(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1861-1862)
(page 1333) (Présidence de M. Vervoort.)
M. de Florisone, secrétaire, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. de Boe, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Florisone, secrétaire, présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« Le sieur Puraye prie la Chambre de l'exempter du droit d'enregistrement, si la naturalisation qu'il sollicite lui est accordée. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« Le sieur Geubelle demande que le projet de loi sur l'organisation judiciaire fixe à 1,800 francs les traitements des greffiers des justices de paix des cantons ruraux et permette à ces fonctionnaires soit d'occuper un emploi de receveur ou de secrétaire communal, soit d'exercer une branche de commerce ou d'industrie. »
- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner le projet de loi.
« Par dépêche du 20 mai, M. le ministre de la justice transmet à la Chambre, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation du sieur Hochets (Pierre), caporal au 8ème de ligne. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« M. Royer de Behr, retenu pour affaires urgentes, demande un congé. »
- Accordé.
M. le président. - La discussion est ouverte sur la disposition proposée par M. Devaux, à placer après l'article 99. Cette disposition est ainsi conçue :
« Les condamnés à la détention, ainsi que les condamnés à l'emprisonnement pour délits politiques, peuvent être expulsés du territoire belge pour le temps de leur peine qui n'est pas accompli, et sous la condition que, s'ils rentrent en Belgique, ils continueront à subir leur peine antérieure qui sera diminuée du temps qu'ils ont passé à l'étranger. »
M. Guillery. - Je regrette, messieurs, que la commission n'ait pas cru pouvoir adopter la proposition de l'honorable M. Devaux, qui me paraît dictée par une idée généreuse d'abord et de plus par la saine appréciation du caractère des peines en matière politique.
Je voudrais même, et c'est une idée que je soumets à l'honorable M. Devaux, que l'on donnât plus d'extension au droit de réduire les peines en un simple exil. Car il ne faut pas perdre de vue qu'il ne s'agit pas ici de la conversion arbitraire d'une peine d'emprisonnement ou de toute autre peine en expulsion du pays, en exil. Il s'agit de l'exercice du droit de grâce, c'est-à-dire d'étendre ce droit en accordant au Roi le droit de substituer l'exil, qui n'est pas une peine prévue par le nouveau Code, à la peine de la détention.
D'après le rapport présenté au nom de commission du Code pénal, il semblerait que la peine du bannissement, je dirai plutôt de l'exil, puisqu'il ne s'agit plus de peine infamante, peut être arbitrairement appliquée à toute personne qui, dans l'intérêt de la société, devrait être enfermée dans une maison de détention.
En limitant cette proposition aux délits politiques, il est évident que l'auteur de l'amendement ne permet la conversion de la détention en exil qu'au profit de personnes dont les délits se trouvent être des délits relatifs à certains pays, à certaines législations.
C'est pourquoi je crois que l'on pourrait étendre cet amendement, ce système aux condamnations pour délit politique, quelles que fussent du reste ces condamnations.
La commission du Code pénal repousse l'idée, je ne dirai pas de cette peine, mais de cette commutation de peine ; parce que, suivant elle, l'exil ou le bannissement sont d'abord inefficaces, et ensuite, seraient de nature à ne pas même constituer une véritable répression, parce qu'ils ne sont pas une punition suffisante.
Quant à l'inefficacité de la peine, je ne puis pas admettre que, dans beaucoup de circonstances, le fait d'expulser du pays un coupable ne soit pas le remède le plus souhaitable à apporter aux maux dont il peut avoir été la cause. Il y a des délits de pure convention. Il y a des faits, des opinions, qui sont un délit dans un pays, qui sont un mérite dans un autre. Etre républicain aux Etats-Unis ou en Suisse est un mérite ; être républicain dans un pays monarchique est souvent un délit, du moins lorsque cette opinion se manifeste par des actes extérieurs. Etre royaliste en Amérique est un délit. Etre partisan de l'abolition de l'esclavage dans les Etats du Sud est un crime et même un des crimes les plus graves.
Ainsi donc, souvent la seule chose que l'on puisse demander à un homme dont les convictions, dont les principes ne peuvent pas se plier à certaines organisations politiques, à un homme qu'un attachement, un sentiment de fidélité exagéré peut-être à une grande infortune peut entraîner à un délit politique, la seule chose qu'on puisse lui demander, c'est qu'il quitte le pays.
La commission voit toutes les personnes expulsées pour délits politiques formant sur la frontière des conspirations. Cela peut arriver, sans doute, mais cela n'arrivera pas toujours, et c'est au gouvernement de savoir quand il peut user du droit dont il s'agit.
C'est le gouvernement qui décidera si, oui ou non, l'article peut être appliqué. Où donc est le danger ?
La commission croit-elle que le ministre de la justice, que le conseil des ministres aura moins de sollicitude dans chaque cas déterminé, que la commission du Code pénal qui, en définitive, n'a pas la responsabilité qui pèse sur le gouvernement ? Tout homme condamné pour délit politique n'est pas nécessairement un conspirateur à l'étranger, et tout complot que l'on peut faire à l'étranger n'est pas toujours excessivement dangereux pour le pays auquel il peut s'appliquer.
Je crois donc que la peine de l'exil est très souvent une peine efficace en ce qu'elle fait sortir du pays une personne qui dans le pays peut être dangereuse.
Et, messieurs, lorsque des étrangers sont en Belgique une cause de trouble, quel est le droit que le gouvernement a demandé ? C'est le droit de les expulser. Cette peine n'est-elle pas assez sévère ? Mais, encore une fois le Roi, qui a le droit de faire grâce, le droit de mettre complètement en liberté, pourquoi ne lui permettez-vous pas de convertir en exil la peine dont il s'agit ?
Ce sera au gouvernement d'apprécier les circonstances.
Mais, messieurs, quelle grave erreur de croire que la peine de l'exil n'est pas une peine assez sévère ?
Depuis l'antiquité, depuis l'exil de Rome et d'Athènes jusqu'à la proscription moderne, c'est une peine des plus redoutables.
Que l'on consulte les proscrits politiques ; ceux qui ont passé de longues années loin de leur pays diront s'il peut y avoir une peine plus (page 1334) grave, une peine qui exerce sur le cœur de l'homme un effet plus douloureux que la peine de l'exil.
Ne nous plaignons pas d'ailleurs, messieurs, de ce que l’on donne au gouvernement le droit d'adoucir les peines ; si elles sont trop douces, il ne les adoucira pas, il n'usera pas de ce droit ; mais ne privons pas le gouvernement du droit d'être indulgent.
Evidemment, en matière politique le droit du gouvernement doit être très étendu ; en matière des délit politiques il est juge, la plupart du temps, de la question de savoir s’il y a lieu de poursuivre ; il est juge aussi en cette matière plus qu'en toute autre de la question de savoir s'il y a lieu de faire grâce.
Je crois, messieurs, que si la Chambre, comme je l'espère, adopte l'amendement de l'honorable M. Devaux, et si l'honorable membre consent à étendre son amendement à toutes les condamnations pour délits politiques, parce qu'en définitive, il n'y a pas de motifs pour limiter le droit de grâce, je crois qu'il sera bien entendu, dans tous les cas, que ce ne peut être que sur la demande du condamné ou du moins de son consentement que l'exil peut être prononcé, car je suis en dissentiment complet avec la commission sur ce point : je pense que la peine de l'exil sera quelquefois une peine beaucoup trop forte et que certaines personnes préféreront continuer à subir une détention que d'être éloignées de leur pays, de leurs familles, de parents qu'ils n'espèrent plus revoir.
Cette peine est-elle injuste, parce qu'elle ne serait rien pour les hommes doués d'une certaine fortune, tandis qu'elle serait beaucoup pour les malheureux ?
Je crois, messieurs, que ce sera souvent le contraire, et que s'il y a inégalité, elle existera au profit des hommes du peuple. Il est beaucoup plus facile à un ouvrier de trouver dans tous les pays du monde de l'occupation pour ses bras, qu'il ne l'est aux personnes exerçant des professions libérales, et c'est dans ces professions en général que l'on rencontre les condamnés politiques ; qu'il ne l'est, dis-je, à ces personnes de trouver dans les pays étrangers le moyen de se livrer à la pratique de leur profession, et même de gagner de quoi vivre.
Tel homme qui dans son pays a une grande clientèle comme avocat ou comme médecin, ne trouvera pas, à l'étranger, de quoi vivre strictement.
Ainsi donc, l'inégalité, si elle existe, serait au détriment des classes les plus aisées.
« Mais, a-t-on ajouté encore, - et c'est la dernière objection présentée au nom de la commission, - que ferons-nous si tous les pays étrangers refusent de recevoir nos exilés politiques ? »
Mais, nous n'avons pas, je crois, à nous inquiéter de ce point. Lorsqu'on expulse une personne du pays, certes si aucun gouvernement étranger ne la laisse passer à la frontière, il faudra bien qu'elle rentre dans le pays, il faudra bien que la commutation de peine qui aura été accordée par le gouvernement, soit inefficace.
Mais ce ne serait pas une raison, parce que, dans une hypothèse donnée, il pourrait se trouver qu'aucun gouvernement étranger ne voulût recevoir un condamné politique, pour refuser le bénéfice de l'amendement de l'honorable M. Devaux à tous les détenus politiques qui peuvent être condamné.
Et d'ailleurs est-il à présumer que ce qui ne s'est jamais présenté, se présente à une époque où les mœurs s'adoucissent, où les idées libérales prennent de l'extension, où le droit des gens se montre plus que jamais généreux envers les condamnés politiques ? A-t-on jamais vu que l'Angleterre refusât de recevoir des condamnés politiques ?A-t-on jamais vu que la Suisse refusât de recevoir des condamnés politiques ?
Et nous-mêmes n'avons-nous pas, par une juste réciprocité de loyauté, obéissant à une idée généreuse et grande, n'avons-nous pas, dans les limites de ce que nous pouvions faire sans compromettre notre sécurité, n'avons-nous pas toujours donné asile à tous les réfugiés politiques, à tous les exilés, à quelque opinion qu'ils appartinssent, à quelque dynastie qu'ils fussent attachés, sous tous les régimes, nous nous sommes empressés d'appliquer de la manière la plus large les lois de l'hospitalité. Nos voisins partagent notre manière de voir à cet égard, et je ne crois pas qu'il y ait lieu de prévoir le cas où un malheureux proscrit ne trouverait aucun pays qui voulût lui donner asile.
