les motifs. Ce n'est pas moi, messieurs, qui vais parler, c'est un livre et quel est ce livre ? C'est un livre que M. le ministre de l'intérieur nous a envoyé et que je me suis donné la peine de parcourir.
Vous êtes peut-être curieux de savoir quelle est la nature de ce livre ? Eh bien, je lais vous le dire. C'est le bulletin du conseil supérieur de l'industrie et du commerce, session de 1862-1863. Vous voyez que c'est tout moderne ; c’est tout neuf,1e volume je tiens dans les mains n'est pas même entièrement découpé.
Eh bien, messieurs, voici les motifs pour lesquels le gouvernement a les mains liées, ne peut rien faire. Nous allons lire cela dans un document officiel ; vous voyez que je ne crée rien, que je n'invente rien et que je lis les choses qui se trouvent même dans les livres que le gouvernement nous fait tenir.
« Le gouvernement, y est-il dit, n'a pu accorder cette convention à l'entrepreneur à cause que tous les services de la province sont accordés à main ferme à un entrepreneur et que, de l'aveu de M. le ministre des travaux publics, il coûte des sommes énormes. L'entrepreneur concessionnaire fait de cela un trafic, remet le service à des sous-entrepreneurs au plus bas prix possible et en retire un bénéfice important.
« Il en résulte que, malgré les sacrifices du gouvernement, il y a de mauvais services exploités généralement suivant les intérêts de l'entrepreneur privilégié (j'ai souligné le mot privilégié, parce que je n'aime pas les privilèges) et que malgré les procès-verbaux, - ce qui est plus fort et j'ai encore souligné, - et les jugements rendus par les tribunaux, il est constant qie jamais aucune amende n'a été payée et que l'entrepreneur a tonjours reçu remise de peine. »
- Une voix. - Cela est grave.
M. Bouvierµ. - Oui, cela est très grave. Cela se trouve indiqué dans le document officiel qu'on m'a envoyé.
MtpVµ. - Qui dit cela ?
M. Bouvierµ. - C'est un membre de la chambre de commerce d'Arlon qui fait partie du conseil supérieur de l'industrie et du commerce.
MtpVµ. - Qu'est-ce que cela fait ? Est-ce que ces membres sont infaillibles par hasard ?
M. Hymans. - Et les ministres ?
MtpVµ. - Ils n'ont pas cette prétention.
M. Bouvierµ. - Et l'entrepreneur, qu'en dites vous ? Est-ce une belle position qu'on lui a faite, oui ou non ? Celui qui a affirmé ces choses n'a pas intérêt à venir mentir en plein conseil supérieur de l'industrie.
Du reste, ces faits sont de notoriété publique dans le Luxembourg. Nous sommes envoyés ici : il faut bien le proclamer, pour dire les choses telles qu'elles sont ; l'honorable M. de Moor va nous confirmer tantôt ce que je viens de dire, il connaît le Luxembourg par cœur, lui.
Mais ce n'est pas tout.
Le service des postes qui est admirablement fait dans le Centre, vous voyez qu'ici je distribue l'éloge comme le blâme, ce service est très mal organisé dans le Luxembourg. Vous voyez que dans les rangs de la gauche, quoi qu'on nous taxe de servilisme, nous avons le courage, et j'ajouterai que nous nous imposerons le devoir de dire la vérité à tout le monde et même à MM. les ministres.
Eh bien, messieurs, ce service, je le répète, est très mal fait et je vais vous en donner encore la preuve en lisant la critique la plus amère du service des postes dans le Luxembourg dans ce même document officiel, et je vous remercie de me l'avoir envoyé. Je vous assure que je suis heureux quand le gouvernement m'envoie de semblables documents parce qu'à côté de mes assertions je trouve immédiatement le moyen d'en administrer la preuve.
Je ne veux pas, messieurs, abuser des moments de la Chambre. Je veux terminer par là, mais je vais lire quatre lignes qui se trouvent encore dans ce document.
« Je ferai remarquer à l'assemblée que les localités du Luxembourg éprouvent journellement des retards préjudiciables pour les dépêches qui sont remises sur le parcours de la ligne du Luxembourg.
« Les lettres devant franchir vingt à trente kilomètres, restent deux et même jusqu'à trois jours pour arriver à destination. »
Si l'on parlait de la Sibérie, de la Laponie ou d'autres pays semblables, je comprendrais qu'il fallût encore deux ou trois jours pour que les lettres arrivassent à destination.
Mais nous sommes en Belgique ; nous avons un budget qui est très gros, les chiffres en sont très élevés et nous sommes très mal desservis dans le Luxembourg.
Ce n'est pas tout.
« Les lettres de l'est de la France (poursuivant ma lecture) parviennent dans le Luxembourg en faisant le tour… Devinez par où ?
« - Par Paris et Quiévrain. Ce qui prouve, ajoute le même document, que les relations avec les puissances voisines ne sont pas régulièrement établies pour le Luxembou'g. »
Messieurs, je finis.
M. le ministre des travaux publics montre une très grande activité, une très haute intelligence dans le département à la tête duquel il se trouve ; mais il ne sait pas tout faire par lui-même. J'ai appelé son attention bienveillante, sa sollicitude éclairée sur un état de choses qui ne peut pas durer davantage.
Les réclamations que je fais dans cette Chambre ne sont pas dictées par un sentiment d'hostilité systématique. Mais je les fais dans l'intérêt de la vérité, et dans l'intérêt de l'arrondissement qui m'a fait l'honneur de m'envoyer dans cette enceinte ; et chaque fois que je rencontrerai un grief, quoi qu'on dise que nous soyons serviles et ministériels, j'aurai le courage de dire avec calme, mais avec énergie, ma façon de penser, comme je viens de le faire.
M. Dupontµ. - Je me joins entièrement aux observations qui ont été présentées tantôt par l'honorable M. Braconier en ce qui concerne les tarifs des chemins de fer.
Comme lui, je pense que la situation actuelle ne peut pas être tolérée plus longtemps. Comme lui, je pense que cet état de choses conduit en définitive à une espèce de protection intérieure, puisque les industriels qui se trouvent placés sur une ligne de chemin de fer de l'Etat sont dans une position tout à fait privilégiée vis-à-vis de leurs concurrents qui sont à portée d'une ligne de chemin de fer appartenant aux compagnies qui n'ont pas accédé aux tarifs de l'Etat.
Cette observation faite, j'en soumettrai une autre à la Chambre.
(page 137) Le cahier qui vient de nous être soumis par la cour des comptes nous révèle un dissentiment et un dissentiment radical qui s'est élevé entre l'honorable ministre des travaux publics d'une part et la cour d'autre part.
Il s'agit de l'interprétation de la loi du 20 décembre 1851. Cette loi a autorisé le gouvernement à accorder un minimum d'intérêt pour l'exécution de certains travaux publics et notamment pour la construction du chemin d'e fer de Manage à Wavre.
La loi, dans son article 3, s'occupe spécialement de ce chemin de fer et elle autorise le ministre des travaux publics à garantir un minimum d'intérêt de 4 p. c. à la compagnie qui exécutera cette voie ferrée, et ce sur un capial de 5 millions.
Lorsqu’il s’est agi d'exécuter la loi, une convention a été passée à la date du mois de juin 1852. Cette convention a été passée dans l'esprit ordinaire qui préside à ces sortes d'arrangements, c'est-à-dire que comme cela s'était fait pour le chemin de fer du Luxembourg, pour le chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse et pour le chemin de fer de la Flandre occidentale, on a décidé que, pour fixer la subvention de l'Etat, on procéderait de la manière suivante : la Compagnie soumettrait au gouvernement les comptes des recettes et des dépenses et lorsqu'il arriverait que les bénéfices nets résultant de la comparaison de ces chiffres seraient inférieurs à un intérêt de 4 p. c, sur le capital de 5 millions qui avait été garanti, l'Etat parferait la différence.
Plus tard, en 1862, ce traité a été modifiée. L'Etat a changé de système, et la convention stipulé cette fois que la compagnie jouira sur la caisse de l'Etat, pendant les années qui restent à courir encore jusqu'à l'expiration de la garantie, d'une subvention de 187,500 fr. au minimum. Si le produit brut du chemin de fer vient à s'accroître, l'Etat profitera de cette augmentation de recette dans une certaine mesure. Mais la compagnie ne sera plus tenue de fournir à l'Etat le compte de ses recettes et de ses dépenses.
Pour fixer la somme que l'Etat aura à payer, on prendra uniquement en considération le produit brut de la ligne. Le ministre des travaux publics a établi une progression entre cette augmentation de recettes et la diminution de la garantie, de cette manière le chiffre de 187,500 francs diminuera successivement à mesure que s'élèveront les produits de la ligne.
