(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1862-1863)
(page 229) Présidence de (M. E. Vandenpeereboom, premier vice-président.
M. Thienpont, secrétaire., procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. de Moor donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.
- La rédaction en est approuvée.
M. Thienpont présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.
« Le sieur Van Moorsel, ancien greffier de la justice de paix du canton de Mechelen, demande une augmentation de pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le conseil communal de Wulveringhem réclame l'intervention de la Chambre pour récupérer les relations postales de cette commune avec le bureau de Furnes. »
- Même renvoi.
« Le sieur Roland demande une loi tendante à prévenir les abus du cumul. »
- Même renvoi.
« Des employés au commissariat de l'arrondissement d'Ypres prient la Chambre d'augmenter, au budget de 1863, le crédit pour frais de bureau des commissaires d'arrondissement et de les assimiler aux employés des, administrations provinciales ou de les relever de l'espèce d'interdit qui les frappe. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget de l'intérieur.
« Le sieur Pierre Nokel, cultivateur et cabaretier à Ruette, né à Sivry-sur-Meuse (France), demande la naturalisation avec exemption du droit d'enregistrement. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« M. le ministre de la justice transmet, avec les pièces de l'instruction, la demande du sieur Guillaume Delange, sergent au 3ème régiment de ligne, en garnison à Anvers, tendante à obtenir la naturalisation ordinaires. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« M. Vilain XIIII, retenu par la maladie d'un de ses gendres, demande un congé d'un mois. »
- Accordé.
Les sections de janvier se sont constituées comme suit :
Première section
Président : M. Van Iseghem
Vice-président : M. Kervyn de Volkaersbeke
Secrétaire : M. de Gottal
Rapporteur de pétitions : M. Notelteirs
Deuxième section
Président : M. Grandgagnage
Vice-président : M. Van Humbeeck
Secrétaire : M. Mouton
Rapporteur de pétitions : M. Vander Donckt
Troisième section
Président : M. Goblet
Vice-président : M. de Moor
Secrétaire : M. Magherman
Rapporteur de pétitions : M. de Paul
Quatrième section
Président : M. Faignart
Vice-président : M. J. Jouret
Secrétaire : M. Thienpont
Rapporteur de pétitions : M. Frison
Cinquième section
Président : M. Muller
Vice-président : M. C. Carlier
Secrétaire : M. Braconier
Rapporteur de pétitions : M. Van Leempoel
Sixième section
Président : M. Laubry
Vice-président : M. Allard
Secrétaire : M. Bara
Rapporteur de pétitions : M. Hymans
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, dans la séance d'avant-hier, l'honorable M. H. Dumortier a demandé quelques renseignements sur l'état actuel de la révision du Code de commerce, et il a appelé l'attention du gouvernement sur la question de savoir s'il n'y aurait pas utilité et opportunité à introduire dans notre législation un nouveau genre de société connue en Angleterre, sous le nom de Limited (le second mot est illisible), c’est-à-dire société à responsabilité limitée. Comme cet objet concerne plus spécialement mon département, je crois devoir donner à l'honorable membre quelques explications sur ce point.
La commission chargée de réviser le code de commerce s’occupe aussi activement que possible de la tâche dont elle a bien voulu se charger. Cependant, je dois dire que, pendant l'été dernier, par suite de la maladie de plusieurs de ses membres, elle n'a pas pu le faire avec l'assiduité qu'elle aurait voulu y apporter et que nous eussions tous désirée. Je pense cependant qu'elle se mettra en mesure de déposer encore pendant le cours de cette session le projet de révision de cette matière importante.
Les diverses parties du code sont révisées, sauf la question des assurances, dont la commission s'occupe en ce moment. Quand elle aura élucidé ce point, elle s'occupera du titre relatif aux sociétés et notamment à la société dont je viens de parler, la société à responsabilité limitée.
Dès le 17 septembre 1862, j'ai adressé à la commission les différentes pièces et les documents relatifs à cette espèce de société, en la priant de bien vouloir en faire l'objet de son examen.
Au mois de novembre, je lui ai rappelé ma lettre précédente, en lui demandant, en même temps, à quel point étaient arrivés les travaux de révision du code de commerce. M. le président m'a adressé sa réponse à la date du 20 novembre, et m'a fourni les renseignements que je viens de donner à la Chambre.
Messieurs, quant à la nécessité, à l'utilité et aux avantages qu'il y aurait à introduire les sociétés à responsabilité limitée dans notre législation, je ne puis me placer au même point de vue que l'honorable membre qui nous a interpellé à ce sujet dans la séance d'avant-hier.
L'honorable membre semble croire que notre législation présente de très grandes lacunes, que la société à responsabilité limitée offre de très grands avantages, des avantages tels qu'elle exercerait en quelque sorte de l'influence sur le développement industriel et commercial de la nation et que, par suite de l'absence de dispositions semblables, nous ne serions pas dans de bonnes conditions de concurrence avec les nations voisines.
Je crois, messieurs, que cela n'est pas tout à fait exact, qu'au moins il y a là quelque exagération.
Qu'est-ce, en effet, que la société à responsabilité limitée, telle qu'on l'entend en Angleterre et telle qu'on l'entend en France, en France où l'on a déposé un projet de loi à ce sujet dans la séance du 16 mai dernier, si j'ai bonne mémoire ?
La société à responsabilité limitée n'est autre chose que la société anonyme moins l'intervention du gouvernement.
M. Julliot. - C'est la société en commandite.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est une erreur. C'est, je le répète, la société anonyme moins l'intervention du gouvernement.
M. Orts. - C'est très exact.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Voilà ce que c'est que la société à responsabilité limitée.
Quand et comment a-t-elle été introduite dans la législation anglaise ?
Messieurs, la société anonyme était peu admise en Angleterre.
L'anonymat ou la responsabilité limitée n'y existait que d'une manière tout à fait exceptionnelle. Il a été accordé jusqu'en 1838, je pense, exclusivement par le parlement et, jusqu'en 1838 et même jusqu'en 1856, il y avait à peine quelques sociétés anonymes autorisées en Angleterre.
L'anonymat n'avait été accordé qu'à de grands établissements et à des chemins de fer.
Ainsi, la compagnie des Indes était une société anonyme. La Banque était une société anonyme. Il y en avait encore quelques autres.
Mais la règle générale et je dirai presque absolue en Angleterre, c'était la société à responsabilité illimitée, qui fait peser sur tous les membres une responsabilité telle que, dans certains cas, pour un intérêt très minime que l'on avait dans une affaire, on pouvait être complètement ruiné.
Voilà quelle était la situation en Angleterre jusqu'en 1838.
En 1838, un acte du Parlement a autorisé les lords du Board of trade à accorder le privilège de la responsabilité limitée à diverses sociétés, mais il paraît que cette forme était si peu appréciée en Angleterre, que les lords du Board n'en firent pour ainsi dire pas usage. C'est à tel point que je lisais hier, dans la Revue des économistes, qu'ils n'en firent pas usage du tout.
C'est en 1856 que, pour la première fois, l'on organisa avec certaines (page 230) précautions, avec certaines garanties, la société à responsabilité limitée.
Dans la réalité ces sociétés datent en Angleterre de 1836 et elles y ont pris naissance parce que l'on n'avait pas comme en Belgique, une disposition qui permettait au gouvernement d'accorder l'anonymat aux sociétés qui le demandent.
Nous avons ici la société anonyme. La seule différence entre la société à responsabilité limitée telle qu'elle existe en Angleterre et la société anonyme telle qu'elle existe chez nous c'est, comme je le disais tantôt que l'une se constitue librement, dans les conditions que la loi établit, et que l'autre est autorisée par le gouvernement.
Nous avons donc à notre disposition le moyen que les Anglais possèdent et le gouvernement en a fait usage à telle enseigne qu’il il y a en Belgique un très grand nombre de sociétés anonymes et qu'elles embrassent toutes les branches de l'activité industrielle et commerciale.
J'en faisais hier, ici même, un relevé dans un volume publié en 1857, et jusqu’à cette date, je comptais qu'il s'était établi en Belgique 202 sociétés anonymes ; parmi ces sociétés on compte :
Sociétés financières, 13
Sociétés d'assurances, 32
Sociétés de chemins de fer, 21
Sociétés de charbonnages, 33
Sociétés métallurgiques, 34
Routes, ponts, canaux, 30
Sociétés diverses, 39.
Sous ce rapport donc, le mouvement industriel et commercial, dans notre pays, n'a pas été arrêté faute de dispositions relatives à l'association des capitaux.
Cette question, messieurs, nous l'examinons à un autre point de vue. Nous l'examinons avec le désir de pouvoir dégager complètement le gouvernement de toute intervention en cette matière, de laisser aux particuliers le droit de se constituer sans que le gouvernement ait besoin d'approuver leurs statuts. Mais cette matière est extrêmement difficile, beaucoup plus difficile qu'on ne le croit, et je déclare qu'on ne pourrait pas, aujourd’hui, se borner à déclarer purement et simplement que les sociétés à responsabilité limitée se constitueront comme elles l'entendront sans que la législature exige aucune espèce de garantie.
M. H. Dumortier. - Personne ne le demande.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Personne ne le demande ? Cela n'empêche pas qu'avant de penser à l'abrogation pure et simple de la disposition qui soumet l'anonymat à une autorisation du gouvernement, il y a des règles à tracer, des conditions à prescrire.
M. H. Dumortier. - Proposez-les.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je n'ai pas la prétention d'improviser une législation quelconque et encore moins d'improviser une législation aussi difficile que celle-là.
