Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Documentation Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 10 février 1863

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1862-1863)

(page 342) Présidence de (M. E. Vandenpeereboom, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Thienpont, secrétaire., procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. de Boe, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Thienpont, secrétaire, présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Le sieur Vande Zande se plaint de l'abus des renseignements statistiques demandés aux communes et propose d'inviter les administrations supérieures à borner leurs demandes aux renseignements qu'ils ne peuvent trouver dans les documents en leur possession. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des habitants de Chiny prient la Chambre de rejeter la proposition tendante au rétablissement da commissariat de Virton. »

- Même renvoi.


« Le sieur Triquoy demande à recouvrer le droit d'électeur dont il se trouve déchu par suite d'une condamnation judiciaire. »

- Même renvoi.


« Le sieur Van Tiberghem, ancien volontaire de 1830, demande une récompense. »

- Même renvoi.


« Le sieur Vananderoy, ancien volontaire de 1830, demande la médaille commémorative. »

- Même renvoi.


« Le sieur Renard, ancien soldat, atteint de cécité par suite d'une ophtalmie contractée au service, demande une pension. »

- Même renvoi.


« Le sieur Joly, ancien sous-officier d'artillerie à cheval, demande une récompense pour la part qu'il a prise aux combats de 1830 à 1834. »

- Même renvoi.


« Le sieur Winandy, secrétaire du parquet à Verviers, demande une augmentation de traitement. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de la justice.


« Les messagers du parquet et du greffe de la Cour de cassation demandent que leur traitement soit porté à 1,200 fr. »

- Même décision


« Le sieur Sterpenich présente des observations sur l'augmentation de traitement proposée par la section centrale en faveur des secrétaires des parquets et prie la Chambre de voter un chiffre plus élevé. »

« Mêmes observations des commis pu parquet de la Cour d'appel de Liége/ »

- Même décision.


« Le sieur Cailliau demande que les traitements des secrétaires du parquet soient portés, sinon aux taux des traitements des commis-greffiers, du moins à un chiffre proportionnel. »

- Même décision.


« Le sieur Constant-Eugène Marainville, négociant à Bruxelles, né à Paris, demande la naturalisation. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Un grand nombre d'anciens combattants de 1830 demandent la croix de Fer et déclarent renoncer au bénéfice de la pension attachée à cette croix. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le bourgmestre de Louvain fait connaître que d'après les renseignements pris par la police locale, le prétendu Bulot, se disant particulier et domicilié à Louvain, rue des Moines, n.°35, qui s'est plaint à la Chambre d'atteintes aux principes de l'égalité des citoyens devant la loi et de la protection accordée aux étrangers, n'existe point dans cette ville et qu'il n'y a pas, rue des Moines, une maison du n°35. »

- Même renvoi.


« M. d'Hoffschmidt, obligé de s'absenter, demande un congé. »

- Accordé.

Proposition de loi relative à la compétence territoriale du commissaire d’arrondissement de Bruxelles

Lecture

M. le président. - kes sections ont autorisé la lecture de la proposition suivante :

« Article unique. Les attributions de commissaires d'arrondissement de Bruxelles ne s'étendent pas sur les communes dont les noms suivent : 1° Anderlecht ; 2° Ixelles ;

3° Molenbeek-Sa int-Jean ;

4°. Laeken ;

5° Saint-Gilles ;

6° Saint-Josse-ten-Noode ;

7° Schaerbeek.

« (Signé) GuillerV. »

Quand M. Guillery désire t-il développer cette proposition ?

M. Guillery. - Si la Chambre le permet, je 1a développerai ftmnéi diatement en trois mots'.

M. le président.—S'il n'y a pas d'opposition, la proposition sera développée immédiatement..

La parole est à M. Guillery.

M. Guillery. - Messieurs, voici comment s'exprimait M. Liedts, gouverneur du Brabant, dans son discours d'ouverture de la session au Conseil provincial de 1860 :

« Personne, dit M. Liedts, ne sait mieux que moi combien est utile l'action incessante des commissaires d'arrondissement sur l'administration des petites communes, où l'on ne trouve pas toujours des administrateurs capables.

« Mais ce que la raison ne saurait approuver, c'est que des communes aussi populeuses que les faubourgs de la capitale soient soumises à cette tutelle, non parce qu'elles ne renferment pas dans leur sein assez, de ca- v pacités et de lumières, mais uniquement parce que dans des siècles passés le souverain ne les a pas élevées au rang de villes. »

Voilà, messieurs, tout l'exposé des motifs de la proposition que'j'ai eu 1 honneur de déposer.

Les communes dont il s'agit ont, respectivement, la population suivante : '

t Anderlecht, 9,212 habitants,

t Ixelles, 2-2,129 —

« Molenbeek-Saint-Jean, 21,313 — « Laeken, ' 6,204 —

« Saint-Gilles, 6,971 —

c Saint-Josse-ten-Noode, 19,879 — t Schaerbeek, 14,355 —.

Je crois, messieurs, que ces motifs sont suffisants pour justifier ma proposition. ~ «

M. le président. - La discussion est ouverte sur la prise en considération.

M. Muller. - Messieurs, en présence de la proposition de l'honorable M. Guillery, j'inviterai le gouvernement à ne pas larder à soumettre à la Chtmbre un projet de loi qui ait un caractère général. Sans cela nous allons tous arriver avec de petits projets de loi spéciaux. C'est ainsi que pour ma part je pourrais citer, parmi plusieurs grandes communes de ma province, celle de Seraing, dont la population est de 21,000 âmes, et qui, de même que les faubourgs de la capitale, ne devrait plus être astreinte à passer par l'intermédiaire du commissariat d'arrondissement, lorsqu'elle s'adresse au gouverneur où à la députation permanente.

J'approuve le fond de la proposition de l'honorable M. Guillery, elle est parfaitement justifiée, pour les localités qu'elle concerne ; mais j'invite instamm.ent le gouvernement à nous soumettre un projet de loi dont l'application soit générale, qui fasse justice à toutes les communes dont la situation est analogue à cède des communes dont il s'agit dans la proposition de M. Guillery.

M. de Naeyer. - Messieurs, je voterai la prise en considération de la proposition de M. Guillery, mais dans le sens des observations très judicieuses que vient de présenter l'honorable M. Muller.

Cette proposition est évidemment incomplète, et si elle devait être votée, telle qu'elle nous est présentée, il en résulterait de très graves inconvénients ; nous aurions une nouvelle catégorie de communes. Nous avons déjà aujourd'hui des communes qui sont qualifiées villes ; nous avons des communes rurales, et nous aurions, en outre, des communes rurales assimilées aux ville.

page 343

Cela n'est plus en harmonie avec l'esprit de nos institutions. Nous avons consacré dans notre Constitution l'égalité, devant la loi, de tous les Belges se trouvant dans les mêmes conditions ; eh bien, il faut que nous consacrions aussi l'égalité des communes belges ; il faut qu'elles jouisseut des mêmes droits, lorsqu'elles se trouvent dans les mêmes conditions.

La distinction qui existe aujourd'hui doit disparaître ; elle, remonte à une époque qui était dominée par des idées tout autres que celles qui prévalent aujourd'hui ; elle remonte à une époque où les communes rurales n'étaient rien et où les vides éta-ent quel,ue chose. Aujourd'hui le paysan est l'égal du bouigeois et du noble. Il faut que cette vérité passe dans toutes nos lois

M. Rodenbach. - Je pense avec l'honorable M. de Naeyer qu'il y a lieu de faire disparaître la distinction qui existe, c'est un abus qui n'est plus de notre âge.

J'appuie donc la proposition de l'honorable M. Guillery ; mais tout en l'appuyant, je demanderai que le gouvernement veuille examiner la grave question de la réunion des faubourgs à la capitale.

C'est ainsi que Londres s'est successivement agrandie, au point de renfermer aujourd'hui une population de 3 millions d'habitants. La ville, de Paris, qui suit le même exemple, possède actuellement 1,300,000 ha-biants. La ville de Bruxelles a aujourd'hui1 une population de près de 170,000 habitants ; les faubourgs ont ensemble 70,000 à 80,000, âmes : ce qui fait pour l'agglomération bruxelloise une population de près de 300,000 âmes. Cette question doit être examinée en même temps que celle qui nous est soumise ; il y a lieu de voir si, dans le cas de l'incorporation tota'e, il faudra nommer plusieurs bourgmestres à Bruxelles. J'appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur cette grave question, et je pense qu'il en fera l'objet d'un sérieux examen. '

M. Vander Donckt. - Messieurs, je ne combattrai pas pour le moment la proposition de l'honorable M. Guillery ; mais que demande au fond l'honorable membre ? Il réclame un privilège pour quelques-communes voisines de la capitale en laissant toutes les autres dans l'état où elles sont.

Si l'on voulait tenir compte de toutes les anomalies qui existent dans le classification des communes, il y aurait lieu à étudier une mesure d'ensemble. Il serait beaucoup plus sage d'attendre que le gouvernement ai1 examiné cette question ; alors, les communes dont il s'agit dans la proposition de l'honorable. M. Guillery rentreraient sans privilège dans la mesure générale.

Je dois cependant signaler une anomalie, en ce qui concerne l'importante commune de Cruyshautem. Cette commune, d'une population de plus de 6,000 habitants, fait pu-tie à la fois de l'arrondissement judiciaire de Gand et de l'arrondissement administratif d'Audenarde.

Vous comprenez, messieurs, que c'est là une anomalie qui ne peut p :.s être maintenue.

Il faut de deux choses l'une : ou bien que cette commune soit réunie à l'arrondissement de Gand, comme elle y appartient judiciairement, ou bien qu'elle soit judiciairement réunie à Audenardcv

Mais je crois qu'il serait beaucoup plus sage d'aba ; donner l'examen de cette question au gouvernement. M. le ministre de l'inférieur n'est pas contraire aux idées qui se manifestent ; et, jusqu'à ce qu'il nous ait soumis des proportions, ne préjugeons rien. N'accordons pas surtout un priyilége à quelques communes des environs de Bruxelles, tandis qu'on laisserait les autres (Lans l'état où elles sont.

M. Guillery. - Si j'ai limité ma proposition aux communes voisines de Bruxelles, ce n'est pasqieles autres communes du pays m'inspirent moins de sollicitude : mais, d'après les déclarations de M. le ministre de l'intérieur, dans la séance de vendredi dernier, il m'a paru qu'il y avait, de sa part, une certa :ne hésitation en ce qui concerne la réusion de l'art. 152 de la loi provinciale. Adoptera-t-on le chiffre de 5,000 âmes pour les communes rurales, comme on l'a faitpour les villes ; prendra-t-on un chiffre plus élevé ? M. le ministre de l'intérieur a déclaré qu'à c >i égard, il n'est pas encore fixé.