Voilà la modification qui a été apportée au système suivi jusqu'aujourd'hui en ce qui concerne le chemin de fer du Luxembourg et les autres lignes concédées qui jouissent d'un minimum d'intérêt.
L'honorable ministre a été amené à introduire ce changement dans l'intérêt du trésor.
C'est du moins ce qu'il affirme dans la correspondance qu'il a échangée avec la cour des comptes.
MtpVµ. - Les résultats le prouvent.
M. Dupontµ. - En effet, les résultats le prouvent : il en résulte que, pendant les trois dernières années, l'Etat n'a pas déboursé une somme aussi considérable que celle qu'il dépensait auparavant.
La subvention, au lieu d'augmenter, a diminué. Et cela se conçoit ; la compagnie a eu dès lors intérêt à augmenter la somme de ses recettes et à rechercher des transports puisque l'Etat n'était plus seul à en profiter.
C'est à cette occasion qu'un dissentiment s'est élevé entre la cour des comptes et M. le ministre des travaux publics sur l'interprétation de la loi du 20 décembre 1851. La cour des comptes prétend que l'interprétation donnée par le ministre à la loi n'est pas une interprétation exacte.
La loi du 20 décembre 1851 a bien autorisé, dit-elle, le gouvernement à accorder à la compagnie du chemin de fer de Manage une subvention égale à la différence entre la somme de 200,000 fr. et celle qui représente les bénéfices résultant de l'exploitation.
Suivant le ministre, au contraire, le gouvernement était autorisé à accorder à la compagnie une subvention quelconque, du moment que cette subvention n'atteignait pas toutefois le chiffre de 200,000 fr. Or, la cour des comptes prétend que du moment que le bénéfice net de la compagnie, joint à la subvention que lui donne le gouvernement, excèdra le chiffre de 200,000 fr., la loi sera violée.
Messieurs, je l'avoue, en examinant le texte de la loi, des doutes très sérieux se sont élevés dans mon esprit sur l'interprétation que lui a donnée M. le ministre des travaux publics. Je reconnais que cette interprétation peut être favorable au trésor. Mais il ne me semble pas, franchement, qu'elle soit tout à fait conforme à la loi.
Dire en effet que le gouvernement est autorisé à accorder à une compagnie nu minimum d'intérêt de 4 p. c, c'est bien dire que le bénéfice net que la compagnie retirera de son exploitation, ajouté à la subvention que donne le gouvernement, ne pourra dépasser 200,000 fr.
Cependant dans le système qui a été nouvellement inauguré, ce résultat pourra se produire.
MtpVµ. - Je vous demande pardon. Je m'expliquerai.
M. Dupontµ. - Alors la cour des comptes est dans une profonde erreur.
Quoi qu'il en soit, je demande à M. le ministre des travaux publics de bien vouloir s'expliquer à cet égard.
Je voudrais aussi qu'il nous fît connaître les considérations qui l'ont amené à établir la progression qu'il a adoptée dans cette convention.
En effet, lorsqu'une dissidence aussi radicale sur l'interprétation d'une loi importante surgit entre les membres de la cour des comptes, c'est-à-dire les mandataires de la Chambre et le gouvernement, il est esssentiel que celui-ci motive son appréciation et sa conduite.
Il est nécessaire que ces explications qu'il refuse à la cour, il les donne à la Chambre afin qu'elle avise et que ces conflits regrettables viennent à disparaître.
Voici encore une observation, messieurs, à ajouter à celles que je viens de vous soumettre. Elle a pour but de parer à certains inconvénients qui se sont présentés dans l'arrondissement qui m'a conféré mon mandat.
La presse de Liège se plaint souvent que les plans des travaux publics qui s'exécutent dans cette province ne soient pas envoyés à Liège pour être soumis à l'inspection du public.
Ainsi, je suppose qu'on mette en adjudication, à Liège, les travaux d'une station ; eh bien, les entrepreneurs de Liège sont obligés de se rendre à Bruxelles, pour aller consulter les plans de travaux.
Il serait facile de faire droit aux plaintes que soulève cet état de choses, il suffirait que l'administration envoyât les plans au gouvernement provincial de Liège pour être soumis pendant quelques jours au public.
Aujourd'hui les entrepreneurs qui voudraient soumissionner reculent souvent devant la nécessité de se déplacer, de perdre du temps et de l'argent, alors qu'ils n'ont aucune espèce de certitude sur la résolution qu'ils seraient amenés à prendre après l'examen des plans. Or, il est de l'intérêt du trésor d'appeler la concurrence la plus énergique possible.
Il me semble au surplus que la chose n'est pas difficile à exécuter. M. le ministre des travaux publics a toujours été attentif aux plaintes de la presse, il a toujours fait tout ce qui était en son pouvoir pour satisfaire à toutes les réclamations qui avaient quelque chose de fondé. J'espère donc qu'il fera droit à l'observation que je viens de présenter.
M. de Moorµ. - Si je prends part au steeple-chase dont parlait tout à l'heure l'honorable M. Bouvier, je prie la Chambre de croire que ce n'est point pour fournir une course à fond de train et de longue haleine.
L'honorable député de Virton a articulé des griefs nombreux contre l'administration des travaux publics et il en est qui méritent toute l'attention du gouvernement.
Moins malheureux que mon honorable ami et collègue, je serai plus court et moins vif, et je me bornerai à poser trois questions à l'honorable ministre des travaux publics.
Des routes en construction ont été décrétées par arrêté royal ; je désirerais savoir de M. le ministre des travaux publics si ces affluents à la ligne concédée du Grand-Luxembourg ont chance d'être mis prochainement en adjudication. Ce sont de véritables solutions de continuité qui existent sur des routes en construction depuis un certain nombre d'années déjà, et qu'il est important de combler sans plus de retard, dans l'intérêt de l'agriculture, du commerce et de l'industrie. L'une de ces solutions de continuité existe entre Freux et Jenneville, ou mieux encore entre Freux et Herbaimont, ce dernier point se trouve dans un autre arrondissement que celui qui m'a fait l'honneur de m'envoyer dans cette enceinte. Je désirerais savoir si M. le ministre des travaux publics compte faire mettre en adjudication les travaux de ce tronçon de route.
Je poserai la même question pour le bout de route qui reste encore à construire entre Libin et Maissin, route de Bouillon à la station de Poix. J'ai déjà eu l'honneur de faire connaître au gouvernement qu'il y avait un véritable danger à maintenir, avec ses pentes exorbitantes, le chemin communal existant, le long duquel il y a de véritables précipices.
Cet état de choses, j'en suis convaincu, a été signalé au département des travaux publics par les ingénieurs des ponts et chaussées de notre province, et je le répète, il est plus que temps d'y apporter un prompt et énergique remède.
(page 138) J'appellerai également l'attention de M. le ministre sur les demandes parties des communes des provinces de Namur et de Luxembourg, au sujet d'une route destinée à relier le centre ardoisier d'Alle à trois routes se bifurquant au même point.
Je veux parler de la route du Moulin d'Alle sur la route de Baillamont vers Sedan ; et aboutissant à la barrière de Menuchenet à l'intersection des routes de Falmignoul, de Marche et de Recogne.
Je désirerais que M. le ministre pût donner aux populations que ces questions intéressent au plus haut point, quelques renseignements qui fussent de nature à calmer leurs inquiétudes et être accueillis par elles avec satisfaction et reconnaissance.
M. Hymans. - Afin de ne pas importuner la Chambre en prenant la parole sur divers articles, je résumerai en quelques mots les observations que j'ai à présenter sur le budget en général.
J'ai partagé, l'année dernière, le sort de l'honorable M. Bouvier à propos de questions que j'avais posées à M. le ministre et auxquelles il n'a pu répondre, d'abord à cause des débats politiques qui sont intervenus et, en second lieu, à cause de la précipitation avec laquelle on a dû procéder dans la session extraordinaire.
Je redemande aujourd'hui à M. le ministre des travaux publics quelles sont les causes de l'extrême lenteur que l'on apporte aux travaux du chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain. La Chambre a reçu plusieurs pétitions relatives à cet objet, pétitions émanées des administrations communales que la chose intéresse, et je crois qu'il est urgent, comme ces administrations le demandent, d'obliger les entrepreneurs à remplir exactement les stipulations de leur cahier de charges.
La Chambre est saisie également de pétitions des trois administrations communales de Dieghem, Haeren et Machelen, qui se plaignent de ce qu'on ait établi la station accordée à la commune de Dieghem dans un endroit tel, que l'on est obligé de faire un long détour et de monter une rampe de cinq centimètres par mètre pour arriver à la station, ce qui est très désagréable pour les voyageurs et plus désagréable encore pour le transport des marchandises.