J'ai dit tantôt à l'honorable membre que dès le 17 septembre, j'avais adressé à la commission tous les documents qui étaient de nature à éclairer cette question. Au mois de novembre je lui ai rappelé cette affaire. Je m'en suis occupé moi-même très activement. Je ne puis, je le répète, improviser une législation pareille, et je ne pense pas que l'honorable membre qui m'interrompt puisse le faire plus que moi.
Je disais donc, messieurs, qu'il était impossible de supprimer purement et simplement l'article du code de commerce qui prescrit l’intervention du gouvernement, qu'il était impossible de laisser les sociétés à responsabilité limitée se constituer comme elles l'entendent, et la raison en est simple.
On discutait hier la question de savoir si l'anonymat ou la responsabilité limitée était un privilège ou n'en était pas un. Eh bien, pour moi, il est évident que la responsabilité limitée, l'anonymat est un privilège. C'est un privilège au point de vue du droit commun.
- Un membre. - Du droit commun que vous établissez.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - On me dit ; Du droit commun que j'établis. Nullement, c'est le droit commun que la loi, c'est le droit commun que le Code civil établit. Le droit civil déclare, et je crois qu'ici la raison est conforme à la loi ou plutôt que la loi est conforme à la raison, le droit civil déclare que quiconque s'oblige, s'oblige sur tous ses biens mobiliers et immobiliers. Voilà le principe, la règle générale. Or. que faites-vous par l'anonymat ou par la société à responsabilité limitée.
Vous donnez à quelqu'un le droit de traiter, de s'engager et de ne s'obliger cependant que jusqu'à concurrence d'une certaine somme qu'il a déterminée d'avance en la versant dans la société. Voilà en quoi consiste l'avantage ou le privilège ; j'appelle privilège ce qui sort du droit commun. Par cela seul que vous jouissez du privilège ou de l'avantage de n'être tenu que jusqu'à concurrence de la somme que vous avez déclaré vouloir consacrer à une affaire, il s'ensuit que vos opérations peuvent occasionner un grand dommage aux tiers ainsi qu'aux actionnaires, et l'on comprend qu'il est nécessaire que des garanties soient prises, que le législateur trace des règles pour sauvegarder les droits des tiers et les intérêts des actionnaires. Quand le gouvernement autorise aujourd'hui la constitution d'une société anonyme, que fait-il ?
Ce n'est pas une simple autorisation qu'il donne, il demande que l'on introduise dans les statuts des dispositions qui garantissent les tiers et les actionnaires. A ce titre, l'intervention du gouvernement est indispensable.
Le gouvernement protège les tiers et les actionnaires en vérifiant le capital social, en déterminant les cas de dissolution de la société, les règles et les formes des délibérations et de la surveillance.
Voilà les garanties qu'il assure aux actionnaires et aux tiers qui traitent avec eux. Ainsi, en déclarant que la société sera dissoute le jour où les trois quarts du capital seront perdus, il veille aux intérêts des tiers qui traitent avec la société, parce que, même en cas de mauvaises affaires, il. restera toujours un quart du capital excédant ses dettes.
Le gouvernement introduit donc dans les statuts des sociétés des garanties, des dispositions très tutélaires pour les tiers et pour les actionnaires.
Quel changement y a-t-il maintenant à apporter à cet état de choses ? Il y a lieu de rechercher quelles sont les dispositions qui sont de nature à produire cet effet salutaire, de les coordonner et de les faire consacrer par le législateur.
Il y a lieu de faire décréter des règles générales applicables à toutes les sociétés, auxquelles ces sociétés devront toutes se soumettre.
Ces règles demandent à être étudiées avec soin et examinées de très près. En France, on a proposé un projet de loi qui contient beaucoup de garanties ; cependant il a été critiqué en France par de très bons esprits, parce qu'il ne contient pas des garanties suffisantes pour les tiers qui traitent avec ces sociétés. C'est le reproche principal qu'on fait à ce projet ; on prétend que les tiers, qui traiteront avec ces sociétés, seront exposés à des pertes.
Je crois qu'on parviendra à sauvegarder tous les intérêts, qu'un projet de loi pourra être présenté à la Chambre, et que le gouvernement pourra être débarrassé du soin d'autoriser l'institution des sociétés anonymes. Mais la chose n'est pas facile, parce qu'il n'est pas facile de trouver de garanties qui puissent s'adapter indistinctement à toutes les sociétés qui se créent. Il s'agit de sauvegarder les intérêts des actionnaires et les intérêts des tiers qui traitent avec eux ; et il faut éviter d'aller trop loin, soit d'un côté, soit de l'autre. Si l'on est trop sévère pour les administrateurs, on s'expose à ne pas avoir d'administrateurs ; si, au contraire, on se relâche trop, on est exposé à des abus de toute espèce : ces abus ont déjà fait modifier, à différentes reprises, la législation des sociétés en France, et hier encore je lisais qu'un nouveau projet venait d'être présenté au corps législatif, relativement aux sociétés en commandite. Les changements que l'on a fait subir à la législation française prouvent combien il est difficile de régler cette matière d'une manière convenable.
Je ne puis pas entrer ici dans les détails de toutes les garanties qu'il faudrait accorder ; ce serait discuter toute la loi, car la loi aura uniquement pour objet les garanties générales qu'il conviendra de stipuler.
Dans la séance d'hier, l'honorable M. Bara a appelé l'attention du gouvernement sur un autre objet, sur l'exécution des jugements rendus en pays étrangers, sur la nécessité de prendre des mesures pour que ces jugements puissent être exécutés en Belgique.
L'honorable M. Bara a fait observer qu'il faut assurer à l'étranger le droit et les moyens d'obtenir cette exécution, que les idées humanitaires, les idées de fraternité se développent tous les jours et que les relations de peuple à peuple s'étendent et se multiplient continuellement.
Il a rappelé, à cette occasion, la loi de 1837 qui a admis l'étranger à succéder en Belgique ; il a rappelé la loi hypothécaire de 1851 et il nous convie à appliquer le même principe dans un autre ordre d’idées, en ce qui concerne l'exécution des jugements.
Messieurs, la Belgique a fait un pas bien marqué dans la voie des idées de justice universelle et de fraternité.
(page 231) Notre loi de 1836 a rendu la loi pénale belge applicable aux Belges qui commettent un crime à l'étranger contre un étranger. Elle contient évidemment une satisfaction tout à fait humanitaire, tout à fait conforme aux règles de la morale absolue.
Cependant, messieurs, l'exemple de la Belgique n'a pas été suivi. En France, par exemple, on a proposé en vain à ce sujet deux lois : l'une en 1842, l'autre en 1852.
Jusqu'à présent, en France, l'article 7 du Code d'instruction criminelle continue à subsister, et, d'après cet article, le crime commis à l'étranger par un Français n'est puni que s'il a été commis contre un Français.
Vingt-six ans se sont écoulés depuis l'époque où la Belgique a introduit cette disposition dans sa législation, et nos plus proches voisins ne nous ont pas encore suivis dans cette voie.
Il y a, messieurs, un très grande différence entre la matière dont s'est occupé hier l'honorable M. Bara, et celle qui a été réglée par la loi de 1851, aux termes de laquelle les hypothèques consenties à l'étranger peuvent servir de base à une inscription en Belgique. De quoi naît l'hypothèque ? D'un contrat. Or, autre chose est un contrat, qui n'est que l'expression de la volonté des individus, et autre chose est un jugement, qui est un acte émané d'une autorité étrangère.
Il y a là, à mon avis, une première différence tout à fait capitale. Une seconde différence, c'est que lorsqu'on se présente devant un fonctionnaire étranger pour faire constater ses conventions, on choisit ce fonctionnaire, on a confiance en lui. Mais quand il s'agit d'un jugement, vous ne choisissez pas votre juge, le choix de votre juge dépend de circonstances qui sont plus ou moins indépendantes de votre volonté, qui souvent même sont complètement indépendantes de votre volonté dans l'état actuel de la législation.
Nous ne pouvons donc pas appliquer les principes de la loi sur les hypothèques à la matière qui nous occupe. Ce sont des choses complètement différentes.
D'un autre côté, il ne faut pas se dissimuler qu'il est impossible de régler cette matière par un acte unilatéral. On a pu écrire dans une loi belge qu'un contrat consenti en pays étranger, devant un fonctionnaire étranger, servira de base à une inscription hypothécaire en Belgique, sans porter préjudice aux intérêts du citoyen belge ; on ne pourrait pas décider que les jugements étrangers seront rendus exécutoires au moyen de l'accomplissement d'une simple formalité. Cette impossibilité, je vais vous la prouver par une raison palpable.
Aujourd'hui, dans l'état actuel de la législation de nos voisins et particulièrement de la France, aux termes de l'article 14 du Code civil, le Français a le droit d'assigner des Belges en France, devant les tribunaux français, pour des obligations même contractées en pays étrangers. Ainsi un Français traiterait en Belgique avec un Belge ; il pourrait retourner en France et assigner le Belge devant les tribunaux français, pour l'exécution des engagements contractés par lui en Belgique. Eh bien, si ce Belge est condamné à Paris, par exemple, prétendra-t-on qu'il faut rendre ce jugement exécutoire en Belgique ?
Quant à moi, c'est un système que je combattrai toujours. Je ne puis admettre qu'il soit possible de régler cette matière par un acte unilatéral ; il faudrait commencer par abroger complètement l'article 14 du Code civil.
