(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1860-1861)
(page 1364) (Présidence de M. Vervoort.)
M. de Florisone, secrétaire, procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.
M. de Boe donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.
- La rédaction en est adoptée,
M. de Florisone, secrétaire, présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.
« Des pêcheurs à la Panne demandent qu'il soit pris des mesures pour arrêter la destruction du frai et du fretin du poisson de mer. »
M. Rodenbach. - Messieurs, ce sont une centaine de pêcheurs de la Panne, arrondissement de Furnes, qui demandent qu'on veuille réglementer la pêche. Les arguments qu'ils font valoir sont de la plus haute importance, Ils signalent, entre autres, que d'année en année, leur industrie s'éteint, que leur misère est telle, que les équipages de barque de pêche sont obligés de quitter le pays, et de chercher à bord des navires de pêche français, qui vont à la pêche en Islande, des moyens d'existence. Finalement, ils pétitionnent, une législation prévoyante, comme en Angleterre, en France, en Prusse et en Danemark. Je demande un prompt rapport.
- Adopté.
« Par messages, en date du 4 mai, le Sénat informe la Chambre qu'il a adopté les projets de lois suivants :
« 1° Portant augmentation du personnel de la cour d'appel de Gand.
« 2° Approuvant la convention entre la Belgique et le Hanovre, concernant le péage de Stade.
« 3° Concernant un crédit de 8,500 fr. 49 c. au département des finances.
« 4° Ouvrant au département de la guerre un crédit extraordinaire de 15,561,170 francs.»
- Pris pour notification.
« Des habitants de Frasnes-lez-Gossclies demandent l'exécution du chemin de fer Grand-Central franco-belge d'Amiens à Maestricht qui est1 projeté par le sieur Delstanche. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif aux travaux publics.
« Le conseil communal de Meerhout déclare adhérer à la pétition du conseil communal de Westerloo, en faveur d'un chemin de fer de Louvain à Herenthals par Aerschot et Westerloo. »
- Même décision.
« Les membres du conseil communal de Flamierge demandent la construction d'un chemin de fer de Marloye à Bastogne. »
- Même décision.
« M. Beeckman retenu par une indisposition grave, demande un congé de quelques jours. »
- Accordé.
M. Vanden Branden de Reeth. - Messieurs, comme mon honorable ami, M. Notelteirs, qui a parlé dans une séance précédente, je ne comptais prendre la parole qu'à l'article premier, qui concerne le chemin de fer de Louvain à Herenthals, mais plusieurs membres de cette assemblée s'étant déjà occupés longuement de ce projet et, en outre, un amendement étant déposé, je pense que c'est aussi le moment de soumettre mes observations à la Chambre.
Messieurs, la construction d'un nouveau réseau de chemins de fer présente toujours un double intérêt. Si, d'une part, ce travail doit, avant tout, offrir un caractère d'utilité publique, d'autre part, il est appelé à desservir également des intérêts locaux, et c'est à concilier ces deux intérêts que doivent tendre nos efforts pour arriver à un résultat véritablement utile.
Le chemin de fer de Louvain à Herenthals présente-t-il un caractère d'utilité publique ?
Messieurs, je pense que sur ce point il n'y aura pas de contestation. Quant à moi, je suis parfaitement d'accord sur l'utilité, la convenance, l'opportunité de ce chemin de fer. Ce ne sera donc pas sous ce rapport que j'examinerai le projet.
Mais il y a la question du tracé.
J'ai dit, messieurs, qu'un chemin de fer doit offrir un intérêt général comme but principal, mais qu'il dessert aussi des intérêts locaux et c'est sous ce dernier rapport que la question d'un tracé a une très grande importance.
Je serai aussi bref que possible dans les observations que je compte présenter.
Je conçois que ce débat, déjà fort aride par sa nature, ne peut intéresser que les membres qui connaissent les localités dont j'ai à m'occuper ; mais la Chambre voudra bien me permettre de l'entretenir quelques instants d'une contrée qui, jusqu'à ce jour, a été privée de ces voies de communication rapides qui répandent le bien-être et la prospérité dans la plus grande partie de la Belgique.
La construction d'un chemin de fer dans une pareille contrée est une bonne fortune qui ne se présente pas deux fois, et dès lors vous comprendrez facilement combien l'on doit chercher à tirer parti d'un pareil événement.
C’est ce qui explique les nombreuses pétitions adressées à la Chambre, les démarches faites auprès du gouvernement, et de la société concessionnaire depuis qu'il a été sérieusement question du chemin de fer de Louvain à Herenthals.
Malheureusement, messieurs, dans ces circonstances des intérêts opposés se trouvent toujours en présence.
Il est souvent très difficile, je dirai même impossible de donner satisfaction à tous, c'est encore ce qui se présente dans le cas actuel.
Mais, messieurs, pour résoudre une question de tracé, que faut-il considérer ?
Il y a, me semble-t-il, deux points auxquels il faut surtout s'arrêter si l'on veut arriver à une conclusion juste et équitable.
La première question qui se présente est celle-ci : quel est le tracé qui s'offre le plus naturellement, celui qui répond le mieux à l'intérêt général ? ensuite quel est celui qui, sans s'éloigner de cette ligne répond aux intérêts et aux besoins les plus nombreux ? Eh bien, messieurs, si nous jetons les yeux sur la carte, nous voyons, en ce qui concerne le chemin de Louvain à Herenthals, que la direction à suivre, celle qui se présente tout naturellement, c'est évidemment le tracé le plus droit.
Je ne dirai pas que c'est en vertu de ce principe élémentaire que la ligne droite est le chemin le plus court d'un point à un autre ; cette vérité serait banale et d'une importance fort secondaire si je ne pouvais y ajouter de nombreuses raisons qui viennent confirmer mon appréciation .
L'honorable M. Notelteirs, dans son discours, vous a prouvé que la ligne droite était ici tout à fait conforme à l'intérêt général et je ne pourrais rien ajouter aux excellentes raisons qu'il a fait valoir ;je ne pourrais que répéter les bons arguments qu'il a développé et ce serait évidemment abuser des moments si précieux de la Chambre.
(page 1365) Dans le cas spécial qui nous occupe, je dirai qu'il n'y a aucun motif pour la société concessionnaire de dévier de cette ligne directe.
D'abord, l'on ne rencontre pas de difficulté de terrain à vaincre, pas d'ouvrages d'art à exécuter ; il n'y a ni déblais ni remblais de quelque importance.
Ainsi, facilité d'exécution et économie d'argent pour la société ; économie de temps pour les voyageurs ; je crois que c'est une considération dont il importe de tenir compte.
En suivant le tracé direct, vous traversez la partie la plus populeuse de cette contrée ; vous passez notamment près de la commune d'Heyst-op-den-Berg qui, à elle seule, compte 6,000 habitants. D'après un travail qui nous a été distribué et que j'ai sous les yeux, en suivant le tracé que je défends, la population des communes situées, non pas à 2, 3 ou 4 lieues, mais à 2, 3 ou 4 kilomètres, ce qui est bien différent, s'élève à 40,705 habitants, tandis que par la direction que l'honorable député de Turnhout propose, elle ne serait que de 26,885 habitants.
Il me semble que c'est déjà là une raison assez péremptoire en faveur du premier tracé.
Si je devais maintenant m'occuper longuement des avantages de la ligne directe, je devrais reproduire tous les arguments qui ont été mis en avant toutes les fois qu’on est venu demander le redressement des lignes qui s'en éloignaient.
Je devrais notamment reproduire les arguments que font valoir les honorables membres qui demandent la ligne directe de Bruxelles à Louvain. Aussi, messieurs, je ne réclame qu'une chose, c'est que les honorables préopinants auxquels je fais allusion restent aujourd'hui conséquents avec les opinions qu'ils ont émises.
Pourquoi lorsqu'ils demandaient ces redressements, rencontraient-ils de la résistance ? Parce qu'ils se trouvaient en présence des faits accomplis.
On répondait aussi que ce serait annuler ou, au moins diminuer considérablement les recettes des chemins de fer déjà en exploitation.
Ici, messieurs, nous n'avons pas ces craintes, et si nous commettons la faute d'adopter un mauvais tracé, elle sera toute volontaire et par conséquent sans excuse.
Cependant, messieurs, malgré les considérations que je viens de faire valoir, je dois reconnaître qu'il n'y a pas ici de principe tellement absolu, qu'il ne soit pas possible d'en faire fléchir quelque peu la rigueur.
C'est pour cela que je ne repousse pas d'une manière complète l'amendement de l'honorable M. Landeloos ; je l'accepte même conditionnellement et en faisant mes réserves. Je conçois que la ville d'Aerschot désire avoir le chemin de fer à sa porte, mais est-il juste, pour donner satisfaction à une localité qui après tout ne compte que 4,200 habitants, de blesser les intérêts d'autres localités au moins aussi importantes ?
Dans ce cas ne faut-il pas chercher à réparer le tort qu'on occasionne par une faveur dont on veut doter une localité ? En suivant le tracé par Aerschot, vous privez ces localités des avantages qu'elles étaient appelées à recueillir, si le projet avait suivi la ligue directe, la ligne réclamée par l'intérêt général et demandée par le plus grand nombre.
Il y aurait un moyen, d'après moi, de concilier ces différents intérêts et c'est pour cela que j'ai dit que j'acceptais conditionnellement l'amendement de M. Landeloos.
Voici quel serait ce moyen :
Il faudrait qu'à partir d Aerschot le tracé se dirigeât vers Herenthals, fît une légère courbe vers Boisschot et Heyst-op-den-Berg ; de cette manière ces localités ne seraient plus déshéritées des avantages dont elles devaient être dotées si on avait suivi la ligne la plus naturelle.
L'honorable M. Nothomb dans le discours qu'il a prononcé a parlé d'un droit acquis pour Aerschot ; je soutiens que s'il y a droit acquis c'est pour les localités dont je prends la défense ; la direction sur Aerschot n'est qu'une concession arrachée à la société concessionnaire, car d'après le premier projet, les premières études, les premiers plans de la société, le chemin de fer devait être plus direct.
L'honorable membre a donné lecture d'une lettre du demandeur en concession M. Bischoffsheim qui prouve à l'évidence que le chemin de fer ne devait pas, dans l'origine, passer par Aerschot.
Voici un passage de cette lettre :
« Bruxelles, 1er mai 1861.
« M. le ministre,
« En réponse à votre dépêche en date de ce jour, relative au chemin de fer de Louvain à Herenthals, permettez-moi d'avoir l'honneur de vous faire remarquer que les études que j'ai fait faire jusqu'ici ont naturellement porté exclusivement sur le tracé tel que le prévoyaient nos conventions, c'est-à-dire, avec embranchement vers Aerschot. »
S'il s'agissait dans les conventions de faire un embranchement vers Aerschot, il en résulte, selon moi, que le chemin de fer ne devait pas y passer, et que la position que vous voulez faire à cette localité est une faveur, et une faveur ne constitue pas un droit acquis.
L'honorable membre a eu beau chercher à expliquer la lettre de M. Bischoffsheim en lui donnant un sens conforme à son opinion. Je ne puis la comprendre ainsi, car les termes sont clairs et peuvent se passer de commentaire.
Messieurs, j'ai des motifs de croire que l'idée que je mets en avant n'est pas complètement étrangère aux intentions de la société. Je puise cette conviction dans les renseignements qui m'ont été fournis par une personne à même d'être parfaitement renseignée, et je regrette de ne pouvoir vous donner lecture d'un passage d'une lettre que j'ai reçue, et qui serait la confirmation de ce que j'avance. Le caractère privé de cette pièce ne me permet pas de la communiquer à la Chambre. Mais ce que je tiens surtout à constater, c'est que l'idée que je mets en avant est acceptable et parfaitement réalisable ; elle aurait, en outre, l'avantage de donner satisfaction, si pas à tous les intérêts engagés dans la question, au moins à un grand nombre.
