(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1863-1864)
(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)
(page 265) M. Van Humbeeck, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.
M. de Florisone, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.
- La rédaction en est approuvée.
M. Van Humbeeck présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.
« Le conseil communal de Perck demande une loi dans l'intérêt de la langue flamande. »
- Renvoi à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport.
« Des habitants de Felenne demandent une loi qui règle le mode de sépulture. »
« Même demande d'habitants de Villers-la-Bonne-Eau. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des habitants de Cheoux demandent une enquête sur des faits qui sont mis à charge d'un instituteur de la commune. »
- Même renvoi.
« Les membres des administrations communales de Harre, Chevron, Ferrière, Gercé, Ernonheid et Werbomont demandent que la ligne télégraphique à établir jusqu'à Aywaille soit prolongée jusqu'à Houffalize en suivant la route d'Aywaille vers Bastogne, et qu'un bureau pour le télégraphe soit annexé au bureau des postes à Werbeumont. »
- Même renvoi.
« M. Van Volxem, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé. »
- Accordé.
MpVµ. - La parole est continuée à M. Hayez.
M. Hayezµ. - Messieurs, l'état de crise dans lequel semble se trouver le ministère m'impose le devoir d'être très bref dans ce que j'ai à ajouter à mon discours d'hier.
J'étais arrivé à l'examen de la loi qui régit les pouvoirs militaires. Cette loi est de 1838. Je ne m'occuperai que de l'article que je veux critiquer.
D'après cette loi, tout officier, quel que soit son grade, quelle que soit sa position, peut être pensionné à l'âge de 55 ans. Cette disposition laisse trop de latitude au ministre de la guerre, cette latitude n'est plus conforme à nos mœurs ; il faut que la position de l'officier soit rendue plus indépendante.
On en a fait la remarque depuis longtemps déjà, aussi les réclamations n'ont pas manqué, et l'honorable général Greindl a cherché à porter remède à cet état de choses, en vous soumettant l'arrêté-loi de 1855.
Cet arrêté, messieurs, fixe les âges de la mise à la pension, mais il n'a remédié en rien à l'état de choses existant parce que, par son article 2, il donne encore au ministre la faculté de pensionner ou de ne pas pensionner, lorsque l'âge fatal a sonné. Cette latitude, je le répète, est trop grande. On s'est contenté longtemps de laisser en activité des officiers qui avaient passé l'âge voulu pour leur mise à la pension ; mais aujourd'hui on a poussé les choses plus loin : on a promu à un grade supérieur des officiers qui, aux termes mêmes de cet arrêté, auraient dû être pensionnés déjà dans le grade précédent.
C'est un abus très grave.
On veut excuser cette manière de faire par la nécessité de tenir compte de la position de fortune de certains officiers : mais en agissant ainsi, en cédant à de telles considérations, on fait un tort réel à d'autres officiers qui attendent pendant longtemps un légitime avancement sur lequel ils ont droit de compter pour augmenter quelque peu l'aisance de leur famille. Ainsi, en favorisant l'un on fait tort à dix autres.
La limite d'âge fixée par l'arrêté-loi de 1855 me paraît convenable ; je ne veux pas la combattre parce que l'expérience m'a prouvé qu'à cet âge les officiers n'ont plus, en général, l'activité nécessaire pour faire convenablement leur service.
S'il y a des exceptions, tant mieux pour ceux qui en recueillent le bénéfice.
Si des officiers éprouvent quelque mécontentement au commencement de leur mise à la pension, ils finissent par trouver une compensation très suffisante.
En effet, la liberté est quelque chose dans la vie privée ; dans l'état militaire elle est à peu près nulle. Car un officier ne peut disposer de 24 heures sans permission.
L'officier est un citoyen à part dans notre société, à cause des règlements qui régissent l'armée et qui sont nécessaires, j'en conviens.
Je pense qu'il est indispensable de fixer définitivement l'âge auquel les officiers doivent être pensionnés, mais il faut que ce soit irrévocablement et de manière que l'officier ayant atteint l'âge fatal soit mis à la pension. Il est temps de faire disparaître le système des hommes indispensables.
En définitive, il n'est pas d'hommes indispensables, on en voit chaque jour la preuve : en effet, des hommes jugés indispensables depuis longtemps, étant remplacés, on est tout étonné de voir que leurs successeurs sont au moins aussi aptes qu'eux à remplir leurs fonctions. Ce système d'exception dans la mise à la pension est pernicieux pour l'esprit de fraternité qui doit exister dans l'armée ; car c'est surtout dans l'armée que la devise l'union fait la force trouve sa raison d'être.
La loi sur l’avancement donne aussi lieu à des abus. Je comprends que la loi autorise le ministre à choisir les hommes appelés à remplir les grades supérieurs à ceux qu'ils acceptent, car il y a des officiers très propres à remplir des fonctions subalternes, et qui ne le seraient pas à remplir celles d'un grade supérieur.
Il faut donc nécessairement que le ministre ait une certaine liberté de choix ; mais cette latitude doit avoir des bornes. On a tellement abusé de l'avancement au choix qu'on serait tenté de rejeter les bénéfices qu'il peut procurer à l'armée pour éviter les inconvénients auxquels il a donné lieu.
Il est une autre circonstance qu'il est bon de noter. Des officiers instruits remplissant parfaitement, consciencieusement tous leurs devoirs, ne sont pas toujours à même, par leur position, de se faire connaître, étant trop éloignés de ceux qui disposent de l'avancement. Ils n'en obtiennent donc jamais qu'exceptionnellement, tandis que d'autres, placés près du soleil, en sentent grandement et largement les rayons.
Je pense donc que, dans l'avancement au choix, il faut n'user qu'avec la plus grande prudence de la latitude que laisse la loi.
La position financière des officiers est améliorée par une augmentation de traitement. Mais on disait qu'on s'est hâté d'annihiler cette amélioration en changeant, sans raison aucune, les uniformes.
Ces changements sont tellement fréquents, que le Belge absent pendant quelques mois et n'ayant pas lu les journaux, pourrait croire, en rentrant en Belgique, que son pays a été envahi par l'étranger.
Outre l'inconvénient de grever les officiers de dépenses que je regarde comme complètement inutiles, il y en a encore bien d'autres. Le soldat s'attache à son uniforme, à son régiment, à son drapeau. Changer souvent son uniforme, c'est changer son drapeau, c'est changer sa religion ; la religion du soldat est son drapeau.
Combien n'avons-nous pas vu d'anciens soldats conserver comme une relique l'uniforme qu'ils avaient porté avec honneur dans maintes campagnes.
Si un officier s'avisait aujourd'hui de conserver tous les uniformes qu'il a portés, il lui faudrait un magasin.
Ces changements sont parfois aussi fort peu rationnels et paraissent uniquement le résultat de la fantaisie. Ils sont très souvent en désaccord avec le bon goût.
Les traditions doivent être respectées ; n'y a-t-il pas quelque chose d'anomal, par exemple, quelque chose de choquant à voir un homme avec une capote écourtée, étriquée, une capote de petit-maître, en un mot, coiffé du bonnet à poil traditionnel des grenadiers du premier empire français ?
La cavalerie vient également de recevoir un nouvel uniforme.
Cet uniforme a-t-il subi les épreuves nécessaires avant que d'être adopté ? Je n'en sais rien. Mais il ne plaît guère à la première vue, et je le crois en outre peu approprié aux exigences d'une campagne.
Il a un autre inconvénient encore. C'est que, devant être l'uniforme de toute la cavalerie belge, il devrait, pour être convenable, se prêter à toutes les structures. Or, il n'en est pas ainsi. Cet uniforme, pour qu'il ne prête pas en quoique sorte au ridicule, doit être revêtu par un homme de taille élancée, et la plupart des officiers de cavalerie, vous l'avez constaté peut-être, prennent avec l'âge un embonpoint peu en harmonie avec ce nouveau costume.
(page 266) Tous les changements d'uniforme ne devraient se faire qu'après de mûres expériences, réflexions, et non pas pour satisfaire en quelque sorte la fantaisie de quelques-uns.
Il y a un autre changement en projet, mais je n'en dirai que peu de chose, parce qu'il n'est encore qu'en herbe, c'est pour ainsi dire un ballon d'essai.
L'honorable ministre de la guerre a dit, dans une séance précédente, qu'il avait réuni à Anvers, dans notre grand centre militaire, tous les établissements nécessaires pour que la défense fût prolongée autant que possible.
M. le ministre doit se rappeler que, dans une visite qu'il a faite à un de ces établissements, à l'école de pyrotechnie, il lui a été déclaré que la poudrerie de cet établissement ne pouvait pas, à cette époque, fabriquer par jour un kilogramme de poudre. C'est peu pour la consommation d'une place de l'importance d'Anvers si elle était assiégée. Peut-être cet état de choses a-t-il changé depuis.