Il serait inadmissible qu'un Belge pût être distrait de son juge et être appelé, par exemple, devant les tribunaux de Paris, alors que vous ne pourriez pas, en matière purement personnelle, s'il était domicilié à Bruxelles, l'attraire devant le tribunal d'Anvers. Une convention est donc nécessaire à cet égard mais ici l'on rencontre de très grandes difficultés, difficultés que je ne veux pas aborder aujourd'hui. Veuillez-le remarquer, messieurs, on demande des facilités dans l’intérêt des rapports internationaux ; mais c'est une chose très grave que de toucher à la compétence, c'est une chose très grave que d'exposer un citoyen à être distrait de ses juges, et il ne m'est pas démontré du tout que si, sous ce rapport, vous touchez d'une manière sérieuse à votre législation, vous atteindriez le but que vous vous proposez.
Je me demande si, par exemple, l'individu qui voudrait traiter une affaire ne craindrait pas de s'engager, s'il savait que, en cas de procès, il doit subir un changement de compétence ; cette crainte, il ne l'éprouverait pas, s'il avait la certitude de n'être point soustrait à la juridiction de son juge naturel.
Pour mon compte, si j'étais en présence d'un engagement qui pût m'entraîner devant des juges étrangers, j'hésiterais certainement beaucoup plus que je ne le ferais si la contestation, le cas échéant, devait être portée devant des juges belges et jugée en vertu de lois dont je connais les principes et l'interprétation.
Je dis que, sous ce rapport, il y a beaucoup à réfléchir et qu'il ne m'est pas démontré que si l’on modifiait d'une semblable manière nos lois sur la compétence, si l'on consentait trop facilement à une espèce d'union judiciaire complète qui permettrait aux parties d'attraire tantôt devant les tribunaux belges, tantôt devant les tribunaux étrangers, on manquerait complètement le but qu'on se propose.
Je reconnais qu'il y a différentes choses à faire, mais il ne faut procéder qu'avec beaucoup de circonspection. Ainsi, par exemple, on pourrait, au moyen d'une convention, arriver à déclarer qu'un jugement rendu en pays étranger entre étrangers, qui ultérieurement se trouvent en Belgique, pourra être rendu exécutoire en Belgique, moyennant certaines formalités qui n'entraîneraient cependant plus l'examen du fond.
Voilà un des cas où je comprends parfaitement des conventions avec l'étranger. J'admets encore qu'une convention internationale puisse régler l'hypothèse, où une partie aurait formellement déclaré qu'en cas de contestation elle accepterait telle ou telle juridiction, fût-ce une juridiction étrangère.
Faut-il aller plus loin, faut-il déterminer des règles de compétence autres que celles qui existent aujourd'hui, faut-il supprimer l'article 14 du code civil ?
Ce sont là des points sur lesquels j'entends réserver complètement mon opinion ; car, je le répète, c'est une chose très grave d'introduire de nouvelles règles dans cette matière : ces règles pourraient avoir des conséquences diamétralement opposées au but que l'on poursuit ; elles porteraient, en outre, atteinte à ce qu’on est convenu d'appeler la souveraineté nationale.
Du reste, messieurs, il y a longtemps qu'on s'occupe de cette question ; c'est une des premières que j'ai étudiées à mon entrée au ministère en 1850, et, que l'honorable M. Bara me permette de le lui dire sans la moindre intention de le désobliger, c'est se faire illusion que de croire que de pareilles questions se résolvent aussi facilement qu'il se l'imagine.
En 1850, la France avait fait des propositions relativement à l'exécution réciproque des jugements dans les deux pays. J'examinai ces propositions et j'y trouvai tout d'abord deux lacunes importantes. La première était relative à la répression des crimes commis par les Français en Belgique ; la seconde était relative à la répression des délits qui se commettent notamment sur nos frontières.
Sur nos frontières, au vu et au su de tout le monde, les délits forestiers et les délits de maraudage se commettent tous les jours, et il est en quelque sorte impossible d'en obtenir la répression. Il m'a paru que ces deux points étaient fort importants et qu’ils devaient nécessairement faire partie des négociations ; du moment qu'on s'occupait d'un traité que j'appellerai judiciaire, j'ai cru qu'il y avait lieu de stipuler que les crimes et délits commis par des Français en Belgique seraient réprimés comme nous réprimons les crimes et délits commis par les Belges en France.
J'ai également cru qu'il fallait réclamer les moyens d'atteindre et de punir les auteurs des délits forestiers et des délits de maraudage qui te commettent sur nos frontières ; qu'il fallait au moins, de commun accord, chercher à arriver à la répression de ces délits. Eh bien, depuis 1850 jusqu'aujourd'hui, cette affaire n'a pas avancé ; elle est restée au même point, bien que mes honorables prédécesseurs MM. Faider et Nothomb s'en soient occupés également.
L'honorable M. Bara voit donc qu'avec la meilleure volonté il est bien difficile d'aboutir aussi rapidement qu'il semble le croire.
Pour me résumer sur ce point, messieurs, je dis que cette matière ne peut pas être réglée simplement par une loi.
Je dis qu'il est impossible de prendre une mesure unilatérale, de décréter d'une manière générale que les jugements rendus à l'étranger seront exécutoires en Belgique ; ce n'est que par des traites qu'on peut arriver à consacrer ces principes dans certaines limites.
L'honorable M. Bara voudrait que le gouvernement présentât tout au moins un projet de loi pour se faire autoriser à traiter.
Je ne suis pas de cet avis ; je crois, messieurs, qu'il est préférable, si un traité se conclut, qu'il soit soumis à la législature.
Je crois qu'il ne faut pas donner facilement de semblables autorisations au gouvernement, parce qu'elles peuvent avoir des inconvénients même pour le gouvernement qui en serait nanti. Il peut y avoir des pays où se trouvent des institutions judiciaires qui n'offriraient pas de garanties. Mieux vaut que le gouvernement n'ait pas le pouvoir de traiter dans des cas semblables.
Une loi qui autoriserait purement et simplement le gouvernement à traiter eu cette matière présenterait plus d'inconvénients que d'avantages.
Ce n'est que quand les principes sont admis qu'on peut exceptionnellement accorder au gouvernement une semblable autorisation.
(page 232) L’honorable M. Bara nous a parlé de principes du droit international privé, il a dit que c’était un véritable chaos, il a cité un arrêt qui décide qu’un étranger n’a pas d’action en Belgique pour faire établir son droit à une succession.
Il a parlé du droit d’ainesse ; je ne pense pas cependant que le droit d'aînesse ait été mis en question dans l'affaire dont il nous a entretenus hier, je ne trouve pas les principes du droit international si compliqués qu’il le pense ; l'arrêt qui a été rendu ne me semble pas impliquer des points de droit international ; il s'agissait tout simplement d'une question de procédure.
Voici quel était le cas : un Hollandais, qui n'avait pas son domicile en Belgique vint à décéder, laissant pour légataire universel une société hollandaise ; un parent du défunt assigna la société hollandaise afin de se faire adjuger l’héritage. Voilà dans quels termes se présentait la question.
La cour a décidé qu'aux termes de l'article 59 du code de procédure la question devait être portée devant le tribunal du lieu où la succession s’était ouverte et que le lieu de l'ouverture de la succession était indiqué par l'article 110 du code civil qui fixe ce lieu au domicile du défunt, voilà ce qui a été décidé. Je dois avouer que je vois là bien plus une question de procédure qu'une question de droit international.
M. Bara, quand on l'a interrompu en objectant que ce n'était pas une question immobilière, a répondu que c'était la même chose. C'est une erreur ; quand il s'agit d'immeubles, la question est résolue par l'articles 5 du code civil.
M. Bara. - Ce n'est que quand son droit personnel a été consacré qu'ils obtient des droits sur les immeubles.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il s'agissait de toute la succession, de la question d'hérédité ; le principe est que les questions d'hérédité doivent être portées devant le tribunal du lieu où la succession s'est ouverte.
Il n'y a rien d'exorbitant dans cette décision qui vous envoie plaider devant le juge de votre domicile. S'il se fût agi d'une cause immobilière, les tribunaux belges eussent été compétents et ils eussent appliqué la loi belge ; je ne vois, je le répète, rien d'exorbitant dans cet arrêt, je n'y vois que l'application des principes. La même question se serait présentée à propos d'un Belge décédé dans un arrondissement autre que celui où il a son domicile, que la même décision aurait été rendue.
Je ne sais pas quelles dispositions législatives l'honorable membre voudrait introduire à raison de cet article. S'il voulait proposer un projet de loi, il trouverait que cette loi entraînerait plus d'inconvénients que d'avantages. Est-ce par une loi qu'on dessaisira les tribunaux étrangers des questions qui intéressent les étrangers ? Nous avons le droit de régler ce qui concerne les Belges ; si nous voulons aussi régler ce qui intéresse les étrangers, nous risquerons de toucher à la loi étrangère qui règle la matière des successions et de mettre les législations en conflit.
Si on décrétait que les tribunaux belges seront compétents pour régler les droits à la succession d'un étranger mort en Belgique et n'y ayant pas son domicile, on irait très loin, car celui qui n'a pas son domicile en Belgique en a un quelque part. Si les tribunaux belges avaient à décider à qui appartient cette succession, quels sont les héritiers, ils se mettraient en opposition avec la législation du pays où la succession s'est ouverte. Pour éviter des embarras, nous nous exposerions à en créer d'autres plus grands.
L'honorable M. Bara nous a reproché de n'avoir cas dans nos départements des comités chargés d'étudier les législations étrangères.
