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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 18 avril 1860

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1859-1860)

(page ) (Présidence de M. Orts.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Florisone fait l'appel nominal à trois heures et un quart.

M. de Moor, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Florisone, secrétaire, présente l'analyse des pétitions suivantes.

« Des brasseurs à Menin, Wervicq, Gheluwe, Wevelghem et Moorseele, présentent des observations sur le projet de loi qui supprime les octrois et proposent de porter le taux de l'accise sur les bières à 3 fr. par hectolitre de cuve matière. »

- Renvoi à la section cent aie chargée de l'examen du projet de loi.


« Des brasseurs à Lippeloo demandent que le droit d'accise sur les bières soit porté à 4 fr., s'il doit subir une augmentation, par suite de la suppression des octrois. »

« Même demande de brasseurs à Bornhem, St-Amand, Eyckevliet, Hingene, Wintham. »

- Même renvoi.


« Le sieur Cooremans propose de remplacer le revenu des octrois par les assurances contre l'incendie. »

- Même renvoi.

« Les membres du conseil communal de Dison présentent des observations, relativement au projet de loi qui supprime les octrois communaux. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal de Nimy présente des observations sur le projet de loi qui supprime les octrois communaux »

« Mêmes observations des membres des administrations communales de Noirchain, Eugies, Spiennes, Villers-St-Ghislain, St-Symphorien, Harvengt, Nouvelles, Mesvin, Asquillies, Tamines et Willaupuis. »

- Même renvoi.


« Les membres du conseil communal de Habay-la-Vieille demandent que cette commune soit assimilée aux communes à octroi, à titre de l’impôt qu'on y paye sur le bois de chauffage »

- Même renvoi.


« Le conseil communal de Harcourt présente des observations sur le projet de loi relatif aux octrois et demande que cette commune soit comprise dans la catégorie des communes à octroi, à titre de la capitation qu'on y paye. »

- Renvoi à la section centrale du projet de loi.


« Les membres de l'administration communale de Nimy soumettent à la Chambre des considérations sur l'utilité de maintenir l'industrie du sucre de betteraves. »

« Les administrations communales de St-Symphorien, Villers-Saint-Ghislain, Asquillies, Nouvelles, Mesvin, Harvengt, Spiennes, Eugies et Noirchain déclarent adhérer à ces considérations. »

- Même renvoi.


« Des médecins à Zele demandent que le projet de loi sur la police et la discipline médicales ne leur enlève pas le droit de cumuler la pharmacie et la médecine. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


« Des médecins dans le canton de St-Gilles (Waes) demandent que le projet de loi relatif à la police et à la discipline médicales consacre le principe électif dans la nomination des conseils médicaux. »

« Même demande de médecins à Aeltre et à Gand. »

- Même renvoi.


« Des industriels et négociants à Marchienne-au-Pont demandent qu'il soit donné cours légal en Belgique à la monnaie d'or de France. »

« Même demande d'habitants de Lessines et Vivy. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur de Stoop, meunier à Zulte, demande la réduction du droit de patente sur les moulins à vent. »

- Même renvoi.


« Le sieur Goossens réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une indemnité du chef de pertes essuyees par suite des événements de 1830. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les membres de conseil communal de Rosmeer demandent la construction d’un chemin de fer de Tongres à Bilsen. »

« Même demande des membres du conseil communal de Widoye. »

- Même renvoi.


« Les conseils communaux de Berlingen, Cuttecoven, Gothem. Woordt, et Hendrieken demandent la construction d'un chemin de fer de Liège à Hasselt, par Ans, Tongres et Cortessem. »

- Même renvoi.


« Des habitants d'Oostvleteren demandent qu'il soit donné cours légal aux pièces décimales françaises en or ou tout au moins que ces monnaies soient reçues pour leur valeur nominale dans les caisses de l'Etat et proposent subsidiairement que le gouvernement soit autorisé à battre pour son compte et pour compte des particuliers, des monnaies d'or belges de même valeur, titre et module que l'or français. »

« Même demande d'habitants de Wulveringhem. »

- Même renvoi.

« Il est fait hommage à la Chambre, par M. Gauthy, professeur de chimie industrielle à l'athénée de Bruxelles, de 118 exemplaires d'une brochure qu'il vient de publier et qui est intitulée : Influence de l’enseignement sur la prospérité commerciale et industrielle. »

- Distribution aux membres et dépôt à la bibliothèque.


« M. d'Hoffschmidt, forcé de s'absenter et M. Crombez, retenu par une indisposition, demandent un congé de quelques jours. »

- Ces congés sont accordés.

Composition des bureaux de section

Les bureaux des sections pour le mois d'avril 1860 ont été constitués ainsi qu'il suit.