Messieurs, revenant à l'amendement de mon honorable ami M. Landeloos, j'émettrai un doute sur la question de savoir si cet amendement peut être soumis à un vote législatif. D’ailleurs, en matière de chemin de fer, nous votons le principe, c'est-à-dire l'autorisation soit pour le gouvernement soit pour une société de construire un chemin de fer dans telle ou telle direction, de telle localité à telle autre. Mais nous n'entrons pas dans les détails du tracé, car si on en fixe une partie il n'y a pas de motif pour ne pas le fixer entièrement. Si cependant la Chambre croyait devoir en agir autrement, il y aurait lieu de modifier l'amendement de l'honorable M. Landeloos dans le sens de mes observations. L'amendement demande que le concessionnaire soit tenu de faire passer la ligne principale de Louvain à Herenthals par Aerschot ; il faudrait ajouter, qu'à partir de ce point, la ligne se dirigerait vers Boisschot, et Heyst-op-den-Berg. Mais je le répète, je ne pense pas que nous ayons à entrer dans ces détails, et que nous puissions aller aussi loin.
Il y a des moyens d'exécution dont nous ne pouvons pas nous faire juges. La direction définitive doit résulter des études faites sur les lieux, des plans, etc. Nous ne pouvons pas apprécier toutes ces circonstances et nous devons nous borner ici à émettre un vœu et à présenter des observations au gouvernement, sauf à celui-ci à répondre à nos observations et à nous faire savoir jusqu'à quel point nous pouvons compter sur sa bienveillance. Je serais donc charmé de connaître l'opinion de M. le ministre à l'égard des observations que je viens d'émettre.
J'ignore ce que la Chambre décidera par rapport à l'amendement de l'honorable M. Landeloos. Mais pour le cas où il serait soumis à un vote, je dépose le sous-amendement suivant :
« Ajouter à l'amendement de M. Landeloos, après las mois : « de Louvain à Herenthals », ceux-ci : « pour se diriger à partir de ce point vers Boisschot et Heyst-op-den-Berg. »
Messieurs, puisque j'ai la parole, avant de me rasseoir, je veux donner mon approbation la plus complète aux bonnes raisons qu'a fait valoir dans son remarquable discours mon honorable ami, M. Verwilghen, pour montrer tous les avantages qui doivent résulter, pour une partie notable de la Flandre et pour le pays en général, de l'exécution d'un chemin de fer de Malines à Terneuzen par Tamise et Saint-Nicolas. Il me paraît impossible d'ajouter quelque chose à l'exposé si complet qu'a présenté l'honorable préopinant. Je me bornerai donc à vous demander d'accueillir favorablement l'amendement qui a été déposé et dont je suis heureux d'être l'un des signataires.
Il faudrait, messieurs, des motifs bien graves, non seulement pour refuser mais pour ajourner un travail si utile et qui peut s'exécuter sans bourse délier, la société ne demandant ni subsides, ni minimum d'intérêt.
Messieurs, nous ne devons pas perdre de vue que les chemins de fer répandent le bien-être dans le pays ; plus on les multiplie, plus on accroît la richesse publique. C'est là, messieurs, un véritable progrès auquel nul ne peut s'opposer.
M. Van Overloop. - Messieurs, nous avons déposé un amendement ayant pour but d'autoriser le gouvernement à concéder, aux conditions ordinaires, une ligne de chemin de fer de Malines à Terneuzen.
Deux adversaires ont ouvertement combattu cet amendement, l'un c'est mon honorable ami M. de Decker, l'autre c'est l'honorable ministre des travaux publics. Mon honorable ami M. de Decker, se plaçant au point de vue de (page 1366) l’arrondissement de Termonde, a fait valoir avec son talent habituel, tous les avantages qui se rattacheraient à l'achèvement de la ligne de Dendre et-Waes vers Terneuzen ; mais, immédiatement après, obéissant aux sentiments généreux qui le caractérisent, il a, se plaçant à un point de vue plus large, au point de vue de l'intérêt général, fait ressortir toute l'utilité qui résulterait pour le pays, d'une ligne de chemin de fer reliant Saint-Nicolas à la capitale.
L'honorable ministre des travaux publics, messieurs, s'est contenté de dire qu'il se trouvait en présence de trois demandes de concession : ta demande de concession d'une ligne de Lokeren à Terneuzen, la demande de concession d'une ligne de Gand à Terneuzen, et la demande de concession de la ligne dont je m'occupe spécialement.
L'honorable ministre des travaux publics a ajouté que cette affaire n'est pas instruite, qu'il devait examiner laquelle de ces lignes méritait la préférence, et il a fini par dire que la Chambre abandonnerait son droit de contrôle si elle adoptait notre amendement.
Je pense, messieurs, que nos deux honorables adversaires se trompent également dans le point de départ de leur argumentation. Que font-ils ? Ils se placent l'un et l'autre au point de vue de la ville de Terneuzen ; ils oublient que ce que nous demandons, avant tout, c'est moins la concession d'une ligne allant à Terneuzen, d'une ligne rattachant la petite ville de Terneuzen à la Belgique, que la concession d'un chemin de fer traversant le cœur du pays de Waes et allant jusqu'à la frontière hollandaise.
Mon honorable ami, M. de Decker, disait :
« Une ligne directe de Saint-Nicolas sur Bruxelles, avec un pont sur l’Escaut, serai un travail important dont les conséquences seraient fécondes pour une grande partie du pays, et, pour ma part, loin de jalouser ce bienfait pour le pays de Waes, je le lui souhaite de grand cœur. »
Eh bien, messieurs, c'est précisément là ce que nous demandons. Ce que nous désirons, avant tout, c'est une ligne reliant Saint-Nicolas à la capitale, un pont sur l'Escaut à Tamise.
Si nous demandons, messieurs, une ligne qui aille jusqu'à la frontière hollandaise, c'est que nous espérons que, plus tard, le gouvernement hollandais accordera, de son côté, une concession permettant le rattachement de l'extrême ligne belge à une ligne hollandaise, allant de la frontière belge à Terneuzen.
Il est à remarquer, messieurs, que les travaux du chemin de fer dont nous demandons la concession seraient très peu importants, au nord de Saint-Nicolas, dans la direction de la ligne hollandaise, mais, qu'ils seraient très importants au sud de Saint-Nicolas dans la direction de Tamide.
Donc, en appréciant notre amendement, il faut nécessairement mettre de côté le point de départ de M. le ministre des travaux publics et de l'honorable M. de Decker ; il faut laisser Terneuzen de côté. La question n'est pas de savoir s'il est utile de relier Terneuzen à la Belgique ; mais la question est de savoir s'il est utile, s'il est juste de faire jouir le pays de Waes des bienfaits d'une ligne de chemin de fer avec un pont sur l'Escaut. Voilà la question à examiner.
La question ainsi posée, est déjà résolue ; elle fait crouler les objections de l'honorable M. de Decker et de M. le ministre des travaux publics.
Est-il utile d'accorder la concession que nous demandons ? Le discours de mon honorable ami, M. Verwilghen, ne peut, me semble-t-il, laisser aucun doute sur la réponse affirmative à cette question.
La ligne que nous proposons, partant du chemin de fer à Malines, constituerait évidemment un affluent considérable pour notre réseau national.
La ligne reliant Malines à Saint-Nicolas serait d'un avantage direct immense pour les deux importants arrondissements de Malines et de Si-Nicolas.
Par la station de Willebroeck, village qui est rattaché à Boom, au moyen d'un pont sur le Rupel, la ligne que nous défendons avantagerait une partie notable de l'arrondissement d'Anvers, Boom et ses industrieux environs.
Croisant à Saint-Nicolas la ligne concédée d'Anvers à Gand, le chemin de fer de Malines à Terneuzen permettrait de verser, dans tous les coins du pays, les produits agricoles du riche pays de Waes.
Aboutissant à la Zélande, dont les produits agricoles annuels sont évalués à 35,658,514 francs, l'exécution du railway que nous demandons faciliterait considérablement l'alimentation de notre pays.
Mettant le centre de l'arrondissement de Saint-Nicolas en relation avec Liège, Charleroi, le Centre et le couchant de Mons, ce même chemin de fer assurerait un nouveau débouché à ces parties industrielles du pays, et, ce qui est plus important, il rendrait le combustible moins cher aux nombreux ouvriers des fabriques de Saint-Nicolas, Tamise et autres communes.
Par l'exécution d'un pont sur l'Escaut à Tamise, la réalisation dû notre projet contribuerait efficacement à la défense du pays, soit en assurant la retraite de nos troupes sur Anvers, ce dont Dieu nous préserve !, soit en facilitant un retour offensif sur Bruxelles.
Il est vrai que la construction de ce pont ne sera pas chose aisée, mais cette considération ne doit pas plus arrêter nos ingénieurs que le pont de Strasbourg à Kehl, qui a une longueur de 234 mètres, n'a arrêté les ingénieurs français et badois ; elle n'arrêtera pas plus nos ingénieurs que le pont de Cologne à Deutz, qui a une longueur de 420 mètres, n'a arrêté les ingénieurs prussiens. L'Escaut à Tamise a moins de 300 mètres de longueur.
Maintenant, est-il juste de faire jouir le pays de Waes des bienfaits d'une ligne de chemin de fer avec un pont sur l'Escaut ?
Messieurs, le discours de l'honorable M. Verwilghen ne peut, encore une fois, laisser aucun doute dans vos esprits.
Depuis 1830, le pays de Waes verse dans le trésor des ressources abondantes destinées à doter les autres arrondissements de nouveaux éléments de prospérité.
Comme mon honorable ami vous l'a dit, l'arrondissement de Saint-Nicolas paye annuellement à l'Etat 2,775,000 francs.
Je ne puis que le répéter avec l'honorable M. Verwilghen : « C'est un contingent fort honnête et passablement utile à certains arrondissements qui depuis longtemps sont passés maîtres dans l'art de s'annexer la meilleure partie des ressources du trésor, » Aussi espérons-nous, avons-nous le droit d'espérer, que les représentants de ces arrondissements, écoutant la voix de leur conscience, donneront leur appui et leur vote à notre amendement.
Il est d'autant plus juste que le gouvernement accepte notre amendement, qu'autrefois nous avions un service de bateaux à vapeur de l'Etat entre Anvers et Tamise, service que l'Etat a supprimé sans compensation aucune.
Il est d'autant plus juste que c'est, et je n'hésite pas à le répéter aujourd'hui, par la négligence du gouvernement que l'Escaut s'est ensablé devant Tamise du côté de Bornhem.
Si le gouvernement avait écouté les réclamations que Tamise lui a, dès l'origine adressées, relativement à des épis dont l'administration avait toléré le placement dans l'Escaut, le fleuve ne se trouverait pas ensablé comme il l'est et le passage de Tamise à Bornhem, de l'arrondissement de Saint-Nicolas dans le petit Brabant, pourrait s'effectuer d'une manière convenable, tandis qu'il n'en est pas ainsi aujourd'hui.
J'arrive à l'examen des objections que nous a faites M. le ministre des travaux publics.
Il y a, dit l'honorable ministre, trois lignes dont on demande la construction vers Terneuzen. Je dois examiner laquelle de ces trois lignes mérite la préférence, car Terneuzen n'est pas assez important pour avoir trois lignes à la fois.