Je puis lui donner l'assurance qu'il ne se publie à l'étranger aucun ouvrage sur la législation qui ne nous soit à l'instant connu.
Toutes les fois qu'une question de législation est résolue à l'étranger, nous nous procurons tous les documents nécessaires pour nous en rendre un compte exact.
Tout ce qui se discute soin ce rapport à l'étranger est immédiatement examiné et étudié dans le département.
Quand nous nous sommes occupés du Code pénal, nous avons réuni tous les traités, tous les travaux que pouvaient nous fournir les législations étrangères.
Ainsi encore pour les sociétés à responsabilité limitée, avant que le projet fût déposé en France nous connaissions la législation nouvelle introduite en Angleterre, et nous avions formé notre opinion sur ce qu'elle avait d’incomplet et d'inapplicable à notre pays.
Enfin M. Bara a demandé s'il n'y avait pas lieu de créer une chaire de droit international dans nos universités. Cet objet ne me concerne pas ; il concerne mon collègue de l'intérieur. Je dois cependant faire une observation : c’est que quand on discute une loi sur l'enseignement, on prétend que les élèves sont surchargés, qu'ils ont trop de matières à étudier ; faut-il encore en ajouter une au programme ? Ne vaudrait-il pas mieux les restreindre ?
J'entrerais plutôt dans cette dernière voie.
Un mot, messieurs, sur ce qui a été dit dans les séances d'hier et d'avant-hier relativement à la législation sur la successibilité des étrangers en Belgique.
Cette législation, messieurs, la législation belge surtout qui ne remonte qu'à 1837, a été jugée très sévèrement, trop sévèrement à mon avis.
La loi de 1837 a été un adoucissement à la législation du Code civil.
Sous ce rapport déjà c'était un progrès dans l'ordre des idées qui ont été défendues, et que je partage en plusieurs points.
Ensuite, messieurs, le principe de la réciprocité qu'elle consacre n'est pas aussi injuste qu'on le soutient.
Il n'est pas si injuste au point de vue du droit des gens, et je crois, c'est du reste ce que constatait le rapport dont l'honorable M. Bara a donné lecture hier en partie, je crois que c'est grâce au principe de la réciprocité que le droit d'aubaine a' été supprimé dans beaucoup de pays de l'Europe.
Cette législation a eu sa raison d'être à une époque donnée.
M. de Boe. - Pas dans ce siècle-ci.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Comme principe international du droit des gens, je regarde la règle de la réciprocité comme une chose parfaitement soutenable, parfaitement juste. C'est ce qui a été soutenu dans la discussion de 1837.
M. de Boe. - Quand il s'agit d'avantages, oui ! mais pas quand il s'agit de la négation de droits naturels.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Vous ne pouvez pas argumenter des inconvénients particuliers que le principe peut produire lorsque vous vous placez au point de vue du droit des gens.
Ce principe du droit des gens est souvent la seule arme qu'une nation puisse employer contre une autre et le seul moyen de prévenir, par un mal, un mal plus grand encore.
M. de Boe. - Dans quel cas ?
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Le cas, entre autres,. qui nous occupe.
Les idées généreuses, les idées de justice, d'équité universelle ne se réalisent pas d'une manière également prompte dans tous les pays, et la réciprocité peut être très souvent un moyen de peser sur un pays voisin et de l'amener à faire des concessions qu'il ne ferait pas si vous lui accordiez d'emblée tous les avantages de votre législation, de sorte qu'au point de vue du droit des gens le principe de la réciprocité peut fort bien se défendre.
Maintenant s'il ne doit plus produire d'effet, j'admets qu'il doit disparaître de la législation.
Ce sont des armes qu'il faut avoir dans les mains dans certains cas, mais dont il ne faut plus user lorsqu'elles ne peuvent plus produire de résultats.,
Telle est, messieurs, mon opinion à cet sujet.
Je bornerai là mes observations.
M. Bara. - Messieurs, la réponse que M. le ministre de la justice vient de faire aux observations que j'ai présentées hier, me prouve une chose, c'est que le droit international privé est beaucoup plus embrouillé et beaucoup plus difficile qu'il ne croit, car il n'a pas complètement compris, peut-être à cause de l'obscurité de mon langage, les observations que je lui ai soumises.
M. le ministre de la justice invoque d'abord des principes en matière de droit international criminel.
Je dois, sur ce premier point, lui répondre que les principes ne peuvent pas être les mêmes en matière criminelle et en matière de droit civil ; que la justice criminelle procède entre les nations d'un tout autre ordre d'idées.
La justice criminelle, c'est l'exercice du pouvoir, non seulement quant à l'exécution des jugements, mais aussi quant à la constatation du fait criminel ; tandis que dans la justice privée, il y a des contrats, des questions de fait, des questions liant les particuliers, et là l’imperium, la force exécutoire du gouvernement étranger n’est pas engagée.
Ainsi donc, de ce qu'un gouvernement se refuse à exécuter un jugement criminel prononcé à l’étranger, il n'en résulte nullement que vous puissiez prétendre user de représailles à l'égard des jugements civils.
C'est une matière complètement différente, et si M. le ministre de la justice veut exiger des concessions en ce qui concerne la justice criminelle pour obtenir une bonne législation internationale privé, selon moi, il se trompe.
On ne peut faire d'union judiciaire criminelle et civile d'une manière liée, simultanée. Il faut séparer ces deux matières. On vous a dit, (page 233) messieurs : Il nous est impossible d'admettre l'exécution en Belgique de jugements civils et commerciaux étrangers, il en résulterait de graves abus.
Mais, messieurs, examinons le principe de notre législation. En vertu des articles 14 et 15 du Code civil, la justice belge peut juger un étranger. Assurément, vous admettez que si elle juge un étranger, elle le fera avec impartialité.
Eh bien, votre jugement , qui sera une chose sérieuse dans votre esprit, vous ne pouvez l'exécuter à l'étranger. C'est une lettre morte d'après vos principes.
Dès que votre jugement, qui doit être l'expression de la vérité, ira au-delà de la frontière, il n'est plus exécutoire, il n'a plus aucune valeur. Et l'étranger a le droit d'agir contre vous de cette façon parce que vous ne voulez pas de la force exécutoire pour ces jugements dans votre pays.
Mais, dit M. le ministre de la justice, pour que la théorie que j'ai défendue hier soit appliquée, il faut supprimer les articles 14 et 15 du code civil. Il ne faut pas permettre à l'étranger, au Français par exemple, de pouvoir assigner le Belge en France, pour une convention, pour un marché qui aura eu lieu en Belgique, parce qu'alors le Belge ne choisit plus son juge, parce qu'il est distrait de son juge naturel.
Le contrat a eu lieu en Belgique, il faut que la contestation soit jugée en Belgique. C'est un point important d'avoir les formes garantissantes de la justice de son pays.
Je reconnais tout cela avec M. le ministre de la justice, je ne demande pas mieux que d'arriver à la suppression des articles 14 et 15, mais il n'a pas bien compris ma théorie, et la voici.
Vous avez un contrat en Belgique avec un Français. Le Français vous assigne en France. Eh bien, si vous ne voulez pas de la justice française, si vous prétendez qu'elle sera partiale à votre égard, ne vous défendez pas. N'allez pas en France.
le ne vous ai pas demandé l'exécution des jugements par défaut, mais bien l'exécution des jugements contradictoires et définitifs.
Comment ! vous allez devant un tribunal français, sans soulever d'exception, vous avez la même législation qu'en Belgique, vous passez par les trois degrés de juridiction, vous êtes condamné ; et quand on a un jugement contre vous, vous passez la frontière et vous dites : Je me moque de la chose jugée et nous allons discuter de nouveau en Belgique.
Est-ce la de la justice universelle ?
Est-ce un principe que l'on puisse accepter ?
Je dis que c'est le renversement de toutes les notions de la morale.
On dit encore que le Belge assigné à l'étranger ne choisit pas son juge. Mais lorsqu'il traite avec un étranger il sait qu'il peut être assigné dans le pays de cet étranger.
Pourquoi ne fait-il pas des conventions particulières qui sauvegarderont ses droits dans notre pays et lorsqu'on aura obtenu un jugement étranger contre lui et qu'on voudra l'exécute : ?
On peut convenir que les jugements pris à l'étranger ne seront pas exécutoires dans le pays, et celui qui aura fait une pareille stipulation en sa faveur, pourra l'opposer devant nos tribunaux lorsqu'on demandera la force exécutoire pour un jugement prononcé contre lui.
Mais vous ne faites rien. Vous savez que l'étranger a le droit de vous assigner dans son pays ; vous allez plaider avec lui devant les tribunaux étrangers, et puis, vous refusez l'exécution du jugement. Cela n'est pas juste.
On vous dit, messieurs, que les jugements ne doivent pas être rendus exécutoire quand même, dans toutes les conditions, dans toutes les circonstances. Je le sais parfaitement bien. Aussi, qu'ai-je dit quand j'ai présenté mes observations hier ? J'ai dit qu'un jugement rendu à l'étranger ne devait être déclaré exécutoire par les tribunaux belges que lorsque le jugement aurait été définitif, que lorsqu’il aurait été constaté qu'il a été rendu selon les formes judiciaires du pays dont il émane, par un tribunal compétent, qu'il n'est contraire ni au droit public belge, ni à des droits réels, ni à une question d'état ou de capacité de personne, ni à l’ordre public, ni aux bonnes mœurs. Et vous trouvez qu'il n'y a pas, dans toutes ces exceptions, que le national pourra soulever des garanties suffisantes pour que les lois politiques de notre pays, pour que les lois d'intérêt national soient sauvegardées !