Etablir les lois sur de pareilles hypothèses, c'est les établir sur ce qui ne peut être ; il faut, au contraire, prendre égard aux faits, il faut les établir pour les hommes tels qu'ils sont, et ne pas les supposer plus mauvais que de raison.
M. Carlier. - J’ai fait partie de la majorité de la commission lorsque celle-ci a cru devoir repousser l'amendement de l'honorable M. Devaux. Je dois, à ce titre, quelques explications à la Chambre.
Je me plais, messieurs, à rendre à l'honorable M. Devaux, de même qu'à l'honorable préopinant, cet hommage que leur proposition a tout particulièrement en vue un adoucissement des peines qui pourraient être comminées en matière politique. Cette idée est certes digne d'éloges et le seul point de vue auquel je veuille l'examiner c'est sa praticabilité, c'est surtout la question de savoir si elle ne créera pas entre les justiciables des inégalités qui ne doivent pas exister, qui ne peuvent pas exister, surtout sous notre régime politique, sous nos lois constitutionnelles.
Quant à la praticabilité, nous avons pensé que la loi ne serait pas toujours praticable et les indications qui nous ont été fournies par M. le ministre de la justice lors de nos délibérations, nous ont montré qu'à différentes reprises, en Angleterre et en Amérique, des personnes qui se présentaient, croyant rencontrer l'hospitalité que vante l’honorable préopinant ont été déçues dans leurs espérances.
Dès lors, messieurs, il peut arriver, non pas certes en règle générale, mais à titre d'exception, il peut arriver que des personnes à qui une commutation de peine aura été accordée en matière politique, à qui l'exil aurait été donné comme adoucissement de peine, ne trouveront pas, soit en Suisse, soit en Angleterre, soit ailleurs, l'hospitalité que l'honorable préopinant nous a dit tout à l'heure qu'il avait la certitude qu'elles y rencontreraient.
Donc, au point de vue de la pratique, la motion de l'honorable M. Devaux ne pouvait pas être accueillie par la commission du Code pénal.
Un autre motif encore nous a déterminés, nous membres de la majorité, dans notre vote. C'est qu'il nous a paru que de la façon dont l'amendement de l'honorable M. Devaux était présenté, il venait porter une sorte d'atteinte au droit de grâce, ou plutôt qu'il était une atténuation de ce droit de grâce, puisque ses effets seraient subordonnés à des conditions subordonnées elles-mêmes à une sorte de marchandage. Que la grâce en matière politique s'accorde largement, je crois que personne ne le trouvera mauvais.
Pour ma part, j'en serai toujours partisan ; mais que cette grâce s'accorde à la condition que le citoyen qui en est l'objet sortira du pays ; que cette grâce cesse d'exister au moment où ce citoyen voudra remettre le pied sur le sol de la patrie ; que cette grâce cesse d'exister, alors que ce citoyen sera contraint de remettre le pied sur le sol de la patrie ; je trouve que c'est une atteinte au droit de grâce lui-même ; que c'est le rapetisser en quelque sorte ;c'est réduire les prérogatives de la Couronne ; et à ce point de vue encore, je n'ai pu me rallier au système présenté par l'honorable M. Devaux.
Mais, disait tout à l'heure l'honorable M. Guillery, l'argument principal de la commission a été l'inégalité que le système de l'honorable M. Devaux créerait entre les justiciables. Eh bien, messieurs, cette inégalité existera quoi qu'en pense l'honorable M. Guillery. Je suppose, un instant, messieurs, que, dans une émeute, il se trouve sur une barricade un général et un ouvrier. Le général a acquis un certain renom, sa réputation est connue, il possède une position aisée, une position fortunée ; il est pris les armes à la main.
A côté de lui, on prend également les armes à la main l'ouvrier qu'il a guidé au combat. Tous deux sont condamnés et le Roi veut leur faire grâce, en usant du moyen indiqué par l'honorable M. Devaux et leur peine est commuée en celle du bannissement.
Le général a son titre, son renom, sa fortune ; il ira demander l'hospitalité à une nation hospitalière ; il y sera accueilli et il aura le moyen d'y vivre, mais l'ouvrier est un pauvre diable, qui n'a pas de fortune, pas de nom, qui n'a que ses mains pour vivre ; il ne sait ni l'anglais ni l'allemand.
Il faudra qu'il aille en Angleterre, mais s'il ne sait pas l'anglais, sa force manuelle et sa profession ne pourront lui servira rien.
Il en est de même pour l'Amérique, ou bien il devra se rendre en Suisse, autre contrée hospitalière. S'il ne sait pas l'allemand, encore une fois il ne pourra y trouver les moyens de vivre.
Le général reste où il est allé se fixer ; il peut y vivre largement et en liberté.
Il a bien la peine très réelle comme l'a dit l'honorable membre, de subir l'exil, le bannissement, mais cette peine est un adoucissement cependant.
L'ouvrier ne pouvant vivre ni en Angleterre, ni en Suisse, ni en Amérique, doit rentrer dans son pays, et la prison l'attend. N'y a-t-il pas inégalité absolue entre ces deux situations ? C'est cette inégalité qui a été le principal motif à raison duquel la commission s'est prononcée contre la proposition de l'honorable M. Devaux. Elle n'a pris en considération ni les dangers de conspiration aux frontières, (page 1335) ni cette circonstance que la peine ne serait pas assez sévère ; ces motifs sont restés étrangers à notre décision.
Les motifs qui nous ont déterminés, je viens de vous les dire, et je vous propose de les adopter.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je regrette que h proposition de l'honorable M. Devaux ne se soit pas produite plus tôt, qu'elle n'ait pas été présentée lorsqu'on a discuté le premier livre du Code pénal auquel elle se rattache.
A cette époque la Chambre avait à s'occuper des différentes peines que le Code pénal avait à comminer, et elle eût pu l'examiner avec plus de soin, plus de maturité et plus de fruit qu'elle ne peut le faire en ce moment.
Cette proposition est très importante, et personne n'a eu le temps» d'y réfléchir. Au fond, elle consacre un système tout nouveau, qui n'existe pas dans nos lois actuelles.
De quoi s'agit-il, en effet ? D'introduire dans la loi la commutation d'une peine en un autre mode d'expiation, si je puis m'exprimer ainsi, et qui, en réalité, n'est pas une peine, auquel du moins le Code pénal n'attribue pas ce caractère.
Jusqu'à présent le Roi pouvait gracier ; il pouvait réduire la peine ; il pouvait accorder une commutation de peine, mais il fallait toujours que la commutation fût faite en une peine établie par la loi.
Aujourd'hui il ne s'agit pas de commuer la détention en bannissement, puisqu'on repousse le bannissement à titre de peine, mais en une espèce d'exil ou d'expulsion qui n'existe pas dans le Code pénal, et remarquez-le bien, sans établir de sanction contre la violation de la condition qui serait attachée à la grâce qui serait accordée.
C'est, je le répète, un système tout nouveau et qui devrait être longuement mûri avant de pouvoir être accepté par la Chambre.
Messieurs, quant à moi, je le déclare, je n'ai pas encore pu me rendre suffisamment compte des conséquences, des effets de la disposition proposée pour prononcer définitivement.
J'aperçois beaucoup plus d’inconvénients que d'avantages dans le système qui nous est soumis par M. Devaux.
Il établit d'abord des règles spéciales en ce qui touche le droit de grâce en matière politique. Cela peut-il se faire ?
L'on propose de dire que le Roi pourra subordonner cette grâce à l'exil, de déclarer que le condamné est gracié, mais à la condition qu'il quittera le pays pendant un laps de temps égal à la durée de sa peine.
Je crains, si une disposition semblable passe dans la loi, que la peine principale que vous prononcez contre les délits politiques ne s'efface dans la réalité des choses et qu'il n'apparaisse plus, pour ceux qui voudraient provoquer des désordres dans le pays, que la peine d'expulsion.
Je crains, si l'on inscrit dans la loi que la détention en matière politique pourra être commuée en exil, que l'on ne voie plus que la peine subsidiaire et non la peine principale ; la loi perdra ainsi un de ses caractères, son caractère exemplaire, son caractère d'intimidation., Que risquons-nous, dira-t-on, de tenter le renversement du gouvernement, des institutions ? Nous en serons quittes pour quelques jours de détention, puis l'expulsion du pays.
On vivra aussi bien à l'étranger qu'en Belgique, surtout quand ce sera au profit de l'étranger qu'on a conspiré.
C'est un inconvénient qui me frappe au plus haut degré.
N'y aurait-il pas dans certaines dispositions du Code les avantages que M. Devaux cherche par son amendement ?
Remarquez que tous les individus qui sont condamnés pour crime peuvent être mis sous la surveillance de la police. Cette surveillance permet d'interdire certaines parties du territoire à celui qui est placé dans cette situation. Je crois que l'on aurait pu trouver là un moyen d'atteindre le résultat que l'on cherche. Il est certain que plusieurs parties de notre territoire sont plus loin du centre, du cœur du pays, plus isolées que les frontières étrangères ; n'aurait-on pas trouvé là les avantages que l'on cherche ?
Ne pourrait-il pas être dit qu'il pourrait être assigné une résidence aux individus qui auraient été frappés de telle ou telle peine ? La sanction de ces dispositions se trouve dans les pénalités comminées en cas de rupture de ban.
Pour votre système, vous n'avez aucune sanction contre la violation de la condition sous laquelle la grâce a été accordée.
L'amendement de l'honorable M. Devaux consacre pour le condamné, en cas de grâce, le droit d'aller à l'étranger ou de revenir subir sa peine en Belgique.
Cela ne me paraît pas un système répressif sérieux, ni en rapport avec le but que la société poursuit en punissant.
Je ne puis donc pas accepter l’amendement ; je veux bien recherché s’il y a quelque chose à faire dans l’ordre d’idées indiqué. La loi sera discutée au Sénat et je verrai s’il y a lieu de proposer un amendement, il est en tout cas probable que le Code en discussion reviendra à la Chambre ; d’ici là on pourra réfléchir.
Mais il serait dangereux d'accepter dès maintenant la proposition qui est faite.
M. Devaux. - Messieurs, vous remarquerez que les objections que rencontre ma proposition sont presque toutes indirectes.
Je n'entends pas contester l'utilité de la mesure en elle-même. Je n'ai pas entendu un seul mot contre cette utilité ; on combat la proposition par des raisons tout à fait secondaires ou de forme.
