(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1859-1860)
(page 69) (Présidence de M. Dolez, premier vice-président.)
M. de Boe procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. de Florisone donne lecture du procès-verbal de la séance de samedi.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Boe présente l'analyse des pétitions suivantes :
« Le sieur Lemaître, ancien militaire atteint d'ophtalmie, demande la continuation du secours dont il a joui jusqu'en juillet dernier. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« La dame Blondiau, atteinte d'une ophtalmie qui lui a été communiquée par un milicien ayant pris la table et le logement chez elle, réclame l’intervention de la Chambre pour obtenir un secours. »
- Même renvoi.
« Des habitants d'Anvers présentent des observations contre les dispositions du Code pénal relatives aux coalitions. »
- Même renvoi.
« La dame Riez, atteinte de l'ophtalmie qui lui a été communiquée par son frère, milicien décédé aveugle, demande un secours. »
- Même renvoi.
« Le sieur Balkenbergh, secrétaire communal, demande la création d'une caisse de retraite en faveur des secrétaires communaux. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi instituant une caisse centrale de prévoyance pour les secrétaires communaux.
« Le sieur Jean-Pierre Lindelaux, boulanger à Houppertingen, né à Heerlen (partie cédée du Limbourg),demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« M. le ministre de la justice transmet à la Chambre, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation ordinaire du sieur Fischlowitz. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« M. Crombez, obligé de s'absenter pour un deuil de famille, et M. de Bast, retenu chez lui pour affaires, demandent un congé de quelques jours. »
- Ces congés sont accordés.
M. Guillery. - Messieurs, je ne me dissimule pas que les membres de cette Chambre doivent user avec beaucoup de réserve et de discrétion du droit d'initiative. Aussi, n'aurais-je pas eu un seul instant l'idée de déposer une proposition de loi, si je n'avais eu la conviction que j'exprimais le vœu de tous les hommes pratiques, c'est-à-dire de la magistrature et du barreau ; si, en outre, en proposant de revenir au Code d'instruction criminelle, je ne venais soumettre à votre approbation un système qui a fonctionné pendant quarante années, sans soulever de critiques sérieuses.
Voici, messieurs, le texte du projet de loi que j'ai eu l'honneur de déposer sur le bureau :
« L'article premier de la loi du 15 mai 1849 est abrogé.
« La composition des cours d'assises est réglée conformément aux prescriptions des articles 252, 253 et 254 du Code d'instruction criminelle. »
(L'orateur donne lecture de ces articles.)
Sauf quelques dénominations qui appartiennent à l'époque à laquelle a été promulgué le Code d'instruction criminelle, c'est le système qui a fonctionné jusqu'en 1849.
Le 15 mai 1849, une loi a changé la composition des cours d'assises. L'article premier dont j'ai l'honneur de proposer l'abrogation est ainsi conçu :
(L'orateur en donne lecture.)
Cette loi qui a été portée surtout dans un but d'économie, a désorganisé les tribunaux de première instance. De plus, elle constitue une anomalie dans l’organisation judiciaire.
Je dis qu'elle a désorganisé les tribunaux de première instance, parce que, pendant toute la durée des assises, dans les grandes villes où les fonctions de président du tribunal de première instance sont très importantes, ce magistrat se trouve obligé d'aller siéger à la cour d'assises.
Peu de temps après la promulgation de la loi de 1849, la cour de cassation, par un arrêt en quelque sorte disciplinaire, a décidé que le président du tribunal de première instance ne pourrait pas se faire remplacer à la cour d'assises par un juge, en invoquant les exigences du service du tribunal. Il n'y a que l'excuse de maladie qui puisse le dispenser de ce service, Il en résulte donc que, pendant plusieurs mois de l'année, le magistrat le plus occupé du palais de justice et le plus difficile à remplacer se trouve enlevé à ses fonctions.
Pour avoir une idée de l'importance des devoirs du président du tribunal de première instance, il suffit de lire dix lignes extraites du dernier compte rendu des travaux du tribunal de première instance de Bruxelles, et que je trouve dans la Belgique judiciaire du 2 janvier de cette année.
« Le président du tribunal. - Ce magistrat a prononcé sur 110 référés à l'audience, 230 demandes d'assigner à bref délai, 120 demandes de saisie-arrêt, gagerie, etc., 98 ouvertures de testaments, non compris ceux présentés par les juges de paix, 41 demandes admises d'arrêter des débiteurs étrangers, 130 arrestations par mesure de correction paternelle, dont 75 admises, 55 rejetées ou retirées, 23 nominations de notaire pour représenter des non-présents, 29 envois en possession, 6 ordonnances d'exequatur de sentences arbitrales, 1 demande de mise en liberté d'aliéné séquestré, 11 demandes semblables, faute de consignation d'aliments de débiteurs incarcérés ; une nomination de notaire pour conserver des minutes, 2 nominations d'experts en exécution de conventions, 6 demandes de femmes mariées à fin d'inscription contre le mari, 6 ordres amiables.»
Voilà quelle est l'importance de ces fonctions ; j'ajouterai qu'elles exigent des qualités et des connaissances toutes spéciales. Il n'y a donc pas de magistrat plus difficile à remplacer que le président du tribunal de première instance. Chef du corps, il doit régler l'ordre du service, il doit avoir connaissance de ce qui se passe dans toutes les chambres du tribunal.
Sa présence à la Cour d'assises le rend complètement impuissant à remplir cette partie de ces fonctions. De plus, il ne peut souvent, dans l'intervalle des séances de la cour d'assises, vaquer à aucune de ses fonctions. Ainsi, lorsqu'une affaire criminelle dure plusieurs jours, le président du tribunal de première instance, en arrivant chez lui à deux heures, après l'audience, alors qu'il est libre et qu'il ne demanderait pas mieux que de vaquer aux devoirs de son office, est obligé de renvoyer les justiciables qui se présentent devant lui dans les cas d'urgence tels que les arrestations, etc. Il est obligé de répondre que la loi le lui interdit formellement à peine de nullité. Il ne pourrait pas même appointer une requête.
Vous voyez, messieurs, quelle perturbation la loi de 1849 jette dans les travaux du tribunal.
De plus, ce système est une anomalie dans notre organisation judiciaire. D'après l'économie du code, une chambre du conseil, composée de trois juges examine d'abord la procédure criminelle. La chambre des mises en accusation, composée de cinq juges, décide s'il y a lieu à renvoyer devant la cour d'assises.
Une cour d'assises, composée également de cinq juges, statue en dernier ressort, applique la peine et a quelquefois à se prononcer indirectement sur la question de compétence.
En effet, si le jury déclare le fait constant, bien qu'il y ait arrêt de la chambre des mises en accusation, il est possible que la cour d'assises juge que le fait ne tombe pas sous l'application de la loi, absolve l'accusé et renverse ainsi l'arrêt de la chambre des mises en accusation.
Ce n'est pas sans de graves motifs que le Code d'instruction criminelle avait fixé à cinq membres le personnel des cours d'assises. Cette question fut mûrement débattue et l'on crut que, tant pour la dignité de l'audience qu'à raison de l'importance des foncions de la cour, il était important non seulement qu’elle fût composée de cinq magistrats, mais autant que possible de cinq magistrats membres de la cour d'appel.
Il ne faut pas perdre de vue que les fonctions de membre de la cour d'assises ne consistent pas uniquement à assister aux débats et à sanctionner le verdict du jury. Les questions de droit les plus graves se présentent à son examen ; elle a à statuer sur des intérêts civils qui peuvent s'élever aux sommes les plus considérables.
Est-il convenable, est-il juste qu'une cour d'assises composée souvent comme l'est un tribunal de première instance, car il arrive quelquefois qu'elle est présidée par le président du tribunal qui est assisté de deux juges de première instance, est-il convenable qu'une telle cour prononce eu dernier ressort dans de semblables affaires ?
Aussi, messieurs, la commission qui a été nommée en 1853 au département de la justice s'est-elle prononcée pour le retour pur et simple au système du Code d'instruction criminelle. Elle s'appuyait sur l'expérience, sur la manière dont ce système avait fonctionné.
Plusieurs autres projets ont été successivement discutés : le système français qui consiste à composer la cour de trois conseillers, un autre système, nouveau, d'après lequel il y aurait une chambre criminelle à la cour d'appel, laquelle irait dans chaque chef-lieu de province tenir les assises. Tous ces systèmes peuvent avoir du bon, je ne veux pas même dire, dès à présent, qu'il n'y en ait pas de meilleur que celui du Code d'instruction criminelle, mais ce qui est certain c’est que, du moment qu’il faut revenir à un provisoire, aucun n'offre plus de garanties que celui qui a déjà fait ses preuves.
(page 70) On m'objectera peut-être : Pourquoi n'avez-vous pas attendu que le gouvernement présentai un Code d'organisation judiciaire complet ?
Il en a déjà été présenté un par l’honorable M. Nothomb ; il se trouve retiré par suite du renouvellement partiel de la Chambre. J'ai pensé, messieurs, qu'un projet complet ne pourrait être voté qu'après de longues et laborieuses discussions, et qu'après avoir été adopté par la Chambre il serait probablement amendé par le Sénat, en un mot que ce ne serait qu'après plusieurs années que nous pourrions inscrire ce code dans notre législation.