Mais, messieurs, ce n'est pas une thèse nouvelle que je défends, ce n'est pas une élucubration d'un esprit pressé de devancer l'avenir, mais c'est une thèse défendue que tous les jurisconsultes, par tous les auteurs en matière de droit international privé, et c'est un principe admis par la plupart des Etats européens, comme je vais vous le démontrer.
Messieurs, l'on ne rencontre guère un principe contraire que dans la législation française qui est excessivement hostile à l'étranger, qui a été faite, ainsi que je l'ai dit hier, plutôt pour servir d'arme contre l'étranger que pour satisfaire des sentiments de justice que l'on doit manifester envers les autres nations.
En Autriche, en Prusse, en Bavière, dans le Wurtemberg, dans toute la Confédération germanique, dans les Etats pontificaux, dans la Sardaigne, dans le Danemark, dans les duchés de Holstein et de Schleswig, les jugements étrangers sont appliqués sans révision du fond, mais sous la condition de réciprocité.
Eh bien, je dis à M. le ministre de la justice et à M. le ministre des affaires étrangères : Voilà des peuples avec lesquels vous pouvez traiter. Vous pouvez accorder à ces peuples l'exécution des jugements pris chez eux, et vous aurez aussi l'exécution de vos jugements sur le territoire de ces nations.
En Angleterre et aux Etats-Unis l'on va plus loin : les tribunaux peuvent ordonner l'exécution de tous les jugements, même sans réciprocité. Le jugement constitue un titre, et vous trouverez dans Fœlix, Traité du droit international privé, que tous les auteurs de droit international privé sont unanimes, quant à l'opinion que les jugements rendus à l'étranger doivent être appliqués sans révision du fond.
Et cela n'est pas difficile à exécuter. L'honorable ministre de la justice paraît croire que c'est une observation qui émane de moi, mais j'ai vu un président de tribunal de première instance des plus capables, homme d'expérience dont M. le ministre ne contestera pas les lumières, M. Lelièvre, président du tribunal de Gand, venir soumettre un projet en règle pour l'exécution des jugements étrangers.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je l'ai lu depuis longtemps.
M. Bara. - Eh bien, si les hommes pratiques qui voient les choses de près, si les auteurs se réunissent pour déclarer qu'il y a quelque chose à faire, est-ce trop d'appeler l'attention du gouvernement, de lui demander de vouloir agir, de faire en sorte de parer aux difficultés et aux lenteurs que nécessite l'exécution des jugements étrangers ?
On aura beau dire : Mais nous ne devons pas mettre en suspicion la justice des autres pays ; nous voulons que notre justice soit respectée. Eh bien, quand nous reconnaissons chez les autres pays une justice aussi éclairée, aussi impartiale, a ssi probe que la nôtre, nous ne devons pas, sur des que lions de droit j rivé, discuter à nouveau. '
Et savez-vous ce qui arrive ? C'est que, quand on soumet à nos tribunaux un jugement des tribunaux étrangers, nos juges sont presque forcés par solidarité de les accepter, parce que la justice humaine repose sur des règles universelles qui doivent être admises par tous. Ces jugements sont des présomptions difficiles à renverser, et il faut des motifs bien graves, des motifs d'ordre public pour qu'ils soient révisés par nos tribunaux. Ainsi, ordinairement, l'on obtient en fait, mais après des procédures interminables, ce que je voudrais voir obtenir uniquement par un texte de loi.
Messieurs, l'honorable ministre s'occupant de la succession des étrangers en Belgique, disait qu'il était bon d'user quelquefois du système de réciprocité. Eh bien, je crois pouvoir dire que ce système est condamné. Les idées généreuses feront qu'il finira par disparaître. Quand vous avez fait du tort à une nation, vous n'en profiler pas, ce tort retombe sur vous-mêmes. Les nations sont solidaires ; c'est ce que je disais hier. Et voyez ce qui se passe. Nous sommes dans un état de civilisation avancée, notre prospérité est immense. Eh bien, nous sommes très loin de l'Amérique, et nous éprouvons le contre-coup des malheurs de l'Amérique du Nord. C'est que toutes les nations se tiennent. Tout dommage éprouvé par un peuple est ressenti par tous.
Je dis donc que le système de réciprocité ne peut être maintenu. Nous ne pouvons, nous peuple avancé, nous peuple civilisé (et c'est notre droit de revendiquer ce titre), parce que l’Angleterre commet une injustice à notre égard, renoncer aux principes de la justice. Ces principes, nous devons les maintenir dans nos codes. Imitons la France, elle a renoncé au principe de la réciprocité et je crois que nous pouvons parfaitement faire de même.
Mais je disais que la proposition de l'honorable M. de Boe n'était pas complète, en ce sens que le chaos que notre droit international présente était tel, qu'il était impossible, même avec la réforme qu'il voulait porter à la loi de 1837, d'obtenir le but qu'il se proposait d'atteindre, et j'ai cité comme preuve un arrêt de 1859. J'ai dit : Supposons que par une loi vous déclariez l'Anglais habile à succéder en Belgique ; eh bien, vous n'aurez rien fait. Et voici le cas que j'ai supposé.
Un Anglais meurt, laissant deux enfants mâles. Sa succession comprend des immeubles situés en Belgique. Le cadet se présente devant les tribunaux belges, assigne l'aîné et vient dire : Les immeubles m'appartiennent pour moitié en vertu de la loi belge. Que fait le tribunal ? Il lui (page 234) répond : Je suis incompétent, parce qu'il s'agit d'une contestation entre étrangers et au sujet d'une succession qui n'a pas été ouverte en Belgique.
Voilà donc le tribunal incompétent et le cadet ne peut faire reconnaître son droit. Il doit se pourvoir devant la justice anglaise. Et que dira la justice anglaise ? Elle dira que tous les biens immeubles situés en Belgique appartiennent à l'aîné.
M. le ministre de la justice me répond : Mais c'est une question de statut réel. C'est une erreur complète.
Dans le cas de l'arrêt de 1859, il s'agissait d'un parent qui revendiquait toute une succession contre une société qui avait été instituée par le défunt. Il y avait des immeubles, il pouvait au moins y en avoir dans la succession. L'héritier avait à se faire reconnaître comme héritier. C'était donc une question de statut personnel et non une question de statut réel.
Car avant de savoir s'il avait un droit sur les immeubles, il fallait savoir quelle était la qualité du revendiquant ; il fallait que le tribunal décidât qu'il était héritier et ce n'était qu'ensuite que le droit réel pouvait être décidé.
Je dis donc qu'il y a lieu de réviser notre législation et qu'il y a lieu d'y introduire des dispositions plus conformes à l'esprit de nos institutions et au développement de nos relations avec l'étranger.
Il est donc évident, messieurs, que les étrangers ne pourraient pas venir discuter entre eux des questions de successions relatives à des biens situés dans le pays.
Je soutiens, messieurs, qu'il y a autant de successions que de biens, que quand il s'ouvre une succession relative aux biens d'un étranger situés en Belgique, il se forme immédiatement une sorte d'être moral composé de tous ces biens et de toutes ses obligations dans le pays et que les tribunaux belges ont le droit de vider toutes les difficultés relatives à cette succession : mais si vous admettez la théorie contraire, où arriverez-vous ? C'est que vous consacrerez toutes les absurdités des législations étrangères en matière de successions, c'est que vous devriez passer par toutes les dispositions injustes et quelquefois immorales du droit étranger. Que feriez-vous si des Belges et des étrangers étaient intéressés dans la même succession ?
Décideriez-vous selon la loi belge ou selon la loi étrangère ? Vous voyez donc que ma théorie d'un être moral est beaucoup plus rationnelle que la théorie consacrée par l'arrêt de la cour d'appel de Bruxelles.
J'ai dit, messieurs, et je répète que le droit international est dans l'enfance, qu'il est dans le chaos, et qu'il faut s'efforcer de l'en faire sortir. Les observations que j'ai présentées au gouvernement n'ont pas pour but d'arriver à un résultat immédiat. Je n'ai pas prétendu que MM. les ministres de la justice et des affaires étrangères devaient mettre l'Europe en demeure de souscrire au plus tôt aux principes d'un code international à faire par la Belgique, j'ai demandé seulement que le gouvernement voulût bien agiter ces questions et pousser avec activité à leur solution.
Il suffit de lire les ouvrages qui ont été écrits sur ces matières, pour se convaincre qu'il y a des progrès à réaliser, et notre pays devrait considérer comme un devoir et un honneur de travailler à obtenir cet important résultat.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, si je n'ai pas compris mon honorable adversaire, il me paraît que de son côté il ne m'a pas compris davantage.
En effet, messieurs, je crois avoir dit une chose extrêmement simple lorsque j'ai parlé de l'article 7 du code d'instruction criminelle ; je n'ai pas le moins du monde confondu les jugements en matière criminelle avec les jugements en matière civile ; je n'ai pas dit un mot de l'exécution des jugements rendus en matière criminelle.
Voici ce que j'ai dit et ce qui me paraît incontestable. L'honorable membre avait parlé des principes d'humanité et de fraternité universelle ; j'ai répondu que la Belgique a fait un grand pas dans cette voie, par la loi de 1836, en punissant les Belges qui commettent des crimes ou des délits à l'étranger.
Cette loi est évidemment la consécration d'un principe de justice et de morale absolue.