Quant à l'arsenal de construction, on a doté cet établissement de machines très nombreuses : on en a fait une véritable usine et cette usine, dans le moment actuel, est en très grande activité puisqu'elle occupe, à l'intérieur ; 500 ouvriers et mille autres environ à l'extérieur.
Cet établissement me paraît un véritable contre-sens, car il a dû coûter des sommes considérables, et si, aujourd'hui, il est en activité, il est bien certain que cette activité cessera lorsque les 15 millions consacrés à l'artillerie seront dépensés.
Alors ce capital considérable sera une valeur morte.
Vous comprendrez, messieurs, les motifs qui m'empêchent d'étendre davantage ma critique sur cet établissement. Ce n'est cependant pas la matière qui me manque.
Je me résume.
Je voterai contre le budget de la guerre pour les raisons suivantes :
Notre système de défense n'est pas exécuté comme le veut la loi de 1859 et n'est pas efficace.
Notre organisation militaire n'est plus en rapport avec le nouveau système de défense qui exige particulièrement une grande force en artillerie.
Les fonds allouée pour la transformation de notre artillerie sont employés de manière à ne pas obtenir le résultat promis.
La concentration des affaires militaires dans les bureaux du département de la guerre est telle, que tout émane de lui, que les inspections des armes spéciales, le comité d'artillerie et d'autres services encore, sont réduits à n'avoi r qu'une influence nulle, ou à peu près, sur les décisions.
Le système de compression exercé sur les officiers nuit au développement de leur instruction acquise quelquefois à grands frais.
La cause première de ce mal est la défense de se servir de la presse pour la discussion et la communication des idées.
La loi sur les pensions n'est pas en rapport avec nos institutions ; combinée avec la loi de 1836 sur la position des officiers, elle met ceux-ci dans une dépendance trop grande du chef du département de la guerre ; elle change en espèce de parias, vivant au milieu d'une population libre, une classe de citoyens prêts à toute heure à sacrifier résolument leur vie pour le service de leur pays.
Enfin une partie notable de notre armée est détournée de sa destination spéciale, arrêtée dans son instruction, sous prétexte de la former à des travaux que nos miliciens, campagnards presque tous, ont faits toute leur vie.
Tels sont, messieurs, les motifs pour lesquels je me crois obligé, et comme militaire et comme représentant, de refuser mon vote au budget de la guerre.
M. le ministre de la guerre (M. Chazal). - Messieurs, l'honorable M. Hayez a soulevé de nouveau la question d'Anvers, la question de l'artillerie, la question du système de défense, la question de l'organisation de l'armée et d'autres moins importantes.
Toutes ces questions ont été discutées et résolues par la Chambre après de longues et nombreuses discussions.
Tout ce qui a été dit et répété par l'honorable M. Hayez a été vingt fois réfuté.
Par respect pour les décisions de la Chambre, je ne rouvrirai pas des débats que je considère comme terminés. Je dois cependant déclarer que si jamais les propositions de l'honorable M. Hayez pouvaient prévaloir, il y aurait un bouleversement général dans notre organisation militaire et dans notre système de défense ; nous serions entraînés dans des dépenses immenses, inutiles, dangereuses.
Je ne sais pas, messieurs, qui consentirait à en assumer la responsabilité.
Quant à la partie tactique du mémoire que nous a lu hier l'honorable M. Hayez, je déclare à la Chambre que je ne l'ai pas bien comprise.
Je ne veux pas dire par là qu'elle soit incompréhensible, mais je dois dire qu'elle est au-dessus de mon intelligence ou que je n'ai pu la saisir à la lecture que j'en ai entendue.
Si j'ai bien compris, il me semble avoir entendu citer des passages d'ouvrages publiés par M. le major Brialmont.
M. le major Brialmont est un officier d'un grand mérite. Il honore le pays et l'armée par ses écrits et ses travaux, mais l'honneur et la responsabilité de ses ouvrages lui appartiennent à lui seul. Quant à moi, je n'ai pas qualité pour les défendre.
C'est une question de polémique entre l'honorable M. Hayez et M. le major Brialmont ; si M. Hayez éprouve le besoin de répondre à cet officier, qu'il prenne la plume et je lui promets qu'il trouvera à qui parler ; mais c'est un débat dans lequel ni moi, ni les Chambres n'avons à intervenir.
Quant à moi, je n'accepte que la responsabilité de mes œuvres, de tout ce que j'ai dit à la Chambre, des actes que j'ai posés, des mesures que j'ai prises.
Pendant mes différents ministères, j'ai eu la bonne fortune de pouvoir poser quelques actes importants pour l'armée. En dernier lieu, le département de la guerre a créé Anvers et a créé notre nouveau système d'artillerie. J'en revendique la responsabilité tout entière.
Lorsque Anvers n'était pas fait, lorsqu'il n'était pas écrit sur le sol en caractère ineffaçable, lorsqu'il n'étalait pas à tous les yeux ses puissants remparts, ses larges fossés, ses magnifiques constructions et son formidable armement, on pouvait dénaturer mes projets, les condamner, tourner en ridicule le système de défense, le système de fortifications et le système d'artillerie que je cherchais à faire prévaloir, et prétendre même qu'ils nous rendraient la risée de l'Europe. Ces attaques étaient compréhensibles ; elles étaient dans l'ordre de choses ordinaire ; on n'était pas tenu de me croire sur parole. Il n'y avait rien de créé et tout le monde n'était pas obligé d'avoir fait sur ces questions spéciales les études que j'avais dû faire par position et par devoir.
Je me rendais compte alors de ces attaques, et jamais je n'ai réclamé contre celles auxquelles j'ai été en butte dans cette enceinte.
Mais après les discussions qui ont eu lieu, après les décisions qui ont été prises, revenir sans cesse sur des questions jugées, me paraît incompréhensible et sans aucune utilité.
Dans le début, je ne pouvais que m'efforcer de faire comprendre et apprécier les avantages du système que je préconisais ; je ne pouvais qu'en expliquer la supériorité et défendre avec toute l'énergie de mes convictions les principes et les vérités auxquels on a fait une si longue et si vive opposition.
Après ces laborieuses discussions et surtout après les décisions que vous avez prises, quel était mon devoir le plus impérieux ? N'était-il pas de mettre la main à l'œuvre, de faire exécuter les travaux avec toute l'activité, toute l'énergie dont j'étais capable, sans me laisser arrêter par les difficultés de tout genre que j'ai rencontrées, par les obstacles sans cesse renaissants qu'on m'a suscités, et sans me laisser même émouvoir par les calomnies auxquelles j'ai été en but ?
Je crois ne pas avoir failli à cette tâche, je crois ne pas avoir manqué à ce devoir, je crois ne pas avoir trompé votre confiance.
Aujourd'hui toutes les difficultés sont vaincues, tous les obstacles sont surmontés. Anvers et notre artillerie n'ont plus besoin que je les défende ; ils se défendront eux-mêmes. On n'a qu'à les examiner pour avoir la réponse à toutes les assertions que vous avez entendues. Ils donnent un démenti formel, éclatant, à tout ce qui a été dit hier, comme ils ont donné un démenti à tous ces faux prophètes qui avaient prédit qu'Anvers ne se ferait pas, que ceux qui étaient chargés de son exécution mourraient à la peine, quoique jeunes, sans voir jamais la fin de cette entreprise insensée qui devait, selon eux, causer la ruine du pays et coûter plus de cent millions !
Anvers va être terminé ; il le sera à la fin de cette année. Anvers pourrait se défendre dès aujourd'hui. Une partie de son armement est en batterie et bientôt cet armement sera au grand complet. Eli bien, malgré des travaux extraordinaires et très importants, malgré des ouvrages supplémentaires qui ont été exigés dans un intérêt (page 267) purement civil et tout à fait étranger à la fortification, travaux que j'ai fait connaître a la Chambre, il y a deux ans et qui consistent dans l'ouverture de six grandes portes de ville, dans le détournement du canal d'Herenthals, du Schyn, dans des ponts, des aqueducs, malgré tous ces travaux exceptionnels, je suis heureux de le dire à la Chambre, les dépenses d'Anvers ne s'élèveront pas au-delà de 54 millions et demi.
Or, messieurs, je déclare que jamais en Belgique on n'a obtenu un pareil résultat. Je vais plus loin cl je dis que jamais dans aucun pays on n'a exécuté un travail aussi considérable, en aussi peu de temps, avec moins d'argent et avec autant de soin.
Je le déclare parce que ce résultat est dû à la probité, au talent et au zèle ardent de tous les officiers qui se sont dévoués à cette œuvre, et qui, depuis quatre ans, y ont consacré tout leur temps, tous leurs efforts avec une intelligence et un patriotisme que j'ai déjà proclamés ici et auxquels je suis heureux de rendre aujourd'hui un nouvel et solennel hommage.
