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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 25 avril 1861

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1860-1861)

(page 1227) (Présidence de M. Vervoort.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Snoy, secrétaire, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart et donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Boe, secrétaire, présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« L'administration communale de Cortenberg demande que le projet de loi relatif à l'exécution de travaux d'utilité publique comprenne le chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain par Cortenberg. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


« Le sieur Verbeke, préposé des douanes pensionné, prie la Chambre de statuer sur sa pétition tendante à obtenir une récompense pour services de 1830. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« L'administration communale d'Aerschot prie la Chambre d'écarter tout projet de chemin de fer de Louvain à Herenthals qui ne passerait point par Aerschot. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi de travaux publics.


« L'administration communal de Zele prie la Chambre d'accorder à la compagnie de Porre, la concession d'un chemin de fer de Lokeren à Terneuzen. »

- Même décision.


« MM. de Renesse, de Paul et Neyt, obligés de s'absenter, demandent un congé. »

- Ces congés sont accordés.

Rapport de pétition

M. Janssens. - J’ai l'honneur de déposer le rapport de la commission d'industrie sur la pétition des fabricants de tissus de coton à Renaix, qui demandent la révision de la loi du 6 avril 1823 en ce qui concerne leur industrie ou du moins l'application modérée de la loi.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport.

M. Magherman. - Cette pétition intéresse plusieurs localités industrielles. La Chambre a ordonné qu'elle fût l'objet d'un prompt rapport, je demande que ce rapport soit discuté prochainement.

- Plusieurs membres. - Demain,

M. Vander Donckt. - Le rapport doit être imprimé et distribué et l'on doit avoir au moins deux ou trois jours pour l'examiner.

M. J. Jouret. - Il y a d'ailleurs eu résolution prise hier de discuter le Code pénal dans les séances de demain ou après-demain.

M. Magherman. - Je demande que le rapport soit discuté le plus tôt possible, mais après que les délais fixés par le règlement seront écoulés.

M. le président. - Vous pourrez renouveler votre demande après que le rapport aura été distribué.

Prompts rapports de pétitions

M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée d'Ypres, le 16 mars 1861,1e conseil communal d'Ypres demande la révision du décret impérial du 30 décembre 1809, concernant les fabriques d'église.

Par pétition datée de Couvin, le 25 mars 1861, le sieur Pire demande la révision de la législation sur les fabriques d'église.

Messieurs, votre commission a examiné avec soin ces deux demandes de révision du décret de 1809. Elle a examiné ce décret surtout au point de vue des garanties et du contrôle qu'il consacre. Elle a trouvé qu'en vertu de ce décret, le bourgmestre fait de droit partie du conseil de fabrique, que quatre séances par année sont obligatoires, que le bourgmestre y assiste au nom des intérêts communaux avec voix délibérative ; que le trésorier de la fabrique est tenu de délivrer un double des comptes et des budgets de la fabrique de l'église à l'examen du conseil communal.

Il a paru à votre commission que c'étaient là des garanties sérieuses. L'espèce d'engouement qu'il y a aujourd'hui à réviser toutes nos lois et tous les décrets semble quelque peu dégénérer en abus. Nous pensons qu'il en est de ces lois, qui fonctionnent depuis cinquante ans à peu près, ce qui en est de la loi sur le notariat.

Pour la loi sur le notariat, vous vous en souvenez, le bureau était encombré de pétitions en demandant la révision de tons les points du pays et par centaines.

Eh bien, l'on n'a rien fait ; le gouvernement a trouvé qu'il n'y avait pas lieu de modifier la loi, et aujourd'hui l'on est d'accord ; personne ne demande plus la révision de la loi sur le notariat.

Messieurs, ce que la commission a constaté, c'est que le décret de 1809, tel qu'il est, n'est pas exécuté ; soit par l'incurie ou la négligence des administrations communales, soit par toute autre cause, le décret de 1809 n'est pas exécuté dans beaucoup de localités ; s'il était bien observé, si les bourgmestres des communes se donnaient la peine de se rendre aux réunions du conseil de fabrique, aux jours déterminés par la loi, il n'y aurait pas lieu de modifier la législation pour le moment. Tel est l'avis de la commission.

Toutefois, messieurs, elle conclut au renvoi de la pétition à MM. les ministres de l'intérieur et de la justice, à M. le ministre de l'intérieur surtout, afin qu'il prenne des mesures pour stimuler les administrations locales et les engager à remplir leurs devoirs, à se faire rendre compte des budgets et des comptes des fabriques d'église et à prendre part à leurs délibérations, comme le prescrit le décret de 1809.

Vous savez, messieurs, qu'en 1809, Napoléon Ier n'était pas en très bons termes avec le clergé, c'est à cette époque que commencèrent les vexations qui ont eu lieu contre le clergé. Cette loi a traversé ensuite tout le règne du roi Guillaume, or le roi Guillaume, s'il y avait eu des motifs pour la révision de cette loi, n'aurait pas manqué de l'ordonner.

Nous croyons, messieurs, que cet engouement, qui existe depuis quelque temps, à faire réviser toutes les lois, que cet engouement dégénérerait en abus et qu'il serait sage de commencer par faire exécuter les lois. Je le répète, messieurs, si le décret de 1809 était loyalement exécuté et si les bourgmestres se faisaient un devoir d'assister aux réunions des conseils de fabrique, il n'y aurait pas lieu à réclamation.

C'est en ces termes, messieurs, que la commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de ces pétitions à MM. les ministres de l'intérieur et de la justice.

M. A. Vandenpeereboom. - Messieurs, la commission des pétitions, comme vous venez de l'entendre, conclut au renvoi à M. le ministre de l'intérieur et à M. le ministre de la justice, de la pétition du conseil communal d'Ypres, demandant la révision de la législation sur les fabriques d'église.

Si ce renvoi avait été proposé purement et simplement, je m'y serais rallié, mais les conclusions sont précédées de commentaires qui donnent au renvoi une signification très nette, et dès lors je ne puis plus admettre les conclusions.

En effet, messieurs, d'une part l'honorable rapporteur constate que le décret de 1809 n'est pas exécuté, et je suis, à cet égard, parfaitement de son avis, mais en même temps il émet, au nom de la commission, l'opinion que le décret de 1899 ne doit pas être révisé, et sur ce point je suis complètement en désaccord avec l'honorable rapporteur. Dans une autre séance j'ai eu l'honneur de faire connaître en partie les motifs sur lesquels mon opinion est basée.

Si la Chambre aborde le fond de la question, je suis prêt à développer les considérations qui démontrent, selon moi, que la législation sur les fabriques d'église doit être révisée.

Je m'oppose donc aux conclusions de la commission des pétitions, commentées comme elles viennent de l'être.

Il est évident que si la Chambre votait cette proposition, il y aurait une espèce de préjugé, et que si plus ltrd nous cherchions à faire prévaloir notre opinion en faveur de cette réforme, on viendrait nous objecter la décision prise par la Chambre dans la séance de ce jour.

D'ailleurs, messieurs, je vous le demande : que signifie le renvoi à MM. les ministres de la justice et de l'intérieur, dans les conditions où ce renvoi est proposé ?

Lorsque la Chambre renvoie une pétition aux ministres, c'est parce qu'elle juge qu'il y a lieu de l'examiner, ou bien pour qu'ils y fassent droit, quand l'affaire rentre dans leurs attributions.

Mais dans le cas actuel, on renverrait une pétition au gouvernement en lui déclarant qu’il n'y a pas lieu à l'examiner ni à y faire droit.

Eh bien, messieurs, dans une pareille situation, le renvoi est (page 1228) complètement illusoire. Pour être logique, la commission aurait dû proposer purement et simplement l'ordre du jour.

II est un autre fait contre lequel je dois protester. La commission impute très gratuitement aux administrations communales la non-exécution da décret du 30 décembre 1809. Or, je ferai remarquer que les conseils communaux n'ont aucune action sur les fabriques d'église, et je le démontrerai plus tard, si la discussion se prolonge.

Il est vrai que le bourgmestre a le droit d'assister aux séances du conseil de fabrique ; mais il y fait assez souvent une singulière figure ; s'il fait des observations, on passe aux voix, et parfois le bourgmestre forme à lui seul la minorité ; il a exercé son droit ; mais vous reconnaîtrez que ce n'est pas là une garantie sérieuse. Je ne parle pas ici par expérience, car les conseils de fabrique d'Ypres donnent à l'autorité communale des preuves non équivoques de confiance.

Je crois donc de mon devoir de repousser les imputations peu justes que l'honorable rapporteur lance contre les administrations communales.

Je prie aussi l'honorable rapporteur de vouloir être persuadé qu'il n'y a, de notre part, aucun engouement à demander cette révision ; nous la poursuivons parce que l'expérience nous a prouvé que cette réforme est utile et même nécessaire.

Quant au motif invoqué par l'honorable rapporteur, à savoir que le décret de 1809 fonctionne depuis plus de 50 années, et par conséquent qu'il ne doit pas être révisé, il me paraît, au contraire, de nature à exiger la révision de ce décret. Depuis cette époque notre législation a été profondément modifiée.

Une des raisons pour lesquelles nous demandons la révision, c'est que le décret de 1809 n'est plus en harmonie avec nos institutions actuelles.

Du reste, je ne veux pas discuter pour le moment le fond. Si on m'attire sur ce terrain, je serai prêt à examiner la question d'une manière plus approfondie. Pour le moment, ne pouvait pas adhérer aux conclusions commentées par l'honorable rapporteur, mais désirant moi-même le renvoi de la pétition à MM. les ministres de la justice et de l'intérieur, je propose d'ajouter aux conclusions de la commission les mots : « avec demande d'explications ». MM. les ministres de la justice et de l’intérieur donneront leurs explications quand et comme ils le jugeront convenable.

M. Rodenbach. - Messieurs, il est d'usage, lorsque la commission examine une pétition, qu'elle émette une opinion. Je ne sais si l'opinion que l'honorable rapporteur a exprimée, préjuge ou ne préjuge pas ; mais je trouve que l'honorable rapporteur était dans son droit, quand il a déclaré, notamment, qu'à son avis l'envoi d’une circulaire pour recommander aux autorités communales la stricte exécution des dispositions du décret serait une mesure suffisante. Le bourgmestre fait partie du conseil de fabrique ; il assiste à ses séances ; je dirai même qu'on renouvelle les conseils de fabrique. Ce sont des fonctions gratuites ; les membres n'ont aucun intérêt à continuer de remplir ces fonctions.

Il est à ma connaissance que ce. sont presque toujours de très honnêtes gens. Le receveur souvent n'est pas salarié.