J'ai ajouté qu'il est regrettable que la Belgique n'ait pas été suivie dans cette voie par une nation voisine, et que, du moment qu'il s'agissait de faire un traité relativement aux matières judiciaires, la première chose à faire c'était de stipuler des garanties contre les voies de fait, les actes de violence, les crimes et délits qui pourraient être commis par des étrangers dans le pays.
Il me semble qu'il y a là quelque chose d'extrêmement rationnel. Il est beaucoup plus important pour la Belgique de voir punir les crimes et les délits commis sur son territoire par des étrangers, que d'admettre l'exécution en Belgique des jugements rendus par les tribunaux étrangers.
Il faut, avant tout, assurer la répression des crimes et délits.
Pour ma part, je ne signerai jamais un traité judiciaire qui ne commencera pas par garantir à la Belgique les avantages que la loi de 1836 accorde aux pays étrangers.
Le premier point à stipuler quand on ouvrira des négociations, c'est que les étrangers qui commettraient des crimes ou des délits en Belgique, soient punis comme les Belges qui commettent des crimes ou des délits à l'étranger. C'est ce que j'ai fait en 1850, car, je le répète, dès 1850 je me suis occupé de la question soulevée par l'honorable membre.
Voilà ce que j'ai dit, je n'ai donc fait aucune confusion entre les jugements rendus en matière criminelle et les jugements rendus en matière civile. Je ne me suis pas occupé de l'exécution, je me suis occupé exclusivement de la question de principe, de l'admission par les pays étrangers des principes que la Belgique a adoptés en 1836, et je crois qu'il est peu de membres dans cette Chambre qui ne partageront pas complètement ma manière de voir.
Maintenant, messieurs, je répète, et sous ce rapport l'honorable membre ne m'a rien répondu, je répète qu'il est impossible d'accorder l'exécution des jugements rendus en pays étrangers par une mesure unilatérale ; il est impossible de déclarer, par un acte du législateur, que les jugements rendus en pays étrangers sont exécutoires en Belgique ; on ne pourrait le faire sans s'exposer aux plus graves inconvénients. (Interruption.)
Vous avez demandé qu'une loi déclarât les jugements rendus à l’étranger exécutoires en Belgique. (Nouvelle interruption.)
Voici vos paroles :
« Messieurs, il suffirait de quatre articles pour mettre un terme à toutes les difficultés, à toutes les lenteurs occasionnées par l'exécution des jugements étrangers en Belgique, et il est évident qu'une pareille loi serait très utile à notre commerce et à notre industrie ; elle serait acceptée avec plaisir par toutes les personnes qui ont des intérêts à l'étranger.
« En définitive, si l’on ne veut pas du principe général de l'exécution des jugements étrangers en Belgique, si l’on croit qu'il est des nations dont la justice n'est pas impartiale, dont les lois ne sont pas conformés à la justice universelle, eh bien, que le projet autorise le gouvernement à traiter avec les nations dont les législations sont justes, loyales, sont reconnues tout aussi bonnes que la nôtre. Ainsi, nous pourrions très bien avoir de pareils traités avec la France, avec l'Angleterre, avec la Hollande et d'autres peuples. Il ne pourrait en résulter aucun inconvénient. »
Vous demandez donc une loi en 4 articles qui admette l'exécution en Belgique de tous les jugements rendus à l'étranger ; c'est je pense contre cette idée aussi que l'honorable M. Orts a protesté. Eh bien, aussi longtemps qu'il sera permis aux étrangers de poursuivre, dans leur pays, les Belges, il sera impossible d'admettre l'exécution de ces jugements, qui rendrait les Belges justiciables des tribunaux étrangers. Il ne peut pas y avoir de traité sans que l'article 14 du code civil disparaisse..
Aussi dans tous les projets de traités qui ont été faits, on a admis comme règle générale qu'il faut poursuivre le débiteur devant ses juges naturels, à moins qu'il n'y ait élection de domicile, à moins qu'on n'ait accepté d'autres juges.
Il s'agit, messieurs, de modifier profondément toutes les dispositions qui existent aujourd'hui et dans le Code civil et dans le Code de procédure, et ce n'est pas, comme le croit l'honorable membre, ce n'est pas au moyen de 4 articles qu'on pourra le faire.
Mais, a dit l'honorable membre, si un étranger vous assigne à comparaître devant un tribunal étranger, n'allez pas vous défendre, laissez-vous condamner.
Le conseil est facile à donner ; mais il n'est pas toujours aussi facile à suivre ; et même dans certains cas, il ne peut pas être suivi.
Ainsi, lorsque le Belge aura des biens dans le pays où il sera assigné à comparaître en justice, il devra bien aller s'y défendre, ou quand il y aura des affaires qui le forcent à s'y rendre de sa personne, il devra encore le faire, car en sa qualité d'étranger, il serait soumis à la contrainte par corps.
Le Belge attrait devant une justice étrangère, en vertu de l'article 14, ne peut donc pas se laisser condamner par défaut ; et de ce qu'il se sera défendu on ne peut pas en conclure qu'il a accepté volontairement la justice étrangère et que les décisions doivent devenir exécutoires en Belgique contre lui.
L'honorable membre a cité plusieurs nations qui ont introduit ce principe dans leur législation.
Je ne le conteste pas ; mais le besoin de traiter avec ces nations ne s'est guère fait sentir jusqu'à présent en Belgique.
La nation avec laquelle nous avons, à ce point de vue, le plus de rapport, c'est la nation française ; c'est avec elle que les premières négociations (page 235) ont été entamées, et je regrette de devoir le dire, si elles n'ont pas abouti, à mes yeux la principale cause de ce fait, c'est précisément qu'on n'est pas tombé d'accord sur les différents points que j'ai signalés tout à l'heure.
Messieurs, je ne reviendrai pas sur l'arrêt qui a été cité. Ce sont des discussions de droit qui n'ont pas de rapport avec le budget dont nous nous occupons ; nous n'avons à traiter en ce moment que des matières qui se rattachent plus ou moins intimement au budget des affaires étrangères.
M. de Vrière. - Messieurs, mon intention n'est pas de demander à M. le ministre des affaires étrangères des renseignements sur la marche de nos négociations avec les Pays-Bas ; je veux au contraire éviter de prononcer une seule parole que le gouvernement pourrait considérer comme inopportune en ce moment.
Mais il y a une phase de ces négociations qui est passée à l'état de fait accompli, et à laquelle la plus grande publicité a été donnée. C'est sur ce point seulement que je désire présenter quelques considérations à la Chambre.
Les journaux nous ont appris que le traité conclu avec les Pays-Bas au sujet des prises d'eau à la Meuse avait été rejeté par la seconde chambre des états généraux. .
Le fait est regrettable ; et j'avoue qu'il m'a péniblement surpris, parce que cette affaire avait fait, pendant presque tout le cours de mon ministère, l'objet de longues et laborieuses négociations pendant lesquelles les intérêts néerlandais avaient été défendus avec un talent et une persévérance remarquables.
Mais ce qui est encore plus regrettable, c'est l'attitude qu'a prise, dans cette circonstance, le cabinet de La Haye et particulièrement son honorable ministre des affaires étrangères.
Il résulte des discours d'un assez grand nombre de membres des états généraux les faits suivants : M. le ministre des affaires étrangères aurait demandé au cabinet de Bruxelles un délai pour les ratifications du traité.
Il aurait ensuite fait connaître au gouvernement belge que le cabinet nouveau répudiait l'acte de ses prédécesseurs. Enfin, il aurait soumis le traité aux débats du parlement de son pays, tout en y prenant une attitude telle, que le rejet du traité devait nécessairement s'ensuivre.
Voilà les faits qui résultent des discours de la plupart des membres qui ont pris part aux débats.
M. le ministre des affaires étrangères n'a pas contredit ces assertions ; seulement il a soutenu qu'il avait respecté la liberté du parlement, en n'usant pas de la connaissance qu'il avait de l'affaire, connaissance par suite de laquelle il aurait pu faire ressortir bien davantage les inconvénients du traité. Un membre des états généraux s'était exprimé en ces termes : « J'ai fait dépendre pour ainsi dire mon vote, dans la séance du 15 mai, d'une déclaration que j'attendais du gouvernement. Qu'est-ce ? que j'ai dit alors ? Voterai-je en faveur de ce projet de loi ? Je ne puis le faire, car le gouvernement a déclaré qu'il prendrait en considération quelle serait la proposition à faire au roi dans le cas où le projet serait approuvé par les deux Chambres, et j'ai ajouté : Ces paroles doivent bien signifier que le gouvernement proposera au roi de ne point ratifier le traité... Je mettais ainsi mon vote à la disposition du gouvernement.
« Si le ministre avait déclaré que j'étais dans l'erreur, que telle n'était pas l'intention du gouvernement, j'aurais dû donner ma voix à ce traité ; le gouvernement avait le pouvoir de faire cette déclaration ; mais en ne la faisant point il me fortifia dans mon opinion, et fit une certitude de ce qui n'avait été qu'une hypothèse de ma part. »
Qu'a répondu M. le ministre des affaires étrangères ?
« Le moment n'était pas venu, dit-il, de décider cette question (celle des ratifications). Mais qui, demande-t-on, doit assumer la responsabilité dans cette affaire, la Chambre ou le cabinet ?
« Quant à moi, M. le président, en tant que j'ai pris part à ce qui est arrivé, j'en assume volontiers la responsabilité. »
Je regrette, messieurs, de devoir dire qu'en confirmant ainsi, par ses paroles, l'attitude qui lui était reprochée, l'honorable ministre a perdu de vue les notions les plus élémentaires du droit public. Lorsqu'un ministre des affaires étrangères traite avec un gouvernement étranger, ce n'est pas sa responsabilité, ce n'est pas sa personne qu'il engage ;, il engage l'Etat au nom duquel il stipule.