En attendant, tous les hommes pratiques se plaignent de l'état actuel des choses et, provisoire pour provisoire, j'ai cru qu'il valait mieux prendre le système du code d'instruction criminelle que le système de la loi de 1849.
La Constitution a rangé parmi les objets les plus importants, les plus urgents, l'organisation judiciaire ; néanmoins, depuis 1830, d'autres préoccupations ont détourné le législateur de ce soin.
On a résolu ces questions par pièces et morceaux en quelque sorte.
Nous avons eu la loi du 4 août 1832, les lois sur le jury, la loi de 1849, mais jamais un code d’organisation judiciaire. Quelque urgent que fût le sujet, il s’est trouvé que la gravité de la question soulevée a souvent arrêté le législateur comme le pouvoir exécutif.
Ce n'est, messieurs, qu'avec une grande réserve qu'on peut toucher au Code d'instruction criminelle, qui, en définitive, offre une grande harmonie et est élaboré avec infiniment de soin ; vouloir changer un article sans modifier tous ceux qui s'y rapportent, ce serait rompre cette harmonie si nécessaire dans l'administration de la justice.
Ce que je viens donc vous proposer, messieurs, c'est uniquement de rendre à notre procédure criminelle et à notre organisation judiciaire l'harmonie qui a été rompue par la loi de 1849. Ce ne sera sans doute qu'une modification provisoire. Je ne doute pas qu'un code d'organisation judiciaire ne nous soit proposé ultérieurement, et alors vous aurez naturellement à discuter tous les systèmes qui se sont produits à cette occasion.
Messieurs, qu'il me soit permis de dire, en terminant, que le système qui compose la cour d'assises de trois conseillers, système qui me sera, selon toutes les probabilités, opposé le plus généralement, parce qu'il est adopté en France ; que ce système est corrélatif à bien d’autres changements.
Ainsi, le membre de la commission spéciale, nommée par le gouvernement, et composée de jurisconsultes éminents, réunissant à une science profonde une longue expérience des affaires judiciaires ; le membre qui a proposé que la cour d'assises fût composée de trois conseillers, a demandé un autre changement qui en dépend essentiellement. En ôtant à la cour d'assises l'importance que lui donne le Code de 1808, il lui était aussi une partie de ses fonctions ; ainsi, il lui ôtait le droit de prononcer sur les intérêts civils, en cas d'acquittement et sur les dommages-intérêts réclamés à charge de la partie civile par l'accusé qui vient à être acquitté.
Messieurs, je crois, pour ma part, que si l'on considère la mission de la cour d'assises au civil ou au criminel, il est juste de la composer de cinq magistrats de l'ordre supérieur, d'abord eu égard au prestige que doit avoir un tribunal aussi élevé, ensuite parce qu'en matière criminelle, comme en matière civile, ce n'est pas trop exiger que de demander ces garanties pour la composition d'une cour qui décide en dernier ressort de l'honneur et de la fortune des citoyens.
- La proposition de loi est appuyée.
La discussion est ouverte sur la prise en considération.
La prise en considération de la proposition de loi est mise aux voix et prononcée.
La Chambre renvoie la proposition de loi à l'examen des sections.
L'article premier a été amendé au premier vote ; l'article amendé est ainsi conçu :
« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à réduire de 40 p. c. les péages du canal de Charleroi, pour le parcours entier, et à fixer le péage ainsi réduit, pour le Centre vers Bruxelles, à raison de 12 1/2 lieues. »
- L'article premier, ainsi amendé, est définitivement adopté.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, la loi sur laquelle la Chambre va émettre un vote comprend différentes dispositions ; elle ne réduit pas seulement encore les péages sur le canal de Charleroi, mais elle consacre sur nos voies navigables un nouveau mode de perception et une tarification spéciale pour les provenances du bassin du Centre.
Sur tous ces points, on a adopté les propositions du gouvernement. Il y a différence seulement dans la quotité de la réduction.
Les dispositions importantes que je viens d'indiquer, ne nous permettent pas de voter contre l'ensemble de la loi. Nous l'adoptons ; mais nous réservons la position du gouvernement quant à la quotité de la réduction.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.
81 membres prennent part au vote.
70 votent l'adoption.
11 votent le rejet.
En conséquence, le projet de loi est adopté ; il sera transmis au Sénat.
Ont voté l'adoption : MM. J. Jouret, Koeler, Lange, le Bailly de Tilleghem, Ch. Lebeau, Loos, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pierre, Pirmez, V. Pirson, Prévinaire, Rogier, Sabatier, Saeyman, Tack, Tesch, Thibaut, Vau den Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vander Stichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Van Overloop, Van Renynghe, Van Volxem, Vermeire, Vervoort, Verwilghen, Vilain XIIII, Wasseige, Allard, Ansiau, Carlier, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, de Boe, Ch. de Brouckere, Dechamps. Dechentinnes, de Decker, de Florisone, De Fré, de Haerne, Deliége, de Mérode-Westerloo, de Montpellier, de Naeyer, de Paul, de Portemont, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Vrière, H. Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Goblet, Grandgagnage, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Janssens et Dotez.
Ont voté le rejet : MM. M. Jouret. Laubry, J. Lebeau, Magherman, Moreau, Rodenbach, Vander Donckt, de Lexhy, de Muelenaere, de Renesse et Grosfils.
La discussion générale est ouverte.
M. B. Dumortier. - Messieurs, le budget du ministère des finances semblerait devoir appeler l'examen de la question de l'or. Mais la Chambre a ajourné ce débat à la fin du budget des finances, pour autant qu'il n'y ait pas de rapports prêts sur d'autres budgets.
Bien que je désire vivement la solution de la question de l'or, je reconnais que nous avons un danger à éviter, c'est de tomber dans le système des crédits provisoires, et qu'il vaut mieux voter, avant tout, les budgets.
Mais je demanderai à M. le ministre des finances un renseignement qui nous est indispensable dans la question. Je voudrais que M. le ministre des finances remît à la Chambre un tableau indiquant à quel taux la pièce d'or française a été cotée par la Banque nationale depuis l’époque où l'on a cessé de lui donner cours légal jusqu'aujourd'hui. Il est indispensable pour le débat de connaître à quel taux la Banque nationale reçoit ces pièces.
Il est très facile à M. le ministre des finances de nous donner ce renseignement Il doit l'avoir à son ministère, et dans tous les cas il peut se le procurer aisément.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je ferai en sorte de donner à l'honorable M. Dumortier le renseignement qu'il réclame. Mais la Banque pas plus que les particuliers n'est tenue à recevoir les pièces qui n'ont pas cours légal. Je ne sais si elle a fixé un taux ou si elle a changé celui qui a été indiqué il y a un certain temps, et qui était, je crois, de 19 fr. 50.
La Banque nationale donne une facilité beaucoup plus grande que celle-là au public : c'est la faculté de déposer les pièces d'or moyennant une très petite redevance à charge de les reprendre dans un délai déterminé. Cette mesure, très favorable aux détenteurs d'or, évite le grave inconvénient de faire entrer dans les caisses de la Banque une monnaie qui n'a pas cours légal.
M. B. Dumortier. - Je sais que la Banque n'était pas obligée de recevoir la monnaie d'or à partir du jour où la loi lui a enlevé le cours légal.
Mais il n'en reste pas moins vrai que c'est l'action de la Banque qui a contribué à diminuer, pendant quelque temps au moins, la valeur de la pièce de 20 francs dans notre pays. Or, aujourd'hui que nous savons quelle est la valeur réelle de la pièce d'or par le cours de la Bourse, il est important de connaître à quel taux la Banque l'évalue.
S'il est vrai que pendant que la pièce d'or vaut à la Bourse 19 fr. 92 cent, la Banque ne la reçoit que pour 19 fr. 50 cent., chacun aura à apprécier la conduite de la Banque et à faire ses réserves ou à s'en explique.
Il est donc important de connaître à quel taux la Banque a coté les pièces d'or depuis qu'elles n'ont plus cours légal en Belgique, et je remercie M le ministre des finances de la promesse qu'il nous a faite de nous procurer ce renseignement.
M. A. Vandenpeereboom. - Le discours de la Couronne présenté à l'a Chambre au commencement de la dernière session, annonçait qu'un projet de loi serait déposé par le gouvernement à l'effet d'améliorer la loi sur la caisse générale de retraite, et de constituer un système général de caisse d'épargne dans le pays.
Les nombreux travaux auxquels la Chambre et le gouvernement se (page 71) sont livrés dans la dernière session, n'ont pas probablement permis de présenter ce projet.
Je prie M. le ministre des finances de nous faire connaître si les études sont assez avancées pour permettre d'espérer que ce projet de loi pourra être déposé et discuté dans la présente session.
L'institution de la caisse générale de retraite n'a pas produit tous les résultats qu'on en avait espérés. On croit que ces résultats négatifs sont dus surtout à la réglementation même de cette institution et qu'un règlement nouveau pourrait produire d'autres conséquences.