J'ai demandé en outre à M. le ministre des travaux publics, il y a qiclques mois, où en étaient les travaux de la commission chargée de l'examen de la question des péages sur les canaux et autres voies navigables ; le rapport de la section centrale nous apprend que cette commission a terminé son travail ou à peu près et qu'elle a adopté à l'unanimité les membres présents la proposition émanée de l'initiative d'un grand nombre de membres de cette Chambre dont j'avais l'honneur de faire partie, mais ce renseignement n'est donné qu'à titre officieux ; le résultat n'est pas officiel.
Or, je désire qu'il le devienne le plus tôt possible, et si le gouvernement a l'intention de se rallier aux conclusions de la commission des péages, comme je l'espère, je forme le vœu que ces conclusions soient très prochainement formulées en loi, afin que les bateliers, dont j'ai souvent fait valoir ici les doléances parfaitement légitimes, ne continuent pas à souffrir de la position difficile où les a placés l'abaissement du tarif des marchandises transportées par le chemin de fer.
Une quatrième observation que je désire présenter à M. le ministre des travaux publics, se rapporte à une question d'humanité. Nous nous sommes occupés, dans la dernière session, des accidents qui arrivent sur le chemin de fer, et l'honorable M. Dolez, pour la deuxième fois, a recommandé à M. le ministre des travaux publics d'introduire certaines modifications dans le service, notamment en ce qui concerne les promenades fort dangereuses que les gardes sont obligés de faire le long des trains.
M. le ministre a promis de s'occuper de cet objet, et je suis convaincu qu'il tiendra sa promesse ; mais il y a une autre catégorie d'accidents non moins sérieuse que celle-là sur laquelle je désire appeler l'attention.
Je trouve, dans la dernière statistique du chemin de fer, le relevé des accidents qui ont eu lieu sur le chemin de fer pendant l'année 1863. Parmi les 21 morts causées par le service, il y en a 6 occasionnées par des trains qui ont écrasé des gardes-barrières.
Messieurs, n'y aurait-il pas moyen d'empêcher des malheurs qui, d'après une réponse faite par M. le ministre des travaux publics dans une autre circonstance, sont souvent le résultat de l'imprudence des victimes ?
Je ferai observer à la Chambre que la statistique que je cite n'est que la statistique du chemin de fer de l'Etat, et qu'il arrive beaucoup d'autres accidents du même genre sur les chemins de fer concédés. Dans la quinzaine qui vient de s'écouler, des journaux en ont signalé un grand nombre, et entre autres la fin malheureuse d'un certain nombre de gardes-barrières, écrasés par les trains.
A cette occasion, je demande à la Chambre la permission de lui lire une note qui m'a été communiquée par un honorable industriel du Hainaut, qui indique la cause de ces accidents et qui ose même indiquer le remède.
Comme il s'agit d'une question d'humanité, je crois que la Chambre voudra bien me permettre de faire intervenir dans le débat ce document, bien qu'il ne soit pas officiel.
Voici ce que m'écrit ce correspondant :
« Depuis une année j'habite à proximité de la station de Gouy-lez-Piéton, et dans ce court espace de temps, on a constaté la mort de quatre gardes-barrières, sur un parcours de moins de deux lieues (Manage à Pont-à-Celles). Hier soir encore un ouvrier a été pris entre deux convois, près Gosselies ; ses membres épars ont été recueillis dans un panier. Son service commençait à 6 h. du soir et à 6 h. 3/4 il était tué ! Ce dernier n'était pas garde-barrière, mais il vient porter à cinq le nombre de tués sur un parcours aussi peu long.
« Je crois pouvoir signaler la cause des accidents mortels dont sont principalement victimes les gardes faisant le service de nuit (6 h. du soir à 6 h. du matin).
« Ces gardes ont pour attribution de se trouver à leur barrière, une lanterne à la main, pour indiquer que la voie est libre. Mais il faut qu'ils se placent à la droite du convoi, ce qui les oblige à traverser la voie, chaque fois que le convoi arrive dans ce sens, leurs aubettes se trouvant à la gauche du train.
« C'est ce passage de la voie qui a causé les 4 morts dont je vous entretiens ; cela se conçoit du reste, ces hommes souvent par des nuits noires, froides ou humides se trouvent enfermés dans une espèce de hutte de quelques pieds carrés, auprès d'un feu qui les assoupit, malgré leur lutte contre le sommeil ; l'approche d'un train les réveille en sursaut, ils sortent de leur baraque en hâte et donnent en plein sur le convoi ; plusieurs ont dû leur mort à cet état de somnolence. Pour y obvier, on a, depuis quelques mois, placé devant ces maisonnettes un garde-corps qui oblige l'employé à faire un détour d'une dizaine de pas ; pendant ce temps il se réveille complètement, cela est vrai, mais la largeur de la voie à traverser étant augmentée de ce détour, le garde n'arrive pas en temps de l'autre côté de la voie et les deux derniers gardes-barrières ont dû leur mort à cet obstacle destiné à les réveiller.
« Ce qui se passe sur cette ligne-ci a lieu probablement un peu sur toutes les autres, car le mois dernier, pendant la même semaine que le dernier garde fut tué ici, un autre subit le même sort et dans les mêmes circonstances, aux environs d'Herenthals.
« Mais les journaux sont rarement au courant de ces sortes d'accidents qui paraissent ne pas devoir être connus du public, de peur probablement que l'on ne s'en préoccupe. Il y a donc lieu de supposer que de nombreux cas de mort ont lieu dans le pays, parce que les gardes doivent traverser la voie ferrée au moment du passage des trains.
« Il me semble qu'après des accidents successifs, dus tous à la même cause, on y devrait porter remède, et que la première mesure à prendre serait de ne plus obliger ces gardes de nuit à traverser une voie qui leur est si souvent fatale.
« D'après les informations que j'ai obtenues à cet égard, ces hommes doivent se trouver à la droite du convoi, parce que le machiniste, placé comme il est, ne peut voir que de ce côté.
« Cette raison, je l'admets volontiers aujourd'hui, que ces malheureux tenant une lanterne à la main, cette dernière se trouve à peine à deux pieds du sol et ne peut certes être vue du côté opposé à cause du rebord de la locomotive ; mais si cette même lanterne se trouvait au haut d'un bâton de quelques pieds, de manière à se trouver à la hauteur de la machine, elle serait visible de loin et à gauche comme à droite ; et partant, il suffirait que le garde fut à son poste, à côté de son aubette, le bâton à la main. Il n'y aurait plus de voie à traverser et les accidents seraient supprimés du même coup.
« Le service tel qu'il se fait aujourd'hui, du reste, rend souvent matériellement impossible que le garde soit à son poste.
« Ainsi j'ai vu, il y a quelques jours, entre le tunnel de Godarville et Manage, me trouvant sur le train partant à sept heures de Gouy vers Bruxelles, que nous passions devant le garde-barrière qui était à notre droite, et en même temps passait le convoi de Mons vers Charleroi ; pour remplir son devoir, ledit garde-barrière aurait donc dû se trouver en même temps des deux côtés de la route ! Dans l'hypothèse que quelques secondes séparent le passage de ces trains, le garde n'est-il pas chaque fois exposé à être broyé ? »
Voilà ce qu'on m'écrit, et les idées exprimées dans cette lettre m'ont paru de nature à vous être communiquées. Dès l'instant qu'il est prouvé que (page 139) ces accidents causés par le service ne sont pas toujours le résultat de l'imprudence des victimes, il est indispensable que l'on s'occupe de les prévenir.
J'ai à faire une dernière remarque. Elle m'est suggérée par le cahier des observations de la cour des comptes dont a parlé tout à l'heure l'honorable M. Dupont et qui nous a été distribué hier au soir : La cour des comptes demande d'une manière à peu près formelle que le gouvernement impute sur l'article du budget affecté à l'entretien des bâtiments civils, les frais d'établissement de paratonnerres sur les bâtiments de l'Etat, à commencer par la cour des comptes qui renferme des archives très précieuses et à finir par les hôtels des ministères, les musées et le palais de la Nation.
Je tiens à prendre acte de cette réclamation, parce qu'elle se rapporte au budget des travaux publics, et qu'il s'est élevé, paraît-il, des doutes dans les corps savants au sujet de l'efficacité des paratonnerres. Ces doutes sont même venus se traduire en un rapport très développé dans une séance récente du conseil communal de Bruxelles.