Première section

Président : M. de Moor

Vice-président : M. Van Volxem

Secrétaire : M. de Boe

Rapporteur de pétitions : M. Julliot


Deuxième section

Président : M. Muller

Vice-président : M. Grandgagnage

Secrétaire : M. Sabatier

Rapporteur de pétitions : M. Jamar


Troisième section

Président : M. Faignart

Vice-président : M. de Breyne

Secrétaire : M. Van Renynghe

Rapporteur de pétitions : M. Vander Donckt


Quatrième section

Président : M. Ch. Lebeau

Vice-président : M. Dautrebande

Secrétaire : M. de Florisone

Rapporteur de pétitions : M. de Lexhy


Cinquième section

Président : M. Deliége

Vice-président : M. Laubry

Secrétaire : M. David

Rapporteur de pétitions : M. Van Iseghem


Sixième section

Président : M. Koeler

Vice-président : M. de Ridder

Secrétaire : M. Orban

Rapporteur de pétitions : M. Hymans

Projet de loi révisant le code pénal (livre II, titre V)

Discussion des articles

Titre V. Des crimes et des délits contre l’ordre public, commis par des particuliers

Chapitre IX. De quelques autres infractions à l'ordre public
Section V. De l’usure
Article 367

« Art. 367. Quiconque aura habituellement fourni des valeurs de quelque manière que ce soit à un taux excédant l'intérêt légal et en abusant de l'ignorance, des faiblesses ou des passions de l'emprunteur, sera condamné à un emprisonnement d'un mois à un an, et à une amende de mille francs à dix mille francs, ou à l'une de ces peines seulement. »

M. de Haerne. - Messieurs, en demandant hier la remise à ce jour de la discussion de l'article dont il s'agit, j'avais pour but d'appeler votre attention sur l'importance de la question, qui a tenu en suspens pendant des mois l'assemblée législative de France en 1850, et qui a fait naître en Angleterre des débats qui ont duré, par intervalles, plus de quarante ans et qui ne sont pas encore terminés.

La question a une haute importance à plus d'un point de vue.

Je me hâte de dire que s'il fallait opter entre le projet du gouvernement tel qu'il a été formulé d'abord et le projet de la commission qui nous est présenté, je donnerais la préférence au premier de ces projets. Je penche pour le système établi par la loi de 1807. Dans tous les cas, il faudrait, selon moi, modifier le projet de la commission dans ce sens qu'au lieu de venir au secours seulement de la faiblesse, de l'ignorance et des passions, il faudrait encore appuyer la détresse et la misère ; il faudrait empêcher qu'on ne pût créer des positions à exploiter par les usuriers. Sous ce rapport, je trouve une lacune et un danger dans l’innovation qui nous est proposée par la commission de révision du Code pénal.

Cette matière est des plus délicates et l'on peut s'en rendre compte par les longues discussions qu'elle a fait naître dans d'autres pays.

J'écarte d'abord, je m’empresse de le dire, la question théologique qui, dans une discussion précédente, a occupé la Chambre, selon moi, un peu (page 1147) hors de saison. Je dirai franchement que ce n'est pas la question qu'on doit traiter, parce qu'il est reconnu par tous les théologiens que l'on ne doit pas inquiéter ceux qui perçoivent l’intérêt légat de 5 à 6 pour cent sans avoir aucun autre titre extrinsèque. Mais lorsqu'on envisage la question de l'intérêt légal à un point de vue général, au point de vue social universel, où se place l’Eglise, on conçoit les difficultés que la question fait naître. Car l'intérêt légal n'est pas partout le même, et comme l'usure est un vice qui résulte du système de l'esclavage, de l'exploitation de l'homme par l'homme, exploitation d'autant plus dangereuse qu'elle est subreptice, on trouve l'intérêt légal échelonné, dans une proportion croissante à mesure que le régime de l'esclavage se rencontre à différents degrés dans divers pays.

Ainsi l'intérêt légal, dans les pays civilisés et chrétiens, est généralement de 5, 6 ou 7 p. c, En Turquie, il est de 12 p. c. et même les institutions de bienfaisance peuvent prêter à 15 p. c.

M. Rodenbach. - Les monts-de-piété perçoivent ici de gros intérêts.

M. de Haerne. - C'est une toute autre question. Nous n'avons pas ici à nous occuper des monts-de-piété.

Dans les Indes, l'intérêt légal est de 12 à 20 p. c. ; en Chine, il s'élève jusqu'à 30 p. c.

Vous voyez donc que la question s'élargit, et je fais ces observations non pas précisément pour émettre sous ce rapport une opinion sur ce qu'il y a à faire dans ces divers pays ; mais pour en tirer une conséquence, à savoir qu'en se plaçait à un point de vue général, on ne peut pas toujours dire qu'il n'y a pas d'usure, lorsqu'on s'en tient à l'intérêt légal. Car il est évident qu'il peut y avoir usure, lorsqu'on perçoit 30 p. c.