Je n'ai donc pas voulu soulever une question q ii aurait pu entraîner de trop longs débats. Je me suis borné à soumettre à la Chambre une proposition >|ui a été examinée depuis longtemps, sur- laquelle "tous les hommes d'expérience se sont prononcés, sur laque le il n'y a qu'un avis. Il m'a paru que, sur ce pou t, il ne pourrait y avoir lieu qu'à un appel nominal ; que la Chambre, sans perdre de temps, aurait pu ainsi consacrer un progrès et non pas cons'ituerunprivil'ge, comme le croit l'ho-

L'honorable M. Vander Donckt, car il ne sVgît que de faire cesser une injustice, et de ce qu'on ne peut jas y mettre immédiatement un terme pour toutes les communes qui en souffrent, ce n'est pas une raison pour ne pas la faice cesser, dès à présent.rour quelques-unes.

Du reste, si les honorables membres qui désireraient une mesure plus générale veulent voir triompher leurs idées, il suffira que, par amendement présenté lorsque ma proposition de loi sera soumise aux délibérations de la Chambre, ils demandant que cette proposition soit étendue à toutes les communes de 5,000 ou de 10,000 âmes, suivant le chiffre que l'on voudra adopter.

Ce que j'ai voulu, messieurs, c'est uniquement vous soumettre une proposition dont la discussion ne souffrît aucun retard et que la Chambre pût voter immédiatement.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). -J'ai fait connaître, il y a peu de jours, que la question qui nous occupa et à l'étude avec d'autres déjà résoldes en partie. Dans la présente session j'espère pouvoir présenter encore d'autres mesures de simplification et de décentralisation. Mais pour ce qui concerne ce qu'on a appelé l'émancipation des communes, je demande à pouvoir en continuer l'examen, et j'espère le terminer as«ez promptement pour présenter, pendant la se ;sion actuelle, un projet d'ensemble appuyé de tous les documents et de toutes les pièces propres à justifier la résolution du gouvernement.

Cette question, comme beaucoup d'autres, messieurs, semble extrêmement simple au premier abord ; mais quand on l'examine de près, on découvre une foule de détails dont on reconnaît la nécessité de tenir compte. Je demande donc que l'on veuille bien me laisser toute liberté d'action pour l'examen de cette affaire ; et je ferai en sorte de pouvoir apporter à la Chambre, le plus prochainement possible, le résultat des mes éludes.

Mais je persiste à croire qu'il faut faire de cette question l'objet d'une mesure d'ensemble, tout en déclarant, toutefois, que je ne m'oppose pas à la prise en considération de la proposition qui vous (st soumise.

La Chambre peut voir par la discussion d'aujourd'hui que le ptoblème n'est pas aussi simple et aussi facile à résoudre qu'on semble le croire.

M. de Naeyer. - D'après les explications que M. le ministre de l'intérieur vient de donner, je me propose de faire ausâ une proposition de loi qu'on pourrait joindre à celle de M. Guillery.

M. de Naeyer. - D'après les explications que M. le ministre de l'intérieur vient de donner, je me propose de faire ausâ une proposition de loi qu'on pourrait joindre à celle de M. Guillery.

Voici en quels termes elle serait conçue : L'art. 132 de la loi provinciale est m»difié dans les termes suivants :

« 11 y a pour chaque arrondissement administratif un commissaire du gouvernement portant le titre de commissaire d'arrondissement ; ses attributions s'étendent sur les communes dont la population est inférieure à 5 mille âmes, pour autant que ces communes ne soient pas chet-lieu "d'arrondissement j

En deux mots la proposition tend à faire disparaître bi distinction entre les villes et les communes rurales, qui n'a plus de raison d'être.

Je demande si la Chambre veut m'autorisera joindre ma proposition à celle de M- Guillery ou si elle exige que cette proposition suive la filière du règlement.

M. le président.—Votre proposition pourra venir comme amendement à celle de M. Guillery quand on viendra à la discussion. Mais à présent on ne pourrait l'y joindre sans qu'elle ait suivi la filière établie par le règlement.

M. de Naeyer. - Je déposerai une proposition de loi.

- La discussion est close.

La proposition est prise en considération.

M. le président. - Comment la Chambre veut-elle que cette proposition soit examinée ?

- Plusieurs voix. - Par les sections.

M. Guillery. - Ne serait-il pas plus simple de renvoyer ma propoition à la section centrale qui a examiné le budget de l'intérieur ? (Interrupiion.)

Je ne comprends pas l'opposition qui se manifeste ; la section centrale du budget de l'intérieur ferait un rapport ; la discussion pourrait avoir lieu prochainement et la solution arriverait plus vite que si la proposition était examinée par les sections. Je ne crois pas que personne ait intérêt à traîner la chose en longueur ; ceux qui voudront la combattre, la c mbattrout, de même que ceux qui voudront l'appuyer, l'appuieront ; la libcité de la Chambre ne sera en aicunc manière gênée.

M. B. Dumortier. - 11 s'agit d'une proposition qui" modifie une loi orga ique qui intéresse tous les districts ; tous les députés, on ne peut pas en renvoyer l'examen à une section centrale de budget, elle c-t rie' nature à être examinée par les sections.

J'engage l'honorable M. Guillery à ne pas insister. Si sa proposition ne (page 314) doit s'appliquer qu'à un seul canton des environs de Bruxelles, il sera en minorité, tandis que si elle comprend toutes les localités du pays qui sont dans une position analogue à celles qu'il a en vue, il obtiendra la majorité. Il est donc important que la proposition soit renvoyée à l'examen des sections.

M. Muller. - J'avais demandé la parole pour présenter la même observation que M. Dumortier. J'ajouterai que dans les sections chacun de nous pourra faire connaître les localités qui ont droit, éventuelemenf, à être comprises dans la proposition de M. Guillery pour autant que le gouvernement ne soumette pas à la Chambre une loi générale et d'ensemble.

M. Guillery. - Je n'insiste pas, mais je demande que dès jeudi la proposition soit soumise aux sections

— La Chambre consultée renvoie la proposition à l'examen des sections.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1863

Discussion du tableau des crédits

Chapitre XII. Voirie vicinale et hygiène publique

Discussion générale

M. de Renesse. - Depuis quelque temps, la Chambre a été saisie d'assez nombreuses pétitions des communes des provinces de Liège et de Limbourg, demandant qu'un crédit spécial soit porté au budget de l'intérieur, pour subsidier les travaux d'entretien de la voirie vicinale et afin que le gouvernement veuille organiser une surveillance plus spéciale pour cet objet.

Quoique, en général, je ne sois pas partisan de l'augmentation progressive sans nécessité des budgets de l'Etat, dans la crainte de voir, par après, augmenter la charge des contribuables, il est cependant des considérations d'un intérêt plus général où il peut être très utile de recourir à une plus large intervention du gouvernement, lorsque, d'ailleurs, les moyens financiers du pays semblent le permettre.

J'appuierai donc toutes les demandes qui tendent à améliorer la position intellectuelle et morale de nos populations ou qui pourraient faire progresser l'intérêt matériel de nos nombreuses communes.

Sous ce dernier rapport il est incontestable que l'amélioration successive des moyens de communication dans nos campagnes entre elles, ainsi qu'avec les grandes routes et nos nombreux chemins de fer, doit exercer une influence heureuse sur toute l'économie des transactions rurales et commerciales.

Aussi, dans l'intérêt de la bonne viabilité de nos chemins communaux, deux conseils provinciaux, ceux de Liège et de Limbourg, ont cru devoir attirer l'attention toute particulière du gouvernement sur la nécessité d'une intervention plus directe de l'Etat dans l'entretien des chemins vicinaux, surtout dans leur conviction de voir bientôt anéantir des travaux ayant coûté de très grands sacrifices, et dans l'impossibilité où se trouvent beaucoup de nos communes, faute de ressources, de pourvoir à leur entretien.

Depuis 1841, où le premier subside de 100,000 fr. a été porté au budget de l'intérieur, grâce à l'initiative du ministère de 1840, et surtout de l’honorable ministre de l'intérieur, M. Liedts, subside successivement porté à 1 million, des sommes très considérables ont été dépensées pour la voirie vicinale ; et elle est devenue d'une très grande importance pour le pays. D'après le dernier rapport présenté aux Chambres, les travaux de cette voirie ont pris un développement de 13,419,291 mètres courants, soit environ 2,700 lieues de 5,000 mètres.

Ces travaux ont coûté 66,418,000 francs.

En y ajoutant, pour la même période, les dépenses pour l'entretien ordinaire de ces chemins, se montant à 16,337,351 fr., l'on a donc dépensé une somme totale de près de 83 millions de francs ; ce qui fait une dépense annuelle de plus de 4 millions.

Si on y comprend les 3,041,000 mètres de chemins vicinaux pavés ou empierrés, qui existaient en 1841, la longueur totale de nos chemins vicinaux améliorés serait actuellement de 16,000,460 mètres, ou 3,292 lieues de 5,000 mètres.

Il est de toute évidence qu'une grande partie des chemins vicinaux, surtout ceux de grande vicinalité, sont d'une utilité plutôt générale que communale : ce sont les artères vives de nos grandes routes, des affluents très notables de nos si nombreuses voies ferrées, de nos canaux et fleuves ; il y a donc nécessité, et intérêt public à les maintenir toujours en bon état de viabilité ; laisser l'entretien de ces moyens de communications rurales à la charge seule des communes, dont la plupart se sont déjà soumises à des impositions assez lourdes pour la voirie vicinale, c'est vouloir laisser dégrader une grande partie de nos chemins de campagne, réparés à si grands frais. C'est rétrograder au lieu d'avancer, et l'on aura fait de grandes dépenses en pure perte.

En 1860, lorsque la question de la réparation et surtout de l'entretien des chemins vicinaux a été soulevée au conseil provincial de Liège, le conseil charge a sa députation permanente du soin de recueillir tous les renseignements nécessaires, pour la session de 1861.

Le concours de M, l'ingénieur en chef des ponts et chaussées, et de ses agents, fut demandé, afin de réunir les informations les plus exactes sur l'état des grandes communications vicinales, et les moyens de les rétablir dans leur situation primitive.

Il résulte du rapport de cet honorable fonctionnaire, consigné en partie dans la requête adressée, sous la date du 19 décembre 1861, par la députation de Liège à la Chambre des représentants : « Qu'un grand nombre de chemins se trouvent dans une fâcheuse situation. Cet état de choses est dû à la circonstance que les communes intéressées, ou bien ne s'imposent pas les sacrifices nécessaires pour le prévenir, ou bien ne possèdent pas assez de ressources pour faire face aux exigences de ces voies de communication. Mais, ce ne sont pas là les seules raisons qui causent la ruine de celles-ci ; beaucoup d'entre elles, construites avec inintelligence, sans soin et assujetties à un roulage pesant, actif, présentent, sur certains points, une surface concave, au lieu d'un bombement régulier qui permette aux eaux l'écoulement requis.