Nous avons déjà dit, messieurs, que c'est là déplacer la question. Il ne s'agit pas de Terneuzen, mais d'un chemin de fer passant à travers le pays de Waes et allant jusqu'à la frontière hollandaise.
Mais en supposant qu'il ne faille qu'un de ces trois chemins, l'utilité de la ligne de Malines vers Terneuzen est démontrée.
Personne ne peut contester cette utilité, ni la justice des réclamations du pays de Waes.
Lokeren est déjà relié au réseau de l'Etat et à Bruxelles par le chemin de fer de Dendre-et-Waes, dans la construction duquel le gouvernement est intervenu.
Gand a des lignes de l'Etat dans toutes les directions, et de plus des lignes concédées vers Anvers, Audenarde et Eecloo.
Gand est déjà relié à Terneuzen par un canal exécuté aux frais du gouvernement.
Mais pourquoi, si des concessionnaires se présentaient pour les trois lignes, ne les satisferait-on pas ?
Je n'en vois pas de motifs. Si des concessionnaires se présentaient pour doter de chemins de fer toutes les localités du pays, n'y aurait-il pas lieu de laisser jouir ces localités de ce bienfait ? Ne sommes-nous pas égaux ?
Saint-Nicolas ne demande pas de privilège, mais il veut qu'on n'en accorde pas à son détriment.
Nous, députés de Saint-Nicolas, nous ne jalousons pas plus la ligne de Lokeren à Terneuzen, que mon honorable ami M. de Decker ne jalouse la ligne de Saint-Nicolas vers Bruxelles.
(page 1367) Au contraire, nous sommes tous disposés à appuyer de notre parole et de notre voie la demande en concession d'un chemin de fer de Lokeren à Terneuzen.
Nous en disons autant de la demande qui aurait pour objet de relier Gand à Terneuzen.
Si nous insistons spécialement aujourd'hui en faveur de la ligne de Malines, c'est que Lokeren est à l'extrémité du pays de Waes ; c'est que le centre de l'arrondissement de Saint-Nicolas a droit à avoir une ligne ferrée.
Il est bien temps, au bout de trente ans, que ce droit soit reconnu. Nous disons avec l'honorable ministre des travaux publics : il est plus équitable de créer de nouveaux travaux pour relier de nouvelles localités au railway national, que d'améliorer ceux qui existent déjà.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Certes !
M. Van Overloop. - Nous sommes d'accord. Nous disons avec vous qu'il est plus utile de créer des travaux publics nouveaux reliant de nouvelles localités au chemin de fer de l'Etat, que d'améliorer la ligne de Dendre-et-Waesou de doter Gand d'une ligne de chemin de fer, allant vers Terneuzen, alors que Gand est déjà relié à Terneuzen par un canal.
La seconde objection de M. le ministre des travaux publics est celle-ci ;
En adoptant l'amendement, la Chambre abdiquerait son droit de contrôle.
Vous remarquerez, messieurs, que le gouvernement n'est pas toujours si soucieux du droit de contrôle de la Chambre. Il nous en a donné une preuve dans une circonstance récente.
Il est inutile de rappeler cette circonstance à votre esprit, elle y est encore présente. D'ailleurs je ne l'en ai point blâmé.
En repoussant notre amendement, le gouvernement aurait deux poids et deux mesures.
'Ainsi il n'a pas prétendu que la Chambre abdiquait son droit de contrôle en l'autorisant, en 1856, à accorder, aux conditions ordinaires, la concession d'une ligne de Bilsen à Tongres.
Le gouvernement prétendra-t-il que la Chambre abdiquerait son droit de contrôle en votant l'article 4 du projet de loi en discussion ?
Que porte cet article ?
« Le gouvernement est autorisé à concéder, aux conditions ordinaires :
« 1° Un chemin de fer de Tournai à la frontière de France vers Lille ;
« 2° Un chemin de fer de Marienbourg à la Meuse, en amont de Dinant. »
Que devient, dans ces deux cas, le droit de contrôle de la Chambre, dont le gouvernement se montre si soucieux lorsqu'il s'agit de repousser notre amendement ?
Que le gouvernement soit tranquille ! La Chambre ne compromettra pas ses prérogatives.
Nous demandons que le gouvernement n'ait pas deux poids et deux mesures et que s'il se montre si soucieux du droit de contrôle de la Chambre quand il s'agit de la ligne de Terneuzen à Malines, il le soit aussi quand il s'agit de la ligne de Tournai à Lille ou de celle de Marienbourg à Dinant, ou de la jonction de la Lys à l’Yperlée, dom parle le rapport de la section centrale.
La seconde objection de M. le ministre des travaux publics n'est donc pas sérieuse.
Il reste une troisième objection : « La ligne de Malines à Terneuzen, dit-on, pourrait léser de graves intérêts. »
Lesquels ? M. le ministre des travaux publics n'indique absolument aucun des intérêts qui seraient lésés. Ce ne sont certes pas ceux de la société de Dendre-et-Waes, car elle pourrait, à l'aide d'un léger tronçon, se rattacher à la ligne de Malines à Terneuze, soit en allant se combiner avec cette ligne à Axel, en Hollande, soit, si l'on veut éviter l'exécution de travaux d'art, en se rattachant à cette ligne, aux environs de Stekene.
De cette manière les intérêts de la société seraient parfaitement couverts.
Au surplus je ne pense pas que le gouvernement voudrait priver un arrondissement important du pays du bienfait d'une ligne de chemin de fer, par des considérations tirées de l'intérêt d'une société particulière.
La société de Dendre-et-Waes et la ville de Lokeren ont donc intérêt à appuyer notre amendement. La réalisation de la ligne que nous soutenons aurait pour résultat de permettre à la société de Dendre-et-Waes et à la ville de Lokeren de se mettre plus facilement et avec moins de frais en rapport avec le port de Terneuzen.
Ce ne sont pas davantage les intérêts d s la ville de Gand qui seraient lésés. Car, par le chemin de fer concédé d'Anvers à Gand, cette dernière ville se relierait, à Saint Nicolas, au chemin de fer de Malines à Terneuzen et, par conséquent, au moyen d'un léger détour, la ville de Gand profiterait parfaitement de la ligne que nous défendons.
Gand, en outre, serait, au moyen de ce chemin de fer, en rapport direct avec le centre si populeux et si productif du pays de Waes.
Ce ne sont pas non plus les intérêts d'Anvers qui pourraient être lésés.
Jamais Terneuzen, qui est une ville de 2,634 habitants, ne pourra organiser contre Anvers une concurrence fâcheuse. Cela est évident ; il suffit de connaître la localité ; il suffit de savoir que Terneuzen est situé au beau milieu des polders et de connaître les conditions hygiéniques du pays des polders, pour être convaincu que jamais une maison de commerce importante ne pourra s'établir à Terneuzen et réaliser une concurrence contre Anvers.
La ville, de même que l'arrondissement d'Anvers, ont, au contraire, le plus grand intérêt à ce que la ligne de Malines à Terneuzen soit exécutée,
Cette ligne exécutée, qu'arriverait-il ? Les chargements en destination d'Anvers qui, actuellement, sont arrêtés, en hiver, par les glaçons, ne seraient plus exposés à s'avarier par un long séjour devant Terneuzen. Ils pourraient être transbordés immédiatement sur le chemin de fer dont nous demandons l'exécution, arriver à Saint-Nicolas, et de là à destination par le chemin de fer de Gand à Anvers.
Enfin, messieurs, la ligne projetée serait, au point de vue d'un avenir qui n'est peut-être pas très éloigné, cette ligne serait d'un grand avantage pour la Belgique entière, parce qu'elle permettrait à notre pays de conserver le transit vers l'Allemagne.
Si, comme le faisait remarquer l'honorable M. Verwilghen, on construit la ligne de Flessingue à Düsseldorf, que deviendra le transit par la Belgique vers l'Allemagne ? Il sera nécessairement anéanti.
Eh bien, au moyen de notre ligne, qui irait aboutir à Terneuzen en face de Flessingue, ce transit serait maintenu au profit de la Belgique. Cela me paraît incontestable.
A entendre l'honorable ministre des travaux publics, il ne se préoccuperait que des intérêts des villes de Gand et d'Anvers, il me semble qu'en se plaçant ainsi au point de vue de la ville de Gand, l'honorable ministre des travaux publics met un peu de côté (n'a-t-il pas tort ?) sa qualité de ministre pour ne considérer que celle de député de Gand. Il voudrait, si je puis répéter l'expression dont il s'est servi en répondant aux honorables députés de Bruxelles, quelques miettes pour Gand. Je ne sais réellement pas pourquoi, si l'on doit consulter les conseils communaux de Gand et d'Anvers, on ne consulte pas également les conseils communaux de Lokeren et de Termonde.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - C'est que je] connais leur avis.
M. Van Overloop. - Soit !
Toujours est-il que vous avez gardé un silence absolu sur les nombreuses pétitions de la plupart des conseils communaux du petit Brabant et du pays de Waes, qui demandent la concession d'une ligne de Malines à Terneuzen ; toujours est-il que vous n'avez pas dit à la Chambre que vous avez reçu de nombreuses députations, ce dont nous vous remercions sincèrement ; toujours est-il que vous vous êtes tu sur l'avis de la chambre de commerce de Saint-Nicolas.
Je tiens à faire connaître à la Chambre toutes les démarches qui ont été faites dans l'intérêt de cette concession ? Presque tous les conseils communaux du petit Brabant, presque tous les conseils communaux du pays de Waes ont adressé à la Chambre des pétitions en faveur de la ligne que nous réclamons, et M. le ministre des travaux publics a reçu de nombreuses députations dans le même but ; la chambre de commerce de Saint-Nicolas, entre autres, a été reçue par l'honorable ministre, ainsi que MM. les bourgmestre et échevins.
Quant à la ville de Gand, je crois qu'elle a trop le sentiment de la justice et de la solidarité qui doit régner au sein de la population flamande, pour qu'elle vienne combattre l'adoption de notre amendement. La ville de Gand, du reste, y est également intéressée et elle n'oubliera pas qu'elle est déjà reliée à Terneuzen par un canal construit aux frais de l'Etat, canal sur lequel il y a même, si je ne me trompe, un service de bateaux à vapeur.
Repousser notre amendement, ce serait donc véritablement manquer à toutes les règles de l'égalité et de la justice.
(page 1368) L’honorable ministre des travaux publics, répondant aux honorables députés de Bruxelles ou plutôt repoussant l'amendement de ces honorables députés et de ceux de l'arrondissement de Louvain tendant à l'établissement d'une ligne directe de la capitale à Louvain, disait : « Une seule considération pourrait engager le gouvernement à construire la ligne directe, ce serait une considération de justice et d'équité.
« S'il était démontré que les deux arrondissements de Bruxelles et de Louvain eussent été complétement perdus de vue, comme on le prétend, je concevrais que, par acquit de conscience, le gouvernement se résignât à cet énorme sacrifice. »
Eh bien, messieurs, l'arrondissement de Saint-Nicolas a été complétement perdu de vue, et depuis 30 ans, dans tous les projets de travaux d'utilité publique extraordinaires.
Le gouvernement devrait donc pur acquit de conscience, exécuter lui-même une ligne de Bruxelles à Saint-Nicolas et traversant tout le pays de Waes ; et cependant le gouvernement repousse un amendement qui a pour but quoi ?
De le faire autoriser à concéder, aux conditions ordinaires, la ligne de Malines à la frontière vers Terneuzen ! Est-ce là de la justice ; est-ce là de l'égalité ? Personne, je pense, n'aura la pensée de le prétendre.