Je crois qu'il y a plus de quatre réunions par an, je me rappelle que tous les mois on se réunit et qu'on y examine avec la plus grande attention les comptes des receveurs.

Il est possible qu'il se soit produit des abus dans quelques villes, à Ypres par exemple.

Il est possible que des receveurs malhonnêtes aient enlevé la caisse, mais on voit cela également parmi les receveurs du gouvernement. Cela ne prouve nullement que la loi doive être révisée. Je pense même que les évêques ont intérêt à contrôler, avec la plus grande exactitude, la gestion des conseils de fabrique, et je crois que c'est là une garantie suffisante.

Comme l'a fort bien dit l'honorable rapporteur, sous le roi Guillaume, qui certes ne laissait rien passer de ce qui était relatif au culte, car au contraire le gouvernement hollandais s'est distingué parfois en voulant trop contrôler tout ce qui concernait notamment ce qu'on appelait alors le clérical cette loi n'a pas été modifiée. Napoléon lui-même n'y a pas à certaine époque touché, et pourtant il n'était pas très favorable aux fabriques d'église, car c'est peu de temps après qu'est arrivé le différend avec l'évêque de Fontainebleau.

Je ne vois pas pourquoi on viendrait, après 40 ans, demander la révision de cette loi qui fonctionne très bien.

Sur 2,500 communes que possède la Belgique, il y a eu 3 ou 4 pétitions.

Je crois que si les bourgmestres voulaient contrôler les comptes avec attention, ils auraient toute garantie.

Les conseils de fabrique se forment par l'élection comme les chambres de commerce, je crois qu'il y a tout intérêt à les composer d'honnêtes gens.

Je le répète, je suis convaincu que cette ardeur de vouloir à chaque instant modifier les lois existantes est irrationnelle et contraire aux vœux de la majorité du pays.

M. Vander Donckt, rapporteur. - Je répondrai quelques mots à l'honorable M. Rodenbach qui a prétendu que les conseils de fabrique pouvaient avoir plus que les quatre réunions prescrites par le décret de 1809.

Le décret contient des dispositions en vertu desquelles il n’est pas permis au conseil de fabrique de se réunir plus de 4 fois sans une autorisation spéciale du gouverneur ou de l'évêque diocésain.

Sons le rapport du contrôle et des garanties que l'honorable M. A. Vandenpeereboom conteste, non seulement le bourgmestre a le droit et le devoir d'assister aux réunions du conseil de fabrique ; mais il prend part aux délibérations avec voix délibérative.

Il prend également part aux élections pour le renouvellement du conseil.

Eh bien, encore une fois, je dirai que c'est un triste bourgmestre, un bourgmestre qui n'a pas d'influence dans sa commune, s'il ne sait pas conduire les affaires de manière à concilier les intérêts de la commune et à ne pas se trouver isolé dans le conseil de fabrique.

L'honorable préopinant compte donc pour rien l'autorité du bourgmestre et sa présence à toutes les délibérations du conseil de fabrique, sa coopération active aux comptes et aux budgets. Toutes les pièces justificatives du compte lui sont mises sons les yeux, et il concourt par ses votes au renouvellement partiel des membres, tandis que lui-même n'est pas sujet à réélection de ce chef.

Je crois, messieurs, que le décret, tel qu'il est, offre des garanties suffisantes et un contrôle sérieux, et qu'il n'y a, pour le moment, pas d'urgente modification à y apporter.

Lorsque nous avons proposé le renvoi des pétitions à MM. les ministres de l'intérieur et de la justice, nous n'avons nullement entendu enchaîner, en quoi que ce soit, le libre arbitre de MM. les ministres ; et il n'est pas nécessaire de leur renvoyer des pétitions avec demande d'explications pour qu'ils provoquent, quand ils le jugent nécessaire, la révision de certaines lois, La commission s'est bornée à émettre un avis tout en laissant une entière latitude au gouvernement quant à la révision de la législation actuelle sur les fabriques d'église.

M. Goblet. - Je viens appuyer la proposition de renvoi des pétitions en discussion à MM. les ministres de l'intérieur et de la justice, avec demande d'explications.

Je crois que la commission avait parfaitement le droit d'émettre un avis en formulant la proposition et je ne partage nullement, sous ce rapport, l’opinion de l'honorable M. Rodenbach qui croit qu'il était inopportun d'exprimer cet avis.

M. Rodenbach. - Je n'ai pas dit cela ; j'ai dit précisément le contraire.

M. Goblet. - Quoi qu'il en soit, l'honorable rapporteur, en disant qu'il n'y a pas lieu de réviser la législation sur les fabriques d'église, est complètement dans l'erreur, selon moi. Ce n'est pas ex abrupto, comme il l'a dit, qu'on demande la révision de cette législation : il y a longtemps que les administrations communales s'en sont occupées et que la législature est saisie de pétitions sollicitant cette révision.

Il n'est pas non plus contraire aux usages, il n'est pas intempestif, en renvoyant des pétitions aux ministres, de leur demander quelles sont leurs intentions, quant à l’objet de ces pétitions. Sans doute, ils ont l’initiative de la présentation des projets de loi ; mais nous avons aussi le droit de leur demander leur avis et de les engager à formuler leurs projets dans tel ou tel cas.

Ainsi, messieurs, en renvoyant les pétitions dont il s'agit ici à MM. les ministres de la justice et de l'intérieur, avec demande d'explications, nous ne faisons qu'user d'un droit qu'il nous arrive chaque jour d'exercer.

La surveillance des fabriques d'église par les administrations communales est complètement illusoire. Je ne fais certes aucune difficulté d'admettre que les membres des fabriques d'église sont, en général, d'honnêtes gens ; mais il peut aussi s'y trouver parfois des fripons ; et les lois ne sont faites que pour les cas exceptionnels. Les ministres aussi sont de très honnêtes gens ; ce qui n'empêche pas la cour des comptes de surveiller de très près leurs opérations en ce qu'elles touchant aux finances publiques.

(page 1229) Je crois, messieurs, que le renvoi des pétitions en discussion avec demande d'explications est indispensable. Ce n'est pas la première fois que cette discussion est soulevée. A propos d'une autre pétition qui nous a été présentée il y a quelques mois, un débat s'est engagé, auquel la Chambre a mis fin en décidant qu'elle prendrait une décision quelconque aussitôt qu'il se produirait un nouvel incident sur cette question.

M. de Theux. - Je ne m'oppose, ni au renvoi à MM. les ministres, ni à la demande d'explications.

Quand les explications auront été fournies, nous pourrons, si nous le jugeons à propos, entamer une discussion sur ces explications.

Je ferai seulement remarquer à la Chambre qu'en général toutes les lois ayant un caractère administratif et portées sous l'empire, ne laissent ordinairement rien à désirer au point de vus de l'autorité, mais laissent souvent beaucoup à désirer au point de vue de la liberté ; aussi je crois pouvoir affirmer que toutes les lois administratives de l'empire qui ont été révisées jusqu'à présent par le parlement belge, l'ont été au point de vue de la liberté.

Je n'émets aucune opinion en ce moment, en ce qui concerne le décret des fabriques, je réserve mon opinion pleine et entière. Nous verrons, je le répète, lorsque les explications auront été fournies, ce qu'il y a lieu de dire dans cette enceinte.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, la Chambre a déjà renvoyé au département de la justice une pétition ayant le même objet que celles dont nous nous occupons en ce moment.

En suite de ce renvoi, j'ai prié MM. les gouverneurs des différentes provinces de bien vouloir me faire connaître les modifications qu'ils croiraient nécessaire d'apporter au décret de 1809. Jusqu'à présent cette instruction n'est pas terminée. Si donc le renvoi au département de la justice avec demande d'explications est ordonné, ces explications ne pourront être fournies que lorsque j'aurai reçu tous les renseignements que j'ai demandés.

Je ne pense pas, et ceci touche au fond de la question, qu'il y ait dans l'administration des fabriques d'église beaucoup de malversations. Mais, je crois qu'il y a des irrégularités, et bien souvent j'en ai entendu signaler.

Ainsi, le placement des fonds en général ne se fait pas comme il devrait se faire ; on place souvent sur simples billets ; on ne stipule pas suffisamment de garanties. On ne s'enquiert pas suffisamment de la solvabilité des individus auxquels on prête, et très souvent les fabriques sont exposées à subir, de ce chef, de très grandes pertes. (Interruption.)

Le fait est certain. Je pourrais dire que je le sais positivement. J'ai vu des fabriques subir de très grandes pertes, parce qu'on ne s'était pas suffisamment enquis de la solvabilité des personnes auxquelles on prêtait des fonds.

Il arrive très souvent aussi que les budgets sont dépassés, que l'on fait des dépenses que l'on ne sait pas couvrir, que l'on compte sur un avenir meilleur qui ne se présente pas ; et qu'après un certain nombre d'exercices, les communes sont obligées de couvrir les dépenses qui ont été faites. De là une source de réclamations. Les communes disent : « Si vous vous étiez tenus dans les limites de votre budget, nous n'aurions pas besoin d'intervenir. » Voilà les principaux griefs que j'ai entendu articuler.

Quoi qu'il en soit, ainsi que je viens de le dire, j'ai prié MM. les gouverneurs de m'indiquer les modifications dont leur expérience leur a démontré l'utilité ou la nécessité ; lorsque ces renseignements me seront parvenus, je pourrai donner des explications.

M. Nothomb. - Sans rien préjuger maintenant.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je pense qu'il ne faut rien préjuger de part ni d'autre. L'honorable M. Vandenpeereboom s'est élevé contre le préjugé que le rapport de la commission semble élever contre toute espèce de modification, mais je ne pense pas qu'il veuille faire établir un préjugé en faveur de sa manière de voir. Tout doit être réservé.

M. A. Vandenpeereboom. - J'accepte les explications que vient de donner M. le ministre de la justice. Cependant, je maintiens ma proposition : le renvoi avec demande d'explications.

L'honorable M. Rodenbach a défendu le décret de 1809, j'ai demandé la parole tantôt, je n'ai pas voulu examiner le fond de la question. Je demande maintenant à faire quelques observations.

Vous vous rappellerez, messieurs, qu'il y a quelques mois, un incident imprévu a fait surgir, dans cette Chambre, la question de la révision de la législation sur les fabriques d'église. A cette époque je n'avais aucune connaissance des pétitions. J’ignorais qu'elles dussent être analysées ; je ne connaissais pis les pétitionnaires.

C’est donc spontanément, sans être préparé à la discussion, que j'ai pris la parole.