Ce rapport est en contradiction formelle avec les rapports et les circulaires du gouvernement qui sont cités dans le travail de la cour des comptes ; et comme je m'intéresse beaucoup à ce que les bâtiments civils, communaux et autres, soient préservés des atteintes de la foudre, autant que faire se peut, dans la mesure des forces humaines, je prends acte en ce moment des observations de la cour des comptes, sauf à revenir sur cette question, que je considère comme très importante, à l'occasion du budget de l'intérieur, en ce qui concerne les administrations communales.
M. Vleminckxµ. - Messieurs, je profite de la discussion du budget du département des travaux publics, pour demander à l'honorable chef de ce département quelques explications au sujet du chemin de fer de jonction qui doit relier la station du Nord à celle du Midi.
M. le ministre des travaux publics, avant que j'eusse l'honneur de faire partie de la Chambre, avait déclaré, dans l'enceinte de cette assemblée, que ce chemin de fer se ferait, mais qu'il coûterait une somme de 5 à 6 millions, et que les études n'étaient pas achevées.
Je désirerais savoir où en sont maintenant ces études. Il est grand temps que cette affaire reçoive une solution définitive, puisque le principe est adopté. Plus on tardera, plus ce chemin de fer coûtera, car il est évident que les terrains avoisinant la ville de Bruxelles augmentent tous les jours de valeur.
Je désire donc que l'honorable ministre des travaux publics fournisse quelques explications à la Chambre sur ce point. Il importe, au plus haut degré, à la ville de Bruxelles que le chemin de fer de jonction qui se trouve actuellement établi au boulevard disparaisse le plus tôt possible.
Je me joins, d'autre part, à l'honorable M. Hymans pour appuyer, d'abord les réclamations des habitants de Saventhem et d'autres communes sur le retard apporté à l'exécution des travaux du chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain, ensuite la réclamation de la commune de Dieghem, contre l'emplacement de la station qui a été accordée à cette localité.
Ces réclamations me paraissent extrêmement fondées, et j'ai l'espoir que M. le ministre des travaux publics, qui a, comme on l'a dit, l'habitude d'examiner avec attention les réclamations qu'on lui adresse, prendra en sérieuse considération celle que je viens de lui soumettre.
(page 145) M. Van Iseghem - On se souvient, messieurs, des ravages qu'ont occasionnés au littoral belge les tempêtes de la fin de 1862 et du commencement de l'année 1863. A cette époque, M. le ministre des travaux publics a institué deux commissions mixtes chargées d'examiner quels étaient les travaux à faire respectivement aux environs d'Ostende et aux environs de Blankenberghe. Le comité des ponts et chaussées a examiné les travaux recommandés par la commission mixte présidée par M. le gouverneur de la Flandre occidentale et a décidé que pour abriter la digue de mer et les dunes aux environs d'Ostende, pour contenir le sable et reformer l'estran, il était nécessaire de construire six épis.
M. le ministre des travaux publics, dans la séance du 8 mai 1863, nous a demandé le crédit nécessaire pour la construction de deux de ces épis et d'autres ouvrages, et voici comment il s'expliquait dans l'exposé des motifs :
« La somme de 166,000 fr. à affecter au port d'Ostende et à ses abords, se décompose ainsi qu'il suit :
« 1° Construction de deux épis au devant de la grande digue de mer à Ostende : fr. 100,000.
« 2° Construction d'un ouvrage de défense au pied de la même digue : fr. 56,000.
« 3° Renforcement des dunes à Middelkerke : fr. 10,000.
« Total : fr. 166,000.
« Il existait anciennement des épis au-devant de la grande digue de mer à Ostende. Leur rétablissement est nécessaire pour réformer l'estran qui s'est considérablement amaigri. Il faudrait construire six épis qui donneront lieu à une dépense totale de 550,000 fr. Il est urgent d'en faire exécuter deux. Les quatre autres pourront être exécutés en 1864 et 1865, à raison de deux par an. »
Les deux premiers épis sont aujourd'hui achevés, et je viens prier M. le ministre de vouloir bien nous dire quand il se propose de demander les fonds nécessaires pour la construction des deux épis suivants. Je ne pense qu'il y ait moyen d'avoir ces fonds par amendement au budget actuel ; mais je voudrais que l'honorable ministre demandât le crédit nécessaire par le prochain projet de travaux publics, qui nous sera présenté dans le courant de cette session, afin de pouvoir faire construire ces deux épis avant l'hiver prochain.
L'honorable M. Bouvier nous a entretenus du service des messageries. A ce propos, je dois faire connaître à la Chambre qu'il existe deux systèmes au ministère des travaux publics, l'un de conserver les messageries, pour autant que les entrepreneurs ne demandent pas d'augmentation de subsides ; le second, de confier le plus possible le service des messageries, qu'on appelle affluents au chemin de fer, à l'association de maîtres de poste : cette dernière est rétribuée à raison de 15 centimes par kilomètre.
II se peut que ce prix soit, pour quelques localités, avantageux pour le trésor, mais il est des cas où il n'en est pas de même. Ainsi, il existe entre Ostende et Furnes une diligence qui transporte en même temps les dépêches ; et l'on accorde aux entrepreneurs de ce service une indemnité, si mes renseignements sont exacts, de 22 fr. 50 fr. par mois, ce qui fait à peu près 270 francs par an. Ces entrepreneurs se sont adressés au département des travaux publics, pour obtenir une augmentation de subside, parce que leur position est devenue beaucoup plus mauvaise qu'auparavant, par suite d'un troisième et nouveau service établi à la demande de la ville de Nieuport, qui a eu raison de réclamer une communication de plus avec le chemin de fer.
Mais, si je suis bien informé, on aurait l'intention à l'administration de ne pas accueillir cette demande et de confier le transport des dépêches dont il s'agit à l'association des maîtres de poste. Or, messieurs, comme l'administration aurait à payer 15 centimes par kilomètre, qu'il y a 54 kilomètres, aller et retour d'Ostende à Furnes, il en résulterait une dépense quotidienne de 8 fr. 10 c, soit une dépense annuelle de 2,956 fr. au lieu de 270 fr. qu'elle paye actuellement, mais qui est devenue insuffisante. Impossible pour les concessionnaires actuels de continuer le service aux présentes conditions.
Il me semble, messieurs, qu'il serait infiniment préférable d'accorder une augmentation de subside à ceux qui en sont en possession ; car comme ils se contenteront de la moitié du subside qu'on allouerait aux maîtres de poste, il en résulterait encore une notable économie pour le trésor.
En outre, on ne peut pas déposséder des entrepreneurs qui ont mis certains capitaux dans une exploitation.
Je recommande donc cette affaire à l'attention bienveillante de M. le ministre des travaux publics.
(page 139) M. Van Hoordeµ. - Pendant la discussion du budget de 1864, j'ai cru devoir adresser à M. le ministre des travaux publics une question dont l'importance est capitale pour l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter. Je lui ai demandé si le gouvernement a l'intention de tenir la main à la stricte exécution des conventions qui concernent l'embranchement de Bastogne.
J'avais un double but. Je désirais d'abord voir se calmer les inquiétudes qui se sont répandues, à cet égard, dans tout l'arrondissement. Ces inquiétudes, fatales à la valeur de ses propriétés foncières et à son commerce, une longue série de déceptions, sans cesse renouvelées les explique si elle ne les justifie pas. Elle est sans exemple, je pense, dans les annales des chemins de fer concédés !
Voilà bientôt vingt ans que l'arrondissement de Bastogne a un droit acquis, et vingt ans que ce droit est absolument stérile. D'où l'on tire cette conséquence, fausse assurément, mais assez vraisemblable pour être admise par un grand nombre de personnes, et gagnant chaque jour en vraisemblance, à savoir que la ligne qui doit relier Bastogne aurléseau national est presque une utopie, et qu'on ne l'exécutera que dans un temps fort éloigné, si toutefois on l'exécute jamais !
Je désirais ensuite entendre fixer par le gouvernement lui-même la portée réelle des conventions conclues en 1862 et 1863.
L'article 3 de la convention intervenue en 1862 stipule que la Grande Compagnie du Luxembourg s'oblige à terminer et à mettre en exploitation l’embranchement de Bastogne, au plus tard dans le délai de trois ans et demi. La convention de 1863 établit formellement que la compagnie du Luxembourg demeure engagée vis-à-vis de l'Etat belge, et elle n'apporte qu'une seule dérogation expresse à la convention de 1862, dérogation qui est relative à la garantie d'intérêt. Mais son article final dit que les concessionnaires, MM. Forcade, Lenoir et Chauvet, auront à s'entendre avec la compagnie du Luxembourg pour la régularisation de la cession à leur profit de l'embranchement concédé à cette compagnie l'année précédente.
Voici la question qui se présente, et qu'il importe d'éclaircir pour éviter tout malentendu. L'article 14 du cahier des charges de 1863 accorde à ces nouveaux concessionnaires un délai de cinq ans pour la réalisation de leur projet.