« D'autres sont rouagées, dégradées, faute d'avoir reçu, en temps utile, les rechargements indispensables, à tel point que la pierraille a entièrement disparu, et que le roulage s'effectua sur les libages, ou sur l'encoffrement.

« Si un prompt et efficace remède n'est pas apporté à cet état de choses, dit le rapport de cet honorable haut fonctionnaire, c'en est fait de la plupart des chemins dont il s'agit, et dans un avenir peu éloigné, ils se trouveront dans la situation déplorable qu'ils accusaient, lorsque, naguère, le gouvernement et la province, par leurs généreux subsides, ont permis aux communes d'exécuter des travaux de nature à faciliter leurs relations avec les différents centres du pays.

« De grands et puissants intérêts vont donc être très prochainement compromis, si l'on ne procède pas, sans retard, aux rechargements, dont l'impérieuse nécessité est reconnue. »

Au conseil provincial du Limbourg la question de l'entretien des routes vicinales fut aussi traitée dans la session de 1861 ; la députation permanente fut chargée de présenter un état de situation des chemins vicinaux, pour la session suivante ; M. Pousset, commissaire voyer de l'arrondissement de Tongres, eut la mission spéciale d'inspecter la voirie vicinale du Limbourg.

Dans son rapport très développé, sous la date du 15 mai 1862, cet intelligent et très zélé fonctionnaire donne le détail par commune de la situation de chaque chemin vicinal.

Il résulte du résumé de ce rapport si complet, « que, d'après une carte dressée en 1841, par M. l'ingénieur en chef, le Limbourg, comptait à cette époque 336 lieues de chemins vicinaux, non compris ceux aboutissant aux abreuvoirs, pâturages, etc. La longueur totale améliorée serait suivant les tableaux statistiques de 561,670 mètres ou 112 lieues de 5,000 mètres ; ce qui fait juste le tiers du relevé de M. l'ingénieur en chef.

« En général, les améliorations des chemins vicinaux ont été mal exécutés, et une grande partie est à refaire. »

« Les défectuosités signalées aux chemins ont principalement pour objet :

« Le tracé irrégulier ;

« Le nivellement défectueux ;

« Le manque de largeur suffisante ;

« L'emploi de mauvais matériaux ;

« Les vices de construction.

D'après cet honorable fonctionnaire, il y aurait, dans le Limbourg, sur une longueur totale de 561,6.70 mètres d'amélioration, une longueur de 400,000 mètres qui doit être revue delà manière suivante ;

« A refaire : 150,000 mètres.

« A rectifier et à élargir : 250,000 ètres

« 400,000 mètres.

« 1° Pour refaire les 150,000 mètres cela coûterait, à raison de 6 fr. 51 c. le mètre, 975,000 francs.

« 2° Pour rectifier et élargir les 250,000 mètres, à 3 fr. le mètre, 750,000 francs.

« Total : 1,725,000 fr. »

Depuis la loi du 10 avril 1841, jusqu'au 31 décembre 1861, les communes du Limbourg ont dépensé une somme de 2,077,109 fr. 35 c. En y ajoutant les subsides de l'Etat et de la province de 1,528,619 r. 27 c., (page 345) en outre un subside de 1860, ainsi que la quote-part de 42 communes, de 53,807 fr., la dépense réelle, faite dans cette province, serait de 3,659,555 fr. 60 c.

D'après le dernier rapport aux Chambres, par le département de l’intérieur, l'Etat, les provinces et les communes sont intervenus, dans la dépense de construction ries chemins vicinaux, d'après la proportion suivante :

L'Etat, pour 22-32 p. c.

Les provinces, pour 17-35 p. c.

Les communes, pour 60-13 p. c.

Les communes ont donc supporté une charge assez lourde, pour l'amélioration de la voirie vicinale, et si, actuellement, les dépenses si considérables de l'entretien des chemins vicinaux doivent être laissées à la charge exclusive des communes, il est probable que ces réparations ou rectifications ne pourront se faire en temps utile ; il est alors à prévoir que nos voies vicinales retourneront, dans un avenir rapproché, dans l'état si désastreux où elles se trouvaient, dans la plupart de nos provinces, avant 1841.

Il me paraît qu'il est d'un intérêt général que le gouvernement veuille faire examiner sérieusement la question de l'entretien des chemins vicinaux améliorés, et s'il n'y a pas réellement nécessité que l'Etat intervienne, pour une certaine part, dans les réparations d'entretien.

S'il fallait, afin de procurer aux communes les ressources nécessaires pour le bon entretien de leurs voies vicinales, établir sur ces chemins des barrières, ce serait entraver la libre circulation, c'est aggraver les frais de transport de ses nombreux produits agricoles, aussi bien que ceux de l'industrie et du commerce ; déjà, l'on se plaint, avec raison, dans nos campagnes, de devoir payer, à chaque demi-lieue, une demi-barrière, sur beaucoup de nos routes vicinales, et si l'on réclame, dans plusieurs de nos provinces, l'abolition des droits de barrières sur nos grandes routes, il est incontestable, que ces nombreuses barrières sur nos chemins vicinaux, sont encore beaucoup plus insupportables, puisqu'on général les grandes routes sont en état de bonne viabilité, tandis qu'il n'en est pas de même de la voirie vicinale, et que les frais de traction y sont plus considérables.

D'après ces diverses considérations, j'ose espérer que le gouvernement voudra faire examiner le plus tôt possible s'il n'y a pas réellement nécessité, dans l'intérêt du maintien de la bonne viabilité de la voirie vicinale, que l'Etat y intervienne, pour une certaine part, surtout pour les. chemins de grande vicinalité, considérés comme affluents très importants de nos nombreuses routes, canaux, voies ferrées, etc.

D'ailleurs, beaucoup de nos cantons sont encore privés de chemins de fer ; ils ont contribué dans toutes les charges extraordinaires, résultant des travaux publics exécutés depuis 1830, sans avoir obtenu eux-mêmes leur juste part ; il est de toute équité de leur tenir compte de leur position tout exceptionnelle, et, en attendant que ces cantons puissent aussi être reliés plus directement à nos voies ferrées, ils ont à faire valoir leurs titres pour l'obtention de subsides, non seulement pour l'amélioration, mais encore pour l'entretien de leurs chemins vicinaux, dont plusieurs doivent être considérés comme des affluents de nos railways.

Si chaque année le chemin de fer de l'Etat procure des excédants de ressources très notables au trésor public, ressources extraordinaires qui s'augmenteront d'année en année, par suite des nombreux nouveaux railways décrétés, et d'autres qui sont encore en instance, ne pourrait-on pas appliquer, chaque année, une certaine partie de ces revenus extraordinaires, pour une intervention plus directe de l'Etat, dans l'entretien, surtout, des routes vicinales, considérées comme de véritables affluents de nos voies ferrées et qui doivent nécessairement contribuer à augmenter les ressources de nos moyens de communication rapides et économiques ; c'est la question que j'ai l'honneur de poser à l'honorable ministre de l'intérieur.

M. De Lexhy. - Les longs développements dans lesquels est entré l'honorable M. de Renesse me dispensent de refaire le discours que j'ai eu l'honneur de prononcer l'année dernière sur ce sujet. A cette époque, l'honorable M. Muller et moi, nous nous sommes efforcés de prouver qu'il y a pour l'Etat intérêt et obligation à contribuer à l'entretien des chemins vicinaux améliorés.

Le fait de la défectuosité de l'entretien de la voirie vicinale est malheureusement incontestable. D'autre part l'urgence de prendre des mesures et de venir en aide aux communes, qui sont souvent dans l'impossibilité de faire face à ces dépenses, constitue un fait aussi incontestable. C'est pourquoi la province de Liége a voté un fonds spécial pour l'entretien de la voirie vicinale,

L'Etat devrait suivre la province dans cette voie féconde.

J'ai surtout insisté sur la nécessité d'adopter des mesures établissant une surveillance spéciale et sérieuse de cet entretien.

On devrait centraliser cette surveillance dans les mains du gouvernement et des provinces, pour assurer le service d'entretien et le mettre en harmonie avec le service si parfait de construction et d'amélioration des chemins vicinaux.

Comme cette discussion ne peut aboutir en ce moment, je me borne à appuyer les arguments de l'honorable M. de Renesse, sur cette question qui intéresse si vivement l'industrie agricole.

M. Vander Donckt. - Messieurs, je regrette beaucoup de ne pouvoir me rallier à l'opinion de l'honorable M. de Renesse, et en effet, messieurs, on sollicite le gouvernement d'intervenir dans les réparations des chemins vicinaux et de grande communication alors qu'il se trouve encore un nombre très considérable de communes qui dans ce moment ne sont pas reliées à une route pavée, alors qu'il y a pour les campagnes encore beaucoup de communes qui sollicitent vivement des subsides de l'Etat pour commencer ou continuer le pavage de chemins destinés à les relier à une route pavée.

Serait-il raisonnable que ceux qui jouissent déjà de routes pavées fussent favorisés de l'intervention du gouvernement pour les réparations de ces routes, alors qu'il y a encore beaucoup de communes qui n'ont pas de routes ?

Laissons d'abord doter de routes les localités qui n'en ont pas et achever les routes commencées. Ce sera alors, et alors seulement que l'on pourra prendre en considération des propositions d'intervention dans l'entretien.

Je ne puis donc me rallier et j'espère que le gouvernement ne se ralliera pas pour le moment à une proposition de cette nature.

M. Tack. - Messieurs, je ne pense pas que l'honorable comte de Renesse ait fait jusqu'à présent une proposition formelle quant à l'intervention de l'Etat dans l'entretien de la voirie vicinale. Je suis d'accord avec l'honorable M. Vander Donckt qu'il faut, avant tout, réserver les subsides du gouvernement pour ceux qui n'ont pas encore de routes mais il n'en est pas moins vrai que les observations de l'honorable comte de Renesse sont très judicieuses et qu'il y a lieu d'en tenir compte.

En effet, messieurs, il n'est que trop bien démontré que beaucoup de nos routes vicinales ne sont pas convenablement entretenues.

Il serait donc à désirer que le gouvernement, par l'intermédiaire du corps des ponts et chaussées, se réservât une surveillance plus active, plus efficace sur l'entretien des routes communales qu'il ne 1 a fait jusqu'à ce jour.

Cela n'est que juste, car enfin le gouvernement est intervenu dans la construction de routes vicinales par de gros subsides.

Il intervient encore constamment ; il fait de grands sacrifices, il a le droit au moins de savoir si les dépenses qu'il s'impose sont utilement faites et portent les fruits qu'elles doivent produire.