Mais aujourd'hui je tiens à dire pour quels motifs je pense qu'il y a lieu de réviser le décret de 1809, et je tiens d'autant plus à le dire, que la motion que j'ai faite a fortement préoccupé la presse et m'a valu l'honneur qui revient en général à tous les membres de la gauche qui s'occupent de certaines questions.

Cette question est aujourd'hui née, elle est étudiée et discutée, et je crois pouvoir déclarer à mes contradicteurs au dehors de cette enceinte, que leurs attaques ne me feront pas reculer.

Aussi longtemps que je serai dans cette Chambre, je poursuivrai la révision de cette législation que je considère comme mauvaise, et si le gouvernement ne s'exécute pas d'ici à une époque donnée, j'userai de mon initiative pour présenter un projet de loi.

Messieurs, la question, et je tiens à poser ce fait, n'a rien de politique.

Pour moi, je ne la place aucunement sur le terrain politique. Ce n'est pas une question cléricale, ce n'est pas une question libérale. C'est purement et simplement une question administrative, une question de régularité administrative.

Je demande que la législation sur les fabriques d'église, sur les paroisses, soit mise en harmonie avec notre législation actuelle, et je partage sur ce point l'opinion de l'honorable M. de Theux qui vient de nous dire qu'un grand nombre de lois qui gisent plus ou moins vermoulues dans l'arsenal des anciennes lois de l'empire doivent être successivement révisées et mises en harmonie avec nos institutions.

Je crois qu'il faut accorder plus de liberté aux fabriques, mais aussi qu'il faut donner aux conseils communaux ou à toute autre autorité civile plus d'action sur ces administrations.

Messieurs, dans mon opinion, le décret de 1809 doit être révisé pour plusieurs motifs. D'abord, il ne présente aucune garantie aux communes. Les intérêts communaux peuvent donc être lésés. Il ne garantit ni les intérêts des conseils de fabrique, ni ceux des contribuables.

En troisième lieu, il ne sauvegarde pas les intérêts de ceux qui font des fondations pieuses. De plus, il est en opposition avec nos institutions modernes, et surtout avec les institutions dont nous jouissons depuis 1830.

C'est précisément parce que ce décret date de plis de cinquante ans qu'il doit être révisé, tandis que l'honorable M. Vander Donckt, qui semble avoir un grand respect pour les antiquités...

M. Vander Donckt. - Quand elles sont bonnes.

M. A. Vandenpeereboom. - ... trouve dans sa vieillesse un motif pour le maintenir. Ce sont deux opinions différentes. Vous en avez une, j'en ai une autre.

Je dis que les intérêts des communes ne sont pas sauvegardés. Voici pourquoi.

Aux termes de l'article 92 du décret, les communes doivent intervenir dans les dépenses du culte et même dans les frais de réparation et reconstruction des églises, et il peut en résulter pour elles des charges extrêmement lourdes. Mais elles ne doivent intervenir qu'à la condition que les ressources des fabriques soient insuffisantes.

Le conseil communal règle tout ce qui est d'intérêt communal, il faut donc que le conseil puisse délibérer en connaissance de cause et puisse savoir si, oui ou non, il y a insuffisance de ressources. Eh bien, je demande comment, sous l'empire du décret actuel, les communes pourraient connaître la situation financière des fabriques.

A quoi les fabriques sont-elles tenues ? D'abord lorsqu'elles demandent un subside, elles sont obligées de porter leur budget à la mairie, mais leur budget sans pièces à l'appui, sans pièces justificatives.

En deuxième lieu, elles doivent remettre un double de leurs comptes, également sans pièces à l'appui, et ce double est purement et simplement déposé dans les archives de la commune.

Il en résulte que le conseil communal n'est pas à même d'apprécier la situation financière de la fabrique. Il ne peut pas même rétablir dans le budget une dépense ou une recette qui n'aurait pas été prévue ; s'il voit figurer dans le compte une dépense qui n'a pas été faite, il ne peut pas rayer cette dépense.

Il faut bien reconnaître, messieurs, que dans une pareille situation les conseils communaux n'ont aucun moyen de s'éclairer. Le dépôt du budget et des comptes dans les conditions que je viens d'indiquer, ne constitue donc pas une garantie, ce n'est là qu'une simple formalité.

(page 1230) On dira : Si le conseil communal ne trouve pas les comptes en règle, il peut refuser le subside. Soit. Mais avec ce système, messieurs, sous exposez le conseil communal à refuser indûment des subsides ou à en accorder mal à propos.

Messieurs, l’intérêt des fabriques n’est pas mieux garanti que celui des communes.

Je ne m'occupe pas ici de la formation des conseils de fabrique, mais je ferai observer que ce sont les seules instituions qui se renouvellent elles-mêmes... (Interruption.) et lorsqu'une place reste vacante au-delà d'un certain temps, ce n'est pas le conseil communal, c'est l'évêque qui nomme le titulaire.

L'honorable M. Rodenbach a dit tantôt que les chambres de commerce se renouvellent aussi elles-mêmes. C'est une erreur, les chambres de commerce présentent des candidats, et c'est le gouvernement qui les nomme.

Je le répète, il n'y a plus aujourd'hui en Belgique que les conseils de fabrique qui se renouvellent eux-mêmes.

Je reconnais, messieurs, qu'il ne sera pas facile de trouver un système de nomination convenable pour les conseils de fabrique ; l'élection directe, par exemple, présente des inconvénients réels.

La question du mode de nomination reste donc à examinerai je la réserve.

Mais je soutiens que l'intérêt des fabriques lui-même n'est pas sauvegardé dans l'état actuel des choses. Où est, en effet, la sauvegarde des administrés et même des administrateurs ? C'est dans le contrôle. Or, il est évident que les conseils de fabrique, au point de vue financier, ne sont pas contrôlés

Lorsqu'un conseil de fabrique ne demande pas de subsides à la commune, il arrête son budget comme il l'entend, et ne doit le soumettre qu'à l'approbation de l'évêque. Or, messieurs, sous le régime de nos institutions constitutionnelles, l'approbation de l'évêque peut-elle avoir une valeur légale ? Sous l'empire il n'en était pas de même ; les ministres des cultes étaient soumis au concordat, ils pouvaient à ce titre exercer une certaine action dans l'ordre civil ; mais aujourd'hui, qu'il y a liberté complète des cultes, il est impossible qu'un ministre des cultes ait, en cette qualité, une action quelconque sur les actes d'une autorité civile.

Quant aux comptes des fabriques, ils ne sont approuvés par personne, pas même par l'évêque.

- Un membre. - Il les voit.

M. A. Vandenpeereboom. - Oui, quand on veut bien les lui donner. En droit, l'évêque n'a pas à s'en occuper ; on doit, comme je l'ai dit, envoyer un double de compte à la mairie et déposer l'autre dans cette armoire à trois clefs qui joue un grand rôle dans le décret, mais qui, en fait, n'existe presque nulle part dans les sacristies.

Il est vrai, messieurs, que le chef du diocèse a le droit d'envoyer des commissaires dans les paroisses ; mais ces commissaires n'ont pas d'action ; dans un seul cas, ils peuvent agir, c'est lorsqu'ils sont grands vicaires.

Or, il y a des diocèses qui renferment plus de 600 paroisses ; tous les budgets et les comptes s'arrêtent le premier dimanche d'avril ; il est donc impossible que le chef du diocèse envoie des grands vicaires partout pour contrôler la comptabilité des conseils de fabrique.

Les receveurs des fabriques ne versent pas de cautionnement ; on n'a aucune action efficace contre eux ; ils ne sont pas même considérés comme comptables ; ce sont de simples dépositaires.

M. Nothomb. - Mais, chose unique, le procureur du roi peut même le forcer à rendre compte. Ainsi le décide l'article 90 du décret.

M. A. Vandenpeereboom. - Oui, mais, lorsqu'ils n'ont pas d'argent, on n'est pas très avancé en leur faisant rendre compte.

Messieurs, n'est-ce pas un spectacle assez curieux de voir en Belgique une seule catégorie d'administrations qui ne soient pas contrôlées. Les administrations de charité sont contrôlées par la commune, la commune est contrôlée par la province, la province est contrôlée par le gouvernement, le gouvernement enfin est contrôlé par les Chambres et par la cour des comptes ; les conseils de fabrique seuls échappent à toute espèce de contrôle.

Remarquez, messieurs, que chaque fois qu'un décret de l'empire est favorable aux intérêts que l'on veut défendre, on soutient que ce décret doit être exécuté. Mais si l'on y rencontre quelque chose de contraire à ces intérêts, alors on ne veut plus qu'ils soient exécutés. C'est encore pour faire cesser les tiraillements que je demande une révision de la législation spéciale de 1809.

Quant aux intérêts des fondateurs, il en est de même ; même absence de garantie : qui contrôle l'exécution des actes de fondation ? Personne.

Il est dit, dans le décret de 1809, qu'il faut qu'il y ait un inventaire ; qu'un extrait de cet inventaire doit être affiché sur l'armoire à trois clefs ; et, comme cette armoire a trois clefs n'existe que très rarement, l'extrait n'existe pas davantage, et ces dispositions du décret restent inexécutées.

Par les comptes mêmes, il est impossible de s'assurer si certaines fondations existent ou n'existent pas.

En général on porte en recette un article dans lequel on dit : « produit des fondations » sans explication aucune, sans détail aucun. L'honorable rapporteur, avec lequel je suis en désaccord sur d'autres points, est d'accord avec moi que le décret de 1809 n'est pas exécuté, et qu'il devrait l'être.

Si l'on compulsait en effet les archives de toutes les paroisses, on verrait que nulle part le décret ne reçoit son exécution complète.

S'il en est ainsi, c'est parce qu'il y a absence de contrôle, c'est parce qu'il n'y a pas d'autorité compétente, pour faire exécuter le décret de 1809.

Il n'y a pas de fonctionnaire qui puisse contrôler, parce que le décret n'est plus en harmonie avec notre législation actuelle, avec notre système constitutionnel.

Il est calqué sur le régime de l'empire, système de centralisation extrême que nous ne pourrions pas supporter en Belgique. Le décret est exactement conforme aux idées qui avaient cours alors ; et c'est parce que ces idées ne sont pas en harmonie avec nos lois actuelles que nous croyons qu'il y a lieu de modifier le décret.

Ainsi ce décret dispose que les conseils de fabrique ne peuvent avoir que quatre séances par an. Je ne vois pas pourquoi dans notre pays les conseils de fabrique ne pourraient pas se réunir chaque fois que cela est nécessaire.