M. de Renesse et d'autres membres. - C'est cela.
M. de Vrière. - Il engage l'Etat dont il est le représentant ; d'où il suit que quels que soient les ministres qui se succèdent, aucun d'eux ne peut, sans violer les engagements de l'Etat, se soustraire à aucune des obligations que comportent les traités conclus par ses prédécesseurs, d'après des règles universellement admises dans les relations internationales.
Un traité, régulièrement signé par les plénipotentiaires de deux ou plusieurs Etats est un acte complet quant à l'exécution des obligations réciproques qu’il contient, en tant que l'exécution des engagements dépende des contractants.
La prérogative parlementaire est naturellement toujours réservée dans les pays constitutionnels.
Le gouvernement ne peut pas être responsable des conséquences de l’exercice de cette prérogative ; mais c'est pour lui à la fois un devoir de convenance, et une conséquence obligée des engagements contractés, d'employer toute son influence pour que ces engagements reçoivent l'approbation de la représentation nationale.
Lorsqu'un gouvernement traite avec un autre gouvernement, il n'a pas à considérer quelles sont les personnes qui occupent le pouvoir ; il lui suffit que ces personnes aient le caractère public ou les pouvoirs nécessaires pour engager l'Etat au nom duquel ils négocient. C'est pour cela que les plénipotentiaires chargés de négocier un traité sont munis de pleins pouvoirs délivrés par le souverain.
Si de l'un ou de l'autre côté le ministère change de main, les négociations peuvent être arrêtées, rompues ; mais les actes accomplis subsistent ; et quels que soient les représentants nouveaux du gouvernement qui a contracté, ils ne peuvent, sans manquer à la fois aux règles du droit commun et aux devoirs internationaux, répudier, directement ou indirectement, les conventions conclues par des plénipotentiaires munis du mandat du chef de l'Etat.
Tels sont les principes universellement admis.
Un traité, pour être complet, doit aussi être ratifié. Mais en laissant entendre que si les deux Chambres adoptaient le traité relatif aux eaux de la Meuse, le gouvernement ne proposerait point au roi de ratifier ce traité, où bien même, en laissant seulement planer des doutes à cet égard ; l'honorable ministre me paraît, encore une, fois, avoir oublié tous les principes en cette matière. Il est de règle, en effet, que la ratification est un devoir, sauf dans des cas très exceptionnels, c'est-à-dire dans le cas où les plénipotentiaires auraient excédé leurs pouvoirs ; et, dans ce cas, on les désavoue ; ou bien encore lorsque l'état des choses est changé depuis la conclusion du traité.. Voilà quelle est la doctrine, et aucune autre ne saurait prévaloir, parce qu'en l'absence de ces règles la conclusion d'un traité perdrait tout caractère positif, ce qui n'est pas admissible. Les actes internationaux les plus importants, un traité de paix par exemple, seraient, jusqu'après l'échange des ratifications, non seulement subordonnés à toutes les vicissitudes ministérielles, mais livrés au caprice d'un ministre ; il en résulterait cette conséquence fâcheuse que la confiance disparaîtrait entre les négociateurs, et qu'il y aurait des gouvernements avec lesquels on hésiterait de traiter.
Messieurs, je n'aurais pas entretenu la Chambre de cet incident sans la large publicité qu'il a reçue par les discussions qui ont eu lieu au sein des états généraux...
Je ne demande point d'explications à M. le ministre des affaires étrangères. Il sera toujours temps pour l'honorable ministre de nous donner ces explications lorsque toutes les affaires qui font l'objet des négociations seront terminées.
Je suis, d'ailleurs, certain que M. le ministre des affaires étrangères aura agi en cette circonstance de manière à garantir la dignité et l'intérêt du pays.
Mais, alors qu'aux états généraux les critiques les plus sévères se sont fait entendre au sujet d'une attitude qui paraissait, chez nos voisins, fâcheuse plus encore au point de vue des relations avec la Belgique que tous le rapport des principes internationaux, il eût pu paraître étrange que dans cette enceinte pas une voix n'exprimât un regret sur ce qui s'était passé.
Je ne puis, messieurs, terminer mes observations sans exprimer le vif plaisir que j'ai éprouvé en trouvant dans la plupart des discours qui ont été prononcés aux états généraux à l'occasion de l'incident dont j'ai entretenu la Chambre, les paroles les plus sympathiques pour la Belgique.
J'aimerais à citer des passages de plusieurs de ces discours si je ne craignais d'abuser des moments de la Chambre.
- Plusieurs membres. - Non ! non ! citez.
M. de Vrière. - J'ai sous la main un cahier contenant tous ces discours ; il n'en est pour ainsi dire pas un seul qui ne contienne l'expression des sentiments les plus bienveillants pour la Belgique, et surtout celle des regrets de ce qui s'est passé, au point de vue de la bonne entente nécessaire entre les deux pays. Je me bornerai, messieurs, à vous citer quelques paroles d'un des (page 236) membres de la deuxième chambre des états généraux, les plus éminents, par le talent et le caractère, et qui a été l'un de ceux qui se sont exprimés dans les termes les plus modérés.
Voici, messieurs, les paroles de l'honorable M. Groen Van Prinsteren :
« Quoique je ne désire pas plus que M. le ministre, que des intérêts soient sacrifiés à des sympathies, je suis également d'avis que si l'on a mal agi dans l'espèce, cet acte est doublement regrettable, parce qu'il frappe la Belgique.
« J’attache tant de valeur à une bonne entente avec la Belgique, que si le gouvernement s'appropriait le projet étendu et radical qui nous a été exposé dans la séance d'hier, et si ce projet admettait une seule exception, je désirerais l'appliquer à la Belgique.
Ce sont là des sentiments entièrement conformes à ceux que nous professons, nous Belges, à l'égard de la nation néerlandaise.
Nous aussi, nous désirons que les liens les plus étroits unissent les deux pays, et voilà pourquoi surtout, nous déplorons, nous devons déplorer tout acte, tout procédé qui pourrait jeter un nuage sur les rapports de sincère amitié que nous avons à cœur d'entretenir avec nos voisins. (Très bien ! très bien !)
Messieurs, encore un mot : Nous avons d'autres intérêts très importants à régler avec les Pays-Bas ; peut-être cette coexistence de plusieurs questions pendantes n'a-t-elle pas été entièrement indifférente à l'attitude que le cabinet de La Haye a prise à l'occasion du dernier traité ; cela me semble résulter d'une réponse du ministre des affaires étrangères à une interpellation.
Le ministre a déclaré à la Chambre qu'il avait sollicité du cabinet belge que l'affaire de la Meuse fût traitée simultanément avec la question de l'Escaut. La Belgique, a dit le ministre, a autant d'intérêt à ce que la question de l'Escaut soit résolue, que la Hollande en a à voir résoudre la question de la Meuse. Je ne vois pas, personne ne verra d'analogie entre la question du péage de l'Escaut et la question des eaux de la Meuse.
Voilà pourquoi je crains qu'il n'y ait sous les paroles que je viens de citer une fâcheuse illusion.
La Belgique n'a pas d'autre intérêt à terminer l'affaire de la Meuse que celui très à considérer, je le reconnais, de faire disparaître un sujet de plainte de la part des Pays-Bas, et pour cet intérêt seul elle s'était résignée à des sacrifices importants.
Il n'en est pas de même de la question de l'Escaut ; là l'intérêt pour la Belgique peut être plus actuel, plus immédiat, mais il est également considérable pour les Pays-Bas, parce que dans cette affaire il y a une question qui toucha aux intérêts commerciaux et aux principes maritimes du monde entier.
Dans mon opinion, quelle que soit l’issue que recevra la négociation qui se poursuit relativement au péage de l'Escaut, il ne se passera pas beaucoup de temps avant que cette question soit résolue par la seule force des choses.
Personne assurément ne violera les traités ; mais je crois qu'on peut tenir pour certain que cette entrave au commerce général, qui est en même temps une déviation grave au grand principe de la liberté des fleuves, disparaîtra, comme ont disparu ses aînés, le droit du Sund et celui de Stade.
Quant à la Belgique qui s'est imposé volontairement mais précairement la charge du remboursement du péage à tous les pavillons, alors que, d'après les traités, la navigation belge n'était frappée qu'à l'égal de celle des autres pays, je n'hésite pas à dire que si les négociations relatives à ce péage n'aboutissaient pas à un arrangement équitable, j'ai la profonde conviction qu'il ne serait pas possible au gouvernement belge, quel que fût le cabinet, de maintenir longtemps la charge de plus en plus onéreuse et de plus en plus impopulaire du remboursement.
- La discussion générale est close.
La Chambre passe à la discussion des articles.
« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement du personnel des bureaux : fr. 131,355. »
- Adopté.
« Art. 3. Matériel : fr. 37,600. »
- Adopté.
« Art. 4. Achat de décorations de l’ordre de Léopold, sans que l'on puisse augmenter ce chiffre par des imputations sur d'autres articles : fr. 10,000. »
- Adopté.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - J'étais occupé à m'entretenir avec mes collègues lorsque l'article 2 a été voté ; j'avais cependant une observation à faire sur cet article.