Il est exact encore de dire que les travaux de la voirie vicinale se rattachent à, l'intérêt général, que les routes de grande communication surtout font partie de l'ensemble de notre système de communication et que nos chemins vicinaux ont leur influence sur nos grandes routes et sur nos chemins de fer.

Les conseils provinciaux de Liège et du Limbourg se sont occupés de la question, et d'après les rapports des ingénieurs qui ont été chargés de vérifier les plaintes qui leur ont été adressées, il est évident qu'il y a un véritable laisser-aller dans le contrôle exercé sur l'entretien des routes vicinales. Or, il est à désirer que l'on fasse tout ce qui est possible pour maintenir ces routes dans un bon état de viabilité. Car si l'on n'y prend garde, il arrivera que le gouvernement aura fait des sacrifices en pure perte et que de nouvelles charges en résulteront pour les communes.

Je recommande donc vivement les observations de l'honorable comte de Renesse à M. le ministre de l'intérieur.

M. Rodenbach. - Messieurs, la loi sur les chemins vicinaux est une des meilleures que nous ayons votées dans cette enceinte depuis un grand nombre d'années. Avec 1,150,000 fr. nous parvenons à construire pour plus de 4 millions de chemins vicinaux. Cela fait infiniment de bien à l'agriculture et au commerce et a une influence très heureuse sur les produits du chemin de fer.

Mais, ainsi que l'ont très bien dit les honorables MM. Vander Donckt et Tack, On doit commencer par donner des routes aux localités qui n'en ont pas.

A cet égard, j'appellerai l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur un fait. Entre Ypres et Roulers, se trouve une route pavée sur laquelle il existe encore une lacune d'environ 3 kilomètres. Avant de commencer (page 346) de nouvelles routes, on ferait bien, me paraît-il, de terminer celles qui sont en construction. Ce serait là une mesure très utile pour les communes.

Je recommande vivement l'achèvement de la route de Roulers à Plaschendaele et Ypres à M. le ministre de l'intérieur.

En comblant la lacune que je viens de signaler, on rapprochera la ville d'Ypres de la ville de Roulers de près d'une lieue, de 4 kilomètres environ.

Je le répète, avant de commencer de nouvelles routes, l'on doit accorder des subsides pour terminer celles qui sont commencées.

M. de Renesse. - Messieurs, dans le discours que je viens de prononcer, j'ai cru devoir faire ressortir la question si importante de l'entretien des chemins vicinaux, qui a été soulevée en 1860 et 1861 par les conseils provinciaux de Liège et du Limbourg ; l'on y a chargé des fonctionnaires très compétents de faire un rapport spécial sur la situation des chemins vicinaux ; ce rapport constate qu'il est très urgent de porter un remède à la situation si fâcheuse de beaucoup de nos routes vicinales améliorées, dans deux de nos provinces, faute d'un entretien suffisant.

Il est certain que les communes, en grande partie, n'ont pas les ressources nécessaires pour satisfaire à ce grand besoin ; il ferait donc à désirer que l'Etat puisse intervenir, pour une certaine part, au moyen des excédants de ressources fournis chaque année par le chemin de fer de l'Etat, surtout que les chemins de grande vicinalité doivent être considérés comme des affluents très notables de nos voies ferrées.

En demandant l'intervention de l'Etat pour une certaine part dans l'entretien des chemins vicinaux, je n'entends nullement que l'on diminue la somme allouée annuellement pour l'amélioration de la voirie vicinale ; c'est l'argent le mieux employé pour les véritables intérêts agricoles ; mais il est aussi d'un intérêt général de ne pas laisser détériorer les chemins vicinaux, déjà réparés à grands frais ; il faut les entretenir, en temps utile, pour ne pas les laisser dégrader et perdre ainsi tout le fruit des dépenses nombreuses faites depuis 1841.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je ne promettrai pas à l'honorable M. Rodenbach d'examiner avec bienveillance la question de la route de Plaschendaele, parce que je pourrais paraître partial aux yeux de la Chambre, y ayant moi-même intérêt. J'examinerai cependant cette question comme toutes les autres.

M. Rodenbach. - On ne doit pas être contre pour cela.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je ne dis pas que je suis contre.

Messieurs, la question soulevée par l'honorable comte de Renesse et par l'honorable M. de Lexhy ne se présente pas pour la première fois à la Chambre. Déjà l'année dernière j'ai eu l'honneur de faire connaître l'opinion du gouvernement sur cette matière, et aucun fait ne s'est produit depuis cette époque, qui soit de nature à modifier cette opinion.

Ce que demandent les honorables membres, c'est tout simplement la modification d'un article de la loi communale.

Aux termes de l'article 131, n°19, de la loi communale, l'entretien de la voirie vicinale est une charge communale obligatoire. Il y est dit :

« Le conseil communal est tenu de porter annuellement au budget des dépenses les dépenses de la voirie communale et des chemins vicinaux. »

Il me semble donc, messieurs, qu'en pareille matière le gouvernement ne doit pas intervenir.

Il est vrai que déjà des subsides d'une certaine importance sont annuellement accordés pour la construction de routes, mais cette dépense est toute différente de celle qui concerne l'entretien. Ainsi que l'ont très bien fait remarquer quelques membres de la Chambre, il s'agit là d'un intérêt général, il s'agit de relier au centre du pays et aux chemins de fer des communes qui en sont isolées. C'est, en outre, un acte de justice ; beaucoup de communes n'ont pas de chemin de fer ; il est juste que le gouvernement fasse quelque chose pour ces petites localités afin de les faire profiter indirectement des bénéfices du chemin du fer.

Quant à l'entretien, c'est, je le répète, une charge exclusivement communale ; et il faut qu'il en soit ainsi, car si le gouvernement se mêlait de la voirie vicinale on arriverait à devoir organiser, comme conséquence, un système général de surveillance ; le département de l'intérieur devrait avoir des ingénieurs, des conducteurs, des piqueurs. On demande continuellement la décentralisation, mais chaque fois qu'il s'agit d'obtenir un crédit quelconque, ces beaux principes de décentralisation disparaissent, et on réclame vivement l'intervention de l'Etat.

Du reste, messieurs, si les chaussées vicinales exigent des réparations dont le montant excède les ressources de la commune, il y a un moyen extrêmement simple, c'est de percevoir un péage. Cela se fait ainsi dans un grand nombre de localités. On place une barrière et lorsque la route est fréquentée, le produit est considérable ; si, au contraire la barrière rapporte peu, c'est que la route est peu parcourue et alors elle s'use peu. Ce système est pratiqué dans une grande partie des Flandres et on s'en trouve parfaitement bien.

Je sais qu'il est beaucoup plus facile de demander à l'Etat des subsides et de ne rien payer soi-même, mais cela est contraire aux principes de la Constitution. Lorsque nous voulons la liberté des communes, il faut aussi que la commune puisse, dans certains cas, s'imposer les charges qui lui incombent. Il ne faut pas seulement revendiquer ses droits, il faut aussi savoir remplir ses devoirs.

Quant à la surveillance qu'on demande au gouvernement d'exercer sur la voirie vicinale, il me semble que ce serait une espèce d'empiétement sur la liberté des communes. Du moment que des fonctionnaires du gouvernement viendraient, sur les routes construites par les communes, ordonner des réparations, la conséquence en serait qu'ils devraient aussi avoir le droit de s'immiscer dans la gestion financière des communes.

Cela existe dans un pays voisin ; là le sous-préfet intervient d'office dans le budget les dépenses qu'il juge nécessaires. Je crois que ce système ne peut convenir à la Belgique.

Si, au contraire, la surveillance se bornait au droit de savoir ce qui se passe, sans qu'il y eût une sanction, ce serait une surveillance tout à fait inefficace.

Du reste, messieurs, il existe dans notre pays des fonctionnaires spécialement chargés de la surveillance de la voirie. Ce sont les commissaires voyers ; ils sont nommés par l'autorité provinciale, et c'est à l'autorité provinciale d'exercer sur eux la surveillance qu'elle juge nécessaire. La plupart des commissaires voyers ne sont nommés que pour un certain temps, et lorsqu'on n'est pas satisfait de la manière dont ils remplissent leurs fonctions, on les remplace.

La Chambre est saisie d'un projet de loi qui permettra encore aux communes de se créer, sans grands embarras, des ressources nouvelles ; aujourd'hui le rôle des impositions est limité, le projet de loi remet les communes en possession de la liberté dont elles jouissaient avant la loi sur les chemins vicinaux.

Il ne faut donc pas, messieurs, que le gouvernement intervienne dans l'entretien de la voirie vicinale, c'est là une charge purement communale, et il ne me serait pas possible de consentir à porter au budget un crédit quelconque pour cet objet ; j'aimerais mieux proposer d'augmenter le crédit pour la construction de routes, afin de donner quelque chose à ceux qui n'ont encore rien reçu.

Messieurs, puisque je parle de cette question, je crois pouvoir dire à la Chambre que plusieurs communes qui auraient dû attendre assez longtemps avant de faire construire des routes déjà décrétées, soit parce qu'elles n'ont pas d'argent, soit parce que le gouvernement n'a pas encore pu payer leurs subsides, pourront, par suite d'une combinaison nouvelle, faire exécuter les travaux qui les intéressent : je viens d'apprendre qu'une société particulière, tout à fait en dehors du gouvernement, s'est constituée et qu'elle consent à construire par anticipation, si je puis m'exprimer ainsi, les chemins vicinaux là où ils sont décrétés, c'est-à-dire que cette société exécuterait les travaux avant d'avoir reçu les subsides. Il en résulterait une très grande accélération des travaux de la voirie vicinale.

M. Braconier. - Si j'ai bien compris l'honorable comte de Renesse, il a eu principalement en vue de signaler les inconvénient qu'il y a à laisser détruire les chemins vicinaux. Il est certain, messieurs, que d'ici à quelques années, beaucoup de chemins vicinaux pour lesquels on a dépensé beaucoup d'argent, seront complètement détruits et qu'il faudra tout recommencer.

Quant à la question de savoir si l'Etat doit intervenir dans ces dépenses, je pense que, pour certains chemins, ce serait très difficile et même impossible. Pour les chemins qu'on décrète de grande communication et qui traversent une commune sur une très petite partie de son territoire, voire même sur un point, si vous voulez imposer également cette charge aux communes, jamais l'entretien ne se fera.

Le danger qu'il y a à laisser complètement à la commune l'entretien des chemins vicinaux et à leur abandonner toute latitude à cet égard, est celui-ci : c'est que les sommes énormes dépensées depuis un certain nombre d'années pour la voirie vicinale en Belgique ne soient des sommes perdues.

Je viens donc appeler spécialement l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la question de savoir s'il y aurait pas moyen d'obliger les communes à entretenir certains chemins. Cependant, je dois dire qu'il y a des chemins de grande communication qui profitent peu à la commune, et pour lesquels l'Etat ou la province devrait intervenir.