D'un autre côté, lorsqu'il y a conflit, lorsque la commune refuse une subside demandé, qui est juge de la question, de savoir si le subside est dû oui ou non ?

D'après nos lois, c'est la députation permanente qui approuve les budgets communaux, et qui seule peut y porter d'office les dépenses obligatoires.

D'après le décret, chaque fois qu'il y a conflit entre la commune et le conseil de fabrique, l'évêque et le préfet discutent, et en fin de compte, c'est le ministre des cultes qui statue.

C'est là une centralisation que nous ne pouvons pas admettre et qui est en dehors de toutes nos idées.

Je signalerai encore une lacune. Lorsqu'on a fait le décret de 1809, la religion catholique était la religion de l'Etat. Il n'est pas fait mention des autres cultes.

Il me semble que le décret doit être revu, à ce point de vue et en ce sens que tous les cultes doivent être mis en Belgique sur la même ligne et en vertu de la liberté, doivent être soumis aux mêmes règles.

Messieurs, les conseils de fabrique jouissent de la personnification civile ; c'est là un avantage immense, et comme compensation à cette position parfaitement juste, il faut que leur gestion soit déférée au contrôle de l'autorité civile ; les corps qui ont la personnification civile doivent être contrôlés par l'autorité laïque.

Telles étaient les observations que je comptais présenter.

Je ne crois pas inutile de répéter ce que j'ai dit en commençant, que cette question n'a rien de politique, que ce n'est ni une question libérale, ni une question cléricale ; ce n'est, à mes yeux, qu'une simple question d'administration.

Je reconnais que lorsqu'on révisera le décret, il est certaines dépenses, celles spécialement affectées au culte, dont il ne doit pas être rendu un compte détaillé. Ces dépenses, si je ne me trompe, sont indiquées dans le décret de 1809, sous le titre : « Dépenses intérieures ». Je crois qu'il ne conviendrait pas qu'un conseil communal s'occupât des détails concernant exclusivement le culte proprement dit. Mais lorsqu'il s'agit de l'administration de biens-fonds, de termes, d'exploitation de coupes de bois, de placements de rentes, de réparation d'immeubles, l'autorité civile doit intervenir parce qu'il s'agit de biens temporels, de biens de ce monde qui tombent sous le contrôle de l'autorité laïque.

Je suis convaincu que la révision de cette législation serait utile aux fabriques elles-mêmes.

Je puis dire, par expérience, qu'une gestion très régulière, conforme à toutes les règles d'une bonne comptabilité, serait de nature à mettre assez prochainement tous les conseils de fabrique dans une position qui les dispenserait de demander des subsides à qui que ce fût, position qui serait réellement digne.

(page 1231) D'un autre côté, lorsque les administrations communales pourront examiner et contrôler la comptabilité des conseils de fabrique, il est évident qu'elles leur accorderont, au besoin, des subsides plus volontiers qu'elles ne leur en accordent aujourd'hui.

Messieurs, il est déjà un certain nombre de membres de conseils de fabrique que j'ai consultés et qui m'ont déclaré être parfaitement de mon avis ; et, si un de ces jours, il arrivait à la Chambre des pétitions de membres de conseils de fabrique, pour demander la révision du décret de 1809, je n'en serais nullement étonné.

- Le renvoi de la pétition à MM. les ministres de la justice et de l'intérieur, avec demande d'explications, est mis aux voix et adopté.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition sans date, des secrétaires communaux dans l'arrondissement d'Eecloo demandent une loi qui fixe leurs traitements en raison de la population des communes et qui établisse une caisse de retraite en leur faveur.

Par pétition datée de Landen, le 6 février 1861, les secrétaires communaux du canton de Landen demandent qu'il soit pris des mesures pour améliorer leur position.

Même demande des secrétaires communaux du canton de Waremme.

Messieurs, des secrétaires communaux s'adressent à la Chambre ; les uns demandent qu'on fixe leur traitement minimum ; les autres sollicitent simplement une amélioration de position.

Dans une séance précédente, l'honorable M. Hymans vous a fait un rapport dans lequel il a énuméré les travaux divers imposés aux secrétaires communaux, en dehors de la besogne ordinaire qui ressortit spécialement à leurs fonctions de secrétaire dans l'intérêt communal.

Cette énumération, messieurs, les pétitionnaires l'ont de nouveau répétée. Ils disent que d'abord la correspondance, les délibérations du budget et des comptes, l'état civil, la police, la population, la milice, la garde civique, les listes électorales et les élections, la grande et la petite voirie, l'instruction publique, les affiches, l'agriculture, les accidents imprévus, le cadastre, les contributions directs, les certificats de bienfaisance publique, le domicile de secours, les enquêtes sur les poids et mesures, les passeports et surtout la statistique et d'autres objets qui n'ont pas trait aux intérêts communaux leur donnent un travail excessivement lourd.

Il est vrai de dire, messieurs, que le gouvernement a déjà fait quelque chose pour eux, en instituant des caisses de retraite pour les secrétaires communaux.

Il est vrai aussi que dans certaines communes on leur abandonne ce qu'on appelle le casuel, c'est-à-dire le produit des expéditions de l'état civil, les extraits du cadastre et d'autres pièces qui se payent.

Il y a encore à observer que, dans beaucoup de communes, les secrétaires communaux ne sont pas exclusivement secrétaires communaux et qu'il en est pour qui le secrétariat n'est en quelque sorte qu'un accessoire.

Nous comptons parmi eux des brasseurs, des marchands de drap, des négociants de toute espèce est surtout des agents d'affaires.

Il y a en outre des secrétaires communaux qui sont secrétaires de 6 ou 7 communes, de petites communes si l'on veut, mais de manière cependant qu'il serait très difficile de fixer le minimum de leur traitement.

D'ailleurs cette fixation de minimum de traitement donnerait lieu à une autre difficulté ; ce serait en quelque sorte empiéter sur les droits des conseils communaux à qui seuls incombe la mission de fixer le traitement de leurs secrétaires communaux.

Messieurs, ces pétitionnaires ont réellement quelques droits en ce qui concerne les travaux extraordinaires qu'ils sont obligés de faire au profit de l'Etat et de la province. Cela est incontestable.

En dernier lieu encore ils ont été accablés d'un travail gigantesque pour la recherche et la confection des tableaux destinés à établir la statistique de la bienfaisance.

Eh bien, messieurs, il est évident qu'ils ont quelque droit et qu'il serait bon que le gouvernement voulût aviser aux moyens de les indemniser, car, comme ils le disent dans leurs pétitions, l'ancien adage qui dit que toute peine mérite salaire, semble ne pas leur être applicable.

Ils sont effectivement non seulement la cheville ouvrière de la commune, mais encore le travail extraordinaire qu'ils sont obligés de faire en dehors de leurs travaux de secrétaire, mérite certainement la considération du gouvernement et de la Chambre.

C'est dans ces conditions, messieurs, que votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. De Lexhy. - J'appuie la demande qui vous est faite par les secrétaires communaux des cantons de Waremme et de Landen, sur laquelle on vient de faire rapport.

Parmi les arguments qui ont été développés par l'honorable rapporteur, il y en a que j'adopte et d'autres auxquels je ne puis adhérer. Je me rallie cependant à la conclusion du rapport, parce que j'ai l'espoir que le gouvernement reconnaîtra le fondement des plaintes des secrétaires communaux.

On a fait de nouveau l’émunération des nombreux travaux qui leur incombent et que l'on peut classer en trois catégories : les travaux concernant la commune, ceux concernant l'Etat et enfin ceux concernant la province.

Une part très notable de ces travaux sont exigés par l'Etat et ces services si importants ne reçoivent aucune rémunération. C'est là une anomalie flagrante. La manie des enquêtes et des statistiques ordonnées par le gouvernement, prend de telles proportions, qu'elle amène un surcroît considérable de besogne pour les secrétaires communaux.

En présence de la somme de travaux fournis par ces utiles et modestes fonctionnaires, on ne peut méconnaître l'insuffisance de leur traitement. Dans beaucoup de communes, le traitement est non seulement insuffisant, mais il est dérisoire. On ne peut laisser ces fonctionnaires dans une position aussi précaire : ce serait un déni de justice.

Aussi, la nécessité d'améliorer la position des secrétaires communaux n'est contestée par personne. On ne peut différer d'opinion que sur la mesure de l'amélioration et sur les moyens d'y arriver. L'amélioration doit être fournie par la commune, l'Etat et la province. Chacun doit y contribuer dans la proportion des services qu'il obtient. C'est là un principe d'équité et de justice.

La participation de l'Etat dans la formation du traitement des secrétaires communaux repose donc sur cette loi fondamentale, que tout service, que tout travail mérite rémunération. Inutile d'insister sur la question de principe.

On objectera peut-être que l'Etat intervenant dans le payement des secrétaires communaux, commet un empiétement sur le domaine communal. Mais cette participation n'altère en rien le caractère essentiellement communal de la fonction de secrétaire ; elle n'érige pas ce dernier en fonctionnaire de l'Etat ; elle ne porte aucune atteinte à l'autonomie communale. L'Etat peut parfaitement intervenir dans les dépenses communales, sans qu'il y ait confusion de pouvoirs.

Le traitement du secrétaire incombe certainement à la commune, mais je ne vois pas pourquoi l'Etat n'interviendrait pas en cas d'insuffisance des ressources communales, comme il le fait pour le traitement des instituteurs primaires qui sont également des fonctionnaires communaux.

Dans ce dernier cas, il est vrai, l'intervention de l'Etat est commandée par un grand intérêt social : mais, dans l'autre cas, elle est commandée par un grand intérêt administratif et surtout par un principe d'équité.

Je me bornerai, messieurs, à établir le fondement de la pétition, sans entrer dans l'examen des moyens pour arriver à l'amélioration désirée ; c'est au gouvernement qu'incombe ce soin et ce devoir. Nous ne sommes pas en possession d'éléments suffisants pour préconiser un moyen plutôt qu'un autre ; le gouvernement est plus à même que nous d'indiquer une solution équitable.

Certes, messieurs, on a déjà fait beaucoup en faveur des secrétaires communaux, en créant la caisse de prévoyance, dans laquelle l'Etat et les provinces interviennent assez largement. Vous leur avez assuré l'avenir, il s'agit de leur assurer le présent. D'ailleurs, en intervenant dans la création des ressources de la caisse de retraite, l'Etat a reconnu implicitement la légitimité du principe de son intervention pour les traitements en cas d'insuffisance des ressources communales. Ces deux idées sont en étroite corrélation.