M. le président. - Personne ne s'oppose à ce que M. le ministre des affaires étrangères prenne la parole sur l'article 2 ? (Non ! non !) La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - C'est une simple observation de détail. D'après le rapport même de la section centrale, si l'article 2 était voté tel qu'il est, je serais dans l'impossibilité de traiter certains fonctionnaires de mon ministère comme le sont les fonctionnaires du même grade des autres départements. Je veux parler des directeurs et du secrétaire général.
Je demande une augmentation de 1,250 francs à l'article 2. La section centrale elle-même a fait remarquer l'inégalité que je signale. Le chiffre de l'article 2 serait porté à 132,605 fr.
- L'article 2, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.
« Art. 5. Autriche : fr. 49,750. »
- Adopté.
Art. 6. Confédération germanique : fr. 36,750. »
- Adopté.
« Art. 7. France : fr. 55,500. »
- Adopté.
Art. 8. Grande-Bretagne : fr. 68,000. »
- Adopté.
Art. 9. Italie : fr. 55,250. »
- Adopté.
Art. 10. Pays-Bas : fr. 44,750. »
- Adopté.
Art. 11. Prusse : fr. 44,750. »
- Adopté.
Art. 12. Russie : fr. 68,000. »
- Adopté.
Art. 13. Brésil : fr. 21,000. »
- Adopté.
Art. 14. Danemark, Suède et Norvège, etc. : fr. 18,500. »
- Adopté.
Art. 15. Espagne : fr. 21,000. »
- Adopté.
Art. 16. Etats-Unis : fr. 21,000. »
- Adopté.
Art. 17. Portugal : fr. 18,500. »
- Adopté.
Art. 18. Turquie : fr. 41,500. »
- Adopté.
Art. 19. Indemnités à quelques secrétaires et attachés de légation : fr. 17,000. »
- Adopté.
« Art. 20. Traitements des agents consulaires, et indemnités à quelques agents non rétribués : fr. 168,000. »
M. le président. - La section centrale, d'accord avec le gouvernement, propose de distraire 4,000 francs de ce chapitre pour les porter à l'article 25. Par conséquent, l'article serait réduit à 164,000 francs. »
- L'article, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 21. Frais de voyage des agents du service extérieur et de l'administration centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses : fr. 70,500. »
- Adopté.
« Art. 22. Perception des droits de chancellerie et bureau de la librairie à Pans. Personnel : fr. 5,740. »
- Adopté.
(page 237) « Art. 23. Frais divers: fr. 360.”
- Adopté.
« Art. 24. Indemnités pour un drogman et autres employés dans diverses résidences en Orient : fr. 10,380. »
- Adopté.
« Art. 25. Frais de correspondance de l'administration centrale avec les agences, ainsi que des agences entre elles ; secours provisoires à des Belges indigents ; achat et entretien de pavillons, écussons, timbres, cachets ; achat de publications nationales et étrangères ; achat, copie et traductions de documents ; abonnement aux journaux et écrits périodiques étrangers ; frais extraordinaires et accidentels : fr. 75,120. »
M. le président. - C'est ici que s'appliquerait le transfert des 4,000 francs distrait de l'article 20, ce qui porterait ce chiffre à 79,120 fr.
- L’'article, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 26. Missions extraordinaires, traitements d'agents politiques et consulaires en inactivité et dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 47,000. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Je ne demande pas une augmentation du chiffre, mais un simple changement du libellé.
Je propose à la Chambre de retrancher les mots : « d'agents politiques et consulaires » et de dire d'une manière générale « traitements d'inactivité. »
Par suite de la réorganisation des bureaux, il y aura quelques employés qui devront être mis en inactivité.
Du reste cela n'augmente pas la dépense du budget ; je laisse le chiffre tel qu'il est.
Avec le changement que je propose, les mots « traitements d'inactivité, » sont applicables tant aux fonctionnaires de l'administration centrale qu'aux agents extérieurs.
M. le président. - M. le ministre propose de retrancher les mots : « agents politiques et consulaires » et de dire : « traitements d'inactivité. »
- L'article, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 27. Ecole de navigation. Personnel : fr. 18,720. »
- Adopté.
« Art. 28. Ecole de navigation. Frais divers : fr. 8,080. »
- Adopté.
« Art. 29. Chambres de commerce : fr. 12,500. »
- Adopté.
« Art. 30. Frais divers et encouragements au commerce : fr. 48,800. »
- Adopté.
« Art. 31. Encouragements de la navigation à vapeur entre les ports belges et les ports étrangers. (Pour mémoire. Voir l'article 2 de la loi.) »
« Art. 32. Service de navigation à vapeur entre Anvers et le Levant, remboursement des droits de tonnage, de pilotage, de phares et fanaux (crédit non limitatif) : fr. 20,276 »
- Adopté.
Art. 33. Pêche maritime. Personnel : fr. 7,722 50. »
- Adopté.
« Art. 34. Subsides aux caisses de prévoyance des pêcheurs et encouragements à la pêche maritime, et à l'éducation pratique des marins : fr. 87,050. »
M. le président. - La section centrale propose sur le chiffre de 87,050 fr. une réduction de 5,000 fr.
Le gouvernement se rallie-t-il à cette modification ?
M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Je m'en rapporte à la décision de la Chambre.
- Le chiffre de 82,050 fr. proposé par la section centrale est adopté.
« Art. 35. Personnel : fr. 173,357 50. »
M. le président. - La section centrale, d'accord avec le gouvernement, propose d'augmenter ce chiffre de 6,000 fr. qui seraient pris sur l'article 45. Ce n'est qu'un transfert. Le chiffre avec l'augmentation serait donc porté à 179,357 fr. 50 c.
- Ce chiffre est adopté.
« Art. 36. Personnel : fr. 25,494. »
- Adopté.
« Art. 37. Personnel. Traitement : fr. 225,583 50. »
- Adopté.
« Art. 38. Personnel. Remises aux pilotes et aux receveurs du pilotage et des droits de fanal (crédit non limitatif) : fr. 258,000. »
- Adopté.
« Art. 39. Remboursement de droits à l'administration néerlandaise, aux termes de l'article 50 du règlement du 20 mai 1843. Restitution de droits.Pertes, par suite des fluctuations du change, sur les sommes à payer à Flessinguc (crédit non limitatif) : fr. 13,500. »
- Adopté.
« Art. 40. Personnel : fr. 14,860. »
- Adopté.
« Art. 41. Personnel. Traitement. : fr. 33,117. »
- Adopté.
Art. 42. Personnel. Primes et remises (crédit non limitatif) : fr. 4,000. »
- Adopté.
Art. 43. Personnel : fr. 30,843 50. »
- Adopté.
« Art. 44. Personnel chargé de services spéciaux, en disponibilité, en non-activité et non encore replacé : fr. 51,116. »
- Adopté.
« Art. 45. Dépenses diverses. Charges ordinaires : fr. 487,614.
« Charges extraordinaires : fr. 308,300. »
M. le président. - Par suite du transfert de 6,000 fr. à l'article 35, le chiffre de 487,614 fr se trouve réduit à 481,614 fr.
- L'article ainsi réduit est adopté.
« Art. 46. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 2,300. »
- Adopté.
Art. 47. Secours à des fonctionnaires, employés et marins, à leurs veuves ou enfants, qui, sans avoir droit à la pension, ont des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 2,000. »
- Adopté.
La Chambre décide qu'elle passera immédiatement au vote définitif du budget.
L'amendement apporté à l'article 2 est définitivement adopté.
La Chambre passe à l'examen du projet de loi.
« Art. 1er. Le budget du ministère des affaires étrangères est fixé, pour l'exercice 1863, à la somme de deux millions neuf cent quatre-vingt-sept mille sept cent quatre-vingt-sept francs (fr. 2,987,787), conformément au tableau ci-annexé. »
- Adopté.
« Art. 2. Les fonds qui, à la clôture de l'exercice 1862, resteront disponibles sur les sommes reportées des exercices antérieurs pour être employées à titre d'encouragement de la navigation entre la Belgique et les ports étrangers, pourront être transférés à l'article 31 du budget de 1863. »
- Adopté.
(page 238) Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du budget.
73 membres répondent à l'appel nominal.
70 membres votent pour le budget,
2 membres votent contre.
1 (M. Hymans) s'abstient.
En conséquence, le budget est adopté. Il sera transmis au Sénat,
Ont voté l'adoption : MM. Kervyn de Lettenhove, Kervyn de Volkaersbeke, Landeloos le Bailly de Tilleghem, Magherman, Moreau, Mouton, Muller, Nothomb, Orban, Orts, Pirson, Rodenbach, Rogier, Royer de Behr, Sabatier, Tack, Tesch, Thibaut, Thienpont, Van Bockel, Vanden Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Renynghe, Van Volxem, Wasseige, Allard, Bara, Coppens, Crombez, Debaets, de Baillet-Latour, de Boe, de Breyne, de Brouckere, De Fré, de Haerne, de Liedekerke, de Mérode, de Montpellier, de Moor, de Pitteurs-Hiegaerts, de Renesse, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Devaux, de Vrière, d'Hoffschmidt, Dolez, B. Dumortier, H. Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Frison, Goblet, Grandgagnage, Guillery, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, M. Jouret, Julliot et E. Vandenpeereboom.
Ont voté le rejet : MM. Snoy et de Naeyer.
M. le président. - Le membre qui s'est abstenu est invité à faire connaître les motifs de son abstention.
M. Hymans. - Je n'ai pas voté contre le budget, parce que je ne veux pas entraver les services publics.
Je n'ai pas voté pour, parce que je ne puis accepter le principe sur lequel repose l'augmentation des traitements des membres du corps diplomatique.
- La séance est levée à quatre heures et demie.