Dans la séance de samedi dernier, l'honorable ministre des travaux publics répondant à des honorables députés de Bruxelles, disait encore : « Je comprends qu'on autorise le gouvernement à concéder aux conditions ordinaires. »
Et que demandons-nous, nous, députés de Saint-Nicolas ?
Nous demandons que le gouvernement soit autorisé à concéder, aux conditions ordinaires, la ligne de Malines à Terneuzen ; et le gouvernement nous refuse !
Je dis, messieurs, que ce n'est pas là de la justice, de l'égalité, et je me plais à croire que la Chambre ne fera pas bon accueil à une semblable opposition.
Mais, messieurs, il y a ceci de plus remarquable encore, c'est qu'en faveur de la ligne de Malines à Terneuzen, nous invoquons identiquement les mêmes motifs que ceux qu'invoque le gouvernement en faveur de la ligne de Tournai à Lille.
Voici, en effet, ce que je lis dans l'exposé des motifs, au sujet de cette ligne :
« La création d'un chemin de fer direct de Tournai vers Lille est vivement désirée depuis un grand nombre d'années ; son utilité ne peut être contestée, eu égard surtout au long détour que fait le chemin de fer de Tournai vers Lille par Mouscron.
« La distance de Tournai à Lille, par cette voie, est de 35 kilomètres, le trajet se fait en 1 heure 30 minutes ; par un chemin de fer direct, la distance ne serait que de 20 kilomètres, que l'on pourrait franchir en 50 minutes. Par cette ligne la distance serait donc raccourcie de 45 kilomètres et la durée du trajet d'environ 40 minutes.
« L'établissement d'un chemin de fer direct de Tournai à Lille favoriserait indubitablement les relations nombreuses existant entre ces deux villes ; il faciliterait les transports des matières pondéreuses du Hainaut, vers le centre du département du Nord en France ; il serait surtout utile aux exportations des produits du bassin houiller du couchant de Mons ; le marché de ce département limitrophe est en partie acquis audit bassin ; mais il a une rude concurrence à soutenir ; il a à lutter contre les charbons anglais, et tout ce qui tend à diminuer les distances, la durée et les frais du transport, doit lui faciliter cette lutte.
« Une considération importante milite encore en faveur de la proposition du gouvernement : c'est que le chemin de fer dont il s'agit raccourcirait de 40 minutes la durée du trajet de Bruxelles à Londres, par Jurbise, Tournai et Calais. »
Eh bien, messieurs, je dis que nous renvoyons identiquement les mêmes arguments en faveur de la ligne de Malines à Terneuzen.
Le gouvernement dit : « La ligne de Tournai vers Lille est vivement désirée depuis un grand nombre d'années. » Nous disons : « La ligne de Malines à Terneuzen n'est pas moins vivement désirée, comme le constatent les nombreuses pétitions adressées à la Chambre, et les députations reçues par M. le ministre des travaux publics.
« L'utilité de la ligne de Tournai à Lille, dit encore l'exposé des motifs, ne peut être contestée eu égard surtout au long détour que fait le chemin de fer de Tournai vers Lille par Mouscron. »
Nous disons, de notre côté, l’utilité de la ligne de Malines à Terneuzen n'est pas contestable, eu égard surtout au long détour que les populations du pays de Waes doivent faire pour se mettre eu communication avec le centre du pays. »
« La distance de Lille à Tournai, ajoute-t-on, est de 35 kilomètres le trajet se fait en 1 heure 50 minutes ; par un chemin de fer direct, la distance ne serait que de 20 kilomètres, que l'on pourrait franchir en 50 minutes. »
Nous disons : « La distance de Saint-Nicolas à Bruxelles, par Anvers, est de 63 kilomètres ; la ligne directe ne serait que de 48 kilomètres ; le trajet se fait actuellement en 3 heures 30 minutes, il se ferait, par la ligne directe en 1 heure. »
La distance de Saint-Nicolas à Bruxelles, par Termonde, est encore plus grande.
« La ligne de Tournai à Lille, dit l'exposé des motifs, favoriserait les relations nombreuses entre ces deux villes. »
Celle de Malines à Terneuzen, disons-nous, favoriserait de nombreuses relations, non seulement entre deux villes, mais entre le pays de Waes et le centre de la Belgique, et entre la Belgique et la Zélande.
« La ligne de Tournai à Lille favoriserait l'industrie houillère du Hainaut. »
Celle de Malines à Terneuzen favoriserait bien plus cette industrie, et, en outre, celle du pays de Liège.
« La ligne de Tournai à Lille raccourcirait la distance de Bruxelles à Londres, par Calais, de 40 minutes. »
Eh bien, celle de Malines à Terneuzen, continuée jusqu'à Breskens, raccourcirait la distance de Bruxelles à Londres de six heures et demie !
Vous voyez que les arguments que fait valoir l'exposé des motifs en faveur de la ligne de Tournai à Lille peuvent être invoqués a fortiori en faveur de la concession de Malines vers Terneuzen.
Nous sommes donc fondés à demander au gouvernement qu'il ajoute à l'article 4 un paragraphe qui l'autorise à concéder, aux conditions ordinaires, la ligne de Malines à la frontière hollandaise ; nous ne demandons pas davantage, si le gouvernement admet la ligne de Tournai à Lille (j'insiste sur ce point), il est incontestable que les mêmes arguments existant en faveur du chemin de fer de Malines à Terneuzen, il doit adopter notre amendement, accorder à Malines et à Saint-Nicolas ce qu'il accorde à Tournai.
Je ne sais pas pourquoi le gouvernement ne répond pas à notre demande comme il a répondu à la demande de jonction de la Lys à l'Yperlée. Voici ce qui s'est passé. La section centrale a demandé pourquoi ce travail n'était pas compris dans le projet de loi.
Voici la réponse du gouvernement :
« Le gouvernement n'est pas resté inactif ; en exécution de la promesse qu'il avait faite, il a fait procéder à une étude comparative, entre l'ancien tracé, proposé pour le canal, et un tracé qui empruntait la Mandel rectifiée et canalisée. Il est résulté de cette étude que ce dernier tracé est à la fois le plus long et le plus coûteux ; la question se trouve ainsi simplifiée. Dans cet état de choses, le gouvernement ne trouve pas de difficulté à laisser inscrire au projet de loi une clause en vertu de laquelle il serait autorisé à concéder un canal de jonction entre la Lys et l'Yperlée. Il va de soi que si cette concession n'était reconnue possible que moyennant intervention pécuniaire de l'Etat, la législature aurait à approuver la convention qui aurait été passée. »
Nous ne demandons pas davantage, nous demandons que le gouvernement soit autorisé à concéder aux conditions ordinaires la ligne que nous attendons.
Si plus tard, en réclamant, ce qui est de pure hypothèse, la garantie de l'Etat, la question devrait être portée devant la Chambre ; si la concession de cette ligne présentait des inconvénients qu'on ne nous signale pas, le gouvernement ne concéderait pas.
Mais si aucun inconvénient ne se présente, si l'intervention du trésor n'est pas réclamée, pourquoi nous qui, depuis 30 ans sommes séparés du centre du pays quand toutes les autres parties y sont rattachées par un chemin de fer... (Interruption).
J'entends l'honorable M. Julliot qui m'interrompt ; je lui répondrai que je voudrais que le pays de Waes fût aussi heureux que son arrondissement ; car le gouvernement va intervenir pour le chemin de fer de Bilsen à Tongres ; nous en disons autant aux députés de Diest, et à tous ceux qui vont recevoir les bienfaits du trésor public.
Je demande pourquoi l'Escaut continuerait à servir de barrière entre le pays de Waes et la capitale ?
Le gouvernement pourrait-il nous faire connaître des motifs sérieux qui s'opposent à la concession de cette ligne ? Je suis convaincu de la négative.
En résumé, tout milite en faveur de notre amendement ; absence d'inconvénients qui en empêchent l'adoption ; intérêt du trésor, notre (page 1369) ligne sera un affluent considérable pour le chemin de fer de l'Etat ; intérêt international des arrondissements de Gand, d'Anvers, de Malines de Saint-Nicolas, des provinces de Liège et de Hainaut, intérêt résultant des besoins d’alimentation du pays.
Indépendamment de ces divers intérêt, des considérations d'humanité en faveur des classes ouvrières viennent vous engager à admettre notre amendement. Les classes ouvrières pourraient se chauffer à un prix plus modéré dans l'industrieux pays de Waes.
Nous demandons donc avec confiance la réparation du long oubli dans lequel est resté ce pays ; nous espérons que la Chambre, qui s'est toujours placée au point de vue large des intérêts généraux, qui n'a jamais été sourde au cri de la justice, fera à notre amendement un accueil plus favorable que le gouvernement.
Déjà trois sections ont exprimé une opinion favorable à cet égard ; la section centrale, elle aussi, a vivement recommandé notre proposition a votre sollicitude.
Je pourrais faire valoir encore un grand nombre de considérations à l'appui de ma thèse, mais je me sens fatigué et je ne veux pas occuper davantage la bienveillante attention de la Chambre. Nous attendons avec sécurité un vote ou des explications favorables aux intérêts si légitimes de l'arrondissement de Saint-Nicolas.
M. le président. - Comme suite au discours qu'il a prononcé dans la discussion actuelle, l'honorable M. Nothomb vient de déposer un sous-amendement à l'amendement de MM. Landeloos et consorts, à l'article premier, paragraphe premier, du projet, consistant à ajouter ce qui suit : « et sous la condition encore que la ligue à partir d'Aerschot, se rapproche autant que possible de la région sud-est de l'arrondissement de Turnhout, de manière qu'elle ne puisse en aucun cas passer à plus de 3 kilomètres du chef-lieu du canton de Westerloo.
Cet amendement porte les signatures de M. Nothomb et de M.de Mérode-Westerloo.
page 1543M. d'Ursel(page 1369) M. Ch. Lebeau. - Je demanderai la permission de répondre deux mots à ce qu'a dit l'honorable ministre des travaux publics. On nous a reproché de nous laisser aller à un sentiment de rivalité industrielle quand nous venons réclamer notre part des faveurs du gouvernement pour le bassin de Charleroi. C'est une erreur que je tiens à rectifier ; nous n'envions rien au bassin de Liège, nous désirons que le bassin de Liége, comme le bassin de Mons, le bassin du Centre et celui de Charleroi, comme tout le pays enfin prospèrent ; ce dont nous nous plaignons, c’est d’être restés en dehors dans la distribution des crédits que réclame le gouvernement pour les travaux publics.
Nous demandions deux choses ; l'élargissement du canal de Charleroi et l'exécution d'un chemin de fer de Marchienne à Baume, chemin concédé à une compagnie qui ne peut pas l'exécuter, d'un-chemin de fer destiné à être un affluent très productif au chemin de fer de l'Etat. Le gouvernement est sourd à nos réclamations, tandis qu'il accorde ses faveurs au bassin de Liège. C'est ainsi qu'il demande une somme destinée à améliorer la navigation de la Meuse.
Ensuite, il demande un crédit pour des travaux à Gand, pour raccorder des charbonnages et des établissements industriels au canal de Liège à Maestricht. Cependant nous ne dirons pas au gouvernement : Ne faites rien pour le bassin de Liège. Je suis même disposé à voter le crédit que l'on demande. Mais je dis que vous auriez dû également faire quelque chose pour le bassin de Charleroi et je ne puis m'e-pêcher de mettre en parallèle les deux intérêts en présence.