J'ajouterai même, qu'à mon avis, le gouvernement est plutôt tenu à contribuer au traitement, en cas d'insuffisance, en raison des services qui lui sont rendus directement, qu'il ne l'était à intervenir dans la création d’une caisse de retraite. Ici c'est un acte de munificence ; là c'est presque une dette.

Les sympathies de la Chambre pour les secrétaires communaux se sont révélées à plusieurs reprises et notamment dans la séance du 14 mars 1860, à l'occasion d'un rapport présenté par l'honorable (page 1232) M. Hymans sur une pétition analogue à celle que nous discutons en ce moment. La question continue à gagner du terrain dans l'opinion publique et il ne lui reste plus guère qu'à se faire adopter par le gouvernement.

Le conseil provincial de Liége a été saisi de cette question, et après un débat des plus brillants, auquel ont pris part plusieurs de mes amis, on a formulé le vœu que la législature voulût s'occuper de la position des secrétaires communaux de manière à l'améliorer.

Une solution sérieuse, efficace, équitable, est devenue urgente. On ne peut plus se borner à plaindre les secrétaires communaux, il faut les payer.

Depuis que j'ai l'honneur de siéger au parlement, j'ai rarement laissé échapper l'occasion de défendre les intérêts des instituteurs primaires, dont la mission est un véritable sacerdoce : je défendrai avec le même zèle les intérêts des secrétaires communaux.

On a appelé les instituteurs, les pionniers de la civilisation ; j'appellerai, moi, les secrétaires communaux, les pionniers d'une bonne administration publique.

J'appuie donc de toutes mes forces le renvoi de ces pétitions à l'honorable ministre de l'intérieur, en l'adjurant de nous apporter une solution satisfaisante.

M. Desmaisières. - Messieurs, les secrétaires communaux sont des fonctionnaires qui rendent de nombreux et importants services non seulement aux communes, mais encore à l'Etat.

A ce titre, ils méritent d'obtenir une amélioration de position.

Je crois donc devoir appuyer de tous mes moyens les conclusions de la commission, c'est-à-dire le renvoi à M. le ministre de l'intérieur, qui reconnaîtra, je n'en doute pas, qu'il y a lieu de faire droit à la demande des pétitionnaires.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Diest, le 18 mars 1861, des habitants de Diest prient la Chambre de décider si les herbagers doivent être soumis au droit de patente.

Jusqu'ici, messieurs, ils n'ont pas été sujets au droit de patente.

Il y a beaucoup de membres de la Chambre qui ne s'expliquent pas clairement ce que c'est que la qualité d'herbager.

Je vais dire en peu de mots en quoi elle consiste.

Ce sont tout simplement des propriétaires ou locataires de prairies qui y font paître des bestiaux pour les engraisser et les vendre ensuite au marché.

Il paraît qu'une circulaire émanant du ministère des finances, et adressée aux contrôleurs et aux receveurs de contributions, a imposé ces industriels d'une patente.

C'est ce qui a donné l'éveil aux herbagers qui demandent qu'on veuille bien s'expliquer sur les intentions que le gouvernement a à cet égard.

C'est dans ces termes, messieurs, que votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre des finances.

M. Beeckman. - Les habitants de Diest ont en effet adressé une pétition à la suite de la circulaire de M. le ministre des finances aux directeurs des contributions.

Messieurs, quant à moi, je me serais borné à demander une explication à l'honorable ministre des finances, mais comme il est absent, je désirerais qu'on ajoutât aux conclusions : « avec demande d'explications. »

M. Muller. - Messieurs, il s'agit ici du point de savoir si les individus qu'on appelle herbagers sont soumis au droit de patente.

Or la voie la plus naturelle, la voie légale pour trancher cette question, c'est que les herbagers adressent leur réclamation à la députation permanente.

Si la députation permanente ne leur donne pas raison, comme il s'agit d'une question de droit, elle pourra être déférée à la cour de cassation.

Je ne m'oppose pas au renvoi à M. le ministre des finances, je fais seulement observer que la voie la plus simple, la voie légale pour obtenir justice, lorsqu'on croit être frappé indûment d'une patente, c'est de réclamer devant la députation permanente.

Si je fais cette observation, c'est parce que probablement les pétitionnaires ont ignoré la voie naturelle d'obtenir justice, s'ils ont droit.

M. Beeckman. - Je crois que l'honorable M. Muller se trompe, car je vois dans l'article 34 de la loi de 1819 que ce sont les employés des contributions qui sont chargés de veiller à l'exécution de la loi, qu'ils sont même obligés de dresser procès-verbal quand un contribuable ne veut pas se soumettre au droit de patente. Or, quand un contribuable ne se soumet pas à la loi de patente et quand l'employé dresse procès-verbal, à qui appartient la décision ? Je crois que c'est bien à la justice, et la preuve, je la trouve dans l’article 42 de la même loi, article ainsi conçu :

« Les poursuites devant les tribunaux ne pourront avoir lieu que de l'avis du département des finances, qui aura la faculté de donner aux fonctionnaires des contributions directes le pouvoir de transiger sur les amendes encourues, avec les contrevenants qui en feront la demande. » Il me paraît que cela est bien clair.

Je crois que la députation permanente peut décider sur le montant de l'imposition ; quand un contribuable se croit trop imposé, quand il se trouve classé dans une catégorie trop élevée, c'est à la députation permanente de décider sur sa réclamation ; mais la question qui nous occupe n'est évidemment que de la compétence des tribunaux.

Un cas identique s'est déjà présenté à une autre époque. En 1825 (vous voyez qu'il y a longtemps de cela) le même cas s'est présenté dans l'arrondissement de Louvain.

Un inspecteur des contributions, M. Vanham, voulut imposer également les herbagers de Diest ; plusieurs d'entre eux se soumirent au droit de patente ; un seul, M. Cox, juge de paix de la localité, s'y opposa. Que fit l'inspecteur d'arrondissement ? Il soumit l'affaire au tribunal de première instance de Louvain.

Et le jour même où l'affaire devait être plaidée devant ce tribunal, M. Vanham, qui s'était aperçu probablement qu'il était allé un peu trop loin, fit appeler M. Cox pour lui offrir de transiger. M. Cox s'y refusa. M. Vanham demanda remise à huitaine ; et, depuis lors, on n'a plus entendu parler de cette affaire. Et c'est en 1861 que M. le ministre des finances semble vouloir revenir à la tentative faite en 1825. On sait qu’à cette époque on poussait la fiscalité un peu loi, et je ne puis croire que l’honorable ministre des finances ait réellement l’intention de faire revivre ce précédent dont la justice était au moins douteuse.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable préopinant me semble n'avoir pas suffisamment examiné la question qu'il traite. Il a décidé d'autorité que c'était aux tribunaux qu'on devait toujours s'adresser et non aux députations permanentes. En cela il s'est trompé. Deux recours sont ouverts en cette matière : l'un à la députation permanente, l'autre aux tribunaux, selon les cas. Si un particulier se prétend injustement imposé, il doit s'adresser à la députation pour lui soumettre la question. Si, au contraire, l'administration constate une contravention et dresse procès-verbal à charge de l'individu, les tribunaux sont compétents pour statuer. Voilà comment ces juridictions peuvent être saisies de la question selon les circonstances.

Maintenant, au fond, j'ai eu déjà l'honneur de dire à l'honorable membre qui m'avait entretenu de cette affaire, que l'intéressé devait s'adresser à la députation permanente, laquelle est seule compétente pour résoudre la question de fait qui se présente.

L'administration n'a nullement modifié sa jurisprudence en cette matière et je ne suis pas revenu aux opinions prétendues de 1825. Les herbagers ne sont pas soumis au droit de patente, mais les marchands de bestiaux sont soumis à la patente.

Maintenant, comment décider que, dans tel ou tel cas particulier l'herbager est un marchand de bestiaux ou un simple cultivateur ?

C'est là un fait sur lequel je ne puis évidemment pas me prononcer. En principe général, ou ne peut pas répondre à cette question ; la décision dépend nécessairement de la nature de chaque cas particulier.

Je ne connais pas le fait dont il s'agit ici, et il me serait, par conséquent, impossible de me prononcer. Au surplus, je ne m'oppose pas au renvoi proposé ; l'administration examinera.

M. Landeloos. - Je suis fâché de ne pouvoir abonder ni dans le sens de M. le ministre des finances, ni dans celui de l'honorable M. Muller. L'un et l'autre me semblent être complètement dans l'erreur lorsqu'il prétendent que la connaissance du fait dont se plaignent les pétitionnaires ne serait pas du ressort des tribunaux.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je dis que cela dépend des cas.

M. Landeloos. - Je dis que c'est une erreur de prétendre que le cas dont il s'agit ici serait du ressort de la députation permanente. Ce n'est pas à cette autorité à décider si l'industriel qui prétend être affranchi de la patente, est soumis ou non au droit de patente.

S'il s'agissait d'une question de classification, il est évident qu'elle rentrerait dans les attributions de la députation permanente.

Mais lorsque, comme dans l'espèce, on se croit injustement soumis au droit de patente, c'est évidemment le pouvoir judiciaire qui, seul, est compétent pour trancher la question.

(page 1233) M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Vous êtes dans l'erreur

M. Landeloos. - Pour vous prouver que. je ne suis pas dans l'erreur, je vous dirai que cette question a été formellement résolue dans le sens que j'indique par un arrêt de la cour d'appel de Bruxelles en date du 7 août 1841.

Cet arrêt décide formellement que lorsque la contestation ne roule pas sur cotisation, classification ou répartition du droit de patente, opération qui, aux termes des règlements sur la matière, et entre autres des articles 23 et 28 de la loi du 21 juin 1819, sur les patentes, est du ressort de l'administration, mais qu'elle concerne le fond du droit et appréciation de faits d'où doit découler l'obligation ou la non obligation de payer la patente, elle rentre dans la compétence des tribunaux.

Voilà ce que la cour d'appel de Bruxelles a décidé en 1841. Eh bien, de quoi s'agit-il dans l'espèce ?

Les pétitionnaires disent que la qualité d'herbager ne rend pas celui qui l'a passible du droit de patente.

Maintenant, on leur dit : Si vous croyez n'être pas sujets au droit de patente, adressez une réclamation à la députation permanente, et si cette autorité vous donne tort, vous pourrez vous pourvoir auprès de la cour de cassation.

Eh bien, messieurs, ce n'est pas cette marche qu'on doit suivre, ce sont, d'après l'arrêt que j'ai cité, les tribunaux qui doivent en connaître.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je ne vois pas ce qu'on peut conclure de ces deux opinions. Quelle est l'autorité compétente ? Sont-ce les députations ? Sont-ce les tribunaux ?