Je ne dois pas oublier non plus de rendre justice à la société qui a entrepris ce vaste travail, et spécialement MM. Pauwels et Dupré, qui m'ont constamment secondé avec autant de loyauté que d'habileté et de louable empressement.
Messieurs, les travaux d'Anvers ont été visités par les principaux ingénieurs de l'Europe et notre artillerie a été vue à l'œuvre par de hautes sommités du monde militaires.
Ils diront si ces fortifications et notre nouvelle artillerie nous ont rendus la risée de l'Europe, je leur laisse le soin de faire connaître leur opinion à ce sujet. Leur voix plus autorisée que la mienne, plus imposante aussi que celle de l'honorable M. Hayez, qui n'a jamais vu tirer un seul de nos canons nouveaux (j'en appelle à sa loyauté), leur voix a déjà fait justice de tout ce qu'on a dit et contre notre artillerie et contre nos fortifications ; elle m'a déjà vengé, messieurs, plus que je ne le désire, des attaques de tous ces ingénieurs, de tous ces artilleurs, de tous ces tacticiens apocryphes qui ont vainement usé leur plume anonyme pour battre en brèche des remparts et démonter des canons qui braveront désormais des tirs d'une plus longue portée que celle de leurs attaques.
L'opinion de ces hommes spéciaux, l'honneur que nous font plusieurs puissances en imitant nos travaux d'Anvers et en nous demandant des renseignements pour la transformation et l'organisation de leur artillerie me donnent des satisfactions d'amour-propre au-dessus de mon ambition et me consolent de bien des critiques.
Messieurs, je ne crois pas nécessaire de me défendre encore d'avoir fait exécuter ces travaux et d'avoir, avec votre appui, doté la Belgique d'un système de défense.
J'ai atteint le but que j'ai poursuivi depuis le jour où j'ai eu l'insigne honneur de contribuer à l'affranchissement de notre pays.
J'ai toujours pensé que, quand des hommes avaient pris une part quelconque à une révolution, ils n'avaient accompli leur mission et justifié leur œuvre devant Dieu et devant les hommes que lorsque après avoir détruit et renversé, ils avaient su recréer, reconstruire sur de plus sages et de plus solides bases, et que, lorsque après avoir reconstruit, ils avaient su prendre toutes les mesures pour conserver, défendre et perpétuer leur œuvre.
C'est aussi ce que vous avez pensé, messieurs, car c'est à cette œuvre que vous n'avez cessé de travailler depuis 1830 ; c'est à cette œuvre que vous avez mis la dernière main en votant les fortifications d'Anvers, car elles sont la clef de voûte et le couronnement de la nationalité belge.
On peut dire aujourd'hui que l'œuvre de 1830 est désormais assurée contre toutes les éventualités de l'avenir, si nous continuons à y consacrer le courage, le patriotisme et l'énergie qui sont les vertus traditionnelles du peuple belge, et si nous avons la sagesse de rester unis.
Je ne me défendrai donc plus, messieurs, d'avoir, de commun accord avec vous, donné la sécurité au pays.
Que ceux qui me blâment d'avoir poursuivi et atteint ce but me jettent la pierre, s'ils le veulent ; je ne la ramasserai plus ; je laisserai ce soin à votre justice et à l'impartialité du pays et de l’armée. Je sais que l'heure de la réparation sonnera pour moi le jour où le pays sera menacé d un danger. Cela suffit à ma conscience.
On m'a accusé d'arbitraire et d'une sévérité outrée. Eh bien, au moment où je vais quitter le ministère de la guerre, je déclare qu'il n'est qu'un seul point sur lequel je ne suis pas aussi satisfait de moi que je le voudrais et sur lequel j'éprouve de véritables scrupules.
Loin de me reprocher de la sévérité, je crains au contraire de n'en pas avoir montré assez dans toutes les circonstances particulières qui se sont présentées, sans aucune exception.
L'armée, messieurs, a une excellente organisation, l'armée a aujourd'hui une base de défense que je considère comme inattaquable. L'armée a un matériel et un armement que lui envient les plus grandes nations ; eh bien, tout cela n'est rien, sans une discipline sévère. Dans un pays libre, la discipline est difficile à maintenir et sans elle, l'armée sera impuissante à défendre la liberté et la patrie.
J'espère que mon successeur ne trouvera pas les mêmes difficultés que moi et ne se laissera pas décourager par de tristes exemples. J'espère aussi que vous lui continuerez l'appui bienveillant, sympathique et énergique que vous m'avez si souvent accordé et dont j'éprouve le besoin de vous remercier de nouveau, au moment où je vais me séparer de vous. (Applaudissements.)
M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Messieurs, je ne suivrai pas les deux orateurs qui viennent de se rasseoir dans les longues considérations qu'ils ont émises et qui sont purement techniques.
Je veux me placer, en discutant le budget de la guerre, sur un tout autre terrain ; je me propose de l'examiner au point de vue économique.
Je n'entrerai pas, à cet égard, dans de longues considérations : tout ce qu'on peut dire au sujet des dépenses qu'occasionne l'armée a été dit déjà dans cette enceinte, en des termes beaucoup plus éloquents que je ne pourrais le faire moi-même. Je me bornerai donc à présenter, en peu de mots, les trois objections que je fais contre l'exagération du budget de la guerre.
La première de ces objections est purement financière : Je dis que si la Belgique, constituée en Etat neutre par les traités de 1831 et de 1839, s'était conformée, je ne dirai pas aux prescriptions des protocoles de Londres, mais aux conseils qui lui ont été donnés par les puissances, en d'autres termes, si la Belgique n'avait jamais eu qu'une armée de 12,000 hommes, comme on le lui a conseillé, nous n'aurions pas dû voter, ces jours derniers, un budget de la dette publique de plus de 40 millions ; et quant à la sécurité de notre nationalité, nous en serions exactement au même point qu'aujourd'hui.
Notre sécurité, notre nationalité sont garanties par les cinq puissances qui ont signé le traité de Londres de 1839 ; et certainement aucune attaque ne pourrait être faite contre ce traité sans que ces puissances y mettent obstacle, et nous donnent l'appui et le secours qu'elles nous ont promis.
Messieurs, je ne m'étendrai pas sur la différence considérable qui existerait dans notre état financier, si nous n'avions pas à voter annuellement un budget de 40 millions pour la dette publique, si nous ne devions pas y ajouter 35 millions pour le budget de la guerre.
Chaque fois que nous avons une réforme à faire dans nos finances ou dans nos contributions, nous nous trouvons réduits à l'impuissance. Chaque fois que nous voulons supprimer, réduire ou transformer un impôt, le ministre des finances, vient nous dire : C'est impossible, j'ai besoin de tout cet argent ; et il n'en a besoin que parce qu'il faut subvenir chaque année aux dépenses croissantes de l'armée et de la dette publique. Je ne m'étendrai pas davantage sur ce premier point.
La deuxième objection qui me fera voter contre le budget de la guerre est celle qui a motivé mon abstention lors du vote du contingent de l'armée ; il me serait impossible de consentir à voter l'expropriation forcée pour cause d'utilité publique contre dix mille familles annuellement, de la propriété la plus sacrée, celle de la vie, du temps et de la liberté de nos concitoyens.
Messieurs, je pourrais m'étendre très longuement sur ce chapitre, mais une loi de réforme de notre système de recrutement militaire est présentée ; quand la Chambre s'en occupera, le moment sera venu de la discuter, je ne fais donc qu'indiquer ce second grief contre le budget de la guerre, qui n'est que la conséquence du système d'organisation de notre armée.
La troisième objection est une objection morale et politique. En acceptant par l'organisation d'un système défensif ou agressif formidable, par la force et par l'importance que l'on donne à notre armée, par la création d'ouvrages colossaux, les solutions que peut donner la guerre, nous acceptons évidemment la loi des plus forts. Je ne crois pas, messieurs, que la Belgique ait intérêt à accepter les solutions de la force ; sa sécurité doit reposer sur le droit, et c'est le droit qui est la force des Etats faibles.
Les traités de 1839 que j'ai invoqués tantôt garantissent et notre neutralité et notre nationalité ; les cinq puissances qui ont concouru à ce traité s'en sont portées garantes.
Nous aurions dû nous contenter de cette garantie, ne pas nous lancer comme nous l'avons fait depuis trente-trois ans, dans des dépenses militaires si exorbitantes, que si nous comparions notre budget de la guerre avec ceux des puissances qui font des expéditions lointaines, qui ont des colonies ou de graves questions à vider dans toutes les parties du monde, la Belgique se trouverait placée au troisième rang en proportion du nombre de ses habitants.
(page 268) Il est déraisonnable qu'une nation placée comme la nôtre sous la garantie des grandes puissances de l'Europe, se soit lancée dans des dépenses aussi onéreuses.
Je bornerai là l'exposé des motifs qui me déterminent à voter contre le budget delà guerre.