Le seul but de mes observations est celui-ci ; c'est qu'en continuant à (page 347) marcher comme on marche depuis quelque temps, les chemins vicinaux exécutes seront complètement détruits dans un avenir très rapproché dans une grande partie de la Belgique.

M. Tack. - Messieurs lorsque j'ai demandé que le gouvernement exerçât une certaine surveillance sur la voirie vicinale, je n'ai nullement entendu demander que, par ses agents, il absorbât la liberté communale et empiétât sur les droits des communes. Mais il m'a semblé que lorsque le gouvernement intervient par voie de subsides dans les travaux de la voirie vicinale, il a le droit tout au moins de s'assurer que les routes soient bien construites. Or, comme vient de le démontrer l'honorable M. de Renesse, il est des cas fréquents où cette condition n'a nullement été observée, et plus d'une route vicinale présente des vices de construction très prononcés.

Il me paraît que le gouvernement pourrait se réserver une certaine surveillance sur la voirie vicinale et agir au moins par voie de remontrance, et même pour les communes qui ne remplissent pas tous leurs devoirs, leur refuser les subsides qu'elles seraient dans le cas de demander, n'importe pour quel objet. Une s'agit donc nullement dans ma pensée d'une substitution de l'Etat à la commune, mais d'un légitime contrôle, maintenu dans de sages limites.

- La discussion est close.

Articles 65 et 66

« Art. 65. Encouragements pour l'amélioration de la voirie vicinale ; indemnités aux commissaires voyers et encouragements pour les améliorations qui intéressent l'hygiène publique : fr. 1,150,000. »

- Adopté.


« Art. 66. Inspection des chemins vicinaux, des cours d'eau et de l'agriculture, service du drainage : fr. 15,550.

« Charge extraordinaire : fr. 10,185. »

- Adopté.

Chapitre XIII. Industrie

Discussion générale

M. H. Dumortier. - Messieurs, j'ai une seule observation h présenter à M. le ministre de l'intérieur.

Déjà depuis plusieurs années, l'arrondissement de Courtrai a signalé l'état dans lequel se trouvent les eaux de la rivière de l'Espierre.

Cette petite rivière non navigable prend sa source aux environs de Roubaix ; elle traverse en partie les arrondissements de Tournai et de Courtrai, et se jette dans l'Escaut à Espierre. La corruption des eaux de cette rivière (Note de base de page : « Le compte-rendu sténographique présente ici une lacune. »1)

Cet état de choses est contraire au droit des gens, contraire à toute espèce de lois ; il importe que le gouvernement fasse des réclamations énergiques et promptes auprès du gouvernement français pour que cette situation ait une fin.

Nous venons chaque année faire ici des doléances, et chaque année reproduire les plaintes légitimes des nombreuses communes de l'arrondissement de Courtrai, et chaque année aussi l'organe du gouvernement nous répond qu'on écrira au gouvernement français, qu'on est en correspondance ; mais depuis 2 ou 3 ans qu'on nous parle de cela, il n'a pas été apporté le moindre remède au mal.

En dernier lieu, le gouvernement français a fait connaître que les villes de Roubaix et de Tourcoing se refusaient à faire des bassins d'épuration, et que maintenant on allait essayer d'un autre moyen.

On a fini par nommer une commission il y a 7 ou 8 mois ; je ne pense pas que cette commission se soit déjà réunie. M. le ministre de l'intérieur connaît la situation ; j'espère donc qu'il voudra mettre une certaine énergie dans ses réclamations auprès du gouvernement français et que cet état de choses aura une fin. Des réclamations ont été adressées à la Chambre, au Sénat et au Roi ; les intéressés ne peuvent pas faire davantage ; nous ne pouvons non plus que faire valoir leurs plaintes dans cette enceinte.

J’ai encore un mot à ajouter en ce qui concerne la nomination de la commission. Cette commission est composés pour la Belgique de 5 ou de 6 membres. Eh bien, l'arrondissement de Tournai compte trois représentants dans la commission, tandis que l'arrondissement de Courtrai, qui est le plus spécialement intéressé, y a un seul représentant. Pourquoi cette différence ?

M. B. Dumortier. - Messieurs, l'observation que l'honorable préopinant vient de présenter mérite la sérieuse attention du gouvernement à plus d'un titre, d'abord au point de vue de l'intérêt des arrondissements de Tournai et de Courtrai, ensuite au point dev\ue de la grande question internationale du régime des eaux intérieures de la Hollande.

Quant à ce qui concerne l'intérêt local des arrondissements de Tournai et de Courtrai, je ne suis pas surpris que le gouvernement, dans la commission qu'il a nommée, ait désigné 3 membres appartenait à l’arrondissement de Tournai et seulement un membre appartenant à l'arrondissement de Courtrai.

Il s'agit, en effet, de la petite rivière de l'Espierre qui parcourt presque exclusivement l'arrondissement de Tournai.

La grave question, la voici : par suite des fabriques qui se sont établies à Roubaix, les eaux de l'Espierre sont devenues tellement infectes, putrides, qu'elles occasionnent des maladies pestilentielles dans tout le parcours de cette petite rivière ; les eaux qui ont servi aux fabriques, au lieu d'être jetées dans des conduits pour que les résidus s'y déposent, sont jetées dans l'Espierre et arrivent ainsi jusqu'à l'Escaut.

Là elles corrompent les eaux à ce point que les bateliers eux-mêmes ne peuvent plus boire l'eau de l'Escaut tant elle est devenue infecte. Les poissons, cela va sans dire, ne s'aventurent plus dans ces parages, sous peine d'y trouver la mort.

C'est donc là une chose d'un très grand intérêt pour le pays et qui mérite à tous égards la sollicitude du gouvernement, bien plus encore de M. le ministre des affaires étrangères que de M. le ministre de l’intérieur, attendu qu'il s'agit ici d'une question internationale.

Mais, au point de vue des intérêts de Tournai, il est une autre question qui vient se mêler à celle-là ; je veux parler de la dérivation qui a été effectuée d'une grande partie des eaux de la Scarpe pour les retirer de leur affluent naturel, l'Escaut, et les jeter dans la Deurne. Je me rappelle avoir vu dans un journal hollandais qu'au moyen des écluses que les ingénieurs français avaient établies, le canal de la Deurne ne pouvait pas supporter de grandes gelées. Qu'est-ce que cela prouve ? Que le gouvernement français a fait à l'égard de la Belgique quant à la Scarpe ce que la Hollande nous reproche de faire à son égard quant à la Meuse, dont les eaux servent en partie à l'alimentation du canal de la Campine.

Aussi, je crois que le gouvernement, quand il aura à traiter encore la question de la Meuse avec la Hollande, si tant est que les négociations soient reprises de nouveau après ce qui s'est passé aux états généraux, je crois, dis-je, que le gouvernement pourra tirer utilement parti de la position qui est faite par la France à la Belgique quant aux eaux de la Scarpe, et je recommande cet élément de négociation à l'attention de M. le ministre des affaires étrangères.

Il est absolument indispensable que le gouvernement fasse cesser l'état de malaise dans lequel se trouvent la plus grande partie des communes occidentales de l'arrondissement de Tournai. Il règne dans ces communes des maladies typhoïdes d'une manière pour ainsi dire permanente, à cause des principes pestilentiels dont le sol est imprégné depuis que les fabriques de Roubaix et de Tourcoing déversent leurs immondices dans l'Espierre. Cette rivière, dont les eaux étaient autrefois pures et limpides, est aujourd'hui un véritable cloaque ; or, la France ne peut évidemment pas, dans les termes de bon voisinage où nous sommes avec elle, continuer à empester notre pays, alors surtout qu'il lui serait si facile de faire droit à nos légitimes réclamations.

J'espère que M. le ministre des affaires étrangères voudra bien examiner cette question avec toute l'attention qu'elle mérite.

M. Tack. - Comme l'a dit mon honorable collègue de Courtrai, la question de l'Espierre est une vieille question. A diverses reprises, des plaintes ont été adressées à la Chambre par les riverains de l'Espierre et de l'Escaut ; et fréquemment à l'occasion de la discussion des budgets de l'intérieur et des travaux publics, nous avons élevé ici la voix pour demander qu'il soit mis un terme à un état de choses devenu réellement intolérable.

L'honorable M. B. Dumortier vous a trop bien dépeint la position des riverains de l'Espierre et de l'Escaut, au point de vue de l'infection des eaux, pour qu'il soit nécessaire que je m'étende plus longuement sur ce sujet.

De son côté, mon honorable collègue de Courtrai vous a dit, avec raison, que les prairies riveraines de l'Espierre ont diminué des deux tiers de leur valeur ; que les établissements charitables de l'Espierre et des communes voisines ont éprouvé le plus grand préjudice dans leurs finances ; cela est hors de contestation et ne saurait être révoqué en doute.

J'espère que les représentations qui pourront être faites à la France auront de bons résultats ; mais je pense qu'en attendant que les industriels de Roubaix aient été mis en demeure de prendre certaines mesures, telles, (page 348) par exemple, que l'établissement de bassins de gradation ou de désinfection, il est une autre mesure à prendre de notre côté, pour soustraire notre agriculture aux dégâts périodiques occasionnés par les débordement des eaux de l'Espierre. Je m'explique.

Le préjudice que l'agriculture éprouve a sa source première dans la corruption des eaux ; mais les débordements de l'Espierre sont occasionnés par les travaux que le gouvernement a fait exécuter à l'Escaut, et qui ont modifié le régime de ce fleuve. Le petit ruisseau connu sous le nom de l'Espierre se jette dans l'Escaut en amont du barrage qui a été construit à Espierre en 1855 ; la construction de ce barrage a eu pour conséquence d'élever le niveau des eaux en amont de cet ouvrage d'art, et par suite la pente naturelle de l'Espierre est supprimée.

Il en résulte que, dans les crues d'eau, si insignifiantes qu'elles soient, les eaux de l'Espierre refluent vers leur source. Le ruisseau gonfle, les eaux qui se répandent sur les prairies voisines, brûlent les fourrages et empoisonnent les animaux. Cela n'arrive que dans les cas de hautes eaux dans l'Escaut. Mais ce fait se produit souvent, même en plein été.

Maintenant, voici le remède très simple qui suffirait pour prévenir les dégâts ; ce serait tout bonnement de faire un petit canal de dérivation, une maîtresse-rigole, comme on l'a fait ailleurs, faisant communiquer la petite rivière l'Espierre avec l'ancien lit de l'Escaut qui a été détourné, de manière que, dans toutes les circonstances, les eaux de l'Espierre puissent être déversées dans l'Escaut. Ce travail ne coûterait guère plus de 2,000 fr. et l'on rendrait ainsi justice aux populations riveraines de l'Espierre.