Les travaux qu'il s'agit de faire dans le bassin de Charleroi sont des travaux productifs, dont les revenus rembourseront le capital et les intérêts en peu d'années, tandis que les travaux qui sont à faire dans le bassin de Liège et que je ne lui envie pas, sont des travaux qui ne rapporteront rien.
En effet, les travaux qu'on va faire à la Meuse occasionneront une dépense qui ne donnera rien au trésor. Il en en de même du raccordement des charbonnages et des établissements industriels au canal de Liège à Maestricht. Nous ne venons pas dire cependant : Ne faites rien, mais nous disons au gouvernement : Vous auriez dû faire plu.
Messieurs, le gouvernement, me semble-t-il, méconnaît un principe qu'il devrait avoir en vue, c'est de favoriser non seulement le producteur, mais avant tout le consommateur belge.
Or, pour favoriser le consommateur indigène, que faut-il faire ? il faut établir de nombreuses voies de communication ; il faut les rendre faciles et il faut abaisser autant qu'on le peut les péages.
On vient vous parler de la Meuse.
On vous dit que c'est un fleuve destiné à transporter nos charbons vers le nord en Hollande et vers le midi en France.
C'est précisément la position dans laquelle se trouve la Sambre.
Le canal de Charleroi au contraire est une voie de communication intérieure.
Il est destiné à transporter tous nos produits à l'intérieur. Donc favoriser l'élargissement du canal de Charleroi, c'est favoriser les transports à bon marché dans l'intérieur du pays.
Par conséquent vous favorisez ainsi le consommateur belge, c'est-à-dire l'industrie belge et le travail national.
Au contraire, quand vous favorisez l'exportation, cela est favorable aux producteurs du pays, il est vrai ; mais on favorise aussi les consommateurs étrangers.
Voilà la différence qu'il y a entre les canaux et les chemins de fer qui facilitent les transports des matières premières dans l'intérieur du pays et les canaux et les chemins de fer qui facilitent les transports vers l'étranger. D'un côté, vous favorisez deux intérêts nationaux, tandis que, de l'autre côté, vous n'en favorisez qu'un.
Messieurs, on prétend que, pour la Meuse, il s'agit d'un travail de création, que la navigation y est presque impossible, tandis que pour le canal de Charleroi, il ne s'agît que d'un travail d'amélioration. Messieurs, si vous comparez le trafic qu'il y a sur la Meuse et celui qui existe sur le canal de Charleroi, vous devez reconnaître que la dépense sera bien mieux appliquée, en la consacrant au canal de Charleroi plutôt qu'à l'amélioration de la navigation de la Meuse.
D'un autre côté, nous pensons qu'entre les deux intérêts en présence l'intérêt du consommateur belge et l'intérêt du consommateur étranger, il faut évidemment donner la préférence au premier.
Mais il y a plus : c'est que le canal de Charleroi devient chaque jour de plus en plus insuffisant par suite de l'augmentation sans cesse croissante de la consommation des matières premières et particulièrement du charbon.
Les transports augmentent journellement sur le canal de Charleroi, au point que l'on en est arrivé au maximum de l'éclusage sur ce canal ; il en résulte que les transports ne peuvent plus se faire avec la même célérité qu'autrefois.
Les bateaux doivent rester un jour et quelquefois deux jours pour arriver à Bruxelles ; ils doivent attendre aux écluses. Il en résulte pour les transports une augmentation de dépenses, une augmentation de fret qui tombe à la charge du consommateur, parce que, ainsi que j'ai eu l'honneur de le dire, et ce point ne peut être contesté ni réfuté, c'est le consommateur qui paye les frais de transport.
Pour lui, le prix de revient ne se compose pas seulement du prix de la marchandise sur le lieu de production, mais encore des frais de transport jusqu'à l'arrivée de la marchandise dans les magasins.
Messieurs, on craint vraiment de réclamer ici quelque chose, quand il s'agit du bassin de Charleroi. Immédiatement on vous répond : Vous êtes riches à Charleroi ; de quoi vous plaignez-vous ? Messieurs, il est vrai que nous avons d'immenses établissements métallurgiques, charbonniers, verriers et autres ; mais ces établissements sont créés avec les capitaux privés ; ce sont les industriels qui les ont créés ou moyen de leurs ressources.
Or pour qui veut-on faire des voies de communication, des canaux, des chemins de fer, si ce n'est pour transporter les produits des grands établissements de production de matières premières vers l'intérieur du pays, ou vers les pays étrangers pour tout ce que la consommation intérieure ne peut absorber ?
Il est donc naturel que vous fassiez des voies de communication précisément pour transporter les produits là où il y en a à transporter, et vous ne devez pas vous plaindre que nous ayons des routes, des canaux, des chemins de fer, car ces canaux, ces routes, ces chemins de fer sont productifs, ils rapportent des bénéfices à l'Etat. Non seulement ils couvrent les frais d'entretien et d'intérêt des capitaux engagés mais ils remboursent en peu d'années les capitaux employés. C'est ce qui est arrivé pour le canal de Charleroi. Il a été construit par voie de concession ; le gouvernement l'a racheté vers 1835 ; il a maintenu les péages qui étaient très élevés, parce que la concession était de peu de durée ; et au moyen de ces péages, le gouvernement a été remboursé trois fois de son capital. Cependant ce n'est qu'à force d'instances que nous avons pu obtenir une première réduction il y a quelques années et une seconde réduction l'année dernière.
Il en a été de même quant à la Sambre. La Sambre a également été canalisée par voie de concession.
Les péages ont été maintenus et là encore, au moyen de ces péages, le gouvernement est rentré dans son prix d'acquisition. On a fait des travaux, c'est vrai. Ou a élargi le canal de Charleroi, et il y a peu de (page 1370) temps, l’année dernière, on a voté des fonds pour approfondir la Sambre, ce qui prouve que la canalisation de cette rivière laissait encore à désirer.
Eh bien, ces deux travaux très utiles, sans doute, vont favoriser encore une fois l’exportation de nos produits. On a élargi les neuf premières écluses du canal de Charleroi, précisément pour faciliter le transport de nos charbons vers la France.
On va approfondir la Sambre pour favoriser encore les transports vers l’étranger. Or, nous demandons avec instance que vous fassiez pour le transport des produits dans l'intérieur du pays, ce que vous avez fait à deux reprises différentes pour les transports à l'étranger.
Messieurs, le gouvernement devrait avoir à cœur de favoriser l’intérêt belge de préférence à l'intérêt étranger.
Plus nous produirons, plus nous ferons de bénéfices sans doute. Notre production étant plus grande que la consommation du pays, nous exportons le surplus.
Mais en favorisant l'exportation le gouvernement favorise seulement l'intérêt des producteurs, tandis que quand il facilite les voies de navigation, pour les transports à l’intérieur, il favorise tout à la fois le producteur et le consommateur belges, c'cst-à-dire l'intérêt général et le travail national.
M. Muller. - Est-ce que le consommateur belge ne reçoit pas les charbons de la Meuse ?
M. Ch. Lebeau. - Sans doute, mais est-ce une raison pour qu'ils ne reçoivent pas aussi les charbons de Charleroi à bon marché ? Qu'on élargisse le canal de Charleroi et le fret tombera de moitié, ce sera une différence de 1 fr. 20 à 2 fr. par tonne.
Or, une fabrique qui consomme par exemple 20 tonnes de charbon par jour trouvera là une économie considérable au bout de l'année. Le montant de cette économie possible est aujourd'hui perdu pour le consommateur.
Le gouvernement est animé, je le sais, de bonnes intentions ; il reconnaît qu'il y a quelque chose à faire pour le canal de Charleroi, il dit que c'est un travail d'utilité publique, il ajoute seulement que la dépense excédant les ressources dont il dispose, il ne peut, en ce moment, mettre ce travail à exécution, mais que, cependant, il est occupé à faire des études.
Eh bien, messieurs, nous avions formulé un amendement qui va nous prouver que l'honorable ministre nous a fait une promesse sérieuse ; nous proposons d'allouer un crédit de 10,000 fr., destiné à couvrir les frais d'étude du projet d'élargissement du canal de Charleroi et des embranchements.
Quant à l'opportunité, c'est une question que l'on pourra discuter plus tard.
Nous croyons nous, que le gouvernement devrait faire un emprunt, qu'il pourrait le faire dans de bonnes conditions, et qu'il devrait d'autant moins hésiter qu'il s'agit d'un travail qui couvrira largement l'intérêt et l'amortissement du capital emprunté.
Puisque le gouvernement paraît disposé à exécuter ce travail dans un délai rapproché... (Interruption) dans un délai qui ne soit pas trop éloigné, soit !
Puisque les études sont commencées, il importe de les terminer ; eh bien, messieurs, nous voulons, par notre amendement, faire consacrer le principe.
On nous a fait un tableau des grands avantages qui nous ont été accordés. Déjà, messieurs, l'honorable M. Dechamps a réfuté ce qui a été dit à cet égard ; je n'aurai que peu de chose à ajouter à ses observations.
On nous a parlé du chemin de fer de Marchienne à Baume ; il est vrai que ce chemin de for a été concédé, mais la société concessionnaire n'a jamais mis la main à l'œuvre et ne paraît pas disposée à le faire par la raison qu'elle n'a pas d'argent.
Eh bien, nous disons que le gouvernement aurait dû faire peur la ligne de Baume ce qu'il fait pour la Meuse, car il s'agit là aussi de relier les établissements qui existent le long de la ligne projetée, ligne qui aboutit aux deux extrémités du chemin de l'Etat, (Interruption.) Elle est enclavée dans le réseau de l'Etat.
Voilà, messieurs, la position du chemin de fer de Marchienne à Baume.
Ou est venu nous parler du chemin de fer de Louvain à Herenthals, on a dit que ce chemin de fer favorisera le bassin de Charleroi ; messieurs, ce chemin de fer favorisera tous les centres de production, mais il n’intéresse pas plus Charleroi que Liége, qui peut venir à Louvain comme nous, qui vient même nous faire concurrence à Bruxelles. (Interruption.)
Nous livrons les charbons à Liège ; cela prouve que vous en avez besoin ; eh bien, ils vous arriveront à meilleur marché, quand la Meuse sera navigable. C'est Liége qui en profitera.
On nous dit encore :
« Vous aurez les minerais oligistes à bon marché par la Meuse. »
Eh bien, messieurs, on ne consomme à Charleroi qu'une faible partie de ce minerai. Les autres minerais se trouvent dans nos localités ; mais saviez-vous, messieurs, où l'on emploie les minerais oligistes ? C'est dans le département du Nord, et ce sont les établissements français voisins de la frontière, établissements qui font concurrence au bassin de Charleroi, ce sont ces établissements qui seront particulièrement favorisés par les travaux auxquels je fais allusion en ce moment et que je ne veux nullement critiquer, je le répète.
Quant au chemin de fer de Morialmé et au chemin de fer de Braine-le-Comte à Gand, je répète, messieurs, ce que je viens de dire du chemin de fer de Louvain à Herenthals. Par toutes les nouvelles voies de communication que nous créerons, nous ouvrirons des débouchés nouveaux à la production. Cela sera favorable autant aux producteurs qu'aux consommateurs.
Voilà, messieurs, les observations que je voulais présenter en réponse à ce qu'a dit l'honorable ministre des travaux publics.
M. J. Jouret. - Je n'ai, messieurs, que quelques mots à dire. J'ai déjà fait connaître à la Chambre la profonde répugnance que j'éprouverais à voter contre le projet de loi. Appartenant à cette belle et laborieuse province du Hainaut, représentant d'un de ses centres les plus actifs de travail et de production, un sentiment instinctif me dit que je fais bien en faisant appel aux sentiments de modération dont je tâche de m'inspirer toujours, pour me décider à voter le projet de loi.