Puisque j'ai la parole, j'adresserai une autre question à M. le ministre des finances :
Il a été plusieurs fois question, dans cette enceinte, de l'abolition des octrois communaux. La chambre a examiné à plusieurs reprises cette question et malheureusement, tout en pensant que les octrois étaient une institution mauvaise et qu'il fallait abolir, on a été fort embarrassé pour trouver quelque chose à mettre à la place.
Je crois que M. le ministre des finances a fait faire des études sur cette question et je désire savoir s'il a quelque espoir de pouvoir aboutir et surtout de pouvoir aboutir dans un bref délai.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, à la fin de la dernière session ordinaire, j'ai tenu la promesse, qui avait été faite dans le discours du trône, de proposer des modifications à la loi relative à la caisse de retraite et de présenter également un projet de loi organique des caisses d'épargnes.
Mais le projet de loi qui a été déposé n'a pas été imprimé incontinent et depuis lors j'ai reçu de la plupart des pays des renseignements très intéressants qui ont exigé le remaniement du travail, en ce qui touche au moins l'exposé historique de la question.
Ce travail est maintenant achevé. Je compte que dans deux ou trois jours il pourra être distribué aux membres de la Chambre. L'exposé des motifs est très volumineux, il comprend plus de 150 pages d'impression.
La Chambre pourra donc examiner bientôt la réforme importante que nous proposons. Il s'agit d'un système nouveau pour l'organisation des caisses d'épargne.
Quant à la question des octrois dont a parlé l'honorable préopinant, j'ai déjà eu l'honneur de dire à la Chambre, dans le cours de la dernière session, que je ne désespérais pas de soumettre des propositions à la Chambre.
Tout le monde sait que les difficultés à vaincre sont immenses. Les hommes les plus dévoués ont cherché avec ardeur à les surmonter, et jusqu'à présent aucun système pratique n'avait été indiqué. On me permettra donc de ne pas trop promettre.
Je ne puis en dire davantage pour le moment. Le gouvernement n'a pas encore délibéré sur les mesures qu'on pourrait éventuellement proposer. Mais je répète que je crois être sur la voie d'une solution de ce difficile problème.
- La discussion générale est close.
La Chambre passe à la délibération sur les articles.
« Art. 1er. Traitement du Ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement des fonctionnaires, employés et gens de service : fr. 500,000. »
- Adopté.
« Art. 3. Honoraires des avocats et des avoués du département. Frais de procédure, déboursés, amendes de cassation, etc. : fr. 81,500.
« Charges extraordinaires : fr. 2,500. »
- Adopté.
« Art. 4. Frais de tournées : fr. 7,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Matériel : fr. 46,000. »
- Adopté.
« Art. 6. Traitement du graveur des monnaies et des poinçons de titre et de garantie. : fr. 4,200. »
- Adopté.
« Art. 7. Service de la monnaie : fr.19,200. »
- Adopté.
« Art. 8. Achat de matières et frais de fabrication de pièces de monnaie de cuivre. Charges extraordinaires : fr. 150,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Magasin général des papiers : fr. 105,000. »
- Adopté.
« Art. 10. Documents statistiques : fr. 19,500. »
- Adopté.
« Art. 11. Traitement des directeurs et agents du trésor : fr. 126,500. »
- Adopté.
« Art. 12. Frais de bureau, de commis, de loyer, etc., des directeurs et agents : fr. 26,300. »
- Adopté.
« Art. 13. Caissier général de l'Etat : fr 100,000. »
- Adopté.
« Art. 14. Surveillance générale. Traitements : fr. 352,000. »
- Adopté.
« Art. 15. Service de la conservation du cadastre. Traitements : fr. 323,000. »
- Adopté.
« Art. 16. Service des contributions directes, des accises et de la comptabilité. Traitements fixes : fr. 1,340,600.
« Charges extraordinaires : fr. 6,980. »
- Adopté.
« Art. 17. Service des contributions directes, des accises et de la comptabilité. Remises proportionnelles et indemnités (crédit non limitatif) : fr. 1,500,000. »
- Adopté.
« Art. 18. Service des douanes et de la recherche maritime : fr. 4,310,600. »
- Adopté.
« Art. 19. Service de la garantie des matières et ouvrages d'or et d'argent : fr. 49,400.
« Charges extraordinaires : fr. 400. »
- Adopté.
« Art. 20. Supplément de traitement : fr. 100,000. »
- Adopté.
« Art. 21. Traitements temporaires des fonctionnaires et employés non replacés. Charges extraordinaires : fr. 26,000. »
- Adopté.
« Art. 22. Frais de bureau et de tournées : fr. 68,840. »
- Adopté.
« Art. 23. Indemnités, primes et dépenses diverses : fr. 263,800. »
- Adopté.
« Art.
« Art. 24. Police douanière : fr. 5,000. »
- Adopté.
« Art. 25. Matériel : fr. 132,950. »
- Adopté.
« Art. 26. Traitement du personnel de l'enregistrement et du timbre : fr. 401,680.
« Charges extraordinaires : fr. 1,500. »
(page 72) M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai une modification à demander au chiffre de ce crédit.
Aux termes de l'arrêté organique du 24 avril 1849, les traitements des commis des directions d'enregistrement sont fixés comme suit :
Six à 2,700 fr., 16,200 fr.
Trois à 2,400 fr., 7,200 fr.
Je propose de porter à 3,000 fr. le taux de 2,700 fr., soit, pour la totalité du chiffre du littera D des développements, 18,000 fr., et à 2,700 fr. le chiffre de 2,400, soit pour les trois employés, 8,100 fr. En tout, 26,100 fr., faisant une augmentation de 2,700 fr.
Cette augmentation, messieurs, est exigée par l’intérêt du service. Les commis de direction sont des auxiliaires indispensables qui ne sont pas aujourd'hui suffisamment rétribués. Il en résulte qu'on ne trouve pas le personnel convenable pour assurer le service
L'augmentation, messieurs, est peu importante ; elle ne sera pas encore suffisante pour faire cesser une anomalie qui existe entre les traitements des commis de direction de l'enregistrement et les traitements des fonctionnaires et employés de même rang de l'administration des contributions, mais, provisoirement, l'augmentation est suffisante.
Je propose donc, messieurs, d'augmenter cet article de 2,700 fr.
- L'article ainsi amendé est mis aux voix et adopté.
« Art. 27. Traitement du personnel du domaine.
« Charges ordinaires et permanentes : fr. 105,225.
« Charges extraordinaires et temporaires : fr. 8,060.
« Total : fr. 113,285. »
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, j'ai encore une modification peu importante à proposer à ce chiffre. Il existe des employés sous le titre de « surveillants aux ventes publiques de meubles ». Ces employés existent à Bruxelles, à Anvers, à Gand, à Liège et leurs traitements sont à Bruxelles 2,200 fr., à Anvers 1,900 fr., à Gand, 1,500 fr., à Liège 1,400 fr. En tout 7,000 fr.
Le crédit porté au budget est de 7,400 francs,
Je crois qu'il est juste d’augmenter quelque peu le traitement de ces employés, qui est très minime. Le surveillant des ventes à Anvers serait augmenté de 300 fr.et son traitement serait fixé à 2,200 fr. ; le traitement de celui de Gand serait augmenté de 300 fr. et porté à 1,800 fr. ; celui du surveillant de Liège serait augmenté de 400 fr. et porté à 1,800 fr. ; celui de l'agent de Bruxelles resterait à 2,200 fr. Le crédit total serait de 8,000 fr. ; l'augmentation de 600 fr. seulement.
- Cette proposition est mise aux voix et acceptée.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai une autre modification à proposer à cet article. Il a été jugé indispensable de créer un service de contrôle de la perception des droits de navigation sur la Meuse comme il en existe sur toutes les autres voies navigables ; et en réorganisant ce service on a supprimé certains emplois.
Il y a, en plus, le traitement d'un contrôleur à 1,800 fr. ; en moins, la différence entre les traitements supprimés et les traitements nouveaux ; de telle sorte que l'article 27 serait, de ce chef, augmenté de 1,500 fr.
- Cette proposition est adoptée.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, le palais de la rue Ducale a été remis au département de l’intérieur par procès-verbal du 15 août 1859 ; les traitements des employés affectés à la surveillance de ce palais ne peuvent plus être à charge du budget des finances ; ces traitements s'élèvent à 1,680 fr. qu'on doit retrancher des 8,500 fr. qui figurent à l'article 27. le budget de l'intérieur sera grevé d'une somme équivalente.
- Cette proposition est adoptée.
L'article 27 ainsi modifié est mis aux voix et adopté.
« Art. 28. Traitement du personnel forestier : fr. 290,176. »
- Adopté.
« Art. 29. Remises des receveurs. Frais de perception (crédit non limitatif) : fr. 900,000. »
- Adopté.
« Art. 30. Remises des greffiers (crédit non limitatif) : fr. 42,000. »
- Adopté.
« Art. 31. Matériel : fr. 50,000. »
- Adopté.
« Art. 32. Dépenses du domaine : fr. 93,500.
« Charges extraordinaires : fr. 10,000. »
- Adopté.
« Art. 33. Intérêts moratoires en matières diverses : fr. 3,000. »
- Adopté.