J'entends faire une objection à mes côtés : on me dit : Vous voulez donc empester l'Escaut ! Nullement, messieurs ; comme je l'ai dit, les cas de débordement ne se présentent que lorsqu'il y a des crues d'eau un peu exceptionnelles de l'Escaut ; alors, vu la surabondance d'eau, le mélange des eaux de l'Espierre avec celles de l'Escaut ne peut pas avoir assez d'effet pour corrompre celles de l'Escaut.

J'insiste donc pour que M. le ministre des affaires étrangères, tout en négociant avec le gouvernement français, engage son collègue des travaux publics à compléter l'ouvrage qu'il a fait exécuter à l'Espierre ; car on n'aurait pas dû se borner, de prime abord, à construire le barrage en question ; mais en même temps, on aurait dû faire le petit travail que je viens d'indiquer et qui suffirait pour faire cesser les plaintes des riverains.

- La discussion est close.

Articles 67 à 71

- L'article 67 est mis aux voix et adopté.


« Art. 68. Enseignement professionnel : Ecoles industrielles, ateliers d'apprentissage, écoles manufactures, etc. : fr. 170,325.

« Charge extraordinaire : fr. 18,153. »

- Adopté.


« Art. 69. Achat de modèles et de métiers perfectionnés ; voyages et missions ; publications utiles et souscriptions ; prix ou récompenses pour des ouvrages ou mémoires sur des questions de technologie, de droit ou d'économie industrielle ; subsides en faveur d'industries nouvelles ; frais relatifs aux caisses de prévoyance et aux sociétés de secours mutuels ; décorations d'ouvriers, etc. ; encouragement à la société de pisciculture de Belgique : fr. 15,450.

« Charge extraordinaire : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 70. Indemnités des greffiers, des conseils de prud'hommes : fr. 13,500. »

- Adopté.


« Art. 71. Frais de rédaction et de publication du Recueil officiel des brevets d'invention : fr. 7,000. »

- Adopté.

Articles 72 et 73 (musée de l’industrie)

« Art. 72. Traitement du personnel : fr. 21,100. »

- Adopté.


« Art. 73. Matériel et frais divers : fr. 17,450.

« Charge extraordinaire : fr. 18,037. »

- Adopté.

Chapitre XIV. Poids et mesures

Articles 74 à 76

« Art. 74. Traitement des vérificateurs : fr. 56,525. »

- Adopté.


« Art. 75. Frais de bureau et de tournées : fr. 18,000. »

- Adopté.


« Art. 76. Matériel : fr. 2,000. »

- Adopté.

Chapitre XV. Instruction publique. Enseignement supérieur

Article 77

« Art. 77. Dépenses du conseil dé perfectionnement de l'enseignement supérieur : fr. 14,000. »

M. de Theux. - Messieurs, il y a bien longtemps qu'un projet de loi sur l’enseignement supérieur a été présenté à la Chambre. Nous avons prorogé l'état provisoire qui existe croyant que bien assurément le projet de loi serait discuté dans la session présente. Cependant rien quant à présent n'annonce que cette discussion soit prochaine, nous ne savons même pas si la section centrale s'en occupe. Il serait pourtant désirable que le pays sortît de cet état d'incertitude, que le corps enseignant, que les jeunes gens sussent à quoi s'en tenir, quel sera le système définitif d'enseignement et des examens. Je demanderai a M. le ministre de vouloir bien donner quelques explications sur ses intentions, quant à la discussion du projet de loi sur l'enseignement et sur le point où en est arrivé l'examen en section centrale.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Les explications que j'ai à donner sont extrêmement simples ; le gouvernement a présenté un projet de loi dans le courant de la dernière session. Le projet de loi a été renvoyé à l'examen des sections, la section centrale a été constituée ; lorsque des renseignements m'ont été demandés, je les ai envoyés ; j'ignore où en sont les travaux de la section centrale.

Le gouvernement n'a pas autre chose à faire qu'à déposer les projets de loi et fournir les renseignements qui lui sont demandés, sa mission n'est pas d'exercer une pression quelconque sur les travaux de la Chambre. Quant à moi, je désire et j'ai toujours désiré vivement que le projet de loi sur l'enseignement supérieur pût être discuté dans le cours de cette session.

Je désire n'être pas obligé de présenter encore un projet de loi provisoire pour cette année, je forme des vœux, comme l'honorable M, de Theux, pour que le projet puisse être discuté et voté dans la présente session.

M. de Theux. - M. le ministre de l'intérieur vient de déclarer qu'il désire comme nous que le projet de loi sur l'enseignement supérieur soit discuté dans la présente session, mais comme il ignore dans quel état se trouve le travail de la section centrale chargée d'examiner ce projet, force m'est de m'adresser au bureau pour obtenir à cet égard quelques éclaircissements.

La question que j'adresse au bureau est très légitime, il faut qu'on sache finalement si on s'occupe ou non de ce projet.

M. Guillery. - Je comprends parfaitement le désir de l'honorable préopinant de savoir ce qui se passe au sujet de l'examen du projet de loi relatif à la collation des grades académiques. J'avoue que, quoique membre de la section centrale, je n'en sais pas beaucoup plus que lui., Le projet de loi a été présenté à la fin de la dernière session. La section centrale a été formée et s'est réunie.

J'ai fait la proposition de procéder immédiatement à la discussion, afin que le rapporteur pût faire son travail pendant les vacances et qu'à sa rentrée la Chambre pût s'en occuper. Cette proposition a été rejetée par la majorité de la section centrale et l'examen n'a pas commencé.

Au début de cette session, nous avons eu deux réunions de la section centrale. La première a été employée à examiner les procès-verbaux des sections ; la seconde a été absorbée par la discussion d'une question de principe.

Depuis, j'ai fait plusieurs démarches pour obtenir que la section centrale fût réunie, jamais je n'ai eu de ses nouvelles. Je ne sais pas aujourd'hui ce qu'elle est devenue, ni même si elle existe encore.

M. Devaux. - Je désire comme tout le monde que la discussion du projet de loi dont il s'agit arrive devant la Chambre et aboutisse. Je regrette que M. le président ne soit pas ici.

Il nous expliquerait les raisons pour lesquelles la section centrale n'a pas été convoquée.

En son absence, j'indiquerai un motif qui pourrait bien être le véritable.

Quelques membres de la section centrale ont demandé des communications de pièces.

Parmi ces pièces figurent les rapports des présidents des jurys parvenus au ministère pendant un certain nombre de sessions des jurys jusqu'à la dernière inclusivement.

(page 349) Il paraît que ces rapports n'étaient pas encore tous rédigé par M. le président et l’on nous les communique successivement à mesure qu'ils sont terminés.

Hier encore, comme membre de la section centrale, j'en ai reçu un, et l'on m'a averti qu'on le reprendrait le lendemain pour le communiquer à un autre membre.

Je suppose que c'est là une des causas du retard. Peut-être est-ce aussi parce que l'honorable président préside encore d'autres sections centrales,

M. Rodenbach. - Il y a deux ans que cela dure !

M. Vander Donckt. - Messieurs je crois que l'ajournement des travaux de cette section centrale ne peut être attribué au gouvernement.

On a demandé beaucoup de renseignements. On a demandé communication de tous les procès-verbaux de la commission spéciale qui a formulé le projet de loi ainsi que tous les rapports et tous les avis. Enfin, comme vient de le dire l'honorable M. Devaux, on a demandé les rapports des présidents de tous les jurys.

Le gouvernement a envoyé toutes ces pièces ; mais quelques présidents de jury n'avaient pas transmis immédiatement leurs rapports. Chaque fois qu'il en arrive un au ministère de l'intérieur, le jour même il est transmis à la section centrale.

On ne peut donc faire en cette circonstance aucun reproche au gouvernement du retard qu'éprouverait le projet de loi qui est présenté à la Chambre.

Je tenais à faire cette déclaration et en même temps cette réserve.

M. le président. - Je dois faire remarquer que le président de cette section centrale a eu dans ses attributions beaucoup d'affaires à la fois. Cet encombrement a même été tel, qu'il a été obligé de céder une section centrale à l'un de ses vice-présidents. Car conséquent, c'est l'encombrement seul des affaires qui est cause du retard qu'a éprouvé le projet dont il s'agit.

- L'article 77 est adopté.

Article 78

« Art. 78. Traitement des fonctionnaires et employés des deux universités de l'Etat : fr. 688,390. »

M. Muller. - Messieurs, je désirerais savoir de M. le ministre de l'intérieur quelle est l'augmentation dont il entend faire jouir les répétiteurs des universités de l'Etat. Cela n'est indiqué ni dans le budget, ni dans le rapport de la section centrale.

Voici, messieurs, quelle est la portée de mes observations.

Dernièrement, à l'occasion de la discussion du budget de la guerre, d'honorables membres de cette Chambre ont fait remarquer qu'il était juste de porter le traitement des professeurs de l'école militaire au même taux que celui des professeurs des universités de l'Etat. La Chambre a adopté le projet de loi que le gouvernement s'est empressé de lui soumettre, dans ce but, et on y a réglé, en l'élevant également, le traitement des répétiteurs de l'école militaire.

Or, messieurs, si vous avez élevé le traitement des professeurs de l'école militaire au taux proposé pour le traitement des professeurs de l'Etat, il serait, me semble-t-il, irrationnel que le traitement des répétiteurs des universités de l'Etat fût généralement inférieur à celui des répétiteurs de l'école militaire.

Il me paraît que ni le gouvernement, ni la Chambre ne peuvent admettre des dissemblances choquantes à cet égard.

Je demande donc si le chiffre porté au budget suffira pour faire droit à une amélioration sérieuse de la position des répétiteurs des universités de l'Etat.

Si ce chiffre n'était pas reconnu suffisant, je prierais M. le ministre de l'intérieur et la Chambre de vouloir bien consentir à ce que le vote de cet article soit suspendu jusqu'à ce que nous puissions connaître l'augmentation qui serait nécessaire.

M. Hymans, rapporteur. - Messieurs, j'appuie les observations que vient de présenter l'honorable M. Muller.

Si les traitements des répétiteurs des universités n'ont pas été augmentés par la loi relative à l'augmentation des traitements des fonctionnaires des universités de l’Etat, c'est parce que ces traitements ne sont pas fixés par une loi spéciale, tandis que ceux des répétiteurs de l'école vétérinaire étaient fixés par la loi organique de cet établissement.

C'est donc à l'occasion du budget que nous devons, s'il y a lieu, demander l'augmentation du traitement de ces fonctionnaires.

Les observations de l'honorable représentant de Liège me paraissent d'autant plus fondées que d'après le dernier rapport triennal sur l’enseignement, 14 répétiteurs de l'école spéciale de Liége jouissent d'un traitement qui, pour quelques-uns, s'élève à 2,000 fr., pour d'autres à 1,800 fr., c pour d'autres même à l,200 fr., et quelques-uns de ces répétiteurs sont chargés de plusieurs cours.