La réponse que m'a faite M. le ministre des travaux publics m'a paru très satisfaisante à beaucoup d'égards ; à beaucoup d'autres, elle m'a paru l'être infiniment moins.
Il a exprimé des scrupules respectables, je le reconnais, mais sur lesquels je me permets de ne pas être complétement de son avis. Je laisse cela ; et je me borne à prendre acte des paroles que M. le ministre a prononcées relativement à la canalisation di la Dendre.
« Employer à autre chose, a dit M. le ministre, le crédit de 2,500,000 francs votés pour la canalisation de la Dendre, c'est constitutionnellement impossible ; ne pas l’employer du tout, c'est gouvernementalement impossible. Le crédit de 2,500,000 fr. sera donc employé aux travaux de la Dendre.
« Que reste-t-il à faire ? C'est que le gouvernement achève ses propres études, et lorsqu'elles seront terminées, qu'il en expose les résultats à la Chambre ; si ces études comportent un chiffre plus élevé que celui qui a été voté, qu’il en demande le complément, ou qu'il indique que ce complément sera pétitionné, et qu'en attendant il commence les travaux dès que les plans seront dressés, au moyen d'un crédit de 2,500,000 francs dont il dispose. »
Ce sont là, messieurs, de bonnes paroles, et elles suffiront pour me déterminer à voter le projet.
En le faisant, toutefois, j'exprime l'espoir que les parties de l'arrondissement de Soignies qui ont été complétement délaissées, seront traitées avec plus de faveur dans un temps rapproché.
C'est dans cet espoir que j'ai apposé ma signature à l'amendement qui consiste dans l'allocation d'un crédit de 10,000 francs, pour le parachèvement des études relatives à l'élargissement du canal de Charleroi. Je ne cesserai de faire les plus grands efforts avec mes honorables collègues pour que ce travail puisse être exécuté dans un délai très rapproché.
M. Nélis. - Messieurs, je n'avais pas l'intention de prendre part à la discussion générale du projet de travaux d'utilité publique, quoique l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter dans cette Chambre soit, comme toujours, complétement oublié clans ce projet. Mais, dans une séance précédente, un honorable membre a attiré l'attention du gouvernement sur une nouvelle ligne qui partirait de Namur pour aboutir à Landen ; cette ligne serait à peu près parallèle à celle de Tamines à Landen par Fleurus et Gembloux, faisant partie de celles concédées en 1853 et pour lesquelles un cautionnement de 500,000 fr. a été versé dans les caisses de l'Etat, cautionnement qui doit nécessairement rester affecté à l'exécution de ces lignes et servir de prie à un autre concessionnaire, si celui chargé de l'exécution de ces travaux ne parvient pas à les effectuer ; car il me paraît impossible que le gouvernement (page 1371) vienne jamais proposer à la Chambre le remboursement du cautionnement lorsque la ligne pour laquelle il a été versé reste à l'état de projet.
J'espère, messieurs, que cette éventualité ne se présentera pas, et contrairement à l'opinion de M. Moncheur, j'ai des motifs de croire que la ligne de Tamines à Landen s'exécutera ; les concessionnaires font les plus grands efforts dans ce moment pour arriver à des propositions acceptables par M. le ministre des travaux publics.
Je ne blâme pas les honorables représentants de Namur de faire des efforts pour doter leur ville d'une nouvelle voie ferrée ; c'est une preuve de la sollicitude avec laquelle ils défendent les intérêts de leurs commettants. Mais lorsque l'on est richement doté de lignes de chemins de fer et de voies navigables, lorsque l'on obtient encore de nouvelles faveurs dans le projet en discussion, ce n'est pas montrer de la charité que de se prévaloir de tous ces avantages pour enlever à des voisins laissés à l'écart, ce qui leur a été concédé.
Je vous dirai qu'en principe je ne suis pas opposé à ce que l'on accorde à Namur les chemins de fer qui lui conviennent, mais je regarde comme impossible l'exécution simultanée de ces deux lignes. La ligne de Namur à Landen ferait donc disparaître l'espoir fondé que conserve arrondissement de Nivelles de voir une partie notable de son territoire traversée par une voie ferrée qui y est vivement désirée et dont l'utilité ne peut pas être contestée.
L'honorable M. Moncheur a développé, avec le talent qu'on lui reconnaît, les avantages qui doivent résulter de l'exécution d'une voie ferrée entre Namur et Landen.
Je ne les contesterai pas ; mais il me permettra de faire remarquer à la Chambre que la plupart des motifs invoqués par l'honorable membre peuvent s'appliquer, avec bien plus de raison, à la ligne de Tamines à Landen, ligne vivement sollicitée, dans le temps, par les honorables représentants de Namur, mais qui aujourd'hui n'a plus leurs sympathies.
Lorsque l'on jette les yeux sur la carte des chemins de fer belges, on est surpris de voir qu'entre les lignes de Louvain à Liège et à Charleroi, d'Ottignies à Namur et la vallée de la Meuse, il existe un quadrilatère d'une grande étendue complètement dépourvu de chemin de fer.
Cependant aucune contrée en Belgique n'a un sol plus riche, l'industrie agricole y est des plus florissantes, c'est en quelque sorte le grenier d'abondance d'où les nombreuses populations des centres industriels qui l'entourent, tirent leurs subsistances.
Il est vrai qu'elle n'a pas de mines de charbon exploitées, ni de ces grands établissements industriels qui attirent tous les regards et auxquels on ne peut refuser les communications qu'ils réclament.
Je ne blâme pas le gouvernement de faire des sacrifices pour augmenter leur prospérité, mais on ne peut toujours laisser dans l'oubli l'industrie agricole, car, il ne faut pas l'oublier, elle est la plus importante de toutes, parce qu'elle est la plus répandue, qu'elle emploie le plus grand nombre de travailleurs, qu'elle a le plus de produits à transporter. C'est elle, en définitive, qui nourrit toutes les autres et qui rapporte le plus au trésor.
La ligne concédée de Fleurus à Landen coupe cette riche contrée à peu près en deux parties égales ; et de Perwez, part un embranchement qui va aboutir au chemin de fer de l'Etat à Tirlemont en passant par Jodoigne.
Cette ligne l'emporte donc de beaucoup sur les avantages attachés à la ligne de Namur à Landen qui se rapproche trop de la vallée de la Meuse et qui ne satisferait qu'en partie les intérêts engagés dans la question.
J'ajouterai que j'ai des motifs de croire que les concessionnaires de Tamines à Landen ne seraient pas éloignés de donner toute satisfaction à la ville de Namur et même à la ville de Huy, en demandant la concession de deux lignes de raccordement pour relier ces localités à la ligne principale et à Landen.
De cette manière tous les intérêts seraient satisfaits, et certes si des lignes de chemin de fer méritent la sollicitude des Chambres et du gouvernement, ce sont bien celles dont il s'agit.
En effet, quatre provinces ont un égal intérêt à ce qu'elles s'exécutent, elles ne font concurrence à aucune ligne existante, elles deviendraient au contraire des affluents considérables à celles qu'elles traversent ou auxquelles elles aboutissent.
La ligne principale part du chemin de fer de l'Etat à Tamiecs, elle rencontre a Fleurus la ligne de l'Est belge, elle met donc ces deux lignes en relation avec les localités, riches en produits de toute espèce, qui se trouvent entre Fleurus et Tamines ; à Gembloux elle traverse le chemin de fer du Luxembourg auquel elle apporte les nombreuses populations voisines ; à Landen et à Tirlemont, par l'embranchement de Perwez par Jodoigne, elle aboutit au chemin de fer de l'Etat, auquel elle relie tout le canton de Jodoigne et une partie de celui de Waremme. Si les embranchement vers Namur et Huy se construisaient, ils ne feraient qu'ajouter à la prospérité de la ligne de Namur à Liège et à celle de Namur vers Charleroi.
J'ajouterai qu'elle met les bassins de Charleroi et de Namur en communication avec la ligne de Landen à Hasselt, le Limbourg et la Hollande lorsque le réseau des chemins de fer sera complété de ce côté.
On a considéré le chemin de fer que l'on propose, de Namur à Landen, comme un anneau de la grande chaîne qui doit réunir la Méditerranée à la mer du Nord, comme une portion de la grande artère qui doit mettre en rapport la France, l'Espagne et l'Italie à la Hollande.
Je ferai d'abord remarquer à la Chambre, que le voyageur qui veut se rendre en Hollande et qui arrivera à Namur par Dinant, ne sera nullement arrêté dans sa course, faute de communication ; devant lui se présente une ligne dans les meilleures conditions qui le conduira par Bruxelles ou Louvain à Anvers et à Rotterdam ou Amsterdam.
Tout en reconnaissant qu'il est toujours possible, en comblant les lacunes, de rattacher une ligne quelconque à une grande artère européenne, parce que, comme on dit vulgairement, tout chemin mène à Rome, je me permettrai de faire remarquer que la ligne de Fleurus à Landen peut être considérée avec raison comme contribuant à établir la communication la plus directe entre Paris et Berlin.
Sans attacher à cette circonstance plus d'importance qu'elle ne mérite, je répéterai qu'aucune ligne concédée ne présente plus d'utilité au point de vue belge, et tous les efforts des honorables représentants de Namur ne parviendront pas à démontrer que la nouvelle ligne qu'ils proposent favoriserait autant les intérêts généraux que celle-ci. Il suffit de comparer les deux tracés pour reconnaître le peu de valeur de leurs arguments et combien la ligne de Tamines à Landen l'emporte sur celle que l'on voudrait y substituer. Ils l'ont en quelque sorte reconnu en venant proposer, pour augmenter leurs chances de succès, de se charger en même temps du raccordement de Tamines à Fleurus qui fait partie de la ligne concédée.
Savez-vous comment la Chambre a accueilli la proposition qui a été faite de disjoindre les lignes de Tamines à Landen et de Groenendael à Nivelles, avec la faculté pour le gouvernement de concéder séparément des portions de la ligne de Tamines à Landen ? La section centrale en a fait la proposition formelle en 18S7 dans l'article 3 qu'elle a ajouté au projet de loi qui a autorisé le gouvernement à substituer une autre compagnie à celle du Luxembourg, pour l'exécution de ces lignes. Cet article 3 a été rejeté par 63 voix contre 8.
D'ailleurs, qui se chargerait de l'exploitation de ces quelques kilomètres de chemin de fer entre Tamines et Fleurus ? Ce ne serait certainement pas le concessionnaire, il n'y trouverait pas son compte.
Au lieu de diviser les intérêts engagés dans la question, que mes honorables collègues de Namur me permettent de leur dire qu'ils feraient beaucoup mieux de réunir leurs efforts aux nôtres pour que cette ligne s'exécute promptement ; leur province n'y est pas moins intéressée que le Brabant et, je le dis avec conviction, je ne reconnais aucun travail d'utilité publique d'une urgence plus immédiate que la ligne dont il s'agit.
Je ne puis donc partager l'opinion de l'honorable ministre des travaux publics, lorsqu'il déclare que les travaux qui figurent au projet de loi sont plus urgents que tous autres déjà concédés.
J'ai examiné avec attention les divers travaux dont l'Etat entreprendrait l'exécution ou dans lesquels il interviendra d'une manière quelconque et je vous avoue qu'à quelques exceptions près, je ne leur reconnais pas le caractère d'urgence que l'honorable ministre leur attribue.