Cependant, l'usure n'est pas une conséquence nécessaire de cet intérêt élevé, même au point de vue théologique, et pour vous convaincre, messieurs, que je n'ai pas à invoquer la théologie dans cette discussion, j'ai besoin de vous dire, pour dissiper les préventions qui pourraient surgir sous ce rapport, qu'en 1645, des missionnaires de la Chine ont soumis au saint-siège la question de savoir si l'on pouvait percevoir l'intérêt de 30 p. c. établi par les lois de l'Empire, en présence du danger extraordinaire auquel l'on est exposé dans ce pays, de perdre le capital par suite des mœurs et des usages, et aussi à cause des frais élevés de procédure que l'on doit faire souvent pour rentrer dans ses fonds. Il a été décidé que l'on ne devait pas inquiéter ceux qui, dans ces circonstances, exigeaient les 30 p. c. et même Innocent X a confirmé cette décision prise par la congrégation de la propagation de la foi. Il l'a fait admettre sous peine d'excommunication sententiae latae.

Messieurs, je rends hommage aux connaissances et au talent de notre habile rapporteur. Le long travail qu'il a présenté à la Chambre est sans doute digne de toute notre attention et d’un examen approfondi. Mais, malgré l’hommage que je lui rends, je suis assez franc pour dire que je ne partage pas toutes les idées qu’il a émises dans son savant travail.

On peut avoir de bonnes intentions de part et d'autre sans être d’accord sur tous les points, et j'espère que l'honorable M. Pirmez voudra bien agréer la franchise que je mets dans l'expression de mon opinion.

Ainsi, je crois qu'en parlant des théologiens, l'honorable rapporteur aurait dû s'exprimer d'une manière plus générale en comprenant parmi les théologiens qu'il cite la plupart des chefs du protestantisme.

Parmi les protestants, Luther, Bucer, Brentius, Mélanchton et bien d'autres ont professé sur ce point de doctrine une opinion tout à fait conforme à celle des théologiens catholiques.

Calvin s'en est écarté, mais dans quelle proportion ? Calvin a condamné l'usure à l'égard des pauvres ; il l'admettait, il est vrai, pour les riches, pourvu qu'elle ne fût pas trop élevée, qu'elle fût modérée. Il ne s'agit donc pas du prix de l'argent, aux yeux de Calvin. La théorie qu'on invoque aujourd'hui n'était pas connue des chefs du protestantisme.

Messieurs, telle est aussi l'opinion qui a été professée aux états généraux de Hollande. Je sais bien qu'en France, dans les discussions qui ont eu lieu en 1830 et 1850, des idées contraires ont été soutenues : on a fait entendre que les pays protestants prospéraient plus en industrie que les pays catholiques, parce que dans les premiers, a-t-on dit, on avait vogué à pleines voiles dans les eaux de l'usure, ou de la liberté en matière de prêt, tandis qu'il y avait des restrictions dans les pays catholiques. C'est là, messieurs, une erreur de fait ; cette opinion est démentie complètement par l'histoire, outre qu'elle n'est pas fondée en principe, comme je viens de le faire voir. Et, messieurs, permettez-moi de vous citer, à cet égard, un passage d'une pièce que j'ai reçue de la part d'un des membres les plus éminents des états généraux de Hollande, pays où l'on est beaucoup plus compétent en pareille matière qu'on ne l'est en France. Il y est fait allusion à la discussion qui a eu lieu en 1857, au mois de décembre, et par suite de laquelle la loi de l’an VII a été abrogée en Hollande. Voici ce passage :

« J'ai combattu la loi par principe religieux, parce que toute religion révélée condamne l'usure. Aussi, les protestants dans leurs réformes, n’ont-ils pas cru pouvoir abandonner ce principe. Leurs ouvrages, qui en font foi, sont fort nombreux. Les décrets et arrêtés ou résolutions portés, dans cette matière, par les gouvernements protestants, surtout sous notre république, l'attestent également. »

J'aurais voulu, messieurs, que l’on se rendît un peu mieux compte aussi des difficultés dans lesquelles on s'est trouvé précédemment pour résoudre ces questions, car enfin les circonstances sont considérablement changées ; depuis que le travail a été affranchi, il est évident que la liberté a dû régir et dominer toutes les questions qui se rapportent aux échanges et par conséquent au prêt à intérêt. De là les facilités des placements lucratifs de fonds, qui ont mis fin à l'habitude de thésauriser, si générale autrefois. Il en résulte que le titre de la destination lucrative se présente presque toujours aujourd'hui.

Or, depuis quand le travail est-il entièrement affranchi en Europe ? Depuis l'abolition des jurandes et des maîtrises. Vous comprenez, messieurs, qu'avant cette époque, puisque enfin aucun métier n'était libre, il était très difficile d'établir, même dans des conditions légitimes, la liberté du prêt à intérêt. Toutes ces questions, messieurs, sont corrélatives, et lorsqu'on veut juger les auteurs anciens qui ont traité de l'usure, il faut nécessairement se placer à ce point de vue pour être impartial.