On s'est demandé si ce délai de cinq ans s'applique seulement aux parties du réseau qui n'ont fait l'objet d'aucune concession antérieure, ou s'il s'étend à toute la ligne de Sedan à St-Vith, sans en excepter la section comprise entre Longlier et Bastogne.
En d'autres termes, il s'agit de savoir positivement si le délai d'exécution pour l'embranchement de Bastogne, fixé à trois ans et demi en 1862, a été porté par le gouvernement à cinq ans en 1863.
Je constate avec plaisir que M. le ministre des travaux publics me fait un signe négatif. Les textes sont si peu clairs, ils réclament si impérieusement une interprétation publique, qu'une troisième opinion s'est même fait jour. Se plaçant au point de vue d'une hypothèse qui, je l'espère pour la province de Luxembourg, ne se réalisera pas, on a dit que le délai de trois ans et demi recevrait son application à l'expiration du délai de cinq ans, si à cette époque le réseau Forcade n'était pas encore achevé.
On a soutenu sérieusement qu'alors et alors seulement, le gouvernement pourrait réclamer de la compagnie du Luxembourg, endéans trois ans et demi, l'exécution des engagements souscrits par elle à diverses reprises, notamment en 1862.
N'ayant pas obtenu, par suite des circonstances que l'on a rappelées tout à l’heure, toutes les explications que je souhaitais, je me vois obligé de réitérer mon interpellation.
Je regrette d'y être forcé, car je sais que les questions d'intérêt purement local qui se reproduisent souvent fatiguent l'attention de la Chambre, mais elle voudra bien reconnaître, dans le cas présent, que s'il est vrai que ces sollicitations continuelles provoquées par l'embranchement de Bastogne sont désagréables à entendre, il est vrai aussi qu'elle est excessivement pénible, la situation d'un arrondissement qui, en dépit d'espérances et de promesses vieilles de vingt années, voit ses habitants rester dans l'isolement, et ses produits pondéreux demeurer sans débouchés.
D'ailleurs, je ne serai pas long, et je crois pouvoir me borner à résumer les questions auxquelles je prie de nouveau et très instamment l'honorable ministre de vouloir bien répondre d'une manière catégorique. Quel est le dernier délai accordé pour l'exécution de l'embranchement de Bastogne ? Ce délai sera-t-il réellement le dernier ou bien les compagnies concessionnaires pourront-elles encore se soustraire aux voies de rigueur légales qui reposent sur la stricte exécution du cahier des charges signé par elles ? N'y a-t-il pas lieu de leur rappeler immédiatement certaines dispositions qui auraient déjà dû recevoir leur application, et qui cependant, si mes renseignements sont exacts, ne sont pas encore exécutées ?
Ainsi la compagnie Forcade doit, dans les six mois de l'arrêté de concession, soumettre les plans du tracé à l'approbation du gouvernement. On m'assure qu'aucun plan n'a été produit jusqu'à présent. Ainsi la compagnie du Luxembourg doit s'entendre avec la compagnie Forcade pour la régularisation de la cession au profit de cette dernière de la concession de l'embranchement. Ici encore, on m'assure que rien n'est fait. Le gouvernement va-t-il attendre patiemment qu'il plaise aux deux compagnies de se mettre d'accord ? Va-t-il bénévolement se laisser renvoyer de l'une à l'autre ? Il est urgent qu'il ait par-devers lui un débiteur immédiatement responsable, qu'il puisse surveiller efficacement, et auquel il puisse réclamer en temps utile le payement de cette ancienne créance ! Aussi, si l'accord à la réalisation duquel le gouvernement a promis tout son concours en 1863, tarde davantage à s'accomplir, je crois qu'il sera du devoir de M. le ministre des travaux publics de demander purement et simplement à la compagnie du Luxembourg (page 140) l'exécution de la convention de 1862. Que pourrait-elle objecter maintenant ? L'impossibilité matérielle. Ce temps est loin. Chaque jour nous entendons vanter les magnifiques résultats financiers de son entreprise. Une perte éventuelle ? D'abord, nous sommes en présence d'un droit incontestable et incontesté, et quand il s'agit de l'exercice d'un droit, peu importe qu'il en résulte une perte ou un avantage pécuniaire ! Ensuite la compagnie du Luxembourg ne jouit-elle pas d'une garantie de 70,000 fr. pour l'embranchement de Bastogne, ce qui représente déjà un intérêt annuel de 2 p. c. de la dépense totale ?
Enfin il a été prouvé dix fois dans cette enceinte que cet embranchement, qui est destiné à devenir un jour la section la plus importante de la ligne de Sedan à St-Vith, serait dès maintenant une source de bénéfices.
Avant de me rasseoir, je tiens à recommander une seconde fois à l'attention bienveillante du gouvernement les vœux intéressant l'arrondissement de Bastogne, qui depuis assez longtemps sont reproduits tous les ans par le conseil provincial du Luxembourg. Ces vœux tendent à ce que le gouvernement fasse prolonger jusqu'à Houffalize la route de Libramont à Herbaimont, à ce qu'il reprenne le chemin de grande communication d'Houffalize à Vielsalm, et à ce qu'il relie Bastogne à la gare-frontière de Watermael. Je recommanderai plus spécialement encore un dernier vœu à M. le ministre des travaux publics, parce que je crois qu'il pourra lui donner satisfaction immédiate. Il est relatif à la création d'un bureau de postes à Fauvillers. Je lis à l'article 69 du budget que M. le ministre sollicite un crédit de 44,000 francs pour création de bureaux de postes, et pour établissement de bureaux secondaires dans les grandes villes.
J'espère qu'il pourra affecter une partie de ce crédit à la dépense si nécessaire que je lui signale. Certes l'idée d'établir des bureaux secondaires dans les granJcs villes est très heureuse au point de vue de leurs intérêts, et leur utilité est incontestable. Mais avant de pourvoir à ce qui est simplement utile dans les villes, ne serait-il pas de toute justice de pourvoir à ce qui est absolument nécessaire dans les campagnes, et quelqu'un peut-il contester la nécessité de doter d'une distribution des postes chaque chef-lieu de canton ? Quant au chef-lieu du canton de Familiers, il se trouve dans les conditions déplorables qu'on vous signalait tantôt : il est impossible d'y correspondre en moins de trois et quatre jours. Si M. le ministre des travaux publics voulait bien examiner les considérations qui ont été présentées à ce sujet au conseil provincial, il ne laisserait pas subsister plus longtemps, j'en suis convaincu, l'état de choses actuel.
M. Dolezµ. - Dans une précédente session, un de mes honorables amis demandait qu'un chemin de fer fût construit du Rœulx à Jurbise. Je trouvais que c'était une excellente pensée, bien que ce fût, pour le bassin du Centre, un élément de concurrence vis-à-vis de l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter dans cette enceinte. Mais en même temps que surgissait la proposition de mon honorable collègue et ami, je présentais celle de faire un chemin de raccordement du Borinage à Jurbise.
Cette proposition était la conséquence de la première, les deux situations sont analogues. L'intérêt qui s'attache à une proposition s'attache également à l'autre. J'ai lieu de croire que le projet patronné par mon honorable ami est au moment d'aboutir et que le département des travaux publics proposera la concession de cette petite ligne. Je demande à M. le ministre de ne pas séparer ces deux projets et de les soumettre simultanément à la Chambre, comme la justice le demande.
Les motifs qu'on fait valoir en faveur de l'un des projets sont applicables à l'autre ; M. le ministre sait que, pour l'un comme pour l'autre, des concessionnaires sérieux se présentent qui sont disposés à mettre immédiatement la main à l'œuvre.
Je fais appel avec la plus entière confiance à un sentiment de justice dont M. le minisrre des travaux publics ne cesse pas de donner des preuves. Ces sentiments me sont garants qu'il fera pour le Borinage ce qu'il fera pour le Centre.
J'ai, messieurs, à réitérer cette année un vœu que j'ai déjà manifesté plus d'une fois avec une persévérance qui n'a pas eu grand succès jusqu'ici, mais qui ne se fatiguera pas tant que ce vœu ne sera pas réalisé ; je veux parler du remplacement du tunnel de Braine-le-Comte par une voie à ciel ouvert.
Les incidents de la dernière session que M. Hymans vient de rappeler, ont empêché M. le ministre de me répondre alors, je le prie de vouloir bien le faire cette année.
Je ne parle pas des dangers que peut présenter la solidité du tunnel, je reconnais que, sous ce rapport, il valait mieux que sa réputation, car il y a quinze ans qu'on signalait sa chute comme pouvant être redoutée, et il est toujours debout. Mais il n'en est pas moins vrai que le tunnel est à simple voie sur une ligne d'une très grande importance et d'une activité incessante et qu'à chaque passage il amène un ralentissement nuisible à la marche des convois et à la bonne exploitation du chemin de fer.