M. De Lexhy. - L'honorable ministre de la guerre vient de faire son testament politique. Il y a une clause de ce testament qui exige des explications. L'honorable ministre a dit. si j'ai bien compris, que la dépense totale des fortifications d'Anvers s'élèverait à 54 1/2 millions de francs. Je doute que cette somme soit en concordance avec les crédits votés par la législature. Si cette somme excède les crédits alloués, je déclare que je n'accepte pas le legs que l'honorable ministre veut nous faire. Des explications sont indispensables sur cette question.
M. le ministre de la guerre (M. Chazal). - Messieurs, lors de la discussion des crédits pour Anvers, nous avons présenté les devis nécessaires. C'était avant l'adjudication des travaux ; c'était également avant de savoir à quel taux s'élèverait l'acquisition des terrains. Il ne pouvait y avoir, pour ces objets, que des estimations approximatives.
L'adjudication des travaux, tout le monde le sait, a été, pour l'enceinte, de 4 pour cent plus élevée que l'évaluation du génie, et de 8 pour cent plus élevé pour le camp retranché.
Le prix des terrains a dépassé d'un million le chiffre des évaluations. Il y a déjà deux ans que nous avons signalé cette situation à la Chambre, à propos de la loi qui alloue une avance de cinq millions à la société des entrepreneurs.
L'honorable M. Lebeau, dans le rapport qu'il a fait à propos de cette loi, a signalé la nécessité de cette dépense supplémentaire toute naturelle, et dont la Chambre a reconnu la légitimité. Les détails de ce surcroît de dépense sont indiqués dans le rapport qui a été soumis à la Chambre.
Il n'y a rien de nouveau dans le chiffre que je viens de citer.
La Chambre en a eu connaissance depuis deux ans.
M. Vermeireµ. - Messieurs, comme l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu, je trouve que les dépenses que nous faisons pour notre établissement militaire sont trop considérables comparativement à nos ressources.
Ces dépenses augmentant chaque année, je ne puis pas donner un vote affirmatif au budget de la guerre. Je voterai contre.
M. Goblet. - Messieurs, puisque chacun cherche à motiver son vote, permettez-moi, à moi qui me suis mêlé si souvent et si longtemps à toutes ces questions, de dire qu'aujourd'hui encore je voterai contre le budget de la guerre.
Je reconnais, avec M. le ministre de la guerre, qu'il est parfaitement inutile, complètement oiseux de venir aujourd'hui discuter de nouveau la question d'Anvers, la question des canons et la question du système de défense.
Celte discussion est inopportune en ce moment et ne peut avoir de résultat utile.
Quoique j'honore, que j'estime le caractère de l'honorable ministre de la guerre, il m'est impossible de partager l'opinion qu'il a exprimée si hautement du geste et de la parole, en y mettant une certitude aussi absolue que possible.
Je conserve mon opinion tout entière sur la valeur des fortifications d'Anvers au point de vue général de la défense du pays. Je conserve également mon opinion sur le système d'artillerie, et cette opinion se fortifie encore par les résultats des expériences nouvelles auxquelles on se livre.
J'espère me tromper, messieurs, parce qu’il vaut beaucoup mieux, pour notre patrie, espérer que l'avenir viendra justifier la bonté et l'utilité des moyens de défense que nos contradicteurs ont imposés à la Belgique ; il serait pénible de voir, que nous avons employé tant d'argent et tant d'efforts, sans bénéfice aucun et pour établir un état de chose désastreux.
Je n'y mets pas le moindre amour-propre, mais une pensée patriotique ne peut anéantir des convictions sincères et raisonnées.
Je pense également qu'il ne peut servir à rien de critiquer les détails du budget de la guerre dans la circonstance présente et en présence des événements qui se préparent ; on ne parviendra pas à changer le moindre détail et on aurait le tort de donner de l'inquiétude aux citoyens qui ont encore aujourd'hui plus ou moins de confiance dans notre organisation militaire.
J'ai d'autres raisons qui m'engagent à repousser le budget de la guerre.
Ces raisons ont été en partie exposées par mon ami et collègue l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu.
Je crois, comme lui, que notre organisation militaire et les dépenses qu'elle entraîne ne sont ni en rapport, ni en harmonie avec nos ressources et les mœurs de notre population.
M. Coomans. - Messieurs, je m'étais proposé naguère de présenter de longues observations sur notre budget militaire. J'en suis empêché, à cause de la situation provisoire où se trouve le gouvernement ; à cause du refus de réponse de l'honorable ministre de la guerre à l'honorable M. Hayez, refus duquel j'infère que M. le ministre de la guerre ne me répondrait pas davantage ; à cause de l'excellent discours que je viens d'entendre de l'honorable M. le Hardy de Beaulieu, discours où les principales raisons d'opposition au budget de la guerre et à tout notre établissement militaire se trouve résumée de la manière la plus complète.
Je me bornerai donc à émettre, comme je l'ai fait les années précédentes, je puis m'en vanter, ainsi que l'honorable M. Vander Donckt et plusieurs autres, un vote négatif.
M. Mouton. - J'ai voté jusqu'à présent les budgets qui nous ont été successivement soumis, mais à la suite d'un incident qui s'est produit dans la dernière session et dont la Chambre a conservé le souvenir, j'ai annoncé l'intention de repousser le budget et j'ai indiqué alors le caractère que j'attachais à l'émission d'un vote improbatif.
Je me réfère aux explications que j'ai données à cette époque et je voterai contre le budget de la guerre.
(page 273) M. Vander Donckt. - Je n'ai demandé la parole que pour motiver en peu de mots le vote que j'émettrai sur le budget de la guerre. Depuis que j'ai eu l'honneur de siéger dans cette enceinte, je n'ai pas voté un seul budget de la guerre, je n'ai voté ni pour la petite ni pour la grande enceinte. Je tiens à dire à la Chambre et au pays que ce n'est pas par un sentiment d'hostilité contre l'armée qui a toutes mes sympathies, ni contre l'honorable chef du département de la guerre, que je considère comme un officier général de grand mérite ; c'est par des motifs financiers, à cause de l'élévation annuelle du chiffre des dépenses militaires. Dans les années 1850 et après on était généralement d'accord, et dans les Chambres et au dehors, que le chiffre de 25 millions devait suffire pour tout ce qui concernait les dépenses de la guerre.
Quelque vieille que soit cette idée, je la partage encore ; c'est le seul motif qui me fera émettre encore un vote négatif sur le budget de la guerre.
(page 268) - La discussion générale est close.
« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement des employés civils : fr. 154,810.
« Charge extraordinaire : fr. 650. »
- Adopté.
« Art. 3. Supplément aux officiers et sous-officiers employés au département de la guerre : fr. 16,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Matériel : fr. 40,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Dépôt de la guerre : fr. 19,000.
« Charge extraordinaire : fr. 100,000. »
- Adopté.
« Art. 6. Traitement de l'état-major général : fr. 840,578 90. »
- Adopté.
« Art. 7. Traitement de l'état-major des provinces et des places : fr. 357,266. »
- Adopté.
« Art. 8. Traitement du service de l'intendance : fr. 150,112 75. »
- Adopté
(page 269)
« Art. 9. Traitement du service de santé des hôpitaux : fr. 244,882 90. »
- Adopté.
« Art. 10. Nourriture et habillement des malades ; entretien des hôpitaux : fr. 574,750. »
- Adopté.
« Art. 11. Service pharmaceutique : fr. 120,000. »
- Adopté.
« Art. 12. Traitement et solde de l'infanterie : fr. 13,336,208 48.
« Les crédits qui resteront disponibles, à la fin de l'exercice, sur les chapitres II, III, IV et VIII, concernant le personnel, pourront être réunis el transférés, par des arrêtés royaux, à la solde et autres allocations de l'infanterie, ce qui permettra le rappel sous les armes, pendant un temps déterminé, d'une ou de deux classes de miliciens, qui appartiennent à la réserve. »
- Adopté.
« Art. 13. Traitement et solde de la cavalerie : fr. 3,825,000. »
- Adopté.
« Art. 14. Traitement et solde de l'artillerie : fr. 3,222,635 50. »
- Adopté.
« Art. 15. Traitement et solde du génie : fr. 874,275 76. »
- Adopté.
« Art. 16. Traitement et solde des compagnies d'administration : fr. 285,692 80. »
« Les hommes momentanément en subsistance près d'un régiment d'une autre arme compteront, pour toutes leurs allocations, au corps où ils se trouvent en subsistance. »
- Adopté.
« Art. 17. Etat-major, corps enseignant et solde des élèves : fr. 180,125 40. »
- Adopté.
« Art. 18. Dépenses d'administration : fr. 29,007 73. »
- Adopté.
« Art. 19.Traitement du personnel des établissements : fr. 48,500. »
- Adopté.
« Art. 20. Matériel de l'artillerie : fr. 800,000. »
- Adopté.