Ainsi, par exemple, certains théologiens qui ont écrit il y a 40 ou 50 ans, ont traité la question au point de vue d'autrefois. Même en France, on a longtemps continué à écrire dans ce sens. Tout le monde ne s'est pas suffisamment rendu compte des nouvelles conditions faites à la société par l'affranchissement définitif du travail, d'autant plus qu'on a douté longtemps de la stabilité du régime nouveau.

Messieurs, dans les discussions qui ont eu lieu en France, en 1850, M. Aubry, qui s'y est particulièrement distingué, a parlé en termes très honorables d'un des premiers théologiens de France, le cardinal Gousset ; il a reconnu que cet éminent écrivain a traité toutes ces questions d'une manière très convenable ; qu'il les a, toutes, sagement discutées et qu'il les a résolues presque toutes d'après les lois de l'économie politique.

Eh bien, messieurs, j'ai lu les ouvrages de S. Em. le cardinal-archevêque de Reims, et, je dois le dire, je n'y ai rien trouvé qui diffère, sur cette question, de ce qu'a écrit l'immense majorité des théologiens catholiques.

Tout en respectant le talent et les excellentes intentions de l'honorable rapporteur, je me permettrai de lui faire observer encore que je n'admets pas d'une façon aussi absolue que lui les théories économiques, généralement à la mode aujourd'hui sur la question dont il s'agit.

Messieurs, l'économie politique et sociale est une admirable conquête de l'esprit moderne ; elle est le résultat du développement des faits, et surtout de ce grand fait que je signalais tout à l'heure, à savoir l'affranchissement du travail par la suppression des corporations privilégiées du moyen âge.

Mais est-ce à dire que cette science doive primer toutes les autres et qu'il faille résoudre les questions économiques, sans avoir égard, pour ainsi dire, aux principes qui dominent la science sociale en général ? C'est là un danger qui se présente aujourd'hui et dont on subit souvent l’influence sans s'en douter.

Je dis que l'économie politique et sociale, d'après la définition même, est une science qui doit être subordonnée à la science politique et sociale prise en général, et dès lors aux lois morales et religieuses qui régissent la société.

Je fais cette observation générale pour éviter certains détails, dans lesquels je devrais entrer si je voulais discuter point par point les considérations très nombreuses et savantes qu'a présentées l'honorable rapporteur.

A l'appui de mon opinion, j'ai besoin de faire quelques citations, d'entrer dans quelques détails, surtout afin de justifier l'idée par laquelle j'ai commencé ce discours, et qui tend surtout à protéger l'emprunteur contre le prêteur avide dans les besoins pressants qu'il éprouve.

Afin de faire voir que je ne puis pas admettre la proposition faite par la commission telle qu'elle est énoncée, je crois devoir m'étendre un peu sur ce point ; le rapport, du reste nous y convie, et cette question a donné lieu, je le répète, à de longues discussions dans d'autres pays.

Pour en revenir à cette opinion économique dont je parlais tout à l’heure, je dirai que de grands économistes qui ont traité la question, tout en admettant que les progrès réalisés par la science tendent à ouvrir une voie nouvelle dans cette matière, ont reconnu qu'il fallait faire certaines exceptions réclamées par les faits mêmes, par les faits sociaux pris en général.

Voici comment s'exprime M. Ganith. Après avoir établi ses principes en cette matière, il ajoute :

« Cependant il faut avouer que, si les réflexions que suggère la théorie du prêt sont d'une évidence irrésistible, l'expérience ne les a point confirmées. Il est certain que partout où le prêt à intérêt a été abandonné an libre arbitre du préteur et de l'emprunteur, il n’a servi qu'à la cupidité des uns et à la ruine des autres. Il n'y a pas dans ce contrat l’équilibre des facultés, qui existe dans tous les autres contrats. Le besoin ou la misère de l'emprunteur donne de si grands avantages au prêteur qu'il lui faudrait une grande vertu pour y résister. Mais il est bien rare que les pénalités de la loi lui inspirent cette vertu, quand il ne l’a pas. »

M. Léon Faucher, dont l'autorité en cette matière est très grande, faisait partie de l'assemblée législative de France en 1850 ; il y a pris (page 1148) une très grande part à la discussion de la proposition de M. de Saint-Priest, tendante à renforcer les lois répressives de l'usure.

Il s'est rangé en principe du côté de ceux qui demandaient la liberté. Cependant, ajoutait-il, convaincu des abus qui peuvent se produire, je m'abrite sous la loi de 1807.

Cela revient à ce que je disais tout à l’heure, que les idées économiques doivent se modifier dans l'application, d'après les principes généraux qui gouvernent et dominent la société.