« Art. 34. Administration centrale. Traitements. Frais de route et de séjour : fr. 4,10. »
- Adopté.
« Art. 35. Administration centrale. Matériel : fr. 1,500. »
- Adopté.
« Art. 36. Remises proportionnelles et indemnités des fonctionnaires chargés de la recette et du contrôle (crédit non limitatif) : fr. 3,500. »
- Adopté.
« Art. 37. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 17,500. »
- Adopté.
« Art. 38. Secours à des employés, veuves et familles d'employés qui, n'ayant pas de droits à une pension, ont néanmoins des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 7,500. »
- Adopté.
« Art. 30. Dépenses imprévues non-libellées au budget : fr. 12,000. »
- Adopté.
L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :
« Le budget du ministère des finances est fixé, pour l'exercice 1860, à la somme de 11,645,631 francs, conformément au tableau ci-annexé. »
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'article unique du projet de loi.
Le budget du département des finances est adopté à l'unanimité des 75 membres qui ont pris part au vote, et qui sont :
MM. J. Jouret, M. Jouret, Koeler, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, J. Lebeau, Loos, Magherman, Moreau, Muller, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Saeyman, Tack, Tesch, Thibaut, Van den Branden de Reeth, A Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Van Renynghe, Van Volxem, Vermeire, Vervoort, Verwilghen, Vilain XIIII, Wasseige, Allard, Ansiau, Carlier Coppieters 't Wallant, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Boe, Ch. de Brouckere, Dechentinnes, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Lexhy Deliége, de Mérode Westerloo, de Montpellier, de Muelenaere, de Naeyer, de Paul, de Portemont, de Renesse, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, Devaux, de Vrière, H. Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Goblet, Grandgagnage, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar et Dolez.
Discussion du rapport de la commission des pétitions sur les pétitions relatives à la monnaie d'or.
(page 73) La parole est à M. Rodenbach.
M. Rodenbach. - Messieurs, je ne puis que répéter ce que j'ai déjà dit plusieurs fois dans cette enceinte, à savoir que le système monétaire souffre infiniment en Belgique.
A l'heure qu'il est, la monnaie d'or est considérablement dépréciée dans le pays. A la Bourse, la pièce de 20 francs subit une perte de huit centimes : cette perte est de 50 centimes à la Banque Nationale ; il en est de même au chemin de fer, où les étrangers, donnant des pièces d'or, éprouvent une perte de 50 centimes. Ce même or retourne ensuite en France avec sa valeur légale. Il y a là une espèce de trafic que le gouvernement doit faire cesser par un moyen quelconque.
Messieurs, la question est très grave et très ardue. Malgré ces difficultés, l'Angleterre a l'étalon d'or, et à côté de cet étalon, des schellings pour les transactions. En France, on voit l'argent sortir du pays. L'Europe exporte deux fois plus d'argent qu'elle n'en importe. En France on a obvié à l'inconvénient qui résulte de cet état de choses ; en France, on bat de la monnaie de billon, on y bat des francs, des demi-francs, etc.
Je sais que le ministre des finances paraît disposé à changer le système et à faire battre aussi de la monnaie de billon.
Mais jusqu'à présent aucune mesure propre à porter remède au mal dont on se plaint, n'a été prise, est cependant la moitié du pays réclame une modification à grands cris.
En France, on a battu cette année 600 millions d'or, mais là aussi on a de la monnaie de billon ; les transactions s'y font dès lors facilement ; mais en Belgique on ne bat pas de l'or. Et quant à l'argent, on dit que l'argent est trop cher pour en battre.
Messieurs, je n'ai pas la prétention d'être un financier, d'avoir des connaissances profondes en économie pratique ; mais je suis l'homme des faits ; eh bien, j'entends partout des plaintes sur notre système monétaire.
Je demanderai à M. le ministre des finances s'il n'y aurait pas moyen d'admettre, du moins au taux de la bourse, la pièce d'or dans les caisses du gouvernement. Je ne dis pas qu'il faille prendre cette mesure seulement pour la monnaie d'or de France, mais encore pour la monnaie d'or d'Allemagne, de Hollande et d'Angleterre. On pourrait alors payer plus facilement ses contributions, tandis qu'aujourd'hui on éprouve pour cela une gêne considérable.
Les agriculteurs ne reçoivent que de l'or de la part des marchands. Mais je préfère avant tout le système adopté en Suisse et consistant à accepter la pièce d'or à raison de 20 fr., attendu que nous sommes dans les mêmes conditions.
Messieurs, il est urgent d'introduire un changement de système en Belgique. Vous ne voulez pas battre de l'or, comme le fait presque toute l'Europe ; vous voulez donc posséder plus de connaissances que les économistes de la plupart des nations européennes ?
Je ne demande pas l'impossible, je me borne à demander à M. le ministre des finances, puisqu'il est résolu de changer le système, je me borne à lui demander s'il ne pourrait consentir à admettre la pièce de 20 francs qui circule dans toute l'Europe.
Je n'en dirai pas davantage. Il y a d'autres orateurs qui désirent parler. Je prie M. le ministre des finances de vouloir bien me répondre.
M. Vermeire. - Messieurs, mon intention n'est pas d'examiner, dans ses détails, la question qui est agitée devant vous. Je suis un de ceux qui croient qu'il serait dangereux de prendre pour mesure de la valeur un métal dont la valeur intrinsèque serait moindre que celle de la monnaie qui est émise.
Je me demande d'abord ce qu'est la monnaie dans l'état actuel de nos relations, et je trouve, pour réponse immédiate, qu'elle n'est que l'équivalent, en valeur, d'une matière contre laquelle elle est échangée, c'est-à-dire que l'on est revenu des anciennes erreurs qui permettaient aux gouvernements d'émettre des monnaies à un titre inférieur à leur valeur réelle.
Il est donc nécessaire que la monnaie ait pour base un métal dont la valeur soit le moins possible sujette à des variations. Je pense encore que l'on doit donner la préférence à l'argent.
C'est vous dire, messieurs, que, à mon sens, il y a des inconvénients à avoir, pour type monétaire, deux métaux dont les rapports réciproques ne restent pas dans les proportions auxquelles ceux-ci avaient été évalués.
La démonétisation de l'or a donc eu ce bon résultat qu'elle a empêché l'émigration de l'argent. Et cela est si vrai que si, demain, on attribuait à la pièce de 20 fr., une valeur égale à celle de 4 pièces de 5 fr. en argent, l'on viendrait, immédiatement, changer l'or contre l'argent et profiter, ainsi, du bénéfice attaché à l'opération
Il est vrai que les différences ne sont pas assez sensibles pour que, dans le commerce de détail, l'on ne trouve certains inconvénients dans l'état actuel des choses ; mais cette situation ne peut se prolonger puisque le prix de vente des marchandises se règle sur la valeur que l'on reçoit en retour et que, conséquemment, l'équilibre se rétablit bientôt.
Une autre conséquence qui en résulte à toute évidence, que si l'on changeait le franc argent contre le franc or, l'on altérerait, dans une certaine mesure, les caractères des conventions conclues sur le pied de l'émission actuelle des monnaies ; et que, si, par une mesure législative on en diminuait le titre, le prêteur ne recevrait plus de son débiteur, en cas de remboursement, une valeur égale à celle de la somme prêtée.
Ainsi, par exemple, une somme aurait été prêtée en argent. Si elle est remboursée en or, que ce dernier métal, comparativement à l'argent, aurait perdu 2 1/2 p. c, comme c'est aujourd'hui le cas, il est évident que ce remboursement ferait perdre cette différence au préteur et que, en agissant ainsi, l'or ne se conformerait point aux règles d'une sévère justice, d'une loyauté parfaite.
Maintenant, en examinant la question au point de vue de nos relations avec l’étranger, quel doit en devenir le résultat, sinon que, en diminuant la valeur de notre franc, nous devons perdre, dans la même proportion, sur le change et que les marchandises que nous serons obligés de payer coûteront d'autant plus cher que la valeur intrinsèque de la monnaie aura été plus réduite. Ainsi, peut-être le change de Londres sur Anvers se ressentirait immédiatement de cette mesure et la livre sterling qui, aujourd'hui, est payée, à Anvers, à raison de 25 fr., ne le serait plus qu'avec une augmentation égale à la différence qui existe entre les deux métaux, c'est-à-dire à fr. 25-50.
Ainsi, encore comparativement à Anvers, Londres et Paris se trouvaient, autrefois quand la base du type monétaire était l'argent, dans des conditions à peu près égales.
Aujourd'hui que Paris a le franc or et qu'Amsterdam paye en florin argent, la situation est complètement changée. Paris perd 1/2 p. c. ; Amsterdam donne 1 1/2 p. c. d'avance, c'est-à-dire que la différence constitue celle qui existe entre la valeur intrinsèque des deux métaux.
Cette question, messieurs, doit être examinée sous plus d'un rapport ; je pense que le temps n'est pas venu de porter des changements à notre système monétaire. Je borne, ici, mes observations, me réservant d'y revenir, ultérieurement, si je le crois nécessaire.