En toute hypothèse ce n'est pas la Chambre, paraît-il, et les pétitionnaires, dès lors, avaient à s'adresser soit à l'autorité provinciale, soit à l'autorité judiciaire. Si un individu se croit injustement cotisé, il peut se pourvoir devant la députation permanente ; la députation a ici un fait à constater ; je viens de vous dire quel est le principe en cette matière.

Les herbagers, les cultivateurs ne sont pas soumis à la patente, mais les marchands de bestiaux y sont soumis. Eh bien, les individus qui se plaignent, se prétendent-ils herbagers pour ne pas payer la patente et sont-ils en réalité marchands de bestiaux ? C'est une question que la députation permanente examinera et décidera.

M. Beeckman. - La circulaire n'a pas été interprétée ainsi par vos employés.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je ne sais comment les employés ont interprété la circulaire ; mais je sais que la circulaire, si circulaire il y a, ne peut dire que cela : les herbagers ne sont pas soumis à la patente, les marchands de bestiaux y sont soumis.

Si une patente a été exigée à tort, que l'on se pourvoie devant la députation permanente, et si vous croyez que les députations permanentes ne sont pas compétentes, que l'on s'adresse aux tribunaux. Mais j'ajoute, pour vous donner toute satisfaction, que je ne m'oppose pas au renvoi de la pétition, et j'examinerai encore la question.

M. Beeckman. - Je crois qu'il doit être bien entendu que l'on ne verbalisera pas.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Du tout. Mes paroles ne peuvent avoir cette portée.

M. Beeckman. - J'ai consulté les employés de votre département ; ils paraissent décidés à verbaliser et à porter l'affaire devant les tribunaux. C'est pour cela que les habitants de Diest ont réclamé.

Si vous me dites que l'affaire sera portée devant la députation permanente, je me contenterai de cette explication. Mais si l'affaire doit être portée devant le tribunal de Louvain, il en résultera, pour les réclamants, des frais qu'on devrait, me paraît-il, leur épargner.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je me suis probablement bien mal expliqué pour que l'honorable membre ait compris que j'aurais annoncé qu'il n'y aurait pas de poursuites ou que l'affaire serait portée devant la députation permanente. Je n'ai rien dit de semblable. Je ne connais pas les faits ; je ne puis donc répondre dans le sens indiqué par l'honorable membre.

J'ai dit seulement que les personnes qui s'adressent à la Chambre devraient s'adresser à la députation permanente ; ou bien, si comme l'honorable M. Landeloos le soutient, les députations permanentes sont incompétentes, qu'elles devraient s'adresser aux tribunaux.

Je ne sais rien autre que cela et je ne déclare rien, je ne déclare pas qu'il n'y aura pas de poursuites, je ne sais s'il ne devra pas y en avoir, si la loi n'en fait pas un devoir à l'administration et si, à défaut de poursuites, il n'y aurait pas prescription. Il est possible, que dans le cas qui nous occupe, il n'y ait pas eu déclaration de patente, qu'il y ait un procès-verbal dressé et que, dans cette hypothèse, l'affaire doive être déférée aux tribunaux. Mais si ces particuliers avaient procédé autrement, si même en présence du procès-verbal, ils avaient dit n'être pas soumis à la publicité et si, dans le délai déterminé, ils s'étaient adressés à la députation permanente, celle-ci aurait statué. Je ne sais ce que l'on veut. L'honorable M. Beeckman désire-t-il que la Chambre statue sur la question ?

M. Beeckman. - Je demande que vous vous engagiez à ne pas faire de poursuites.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Comment voulez-vous que je prenne des engagements sur des faits que je ne connais pas ?

La loi doit être exécutée. Vous parliez tantôt du régime de 1825 en vertu duquel on croyait pouvoir suspendre l'exécution de la loi. Mais sous la Constitution nous n'avons pas ce pouvoir. Le gouvernement ne peut pas se dispenser d'exécuter la loi.

- La discussion est close.

M. le président. - M. Beeckman a proposé le renvoi à M. le ministre des finances avec demande d'explications.

M. Beeckman. - M. le ministre vient de s'expliquer. Je renonce à ma proposition.

- Le renvoi pur et simple à M. le ministre de3 finances est ordonné.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 1er mars 1861, le général-major Winssinger propose des mesures tendantes à réparer le mal fait par los inondations à l'amont de Bruxelles et à certains quartiers de cette ville. »

Messieurs, cette pétition, qui est très longue et qui énumère un grand nombre de griefs contre le gouvernement, a donné lieu à un examensérieux au sein de votre commission, qui a jugé à propos de demander au département des travaux publics quelques renseignements à ce sujet. Le département des travaux publics a bien voulu satisfaire à notre demande. La pétition a été imprimée ; elle vous a probablement été envoyée hier soir et vous avez pu en prendre communication.

Je ne m'occuperai donc que de la réplique, et à cet effet je vous donnerai lecture des communications que le gouvernement a fournies à la commission.

C'est d'abord une lettre de M. l'ingénieur des ponts et chaussées à M. le ministre :

« Bruxelles, le 11 avril 1861.

« Monsieur le Ministre,

« J'ai l'honneur de satisfaire à votre apostille en date du 7 mars dernier, cotée comme en marge, par laquelle vous m'avez communiqué, pour rapport, la pétition ci-jointe adressée à la Chambre des représentants par le sieur Winssinger, général-major à la retraite.

« Le pétitionnaire, qui n'a pas une idée très nette des attributions du gouvernement, en ce qui a trait aux travaux publics, s'occupe à la fois d'un grand nombre de faits qu'il confond, bien qu'ils soient d'une nature différente.

« Sa pétition a principalement pour objet d'établir que le gouvernement a, de propos délibéré, causé une dépréciation de 100 millions de francs au hameau de Cureghem, dépendant de la commune d'Anderlecht.

« Les causes auxquelles il attribue essentiellement cette énorme dépréciation ou plutôt la plus-value que les terrains du hameau de Cureghem n'ont pas obtenue par le fait du gouvernement ; sont les suivantes :

« a. Inondations. Je m'occuperai plus loin de ce point, en entrant dans quelques détails en ce qui le concerne.

« b. Raccordement des stations du Nord et du Midi par les boulevards. Ce raccordement a pu porter un certain préjudice aux habitations situées le long du boulevard ; mais on se représente difficilement comment son établissement a pu déprécier la valeur des terrains du hameau de Cureghem.

« c. Retrait de l'arrêté royal octroyant un hippodrome sur la rive gauche du canal de Charleroi, à Molenbeek. L'établissement de l'hippodrome incombait à la ville de Bruxelles. Si l'administration de la capitale a jugé à propos de le construire, à ses frais, au point qu'il occupe aujourd'hui, peut-on en faire un grief au gouvernement ?

« d. Préférence donnée au Nord sur le Midi de Bruxelles, pour le point de raccordement du chemin de fer de Dendre et Waes avec le réseau du chemin de fer de l'Etat.

(page 1234) Le point de raccordement du chemin de fer de Dendre et Waes avec le chemin de fer de l'Etat pouvait sans doute faire l'objet d'une controverse. En adoptant la station du Midi pour point d'aboutissement, on eût dû traverser une localité assez accidentée et l'on se serait trouvé dans la nécessité, pour marcher vers Louvain, par Tervueren, de gravir, à l'aide d'une rampe d'une très forte inclinaison, le versant de droite de la vallée de la Senne. On ne doit, d'ailleurs, pas perdre de vue à ce sujet que la construction du chemin de fer de Dendre et Waes ayant fait l'objet d'une concession, le gouvernement aurait dû avoir de graves raisons pour repousser le projet qui lui fut soumis par la société concessionnaire.

« e. Etat d'abandon indéfiniment prolongé de la station du Midi ; son emplacement, son existence même mis et remis sans cesse en question depuis plus de 12 ans.

« Il est sans doute à regretter que le gouvernement ne se soit pas trouvé en position de se prononcer plus tôt qu'il ne l'a fait sur l'emplacement définitif de la station du Midi ; mais quand il s'agit d'une question de quelques millions, il est, je pense, permis d'hésiter, alors surtout que le retard apporté dans sa solution n'amoindrissait pas les recettes de nos voies ferrées.

« f. Inachèvement de la place Rouppe et retard mis au percement de la rue du Midi.

« L'achèvement de la place Rouppe était subordonné à l'emplacement de la station du Midi dont je viens de m'occuper. Quant au percement de la rue du Midi, ce travail concerne exclusivement la ville.

« g. Préférence accordée par le gouvernement à la direction, par Cortenberg, sur celle par Tervueren, à propos de la construction d'un chemin du fer direct de Bruxelles à Louvain.

« Le chemin de fer de Bruxelles à Louvain doit évidemment former le prolongement de la ligne directe de Gand à Bruxelles et, à ce point de vue, son origine doit être placée dans la station du Nord où aboutît cette ligne, ce qui entraîne le passage par Cortenberg.

« Passant aux inondations, je ferai observer que la Senne ressortit à la petite voirie et qu'à ce titre l'administration de ce cours d'eau incombe à la province de Brabant et non à l'Etat.

« Le gouvernement ne peut donc être rendu responsable ni de la situation dans laquelle se trouve cette rivière, ni des débordements auxquels elle est sujette depuis un temps immémorial et dont les conséquences peuvent sans doute être atténuées à l'aide de travaux, sans qu'on puisse jamais, quoi qu'on fasse, parvenir à les éviter complètement.

« Il est vrai que les travaux publics construits par l'Etat dans la vallée de la Senne, notamment le canal de Bruxelles à Charleroi, peuvent avoir contribué, dans une certaine mesure, à augmenter l'intensité et la fréquence des débordements ; aussi le gouvernement a-t-il consenti à prendre à sa charge une très forte part de la dépense des travaux jugés nécessaires pour obvier aux inondations. Sans cette circonstance, il eût pu décliner toute intervention dans les frais dont il s'agit et abandonner à la province et aux communes le soin de prendre les mesures que leur aurait dictées leur intérêt.

« C'est donc complètement à tort que le pétitionnaire accuse le gouvernement ; s'il avait été inspiré par des sentiments d'équité, il eût reconnu que, sans l'intervention morale et financière de l'Etat, rien ne se serait fait jusqu'à ce jour dans le but d'obvier aux inondations.

« Il n'entre pas dans mes intentions de réfuter en détail toutes les assertions erronées que contient la pétition dont je m'occupe, au sujet des débordements de la Senne, cela me conduirait trop loin. Je dirai cependant quelques mots des prétendues violations de la loi, en ce qui concerne la manœuvre des écluses.