Dans la discussion qui a eu lieu en Hollande en 1857, un des membres les plus distingués des états généraux, M. Meijlink, s'est énoncé dans le même sens. Permettez-moi de citer ses paroles en les traduisant :

« L'argent, dit-il, est de la marchandise lorsqu'il sert à faire un échange proprement dit, actuel, de fait, ce qui constitue le criterium du commerce. Lorsque j'achète de la marchandise avec de la monnaie, lorsque j'achète des lettres de change ou que je les escompte, on peut trouver l'achat et la vente dans ces opérations. Mais prêter de l'argent sur gage ou prêter simplement à des tiers, je ne puis appeler cela ni vente ni achat. Dans le prêt je ne trouve pas le principe essentiel, la condition caractéristique de l'achat et de la vente. C'est toujours et cela s'appelle toujours prêter. C'est un service rendu, et la loi doit maintenir et protéger cette obligation morale et religieuse, et prendre le malheureux sous sa tutelle. De Staat moet den nooddruftigen onder zijne bescherming blijven houden. »

L'usure, messieurs, vous le savez, a été réprouvée par toutes les législations et par toutes les philosophies.

D'après les Romains, le besoin exclut la volonté ; celui qui est dans le besoin d'argent ne dispose pas librement de sa volonté, « Debitor servus est fœneratori. »

On demandait un jour à Caton ce que c'était que l'usure : « Quid est fœnerari ? » Il répondit par une autre question : « Quid est hominem occidere. » Faire l'usure, c'est égorger l'emprunteur, (Interruption.)

Un honorable membre me dit que Caton lui-même était un usurier.

C'est vrai, et j'ajouterai qu'il a prêté à 40 p. c. Cela prouve qu'il arrivait alors ce qui arrive aujourd'hui. C'est qu'on critiquait chez les autres ce qu'on se permettait de faire soi-même. L'histoire du cœur humain explique cela très bien.

Cette question, comme je vous l'ai dit, a été longuement débattue en divers pays, notamment en France.

Elle a d'abord été discutée dans ce dernier pays en 1836. Une proposition fut faite par M. Lherbette. M. Lherbette proposait l'abolition pleine et entière de la loi de 1807. Permettez-moi d'entrer dans quelques détails sur cette discussion et de rappeler les faits qui ont été cités à l'appui de la thèse que je soutiens.

D'abord M. Lherbette, tout partisan qu'il était de l'abolition de la loi, reconnaissait franchement que les faits étaient complètement changés depuis quelque temps. Voici ses paroles : « On a dit : Nummus non parit nummum. Cette question devait nécessairement se présenter dans des temps où l'absence d'industrie et de commerce n'offrait pas de placements utiles, et où le défaut de formes protectrices de la part des gouvernements et des troubles continuels faisaient thésauriser et non employer la monnaie. Ici l'erreur contenait un peu de vérité. »

Il fait une distinction essentielle entre ces temps auxquels je faisais allusion tout à l'heure et les temps actuels.

M. Hennequin prit la parole en sens contraire. Il cita des faits extrêmement frappants et entre autres il dit : t Il y a des lois pour veiller sur ces positions sociales, que l’usure sait créer, pour en abuser ensuite. »

C'est le point de vue auquel je me suis placé tout à l'heure. Le projet de loi ne prémunit pas assez la société contre ce danger.

Dans la discussion de 1850 qui dura pendant plusieurs mois, on cita dans le même sens des autorités très imposantes. On invoqua surtout l'autorité des tribunaux de commerce, pour faire voir que pendant les douze années de liberté sous lesquelles on avait vécu en France à partir de 1792, les plus graves abus étaient résultés de cet état de choses. Vous me permettrez, messieurs, de vous citer quelques paroles qui ont été prononcées dans cette mémorable discussion de l'assemblée législative de France.

On fit connaître l'opinion du tribunal de commerce de Paris. Voici dans quel sens ce tribunal se prononça :

« II fit observer que l'usure qui se produisait avait pour résultat de multiplier les faillites. Il ajoutait que les créances les plus usuraires venaient en concurrence avec les créances les plus honnêtes, les plus légitimes, et que le tribunal était forcé de les admettre. »

Le tribunal du Mans s'exprime dans le sens suivant :

« Le commerce et l'industrie, dit-il, ont toujours été en déclinant, depuis que la loi nouvelle sur l'intérêt les a mis à la discrétion de la classe des agioteurs, si funeste à leur prospérité. C'est à cette époque qu'on a vu se multiplier dans une proportion effrayante les prêteurs sur gages ; cette profession, si flétrissante autrefois dans l'opinion publique, cessant d'être regardée comme déshonorante, a été préférée à celles qui, en propageant des travaux utiles, sont les véritables sources de la richesse nationale. Le produit du prêt est clair, net, prompt et facile à réaliser. S'il est en outre plus considérable que celui des entreprises essentielles, on ne cessera de lui donner la préférence. Les capitaux détournés de leur véritable emploi, ont cessé de féconder l'agriculture et l'industrie ; ils ne semblent plus destinés qu'à alimenter l'agiotage et les maisons de prêt et de commission. »

Telles sont les paroles du tribunal du Mans citées dans la séance, dont je viens de parler, par M. de St-Priest. Le tribunal de Châlons s'énonce dans le même sens. Voici l'opinion émise à la même occasion par la chambre de commerce de Reims, bien compétente en matière d'industrie et de commerce :