M. Tack. - Messieurs, en proposant l'autre jour de porter à l'ordre du jour après le budget des finances la discussion du rapport de la commission des pétitions, ma pensée n'était pas de provoquer un débat approfondi sur la matière ; je crains qu'un débat de cette nature introduit à propos de quelques pétitions ne puisse aboutir, nous savons par expérience que ces questions entamées incidemment se terminent ordinairement par un vote par assis et levés, interprété dans un sens p les uns, dans un autre sens par les autres ; par suite on n'est pas fixé sur l'opinion de la Chambre.
Pour moi, je voulais simplement me borner à saisir cette occasion pour adresser quelques questions à M. le ministre des finances, je désirais connaître ses intentions relativement à notre régime monétaire, tel qu'il se présente actuellement, savoir s'il s'alarme au même degré que la commission instituée près de son département, sur les vices de notre circulation monétaire, s'il la trouve si détestable que le dit la commission instituée par lui, s'il croit qu'il y a des mesures urgentes, indispensables à prendre, s'il y a lieu de procéder à la refonte de la monnaie française d'argent qui circule dans le pays ; s'il est d'avis d'abaisser le titre de la monnaie auxiliaire et d'abandonner notre système de billon pour en prendre un autre, s'il compte remplacer le cuivre par un métal à bases différentes, enfin s'il partage plus ou moins les opinions de la commission, ou s'il croit que pour le moment il n'y a rien à faire.
La réponse de M. le ministre pourra servir de guide à ceux qui penseraient qu'il y a lieu de prendre certaines mesures. S'il se prononce pour le laisser-passer, ils sauront au moins à quoi s'en tenir, et pourront faire ultérieurement telles propositions dont ils croiraient devoir saisir la Chambre.
Jusqu'alors toute discussion serait infructueuse et pour ce qui me concerne, je ne veux point, en ce moment, entrer dans le fond du débat.
- Plusieurs voix. - A demain ! A demain !
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Si la discussion avait dû être close aujourd'hui, j'aurais donné quelques explications en réponse aux interpellations qui m'ont été adressées, mais si la discussion doit être continuée à demain, je parlerai demain.
M. B. Dumortier. - Je crois qu'il vaut mieux que M. le ministre des finances donne dès à présent les explications qu'il se propose de donner à M. Tack et qu'on ne pousse pas plus loin cette discussion. Les préoccupations de la Chambre à l'endroit des élections de Louvain l'empêchent d'écouter ce qui se dit. (Interruption.)
Comme l'honorable M. Tack, je pense qu'une discussion à propos d'une pétition ne peut amener d'autre résultat qu'un dépôt au bureau des renseignements ou un renvoi à un ministre ; la question intéressante est celle de savoir si le ministre a l'intention de présenter une loi ; car ce sera alors le moment de discuter fructueusement et utilement ; chacun pourra user de son droit d'initiative à l'occasion de ce projet. Je crois qu'on peut se borner à clore, comme l'a dit M. le ministre des finances.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je n'ai pas demandé la clôture ; on a provoqué une discussion nouvelle ; je l'ai, je crois, parfaitement (page 74) acceptée. Je me suis borné à dire samedi que l'intérêt du service exigeait qu'on votât d'abord les budgets ; que je ne m'opposais pas à ce qu'on discutât pour la dixième fois la question de la monnaie, après le vote du budget des finances, sauf à postposer cette discussion si le rapport sur un budget venait à être présenté dans l'intervalle.
Aujourd'hui ceux qui ont provoqué ce débat se bornent à m'adresser quelques interpellations, me restreindrai dans les limites qu'ils ont eux-mêmes tracées ; ils ne pourront pas dire que le débat a été clos parce que le gouvernement n'a pas voulu accepter la discussion.
L'honorable membre demande quelles sont les intentions du gouvernement au sujet des conclusions de la commission instituée pour examiner la situation de notre système monétaire. Si le gouvernement n'avait pas cru nécessaire d'introduire certaines dispositions pour améliorer note système monétaire, il n'aurait pas institué une commission à laquelle il a soumis un grand nombre de questions fort importantes et fort difficiles, quant à notre étalon monétaire d'argent que nous voulons du reste maintenir, et quant à la situation de notre monnaie de billon.
La commission a terminé ses travaux ; elle a recommandé au gouvernement, comme mesure préalable, de faire des essais quant à la monnaie de billon.
Une sous-commission a été instituée, elle fonctionne en ce moment ; elle ne m'a pas encore adressé son rapport. Le gouvernement n'a donc pas encore délibéré sur les mesures qu'il pourra être nécessaire de prendre. De ces mesures, les unes pourront être prises assez promptement, les autres seulement dans un délai plus ou moins éloigné, car en admettant qu'il y ait des modifications à introduire, il pourrait ne pas être opportun de s'en occuper. Il est possible, il est probable que la question du billon sera résolue avant les autres. Voilà ce que je puis dire en réponse à l'honorable M. Tack.
Quant à la question spéciale de la monnaie d'or, je demanderai à l'honorable M. Rodenbach s'il veut que l'on donne cours légal à l'or français.
M. Rodenbach. - Je n'ai pas demandé cela.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La presque unanimité de cette Chambre est, je crois, d'avis qu'il ne faut pas donner cours légal à l'or. Mais si vous ne voulez pas le cours légal de l'or, que voulez-vous ? Voulez-vous la tarification des pièces d'or par le gouvernement ? voulez-vous que le gouvernement reçoive dans ses caisses les pièces d'or françaises à un taux fixé par lui ?
M. Rodenbach. - C'est cela.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Le beau système ! L'Etat recevrait dans ses caisses, d'après un tarif déterminé, l'or français qui n'a pas cours légal en Belgique ; la tarification devrait être favorable aux détenteurs d'or ; sinon elle serait inutile et les mêmes réclamations se feraient entendre. Dans ces conditions, le gouvernement trouverait bientôt ses caisses pleines de pièces d'or ; comment payera-t-il si cette monnaie n'a pas cours légal ?
M. Rodenbach. - Elle aurait cours au taux déterminé par le tarif.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Ou ce serait un cours volontaire, et, dans ce cas, on refuserait de recevoir la pièce d'or du gouvernement si le taux en était trop élevé ; ou ce serait un cours légal.et vous venez de déclarer que vous ne le demandiez pas. Vous reculez devant une pareille mesure. Mais ne comprenez-vous pas que l'admission des pièces d'or dans les caisses de l'Etat rendrait inévitable, dans un temps déterminé, le cours légal de l'or ?
C'est probablement ce qui va arriver en Suisse. Dans ce pays on a, comme chez nous, en 1850, admis l'argent comme étalon monétaire ; mais par suite d'un consentement, en quelque sorte général, les particuliers ont reçu les pièces d'or de 20 fr. à leur valeur nominale. Il en est résulté que les pièces de 5 francs d'argent ont rapidement disparu de la Suisse.
La Suisse s'est vue dans la nécessité de subir ce qu'elle avait voulu éviter, et je ne serais pas étonné de voir décréter le cours légal de la monnaie d'or française. Mais est-ce là une bonne situation ? Est-ce là ce qu'il faut provoquer chez nous ?
Nous échapperons, j'espère, à cette nécessité ; nous l'éviterons, je le crois, si nous le voulons, avec de l'énergie et de la persévérance. Mais à coup sûr si l'on peut subir une pareille nécessité, il est absurde de la décréter.
On a traduit de l'allemand une brochure sur la situation monétaire de la Suisse, dans laquelle on constate les faits que je viens de rappeler, faits bien différents de ceux qui se produisent sous nos yeux, et l'on invoque cet écrit pour nous convier, sans doute, à donner cours légal à l'or français, à sa valeur nominale.
J'y trouve les plus étranges et les plus incroyables raisons à l'appui de cette idée.
« Aujourd'hui (dit l'auteur de cette brochure), la France n'est pas encore épuisée d'argent et les pièces de 5 francs, relativement à l'or, ne jouissent que d'une très faible prime ; mais la transformation se fait d'une manière continue et dans de fortes proportions. La prime s’élèvera dès que la quantité d'argent existante en France sera réduite à un certain minimum. Toutes les mesures essayées par le gouvernement français contre la sortie de la monnaie d'argent ou contre l'achat de cette monnaie avec prime, sont demeurées inefficaces, comme il l'a bientôt reconnu lui-même, et d'après la nature des choses, elles devaient demeurer inefficaces Nous aurons à revenir encore plus tard sur ces divers points ; il nous suffit en ce moment d'établir que la prime sur l'argent français, relativement à l'or français, s'élèvera. A cet égard, il ne subsiste pour ceux qui se sont occupés de ces questions aucun doute dans l'esprit de personne. Quant à l'époque où cette hausse deviendra très sensible, on ne peut rien préciser ; probablement elle n'est pas fort éloignée.
« Nous nous placerons dans l'hypothèse d'une hausse de prime jusqu'à 3 p. c, de telle sorte que, pour obtenir quatre pièces de 5 francs, il faille donner un napoléon et 60 centimes. En ce cas nous avons de nouveau en Suisse, comme avant 1850, une monnaie légale (cette fois les pièces de 5 francs) et une monnaie courante (l'or). La situation sera néanmoins beaucoup plus mauvaise qu'avant 1850. Alors, en effet, les petites transactions se réglaient seules en monnaie courante ; toutes les caisses publiques, les banques, le grand commerce et le négoce des lettres de change, dans la plupart d s cantons, se tenaient à la monnaie légale. Aujourd'hui les capitalistes et l'Etat, dans les limites du possible, seraient seuls à s'en tenir à cette dernière.