M. le ministre de la justice trouve que l'on n'a pas eu le temps de l'examiner.
Cependant je m'y suis pris avec certaines précautions, car la proposition vous est soumise depuis samedi. Elle a été renvoyée à la commission et a fait l'objet d'un rapport imprimé.
Pourquoi ne s'est-elle pas présentée plus tôt ? Parce qu'il n'y a pas eu discussion sur la suppression du bannissement, parce que, au début de la discussion du Code pénal, on ne s’est pas aperçu tout de suite des effets de cette suppression.
Une autre occasion se présentait : c'était quand on a ajouté le dixième chapitre, sur le droit de grâce.
Ce chapitre a été ajouté tout à la fin de la discussion et à la fin de la session. Il a été voté si vite en raison des circonstances où nous nous trouvions, qu'aucune des questions qu'il soulève, et il soulève les questions des plus difficiles, n'a été abordée. On l'a voté pour ainsi dire sans discussion.
M. le ministre me dit : Vous proposez une chose toute nouvelle. En réalité, pas bien nouvelle, puisque le bannissement existe aujourd'hui, et je propose moins que le bannissement.
Ce qui est nouveau : c'est la suppression du bannissement, de cette peine essentiellement politique dont je doute qu'aucune législation pénale ou aucun gouvernement se soit jamais passé.
II n'est pas étonnant que de cette suppression il résulte des conséquences un peu nouvelles, et je crois que la nouveauté de celle-ci n'a pas de quoi effrayer. Elle n'a pas de proportions exorbitantes.
Autre objection indirecte : c'est que la mesure n'a pas de sanction.
Je vous en demande bien pardon, elle a une sanction très expresse écrite dans la proposition elle-même : si on viole le ban, la peine antérieure reprend cours.
Si l'on avait été condamné à la détention, on rentre dans la prison où s'accomplit cette peine. Si l'on avait été condamné à l'emprisonnement, on subit l'emprisonnement. Il y a donc une sanction. Celui qui rentre dans le pays, ne reste pas libre ; il est puni. Il me semble que c'est un peine que de passer de la liberté à l'emprisonnement.
Faut-il nécessairement, pour qu'il y ait sanction, renforcer la peine antérieure ? Je n'en vois pas la nécessité.
On n'apercevra plus, dit-on, la peine principale ; le bannissement aura l'air d'être la seule peine de tous les crimes politiques. Comment ! parce que le Roi aura le droit de commuer la peine, la peine principale n'existera plus ? Je ne comprends vraiment pas cette objection. Remarquez qu'on ne fait après tout que conserver au gouvernement un pouvoir de commutation qu'il a aujourd'hui.
Réellement je ne puis croire que s'il n'y a pas d'autres objections que celles-là, cela doive empêcher l'amélioration que je propose.
Messieurs, un honorable membre de la commission a dit qu'il pourrait se présenter des cas où la mesure ne serait pas praticable, parce que le banni ne serait pas reçu dans les pays voisins. D'abord ce cas sera extrêmement rare.
Nous sommes entourés de gouvernements de diverses espèces, et les bannis, quelle que soit leur opinion, trouveront toujours, même en Europe, où se réfugier.
Mais s'ils ne le trouvaient pas, leur sort ne serait pas empiré, il resterait ce qu'il était avant la commutation ; ils rentreraient en prison, et le pouvoir royal aurait à décider s'il les y maintiendra ou s'il leur accordera la grâce plus complète.
C'est, dit-on encore, une espèce de marchandage du droit de grâce qui nuit à sa dignité. Je ne comprends pas comment on pourrait nuire à la dignité du pouvoir qui accorde la grâce en lui conférant une faculté que le projet de loi lui refuse et dont il ne fait usage que quand il le juge convenable. Etendre un pouvoir, est-ce nuire à sa dignité ?
Enfin, il y a inégalité, objecte-t-on, parce que tel homme peut supporter le bannissement mieux que tel autre.
D'abord est-il bien sûr que le bannissement soit toujours moins dur (page 1336) pour les hommes qui ont de la fortune que pour ceux qui n'en ont pas ? Cela ne m'est pas démontré.
Parmi ceux qui s'expatrient, les riches sont loin d'être les plus nombreux. Dans les villes frontières ou dans les capitales voisines, vous trouverez pour ainsi dire des colonies de Belges. Mais ce qui y domine, ce sont assurément les hommes qui n'appartiennent pas à la classe riche. Il me semble donc fort incertain qu'il y ait ici inégalité en faveur de la fortune.
Il est certain que quand on a des intérêts de fortune dans un pays, on y tient par plus de liens que quand on n'y a ni fortune ni intérêts.
D'ailleurs, messieurs, s'il fallait pousser le scrupule de légalité jusque-là, à peu près toutes les peines auraient le même inconvénient : l'amende serait une peine extrêmement inégale suivant les fortunes ; le régime de la prison, la manière dont les détenus sont nourris et logés est beaucoup plus dure pour celui qui est habitué à vivre dans l'aisance que pour l'indigent. Etre enfermé est une peine beaucoup plus rigoureuse pour un tempérament bouillant à qui le mouvement est indispensable que pour le vieillard qui a peine à se mouvoir.
L'honorable M. Guillery a demandé pourquoi je n'avais pas étendu ma proposition à tous les délits politiques. Je ne l'ai pas étendue à tous les délits politiques quelconques, parce que j'ai supposé qu'il pourrait y avoir des amendes et on ne peut, évidemment, pas convertir l'amende en bannissement.
Voilà, messieurs, la raison pour laquelle je ne me suis pas servi d'expressions plus générales.
Je crois avoir répondu à toutes les objections qu'on a faites. Je n'attache pas une importance extrême à l'article ; mais je ne vois pas qu'on puisse ne pas prendre une décision à ce sujet avant le vote définitif du projet de Code et attendre pour cela que le Sénat nous renvoie ce même travail que nous avons encore entre les mains.
S'il est si certain que le projet doit nous revenir du Sénat, alors aussi on pourra revenir sur cet article si on l'a adopté, et si on y a découvert, après son adoption, des inconvénients plus réels que ceux qu'on signale aujourd'hui.
M. Pirmez, rapporteur. - Messieurs, j'ai eu l'honneur de vous présenter hier un rapport, au nom de la majorité de la commission ; je dois déclarer que je ne faisais point partie de cette majorité. Au sein de la commission, j'ai présenté une proposition qui consacre le principe de l'amendement de l'honorable M. Devaux.
Je ne veux pas discuter encore ce principe, mais indiquer les modifications que je crois devoir être apportées à cette proposition.
Je demande à la Chambre la permission de lui soumettre un amendement à cet égard.
La proposition de l'honorable M. Devaux porte :
« Les condamnés à la détention ainsi que les condamnés à l'emprisonnement pour délits politiques, peuvent être expulsés du territoire belge pour le temps de leur peine qui n'est pas accompli, et sous la condition que, s'ils rentrent en Belgique, ils continueront à subir leur peine antérieure qui sera diminuée du temps qu'ils ont passé à l'étranger. »
La première chose qui me frappe dans cette rédaction est la manière dont la faculté de substituer un éloignement temporaire à la privation de liberté est formulée.
Il paraîtrait en résulter que l'expulsion pourrait être appliquée à un condamné, malgré lui, que parfois on lui imposerait, sous le nom de grâce, un changement dont il ne voudrait pas.
Il est impossible évidemment qu'il en soit ainsi.
D'un autre côté il faut éviter d'introduire le bannissement comme remplaçant et éteignant la peine primitive, car il résulterait de la disparition de cette peine que si le condamné rentre dans le pays il n'y aura aucun moyen de l'incarcérer de nouveau.
La commutation a pour effet, comme le mot l'indique, de changer la première peine en la seconde, en sorte que celle-ci seule subsiste. Que ferait-on si le condamné revenait en Belgique ?
On devrait obtenir un nouveau jugement ou un nouvel arrêt contre lui, pour faire recommencer la peine. (Interruption.)
Je pense bien que l'honorable M. Devaux attache une autre portée à, son amendement, mais s'il admet un autre principe, il importerait de l'énoncer d'une manière plus précise.
- Un membre. - On arrêtera le banni rentrant au pays, comme on arrêtera un condamné qui s'évade.
M. Pirmez, rapporteur. - La position n'est pas la même.
Lorsqu'un individu s'échappe de prison, la condamnation subite tout entière ; mais quand il y a commutation de peine, la condamnation ne peut plus être exécutée.
Il est donc important d'adopter un autre système qui laisse incontestablement subsister la condamnation prononcée. Dans ce but, je propose de déclarer formellement que le séjour du condamné en pays étranger est la condition de la remise de la peine, en sorte que la grâce n'existe qu'aussi longtemps que le condamné se soumet à cette condition. Est-elle violée ? La condamnation revit et peut être exécutée.
M. Van Humbeeck. - C'est la théorie évidente de l'amendement.
M. Pirmez, rapporteur. - Je suis disposé à le croire, mais comme l'honorable M. Devaux emploie souvent les termes : « commutation de peine », qui, juridiquement, consacreraient une théorie tout autre, je crois qu'il y a lieu, par une rédaction précise, de faire cesser toute équivoque.
J'ai une seconde observation à faire sur l'amendement.
M. Devaux autorise cette grâce à condition d'exil, non seulement quant à la détention, mais encore relativement à l'emprisonnement. Il me paraît que l'amendement doit être limité aux cas où la détention a été prononcée.
L'honorable M. Devaux veut maintenir dans la législation une faculté qui existe actuellement pour le gouvernement.
Le pouvoir, d'après lui, ne doit pas être désarmé de la faculté d'éloigner du pays certains condamnés.
Il faut lui consriver, sous une forme ou sous une autre, le bannissement, peine qui, étant écrite dans nos lois, peut servir de moyen de commutation.
Mais remarquons qu'aujourd'hui le gouvernement n'a pas le pouvoir de commuer la peine d'emprisonnement en bannissement. La raison en est simple.
Le bannissement est une peine criminelle, supérieure, par conséquent, à celle de l'emprisonnement correctionnel. On ne commue pas une peine plus légère en une plus grave.
D'ailleurs, messieurs, le bannissement suppose nécessairement une certaine durée. On ne conçoit pas, par exemple, un bannissement de 13 jours ou d'un mois, comme on conçoit un emprisonnement de 13 jours ou d'un mois.
L'éloignement du pays pour un temps si court ne serait qu'une permission donnée au condamné de faire un voyage à l'étranger.