« Les seules écluses dont la manœuvre incombe aux agents du gouvernement sont celles situées devant les arches du pont-canal de Molenbeek Saint-Jean, qui livrent passage aux eaux de la petite Senne sous le canal de Charleroi.

« Anciennement, afin de ne pas submerger inutilement le faubourg de Molenbeek et aussi pour prévenir le déversement des eaux débordées dans les canaux de Charleroi et de Willebroeck, on ne laissait passer sous les arches du pont-canal que le volume d'eau que pouvait évacuer le siphon dit « des trois trous » établi sous le canal de Willebroeck.

« Mais depuis longtemps déjà on ouvre complètement les vannes du pont-canal de Molenbeek, toutes les fois que la chose est nécessaire dans l'intérêt de l'amont.

« Quant aux écluses de la ville, elles sont manœuvrées par les agents de l'administration communale, lesquels ont pour instruction de ne tenir les écluses ouvertes que jusqu'à ce que les eaux aient atteint, en deçà des boulevards, un niveau qui ne pourrait être dépassé sans que le bas de la ville fût submergé.

« La fermeture des écluses, à un moment donné, est sans doute contraire au règlement provincial qui régit les cours d'eau. Toutefois, il importe de ne pas perdre de vue que la ville se borne à pratiquer ce qui s'est fait depuis un temps immémorial et ce qui a lieu dans un grand nombre de villes de la Belgique, parmi lesquelles je citerai Louvain, où la commune retient, en amont de la ville, les eaux débordées de la Dyle jusqu'à ce qu'elles puissent être évacuées sans submerger la partie basse de la ville.

« D'après le pétitionnaire, moyennant une dépense de 110,000 francs, on aurait pu garantir d'inondations, dès 1839 ou du moins dès 1840, les localités qui en ont le plus souffert et rendre inutile la violation des lois sur les cours d'eau, par la ville de Bruxelles et par la concession du canal de Charleroi.

« Pour motiver cette opinion, le requérant se livre à l'évaluation de ceux des travaux proposés par la commission instituée en 1859, qui devaient particulièrement soulager la localité dont il défend les intérêts.

« Ainsi, suivant lui, le gouvernement et la province auraient dû s'occuper exclusivement du hameau de Cureghem, au risque d'inonder, par l'élargissement intempestif des débouchés d'ouvrages d'art situés aux abords de Bruxelles, la partie aval de la capitale et la partie de la province d'Anvers baignée par le cours de la Senne.

« Cette prétention exorbitante ne pouvait être admise et ne l'a pas été. Le gouvernement a nécessairement dû procéder, en marchant de l'aval vers l'amont.

« Si des retards ont eu lieu dans l'exécution des travaux, la cause en doit être attribuée, non pas à l'administration, mais bien à la difficulté de faire contribuer les localités intéressées, dans une juste proportion, aux frais que les ouvrages devaient entraîner.

« Mon rapport du 12 décembre 1850, dont ci-joint copie, établit qu'à cette date le gouvernement avait dépensé, en travaux, pour obvier aux inondations de la Senne, une somme de fr. 269,181-25, tandis que les provinces, les communes et les particuliers n'avaient encore exécuté aucun travail, ni fait aucune dépense.

« Depuis 1850, le gouvernement, en vertu de la loi du 20 décembre 1851, modifiée par celle du 8 mars 1858, a pu consacrer à la Senne une allocation de 300,000 fr. qui sera bientôt complètement absorbée. La province a dépensé, de son côté, depuis 1850, environ 200.000 fr. et la ville de Bruxelles 110,000 fr. Cette dernière a en outre porté à son budget de l'exercice courant une somme de 20,000 fr. destinée aux travaux d'élargissement du pont dit « du Diable », situé sur la petite Senne.

En récapitulant ces diverses dépenses et en y ajoutant les frais de la dérivation de la Senne à Vilvorde, ceux des perrés exécutés le long de la Senne, aux abords du domaine de Laeken et ceux des travaux entrepris dans la province d'Anvers, on est amené à reconnaître que les dépenses faites depuis 1840, pour obvier aux inondations de la Senne, s'élèvent à au moins 1,100,000 fr. dont 800,000 ont été supportés par l'Etat et le surplus par la province de Brabant et la ville de Bruxelles.

« Ce résultat, dû, je le répète, à l'intervention morale et pécuniaire du gouvernement, réfute et détruit toutes les allégations malveillantes et injurieuses du pétitionnaire.

« Si l'ordre suivi dans l'exécution des travaux n'a pas obtenu son assentiment, on s'en consolera, en songeant qu'ils ont été entrepris de concert avec les administrations provinciale et communale dont les lumières peuvent certes être considérées comme étant au moins équivalentes à celles que peut posséder le sieur Winssinger sur la question.

« Afin de vous mettre complètement au courant de ce qui fait l'objet de de la présente et de me permettre d'éviter des redites, j'ai l'honneur de joindre un exemplaire imprimé de mon rapport en date du 15 mai 1851, sur les mesures à prendre pour obvier, autant que possible, aux inondations qui affligent la vallée de la Senne.

« L'inspecteur général. »

Voici le rapport du 12 décembre 1850 :

« Bruxelles, la 12 décembre 1850.

« A Monsieur le ministre des travaux publics, à Bruxelles.

« Par dépêche du 11 juillet dernier, 2ème direction, n°679l, vous m'avez fait l'honneur de me demander :

« 1° Des renseignements relatifs aux ouvrages que le conseil des ponts (page 1235) et chaussées, dans son rapport en date du 1 octobre 1839, a signalés à votre département comme étant ceux que, dans l'intérêt de l'amélioration du régime de la Senne, il était le plus urgent d'exécuter ;

« 2° Quels sont, indépendamment des travaux prémentionnés, ceux que, dans mon opinion, il conviendrait d'exécuter prochainement

« Déjà au mois d'août dernier, j'avais rédigé à ce sujet un rapport destiné à vous être transmis, lorsque l’inondation des 16 et 17 du même mois est venue modifier ma manière de voir à l'égard des mesures à prendre pour atténuer les effets des crues extraordinaires et m'a mis dans la nécessité, de me livrer à de nouvelles opérations qui se poursuivent encore dans ce moment.

« Toutefois, comme les matériaux quo j'ai recueillis pour répondre à la première partie de votre demande peuvent vous être utiles pendant la discussion de votre budget, puisqu'ils démontrent que, sauf un seul ouvrage, le gouvernement a exécuté tous les travaux que l'enquête ouverte en 1839 a eu pour résultat de mettre à la charge de votre département, je crois devoir vous transmettre les renseignements relatifs à cette partie de votre demande, me réservant d'indiquer plus tard quelles sont, dans mon opinion, les nouvelles mesures qu'il conviendrait de prendre, eu égard aux faits qui se sont produits, au mois d'août dernier.

« J'aurai d'abord l'honneur de mettre sous vos yeux la récapitulation suivante de tous les travaux entrepris jusqu'à ce jour par le gouvernement et à ses frais à la rivière la Senne.

« Voici le tableau indicatif des travaux exécutés à la Senne, aux frais de l'Etat, depuis l'année 1840 :

« 1. Hombeek. - Elargissement du pont et substitution d'une palée à la pile de 2 mètres 15 centimètres d'épaisseur (soumission du 5 octobre 1840) : fr. 3,378 78

« 2. Sempst. - Construction d'un pont de 5 mètres d'ouverture sous la chaussée (adjudication du 19 mai 1841) : fr. 3,150.

« 3. Weerde. - Construction d'un déversoir supplémentaire (adjudication du 21 décembre 1858), : fr. 17,000.

« 4. Eppeghem. -- Déversoir sous le chemin de fer : fr. 43,500.

« Indépendamment du déversoir, 6 aqueducs ont été construits sous le chemin de fer et à ses abords pour favoriser l'écoulement des eaux.

« 5. Vilvorde. - Ouverture d'une dérivation (adjudication du 19 mai 1841) : fr. 56,700. »

« Construction d'un pont de 10 mètres d'ouverture, à l'entrée de la commune (soumission du 30 septembre 1841) : fr. 18,700. »

« Etablissement d'un pont de service en charpente (soumission du 30 septembre 1841) : fr. 900.

« Travaux en charpente pour fonder les piles et culées de la ventillerie du rempart (soumission du 30 septembre 1841) : fr. 3,595.

« Travaux en charpente et maçonnerie pour soutenir les bâtiments situés le long de la dérivation (soumission du 16 décembre 1841) : fr. 6,488.

« Travaux exécutés pour la construction d'une ventillerie de 10 m 50 d'ouverture en remplacement de l'écluse du rempart à Vilvorde (soumission du 5 juin 1842) : fr. 9,967 40.

« Travaux en charpente et maçonnerie exécutés à la ventillerie n°1 près de la maison de réclusion à Vilvorde (soumission du 5 juin 1842) : fr. 4,567 09.

« Etablissement de fascinages destinés à soutenir les talus de la dérivation (soumission du 8 septembre 1842), : fr. 1,751 10.

« Plantation établie le long de la dérivation (soumission du 24 novembre 1842) : fr. 148.

« Construction d'une risberme le long de la dérivation (soumission du 9 juin 1843) : fr. 26,810.

« Construction d'une risberme (soumission du 14 mars 1844) : fr. 27,603 34.

« Travaux exécutés aux vannes du déversoir et à l’écluse dudit rempart (soumission du 26 novembre 1844) : fr. 690.

« Perrés près de la maison de réclusion de Vilvorde (soumission du 19 février 1847) : fr. 1,199 16

« Neder-over-Heembeek. - Construction d'un déversoir supplémentaire au moulin de St-Michel (adjudication du 23 décembre 1846) : fr. 38,799 62.

« Molenbeek-St-Jean. - Ventillerie construite dans les niches latérales du pont-canal (soumission du 5 juillet 1841) : fr. 4,253 76.

« Total : fr. 269,181 25.

« Les renseignements qui précèdent suggèrent des réflexions fort pénibles. Il en résulte, en effet, que, sauf le pont sous la chaussée de Flandre, qui se trouve en amont de tous les ouvrages considérés comme urgents, l'Etat a loyalement rempli ses obligations, en exécutant, dans une période de 10 années, tous les travaux qui lui incombaient et dont la dépense totale s'est élevée à la somme de fr. 269,181 25, tandis que les provinces, les communes et les particuliers, demeurant dans l'inaction la plus complète, n'ont exécuté aucun travail. Cependant, d'après le tableau annexé au rapport du conseil des ponts et chaussées, la dépense des travaux à exécuter pour l'amélioration de la Senne devait se répartir approximativement comme suit :

A la charge de l'Etat, fr. 112,000

A la charge des provinces et des communes, fr. 236,000

A la charge de l'administration communale de Bruxelles, fr. 40,000

A la charge des particuliers, fr. 80,000

Total : fr. 468,000.