« Art. 21. Matériel du génie : fr. 700,000. »
- Adopté.
« Art. 22. Pain: fr. 1,908,994 34. »
- Adopté.
« Art. 23. Fourrages en nature : fr. 3,121,845 80. »
- Adopté.
« Art. 24. Casernement des hommes : fr. 633,050 04. »
- Adopté.
« Art. 25. Renouvellement de la buffleterie et du harnachement : fr. 100,000. »
- Adopté.
« Art. 26. Frais de route et de séjour des officiers : fr. 100,000. »
- Adopté.
« Art. 27. Transports généraux : fr. 75,000. »
- Adopté.
« Art. 28. Chauffage et éclairage des corps de garde : fr. 70,000. »
- Adopté.
« Art. 29. Remonte : fr. 596,990. »
La section centrale, d’accord avec le gouvernement, propose de réduire ce chiffre de 16,200 fr., ce qui le porte à 580,790 fr.
- Le chiffre, ainsi réduit, est adopté.
(page 270) « Art. 30. Traitements divers et honoraires : fr. 147,772 40.
« Charges extraordinaires : fr. 775 92. »
- Adopté.
« Art. 31. Frais de représentation : fr. 30,000. »
- Adopté.
« Art. 32. Pensions et secours : fr. 103,150. »
« Charges extraordinaires : fr. 3,513 86. »
- Adopté.
« Art. 33. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 16,327 55. »
- Adopté.
« Art. 34. Traitement et solde de la gendarmerie : fr. 2,124,538 76. »
- Adopté.
MpVµ. - L'article unique du projet est ainsi conçu :
« Article unique. Le budget du ministère de la guerre est fixé, pour l'exercice 1864, à la somme de trente-quatre millions neuf cent cinquante-deux mille cent francs (fr. 34,952,100), conformément au tableau ci-annexé. »
- Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.
85 membres y prennent part.
60 répondent oui.
21 répondent non.
4 s'abstiennent.
En conséquence, le budget est adopté. Il sera transmis au Sénat.
Ont répondu oui : MM. Thonissen, Vanden Branden de Reeth, Alp. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Leempoel de Nieuwmunster, Van Overloop, Van Renynghe, Verwilghen, Wasseige, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier, Braconier, Coppens, de Baillet-Latour, de Brouckere, Dechamps, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Mérode, de Naeyer, de Renesse, de Rongé, de Ruddere de te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Dolez, H. Dumortier, Frère-Orban, Grandgagnage, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Julliot, Kervyn de Volkaersbeke, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Ch. Lebeau, J. Lebeau, Mascart, Moncheur, Muller, Nélis, Orban, Orts, Pirmez, Pirson, Rogier, Royer de Behr, Sabatier, Snoy, Tack, Tesch et Thibaut.
Ont répondu non : MM. Vander Donckt, Van Humbeeck, Vermeire, Beeckman, Coomans, Crombez, David, de Bronckart, de Conninck, Delaet, De Lexhy, d'Hane-Steenhuyse, Dubois, Goblet, Grosfils, Hayez, Jacobs, Le Hardy de Beaulieu, Mouton, Rodenbach et Ern. Vandenpeereboom.
Se sont abstenus : MM. Lesoinne, Magherman, Moreau et de Montpellier.
M. Lesoinne. - Messieurs, comme les années précédentes, n'ayant pas donné mon assentiment à la loi d'organisation de l'armée, je n'ai pu voter pour le budget de la guerre, qui est la conséquence de cette organisation. D'un autre côté, dans les circonstances où nous nous trouvons, je n'ai pas voulu refuser au gouvernement les moyens de parer aux éventualités qui pourraient se présenter.
M. Magherman. - Le budget de la guerre est la consécration d'un grand service public basé sur la loi organique de l'armée ; je ne veux pas, par un vote négatif, jeter la perturbation dans ce service. D'un autre côté, les dépenses toujours croissantes de l'armée ne peuvent avoir mon approbation.
M. Moreau. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs que M. Lesoinne.
M. de Montpellier. - Messieurs, j'ai toujours voté pour le budget de la guerre et je me serais bien gardé de voter contre, cette année, parce que je considère le maintien de l'armée comme un principe fondamental. Mais en présence des augmentations toujours croissantes qui nous sont demandées, j'ai préféré m’abstenir.
(page 273 M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Grand-Rieu, le 18 mai 1863, le sieur Lietard demande l'abolition des règlements relatifs au mariage des employés de la douane.
Messieurs, ce n'est pas la première fois que cette demande est soumise à la Chambre, et chaque fois l'honorable ministre des finances nous a fait voir les inconvénients qu'il y aurait à consentir légèrement au mariage des employés de la douane.
La douane peut être assimilée à l'armée, et il est impossible de bien administrer la douane, si le ministre ou les autorités constituées n'ont pas la faculté de déplacer à volonté les douaniers d'après les circonstances.
Ces demandes émanent ordinairement de gens qui ont dans leurs famille des personnes qui ont fréquenté des douaniers et qui pour réparer leur honneur et pour se procurer des moyens d'existence désireraient se marier.
Dans ces termes votre commission, messieurs, conclut au renvoi de cette pétition à M. le ministre des finances.
- Adopté.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Ninove, le 14 novembre 1863, des fabricants et négociants à Ninove réclament contre les anomalies résultant du tarif spécial applicable aux transports de charbons, sur la ligne de Dendre-et-Waes,
Messieurs, cette réclamation aussi n'est pas nouvelle, elle a été faite à plusieurs reprises et notamment en 1862, dans les séances des 1 et 3 avril, sur les observations de l'honorable M. de Naeyer. M. le ministre a bien voulu prendre en sérieuse considération ces observations les a, en quelque sorte, adoptées et a promis de faire justice.
Cependant jusqu'ici rien n'a été fait. Les pétitionnaires se plaignent de ce que dans les localités les l'us rapprochées du lieu de production, ils sont obligés de payer sur un tarif beaucoup plus élevé que dans des localités plus éloignées.
En effet, messieurs, dans la station de Denderleeuw on paye sur un tarif beaucoup plus élevé que dans les stations d'Erembodegem et d'Alost.
Les pétitionnaires allèguent comme preuve de cette assertion, ce que tout le monde peut, du reste, vérifier journellement, c'est que des marchands de charbon sur la ligne de Denderleeuw laissent passer le charbon devant leurs magasins jusqu'à Erembodegem et les font chercher par des chariots pour les introduire dans leur magasin, afin d'éviter l'augmentation du tarif qui est très considérable, de cette manière ils font encore un bénéfice.
Voici, en effet, messieurs, quelles sont ces différences : 10,000 kilogrammes de charbon payent :
A Grammont 52 fr. pour 13 lieues de parcours.
A Ninove 55 fr. 50 c. pour 15 lieues de parcours.
A Denderleeuw 56 fr. 50 c. pour 17 lieues de parcours.
Taudis qu'à Erembodegem et à Alost, qui sont beaucoup plus éloignés des lieux de production, on paye seulement fr. 44-80, à Termonde fr. 45-00, à Zele fr. 46-00 et à Lokeren 46-80, pour un parcours de 22 lieues de distante.
(page 274) Messieurs, il est évident que la réclamation des pétitionnaires est très fondée, elle est si fondée, que M. le ministre l'a reconnu. Je me permettrai de donner lecture d'un passage du discours qu'il a prononcé. Voici ce qu'il dit entre autres ;
« Nous avons à compléter notre travail ; mais comme le dit l'honorable membre, nous ne sommes pas seuls ; je ferai ce que je pourrai, mais je ne puis agir que de commun accord avec la compagnie, puisque c'est sur la part de la compagnie que se prélèvent les remises.
« J'admets avec l'honorable membre qu'une localité plus éloignée ne peut jamais avoir à payer moins qu'une localité rapprochée. Ce serait une chose injustifiable, contraire a la vérité, contraire au bon sens.
« Je pense, messieurs, que moyennant ces observations les deux honorables préopinants peuvent être convaincus que l'examen de l'affaire dont ils se sont occupés, aboutira à un résultat satisfaisant. »
Voilà les paroles de l'honorable ministre dans la séance du 1er avril 1862.
Dans la séance du 2 avril 1862, l'honorable ministre disait encore :
« En ce qui concerne les observations présentées dans la séance d'aujourd'hui, pour la seconde fois, par l'honorable M. de Naeyer, nous avons déjà constaté hier que nous étions d'accord. Il y a certainement à étendre à d'autres localités de la ligne de Dendre-et-Waes, la réduction qui a été consentie sur le transport des charbons, en faveur de quelques localités de cette ligne. Je répète et je renouvelle cette déclaration, parce qu'elle est importante ; comme déclaration de principe, elle est d'une application assez fréquente, que je n'admets pas que sur le chemin de fer de l'Etat une localité plus rapprochée puisse payer plus qu'une localité plus éloignée. »
Messieurs, nous sommes eu janvier 1864, et leurs réclamations n'ont pas encore obtenu justice. La ville de Ninove se croit préjudiciée pat cet état de choses ; or, dans cette séance, M. le ministre a donné les raisons qui ont amené ce tarif anomal, dirai-je ; c'est qui les diverses parties du chemin de fer ont été construites à des époques différentes, les idées ont été successivement vers les réductions, de manière que de là est résultée une anomalie qu'il s'agit de redresser et à l'occasion de laquelle il y a justice à rendre.