Pour que le bannissement, quelle que soit sa forme juridique, peine ou condition de grâce, conserve un caractère sérieusement répressif, il ne faut pas l'admettre au-dessous de cinq ans, minimum tout à la fois de cette peine sous le Code de 1810 et de la détention sous le Code nouveau.
Je crois donc que la disposition ne doit s'appliquer qu'à la peine de la détention.
Enfin, messieurs, je demanderai une troisième modification à la proposition de l'honorable M. Devaux.
Celte proposition admet que quand un condamné rentre dans le pays il n'aura à subir que ce qui restera de sa peine, déduction faite du temps qu'il a passé à l'étranger.
il me paraît que nous ne pouvons pas admettre un système aussi facile, aussi commode pour le condamné.
Lorsqu'on lui a permis de recouvrer sa liberté à condition de quitter le pays, il a contracté une obligation sérieuse, celle de se conformer à cette condition.
Cette obligation ne doit pas être une chose vaine ; il ne doit pas être permis au condamné d'aller quelque temps à l'étranger, et de rentrer, quand il lui plaît, en Belgique, pour continuera y subir sa peine.
Il ne faut jamais que le choix du châtiment appartienne ainsi purement et simplement à celui qu'atteint la répression sociale. Le condamné qui manque à ses engagements, doit voir augmenter la durée du temps qui restera à courir de sa peine, à sa rentrée en Belgique.
Aussi un système différent de celui de M. Devaux s'est présenté : c'est de faire reprendre le cours de la peine au moment où le condamné a été mis en liberté par l'octroi de la grâce. Mais ce système est extrêmement rigoureux.
Prenons un exemple pour mieux saisir la différence des deux systèmes.
Un individu condamné à dix ans de détention, après avoir subi une année de détention, obtient une grâce conditionnelle et passe huit ans à l'étranger ; neuf ans se sont écoulés ; à l'expiration de la neuvième année, il rentre dans le pays.
D'après le système de l'honorable M. Devaux, ce condamné aurait seulement une année de détention à subir ; d'après l'autre système, il aurait encore neuf années de sa peine à expier.
Je trouve ces deux systèmes également excessifs. Il y a lieu, ce me semble, d'adopter une espèce de moyen terme ; d’une part, ne pas (page 1337) permettre au condamné de s'affranchir de son obligation, sans qu'il y ait une aggravation de peine ; d'autre part, ne pas se montrer rigoureux au point de ne lui tenir aucun compte du temps passé par lui à l'étranger.
La commission s'est trouvée en présence de ces deux systèmes extrêmes et je crois que les inconvénients signalés dans chacun d'eux ont été pour beaucoup dans le rejet qu'elle a fait de la proposition de l'honorable M. Devaux.
Voici ce qui me paraît pouvoir être admis.
Comme règle, on déclarerait que si le condamné est trouvé dans le pays en violation de la condamnation qui lui a été imposée, il subira sa condamnation pour le terme qui restait à couvrir au moment de sa mise en liberté. Mais par une exception enlevant à cette règle ce qu'elle aurait de trop dure, on ajouterait que ce terme n'excéderait jamais le double de la durée de la peine, à partir du jour où elle reprendra cours.
Je reprends l'exemple que j'avais posé. Le condamné à dix années de détention a obtenu remise conditionnelle de la peine à l'expiration de la première année ; il a quitté le pays ; il y rentre.
Il aurait neuf ans de détention à subir, mais le maximum apposé qui ne permet pas que la peine excède le double de ce qui est encore à courir, lors de l'infraction à la condition, limite cette peine à deux ans.
Il serait enfin, messieurs, nécessaire de faire une addition à l'amendement, pour déterminer quelle est la position du condamné qui, après avoir passé toute la durée de sa peine à l'étranger, rentre dans le pays.
Certaines incapacités, certaines mesures de précaution atteignent encore les condamnés après qu'ils ont subi leur peine. Il faut régler ce qui en sera à l'égard de ceux qui auront subi le bannissement au lieu de la détention qu'ils avaient encourue.
Je crois qu'il est dit que dans ce cas le condamné sera considéré comme ayant réellement subi la peine portée par la condamnation.
Ces diverses observations me conduisent à présenter l'amendement suivant :
« Réunir les article 101 et 102 et rédiger l'article 101 comme suit :
« Il peut être fait remise de la peine de la détention sous la condition que le condamné quittera le pays pendant la durée de la peine.
« Après ce laps de temps, il sera dans la même position que s'il avait subi la détention.
« Si le condamné est trouvé dans le pays en violation de la condamnation qui lui a été imposée, il subira sa condamnation pour le terme qui restait à courir au moment de sa mise en liberté, mais sans que ce terme puisse excéder le double de la durée de la peine à partir du jour où elle reprendra cours. »
Pour ne pas changer les numéros des articles, on réunirait les articles 101 et 102 en un seul article ; viendrait alors l'article 102 qui consacrerait sous une rédaction ou sous une autre, le système de l'amendement de l'honorable M. Devaux.
- L'amendement de M. Pirmez est appuyé.
M. Guillery. - Messieurs, il est bien entendu, je crois, dans l'intention de l'honorable membre, que la réduction de la peine ne peut jamais être appliquée que du consentement du condamné.
M. Pirmez. - Le condamné est toujours maître de se soustraire à cette réduction de peine ; il n'a qu'à rentrer dans le pays et même à n'en pas sortir ; la grâce tombe.
M. Coomans. - Vous lui faites subir une peine double.
M. Pirmez. - On me dit : Vous lui faites subir une peine double.
Permettez-moi de vous faire remarquer que le double que j'indique a pour but de limiter la durée de sa première condamnation.
Le condamné ne devra jamais subir une détention plus longue que celle qui reste à subir lors de l'arrêté de grâce, ni que le double du temps qui sépare sa rentrée dans le pays du terme de la peine.
II y a un double maximum dont le plus favorable est appliqué au condamné.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs je signalais tantôt les dangers d'improviser des amendements, et en effet dès maintenant ces dangers apparaissent.
Il est certain que personne ne peut apprécier la portée des dispositions qui sont soumises à la Chambre.
D'abord, ne surgit-il pas ici une question constitutionnelle ? N'est-ce pas en quelque sorte la réglementation du droit de grâce qui va résulter de cet article ?
Est-ce que la grâce peut être accordée aujourd'hui conditionnellement ou ne peut-elle pas être accordée conditionnellement, surtout quand, comme au cas actuel, on exige l'assentiment de celui à qui grâce est faite ?
Messieurs, si la grâce peut aujourd'hui, dans l'état actuel de notre législation, être faite sous condition, où est l'utilité de cet article ? Car le Rot sera toujours maître de subordonner la remise qu'il fera de la détention ou d'une peine prononcée en matière politique à la condition que l'individu s'expatrie, et dans le cas où cet individu reviendrait dans le pays, et dans le cas où la condition ne serait pas observée, le condamné serait dans la situation que lui fait la proposition de M. Devaux.
Si, au contraire, la grâce ne peut pas faire l'objet d'une condition, si elle ne peut pas faire l'objet d'une espèce de marché, pouvez-vous adopter la proposition qui vous est faite ? Je ne le crois pas. Je le répète, il y a là des questions très sérieuses qu'il est impossible de trancher aujourd'hui.
L'honorable M. Pirmez a cherché une sanction en cas de violation de la condition, et je suis d'accord qu'il en faut une.
Il est impossible, si l'on veut que l'on puisse imposer des conditions à celui à qui grâce est faite, qu'il n'y ait pas de sanction s'il viole ultérieurement ces conditions.
Maintenant faudra-t-il l'intervention de l'autorité judiciaire ? quelle sera la cour ou le tribunal qui jugera si la condition a été violée ?
Et la sanction que l'honorable M. Pirmez a cherché à introduire est-elle bien juste ? Ne serait-elle pas exagérée dans bien des cas ?
Si je comprends bien l'honorable membre, il dit : Si l'individu auquel il a été fait grâce rentre dans le pays, il subira une peine double de celle qui reste à courir.
M. Pirmez. - Il ne subira jamais une peine plus longue que celle qui restait à courir. C'est un maximum.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Qui va déterminer s'il subira ou s'il ne subira pas une peine double ?
M. Pirmez. - C'est une affaire de calcul.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Nous n'en sommes pas là.
Je suppose un individu qui aura été condamné à 10 ans de détention. Il est gracié un an après sa condamnation ; il lui est donc fait grâce de 9 années de détention.
Il s'exile pendant 5 ans ; puis il rentre dans le pays. Il lui restait donc 4 ans à faire.
Subira-t-il 8 ans de détention ?
Vous voyez, messieurs, que quand on entre dans tous les détails du système, il est impossible de l'accepter. Ce serait là une aggravation énorme.
En matière pénale, rien ne s'improvise. On nous propose un système nouveau que personne n'a étudié, que personne ne connaît.
Je ne crois pas que la Chambre fasse chose sage, en l'admettant dès maintenant.
M. B. Dumortier. - Messieurs, je crois que M. le ministre de la justice a parfaitement raison lorsqu'il vient dire à la Chambre qu'il est impossible de réglementer le droit de grâce.
C'est un droit constitutionnel accordé à la couronne et que l'on ne peut pas réglementer. Cette réglementation appartient à la couronne elle-même, car c'est une prérogative absolue, illimitée.
Mais, si vous n'avez pas le droit de réglementer le droit de grâce, vous avez le droit de l'examiner ici dans le cas dont il s'agit, c'est-à-dire, lorsque celui qui a été l'objet de la grâce enfreint les conditions auxquelles elle a été accordée.
Ainsi, lorsque le Roi a commué la peine de la détention en un bannissement déterminé et que le banni, en rupture de ban, revient dans le pays, je me demande si, d'après nos lois sainement interprétées, le gouvernement peut le faire remettre en prison ? C'est là une grosse question. Je sais bien qu'on le ferait, mais serait-ce bien légal ? Voilà la question.
Je crois qu'on ne peut pas réglementer le droit de grâce, mais qu'il est nécessaire de réglementer la rupture de ban en pareil cas.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est un autre système.
M. B. Dumortier. - Je pense qu'il faut déterminer le droit du gouvernement, du pouvoir exécutif lorsque celui qui obtient la peine du bannissement en remplacement de la détention vient à rompre son ban.
Vous ne pouvez laisser les choses à l'arbitraire.