Le chemin de fer de Braine-le-Comte à Gand a particulièrement pour but de raccourcir la distance de quelques kilomètres entre la ville industrielle de Gand et les bassins du Centre et de Charleroi. La communication existe par Bruxelles et le chemin de fer de Bruxelles à Gand : il n'y a donc pas d'urgence.
Le chemin de fer de Louvain à Herenthals, né en 1853 malgré le gouvernement, destiné à donner une communication directe vers Turnhout, n'est pas plus urgent que beaucoup d'autres ; il ne deviendra réellement utile que lorsque la ligne de Turnhout sera prolongée jusqu'en Hollande,
(page 1372) L'embranchement d'Aerschot à Diest qui va coûter à l'Etat, 2,500,000 fr.1 et dont le produit sera nul pour le trésor, est d'une utilité très problématique. Le gouvernement aurait favorisé bien davantage les intérêts de la ville de Diest et de tout le pays, en offrant cette somme au concessionnaire qui se serait chargé de l'exécution d'une ligne partant de Louvain ou de Tirlemont, sur Diest, le camp de Beverloo et la Hollande.
La canalisation de la Meuse en aval de Namur pourrait encore se faire attendre sans grand préjudice, puisqu'une ligne de chemin de fer latérale à la Meuse et la navigation telle qu'elle existe assurent les communications.
La canalisation de la Meuse de Liége à Visé est devenue nécessaire depuis la construction du canal latéral à la Meuse, mais, messieurs, il aurait mieux valu commencer par la canalisation de la Meuse, on aurait ainsi rendu inutile, au moins, une partie de ce canal. D'un autre côté, un chemin de fer va être construit de Liège à Maestricht, par Visé ; il est établi sur la rive droite, les établissements situés sur cette rive ne seront donc pas dans l'impossibilité d'exporter leurs produits, ils auront le choix entre le chemin de fer en construction et la Meuse. Peut-on dire qu'il y a là urgence, et ces capitaux ne pourraient-ils pas être employés plus fructueusement ailleurs ?
Je ne prolongerai pas cet examen ; ces exemples suffisent pour démontrer qu'avant de déclarer urgents des travaux qui n'ont pas pour but de créer de nouvelles communications, mais seulement d'améliorer les voies navigables existantes ou de raccourcir les distances entre les grands centres, il faudrait penser à donner des communications à ceux qui en sont privés.
Les bienfaits du gouvernement ne doivent pas se multiplier sur certains points, mais ils doivent être répartis avec équité sur toute la surface du pays.
Les honorables représentants de Namur ont fait valoir des considérations puissantes pour engager l'Etat à intervenir d'une manière active pour assurer l'exécution des lignes qui ne présentent pas des avantages immédiats assez puissants pour y attirer les capitaux.
J'admets aussi l'intervention de l'Etat, dans une juste mesure, pour assurer l'exécution de travaux dont l'utilité publique est bien constatée.
Pour le gouvernement, les sacrifices qu'il s'impose pour favoriser l'exécution d'une ligne de chemin de fer, sont le plus souvent largement compensés par le développement de la fortune publique et l'augmentation des revenus du trésor.
Mais, messieurs, je ne partage plus l'opinion des honorables membres lorsqu'ils demandent un minimum d'intérêt pour la ligne de Namur à Landen ; l'équité exige que cette faveur soit d'abord accordée à la ligne concédée depuis longtemps, et qui serait exécutée si le gouvernement lui avait assuré un minimum d'intérêt sur une partie du capital seulement.
J'ai dit en commençant mon discours que l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter avait été oublié, comme toujours, dans ce projet de travaux publics. Permettez-moi d'ajouter quelques mots pour justifier cette assertion.
Le gouvernement est parvenu à compléter son vaste réseau de chemin de fer en ne traversant qu'une seule commune de cet arrondissement ; la commune de Tubise est traversée par la ligne du Midi, elle a l'avantage d'avoir une station. Un point d'arrêt avait été établi à Hennuyères, point rapproché de quelques communes de l'arrondissement de Nivelles, il a été supprimé, alors que les chemins qui y aboutissent étaient impraticables ; depuis que des routes empierrées ont été construites, ces communes ont réclamé sous les différents ministères qui se sont succédé, sans pouvoir obtenir le rétablissement de cette halte.
Voilà, messieurs, tous les avantages que l'arrondissement de Nivelles retire du railway de l'Etat.
Cependant, cet arrondissement s'étend d'au-delà de Tubise jusqu'à peu de distance de la station de Landen, il se trouve entre la capitale et les bassins de Charleroi et de Namur, il devait donc s'attendre à être traversé par de nombreuses lignes.
Il n'en a rien été, on est parvenu à persuader aux habitants de la capitale et des villes de Charleroi et de Namur que leur intérêt n'était pas d'aller directement à Bruxelles, comme le bon sens l'indiquait, mais qu'ils devaient y aller en passant par Braine-le-Comte, c'est-à-dire, un point de la ligne du Midi à six lieues de Bruxelles, à peu près aussi éloigné de Charleroi et plus éloigné de Namur que la capitale elle-même. On croyait encore, alors, que la capitale ne devait pas être le centre des voies ferrées.
Cette erreur ne pouvait se perpétuer ; des compagnies sont venues la rectifier en partie, c'est ce qui a procuré à l'arrondissement de Nivelles l'avantage d'avoir des chemins de fer, mais ces compagnies ont exécuté ces lignes sans avoir égard aux intérêts de cet arrondissement* qui ont été méconnus.
Je me bornerai à citer le chemin de fer du Luxembourg qui devait passer par Wavre, ville importante par son commerce et les six routes qui y aboutissent ; contrairement aux engagements les plus formels, il passe entre Ottignies et Limelette. C'est au milieu des campagnes que se trouve la station centrale qui réunit les chemins de fer qui traversent cet arrondissement.
Sur les réclamations de la ville de Wavre, une ligne de raccordement parlant de La Hulpe ou de Profondsart devait être construite. Cette ligne de raccordement, comme la ligne directe, restera probablement à l'état de projet.
Voilà, messieurs, comme les intérêts de l'arrondissement de Nivelles ont été sacrifiés dans l'exécution des travaux publics ;
Je n'en dirai pas davantage et je me résume en recommandant le chemin de fer de Tamines à Landen et ses embranchements, à la sollicitude bienveillante de M. le ministre des travaux publics, pour qu'il lui donne son appui moral d'abord et, au besoin, son concours actif, s'il devenait nécessaire pour en assurer l'exécution.
Je lui recommande également la ligne de Nivelles à Groenendael. Si cette ligne était prolongée d'une part jusqu'à Luttre et d'autre part jusqu'à Bruxelles, plutôt qu'à Groenendael, elle deviendrait une communication sur laquelle un trafic des plus actif s'établirait.
C'est aux chemins de fer qui favorisent plus particulièrement les intérêts de l'agriculture que le gouvernement doit réserver ses faveurs, parce que l'agriculture est l'industrie la plus importante, et que ceux qui l'exploitent, trop divisés, ne peuvent concentrer leurs efforts, ni faire entendre leur grande voix pour se faire écouter ; parce que, s'il est utile de procurer à l'industrie et à la classe pauvre, le combustible à bas prix par l'abaissement des frais de transport, il serait plus profitable encore à la généralité des habitants du pays et surtout des villes, de leur faire obtenir une réduction dans le prix du pain et de toutes les denrées par la facilité des communications et l'économie du transport.
Je termine par une dernière observation. La lutte qui existe entre les partisans de la canalisation de la Meuse et ceux qui voudraient que la préférence fût donnée à l'élargissement du canal de Charleroi, nous a fait connaître que ces travaux exigeront une dépense d'environ dix-huit millions d'une part et de dix millions de l'autre part, soit la somme énorme de vingt-huit millions. Cette somme devra être dépensée dans un temps assez rapproché.
La caisse de l'Etat paraît inépuisable lorsqu'il s'agit de perfectionner les voies par où s'écoulent les produits de nos grands bassins houillers, ce capital sera à peu près improductif. Les honorables membres demandent, en même temps, que les péages aillent en diminuant jusqu'à la suppression totale. On fait valoir bien haut l'intérêt du consommateur, même du consommateur étranger qui, recevant le charbon et les minerais de fer sans frais, pourra faire une concurrence redoutable à notre industrie, et lorsqu'il s'agit d'établir des communications nouvelles à l'intérieur qui iraient vivifier les industries qui font prospérer les campagnes et tout le pays, la caisse du trésor est vide, le gouvernement n'est plus assez riche pour entretenir les routes sans droits de barrière qui sont aussi des péages bien autrement onéreux que ceux des canaux et des chemins de fer.
M. Hymans. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale qui a examiné la convention conclue entre la Belgique et la France, le 1er mai 1861, pour la garantie réciproque de la propriété des œuvres littéraires et artistiques, des modèles et dessins industriels et des marques de fabrique.
- Ce rapport sera imprimé et distribué.
Le jour de la discussion sera fixé ultérieurement.
M. De Lexhy. - Messieurs, j'imite l'exemple qui m'est donné en venant exposer mes besoins et mes espérances.
Je dois d'abord remercier les députés de Charleroi, de Nivelles et de Namur pour leur courtoisie à l'égard de l'arrondissement de Waremme, en lui accordant la préférence d'y faire aboutir deux chemins de fer.
(page 1373) Puissent nos efforts communs aboutir à un résultat conforme à nos désirs !
On a parlé de deux lignes aboutissant à Landen, celle de Tamines et celle de Namur. Toutes deux traversent une contrée renommée par ses richesses agricoles.
Si les arrondissements de Charleroi et de Nivelles sont surtout intéressés à la création de la ligne de Tamines à Landen, l'arrondissement de Waremme y trouve aussi une large satisfaction. Cette ligne est concédée depuis longtemps, un cautionnement considérable est versé, et, malgré les réclamations les plus vives, son exécution est encore problématique. Il serait superflu de faire remarquer que cette ligne serait un affluent considérable pour le railway de l'Etat.
L'autre ligne dont on a parlé est celle de Namur à Landen, qui entrerait dans mon arrondissement à Wasseiges et passerait à Hannut. Ce chemin de fer est destiné à desservir des populations importantes et à les doter d'un grand bienfait. Ces populations, qui sont reléguées dans un isolement fatal, demandent, avec raison, leur part dans les faveurs gouvernementales. L'équité et la justice distributive commandent impérieusement que l'on fasse droit à une demande aussi légitime. Toutes les communes de mon arrondissement qui se trouvent dans un rayon même assez éloigné du tracé que j'ai indiqué, ont adressé des pétitions à la Chambre, pour exprimer leurs vœux ardents à cet égard, et je manquerais à mon devoir, si je ne les appuyais pas de toutes mes forces.
On ne peut pas les sevrer plus longtemps d'une source aussi considérable de bien-être et de richesse. On ne peut pas méconnaître plus longtemps des droits aussi sacrés.
Au point de vue agricole, cette ligne produirait les résultats les plus heureux. Par ce nouveau débouché, les produits agricoles trouveraient un écoulement plus facile et plus lucratif. L'essor que ce chemin de fer donnerait au développement de l'agriculture est incalculable. Il permettrait à notre agriculture d'entrer de plus en plus dans la voie industrielle, notamment en lui permettant de s'approvisionner à bon marché de charbon qui est l'auxiliaire indispensable de l'industrie. Non seulement les valeurs actuelles recevraient un accroissement, mais des valeurs nouvelles seraient créées.
La haute utilité ainsi que la nécessité de cette ligne sont donc incontestables. Il n'y a de contestation possible que sur les moyens d'exécution.