Votre commission, dans cette occurrence, a l'honneur de vous proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.
(page 270) M. de Naeyer. - Messieurs, ainsi que l'honorable rapporteur de la commission des pétitions vient de l'exposer parfaitement, il a été reconnu, il y a deux ans, que la situation qui est faite à plusieurs localités de la vallée de la Dendre, en ce qui concerne le transport des charbons, est une situation injustifiable, contraire au bon sens. Elle a été caractérisée en ces termes par l'honorable ministre des travaux publics, il y a deux ans, et l'honorable ministre a bien voulu promettre alors que cette situation serait corrigée en étendant à d'autres localités de la ligne de Dendre-et-Waes la réduction qui avait été consentie en faveur de quelques localités de cette ligne.
Deux ans se sont passés depuis cette époque, et malheureusement la situation injustifiable et contraire au bon sens existe encore, il paraît même qu'elle a été aggravée.
Je ne veux pas en faire un reproche à l'honorable ministre des travaux publics. Au contraire, je profite de cette occasion pour lui rendre témoignage de la bonne volonté qu'il a montrée pour remédier à ce fâcheux état de choses.
Mais la réforme qu'il s'agissait d'opérer ne dépendait pas de lui seul. Il fallait le concours de la société de Dendre-et-Waes.
Or, il faut le dire parce que c'est la vérité, cette société est grande amie du progrès quand il est favorable à ses finances. Mais quand il s'agit de réaliser une réforme qui porte plus ou moins atteinte à ses finances, elle devient excessivement rétrograde. C'est ce qui a eu lieu dans cette occurrence et c'est par cette résistance, que j'appelle peu raisonnable, de la société, que la bonne volonté de l'honorable ministre a été paralysée jusqu'ici.
Cependant je dois ajouter que le gouvernement n'est pas complètement désarmé vis-à-vis de cette société ; il a le moyen de lui faire comprendre que l'équité la plus vulgaire exige qu'en cette matière on adopte un système de compensation, ayant pour objet de ne pas favoriser les uns au détriment des autres.
Je crois que si cela devient absolument nécessaire, M. le ministre ne reculerait pas devant une mesure prise dans ce sens.
Il y aurait peut-être un moyen d'arriver plus facilement au résultat que nous désirons tous : ce serait de donner suite au projet qui a été énoncé dans le discours du Trône, projet qui aurait pour objet d'opérer des réductions sur le tarif des chemins de fer.
Je crois que si ce projet était réalisé, la question que nous examinons ici n'aurait peut-être plus d'objet, c'est-à-dire que ce tarif spécial donnant lieu aujourd'hui à des anomalies incroyables serait absorbé dans la réforme générale.
J'espère que M. le ministre des travaux publics voudra bien donner suite prochainement au projet annoncé dans le discours du Trône et qu'ainsi les plaintes dont nous sommes saisis viendront à cesser.
M. Braconier. - Des anomalies semblables à celles qui existent sur la ligne de Dendre-et-Waes se présentent dans plusieurs localités.
II y a des tarifs spéciaux, des traités spéciaux qui donnent lieu à des anomalies sans nombre ; certains transports coûtent plus cher à de petites (page 271) distances qu'à de grandes distances ; cela provient de ce que les tarifs ont été faits successivement et n'ont pas été jusqu'ici coordonnés.
Le discours du Trône annonçait un remède spécial à cet état de choses ; il faisait prévoir que l'on engloberait dans un tarif général tous les tarifs spéciaux.
D'après ce qui est arrivé à ma connaissance, le projet est prêt. Je demanderai s'il y aurait inconvénient à le faire paraître le plus tôt possible. Car l'industrie fait entendre de vives réclamations. Ainsi les transports d'Anvers pour Huy coûtent moins cher que les transports d'Anvers pour Jemeppe, tandis que pour Huy il y a quelque chose comme cinq lieues de parcours de plus. Vous comprenez que les industriels ainsi lésés réclament très vivement.
J'insiste pour que le nouveau tarif paraisse le plus tôt possible.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen. - Je reconnais le fondement des griefs généraux articulés par l'honorable M. Braconier ainsi que du grief spécial articulé par l'honorable M. de Naeyer. Je n'ai rien à retrancher à l'énoncé de ce principe que, sur le réseau de l'Etat, une localité plus éloignée ne peut pas être taxée moins qu'une localité plus rapprochée. Aussi bien qu'en 1862, je regarde l'état de choses actuel comme étant, sous ce rapport, contraire au bon sens et à la justice.
En ce qui concerne, en particulier, la ligne de Dendre-et-Waes, j'ai offert à la compagnie de redresser les vices dont le tarif de cette ligne était entaché, par une réforme isolée. La compagnie, comme l'a parfaitement dit l'honorable M. de Naeyer, devait consentir à la réforme ; je ne pouvais l'opérer sans son assentiment. Cet assentiment, elle l'a refusé.
En présence du refus de la compagnie, il ne restait que doux voies pour amener la solution de la difficulté.
La première, c'était de dénoncer le tarif spécial applicable à quelques-unes des localités de la ligne. C'était un moyen extrême, c'était un moyen qui devait tourner contre une série de localités plus ou moins intéressantes, jusqu'alors en possession des faveurs qu'il s'agissait d'étendre à toutes. II y avait un autre moyen, c'était l'élaboration plus lente, plus difficile d'une réforme générale des tarifs de l'Etat, dans laquelle le tarif spécial de la ligne de Dendre-et-Waes aurait été absorbé.
Cette réforme, messieurs, a été promise par le discours du Trône. J'ai la satisfaction de pouvoir annoncer à la Chambre que le projet auquel il a été fait allusion dans le discours du Trône est complètement arrêté à l'heure qu'il est, et que je puis, du jour au lendemain, si je le trouve bon, publier le nouveau tarif.
Ce nouveau tarif est conçu sur des bases très larges, mais il n'obvie certainement pas à tous les vices qui ont été articulés dans nos tarifs actuels. Si l'on voulait, messieurs, faire une liquidation générale et mettre un terme à tous les griefs qui ont été articulés, il faudrait avoir une marge que je puis évaluer sans exagération à une somme de 3 à 4 millions de francs.
Je pose en fait que personne ne voudrait entreprendre une réforme de ce genre ; il faut nécessairement marcher progressivement, procéder par étapes. Eh bien, je suis prêt à fournir une très bonne étape, mais un scrupule m'arrête : Je me demande si, en ma qualité de ministre démissionnaire, il m'est permis encore de donner suite à une mesure de ce genre.
- Plusieurs voix. - Oui ! oui !
M. Coomans. - Il n'est jamais inopportun de faire une bonne chose.
M. Vermeireµ. - Je viens appuyer les considérations qui ont été présentées et par les pétitionnaires et par l'honorable rapporteur de la commission et par les honorables membres qui ont pris la parole sur cet objet.
En ce qui concerne les transports par chemins de fer, je crois qu'on devrait s'attacher à établir des tarifs uniformes, applicables aux mêmes distances et sur toutes les lignes de chemins de fer. Il a été entendu, en effet, qu'on ne peut pas transporter sur une ligne à des prix plus élevés que sur d'autres lignes.
Je voudrais donc, comme je l'ai dit dans beaucoup d'autres circonstances, que le tarif le plus bas possible fût appliqué dans des conditions égales d'exploitation à toutes les distances ; que, par exemple, quand on fait une concession pour un transport à une distance de 10 à 13 lieues, cette même concession soit accordée sur toutes les lignes indistinctement.
Quant au chemin de fer de Dendre et Waes plus particulièrement, je ne me rappelle pas précisément les conditions auxquelles les tarifs doivent y être appliqués.
Mais, si mes souvenirs sont exacts, je pense que le gouvernement a le droit d'exploiter cette ligne aux mêmes conditions qu'il exploite les autres lignes des chemins de fer de l'Etat. Or, s'il a ce pouvoir, pourquoi n'y n'appliquerait-il pas les tarifs en vigueur sur les autres parties du railway national ?
Conçoit-on, en effet, que pour un transport de Charleroi à Louvain, par exemple, soit une distance de 25 lieues, on fasse payer 1 fr. 50 c. par tonne (c'est un chiffre purement hypothétique que je pose), tandis que pour un transport fait dans une autre direction, également à la même distance de 25 lieues, on demande 2 francs ? Il faut convenir que cela n'est ni juste ni rationnel.