Il y a quatre ans, j'ai été arrêté deux à trois heures à l'entrée du tunnel par suite d'un déraillement qui avait eu lieu de l'autre côté, et les trains de toutes les lignes venant de Mons et de Charleroi ont été entravés dans leur marche. Aussi le bruit d'un très grave accident s'était-il répandu dans toute la contrée.
Tout concourt pour demander une amélioration aussi importante. J'espère que M. le ministre qui a tant fait déjà pour améliorer nos chemins de fer tiendra à honneur de réaliser cette importante amélioration que je continuerai à réclamer jusqu'à ce que je l'aie obtenue.
M. Mullerµ. - Dans une des séances de la dernière session, l'un de mes honorables collègues demanda si, en conformité des engagements pris par le gouvernement, la ville de Liège serait bientôt dotée d'une station intérieure.
M. le ministre des travaux publics fit alors à mon collègue une réponse tout à fait satisfaisante dont nous l'avons remercié personnellement et au nom de nos concitoyens.
Il me reste à prier aujourd'hui ce haut fonctionnaire de vouloir bien nous assurer que nous ne devrons plus longtemps attendre la réalisation de cette promesse, que je me permets de rappeler de nouveau à son attention toute spéciale, parce que la province et la ville de Liége ont droit à la station intérieure, sollicitée depuis près de trente ans.
Ce fait a été reconnu par le gouvernement, et lorsqu'il s'agira d'un projet d'ensemble de travaux publics dont, je l'espère, la situation du trésor rendra la présentation prochaine, je l'adjure de ne pas oublier cet objet, qui a une importance capitale pour notre arrondissement.
M. de Naeyer. - Messieurs, je remarque, dans le projet de la section centrale, que l'attention de cette section a été attirée sur un objet d'une très grande importance. Je veux parler des irrigations le long de nos rivières navigables.
C'est une question qui intéresse au plus haut point l'agriculture et qui mérite certainement d'éveiller toute notre sollicitude. Il est incontestable, messieurs, que les eaux pluviales nous enlèvent, chaque année, des substances fertilisantes d'une très grande valeur, d'une valeur pour ainsi dire incalculable.
Or, le moyen de remédier à cet inconvénient et d'atténuer, dans une certaine mesure, les pertes que nous subissons : c'est l'irrigation qui a notamment pour objet de diriger les eaux pluviales de manière qu'elles déposent sur les prairies le limon fécondant qu'elles ont enlevé aux terres arables.
Il y a donc là un intérêt très considérable et qui malheureusement a été trop négligé jusqu'ici par le gouvernement et par les propriétaires en général.
On ne connaît guère dans le pays que ce que j'appellerai les irrigations naturelles, celles qui résultent du débordement des fleuves ou des rivières.
Dans plusieurs parties du pays et principalement dans la vallée de l'Escaut, ces débordements, qui sont l'œuvre de la nature, ont contribué à former des terrains très fertiles et d'une grande valeur ; mais il n'en est pas moins vrai de dire que ce genre d'irrigations a des inconvénients et est devenu insuffisant ; il est très irrégulier et dépend d'une foule de circonstances variables. Les eaux arrivent souvent à contre-temps et se répandant alors sur les propriétés, elles sont un véritable fléau. Que de pertes n'ont pas été occasionnées par les inondations ! En outre, par suite des remaniements qu'on fait subir à nos rivières et à nos fleuves pour les approprier aux besoins de l'industrie, et surtout aux besoins de la navigation, les irrigations naturelles dont je parle sont ordinairement entravées et même rendues impossibles.
Il y a donc lieu de s'occuper très sérieusement des irrigations artificielles qui, étant convenablement réglées et organisées, permettent, pour ainsi dire, de distribuer les eaux à volonté et dans la mesure d'un emploi véritablement utile, ces irrigations peuvent être pratiquées avec le plus de facilités le long des rivières ou fleuves canalisés, à condition que l'administration veuille bien prêter un concours sérieux et efficace pour l'étude et l'exécution des ouvrages nécessaires à cet effet.
Quand on canalise, messieurs, un fleuve ou une rivière, il y a deux intérêts qui sont mis en présence : l'intérêt du commerce et de la navigation, d'un côté, et l'intérêt de l'agriculture et des propriétés riveraines de l'autre côté.
Je me rappelle que notre honorable président, dans un rapport remarquable présenté il y a quelques années sur un ensemble de travaux (page 141) d'utilité publique, faisait observer avec beaucoup de raison que si un confit était possible entre ces deux intérêts, ce serait l'intérêt agricole le plus ancien et le plus important qui devrait obtenir la prépondérance.
Malheureusement ce principe de justice n'a pas toujours été pratiqué. Non seulement en cas de conflit l'intérêt agricole est souvent sacrifié, mais il arrive mainte fois qu'il est relégué à l’arrière-plan et qu'on le perd absolument de vue. Cela est, messieurs, d'autant plus fâcheux qu'il est ordinairement facile de concilier les deux intérêts.
Que faudrait-il pour cela ? Il faudrait qu'on ne se bornât pas, lorsqu'on canalise un fleuve ou une rivière, à faire les dépenses nécessaires pour avoir une bonne navigation. Il faudrait qu'on allât un peu plus loin et que l'on ajoutât encore quelques dépenses supplémentaires, indispensables pour sauvegarder les intérêts de l'agriculture qui sont aussi dignes de la sollicitude du gouvernement. Or, quand il s'agit d'exécuter ou d'autoriser des travaux de canalisation sur un fleuve ou une rivière, il y a trois questions très distinctes, mais intéressant également l'industrie agricole qui doivent fixer toute l'attention de l'administration ; il y a d'abord la question des inondations qui a pour objet de combiner les travaux de manière à prévenir les débordements qui pourraient être dommageables aux propriétés riveraines ; pour atteindre ce résultat, il ne suffit pas de donner à la rivière canalisée les dimensions voulues dans l'intérêt d'une bonne navigation, l'on doit en outre tenir compte qu'au fur et à mesure qu'on descend vers l'aval, le volume des eaux va toujours en augmentant et qu'ainsi il peut être indispensable d'agrandir la section d'ailleurs suffisante pour les mouvements des bateaux, afin de la proportionner partout au débit probable des eaux.
La deuxième question qui se présente est celle de l'assèchement et de l'assainissement des terrains qui, par suite des changements que la canalisation apporte au régime de la rivière, sont privés de leurs anciens moyens d'écoulement et de suation ; or, pour empêcher que ces terrains ne soient convertis en véritables marais, il n'y a qu'un seul moyen, c'est l’établissement de maîtresses-rigoles dont il a été parlé à différentes reprises dans cette enceinte. Je ne fais qu'indiquer ces deux premiers points, toutefois j'ajouterai qu'en ce qui concerne la canalisation de la Dendre, le gouvernement a tenu compte des principes que je viens d'énoncer, et quoique je ne sois pas entièrement rassuré à cet égard, j'espère cependant que ces principes seront appliqués d'une manière assez large pour sauvegarder les importants intérêts qui sont ici en cause. Je me permettrai maintenant d'entrer particulièrement dans quelques développements sur les irrigations ; c'est la troisième question qui, au point de vue de l'agriculture, mérite une attention toute spéciale quand il s'agit de canaliser une rivière ; en effet, sous ce rapport, les travaux de canalisation ont généralement pour conséquence de bouleverser en grande partie la position des propriétés riveraines, et cela se conçoit facilement.
En effet, dans l'ordre établi par la nature, le courant d'une rivière suit une pente en quelque sorte parallèle à celle de la vallée, d'où il résulte qu'en cas de débordement les eaux se répandent presque de la même manière sur les deux rives.
Or la canalisation, faite en vue d'une navigation permanente, doit changer complètement ce régime naturel de la rivière en la divisant en plusieurs biefs et en établissant dans chacun de ces biefs une ligne de flottaison autant que possible horizontale ; dès lors on comprend qu'il y a des terrains qui ne sont plus susceptibles d'être irrigués, au moins avec des eaux empruntées à la rivière, parce qu'ils sont situés à un niveau trop élevé relativement à la ligne de flottaison qui forme le nouveau courant de la rivière. Par contre, à proximité des écluses on trouve des étendues de terrain souvent assez considérables pour lesquelles il est possible d'organiser un système d'irrigation fonctionnant avec une parfaite régularité au moyen de prises d'eau pratiquées en amont des écluses.