« L'Etat a donc exécuté des travaux pour une somme double de celle qui lui incombait, alors que, je le répète, les provinces, les communes et les particuliers sont restés dans l'inaction.

« Il est à peine nécessaire que j'explique comment il s'est fait que pendant que l'Etat poursuivait sa tâche avec persévérance, les autres parties intéressées ne faisaient aucun effort ni dépense. Chacun sait, en effet, que lorsque le gouvernement s'occupe d'une question pareille, tout est dit.

« Si une calamité survient, on crie haro sur l'administration ; chacun paraît alors disposé à faire des sacrifices ; puis, lorsque le danger est passé, on retombe dans l'état d'apathie habituelle ; les provinces et les communes font valoir l'insuffisance de leurs ressources ou prétendent que les travaux ne les concernent pas, de telle sorte que l'état de choses dont on se plaint se perpétue indéfiniment.

« Des attaques ayant été dirigées contre l'administration, à l'occasion des inondations survenues au mois d'août dernier à Hal, je crois devoir vous transmettre en copie un rapport, accompagné d'un plan, que j'ai eu occasion d'adresser, à ce sujet, à M. le gouverneur de la province. Ces pièces vous démontreront, M. le ministre, que la calamité qui a affligé ce point de la vallée ne peut être attribuée, ainsi qu'on le prétend, à l'insuffisance du débouché, qu'offre, à la rivière le pont-canal du Canal de de Bruxelles à Charleroi, situé en aval de Hal, mais bien à ce que les deux branches de la rivière sont à peu près complètement obstruées, par des ouvrages particuliers qu'il incombe à l'autorité provinciale et non au gouvernement de faire disparaître.

« L'ingénieur en chef, (Signé) Groetaers. »

Messieurs, le pétitionnaire, dans une première requête, s'était permis des expressions un peu vives et peu convenables ; mais dans une deuxième demande il les a corrigées ; mais comme le gouvernement le fait remarquer, il est tombé dans de graves erreurs en confondant des attributions éminemment distinctes et en appréciant erronément l'origine et les causes des inondations qu'il signale.

Une de ces causes est exactement décrite dans un projet d'amélioration du cours de la Senne par M. l'inspecteur général des ponts et chaussées.

Voici ce passage :

« En résumé, je ne repousse pas d'une manière absolue la rectification des sinuosités les plus brusques de la rivière, mais je pense que la mesure dans laquelle cet expédient pourrait être employé sans sacrifier l'aval, aurait peu d'efficacité pour l'amont. Il faut donc, dans mon ordre d'idées, se livrer à la recherche d'autres remèdes que ceux dont je viens de m'occuper.

« A cet effet, examinons d'abord comment se comportaient les inondations lorsque la vallée était dépourvue des bâtisses et travaux de toute nature qui l'encombrent actuellement. Chacun sait que la Senne, fort peu encaissée, coule dans une vallée dont le plafond, disposé horizontalement, a une largeur moyenne d'un kilomètre environ. On n'ignore pas non plus que la capacité du lit de cette rivière, de même que celle des sections de toutes les rivières serpentant dans des terrains (page 1236) meubles, est le résultat de l'action des eaux moyennes et, par suite, que le lit de la Senne ne peut suffire à l'évacuation des crues extraordinaires produites par la fonte subite des neiges ou par des pluies intenses et soutenues. Il faut donc, de toute nécessité, lors des crues, que la rivière franchisse ses berges et submerge les localités qui la bordent. En un mot le lit de la rivière peut servir d'écoulement aux fortes eaux tandis que les eaux des crues doivent nécessairement s'évacuer par la vallée elle-même qui leur sert de lit. Cette vérité fondamentale se démontrerait à défaut des faits par la constitution du sol de la vallée, dont le plafond horizontal est incontestablement dû aux dépôts, lors des débordements, des matières que l'eau tient en dissolution. Ainsi, avant que la vallée ne fût encombrée d'obstacles de toute nature, les eaux des crues se répandaient librement sur son plafond qu'elles fertilisent. A cette époque les eaux se distribuant sur une grande étendue transversale n'atteignaient qu'une hauteur peu considérable et séjournaient moins longtemps qu'aujourd'hui sur les terres, à cause de ce que leur vitesse duc a la pente générale du terrain n'était entravée nulle part. »

Messieurs, votre commission, après avoir pris connaissance de ces documents, s'est posé cette question-ci : Le meilleur moyen d'éviter les difficultés et les conflits entre les pouvoirs, ne serait-il pas d'établir, sur les rives de la Senne, ce qui, depuis des temps immémoriaux, est établi sur les bords de l'Escaut ? C'est-à-dire, n'y aurait-il pas lieu de constituer les possesseurs des propriétés riveraines de la Senne en associations de wateringues ?

Evidemment l'institution des wateringues est une institution des plus salutaires et que l'honorable ministre de l'intérieur continue à appliquer à différentes localités où elle n'existait pas.

D'après les statuts de ces associations, les propriétaires intéressés sont tenus de faire les dépenses des travaux qui se font à leur profit et qui leur incombent spécialement ; ensuite viennent la province et l'Etat qui exécutent les grands travaux.

Ainsi, d'après ce que vous venez d'entendre, il n'y aurait pas même lieu, pour l'Etat, de contribuer, puisque la Senne est un cours d'eau non navigable ni flottable ; et c'est uniquement à cause des constructions très considérables qui ont été effectuées sur cette petite rivière que le gouvernement y a contribué pour une part, assurément très large, puisqu'elle s'élève à 800,000 francs, tandis que la part de la province n'a été que de 200,000 fr., et celle de la ville de Bruxelles de 110,000 fr.

Votre commission propose donc le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics, en appelant son attention sur la question de savoir s'il n'y a pas lieu de constituer en association de wateringues la propriété dont il s'agit.

M. Van Humbeeck. - Messieurs, en voyant que la commission proposait le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics, je croyais pouvoir me borner à signaler cette pétition à l'attention des ministres auxquels on proposait de la renvoyer.

Elle en est digne, parce qu'il s'agit d'un mal réel dont la ville de Bruxelles et ses environs, se plaignent vivement et à juste titre ; elle en est digne encore, parce qu'il y a chez le pétitionnaire une intention dont il faut lui tenir compte, une intention excellente, l'intention de remédier à un mal incontestable.

Mais je ne m'explique plus, je l'avoue, d'une manière bien nette les conclusions de la commission, en présence des documents dont il vient d'être donné lecture. A une simple audition, il m'a été impossible de saisir toute la portée de ce document fort étendu. Ce document laisse-t-il encore quelque utilité au renvoi de la pétition à M. le ministre dos travaux publics ? C'est une question sur laquelle il me serait impossible de m'exprimer en ce moment, et que la Chambre elle-même, dans l'état actuel de la discussion, aurait quelque peine à trancher.

Je propose donc d'ajourner toute délibération sur les conclusions de la commission jusqu'après l'impression du document que l'honorable rapporteur vient de nous lire.

- Cette proposition a été adoptée.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition sans date, des pilotes de rivière, attachés à la station d'Anvers, demandent que M. le ministre des affaires étrangère revienne sur son arrêté du 16 mars dernier, qui réduit de 30 à 20 p. c. leur part dans les frais de pilotage que les navires payent à l'Etat.

Messieurs, les pétitionnaires font valoir beaucoup de considérations sur la cherté des vivres, etc. ; ils disent que leurs compagnons de Hollande sont payés beaucoup plus largement ; qu'ils touchant 50 p. c. au lieu de 20 p. c ; les pétitionnaires avaient autrefois 30 p. c. et l'arrêté organique de 1845, sous lequel ils ont été engagés, leur allouait jusqu'à 45 p. c.

La commission n'a pas pu se rendre un compte exact de la réclamation des pétitionnaires ; et, sans rien préjuger, elle se borne à vous proposer le renvoi à M. le ministre des affaires étrangères.

- Ces conclusions sont mises aux voix et adoptées.

Projet de loi révisant le code pénale (livre II, titre ???)

Rapport de la commission

M. Carlier. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre le rapport de la commission du Code pénal, sur les articles relatifs aux contraventions, que vous lui avez renvoyés hier.

- Impression, distribution et mise à l'ordre du jour de demain.

Prise en considération de demandes en naturalisation

Demande du sieur Antoine Linden.

Il est procédé au vote par scrutin secret.

Nombre de votants, .61

Boules blanches, 51

Boules noires, 10

En conséquence, la demande du sieur Antoine Linden est prise en considération et sera transmise au Sénat.


Demande du sieur Lambert-Joseph Breukers.

Il est procédé au vote par scrutin secret.

M. le président. - Messieurs, 55 membres seulement ont pris part au vote,,

La Chambre n'étant pas en nombre, le résultat sera, conformément au règlement, constaté aux Annales parlementaires dans l'ordre suivant ;

1° Les présents ;

2° Les absents avec congé ;

3° Les absents sans congé.

Ont répondu à l'appel : MM. Beeckman, David, de Boe, de Breyne, de Bronckart, Dechentinnes, De Fré, de Gottal, de Maere, de Mérode-Westerloo, de Montpellier, de Moor, de Naeyer, de Portemont, de Ridder, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Devaux, H. Dumortier, Frère-Orban, Frison, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Landeloos, J. Lebeau, Loos, Magherman, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Rogier, Saeyman, Savart, Snoy, Tesch, Thienpont, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Dormael, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Overloop, Vervoort, Verwilghen et Wasseige.

Sont absents avec congé : MM. Allard, Coomans, de Bast, de Florisone, de Paul, de Renesse, Neyt, Sabatier, Tack et Vermeire.

Sont absents sans congé : MM. Ansiau, Braconnier, Carlier, Crombez, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Brouckere, Dechamps, de Decker, de Haerne, de Lexhy, de Muelenaere, de Pitteurs-Hiegaerts, de Rongé, Desmaisières, de Smedt, de Vrière, d'Hoffschmidt, Dolez, B. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Goblet, Grandgagnage, Janssens, M. Jouret, Julliot, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, C. Lebeau, Lesoinne, Mercier, Moncheur, Orts, Pierre, Pirmez, A. Pirson, V. Pirson, Prévinaire, Rodenbach, Royer de Behr, Thibaut, Vanderstichelen, Van Leempoel de Nieuwmunster, Van Renynghe, Van Volxem et Vilain XIIII.

- La séance est levée à 4 heures et trois quarts.