N'oublions pas, en effet, messieurs, que le chemin de fer, construit aux frais de tous, doit, par conséquent, dans des conditions égales, être exploité à l'avantage de tous. Ne perdons jamais de vue que c'est là le principe fondamental de la création de nos chemins de fer et que c'est aussi d'après ce principe d'équité et de justice distributive qu'ils doivent être exploités.
Avant de terminer, je dois déclarer que M. le ministre des travaux publics a fait, par l'application de ce principe, un pas marqué dans la voie du progrès. Il a considérablement amélioré nos tarifs et, s'ils ne sont pas encore tout à fait irréprochables, il suffira de quelques nouvelles améliorations pour les rendre aussi parfaits que possible.
M. le ministre des travaux publies vient de parler d'un document ayant pour objet une nouvelle réforme de nos tarifs ; et il a exprimé la pensée que, dans la position actuelle du ministère, il ne se croyait pas autorisé à donner suite à ce travail.
Je pense, messieurs, que ce scrupule ne doit pas arrêter M. le ministre : il s'agit, en effet, d'une question d'intérêt général, d'une mesure destinée à exercer une influence heureuse sur l'exploitation de nos chemins de fer.
Dès lors, je ne vois pas quel inconvénient il peut y avoir à donner suite à la mesure annoncée ; il me semble, au contraire, qu'il conviendrait de la mettre en vigueur le plus tôt possible et j'engage vivement M. le ministre des travaux publics à ne pas s'arrêter plus longtemps au scrupule qui lui a fait différer la publication de la réforme en question.
M. de Naeyer. - Si je prends de nouveau la parole, c'est pour insister autant qu'il est en mon pouvoir, et je crois que c'est avec l'assentiment de la grande majorité de la Chambre, pour que M. le ministre ne s'arrête pas devant le scrupule dont il nous a parlé et qui évidemment ne doit pas l'empêcher de mettre en vigueur la réforme qu'il a annoncée. Il s'agit d'une réforme purement administrative, et qui est incontestablement dans les vœux du pays. Cette réforme est le résultat des études de l'honorable ministre, il est de toute justice que son nom y soit attaché. Je suis convaincu que la grande majorité de la Chambre pour ne pas dire l'unanimité de la Chambre, désire vivement que le projet de réduction dont il s'agit reçoive le plus tôt possible son exécution et soit revêtu de la sanction voulue. Le pays le verra avec plaisir dans le Moniteur.
- Les conclusions du rapport sont mises aux voix et adoptées.
M. Wasseige (pour une motion d’ordre). - La pétition analysée sous le n°3 du feuilleton, émane d'électeurs de Gosselies qui demandent l'annulation de la décision de la députation permanente du Hainaut qui a validé les élections communales de cette localité.
L'honorable M. Dechamps, qui a demandé un prompt rapport sur cette pétition, a dû quitter la séance tout à l'heure et m'a demandé de prier la Chambre de vouloir bien remettre la discussion de cette pétition à un prochain feuilleton, si elle n'y voyait pas d'inconvénient.
M. Pirmez. - C'est la seconde fois, je pense, que cette pétition vient à l'ordre du jour ; il me semble qu'il serait temps d'en finir de cette misérable affaire. (Interruption.)
L'honorable M. Wasseige connaît parfaitement l'objet de la pétition puisque c'est lui qui a demandé un prompt rapport.
M. Wasseige. - Non, c'est M. Dechamps.
M. Pirmez. - Pardon, c'est M. Wasseige ; et l'honorable M. Dechamps l'a appuyé, il doit donc être préparé à la discussion.
M. Wasseige. - Les souvenirs de l'honorable M. Pirmez le trompent complètement, c'est l'honorable M. Dechamps, et non pas moi, qui a demandé un prompt rapport.
Je ne connais rien de cette affaire et c'est la première fois qu'elle se présente à la discussion.
Il en a été question quand la pétition est parvenue à la Chambre et a été analysée, mais il y a eu alors un simple échange d'observations sur le point de savoir si la pétition ferait l'objet d'un prompt rapport ou d'un rapport ordinaire. Maintenant, l'honorable M. Dechamps ayant demandé un ajournement, (page 272) je ne pense pas qu'on puisse le lui refuser. Ce serait certes la première fois qu'on agirait de la sorte,
M. Pirmez. - Je n'insiste pas.
- Le rapport sur cette pétition est renvoyé à une autre séance.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de s'Heeren-Elderen, le 30 novembre 1863, le conseil communal de s'Heeren-Elderen demande la construction d'une route pavée ou empierrée de Tongres à Mopertingen.
Depuis que le feuilleton est imprimé, une autre pétition dans le même sens et dans les mêmes termes ,demandant la même chose, a été adressée à la Chambre par le conseil communal de Membruggen ; je demande la permission de la comprendre dans le même rapport.
La commission propose le renvoi des deux pétitions à M. le ministre des travaux publics.
M. de Renesse. - Je viens appuyer les demandes des communes de 's Heeren-EIdcren et de Membruggen (Limbourg) qui réclament la construction d'une route de Tongres à Mopertingen, où elle se relierait à celle de Hasselt vers Maestricht.
Déjà, depuis assez longtemps, cette voie plus directe de la ville de Tongres, notamment vers les cantons de Bilsen et de Mechelen, appartenant à l'arrondissement administratif et judiciaire de Tongres, a été demandée par des communes de cette partie du Limbourg ; aussi, le conseil provincial du Limbourg, dans sa session de 1861, doit avoir attiré l'attention du gouvernement sur cette route ; elle mettrait en relation plus directe une grande partie des communes des cantons de Bilsen et de Mechelen avec les marchés si importants des villes de Tongres et de Liège.
Cette route comblerait une certaine lacune qui existe actuellement entre les routes de l'Etat de Tongres et de Maestricht, cl de Hasselt vers Maestricht ; elle traverserait une contrée riche par ses produits agricoles de toute nature.
J'ai donc l'honneur d'appuyer le renvoi de ces requêtes à M. le ministre des travaux publics, en les recommandant à sa bienveillante attention.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Gérouville, le 3 décembre 1863, l'administration communale de Gérouville demande qu'il soit établi dans cette commune un bureau de distribution des portes.
Même demande des commerçants, des propriétaires et autres habitants de Gérouville.
Il est sans doute utile de faciliter les correspondances, cependant la Chambre ne peut juger par elle-même de l'opportunité, de la nécessité de l'établissement du bureau des postes demandé, elle ne peut que conclure avec la commission au renvoi au ministre des travaux publics qui examinera s'il y a lieu d'accéder à la demande des pétitionnaires.
Le conseil provincial a appuyé la pétition.
La commission conclut donc au renvoi au ministre des travaux publics.
M. Coomans. - Je saisirai cette occasion pour demander à M. le ministre des travaux publics, si défense a été faite aux facteurs ruraux de recevoir des lettres dans le parcours qu'ils ont à faire ; j'aime à croire que sa réponse sera négative, parce que les facteurs ruraux sont des bureaux de poste ambulants, dans lesquels on peut avoir une confiance entière ou du moins une confiance aussi grande que dans les bornes des villes.
Dans tous les cas je demande que l'autorisation qui leur a été donnée jusqu'à présent de recevoir des lettres dans leur passage dans les communes, soit maintenue, car je sais qu'elle existe, que dans plusieurs localités les facteurs reçoivent des lettres sans observation ; mais je sais aussi que, dans deux localités au moins, les directeurs se sont permis de défendre aux facteurs de recevoir des lettres sur leur route.
Il est certain que quand les facteurs pourront faire les commissions postales, les réclamations pour obtenir la constitution de nouveaux bureaux de poste seront moins nombreuses ; ce sera un bénéfice réel pour le trésor, et il y aura convenance pour les contribuables.
II y aura encore des bureaux à créer, mais comme nous jouissons des timbres-poste et d'un service de facteurs ruraux assez convenablement organisé, tout le monde serait satisfait si l'on prenait égard à la recommandation que je prends la liberté de faire à M. le ministre des travaux publics.
M. de Theuxµ. - Je conçois que des facteurs en ville ne reçoivent pas les lettres qu'on voudrait leur remettre, ce serait un grand embarras. Mais à la campagne, il est naturel qu'on les autorise, comme par le passé, à recevoir des lettres ; sans cela, on serait exposé à devoir faire trois quarts de lieue, une lieue même, pour porter une lettre ; le facteur pourrait être passé, la boîte ne serait plus levée que le lendemain, et il en résulterait un retard considérable ; on devrait alors recourir à des messagers, qui ne présentent pas les mêmes garanties que les facteurs.