« Que l'on consulte donc l'expérience, qui, en fait d'administration, est un guide dont les leçons sont préférables aux théories les plus brillantes, et l'on verra que, sous le régime prohibitif de l'usure, le commerce s’est régénéré, s'est élevé au point de devenir l'objet de l'émulation et peut-être même de la jalousie des nations voisines. On verra que les arts, les manufactures aidés des ressources bienfaisantes d'un prêt modéré, ont prospéré dans tous les genres d'industrie, ont encouragé l'agriculture, ont multiplié les productions du sol, étendu les relations commerciales et attiré l'or des étrangers, rendus par ce moyen tributaires de notre industrie. »

Telles sont, messieurs, les principales autorités qui ont été citées à l'appui de l'opinion que je défends, dans les longues et importantes discussions qui se sont élevées sur l'usure dans les assemblées de France, à la chambre des députés de 1856 et à l'assemblée législative de 1850.

Des discussions non moins importantes, mais plus souvent répétées, ont eu lieu sur la même question en Angleterre. Je dois entrer dans quelques développements sur ce qui s'est passé à ce sujet dans ce grand pays qui, sous tant de rapports, peut et doit nous servir de modèle.

L'Angleterre qui brille dans le monde entier par ses idées libérales, s'est avancée dans cette voie avec une prudence et une circonspection dont on ne se rend pas compte, lorsqu'on considère le grand mouvement d'affaires, d'industrie et de commerce dans lequel s'est lancé ce pays.

Les discussions sur cette grave question ont commencé en Angleterre dès 1818. C'est à cette époque seulement que l'on a fait la première proposition tendante à déroger à la loi qui établissait le taux de l'intérêt à 5 p. c. depuis la reine Anne. On proposait d'établir une commission d'enquête pour examiner l'état des choses et voir quelles étaient les modifications que pouvaient être introduites dans le régime légal. Après des débats assez vifs, la commission fut nommée et ce ne fut que bien longtemps après qu'un bill fut proposé et sanctionné par le parlement. Le premier bill, si je ne me trompe, date de 1835.

Déjà en 1818, il y eut des objections contre la proposition d'établir une commission d'enquête. Voici comment les choses se passèrent et comment ces discussions se renouvelèrent de cinq ans en cinq ans à peu près pour arriver à une loi qui n'est qu'exceptionnelle et temporaire ; car tel est le système établi en Angleterre, et je dois faire cette observation parce que l'honorable rapporteur donne à la loi actuellement en vigueur dans la Grande-Bretagne, une portée plus grande que celle que je lui donne, en ce sens qu'il fait l'exception de ce que je crois être la règle et la règle de ce que je crois être l'exception.

Voyons, messieurs, les discussions qui ont amené cette loi et qui se sont renouvelées de cinq ans en cinq ans jusqu'à l'époque actuelle. Elles sont extrêmement intéressantes et font voir avec quelle circonspection on doit procéder en cette matière.

Ce fut donc en 1818 que s'ouvrirent les débats sur cette question. On nomma des commissaires pour procéder à une enquête sur l'usure. A cette époque un orateur s'éleva contre la proposition qui était faite. C'était M. Mittchell. Il allégua pour motif qu'il craignait que la liberté que l'on voulait introduire en cette matière ne donnât lieu à un système inquisitorial de la part des détenteurs de fonds à l'égard de ceux qui ont besoin d'emprunter. Tel était le point de vue où se plaçait cet orateur, d'accord avec les banquiers de Belfast.

Dans les discussions qui eurent lieu postérieurement, sur ce sujet, plusieurs orateurs s'énoncèrent à peu près dans le même sens. Ainsi, le chancelier de l'échiquier expliqua d'une manière extrêmement lumineuse la raison pour laquelle l'Angleterre devait entrer prudemment et lentement dans la voie de la liberté. Pour ce qui regarde les billets de change, on avait proposé d'abord d'admettre un intérêt supérieur à 5 p. c. pour les billets de change n'ayant que 3 mois de date.

Comme la grande masse des affaires de l'Angleterre, disait le chancelier de l'échiquier, se fait avec les pays lointains et qu'on ne peut dès lors rentrer dans ses fonds qu'au bout d’un an, des billets à trois mois pour l'intérieur du pays devaient être renouvelés 4 fois avant qu'on pût obtenir le payement de créances de l'extérieur, ce qui était excessivement onéreux. On proposa donc d'étendre la mesure aux billets à un an de date et cette proposition fut admise. C'est en 1837 que le chancelier de l'échiquier fit cette proposition.

M. Wakely, qui parla dans la même circonstance, s'énonça d'une manière assez vive ; il fit comprendre que la liberté qu'on sollicitait n'était pas demandée par le commerce.

On avait déjà cité les banquiers de Belfast qui s'y opposaient et M. Wakely émit l'opinion que c'étaient quelques richards qui demandaient à entrer dans cette voie ; il fit même quelques allusions personnelles à certains membres qui siégeaient dans l'assemblée. Il ajouta qu'on ne pouvait pas, en cette matière, procéder par théorie, puisque (page 1149) tout le système monétaire de la Grande-Bretagne est artificiel et qu'il y aurait danger à donner une liberté entière, pour le prêt, dans un pays où il circule tant de papier-monnaie.