L'Etat, après quelques tristes expériences, a conservé peu de sympathies pour les garanties d'intérêt.
Si ce mode d'intervention de l'Etat a donné lieu à des abus, il a cependant aussi produit des résultats excellents, en rendant possibles bien des entreprises utiles, en satisfaisant des intérêts considérables et en accroissant la richesse nationale dans des proportions très grandes. Pour créer la ligne de Namur à Landen, l'industrie privée serait impuissante sans le concours du gouvernement. L'intervention de l'Etat est malheureusement nécessaire.
Je comprends parfaitement la prudence du gouvernement, quand il s'agit d'accorder une garantie d'intérêt : sa prudence est légitime. Mais je crois que l'on tombe souvent dans l'exagération. On ne peut pas, en effet, en cette matière, établir un principe absolu.
On n'accorde plus de garantie que dans des cas exceptionnels. Ce système est bon quand on l'applique avec discernement et intelligence, c'est une question d'appréciation. Quand on démontre qu'une garantie est indispensable pour créer une chose éminemment utile et que d'autre part on a la certitude que cette garantie ne sera que de courte durée, grâce aux nombreux éléments de prospérité que cette création offre, ne peut-on pas dire alors, que l'on se trouve dans le cas exceptionnel où la garantie doit être accordée. Il est du devoir de l'Etat d'intervenir pour féconder, pour donner l'élan, pour assurer des entreprises utiles au pays et d'exercer une tutelle bienfaisante sur tous les intérêts.
On ne demande pas ici à l'Etat d'aliéner à tout jamais un capital considérable, on lui demande de prêter avec certitude d'être remboursé promptement.
Je crois inutile de dire que l'Etat bénéficiera largement de cette ligne qui apportera au railway national un trafic considérable.
Je n'entrerai pas plus avant dans la question : le moment n'est pas arrivé. Nous nous bornerons à prendre rang et à nous inscrire sur le grand-livre national. Quand il s'agit d'intérêts aussi grands et aussi légitimes, on peut espérer que le jour de la satisfaction n'est pas éloigné.
Je me résume, eu appelant la bienveillante attention de la Chambre et du gouvernement sur les lignes de Namur à Landen et de Tamines à Landen, qui, toutes deux, présentent une grande utilité pour mon arrondissement.
Toutefois, si l'une de ces deux lignes devait être un obstacle à l'autre, ma préférence serait nécessairement déterminée en faveur de celle qui satisferait la plus grande somme d'intérêts et le plus grand nombre de mes commettants, c'est-à-dire en faveur du chemin de fer de Namur à Landen, par Wasseiges et Hannut.
M. Dolez. - Messieurs, je voterai le projet de loi qui nous est présenté et je n'y propose aucun amendement dans l'intérêt de l'arrondissement qui me fait l'honneur de m'envoyer parmi vous. Vous devez dès lors vous étonner de m'entendre réclamer quelques moments d'attention de votre part. Mais il m'a semblé que par cela même que j'étais décidé à voter le projet de loi, par cela même que je n'avais pas l'intérêt de soumettre à la Chambre aucune proposition nouvelle en faveur d'un arrondissement l'un des plus importants du pays, il m'a semblé, dis-je, que c'était un devoir pour moi de vous faire connaître quelle était la portée de mon vote et de ma réserve.
Cet arrondissement, d'autres ont pris le soin de vous le dire, pourrait se plaindre peut-être de n'avoir pas une part dans les travaux publics que le gouvernement vous propose de décréter. Mais je l'avoue, je n'ai pas le courage, dans notre heureux pays dont le sort est si envié par l'Europe entière, tant au point de vue de ses progrès moraux qu'au point de vue des intérêts matériels ; je n'ai pas le courage de dire à mes commettants : « Plaignez-vous. »
Je crois, d'ailleurs, que le gouvernement fait, en cette matière, tout ce qu'il peut faire. Il ne peut pas en un jour, à la fois, répondre à tous les intérêts, alors même que ces intérêts sont profondément respectables et essentiellement légitimes. De pareilles questions doivent être réglées avec la justice distributive du père de famille ; à chacun son tour, à chacun son moment ; telle doit être la règle d'un gouvernement juste, et j'aime à croire, j'ai même la conviction que c'est en partant de ce principe qu'agit le gouvernement actuel.
Ce que nous n'avons pas aujourd'hui, j'ai donc la confiance que nous l'aurons demain ; et je le répète, tout en rappelant les droits de mon arrondissement, tout en faisant des vœux pour qu'ils soient bientôt reconnus, je ne puis qu'applaudir à ce que le gouvernement vous propose dans l'intérêt d'autres parties du pays. Je n'oublie pas qu'il y a pour le pays une véritable solidarité, eu fait de progrès et de prospérité.
Si donc je vous signale en ce moment ce que l'arrondissement de Mons a droit d'espérer et d'attendre de la justice du gouvernement et des Chambres, c'est uniquement pour que le gouvernement y pense, quand il aura à s'occuper encore, dans une occasion que la prospérité toujours croissante de nos budgets ne tardera certes pas à réaliser, de travaux à exécuter par l'Etat.
Un honorable député de Charleroi qui faisait valoir avec tant de zèle les intérêts de son arrondissement, reconnaissait, il y a quelques jours, qu'il y avait un arrondissement dans le pays, qui, à raison de son importance, devait peut-être trouver étrange que l'Etat ne fî faire, sur son territoire, aucun travail d'utilité publique à ses frais ; c'était de l'arrondissement de Mons qu'il parlait. Et en effet, depuis 1830, à l'exception du chemin de fer de l'Etat, il n'y a été exécuté aucun travail aux frais du trésor public.
Cependant, messieurs, il ne faut pas croire que de grands travaux d'utilité publique ne sont pas encore à accomplir dans cet arrondissement ; il ne faut pas croire même que l'arrondissement de Mons n'ait pas à invoquer des faits antérieurs posés par la législature.
En 1845, la législature avait décrété l'exécution d'un canal de jonction de Mons à la Sambre, et d'un canal de jonction de Jemmapes à Alost ; la loi a été votée, nous n'avions, en 1851, ni l'un ni l'autre de ces deux canaux.
Je le répète, j'ai la conviction que le jour de la réalisation de nos espérances ne se fera pas longtemps attendre, et je prie le gouvernement de vouloir bien tenir note du vœu aussi légitime que juste, que j'exprime en ce moment. Je crois d'ailleurs devoir appeler l'attention de M. le ministre des travaux publics sur un autre intérêt, important pour l'arrondissement de Mons, et particulièrement pour la capitale du Hainaut.
La ville de Mons qui depuis 1817, a vu tout progrès disparaître pour elle, par suite de l'enceinte fortifiée dans laquelle elle avait été emprisonnée, va enfin être rendue à la liberté ; elle pourra s'associer à ce grand mouvement commercial qui existe à ses portes ; elle pourra prendre sa part de ce magnifique élan industriel qui a fait du Borinage une des contrées les plus noblement laborieuses et les plus prospères de l'Europe entière.
Eh bien, je demande à M. le ministre des travaux publics de mettra immédiatement et d'urgence à l'étude toutes les questions qui se (page 1374) rattachent au développement et à la prospérité du chemin de fer de l'Etat au point de vue de la station de Mons.
A l'heure qu'il est, cette station se compose d'une misérable baraque en planches, et occupe un espace tellement restreint que les manœuvres doivent se faire sur la grand-route conduisant de Mons au Borinage ; de telle sorte que, vingt fois par jour, la circulation des voitures se trouve arrêté, et que l'encombrement se fait à la porte de Mons. La station étant trop petite, il faut que les mouvements s'accomplissent sur la grande route elle-même.
Quiconque a traversé cette localité importante doit reconnaître que je ne charge pas d'ombres inutiles le tableau que je viens de faire à la Chambre.
Eh bien, je demande à l'honorable ministre des travaux publics qui chaque jour donne au pays des preuves nouvelles de son zèle, de s'occuper immédiatement de l'étude de ce qu'il importe de faire à la station de Mons.
Je dis immédiatement, et voici pourquoi. L'administration communale de Mons se préoccupe, à l'heure qu'il est, de grands projets d'embellissement et d'amélioration de cette ville à l'occasion de la démolition de la forteresse.
Aujourd'hui même, si je ne me trompe, cette administration intelligente, comprenant tout ce que peut amener de prospérité pour la ville ce grand bienfait de la liberté qui va lui être rendue, a adressé au gouvernement une proposition par laquelle elle lui l'offre de se chargera forfait de la démolition de la forteresse.
Je ne doute pas que la justice du gouvernement et toute la sympathie des chambres seront acquises à cette pensée de rendre la ville de Mons de plus en plus digne de sa position de capitale de notre magnifique province.
Il y a donc urgence à ce que le département des travaux publics examine ce qu'il y a lieu de faire à la station de Mons, et même à nos bassins de navigation qui l'avoisinent, dans l'intérêt non pas seulement de cette ville, mais encore du chemin de fer de l'Etat et de notre navigation intérieure.
Je prie M. le ministre des travaux publics de porter immédiatement sa sollicitude éclairée sur ce grand intérêt.
Voilà, messieurs, ce que je tenais à vous dire.
Vous ne me reprocherez pas d'avoir abusé trop longtemps de vos moments ; vous ne me trouverez pas non plus trop exigeant ; vous reconnaîtrez qu'en bon frère, j'applaudis aux travaux qu'on va exécuter dans d'autres arrondissements et à l'avenir, j'en suis sûr, vous serez prêts comme le gouvernement lui-même, à accueillir mon espoir qu'à un jour qui sera sans doute prochain on fera droit aux justes désirs de mes commettantsqfui m'ont été si fidèles depuis vingt-cinq ans.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, d'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer un projet de loi apportant une modification à quelques articles du livre premier du Code pénal.
Le projet de loi sera imprimé et distribué. La Chambre en décide le renvoi à la commission chargée de l'examen du Code pénal.
M. le président. - Je viens de recevoir un amendement ainsi conçu :
« Un crédit de 10,000 francs est alloué au département des travaux publics pour lui permettre de compléter les études relatives à l'élargissement des écluses du canal de Charleroi et des embranchements.
« L. Ansiau, Dechamps, Pirmez, J. Jouret, C. Lebeau, de Paul, Guillery, Jamar, De Fré, Prévinaire, de Naeyer, Van Leempoel, Allard, Van Humbeeck, Orts, de Decker, de Haerne, Hymans et Van Volxem. »
M. Orts. - Je demanderai à M. le ministre des travaux publics s'il ne conviendrait pas, dans l'intérêt de l'ordre de la discussion, de renvoyer la discussion sur la question du chemin de fer de Louvain à Bruxelles à un article.
On pourrait rattacher l'amendement à l'article 3 qui s'occupe des chemins de fer concédés.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Votre amendement, M. Orts, se réfère à la loi de 1859. Il serait donc peut-être préférable d'épuiser la discussion générale sur le projet tel qu'il est présenté, en réservant la question relative au chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain.
Les orateurs qui ont l'intention de ne traiter que cette question pourraient attendre la clôture de la discussion général pour discuter spécialement cette question.
M. Orts. - Soit ! cela répond parfaitement à ce que j'ai demandé.
M. le président. - Il est donc entendu que les orateurs qui se proposent de parler sur la question du chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain, prendront la parole après la clôture de la discussion générale sur l'ensemble du projet du gouvernement ; on fera de cette question l'objet d'une discussion spéciale.
- Plusieurs membres. - A demain.
- La séance est levée à 4 heures trois quarts.