J'espère que M. le ministre, comme par le passé, autorisera les facteurs ruraux à recevoir des lettres sur leur route ; sans cela on serait obligé de créer de nouveaux bureaux, ce qui occasionnerait de nouvelles dépenses sans faire disparaître le danger du retard auquel seraient exposées les correspondances.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen. - Messieurs, il n'est pas à ma connaissance que la défense dont a parlé l'honorable M. Coomans ait été faite ; je ne puis pas dire cependant d'une manière absolue qu'elle n'a pas été faite, parce qu'il s'agit d'une mesure administrative qui peut avoir été prise par un directeur agissant dans le cercle de ses attributions. Mais si elle l'a été, c'est à mon insu. Je pense comme les honorables préopinants qu'il est convenable, dans l'intérêt du public, de permettre aux facteurs ruraux de recueillir des lettres dans leur tournée, que si on leur confie des valeurs, il va de soi que c'est aux risques et périls de l'expéditeur. Je m'informerai si la mesure critiquée a été prise en réalité, et, si oui, je la ferai redresser.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
(page 273) M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Jurbise, le 19 novembre 1863, l'administration communale de Jurbise réclame l'intervention de la Chambre pour faire rétablir la sonnerie du quart d'heure qui précède la délivrance des coupons aux stations du chemin de fer et celle annonçant le départ des convois.
Messieurs, votre commission en examinant cette pétition a eu la conviction qu'il avait été satisfa.t en quelque sorte à la demande des pétitionnaires par les mesures que M. le ministre des travaux publics a prises depuis.
Cependant comme il fallait faire quelque chose de la pétition et que les pétitionnaires demandent autre chose que ce qui existe aujourd'hui, votre commission se borne à vous proposer le renvoi pur et simple à M. le ministre des travaux publics.
- Ces conclusions sont adoptées.
(page 272) MpVµ. - Messieurs, on distribuera ce soir le rapport sur le projet de loi concernant les substitutions en matière de milice.
Conformément à ce qui a été décidé, cet objet figurera en tête de l'ordre du jour de demain.
Nous avons à nous occuper maintenant du feuilleton de pétitions.
M. Crombez, rapporteur. - Messieurs, il y a très longtemps déjà que ces pétitions sont faites.
Je vous prie de m'excuser de ce retard, qui est tout à fait involontaire.
Dans ce moment, je n'ai pas présent à la mémoire tout ce qui s'est passé.
M. Crombez, rapporteur. - Un certain nombre d'habitants de Frasnes-lez-Buissenal ont adressé à la Chambre une réclamation contre certaines irrégularités dont ils accusent l'administration de leur commune, à propos de la formation et du recouvrement des rôles pour l'entretien des chemins vicinaux.
Les pétitionnaires attribuent à ces irrégularités le mauvais état des chemins dans la commune de Frasnes.
Des réclamations ayant le même objet ont été adressées à l'autorité provinciale et au département de l'intérieur. On y alléguait notamment que, depuis quatre ans, les prestations pour l'entretien des chemins étaient exigées sans rôles approuvés, sans comptabilité pour les recettes, ni pour les dépenses, en un mot sans base de répartition.
L'enquête administrative qui a eu lieu a démontré l'inexactitude de ces assertions. Toutes les autorités consultées, les agents voyers, le commissaire d'arrondissement et la députation permanente du Hainaut, ont été unanimement d'avis qu'il n'y avait rien de fondé dans la réclamation des habitants de Frasnes. Par une lettre du 8 août 1862, les pétitionnaires ont été informés du résultat de l'instruction à laquelle leurs plaintes ont été soumises.
Comme il s'agit ici d'un intérêt communal, sur lequel il est peut-être utile d'exercer une surveillance spéciale, votre commission a l'honneur, messieurs, de vous proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Adopté.
M. Crombez, rapporteur. - Le sieur Florent De Clercq, qui a adressé une pétition à la Chambre le 31 janvier 1863, à l'effet d'obtenir une pension, est un ancien préposé des douanes, révoqué de ses fonctions par arrêté du 21 mars 1861.
Cet employé comptait un assez grand nombre d'annces.de service, mais sa conduite a donné lieu à des plaintes continuelles. Malgré les fréquentes menaces de révocation dont il a été l'objet, il n'a tenu aucun compte de ces avertissements.
Au moment de sa révocation, le sieur De Clercq ne se trouvait pas dans les conditions légales pour obtenir une pension ; cependant comme nous n'avons, à cet égard, aucune certitude, nous vous proposons, messieurs, de renvoyer cette pétition à M. le ministre des finances.
- Adopté.
M. Crombez, rapporteur. - Le sieur Christophe prie la Chambre de lui procurer une place de garde particulier dans une propriété de l’Etat ou tout autre emploi de ce genre.
La Chambre n'étant pas chargée de la nomination des fonctionnaires (page 273) de l’Etat, votre commission, messieurs, vous propose l'ordre du jour sur cette pétition.
- Adopté.
M. Crombez, rapporteur. - Le sieur Tyteca, ancien officier de gendarmerie, et le sieur Dryançon, ancien gendarme, demandent une augmentation de pension.
Ils rappellent les services qu'ils ont rendus et la modicité des pensions qui leur ont été accordées. Tout en éprouvant une grande sympathie pour les militaires dont la position n'est pas heureuse, il est impossible, cependant, d'accueillir leur réclamation. En effet, on ne peut augmenter les pensions qu'en vertu d'une loi ; pareille mesure ne sera jamais prise individuellement.
Conformément aux précédents adoptés par la Chambre, votre commission a l'honneur, messieurs, de vous proposer l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Crombez, rapporteur. - Le sieur Wattel s'adresse à la Chambre afin d'obtenir un congé en faveur de son neveu, G-.stavc Wattel, milicien de la levée de 1860.
Conformément aux précédents suivis à l'égard des demandes de cette nature, la commission des pétitions a l'honneur, messieurs, de vous proposer l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Crombez, rapporteur. - Par deux pétitions en date des 22 décembre 1862 et 29 janvier 1863, les sieurs Pire et Pollet, détenus au dépôt de mendicité de Mons, s'adressent à la Chambre afin d'obtenir leur élargissement.
Le pouvoir de libérer des reclus condamnés pour mendicité et vagabondage est confié aux gouverneurs, aux termes de l'article 4 de la loi du 3 avril 1848 et de l'article 9 de l'arrêté royal du 15 juillet 1849.
Quant aux reclus volontaires, c'est la députation du conseil de la province à laquelle les reclus appartiennent, qui autorise ou refuse la sortie. (Article 14 de l'arrêté précité.)
La Chambre n'a donc pas à intervenir pour qu'il soit fait droit aux demandes des pétitionnaires, sur lesquels, au surplus, il a été donné des renseignements les plus défavorables.
En conséquence, messieurs, votre commission a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Crombez, rapporteur. - Par pétition datée de Mons, le 20 juin 1862, le sieur Amand Colson, économe directeur de l'hôpital civil à Mons, ancien directeur de boulangerie militaire, se plaint des mesures prises à son égard par le département de la guerre et réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une pension.
Déjà la Chambre a été saisie des réclamations du sieur Colson.
Dans la séance du 14 février 1862, elle a prononcé l'ordre du jour sur quatre pétitions qu'il lui avait adressées.
Dans la séance du 16 mai suivant, elle a encore prononcé l'ordre du jour sur deux pétitions ayant le même objet.
Ces décisions n'ont pas découragé le pétitionnaire, et il vient de nouveau nous exposer ses griefs contre le département de la guerre.
En fait, il prétend :
1° Qu'il était premier lieutenant dans l'armée.
2° Qu'il a été nommé ensuite directeur d'une boulangerie militaire, avec conservation de son grade dans l'armée.
3° Que par suite d'un démêlé administratif, il a été traduit devant la haute cour militaire qui lui a infligé une punition disciplinaire dont le Roi lui a fait grâce.
4° Qu'à l'issue de ce procès en 1853, il a été révoqué de ses fonctions et admis par arrêté royal à faire valoir ses droits à la pension.
5° Que de 1853 à 1857, le département de la guerre l'a laissé sans pension et sans solde.
6° Qu'en 1857, au lieu d'être pensionné, il a été replacé dans l'armée, malgré ses protestations.
Il réclame donc le bénéfice de l'arrêté royal qui l'a admis à faire valoir ses droits à la pension ; arrêté, dit-il, qui d'après les précédents admis dans l'affaire Hayez, réglait définitivement sa position et ne pouvait plus être rapporté.
Dans l'impossibilité où la commission s'est trouvée de vérifier les assertions du sieur Colson, et afin de mettre un terme à ses réclamations, si elles ne sont pas fondées, nous vous proposons, messieurs, le renvoi de la pétition à M. le ministre de la guerre avec demande d'explications.
- Adopté.
M. de Smedt. - Messieurs, j'étais, je le regrette, sorti, au moment où a eu lieu le vote sur le budget de la guerre. Je désire que l’on sache comment je me serais prononcé. J'aurais voté contre le budget de la guerre.
- La séance est levée à 4 heures et demie.