Lord Wellington se prononça dans le même sens à la chambre des Lords, et demanda que la loi ne fût encore que temporaire. Elle fut ainsi prorogée de 5 en 5 ans, et la dernière motion de prorogation ou de consolidation, comme disent les Anglais, fui faite l'année dernière au mois de juillet à la chambre des lords.

La loi est donc temporaire, et je citerai tout à l'heure un texte qui trouvera qu'elle est exceptionnelle. Du reste elle est restreinte, en ce sens qu'elle ne comprend pas les prêts hypothécaires dont l'intérêt ne peut excéder 5 p. c ; elle ne s'applique réellement qu'aux billets de change à un an de date et aux promesses écrites sans gage, promissory notes et de 10 livres au-dessus ; car au-dessous de 10 livras l'intérêt ne peut pas excéder 5 p. c.

Plusieurs orateurs ont clairement expliqué la nécessité de donner à la loi un caractère temporaire ; d'autres ont fait comprendre que l'expérience qui a déjà une durée de 40 ans, n'est pas encore complète parce qu'elle n'a pas été faite en temps de guerre ; ce n'est que quand ta loi aura fonctionné pendant une guerre que l'on pourra juger s'il convient de la rendre définitive.

Telle fut l'opinion énoncée par lord Ellenborough en 1845.

On dira peut-être que, si la loi ne s'applique qu'aux affaires commerciales, ces affaires sont tellement importantes en Angleterre que la loi ne doit pas être considérée comme exceptionnelle ; mais, messieurs, il est dit en marge du texte même de la loi que c'est par exception qu'elle est établie, c'est-à-dire que c'est par exception qu'on accorde ta faculté d'excéder le taux de 5 p. c. dans les cas déterminés.

Et, lorsque le prêt a été fait sans convention, le taux de 5 p. c. ne peut jamais être dépassé. La loi est donc bien exceptionnelle. Dans aucun cas, en l'absence d'une stipulation, elle ne permet d'exiger le prix de l'argent, lorsqu'il serait supérieur à 5 p. c. On écarte la théorie de l'argent marchandise.

Vous voyez donc bien, messieurs, qu'en Angleterre la question n'a pas été tranchée au point de vue des principes que l'on invoque souvent aujourd'hui.

En pareille matière comme en toute autre, du reste, l'Angleterre procède toujours avec une grande prudence. L'Angleterre en une nation éminemment conservatrice lorsqu'il s'agit de ses affaires intérieures.

Ainsi, messieurs, quant à la France on doit reconnaître que les autorités que j'ai citées me paraissent très fortes en faveur de mon système.

Je vous ai dit qu'à la suite des discussions qui ont eu lieu en 1850, que loin d'adoucir le régime qui existait précédemment, on l'a rendu plus rigoureux.

On a invoqué l'expérience faite par la France, pendant les douze ans de liberté. Je sais qu'on a contesté tout cela. On a dit que ces faits s'étaient présentés, à cause du désordre qui régnait dans ce pays. Plus tard, sous l’empire de la loi de 1807, alors que cette loi avait restreint la liberté, on a remarqué que l'intérêt de l'argent avait baissé ; encore une fois, on a voulu expliquer cette nouvelle situation par les faits qui se présentaient alors. On a dit que la France, à cette époque, était, à l'intérieur du moins, dans un état prospère, et que cela expliquait le taux peu élevé de l'intérêt.

Je conclus de tout cela qu'il y a des circonstances où la liberté est dangereuse en cette matière et que, par conséquent, on ne peut pas être absolu dans cette question. Or, c'est précisément à ce point de vue que s'est placée la législation anglaise, doit j'ai fait connaître également l'esprit, en signalant la prudence qui l'a dictée, et la sagesse avec laquelle on l'a mise en pratique.

Messieurs, il me reste à ajouter quelques observations sur un fait important qui s'est présenté dans un pays, où depuis longtemps on a proclamé la liberté en matière de prêts d argent.

Je tiens en mains un journal de Philadelphie, qui est intitulé : « North american and United States Gazette. »

Ce journal a publié une série de lettres qui lui ont été adressées par uu économiste, connu non seulement en Amérique, mais dans l'univers entier, et dont plusieurs revues et journaux de France, d'Allemagne et de Belgique se sont souvent occupées, je veux parler de M. H. Carey.

Daun une de ses lettres, qui porte la date du 6 janvier dernier, il signale les effets produits en Amérique par la liberté en matière de prêts à intérêt ; il dit que les ouvriers, les mineurs et les cultivateurs de certaines parties d'Amérique, payent en général autant pour cent par mois qu'on paye par année dans les pays civilisés de l'Europe.