M. Guillery. - C'est le but de l'amendement.
M. B. Dumortier. - Il faut une disposition. Nous ne pouvons réglementer le droit de grâce, mais nous pouvons mettre dans le Code un moyen de porter remède à la violation des conditions de la grâce obtenue.
M. Pirmez. - Messieurs, j'ai modifié mon amendement de manière à rendre très simple la computation de la peine à faire subir au banni qui rentre dans le pays.
Je propose de compter le temps passé à l'étranger pour moitié dans l’expiation de la peine de la détention. Deux ans passés à l'étranger éteindront donc une année de détention prononcée par arrêt.
Je prierai M. le président de donner lecture de l'amendement modifié.
M. le président. - M. Pirmez propose de remplacer la fin du dernier paragraphe de son amendement depuis les mots :« mais sans que ce terme » par la rédaction suivante : « diminué de la moitié du temps passé à l'étranger. »
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Mais si l'individu est rentré dans le pays un an avant qu'on le découvre, qu'arrivera-t-il alors ?
M. Guillery. - Je persiste dans l'opinion que j'ai entendue tout à l'heure, mais les objections présentées par M. le ministre de la justice nous font un devoir, me paraît-il, de lui laisser le temps de la réflexion. Il est impossible que la Chambre vote actuellement sur la question quand M. le ministre dz la justice, qui a une si grande responsabilité à supporter, déclare qu'il ne peut s'expliquer catégoriquement sur tel ou tel point.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je repousse l'amendement quant à présent.
M. Guillery. - Il est possible qu'après que des explications auront été échangées, M. le ministre de la justice revienne sur cette résolution.
Je crois que cet article ne doit pas être rejeté ; qu'il est impossible que nous allions compter sur les amendements qui pourraient être introduits par le Sénat. Cela n'est pas régulier. Mais on pourrait ajourner la discussion sur ce point jusqu'après le vote des article du Code sur lesquels il nous reste encore à statuer.
D'ici là, nous pourrons perfectionner la rédaction et nous rendre un peu mieux compte de la portée des diverses dispositions.
M. le président. - La Chambre ne paraît pas considérer la question comme suffisamment élucidée. M. Nothomb a présenté des propositions qu'une indisposition l'a empêché de défendre.
Nous pourrions renvoyer à la commission l'amendement de M. Pirmez, et la Chambre statuerait ultérieurement sur cet amendement en même temps que sur celui de M. Devaux, avant de procéder au vote définitif ; car nous avons à voter par appel nominal sur le projet de loi contenant les modifications au premier livre du Code pénal, projet qui sera envoyé au Sénat.
Je propose donc à la Chambre de tenir en suspens cette question, de demander un rapport à la commission sur la proposition de M. Pirmez, et d'examiner ces divers points avant de procéder au vote de l'ensemble des modifications adoptées dans la séance d'hier.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il a été convenu hier, en ce qui concerne l'honorable M. Nothomb, que l'occasion de s'expliquer lui serait donnée à propos du projet de loi qui serait présenté pour attribuer à la cour l'appréciation les circonstances atténuantes.
Voilà ce qui avait été entendu. Il n'a donc pas été convenu, comme semble le croire M. le président, que le livre premier serait tenu en suspens pour donner à l'honorable M. Nothomb le temps de présenter ses observations.
M. Coomans. - On pourrait, au lieu d'un projet de loi, introduire une disposition transitoire.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Pardon, cela n'est pas possible. C'est une disposition qui durera toujours ; une disposition définitive et qui prendra ultérieurement place dans le Code d'instruction criminelle.
M. le président. - Dans tous les cas, nous pourrions tenir en suspens le vote sur l'ensemble et procéder à la discussion du second livre.
M. Devaux. - Je ne m'oppose nullement à ce qu'on diffère l'examen de ma proposition, pourvu qu'elle soit discutée avant le vote définitif du projet actuel.
Quant à ce qu'on vient de dire de la réglementation du droit de grâce, je ferai une observation, c'est que j'ai cru élargir et non restreindre ce droit par ma proposition. Il est incontestable que le droit de grâce n'est pas le droit de créer des peines.
Le droit de grâce doit se maintenir dans les peines prévues par le Code, par la législation en vigueur.
Il ne lui appartient pas de créer des peines et de substituer une peine qui n'existe pas dans nos lois aux peines qui y sont prévues. Ainsi, messieurs, si le bannissement n'existe pas dans nos lois, il ne pourra pas servir de commutation à une autre peine, pas plus que la bastonnade ou tel autre châtiment que nos lois ne reconnaissent pas. Le droit de grâce implique celui de diminuer des peines, mais non d'en introduire de nouvelles.
Ma proposition élargit donc le droit de commutation et y ajoute une faculté qu'il ne renfermait pas.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il y a quelque chose de vrai dans ce que dit l'honorable M. Devaux. Ainsi, pour moi, il est bien certain aussi que le Roi n'a pas le droit d'imposer une commutation de peine en dehors des peines établies par la loi ; mais, remarquez-le bien, il ne s'agit pas ici d'imposer une commutation de peine ; il s'agit en quelque sorte d’un contrat qui intervient entre la royauté qui accorde la grâce et le condamné qui la reçoit.
Ainsi, je me demande si aujourd’hui, par exemple, il n'est pas déjà permis de dire à un condamné : Je vous fais grâce mais à la condition que vous quitterez le pays.
M. Devaux. - Et si cette condition est enfreinte ?
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Si la condition est enfreinte, on sera exactement dans la même position que celle qui se présentera dans votre système, c'est-à-dire que la condamnation première reprendra son cours. Je me demande donc si l'amendement est utile, et, s'il n'est pas dangereux, contraire à la Constitution. C'est une question que je soumets à la Chambre et que je n'entends pas résoudre en ce moment.
M. Coomans. - Les objections que nous a présentées M. le ministre delà justice me semblent si raisonnables et si fortes, qu'il m'est impossible de ne pas m'y rendre.
Il est un point sur lequel on ne s'est pas expliqué assez nettement : on ne nous a pas dit si le changement de peine pourrait être imposé au condamné.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Non, dans le système qui est proposé.
- Un membre. - Mais si, on se sert du mot « imposé ».
M. Coomans. - Le changement de peine peut-il être imposé au condamné, ou l'assentiment du condamné est-il nécessaire ? Ce point est, pour moi, essentiel.
Si j'ai bien compris M. Devaux, l'assentiment du condamné, dans beaucoup de cas, ne serait pas nécessaire, parce que l'honorable membre expulse dans un intérêt public, intérêt que je puis comprendre, mais qui n'est pas celui du condamné.
Or, il est certain que, dans bien des cas (je ne pense pas avoir besoin de les citer) le bannissement est une aggravation de peine, une peine plus dure que la détention. (Interruption.)
Je me figure facilement des cas où j'aimerais mieux être détenu dans mon pays, entouré de mes parents pauvres, de mes amis que d'être expulsé.
Je me figure des cas où le gouvernement serait peut-être obligé de me gracier entièrement s'il n'a pas la faculté de me bannir.
Il est de principe, messieurs, qu'une peine ne peut pas être aggravée, que le droit de grâce implique un adoucissement, et comme, en fait, il est certain que le bannissement peut être une aggravation de la peine ; comme, d'autre part, plusieurs des motifs donnés à l'appui de l'amendement viennent à disparaître si l'assentiment du condamné est nécessaire ; et comme cet assentiment crée des difficultés réelles que M. le ministre de la justice nous a succinctement énumérées, mon opinion est dès à présent toute formée et je dois repousser la proposition de M. Devaux.
Je ne repousserais pas le bannissement, je ne le crois pas du moins, s'il devait être prononcé par les tribunaux, parce je trouve là de sérieuses garanties. Mais attribuer à un gouvernement pour des causes politiques seulement le droit de bannir, c'est peut-être courir au-devant de l'arbitraire.
Je crois qu'il serait plus digne de la Chambre de ne pas invoquer et attendre les lumières d'une autre assemblée pour se prononcer et de reconnaître avec l'auteur de l'amendement que deux jours ont pu suffire pour que votre opinion se fasse ; en conséquence, je ne vois pas d'inconvénient à ce que le vote ait lieu aujourd'hui, ou demain, si l'on veut encore réfléchir 24 heures.
M. Guillery. - Il y a toujours une question de rédaction sur laquelle il est nécessaire qu'on laisse à la Chambre le temps de méditer au moins pendant 24 heures. Rien n'est dangereux comme de voter séance tenante sur une disposition improvisée. Il n'est pas de législature qui consente à procéder de cette façon.
Ceux qui ont jeté les yeux sur les discussions du Code civil ont vu que des articles qui avaient passé par le conseil d'Etat et le tribunal péchaient encore par la rédaction, parce qu'il s'est trouvé qu'on avait employé des expressions disant autre chose que ce qu'on voulait dire, et malgré sa perfection le Code civil contient encore des expressions impropres, qu'on est obligé d'interpréter en dehors du sens grammatical.
(page 1139) Je crois que la Chambre ferait bien d'admettre en principe absolu que jamais on ne votera sur un article du Code pénal sans qu'il y ait eu 24 heures de réflexion.
M. le président. - Je mets aux voix la proposition de renvoyer à la Commission la nouvelle rédaction proposée.
M. Wasseige. - Il serait convenable, je pense, avant le renvoi, d'ordonner l'impression et la distribution aux membres.
M. le président. - Votre observation, est juste, c'est ce que je me proposais de faire après le vote.
- L'amendement est renvoyé à la commission.
Il sera imprimé, distribué et discuté avant de passer au vote sur l'ensemble des modifications adoptées hier.
M. le président. - Nous allons passer au vote sur un amendement qui a été introduit au chapitre X, article 98 :
« Le Roi peut, en usant du droit de grâce, faire cesser des incapacités prononcées par les juges ou attachées à certaines condamnations par des lois spéciales. »
L'amendement consiste dans l'addition des mots : « prononcées par les juges ou... »
- Cet article, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.
M. le président. - Nous passons au livre II.
« Art. 96. L'attentat contre la vie ou contre la personne du Roi sera puni de mort.
« Ce dernier attentat sera puni des travaux forcés à perpétuité, s'il n'a causé au Roi ni effusion de sang, ni blessures, ni maladie. »
- Adopté.
« Art. 97. L'attentat contre la vie de l'héritier présomptif de la Couronne sera puni de mort.
« L'attentat contre sa personne sera puni des travaux forcés à perpétuité ; il sera puni des travaux forcés de quinze à vingt ans, s'il ne lui a causé ni effusion de sang, ni blessures, ni maladie. »
- Adopté.