Indépendamment de cela, il est encore souvent possible d'utiliser les eaux amenées par les puissants affluents en les faisant dériver vers les terrains qu'on veut irriguer, de manière que les terrains situés le long des rivières canalisées, auxquels les bienfaits des irrigations peut être appliqué, se divisent en quelque sorte en trois catégories. Il y en a pour lesquels on peut faire usage des eaux empruntées à la rivière canalisée, en amont des écluses, et en outre des eaux qu'on ferait dériver des ruisseaux affluents ; et il y en a d'autres pour lesquels l'irrigation n'est possible qu'à l'aide de l'un ou de l'autre de ces deux moyens.
Il y a donc le long d'une même rivière canalisée un nombre plus ou moins considérable de zones irrigables, tout à fait distinctes, devant chacune faire l'objet d'une association spéciale et être dirigée par une administration spéciale.
L'opération fondamentale pour réaliser les améliorations qui nous occupent en ce moment consiste évidemment à bien déterminer la circonscription de chaque zone irrigable, en y comprenant tous les terrains qui, à raison de leur situation, doivent profiter des mêmes moyens d'irrigation, c'est-à-dire des mêmes ouvrages établis dans ce but. Quoique ces ouvrages soient en général à la charge des propriétaire intéressés, il me paraît néanmoins évident que l'intervention du gouvernement, dans certaines limites, est tout à la fois nécessaire et même commandée par des motifs de justice, car, rigoureusement parlant, il s'agit de régulariser les conséquences d'une situation créée par le gouvernement, par cela même qu'elle résulte de la canalisation qui est le fait du gouvernement.
Ce n'est pas tout. J'ignore si la même chose a eu lieu pour toutes nos rivières ou fleuves canalisés, mais il est à ma connaissance que lorsqu'il s'est agi de faire les études pour la canalisation de la Dendre, on a procédé avant tout à un nivellement général de toute la vallée, et ce travail, qui a été fait avec beaucoup de soin, indique exactement le niveau de chaque parcelle de terrain relativement à la ligne de flottaison ; il est donc extrêmement facile, à l'aide d'un pareil document, de faire la désignation de toutes les propriétés pouvant être comprises dans une même zone irrigable et appartenir ainsi à un même système d'irrigation.
Je pense que l'honorable ministre des travaux publics faciliterait beaucoup les améliorations que nous avons en vue, s'il voulait bien ordonner que le travail que je viens d'indiquer sera fait dans un bref délai partout où il existe un nivellement général ; c'est là, me paraît-il, la première mesure à prendre pour arriver à une solution de la question, et cette mesure doit émaner du gouvernement qui a ici un devoir de justice à remplir, et qui est d'ailleurs en possession des documents nécessaires à cet effet. Il va de soi que le travail déterminant la circonscription de chaque zone irrigable étant fait, devrait être porté à la connaissance des propriétaires intéressés qui pourraient être invités à en prendre communication, soit dans les bureaux des ingénieurs, soit au secrétariat de l'une ou l'autre commune. Vous voyez que cette intervention du gouvernement se réduit à des proportions extrêmement modestes et qu'il ne s'agit aucunement d'imposer de lourds sacrifices au trésor.
Ma demande est d'ailleurs conforme à la pensée qui a dicté la loi du 18 juin 1846 qui autorise le gouvernement à faire un règlement d'administration publique pour l'institution, l'organisation et l'administration de wateringues dans l'intérêt de l'assèchement, de l'irrigation et de l'amélioration des rives et des vallées de l'Escaut, de la Lys et de la Dendre. Si ma mémoire est fidèle, cette disposition a été étendue plus tard à toutes les rivières du pays en général ; or, en exécution de cette loi, il a été fait un règlement qui porte la date du 9 décembre 1847 et qui dit en termes très formels que la circonscription des wateringues à instituer sera déterminée par le gouvernement. Je crois même que cette disposition a été appliquée dans quelques parties delà vallée de la Dendre ; mais comme, par suite des travaux de canalisation qui sont en cours d'exécution, la situation de cette vallée sera complètement changée, il y a lieu, évidemment, de remanier les circonscriptions de wateringues qui peuvent avoir été indiquées jusqu'ici.
Messieurs, le règlement du 9 décembre 1847, que je viens de citer, renferme des dispositions assez étendues sur l'institution et l'organisation de wateringues ou associations entre des propriétaires ayant des intérêts communs en ce qui concerne les mesures destinées à pratiquer des irrigations artificielles, et cependant j'ai eu souvent occasion de constater que ce règlement est généralement assez peu connu. Il me semble qu'i serait très utile d'en faire une nouvelle publication au moyen d'affiches dans les communes particulièrement intéressées, et j'ose espérer que l'honorable ministre des travaux publics ne refusera pas d'ordonner cette nouvelle publication, qui pourra contribuer à faire cesser les incertitudes qui existent aujourd'hui, quant à la marche à suivre pour constituer les wateringues.
J'espère que l'honorable ministre des travaux publics appréciera l'utilité des mesures que je viens d'indiquer et qui ne présentent aucune difficulté. Je suis convaincu qu'il comprend toute l'importance de la question des irrigations artificielles et qu'il considérera comme un devoir de prêter un concours sérieux et efficace afin d'arriver à la solution la plus favorable aux intérêts du pays.
M. Beeckman. - Messieurs, je rappellerai à l'honorable ministre des travaux publics un vœu qui a été émis par le conseil provincial de Brabant depuis plus de deux ans. Je veux parler de l'embranchement du canal de Diest vers le canal de la Campine. Lors de la discussion relative à la construction du canal de la Campine, le gouvernement a pris quelques engagements vis-à-vis les députés de l'arrondissement de Louvain, en ce qui concerne l'exécution de cet embranchement.
Il est inutile, messieurs, de revenir sur tous les arguments qu'on a fait valoir déjà en faveur de cet embranchement. Du reste, je crois qu’en (page 142) présence de toutes les considérations qu'ont présentées mes honorables collègues, nous pouvons avoir la certitude qu'avant la fin de la session le gouvernement sera obligé de présenter à la Chambre un nouveau projet de travaux publics. Je me bornerai donc à demander à M. le ministre des travaux publics de bien vouloir comprendre le travail dont je viens de parler dans le projet qu'il nous soumettra dans le cours de la session.
M. Kervyn de Lettenhove. - Je viens à mon tour, et en fort peu de mots, appeler la bienveillante attention de M. le ministre des travaux publics, sur les diverses demandes en concession de chemins de fer qui se rapportent au district d'Eccloo. Ces demandes en concession tendent à la fois à rapprocher nos deux grands ports d'Ostende et d'Anvers, et à rendre l'accès d'un territoire agricole et industriel plus facile aux produits du sud de la Flandre et du Hainaut. Enfin, et c'est une considération importante sur laquelle j'ai eu déjà l'honneur d'insister, elles ont pour but de développer et de multiplier nos relations internationales avec la Zélande.
M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Comme plusieurs de mes honorables collègues, j'ai eu l'honneur, l'année dernière, lors de la discussion de son budget, de présenter des observations et de poser quelques questions à M. le ministre des travaux publics.
Je maintiens ces observations, je ne les reproduirai pas dans cette discussion, me réservant d'y revenir quand on nous demandera les fonds nécessaires pour exécuter le Palais de Justice et les autres objets dont je me suis occupé dans la dernière session.
Aujourd'hui je me bornerai à demander à M. le ministre des travaux publics où l'on en est pour les projets qui concernent mon arrondissement et dont il a été question l'an dernier. Je veux parler des concessions de chemins de fer demandées et qui doivent donner à plusieurs parties de l'arrondissement de Nivelles, encore privées de communication, les voies qui nous sont nécessaires.
Je pense que quelques-unes de ces demandes sont des plus sérieuses et que les demandeurs sont prêts à donner au gouvernement les garanties qu'il peut désirer quant à l'exécution des travaux. D'autre part, je crois savoir que M. le ministre des travaux publics fait étudier une ligne entre Bruxelles et Charleroi, qui desservira une partie importante de mon arrondissement où de nombreux intérêts attendent impatiemment cette voie de communication.
Parmi les observations que j'ai présentées l'année dernière et auxquelles il n'a pas été répondu pour les causes qui ont été signalées par plusieurs orateurs qui m'ont précédé, il s'en trouvait quelques-unes relatives au service des postes.
J'ai signalé cette anomalie qui force, par la progression irrationnelle des taxes, les personnes qui ont des lettres plus ou moins volumineuses à envoyer, à diviser ces lettres et à doubler ou à tripler ainsi la besogne des employés de la poste.
Je signalerai aujourd'hui quelques autres anomalies de même nature.
Ainsi une lettre de 15 grammes par exemple, envoyée de Bruxelles à Tirlemont, paye 40 centimes et la même lettre envoyée à Kreuznach, ne payera que 20 centimes.