« Quelle en sera la conséquence ? Tous ceux qui sont fondés à réclamer de la monnaie légale, c'est-à-dire les créanciers hypothécaires et peut-être les caisses publiques ou une partie de ces caisses diront au débiteur : Nous n'acceptons point d'or ; parlez, vendez-le et apportez-nous de l'argent.
« Nous retombons ainsi tout à fait dans la situation ancienne où celui qui avait reçu 1 écu de Brabant pour 40 batz ou une pièce de 5 francs pour 35 batz devais les donner à ceux qui exigeaient la monnaie légale, pour 39 à 39 1/2 batz ou 34 à 34 1/2. On était habitué jadis à un tel état de choses ; on n'y est plus habitué aujourd'hui et on ne le souffrira pas. On dira avec raison : Nous ne voulons pas avoir fait de si grands sacrifices pour retomber dans une pareille situation.
« Voilà ce qui arrivera si. Dans l'intervalle, rien ne se fait. Les débiteurs qui perdront 3 p. c., c'est-à-dire la grande partie de ceux qui ont des dettes hypothécaires, ainsi que le plus grand nombre des citoyens feront entendre des clameurs tellement bruyantes que les autorités fédérales se verront forcées à déclarer le napoléon monnaie légale suisse, au cours de 20 francs. Cette loi volera 3 p. c. à chaque créancier de francs suisses.
« Ceux qui pensent comme nous que ces prévisions se réaliseront seront sans doute aussi d'avis qu'il vaut mieux admettre légalement, dès à présent, le napoléon pour 20 francs, en d'autres termes, d'ériger en loi ce qui existe dans la réalité des faits, ce qu'il est impossible de changer. Nous croyons que l'immense majorité des habitants de la Suisse est unanime sur ce point. Si on le fait aujourd'hui, il n'est porté préjudice à personne, car, aux yeux de chacun, le napoléon est encore l'équivalent exact de quatre pièces de 5 francs ; au moyen de l'une ou de l'autre monnaie, l'on peut satisfaire en Suisse une quantité égale de besoins, acheter une quantité égale de marchandises ou de terres, payer une quantité égale de dettes. Quelqu'un craint-il une lésion à cause de l'adoption formelle de l'étalon d'or, si l'or vient à subir une dépréciation, il a encore le temps de faire rentrer ses créances ou de vendre son titre pour placer ses fonds dans les pays où règne le pur système d'argent. »
Et voilà ce qu'on préconise pour la Belgique ; voilà la doctrine dont on demande l'application dans notre pays.
Il est vrai qu'une dépréciation qui est inévitable se fera sentir lorsque le grand réservoir de la France sera épuisé. Alors, dit-on, on volerait aux créanciers 5 p. c. et même plus de leurs créances. Prenez-vous y d'avance ; décrétez le cours légal aujourd'hui que la dépréciation n'est pas aussi considérable, et cela suffira pour que l'honnêteté publique soit sauve, et que nous ayons décrété une loi juste.
J'avoue que je ne pourrais préconiser un pareil système.
Je répète ce que je disais tantôt : la nécessité peut conduire là. On peut être contraint à subir une loi inique. Mais qu'on vienne convier la Chambre et le gouvernement à décréter une pareille mesure, que l'on prend le soin de qualifier de vol, si la dépréciation arrive à 3 p. c, je ne le conçois pas.
M. B. Dumortier. - On ne dit pas cela ; on pose une hypothèse.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Ce n'est pas une hypothèse ; la dépréciation actuelle de l'or est un fait.
M. B. Dumortier. - Est-ce que le napoléon vaut 19 fr. 40 ? C'est une hypothèse cela.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La dépréciation existe ; elle n'est pas encore ce qu'elle sera, dit l'auteur, et il faut se hâter.
M. B. Dumortier. - Le napoléon vaut 19 fr. 92 et l'auteur raisonne dans l'hypothèse où il serait tombé à 19 fr. 40. Il y a 8 centimes de perte et non 60 centimes.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - S'il y a vol à 19 fr. 45, comment n'y aurait-il pas vol à 19 fr. 92 ? La dépréciation existe, et il est clair qu'elle existe, puisqu'on fait de très grands efforts pour substituer les pièces d'or aux pièces d'argent, afin de pouvoir les vendre avec avantage. L'auteur le constate et il dit : Il est indubitable que, dans un (page 75) temps donné, cette dépréciation sera beaucoup plus forte. Nous pouvons admettre que dans un temps donné cette dépréciation ira jusqu'à 3 p. c.En ce cas, il y aurait vol. Aujourd'hui si l'on prenait la mesure, on volerait peu.
M. B. Dumortier. - On ne volerait pas.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - 19 fr. 92, c'est moins que 20 fr. ; mais on volerait peu ! Si l'on attend, tout le monde s'apercevra de la chose. La dépréciation sera telle, que le vol deviendra manifeste et tout le monde criera. Enfin, pour éviter ce désagrément, hâtons-nous aujourd'hui, et tâchons de faire la chose sans qu'on s'en aperçoive,
M. Tack. - Je ne crois pas que l'auteur que vient de citer M. le ministre des finances soutienne qu'il est indubitable que l'or baissera. Tout au contraire, voyez d’autres passages de la brochure et vous reconnaîtrez qu'il soutient la thèse contraire.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Permettez-vous que je cite ses paroles.
M. Tack. - Il faut voir l'ensemble. N'est-il pas vrai que l'auteur de la brochure soutient qu'à l’heure qu’il est, l'or n'a pas baissé, et qu'il est douteux, plus que douteux qu'il baissera ?
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il s'agit d'un article traduit de l'allemand.
M. Tack. - Eh bien, c'est l'auteur de cet article traduit de l'allemand, qui soutient que l'or n'a pas baissé de valeur, mais que l'argent augmente de valeur.
Messieurs, je ne dis pas quelle est mon opinion. Mais cet argument, tiré de la perte qu'on ferait subir aux créanciers en donnant cours légal à l'or, n'est pas tout à fait fondé.
Qu'a-t-on fait en 1850 ? On a aboi le cours légal de la monnaie d'or. Dans quel but et pourquoi ? Parce qu'on craignait la dépréciation de l'or. Cependant à cette époque, tout débiteur avait le droit de payer en or ou en argent. Vous avez donc volé les débiteurs à cette époque ?
M. Ch. de Brouckere. - On leur a rendu la valeur des pièces d'or en argent.
M. Tack. - Mais ceux qui ont contracté des obligations à terme, des obligations expirant aujourd'hui, à quoi sont-ils tenus, d'après votre loi ? Ils sont tenus à payer en argent, à donner un poids d’argent supérieur en valeur à la quantité correspondante d'or qu'ils s'étaient engagés à payer. Le débiteur avait l'option ; il pouvait payer en or ou en argent ; aujourd’hui il ne le peut plus.
On peut donc invoquer contre la mesure que vous avez prise et que je ne critique pas, au point de vue de l'équité, les considérations que vous venez de faire valoir contre ceux qui demandent qu'on donne cours légal à l'or. La situation me semble identiquement la même.
M. B. Dumortier. - Messieurs, je n'avais pas l'intention de prendre part à cette discussion, mais il m’est impossible d'entendre, sans protester, M. le ministre des finances venir représenter les milliers de pétitionnaires qui s'adressent à nous, et les orateurs qui soutiennent leur réclamation comme voulant organiser le vol, comme voulant voler 3 p. c. à leurs créanciers. Car c'est là la conséquence des paroles que vous venez d'entendre. Eh bien, je dis que quand on met de pareils arguments en avant, c'est qu'on n'a pas de bonnes raisons à donner.
Comment ! on vient dire ici que si vous donnez le cours légal à l'or, vous prendrez 3 p. c. à vos créanciers, qu'en d'autres termes vous organiserez le vol de 3 p. c. de toutes les créances, et pour dire cela, on cite un auteur qui raisonne dans une hypothèse qui n'existe pas, qu'il dit lui-même ne pas exister, mais qu'il prévoit comme pouvant exister. Cette hypothèse, on l'applique au présent et l'on vient dire qu'aujourd'hui décréter le cours légal de l'or, ce serait voler 3 p. c. de toutes les créances.
Eh bien, je prie M. le ministre des finances d'examiner les faits. Est-ce qu'aujourd'hui l’or considéré comme lingot, perd 60 centimes sur 20 fr. ? Voyez la cote que vous faites imprimer tous les jours au Moniteur : le napoléon est coté à 19 fr. 92. Il ne subit aujourd'hui, même comme lingot, qu'une perte de 8 centimes, et on raisonne comme s'il perdait 60 c. Je le demande, n'est-ce pas induire en erreur ceux qui vous écoutent ? II faut dire les choses telles qu'elles sont, et ne pas se placer dans des hypothèses pour réfuter vos adversaires et pour repousser dédaigneusement tous les pétitionnaires qui souffrent d'un régime dont ils veulent voir la fin.