« Art. 98. L'attentat contre la vie de la Reine, des parents et alliés du Roi en ligne directe, des frères du Roi, ayant la qualité de Belges, contre la vie du régent, ou contre la vie des ministres exerçant, dans les cas prévus par la Constitution, les pouvoirs constitutionnels du Roi, sera toujours puni comme le fait consommé.
« L'attentat contre leur personne sera puni des travaux forcés de dix à quinze ans ; il sera puni de la réclusion, s'il ne leur a causé ni effusion de sang, ni blessures, ni maladie. »
- Adopté.
M. le président. - L'amendement consiste dans la substitution du n°115 au n°98, pour l'article rappelé dans le deuxième paragraphe.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je ne sais pas s'il faut appeler la Chambre à voter sur ces changements, car il ne s'agit que de l'ordre des numéros. Par suite des changements introduits, l'article 98 devient l'article 115. Si on votait sur ces changements, je ferais une autre observation, nous avons voté hier un article 77bis, qui doit devenir l'article 78. Si la Chambre votait sur les changements de numéro, je proposerais d'assigner dès à présent à l'article 77bis, le n°78, et à l'article rappelé dans l'article 102, le n°110. Tous les numéros cités seraient reculés d'une unité.
- Un membre. - Mais on avait proposé de fondre deux articles en un.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il faut éviter de fondre des articles qui contiennent des dispositions différentes ; cela a de grands inconvénients ; les articles doivent être insérés dans les jugements ; ils ne doivent ni être trop longs ni contenir des parties qui ne se lient pas. J'indiquerai, au fur et à mesure qu'ils se présenteront, les numéros qu'il faut changer.
M. le président. - On pourrait déclarer par un seul vote que les articles prendront le numéro qui leur convient.
- Plusieurs voix. - Oui, oui !
M. le président. - C'est ainsi entendu.
« Art. 131. Seront exemptés des peines portées contre les complots punis par le présent titre, et contre les infractions punies par les articles 122 et 123, ceux des coupables qui, avant tout attentai et avant toutes poursuites commencées, auront donné à l'autorité connaissance de ces complots ou de ces infractions.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je demanderai h M. le président si dans les citations il suis l'ordre ancien ou l'ordre nouveau.
M. le président. - Je suis l'ordre ancien.
M. Pirmez. - On ne peut pas arrêter maintenant les numéros des articles ; peut-être devra-t-on encore introduire deux articles nouveaux ; si on adoptait la proposition de M. Devaux et celle de M. Nothomb, on devrait encore modifier tous les numéros adoptés.
Pour éviter l'inconvénient de revenir sur ces chiffres, on pourrait, en cas d'introduction de nouvelles dispositions, réunir deux articles en un, de manière à laisser.... (Interruption.)
Si la Chambre est d'accord que l'on admette une révision générale des numéros...
M. le président. - Cela vient d'être décidé tout à l'heure.
M. Pirmez. - Oui, M. le président, mais il faudrait étendre cette décision, en ce sens qu'on ne se bornera pas à augmenter d'une unité le chiffre des articles, à cause de l'introduction de l'article 77bis, mais qu'il y aurait une révision générale des numéros des articles, qui serait faite d'après toutes les modifications introduites.
M. le président. - Sans doute. Ainsi je soumets à un vote définitif les modifications de rédaction apportées à l'article 131, en réservant les numéros des articles.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'article 131 commence de la-manière suivante :
« Seront exemptés des peines portées contre les complots, punis par le présent article, et les infractions punies par les articles 105 et 106, etc.»
Pour ne pas répéter le mot « punis » , je propose de dire :
« Seront exemptés des peines portées contre les complots, punis par le présent article, et contre les infractions prévues par les article 105 et 103, etc. »
- L'article, ainsi modifié, est définitivement adopté.
“Art. 136, §3. L'outrage adressé par des faits, par paroles, gestes ou menaces à un ou plusieurs membres de l'une des deux Chambres, dans l'exercice de leurs fonctions, sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans. »
La commission propose de dire :
« L'outrage adressé par des faits, des paroles, des gestes ou des menaces, à un ou plusieurs membres de l'une des deux Chambres, dans l'exercice de leurs fonctions, sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans. »
- Ce paragraphe ainsi rédigé est adopté.
Paragraphe 4 et suivants :
« Les coups portés à un membre de l'une des deux Chambres, dans l'exercice de ses fonctions ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, seront punis d'un emprisonnement d'un an à cinq ans.
« Si les coups ont été la cause d'effusion de sang, de blessure ou de maladie, le coupable sera puni de la réclusion.
« Les coupables seront, en outre, condamnés à une amende de cent' francs à mille francs. »
M. Pirmez. - Dans le paragraphe 4, il est plus simple de dire :
« Les coups portés à un membre de l'une des Chambres dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions. »
- L'article ainsi modifié est adopté.
« Art. 138. Lorsque, par attroupement ou par voies de fait on aura empêché un ou plusieurs citoyens d'exercer leurs droits politiques, chacun des coupables sera puni d'un emprisonnement de quinze jours à un an et d'une amende de vingt-six francs à mille francs. »
- Adopté.
« Art. 139. Si ce délit a été commis par suite d'un plan concerté pour être exécuté dans une ou plusieurs communes, chacun des coupables sera puni d'un emprisonnement de deux mois à trois ans et d'une amende de cinquante francs à trois mille francs. »
- Adopté.
« Art. 140. Sera puni d'un emprisonnement de trois mois à cinq uns et d'une amende de cinquante francs à trois mille francs, tout citoyen qui, chargé, dans un scrutin, du dépouillement des billets contenant les suffrages, sera surpris falsifiant les billets, ou en soustrayant de la masse, ou y en ajoutant, ou inscrivant sur les billets des votants non lettrés des noms autres que ceux qui lui auraient été déclarés. »
- Adopté.
« Art. 141. Toute autre personne coupable des faits énoncés dans l’article précédent sera punie d'un emprisonnement d'un an à deux ans et d'une amende de vingt-six francs à mille francs. La commission propose de dire :
« ... sera puni d'un emprisonnement d'un mois à deux ans. »
Le changement est la rectification d'une erreur.
- L'article ainsi modifié est adopté.
« Art. 152. Quiconque aura frappé ces ministres dans l'exercice de leurs fonctions sera puni d'un emprisonnement de deux mois à deux ans et d'une amende de cinquante francs à cinq cents francs »
- Adopté.
« Art. 153. Si les coups ont été cause d'effusion de sang, de blessure ou de maladie, le coupable sera puni d'un emprisonnement de deux ans à cinq ans et d'une amende de cent francs à mille francs. »
- Adopté.
« Art. 155. Tout fonctionnaire ou officier public, tout dépositaire ou agent de l'autorité ou de la force publique, qui aura illégalement et arbitrairement arrêté ou fait arrêter, détenu ou fait détenir une ou plusieurs personnes, sera puni d'un emprisonnement de trois mois a trois ans.
« Si la détention illégale et arbitraire a duré plus de dix jours, d'un emprisonnement d'un an à cinq ans.
« Si elle a duré plus d'un mois, de la détention de 5 ans à 10 ans.
« Le coupable sera de plus condamné à une amende de cinquante francs à mille francs et à l'interdiction des droits indiqués aux n°1, 2 et 3 de l'article 42, conformément à l'article 44. »
- Adopté.
« Art. 156. Tout fonctionnaire de l’ordre administratif ou judiciaire, tout officier de justice ou de police, tout commandant ou agent de la force publique, qui, agissant en ladite qualité, se sera introduit dans le domicile d’un habitant contre le gré de celui-ci, hors les cas prévus par la loi, sera puni d’un emprisonnement de huit jours à un an et d’une amende de vingt-six francs à deux cents francs, et pourra être condamné à l’interdiction du droit de remplir des fonctions, emplois et offices publics, conformément à l’article 44. »
- Adopté.
« Art. 181. Celui qui aura contrefait des monnaies d'autre métal ayant cours légal en Belgique, sera puni d'un emprisonnement d'un an à trois ans.
« La tentative de contrefaçon sera punie d'un emprisonnement de trois mois à deux ans.
« Les coupables pourront, en outre, être condamnés à l'interdiction, conformément à l'article 44, et placés, pendant cinq à dix ans, sous la surveillance de la police.
« Celui qui aura altéré des monnaies de cette espèce, sera condamné à un emprisonnement de six mois à un an. »
La commission propose au troisième paragraphe les modifications suivantes :
« Le coupable pourra, en outre, être condamné... et placé... »
Et au quatrième paragraphe :
« ... de l'espèce indiquée à l'article précédent sera... »
- L'article ainsi modifié est adopté.
« Art. 183. Celui qui aura altéré des monnaies d'or ou d'argent n'ayant pas cours légal dans le royaume, sera puni d'un emprisonnement de deux à cinq ans, et il pourra de plus être condamné à l'interdiction, conformément à l'article 44, et à la surveillance spéciale de la police pendant cinq à dix ans. »
La commission propose de dire :
« ... sera puni d'un emprisonnement de deux ans à cinq ans, et il pourra de plus être condamné à l'interdiction, conformément à l'article 44, et à la surveillance spéciale de la police pendant cinq ans à dix ans. »
- L'article, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 186. Quiconque, sans être coupable de la participation énoncée au précédent article, se sera procuré, avec connaissance, des pièces de monnaie contrefaites ou altérées, et les aura remises en circulation, sera puni d'un emprisonnement d'un mois à trois ans ; il pourra, en outre, être condamné à l'interdiction, conformément à l'article 44.’
La commission propose de terminer ainsi l'article :
« ... sera puni d'un emprisonnement d'un mois à trois ans ». (Le reste supprimé.)
- L'article ainsi modifié est adopté.
« Art. 193. Celui qui, ayant reçu pour bons des obligations, coupons ou billets contrefaits ou falsifiés, les aura remis en circulation après en avoir vérifié ou fait vérifier les vices, sera puni d'un emprisonnement d'un mois à un an, ou d’une amende de cinquante francs à mille francs.’
- Adopté.
« Art. 204. Les personnes coupables des infractions mentionnées aux articles 184 à 197 inclus, et au dernier alinéa de l'article 201, seront exemptes de peines, si, avant toute émission de monnaies contrefaites ou des papiers contrefaits ou falsifiés et avant toutes poursuites, elles en ont donné connaissant et révèle !es auteurs à l'autorité.