Ceux qui sont chargés des répétitions des cours les plus importantes, ceux de métallurgie, de chimie industrielle et de mécanique, n'ont que 2,000 fr. tandis que d'après la loi relative à l'école militaire, ces répétiteurs ont un traitement de 3,000 fr.

Il est évident qu'il y a ici quelque chose à faire. Il n'y a qu'un seul répétiteur attaché à une université, celui du génie civil de Gand qui touche un traitement de 3,000 fr. après avoir été pendant très longtemps dans une position inférieure.

Je crois que M. le ministre de l'intérieur n'a pas l'intention de confondre les répétiteurs des universités dans ce que l'on appelle le personnel administratif et que les sentiments de justice qui l'animent le porteront à réclamer pour les répétiteurs des universités le traitement dont ils sont dignes.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, le gouvernement propose pour les répétiteurs de l'université et pour les conservateurs, les préparateurs et autres fonctionnaires, une augmentation de crédit de 10 p. c. du montant des traitements.

Le système qui a été suivi pour ces honorables fonctionnaires est donc le même que celui adopté pour les fonctionnaires du département de l'intérieur.

La position du personnel autre que celui des professeurs et administrateurs, est assez variée.

Ainsi, il y a indépendamment des répétiteurs, d'autres personnes qui donnent certains cours aux universités. Il en est même qui cumulent avec leur enseignement d'autres fonctions, celles de surveillant, de conservateur de certains cabinets, en un mot, qui occupent plusieurs fonctions aux universités.

Il était donc difficile de déterminer dès maintenant quel serait le traitement à donner à chacun d'eux.

Je pense qu'avec le supplément de 10 p. c. qui me sera accordé, je pourrai améliorer dans une juste mesure la position de ces différents fonctionnaires.

II faut remarquer, messieurs, que ces traitements ne sont pas fixés d'une manière uniforme. Ils varient suivant le nombre d'heures de leçons que donne chaque personne et aussi suivant l'importance des cour-.

Le montant de ces traitements est fixé sur la proposition des autorités académiques. Il est évident que le crédit que l'on me donnera servira d'abord à augmenter les traitements les moins élevés, puis ceux qui sont à un niveau plus haut, dans une moindre proportion.

Comme je viens de le dire, le traitement de ce personnel varie ; un répétiteur à l’université de Liège touche 3,800 fr. ; d'autres répétiteurs ont 3,000 fr. ; la somme qui sera mise à la disposition du gouvernement sera répartie en raison des services rendus et je crois qu'elle suffira pour rémunérer chacun convenablement.

M. Muller. - Messieurs, je ne puis pas me déclarer bien satisfait de la réponse que vient de faire M. le ministre de l'intérieur. Voici pourquoi :i l ne propose que 10 p. c. d'augmentation pour donner satisfaction à tous ceux qui ne sont pas rangés dans le corps professoral. Il tâchera, il est vrai, d'améliorer la position des répétiteurs qui sont trop peu rétribués, en ayant égard au nombre d'heures de leçons qu'ils donnent ; au cumul qu'exercent quelques-uns d'entre eux ; mais sur quels fonds trouvera-t-il les ressources ? En économisant, sans doute, sur la part destinée au personnel administratif, en n'augmentant les traitements de ce dernier que d'une quotité inférieure à 10 p. c. Un résultat semblable pourra-t-il échapper à des plaintes légitimes ?

L'honorable ministre de l’intérieur n'a pas répondu aux raisons que j'avais puisées dans le vote émis dernièrement par la Chambre sur les traitements des répétiteurs de l'école militaire, et cependant je croyais ces raisons plausibles et concluantes.

J'admets avec lui qu'il y a lieu d'établir une différence entre celui qui cumule plusieurs emplois et celui qui n'est que répétiteur. Mais cette distinction se présentait aussi pour l'école militaire, où il y a des membres du corps enseignant qui cumulent divers emplois. Qu'on suive donc une règle de conduite qui puisse s'appliquer d'une manière égale.

Jusqu'ici les professeurs des universités étaient placés à un degré plus élevé que les professeurs de l'école militaire, et aujourd'hui les répétiteurs de l'école militaire seraient généralement placés à un rang plus (page 350) élevé, sous le rapport du traitement, que les répétiteurs des universités de l’Etat !

Je persiste à prier M. le ministre de l'intérieur de vouloir bien examiner cette question d'ici à la fin de la discussion du budget, et je désirerais que la Chambre ajournât aujourd'hui son vote, pour qu'une proposition puisse être faite en connaissance de cause. Dans ce moment, nous ne sommes pas en état, vu l'absence de documents suffisants, de déterminer le chiffre dont il faudrait augmenter l'article relatif aux universités de l'Etat.

M. Hymans, rapporteur. - Je comprendrais d'autant moins que M. le ministre de l'intérieur ne fît pas droit aux observations qui viennent d'être présentées que, dans le dernier rapport triennal sur l’enseignement supérieur, j'ai vu que le gouvernement lui-même regrette que les répétiteurs des universités ne soient pas mieux payés et parle de la nécessité de leur accorder un traitement plus élevé.

Comme l'a dit tout à l'heure l'honorable M. Muller, il y a des répétiteurs qui donnent plusieurs cours. Un seul répétiteur de l'université de Liége touche 3,800 fr., et celui-là est chargé de deux cours. Après trois répétiteurs touchent 2,000 fr. pour la répétition de cours très importants. Les autres ont 1,800 fr. et jusqu'à 1,200 fr.

Je ferai remarquer, en outre, que les répétiteurs ne touchent pas de minerval, tandis que les professeurs, dont les traitements ont été augmentés, touchent un minerval. Il est donc de stricte justice que l'on fasse droit à la demande de l'honorable M. Muller et je crois aussi que nous devrions suspendre la décision sur cet article, pour que M. le ministre pût nous dire quelle est la somme dont il a besoin pour augmenter dans une proportion équitable les traitements des répétiteurs des universités.

M. Jacquemyns. - Je viens me joindre aux honorables MM. Muller et Hymans pour demander que le traitement des répétiteurs des universités de l'Etat soit porté au même taux que le traitement des répétiteurs de l'école militaire.

A l'université de Gand, il y a huit répétiteurs. Parmi ces répétiteurs, il y en a trois qui remplissent aussi d'autres fonctions. Mais il y en a cinq qui remplissent exclusivement les fonctions de répétiteur, qui ont à donner tout leur temps, tous leurs soins à leur enseignement.

De ces cinq répétiteurs il y en a un seul qui touche un appointement de 3,000 fr. Les quatre autres n'ont qu'un traitement de 2,000 fr. C'est notablement moins que plusieurs des professeurs de nos athénées et c'est certainement un traitement extrêmement modique que 2,000 fr. donnés à des jeunes gens qui ont fait des études remarquables tant dans le pays qu'à l'étranger.

C'est une singulière manière d'encourager les jeunes gens qui ont obtenu des titres pour entrer dans l'enseignement supérieur, que de leur donner un aussi mince appointement.

Il me semble que du moment que vous avez posé le principe de mettre les professeurs de l'école militaire sur la même ligne que les professeurs des universités de l'Etat, il est impossible de ne pas mettre les répétiteurs des universités de l'Etat sur le même pied que les répétiteurs de l'école militaire.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, je viens de faire connaître à la Chambre les motifs pour lesquels le gouvernement a cru, quant à présent, pouvoir se borner à demander une augmentation de 10 p. c. sur les traitements des répétiteurs.

J'ai déjà dit que plusieurs de ces très honorables fonctionnaires ne donnent que quelques cours et que, par conséquent, il n'y a pas lieu d'accorder à tous ces fonctionnaires la même augmentation, ni à tous les répétiteurs le même traitement.

On me demande de les placer sur le même pied que les répétiteurs de l’école militaire ; mais, messieurs, cala n'est pas possible : dans les universités il y a 25 ou 30 personnes à côté des professeurs ; si nous devons les porter au traitement que touchent les répétiteurs de l'école militaire... (Interruption.)

Messieurs, lorsque le budget de 1864 sera présenté, si vous trouvez que la répartition faite par le gouvernement n'est pas équitable vous proposerez un supplément ; mais vous ne pouvez pas exiger de moi que je vienne vous dire de combien j'augmente chacun de ces fonctionnaires ; vous ne pouvez pas transformer la Chambre en un conseil communal administrant par lui -même.

Je tâcherai de faire le meilleur usage possible des fonds que la Chambre aura mis à ma disposition ; il vous sera rendu compte de l'emploi de ces fonds, et si l'on trouve qu'ils ne sont pas suffisants, nous examinerons ; mais venir par amendement fixer les traitements de M. A., de M. B., c'est ce que la Chambre ne peut pas faire.

Il faut que je consulte les autorités académiques, que je m'enquière des services rendus par chacun et que je règle ensuite les traitements consciencieusement, à tête reposée, dans mon cabinet. Cela ne peut pas se faire par voie d'amendements introduits ici dans la discussion publique.

M. Muller. - A coup sûr, lorsque j'ai présenté mes observations à la Chambre, ce n'était pas le moins du monde dans le but de transformer l'assemblée en un bureau du ministère, faisant de l'administration et prononçant sur les droits à l'avancement de chaque fonctionnaire ; je ne voulais pas faire régler par elle quel devait être le traitement de telle ou telle individualité ;j'ai seulement fait remarquer à M. le ministre de l'intérieur que l'augmentation de 10 p. c. proposée à la fois pour les répétiteurs et le personnel administratif des universités n'est pas en rapport avec celle qui a été accordée pour l'école militaire.

Je n'ai nullement prétendu que tous les répétiteurs dussent être mis exactement sur la même ligne ; mais j'ai, dit et je crois l'avoir démontré, que l'augmentation de 10 p. c. n'est pas suffisante.

Maintenant, messieurs, en présence de la déclaration catégorique de M. le ministre de l'intérieur, de laquelle il résulte qu'il persiste à s'en tenir pour le présent budget au chiffre qu'il a demandé, et qu'il manque de renseignements, même pour proposer une augmentation de 4,000 ou 5,000 francs, je n'ai plus qu'à exprimer le regret de voir en général, les répétiteurs des universités de l'Etat moins favorablement traités, cette année, que ceux de l'école militaire. C'est ma conviction et j'ai voulu l'exprimer devant la Chambre.

Le chiffre de 688,390 fr. est mis aux voix et adopté.

Articles 79 à 83

« Art. 79. Bourses. Matériel des universités : fr. 138,710.

« Charge extraordinaire : fr. 7,500. »

Le gouvernement d'accord avec la section centrale propose une augmentation de 10,000 francs.

- Adopté.