Qu'est-ce que nous demandons ? Qu’est-ce que demandent les pétitionnaires ? C'est que le cours de l'or accepté aujourd'hui par les particuliers, soit aussi accepté par l'Etat.
Messieurs, la loi doit être l'expression de la volonté générale. Or, qu'est-ce que la volonté générale dans cette question ? Ce n'est pas la volonté des banques, ce n’est pas la volonté de quelques banquiers, mais c'est la volonté de tous les citoyens. Or, la volonté générale est que l'or conserve le cours légal qu'il avait auparavant. Vous voulez aller contre la volonté générale, et c'est parce que vous voulez aller contre la volonté générale que vous venez invoquer de mauvais arguments, que vous venez supposez des vols qui n'existent pas.
Messieurs, une grave question se présente ; et je ne la traiterai pas, parce que je ne veux pas prolonger un débat qui ne peut aboutir. Mais il est facile de démontrer que ce n'est pas l'or qui a baissé, que c'est l'argent qui a haussé. Rien de plus facile que de faire cette démonstration. Mais, messieurs, qu'en résulterait-il ? Il en résulterait comme conclusion que quand vous voulez forcer le débiteur à payer en argent, c'est le débiteur que vous volez, pour me servir de vos expressions.
Quant à moi, je ne vois ici ni vol ni voleurs ; je vois des théories d'une part et des faits de l'autre. Or, vous devez tenir compte d'un fait, c'est que le gouvernement français, le gouvernement anglais, les gouvernements d'Allemagne, d'Italie, d’Espagne, etc., admettent tous la monnaie d'or, c'est-à-dire que tous ces gouvernements sont des voleurs et qu'il n'y a qu'un seul gouvernement honnête, c'est le gouvernement de M. Frère.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, je ne sais si je dois faire des excuses aux pétitionnaires et à l’honorable M. Dumortier. L'excuse me paraîtrait presque une offense ; car elle supposerait qu'on a pu leur adresser l'épithète que vient de répéter l'honorable préopinant.
L'honorable M. Dumortier prétend que nous avons accusé de mauvaises intentions les pétitionnaires et ceux qui demandent le cours légal de la monnaie d'or ; mais nous, nous les accusons seulement de ne pas connaître la matière qu'ils traitent.
M. B. Dumortier. - Il n'y a que vous en Europe qui la connaissez.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je ne crois pas être seul de mon avis ; déjà, à diverses reprises, la Chambre, presque à l'unanimité, a partagé notre opinion.
Vous prenez une position très commode, vous posez en fait que tout le monde est avec vous, et ce n'est pas assez du pays, toute l'Europe veut ce que vous voulez. Le Zollverein admet l'or, selon vous.
M. B. Dumortier. - L'Angleterre.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'Angleterre n'a pas eu à choisir depuis la dépréciation de l'or. Elle avait, elle continue à avoir l'étalon d'or.
L'Italie admet l'or ! Tous les pays admettent l'or ! La première condition pour traiter une question, c'est de connaître les faits. Eh bien, la Hollande n'admet pas l'or, le Zollverein n'admet pas l'or.
A peu près en même temps que nous le Zollverein, l'Allemagne entière a admis comme étalon monétaire l'argent.
M. B. Dumortier. - Et l'or.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Vous êtes dans l'erreur, l'argent est l'étalon et non l'or. On ne peut avoir deux étalons. C'est impossible, on peut bien mettre dans une loi qu'il y a deux étalons, mais en fait, il y en a qu'un.
Le Zollverein n'a point commis cette erreur du double étalon. L'or y est admis à un taux variable. Ceux qui en veulent en prennent, mais on n'est pas tenu à le recevoir.
Mais, moi aussi, j'en veux ; faites comme moi. Je n'ai d'ordinaire que de l'or dans mon porte-monnaie, mais je n'ai pas la prétention de contraindre les gens à admettre les pièces d'or de 20 francs plus qu'elles ne valent. Il m'est arrivé souvent, soit en Belgique soit en pays étranger, de donner ou de recevoir en payement des pièces de 20 francs, mais c'était au cours du jour, à 19-80,19-83, 19-90. J'admets cela parfaitement.
Qu'on aime mieux à se servir de monnaie d'or que de monnaie d'argent, c’est très bien, mais ce n'est pas une raison de faire déclarer de par la loi qu'une pièce d'or de 20 francs est t'équivalent de quatre pièces de 5 francs d'argent. (Interruption.)
Vous me dites que l'on peut toujours porter ses pièces d'or en France, et qu'il n'y aura pas de perte.
Faisons un peu cette opération, J’ai reçu des pièces de 20 francs au pair sous prétexte qu'on les prend ainsi en France ; je les porte donc en France ou je les donne ici contre une lettre de change payable à Paris. Dans les deux cas, je dois obtenir des pièces de cinq francs. Mais si je prends des pièces de cinq francs en échange, je dois les payer en France plus que le quart d'une pièce de 20 francs. Personne en France ne me donnera quatre pièces de 5 francs pour une pièce d'or de 20 fr. Je subirai donc une perte en faisant l'opération que vous indiquez.
L'honorable M. Dumortier prétend que j’ai mal compris l'auteur que j'ai cité. Pas le moins du monde. L'auteur indique à la vérité cette thèse que ce n'est pas l'or qui a baissé, que c'est l'argent qui a haussé ; qu'est-ce que cela fait au fond ? n'est-ce pas identiquement la même chose ?
Est-ce qu'il y a une valeur absolue ?
Je ne connais, moi, que des valeurs relatives. Je compare l'or à l'argent et je dis que l'or a diminué de valeur ; vous dites que c'est le contraire, que c’est l'argent qui a augmenté. Avez-vous changé pour cela le rapport entre les deux métaux ?
A part cela, l'auteur admet qu'il y a une différence entre la valeur de l'or et la valeur de l'argent.
Il reconnaît que l'or a une tendance très violente à se substituer à l'argent, précisément à cause de la différence de prix. Il constate qu'en Suisse, à la suite de l'admission des pièces de 20 francs dans les caisses publiques, il est arrivé qu'il n'y a plus de monnaie d'argent. Ii constate que la différence ou la déprédation de l’or va grandissant de jour en jour et qu'on pourrait bien arriver jusqu'à 3p. c.
Si l'on attend ce moment pour prendre des mesures, selon lui, il (page 76) faudra alors donner cours légal à la pièce d'or, au cours de 20 fr. Et il ajoute : « Cette loi coûtera 3 p. c. à chaque créancier de francs suisses. »
Il continue enfin en ces termes : « Ceux qui pensent, comme nous, que ces prévisions se réaliseront seront sans doute aussi d'avis qu'il vaut mieux admettre légalement, dès à présent, le napoléon pour 20 fr... »
De ces paroles, j'ai conclu que ce qu'il indique lui-même comme constituant un vol, lorsque la dépréciation atteindra 3 p. c, constituera aujourd'hui un vol de la différence entre la valeur de l'argent et la valeur de l'or.
Mais je n'ai accusé personne de voler, j'ai accusé certaines personnes de ne pas connaître la question des monnaies.
Je reconnais, du reste, que cette question est fort difficile à comprendre ; le public ne se fait pas une idée très exacte des monnaies ; il ne voit que la pièce qu'on lui présente et il est très enclin à penser que du moment que le gouvernement a déclaré que cette pièce doit avoir cours à tel taux, la pièce a réellement cette valeur ; il est très enclin à penser que s'il peut donner pour 20 francs la pièce qu'il a reçue pour 20 fr., il n'y aura, en définitive, de préjudice pour personne.
Le public ne sait pas assez que du moment qu'une monnaie n'a plus sa valeur, où elle est dépréciée par une valeur quelconque, les objets qu'on reçoit en échange de cette monnaie haussent de prix. C'est ce qui arrive nécessairement dans un temps donné, et s'il n'en était pas ainsi, il ne faudrait pas se servir d'or ou d'argent ; il suffirait de prendre un objet le moins cher possible, un chiffon de papier, pour servir d'étalon des valeurs.
Or tous ceux qui ont étudié la matière savent parfaitement à quelles graves perturbations on arrive lorsque, au lieu de conserver un bon système, on n'a plus qu'une monnaie altérée ou dépréciée.
M. B. Dumortier. - Messieurs, à entendre l'honorable M. Frère, il n'y a de système vrai que celui qu'il présente. Ainsi, le système dans lequel les grands financiers, les grands ministres d'Angleterre, de France, d'Espagne, marchent, ainsi que presque toute l'Europe, est un système faux ! Quant à moi, je déclare, que quelque grand homme que l'honorable M. Frère puisse être, j'ai beaucoup plus de confiance dans l'intelligence de tous les grands financiers, de tous les grands ministres de France, d'Allemagne, d'Angleterre, etc., que dans les connaissances économiques de l'honorable ministre des finances.
Et quand il dii que tout le monde est dans un système faux et que lui seul est dans un système vrai, je voudrais bien qu'il nous expliquât comment il se fait que la France ni l'Angleterre, qui sont à la tête de la civilisation, n'ont pas adopté ce système jusqu'ici et qu'elles ont conservé les deux étalons ! (Interruption.)