« Elles pourront néanmoins être mises, pendant cinq ans au plus, sous la surveillance de la police. »
M. Pirmez, rapporteur. - M. le président, il y a une faute d'impression à l'article 216 : « Dans le cas prévu par l'article 214...», il faut dire : « ... par l'article 220... »
- Cette modification est adoptée.
« Art. 218. Tout médecin, chirurgien ou autre officier de santé qui, pour favoriser quelqu'un, aura certifié faussement des maladies ou infirmités propres à dispenser d'un service dû légalement ou de toute autre obligation imposée par la loi, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à un an.
« S'il a eu pour but de procurer l'exemption de la milice, la peine sera l'emprisonnement d'un an à trois ans.
« Dans l'un et l'autre cas, s'il a été mû par dons ou promesses, il sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans ; il pourra de plus être condamne à l'interdiction, conformément à l'article 44. »
- Adopté.
« Art. 221. Les peines portées par les articles 225, 225 et 226 seront appliquées, selon les distinctions qui y sont établies : 1° à celui qui aura falsifié un certificat originairement véritable, pour l'approprier à une personne autre que celle à laquelle il a été primitivement délivré ; 2° à tout individu qui se sera servi du certificat ainsi fabriqué ou falsifié. »
- Adopté.
« Art. 229. Dans tous les cas prévus aux quatre chapitres qui précèdent, il sera prononcé une amende de vingt-six francs à mille francs, lorsque le fait est puni de l'emprisonnement ; de deux cents francs à deux mille francs, lorsqu'il est puni de la réclusion, et de cinq cents francs à cinq mille francs, lorsqu'il est puni des travaux forcés. »
- Adopté.
« Art. 234. Tout coupable de faux témoignage ou de fausses déclarations en matière correctionnelle sera puni d'un emprisonnement de deux ans à cinq ans, si le faux témoignage ou les fausses déclarations ont été faites contre le prévenu ; d'un emprisonnement de six mois à trois ans, s'ils ont été faits en sa faveur.
« Il sera, en outre, condamné à l'interdiction, conformément à l'article 44. »
- Adopté.
Art. 235. Tout coupable de faux témoignage ou de fausses déclarations en matière de police, soit contre le prévenu, soit en sa faveur, sera puni d'un emprisonnement de trois mois à un an. »
- Adopté.
« Art. 239bis. Les dispositions précédentes relatives aux fausses déclarations ne sont pas applicables aux enfants âgés de moins de quinze ans, ni aux personnes qui sont entendues sans prestation de serment, à raison de la parenté ou de l'alliance qu'elles ont avec les accusés ou les prévenus. »
- Adopté.
« Art. 240. Celui à qui le serment aura été déféré ou référé en matière civile, et qui aura fait un faux serment, sera puni d'un emprisonnement de six mois à trois ans, d'une amende qui ne sera ni moindre de vingt-six francs ni supérieure à dix mille francs, et de l'interdiction, conformément à l'article 44. »
M. Pirmez, rapporteur. - Je proposerai de remplacer les mots : « d'une amende qui ne sera ni moindre de vingt-six francs ni supérieure à dix mille francs », par ceux-ci : « d'une amende de vingt-six francs à dix mille francs... »
- L'article, ainsi modifié, est adopté.
Art. 244. Le Belge qui aura publiquement porté la décoration ou les insignes d'un ordre étranger avant d'en avoir obtenu l'autorisation du Roi, sera puni d'une amende de cinquante francs à deux cents francs. »
- Adopté.
« Art. 245. Sera puni d'une amende de deux cents francs à mille francs, quiconque se sera publiquement attribué des titres de noblesse qui ne lui auront pas été légalement conférés ou reconnus. »
- Adopté.
« Art. 250. Seront punis d'un emprisonnement d'un mois à deux ans et d'une amende de cent francs à cinq cents francs, les fonctionnaires qui, par suite de concert, auront donné des (page 1341) démissions dans le but d'empêcher ou de suspendre, soit l'administration de la justice, soit l'accomplissement d'un service légal.
« Les coupables pourront être condamnés, en outre, à l'interdiction du droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics. »
- Adopté.
« Art. 252. Les juges qui, lorsque l'autorité administrative est en cause devant eux, auront néanmoins procédé au jugement de l'affaire, malgré le conflit légalement soulevé par cette autorité et avant la décision de la cour de cassation, seront punis chacun d'une amende de vingt-six francs h cinq cents francs.
« Les officiers du ministère public, qui auront fait des réquisitions ou donné des conclusions pour ledit jugement, seront punis de la même peine. »
- Adopté.
« Art. 256. Lorsqu'il s'agit d'une recette ou d'un dépôt attaché à une place sujette à cautionnement, les peines portées par les deux paragraphes de l'article précédent ne seront respectivement appliquées qu'eu égard aux. deniers ou effets détournés dont la valeur excède le montant du cautionnement fourni par le comptable ou le dépositaire.
« Si le détournement n'excède pas le cautionnement, le coupable sera puni d'un emprisonnement d'un mois à six mois ; dans les deux cas il pourra être condamné à l'interdiction des droits mentionnés aux trois premiers numéros de l'article 42. »
- Adopté.
« Art. 259. Tous fonctionnaires ou officiers publics et toutes personnes chargées d'un service public, qui se seront rendus coupables de concussion, en ordonnant de percevoir ou en exigeant ou recevant ce qu'ils savaient n'être pas dû, ou excéder ce qui était dû pour droits, taxes, contributions, deniers, revenus ou intérêts, ou pour salaires ou traitements, seront punis d'un emprisonnement de six mois à cinq ans, et pourront être condamnés en outre à l'interdiction du droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics.
« Si les auteurs des délits prévus par cet article sont des agents, préposés ou commis de fonctionnaires ou officiers publics, ou de personnes chargées d'un service public, ils seront punis d'un emprisonnement de deux mois à deux ans.
« La peine sera la réclusion, si la concussion a été commise à l'aide de violences ou menaces. »
- Adopté.
« Art. 260. Dans les cas prévus par le présent chapitre, il sera prononcé une amende de vingt-six francs au moins, et dont le maximum sera de cinq cents francs lorsque le fait est puni de l'emprisonnement ; de quinze cents francs, lorsqu'il est puni de la réclusion, et de trois mille francs, lorsqu'il est puni des travaux forcés. »
- Adopté.
« Art. 261. Tout fonctionnaire ou officier public, toute personne chargée d'un service public, qui, soit directement, soit par interposition de personnes ou par actes simulés, aura pris ou reçu quelque intérêt que ce soit, dans les actes, adjudications, entreprises ou régies dont il avait, au temps de l'acte, en tout ou en partie, l'administration ou la surveillance, ou qui, ayant mission d'ordonnancer le payement ou de faire la liquidation d'une affaire, y aura pris un intérêt quelconque, sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans, et d'une amende de cinquante francs à trois mille francs.
« Il pourra, en outre, être condamné à l'interdiction du droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics. »
- Adopté.
« Art. 262. La disposition de l'article précédent ne sera pas applicable au fonctionnaire, à l'officier ou à la personne chargée d'un service public, qui ne pouvait, en raison des circonstances, favoriser, par sa position, ses intérêts privés, et qui aura agi ouvertement. »
- Adopté.
« Art. 267. Tout juge qui s'est laissé corrompre, soit en matière de répression, soit en matière civile, sera puni de la réclusion.
« L'arbitre ou le prud'homme qui s'est laissé corrompre sera condamné à un emprisonnement d'un an à cinq ans et à l'interdiction, conformément à l'article 44. »
-- Adopté.
« Art. 269. Si, par l'effet de la corruption, l'accusé a été condamné à la peine de mort, le juge qui s'est laissé corrompre subira la peine de mort.
« Néanmoins, si cette condamnation n'a pas été mise à exécution, le juge reconnu coupable subira la peine des travaux forcés à perpétuité. »
- Adopté.
« Art. 274. Le juge, le juré, l'arbitre, le prud'homme ou l'administrateur, qui se sera décidé par inimitié contre une partie, sera puni conformément aux articles 263, 267 à 272 et d'après les distinctions qui y sont établies.
« S'il s'est décidé par faveur pour une partie, il sera puni d'un emprisonnement de trois mois a deux ans, d'une amende de cent francs à mille francs et de l'interdiction des droits énoncés aux trois premiers numéros de l'article 42. »
- Adopté.
« Art. 275. Ceux qui auront contraint par violences ou menaces, ou corrompu par promesses, offres, dons ou présents, un fonctionnaire ou officier public, un juré, un arbitre ou un prud'homme pour obtenir un acte de sa fonction ou de son emploi, même juste, mais non sujet à salaire ou l'abstention d'un acte rentrant dans l'ordre de ses devoirs, seront punis des mêmes peines que le fonctionnaire, officier, juré, arbitre ou prud'homme contraint ou coupable de s'être laissé corrompre.
« Les tentatives de contrainte ou de corruption, qui auront manqué leur effet, seront punies d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs. »
- Adopté.
« Art. 276. Il ne sera jamais fait au corrupteur restitution des choses par lui livrées, ni de leur valeur : elles seront confisquées et mises à la disposition du bureau de bienfaisance de la commune où le délit aura été commis. »
- Adopté.
« Art. 280. Lorsqu'un fonctionnaire ou un officier public, un administrateur, un agent ou un préposé du gouvernement ou de la police, un exécuteur des mandats de justice ou jugements, un commandant en chef ou en sous-ordre de la force publique, aura, sans motif légitime, usé ou fait user de violences envers des personnes, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, il sera puni selon la nature et la gravité de ces violences, et en élevant la peine au maximum. »
La commission propose de substituer aux mots : « la peine au maximum », ceux-ci : « la peine au deux tiers de la distance qui sépare le minimum du maximum. »
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je propose à la Chambre de rédiger la dernière phrase de l'article de la manière suivante :
«... et en élevant le minimum de la peine aux deux tiers de la distance qui le sépare du maximum. »
- L'article 280, modifié comme le propose M. le ministre de la justice, est mis aux voix et adopté.
« Art. 285. Tout fonctionnaire public révoqué, destitué, suspendu ou interdit légalement, qui, après en avoir eu la connaissance officielle, aura continué l'exercice de ses fonctions, ou qui, étant électif ou temporaire, les aura exercées après avoir été remplacé, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à un an et d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs. Il pourra être condamné, en outre, à l'interdiction du droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics. »
Disposition supprimée : « Le tout sans préjudice des plus fortes peines portées contre les officiers ou les commandants militaires, par l'article 121. »
- La suppression de cette disposition est définitivement prononcée.