« Art. 80. Frais de route et de séjour, indemnités de séance des membres des jurys d'examen pour les grades académiques, pour le titre de gradue en lettres et pour le grade de professeur agrégé de l'enseignement moyeu de l'un et de l'autre degré, et pour le diplôme de capacité à délivrer aux élèves de la première commerciale et industrielle des athénées ; salaire des huissiers des jurys, et matériel : fr. 175,225. »

- Adopté.


« Art. 81. Dépenses du concours universitaire. Frais de publication et d'impression des Annales des universités de Belgique : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Art. 82. Subside pour encourager la publication des travaux des membres du corps professoral universitaire et pour subvenir aux frais des missions ayant' principalement pour objet l'intérêt de cet enseignement : fr. 12,000. »

- Adopté.


« Art. 83. Frais de rédaction du quatrième rapport triennal sur l'état de l'enseignement supérieur, fourniture d'exemplaires de ce rapport pour le service de l'administration centrale. (Article 3 du titre premier de la loi du 15 juillet 1849 sur l'enseignement supérieur. Charge extraordinaire : fr. 7,000. »

- Adopté.

Chapitre XVI. Enseignement moyen

Discussion générale

M. le président. - L'amendement suivant a été déposé sur le bureau :

« Amendement aux articles 88 et 90.

« Le soussigné propose de porter de 10 à 20 p. c. l'augmentation du traitement fixe, accordé aux professeurs de l’enseignement moyen, par le budget de l'intérieur, et de libeller, comme ci-dessous, les articles 88 et 90 de ce budget.

« A. Jamar.

(Suit le tableau des augmentations découlant de l’amendement, non repris dans la présente version numérisée)

M. Royer de Behr. - Je croyais qu'il avait été entendu qua la discussion du chapitre XVI serait ajournée jusqu'après le vote des chapitres suivants du budget. Le tableau que M. le ministre de l'intérieur a nous dresser ne nous a été distribué qu'hier au soir ; nous n'avons pu encore en prendre une connaissance suffisante. Voit-on de l'inconvénient à maintenir la décision que je viens de rappeler ?

M. Hymans, rapporteur. - Messieurs, on désire, paraît-il, ne pas donner à cette discussion des proportions trop vastes, et ce qui me le fait croire, c'est que j'entends dire autour de moi qu'on a l'intention de s'ajourner samedi ; eh bien, pour qu'on puisse s'ajourner samedi, je vais faire une proposition qui, je crois, conciliera tous les intérêts ; je demanderai que l'amendement de l'honorable M. Jamar soit renvoyé à la section centrale, que cet honorable membre soit entendu dans la section centrale, en même temps que M. le ministre de l'intérieur, de manière qu'on se mette d’accord pour apporter devant la Chambre une seule proposition. Il est évident que cela vaudra beaucoup mieux. Si mon honorable ami est prêt à développer sa proposition, il pourrait le faire dès à présent ; sinon, il pourrait communiquer ses idées à la section centrale qui les insérerait dans son rapport. De cette façon tout le monde serait satisfait.

M. Jamar. - M. le président, je suis prêt à développer ma proposition.

M. le président. - Vous avez la parole.

M. Jamar. - Messieurs, l'amélioration du sort des fonctionnaires de l'Etat ne sera pas, à mon sens, le moindre honneur de l'administration actuelle qui, après avoir démontré la nécessité de cette réforme, l'a entreprise avec courage, et la poursuit avec intelligence. Mais à mesure qu'apparaissent les conséquences financières de cette réforme, des tendances diverses se manifestent dans cote assemblée.

Les uns s'effrayent des sacrifices imposés au trésor, trouvent qu'on a fait trop bon marché des intérêts des contribuables, et craignent de céder a un entraînement qu'ils considèrent comme irréfléchi.

Les autres, guidés seulement par des sentiments d'humanité très respectables sans doute, mais peut-être étroit, limitent leur sollicitude au sort des fonctionnaires de l'ordre inférieur, de ceux qu'un honorable membre appelle des fonctionnaires affamés, faisant peser sans justice sur le gouvernement la responsabilité de situations pénibles assurément, mais aussi librement acceptée, et très souvent ardemment sollicitées. N'envisager la réforme administrative qu'à ce point de vue, c'est méconnaître, à mon sens, les considérations les plus sérieuses qui la rendent indispensable ; c'est justifier les hésitations de ceux qui, tout en reconnaissant que le sort des petits employés est digne de la sollicitude qu'on leur témoigne, disent qu'il y a des petits contribuables dont la situation est très fâcheuse aussi.

Sans méconnaître, messieurs, ce que ces considérations d'humanité ont de respectable, il me semble que notre grande préoccupation, c'est que le gouvernement puisse compter sur le concours d'hommes intelligents, actifs, dévoués, en leur assurant une rémunération et une position en rapport avec le talent, le zèle, ou des aptitudes indispensables pour remplir certaines fonctions.

Si l'on envisage la question à ce point de vue, on s'aperçoit bientôt que les contribuables sont plus directement intéressés que les fonctionnaires eux-mêmes à la réforme que nous complétons par la discussion des divers budgets soumis à notre approbation.

Personne ne pourrait nier l'utilité, au point de vue des contribuables exclusivement, de sacrifices faits en vue d'attirer au service de l'Etat des hommes d'élite qui trouveraient aisément dans le commerce et l'industrie des positions plus brillantes et plus lucratives.

A qui donc profiteront surtout l'intelligence et l'activité déployées dans la formation, la garde et l'emploi des finances nationales, l'administration de la justice, le maintien de l'ordre et des lois, l'organisation de la force publique, les soins de santé et de salubrité, le développement des moyens de transport et des voies de communication ? N'est-ce point au contribuable surtout, et, si nous atteignons le but que nous nous proposons, c'est-à-dire l'amélioration de l'administration à tous les degrés, les sacrifices que nous nous serons imposés seront féconds en excellents résultats.

Aussi, je pensais, en me plaçant à ce point de vue, que l'augmentation du traitement des gouverneurs était en réalité une mesure aussi démocratique et aussi justifiée que l'augmentation de traitement des plus minces employés des gouvernements provinciaux.

C'est, au reste, le système que la Chambre elle-même a voulu consacrer en votant le budget du ministère des finances. Vous avez pu remarquer dans le tableau des fonctionnaires de ce département qui vous a été soumis, que ce n'étaient pas seulement des considérations d'humanité qui avaient guidé M. le ministre des finances, mais qu'administrateur aux vues larges, l'honorable M. Frère-Orban avait pris surtout en considération les besoins du service.

Des traitements de 3,C00 fr. sont majorés de 29 et de 38 p. c. parce que, disait avec beaucoup raison M. le ministre des finances dans une note jointe à ce tableau, les premiers commis des directions doivent posséder une connaissance parfaite de toutes les branches du service et qu'il importe de prendre pour base du traitement la nature des services rendus et la somme de connaissances qu'ils exigent.

Messieurs, ce sont des considérations analogues qui m'ont engagé à soumettre à la Chambre l'amendement dont M. le président vient de donner lecture.

Dans l’émunération des besoins sociaux auxquels l'Etat doit pourvoir, (page 352) j'eusse dû placer en première ligne, comme le plus important, le plus digne de notre solitude l'instruction publique à tous les degrés.

Le ministère actuel a parfaitement compris quelle large part l'instruction devait avoir dans les préoccupations d'une administration libérale et des crédits très importants nous ont été demandés, soit pour construire des maisons d’école, soit pour améliorer la situation des instituteurs primaires.

La Chambre a accueilli toutes ces demandes de crédit de façon à prouver l'accueil qu'elle était disposée à faire à toutes propositions du même genre dont elle serait saisie par le département de l'intérieur.

Nous avons aujourd'hui à nous occuper de l'enseignement moyen, et il importe que nous fixions le traitement des professeurs de cette branche si importante de l'enseignement de manière à faire droit aux justes réclamations d'hommes dont la situation actuelle est d’autant plus pénible qu'ils occupent dans la société un rang dont les exigences les soumettent à de cruelles privations, s’ils ont à supporter les charges d'une famille même peu nombreuse.

Mais nous avons surtout à nous préoccuper, pour y porter remède, de la situation que signale le rapport de la section centrale, au point de vue de l'avenir de cet enseignement.

Les établissements destinés à former des professeurs sont presque déserts ; et si nous n'y prenons garde, le mal ira en grandissant.

La raison de cette désertion est bien simple, au reste.

Quel est le professeur qui, consulté par un élève, doué d'aptitudes remarquables, lui conseillerait d'embrasser une carrière dans laquelle, après un long labeur, son bâton de maréchal sera une chaire de professeur de rhétorique, lui valant 3,900 fr.

Aura-t-il au moins, comme les professeurs d'université, après 25 ans de services, une pension qui lui permette de vivre dans le milieu où il aura vécu jusqu'alors ? Trouvera-t-il cet otium cum dignitate si pompeusement annoncé lors de la discussion de la loi sur l'enseignement moyen ?

Jugez-en, messieurs.

Un professeur de rhétorique française, après 20 ans de services, devient impotent ; sa pension est de 801 francs, moins die 2 fr. 25 par jour ; quelque chose comme la pension d'un maréchal des logis chef de gendarmerie.

Nous ne devons donc pas nous étonner que, dans ces conditions, si peu de jeunes gens profitent des avantages qui leur sont offerts dans les cours normaux de l’enseignement moyen du degré supérieur. Il y a là une situation qui, me semble-t-il, appelle toute notre sollicitude.

La section centrale a également appelé l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le mode d'avancement qui n'est pas réglé par la loi.

En attendant que ces questions de pension et de réorganisation des cours normaux, du mode d’avancement, que la section centrale recommande à l'attention de M. le ministre de l'intérieur, puissent être résolues, je crois qu'il serait juste que, dès maintenant, nous arrivions à fixer le traitement des professeurs de l'enseignement moyen de façon à faire droit, comme je le disais, aux justes réclamations qui nous sont parvenues.

Dans plusieurs sections, on a exprimé le désir de voir majorer l'augmentation de 10 p.c. proposée par le budget ; la section centrale, de son côté, a demandé à M. le ministre que cette augmentation portât tout à la fois sur le traitement fixe et sur le minerval. Le gouvernement s’est rallié à la proposition de la section centrale. Mais, messieurs, d'après les tableaux qui nous ont été distribués hier, nous avons pu voir combien cet élément de minerval était variable dans les divers établissements. J'ai cru plus équitable de prendre le traitement fixe comme base de l'augmentation, et en vous proposant de majorer cette augmentation de 10 à 20 p. c, je crois répondre dans de sages limites aux vœux exprimés dans diverses sections.

- La proposition du renvoi de l'amendement de M. Jamar à la section centrale est mise aux voix et adoptée.

Proposition de loi

Dépôt

M. le président. - Il est parvenu au bureau une proposition de loi ; elle sera communiquée aux sections. La séance est levée à 4 1/2 heures.