J'ai encore ici d'autres lettres du même auteur, que le même journal et d'autres journaux américains ont publiées.

Mais comme c'est presque toujours la même pensée qui est exposée sous des formes un peu différentes, je n'entrerai pas dans de nouveaux détails qui n'ajouteraient rien à la démonstration que j'ai eu l'honneur de vous présenter. Mais puisque l'auteur revient si souvent sur la même idée, il faut que les faits qu'il allègue soient bien établis et reconnus comme tels en Amérique.

Messieurs, le régime en vigueur chez nous est une loi d'intimidation ; je l'avoue, elle est assez souvent violée dans la pratique. Mais comme on l'a très bien démontré dans les discussions qui ont eu lieu en France, en Angleterre et, dans l'année 1857, en Hollande, ce caractère d'intimidation est une grande ressource, et amène souvent des compositions ; ainsi qu'on l'a dit en Hollande, il permet souvent aux avocats et aux agents d'affaires de s’interposer pour empêcher l’usure. C'est là un des bons effets de la loi, et c'est pour cela qu'il ne faut pas y toucher à la légère. D'ailleurs, beaucoup d'autres lois sont fréquemment violées ; il ne s'ensuit pas qu'elles soient inutiles.

Je répète que je ne puis admettre le projet de la commission, tel qu'il est, je voudrais qu'il fût modifié, dans le temps que j'ai eu l'honneur d'indiquer. Je voudrais qu'on armât la justice contre tms prêteurs qui abusent des besoins momentanés, de la détresse de l'emprunteur.

J'ajouterai que si la mesure proposée était temporaire comme la loi anglaise, je pourrais la voter, moyennant quelques changements ; mais en aucun cas, je ne pourrais l'admettre comme définitive.

J'ai dit.

M. le président. - M. Guillery a fait parvenir au bureau un amendement à l'article 367, amendement qui se résume : 1° dans la suppression du mot « habituellement » ; 2° dans la substitution du mot « besoins » au mot « ignorances ».

La parole est à M. Guillery pour développer son amendement.

M. Guillery. - Messieurs, je partage entièrement l'opinion de la commission, quant à la liberté, en matière de prêts d'argent, comme en toute autre matière commerciale. Mais je propose la suppression du mot « habituellement », et la substitution du mot « besoins » au mot « ignorance ».

La commission, dans son projet, ne punit que des actes coupables par eux-mêmes ; elle ne punit pas, comme la loi de 1807, le fait de prêter à intérêt, à un taux excédant l'intérêt légal ; elle ne punit ce fait que lorsqu'il est accompagné de l'abus de l'ignorance, des faiblesses ou des passions de l'emprunteur. J'ai cru dès lors qu'on pouvait supprimer le mot « habituellement » puisque, lorsque l'acte est coupable, il est juste qu'il soit puni.

D'un autre côté, comme on ne peut pas toujours réprimer les actes coupables, il est bon de donner aux juges la latitude de les punir, même lorsqu'ils sont peu nombreux.

Quant au mot ignorance, je ne crois pas qu'il réponde à l'intention de la commission ; je démontrerai ultérieurement que les mots « abus des besoins », empruntés à l'article 406 du Code pénal, répondent mieux à l’intention de la commission.

En principe, je suis parfaitement d'accord avec la commission, et je crois que, de son côté, l’honorable M. de Haerne trouvera dans mon amendement l’idée qu’il a développée, et dont la commission n’est pas éloignée.

Il s'agit de protéger le petit commerçant, l'homme dans la détresse, contre l'abus qui peut être fait de sa position par le créancier ayant contre lui la contrainte par corps et plusieurs titres exécutoires. Ceux qui ont eu occasion de voir des faillites savent que les derniers temps qui la précèdent sont employés eu négociations par le malheureux qui se débat contre une position désespérée, contre les hommes qui l'exploitent. Quand le tribunal de commerce constatera un abus semblable, il pourra le réprimer. Je borne là, pour le moment, mes développements, me réservant de les compléter dans une autre séance, s'il y a lieu.

- L'amendement de M, Guillery sera imprimé, distribué et renvoyé à la section centrale.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Je proposerai à la Chambre de déroger à une décision qu'elle a prise. Comme il est difficile de réunir les sections pour s'occuper d'autre chose que des octrois, on pourrait renvoyer à une commission spéciale un petit projet de loi qui n'a pas grande importance et ne peut présenter aucune difficulté ; l'examen n’exigerait pas vingt minutes ; et ce serait un objet de plus à mettre à l'ordre du jour qui est très peu chargé, je veux parler du projet de loi déposé hier, et qui a pour objet d'instituer un conseil de prud'hommes à Tournai.

- La Chambre décide que le projet de loi ayant pour objet d'instituer un conseil de prud'hommes à Tournai, sera examiné par une commission spéciale nommé par le bureau.

M. le président. - Le bureau vient de composer la commission comme suit : MM. Allard, Magherman, de Boe, Guillery et Royer de Behr.

- La séance est levée à 5 heures.