Un paquet d'imprimés, cinquante circulaires, par exemple, pesant environ 100 grammes, payera, si on l'envoie en Belgique, 50 centimes et si on l'envoie à Edimbourg il ne payera que 20 centimes, et 40 seulement si on l'expédie à Calcutta ou en Chine. Je soumets ces faits à l'attention de M. le ministre des travaux publics, car il me semble que le service postal belge doit être, avant tout, au service des Belges et mis à la portée de tous les contribuables, aux conditions les plus économiques.
On a soulevé, messieurs, tantôt une question sur laquelle je désire dire aussi quelques mots.
Mon honorable collègue et ami, M. Vleminckx, a parlé de la jonction des chemins de fer du Nord et du Midi.
Je me suis beaucoup et sérieusement occupé, dans le temps, de cette question ; je croyais alors comme je crois maintenant que la meilleure solution était de joindre les deux stations par le chemin le plus court et de doter la capitale d'une station centrale, où tous les services auraient été réunis et concentrés.
Cette solution qui a fait, dans le temps, son chemin à Bruxelles, qui a été appuyée par la majorité du conseil communal, n'a pas obtenu les sympathies de l'administration et, au rebours de ce qui s'est fait partout ailleurs, l'on a éloigné la station du Midi et l'on a augmenté la distance entre les deux chemins de fer et le centre de la capitale.
La ville de Londres qui offrait bien d'autres obstacles à la création des stations intérieures, est aujourd'hui sillonnée de chemins de fer ; les moyens de communication ont été rapprochés des populations et, en ce moment il ne serait pas difficile de compter dans Londres une cinquantaine de haltes ou stations, de sorte que, quelque quartier que l'on habite, on n'a guère que 7 à 8 minutes à parcourir pour se rendre au chemin de fer. Ici, nous avons procédé différemment, et une grande partie des habitants de Bruxelles devront ajouter 10 ou 15 minutes au temps qu'ils ont à employer pour arriver à la station.
Ainsi le temps qu'ils emploient à se rendre de chez eux à leur destination est souvent plus que doublé et par là le but principal de la création des chemins de fer, l'économie du temps, est loin d'être atteint.
Je prierai donc M. le ministre des travaux publics, dans les études qui se font probablement en ce moment, d'examiner de nouveau cette question. Il me semble qu'avec l'accroissement rapide que prend la population de la capitale, les deux stations actuelles du Nord et du Midi seront bientôt des stations intérieures ; mais comme elles ont été construites pour être des stations extérieures, elles présenteront, à cause du passage au niveau des rues nouvelles, tous les inconvénients de stations intérieures établies à niveau sans avoir les avantages de la proximité du centre et de la concentration des services.
Pour relier ces deux stations, on propose d'établir ce qu'on appelle un chemin de ceinture. A Londres aussi on a fait des chemins de ceinture dans le principe, mais on n'a pas tardé à reconnaître leurs nombreux désavantages et à les remplacer par les voies directes. Tout le monde, public et exploitants, s'en est parfaitement trouvé.
Mais, à Londres, les chemins de ceinture n'ont jamais entravé l'expansion de la population ; partout ils passent au-dessous et au-dessus de la voie publique ; ici, au contraire, nous avons un chemin faisant une demi-ceinture, le raccordement du Luxembourg, et presque partout il traverse la voie publique à niveau, au grand détriment de la circulation ; il devient ainsi un obstacle très sérieux à l'expansion de la population et à l'établissement d'une bonne voie.
Je signale ces points à l'attention de M. le ministre des travaux publics. Il est à désirer que dans l'étude des projets on porte la plus sérieuse attention à la nécessité, pour la capitale, de prévoir l'augmentation progressive et croissante de population qui l'obligerait dans un délai plus ou moins long, à franchir la ceinture ferrée, et à s'étendre au-delà de cette limite.
Je crois pouvoir borner là mes observations à ce sujet. Je les développerai plus amplement dans une autre occasion.
M. de Mérode. - Une lettre adressée par l'ingénieur en chef de la province d'Anvers à M. le ministre des travaux publics, et insérée au rapport de la section centrale, traite la question de navigabilité de la Grande-Nèthe, aujourd'hui compromise. Plusieurs hypothèses sont émises dans cette lettre, plusieurs chiffres y sont cités, mais aucune conclusion n'y est formulée. De là naissent des plaintes très fondées sur l'absence de la navigation, rarement possible aujourd'hui par suite de la rapidité que les travaux entrepris par l'Etat ont donnée à l'écoulement des eaux.
Cette situation a ému le conseil provincial d'Anvers dans sa dernière session et je demanderai à M. le ministre des travaux publics quelles sont les mesures qu'arrêtera son département pour obvier à ce mal si réel.
M. Coomans. - Je prierai l'honorable ministre des travaux publics de songer à une amélioration qui ne coûterait presque rien au trésor et qui ferait grand plaisir aux deux millions de Belges environ qui savent lire et écrire. Il s'agit de l'augmentation du nombre des boîtes à lettres.
Nous sommes loin, Dieu merci, de l'époque où pour l'agglomération bruxelloise tout entière, il n'y avait qu'un seul bureau de poste et même qu'une seule boîte, destinée à la réception des lettres. Depuis lors, on a créé plusieurs bureaux de poste et un grand nombre de boîtes. On a parfaitement bien fait.
Je trouve qu'il n'y a pas encore assez de boîtes.
Si le nombre en était doublé, le budget des travaux publics n'aurait à supporter qu'une dépense presque insensible, et l'on faciliterait les relations du public avec la poste ; en outre, on favoriserait les recettes du trésor, sans aucun doute.
Mais en réclamant cet avantage pour les agglomérations de population, je n'oublie pas les petits centres, même les villages, même les hameaux, où le manque de boîtes est presque absolu. Je ne sais pourquoi le gouvernement ne place qu'une seule boîte à lettres dans un rayon d'une ou de deux lieues. Maints villages de ma connaissance, qui ont une circonférence de 2 à 3 lieues, n'ont qu'une seule boîte à lettres. Quel inconvénient y aurait-il à en avoir deux ou trois ? Pourquoi ne pas placer une boîte à lettres dans tous les centres habités, là où il y a 200 à 300 hommes réunis ?
On m'a fait une objection et elle serait sérieuse, s'il n'y avait pas (page 143) moyen d'obvier à l'inconvénient qui m'a été signalé ; on m'a dit qu'il était impossible déplacer des boîtes à lettres dans les villages, où elles ne pourraient pas être surveillées. Cela est parfaitement vrai ; mais pourquoi ne placerait-on pas les boîtes dans les maisons, soit chez des personnes honorables où les bottes seraient aussi bien placées et avec autant de sûreté que dans les rues des villes, soit chez des fonctionnaires de l'Etat.
A Paris et dans d'autres grandes villes, le nombre des boites à lettres est triple, quadruple, même décuple de celui qui existe à Bruxelles.
Je voudrais donc étendre cette amélioration aux campagnes. Je puis donner à l'honorable ministre l'assurance qu'il faut faire parfois plus d'une lieue, non pas dans la Campine, mais dans les provinces les plus peuplées de la Belgique... (interruption), dans les Flandres, me dit l'honorable M. Rodenbach, j'ajoute moi, dans toutes les provinces, pour trouver le moyen de déposer une lettre. C'est un grand inconvénient.
Je tiens compte, je le répète, de l'objection qui m'a été faite ; c'est que les boîtes des villes ne peuvent pas être en sûreté dans les campagnes ; je le reconnais ; mais il n'y a aucune difficulté à établir les boites à lettres dans les maisons mêmes, par exemple, comme me le dit un honorable ami, dans toutes les écoles communales, dans celles des centres villageois, comme dans celles des hameaux ; là où il n'y a pas d'écoles, ou bien là où l'école serait trop rapprochée du bureau de poste déjà établi, on placerait les boîtes dans les maisons de fonctionnaires publics. Je suis persuadé que nul ne se refuserait à laisser établir une boîte à lettres dans sa maison. C'est un très grand avantage. M. le ministre des travaux publics n'aurait qu'à s'assurer de l'honnêteté de la personne.
M. de Theuxµ. - Messieurs, l'idée mise en avant par l'honorable M. Coomans me paraît pouvoir être réalisée avec facilité dans toutes les localités un peu peuplées où le facteur rural est obligé de passer ; si l'on y plaçait une boîte à lettres, le facteur s'arrêterait un instant pour prendre les lettres qui y seraient déposées, il n'y aurait donc là pour lui ni surcroît de parcours, ni perte de temps.
- La suite de la discussion est remise à mardi à deux heures.
La séance est levée à quatre heures.