« Art. 287. Lorsque, pour la validité d'un mariage, la loi prescrit le consentement des pères, mères ou autres personnes :
« Si l'officier de l'état civil a négligé d'énoncer ce consentement dans l'acte de mariage, il sera puni d'une amende de vingt-six francs à cent francs ;
« S'il a procédé à la célébration du mariage sans être assuré de l'existence de ce consentement, il sera puni d'une amende de cent francs à cinq cents francs ;
« S'il a célébré le mariage contre le gré des personnes dont le consentement était requis, il sera condamné, outre l'amende de (page 1342) cent francs à cinq cents francs, à un emprisonnement de trois mois à un an.
« Enfin, lorsqu'il n'y aura pas eu d'actes respectueux, dans les cas où ils sont prescrits par la loi, l'officier de l'état civil qui aura célébré le mariage sera passible d'une amende de vingt-six francs à trois cents francs. »
- Adopté.
« Art. 291. Les peines portées aux articles précédents contre les officiers de l'état civil leur seront appliquées, même dans les cas où les infractions par eux commises ne seraient pas jugées suffisantes pour faire prononcer la nullité de leurs actes et lors même que la nullité n'en aurait pas été demandée, ou aurait été couverte. »
Disposition supprimée : « Le tout sans préjudice des peines plus fortes s'il y a lieu, d'après les autres dispositions du présent Code. »
- Cette dernière disposition est définitivement supprimée.
« Art. 292. Hors le cas où la loi règle spécialement les peines encourues pour crimes ou pour délits commis par les fonctionnaires ou officiers publics, ceux d'entre eux qui se seront rendus coupables d'autres crimes ou d'autres délits qu'ils étaient chargés de surveiller ou de réprimer, subiront le maximum des peines attachées à ces crimes ou à ces délits.
La commission propose la modification suivante :
« ... seront condamnés aux peines attachées à ces crimes ou à ces délits, dont le minimum sera élevé aux deux tiers de la distance qui le sépare du maximum. »
- L'article 292, ainsi modifié, est adopté.
M. le président. - Nous arrivons à l'article 295.
M. B. Dumortier. - Messieurs, dans une séance précédente, j'ai demandé que cet article fût remis à d'autres circonstances, et le gouvernement n'y a point fait d'opposition. Il avait reconnu même qu'il y avait de la sagesse dans cette proposition.
Je demande que cet article soit retiré provisoirement du projet de loi et qu'on fixe un jour pour l'examiner, et cela pour plusieurs motifs : d'abord les circonstances dans lesquelles se trouve le pays par suite de l'indisposition du Roi ; en second lieu, il s'agit ici d'un article qui a donné lieu à de très vifs débats au premier vote et qui doit être soumis au second vote.
Comme ce n'est pas seulement un article du Code pénal, mais une question politique, il est juste que, comme on l'a toujours fait, tous nos collègues soient prévenus et qu'on fixe un jour pour l'examen de cet article. J'en fais la proposition formelle.
Je ferai remarquer d'ailleurs qu'il est impossible de songer à l'examiner aujourd'hui, que demain vous avez à vous occuper des pétitions, et que par conséquent vous ne perdrez pas de temps.
M. le président. - M. Dumortier, votre proposition se rapporte aussi à l'article suivant, je pense ?
M. B. Dumortier. - Oui, M. le président.
M. Pirmez. - Il me paraît qu'on pourrait aujourd'hui et demain voter les autres articles qui ne pourront donner lieu à aucune espèce de discussion, et examiner, immédiatement après, les deux articles dont il s'agit. Les prompts rapports viendraient ensuite.
De cette manière on satisferait à la demande de l'honorable M. Dumortier sans retarder la fin du travail du Code pénal qui nous occupe depuis si longtemps.
M. de Theux. - Messieurs, je proposerai à la Chambre de renvoyer la discussion de ces articles à mardi prochain et de maintenir à l'ordre du jour de demain les pétitions.
Nous pourrions reprendre samedi la suite des articles, sauf ceux dont il s'agit et qui sont tout à fait indépendants du projet.
De cette manière, les membres qui désirent prendre part à la discussion et au vote pourront se trouver à la Chambre.
Je pense que l'observation est fondée en raison et conforme aux précédents de la Chambre.
M. le président. - M. Dumortier, vous vous ralliez sans doute à la proposition de M. de Theux ?
M. B. Dumortier. - Oui, M. le président.
M. Guillery. - Je viens combattre la proposition de fixer un jour spécial pour la discussion.
A entendre l'honorable M. Dumortier, il y aurait des membres de la Chambre qui ne se rendraient aux séances qu'à l'occasion de certaines discussions.
Je ne puis admettre ce système. Nous sommes tous prévenus par l'ordre du jour et nous devons tous nous rendre à notre poste. Si les seigneurs féodaux de la droite ne peuvent se rendre ici que lorsque des circonstances extraordinaires se présentent, il arrivera très souvent que la Chambre ne sera pas en nombre. Tant pis pour ceux qui n'y sont pas.
S'il plaît à la droite de revenir sur une discussion épuisée avec aussi peu de succès que la première fois, c'est son droit ; mais au moins que ceux qui veulent éventuellement discuter et même abuser de la discussion veuillent bien nous faire l'honneur de se rendre à leur poste.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il est 4 heures 10 minutes. .Demain nous avons les prompts rapports. Que l'on continue samedi le Code pénal ; d'ici là tout le monde pourra être prêt.
II est inutile de passer maintenant aux autres articles et de revenir ensuite en arrière. Je n'y vois ni utilité ni nécessité.
M. Coomans. - A lundi.
M. Pirmez. - Je propose à la Chambre de postposer les rapports de pétitions. Peut-être la discussion des prompts rapports prendra-t-elle plusieurs jours à la Chambre, et Dieu sait alors quand nous reprendrons le projet de Code pénal !
La plupart des articles ne donnent pas lieu à discussion et nous pourrons examiner ensuite les articles dont il s'agit en ce moment.
M. Coomans. - Et pourquoi pas lundi ?
M. Allard. - Il y a des élections provinciales. M. de Theux. - Je pense que la Chambre ne pourra faire aucune objection à la fixation à mardi des articles dont nous nous occupons.
Il ne s'agit pas des seigneurs féodaux de la droite pas plus que de ceux de la gauche, car plusieurs membres influents de la gauche ne sont pas à leur poste.
M. Guillery. - Nous ne nous en plaignons pas.
M. de Theux. - Nous sommes tous égaux devant la Constitution et devant la loi.
Plusieurs fois la Chambre a fixé jour pour la discussion de certaines propositions.
Il s'agit ici de propositions qui tiennent évidemment à l'interprétation de la Constitution et je crois que par respect pour la Constitution et à cause de l'importance de la question qu'il s'agit de décider, on ne peut reculer devant la proposition de fixer la discussion à mardi prochain. Si l'on continue aujourd’hui la révision du Code pénal, rien n'empêche de réserver les articles dont il s'agit. Mais je crois qu'il est plus convenable de suivre l'ordre du jour et de s'occuper demain des pétitions ; on continuerait samedi la révision du Code, et mardi l'on aborderait l'examen des articles réservés.
M. Goblet. - Je fais la proposition formelle de continuer la discussion du Code pénal jusqu'à ce qu'elle soit terminée. Si nous remettons toujours cette discussion, nous n'en finirons pas.
Dès que nous avons discuté pendant un ou deux jours, nous renvoyons des articles à la commission et nous suspendons la discussion. Ce n'est pas là une manière sérieuse de procéder.
Discuter demain les prompts rapports, c'est remettre le Code pénal à plusieurs jours, car il n'est pas sûr que certaines pétitions ne nous occupent pendant plusieurs séances.
Je fais donc la proposition de continuer la discussion du Code pénal.
M. B. Dumortier. - Je viens appuyer la proposition de l'honorable M. Pirmez qui rentre dans celle de l'honorable M. Goblet.
II y a deux manières de discuter le Code pénal : article par article, ou bien de détacher certains articles et de les réserver jusqu'après le vote des autres.
Il me semble que c'est là incontestablement le système le plus sage. Il s'agit, comme vient de le dire l'honorable M. de Theux, il s'agit d'une question constitutionnelle, à laquelle la droite attache un grand prix ; et certes il n'est personne d'entre vous, je pense, qui veuille bâillonner la droite. (Interruption.)
M. Guillery. - Ce serait bien difficile.
M. B. Dumortier. - Ce serait bien difficile ? Cependant à en juger par la manière dont l'honorable membre traite la droite, il me semble que cela serait très possible ; car de nous traiter de grands seigneurs féodaux à nous bâillonner, la distance n'est pas grande et ce serait évidemment nous bâillonner que de nous contraindre à aborder une discussion à laquelle nous ne devions pas nous attendre : personne ne devait supposer que trois jours auraient suffi pour revoir 294 articles du Code pénal.
(page 1345) M. Guillery. - Ce ne sont que des changements de temps de verbes.
M. B. Dumortier. - Qu'importe ? Ce sont toujours des articles qu'on a dû soumettre à un second vote. Nous forcer à engager demain une discussion sur les articles 295 et 296, c'est, en définitive, faire violence à la moitié de l'assemblée, et je ne pense pas que la gauche oublie à ce point ce qu'elle doit à l'assemblée et au pays.
Je demande donc avec l'honorable M. Pirmez que l'on continue sans désemparer la discussion du Code pénal, en réservant jusqu'à mardi les articles 295 et 296.
De cette manière, chacun de nous pourra se préparer à la discussion après avoir pu assister aux élections provinciales.
M. le président. - Nous sommes donc d'accord pour ne pas nous occuper demain des prompts rapports sur les pétitions.
- De toutes parts. - Oui ! oui !
M. le président. - Maintenant nous avons à statuer sur la proposition de MM. Dumortier et de Theux, qui demandent que les articles 295 et 296 ne soient examinés que mardi prochain.
- Un membre. - Et la proposition de M. Goblet ?
M. le président. - Nous sommes d'accord pour continuer demain la discussion du Code ; mais la question est de savoir si l'on tiendra en suspens jusqu'à mardi les articles 295 et 296. C'est cette question que je mets aux voix.
- L'assemblée, consultée, décide qu'elle continuera demain l'examen du Code pénal, en réservant jusqu'à mardi les articles 295 et 296.
- La séance est levée à quatre heures et trois quarts.