Il n'y a pas de monnaie d'argent en Angleterre ?... Peut-on soutenir une pareille chose ? Il y a en Angleterre une monnaie d'or et une monnaie d'argent. (Nouvelle interruption.)
Appelez cette dernière monnaie de la monnaie de billon, si vous voulez ; mais il y a une monnaie d'argent en Angleterre.
Il y en a encore en France, en Espagne, en Allemagne, en Italie, etc. Faites donc comme les autres, et ne veuillez pas faire autrement que les autres.
La Suisse a voulu faire comme l'honorable M. Frère ; or, il est évident qu'aujourd'hui la Suisse reconnaît qu'elle ne peut pas marcher avec ce système.
Que se passe-t-il en Belgique ? L'or a tellement envahi la circulation que dans les provinces limitrophes de la France, la monnaie d'argent n'existe que pour mémoire. Aussi, avez-vous vu les conseils provinciaux du Hainaut et de la Flandre occidentale demander, malgré l'influence des gouverneurs, que cours légal soit donné à l'or. Comment ! lorsque des conseils provinciaux, appréciant le malaise qui existe dans leurs provinces, viennent solliciter un remède, une pareille démarche n'aurait aucune signification !
L'honorable M. Frère parle toujours de vol, comme si en donnant valeur légale à l'or, le pays allait être volé. Si au contraire, le pays est volé, c'est avec la monnaie d'argent qu'il est volé. En effet, examinez le tableau des pesées, inséré dans le rapport de l'honorable M. Pirmez, et vous verrez que le vol sur la monnaie d'argent est double de celui sur la monnaie d'or. (Interruption.)
On coupera, me dit-on, la monnaie d'argent ; mais il en résultera que la Belgique n'aurait plus alors ni monnaie d'or, ni monnaie d'argent.
Ce sera une belle chose ! Vous aurez à donner cours légal aux billets de la Banque Nationale. Au lieu d'une circulation de 100 millions en billets, vous en aurez une de 200, 300, 400 millions. Voilà où vous voulez en arriver ; vous voulez enrichir quelques banquiers, quelques actionnaires de la Banque Nationale, au détriment du commerce et de l'industrie, au détriment des populations !
Messieurs, je ne veux pas prolonger ces débats qui ne peuvent amener aucun résultat. J'attendrai la présentation et la discussion du projet de loi que M. le ministre des finances nous annonce, et alors l'examen de toutes ces questions pourra s'engager beaucoup plus fructueusement que dans ce moment-ci. (Aux voix !)
M. le président. - Si personne ne demande plus la parole, je mets aux voix les conclusions de la commission.
La commission propose le renvoi de toutes les pétitions à M. le ministre des finances.
M. Pirmez. - Messieurs, l'année dernière, la question de la monnaie d'or a été discutée dans cette Chambre. L'assemblée a ordonné alors le dépôt des pétitions au bureau des renseignements ; elle n'a pas voulu les renvoyer à M. le ministre des finances, dans la crainte qu'on n'interprétât ce renvoi en ce sens qu'on voulait donner suite à ces réclamations. Je proposerai donc derechef le dépôt des nouvelles pétitions au bureau des renseignements ; et ce dépôt aura la même signification que celle que la Chambre a attachée à son vote de l'année dernière.
A cette époque, la Chambre n'a pas voulu que la question demeurât en suspens ; si ma proposition est adoptée, le pays saura qu'elle est encore résolue dans le même sens.
ML M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, je viens défendre les conclusions de la commission des pétitions.
Ne perdons pas de vue que les pétitionnaires ne sont pas simplement quelques particuliers, re sont encore des conseils provinciaux, des conseils communaux de villes importantes qui vous demandent d’examiner sérieusement quel remède peut être apporté à la situation fâcheuse faite par le système actuel au commerce, à l'industrie et aux particuliers appartenant aux classes moyenne et inférieure de la société.
Eh bien, le dépôt de ces nombreuses pétitions au bureau des renseignements, c'est-à-dire que nous ne voulons pas examiner qu'on veut bien permettre une discussion, mais qu'on refuse de chercher tout remède, toute atténuation. J'espère que M. le ministre des finances ne refusera pas d'accepter le renvoi de toutes ces pétitions à son département.
D'ailleurs, n'oublions pas que parmi les critiques mêmes qui surgissent, il en est qui sont réellement fondées.
Ainsi, par exemple, un voyageur présente au guichet du chemin de fer, une pièce de 20 fr. on la reçoit pour 19 fr. 50.
Le voyageur se dit : « Voilà une pièce d'or qui ira à Lille aussi vite que moi ; à Lille elle vaudra vingt francs, tandis qu’ici on me vole un demi-franc. »
« Mais, objecte-t-on, pourquoi présenter au guichet des chemins de fer des pièces de 20 francs ? » Mettez-vous dans la position de ces voyageurs ; il en est beaucoup qui n'ont pas d'autre monnaie ; ils ne peuvent pas obtenir des billets de banque en échange de leur or, à moins de subir la même retenue, la même perte ; ils n'ont reçu que de l'or en payement de leurs marchandises, on l'accepte, au chemin de fer, à raison de 19 francs 50 centimes, tandis que la même pièce d'or vaut à Lille 20 francs.
Si vous receviez l'or au prix de la valeur du lingot, ou au prix coté à la bourse, je le concevrais.
Je demande que M. le ministre des finances veuille examiner sérieusement s'il n'y a pas lieu de prendre tant à l'égard des voyageurs qui se présentent au guichet du chemin de fer avec des pièces de 20 francs, s'il n'y a pas lieu de prendre à l'égard de ces personnes comme à l’égard des classes peu aisées, des mesures dans le sens de celles qui sont indiquées par les pétitionnaires ou toutes autres propres à remédier ou au moins à atténuer la situation fâcheuse et intolérable qui leur est faite par les dernières dispositions législatives.
J'ai dit.
M. Pirmez. - Messieurs, ce que vient de dire l'honorable M. Van der Donckt m'engage à maintenir ma proposition. L'honorable rapporteur demande le renvoi à M. le ministre des finances, pour qu'on examine encore la question, et dès lors pour qu'elle reste encore eu suspens. Je propose, au contraire, le dépôt au bureau des renseignements, non pas dans la crainte que la question soit encore examinée, mais parce qu'elle l'a été, et parce qu'elle a été résolue.
Messieurs, cette question semble avoir fait un grand pas depuis les derniers débats ; aujourd'hui personne ne semble disposé à soutenir le cours légal des pièces françaises ; il me paraît utile qu'en présence de cette presque unanimité de la Chambre, la solution du débat ne paraisse pas incertaine.
La semaine dernière on voulait une prompte discussion pour faire cesser les prétendues incertitudes du pays ; sans se préoccuper des précédentes discussions de la Chambre, on voulait que son opinion fût constatée de nouveau.
Puisque le débat s'est rouvert, qu'il n'ait donc pas pour conséquence de faire naître des incertitudes. La confiance dans la stabilité des monnaies est trop importante pour que la Chambre ne fasse pas en sorte que le commerce sache à quoi s'en tenir.
A ce point de vue, je pense que la Chambre fera chose utile en adoptant ma proposition.
M. B. Dumortier. - Je ne m'oppose pas au dépôt au bureau des renseignements. Mon intention est même de le voter. Mais je proteste contre la portée que l'honorable M. Pirmez voudrait donner à ce vote de la Chambre.
Il se trompe quand il prétend que personne ne veut le cours forcé de l'or ; qu'il constate les faits, et il verra que les choses sont telles que je le dis. Je m rallie à la proposition de déposer les pétitions au bureau (page 77) des renseignements, mais sans préjuger la question qui doit être l'objet d'une grande discussion et d'un vote positif sur le fond.
M. le président. - Je vais consulter la Chambre.
M. Pirmez. - J'ai fait ma proposition pour donner au vote de la Chambre une signification et une signification opposée à celle que voudrait lui attribuer M. Dumortier et au sentiment qu'il a exprimé. Je croyais qu'il se rallierait à la proposition de M. Vander Donckt, qui a pour but d'exprimer une opinion contraire à la mienne. Si maintenant il se rallie à la mienne, elle n'a plus de portée parce qu'elle n'a plus celle que je voulais lui attribuer.
- Plusieurs membres. - La Chambre lui donnera cette portée.
M. Pirmez. - Alors je maintiens ma proposition.
M. B. Dumortier. - Je répète que l'honorable M. Pirmez ne peut donner à un vote de dépôt au bureau des renseignements la portée d'une solution quand il s'agit d'une question aussi importante que celle qui nous occupe ; s'il veut que la Chambre se prononce, qu'il présente une formule de délibération, nous la discuterons.
Ce n'est pas incidemment, à propos d'une pétition, qu'on tranche une question de cette gravité. Ce serait escamoter la discussion que d'agir de la sorte ; telle ne peut pas être l'intention de l'honorable membre.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Vous n'en voulez pas de la discussion.
M. B. Dumortier. - Je prouverai que plus que M. le ministre je veux une discussion et une solution de la question.
Demain, peut-être, je présenterai une proposition de loi ; à moins que M. le ministre, de son côté, ne dépose un projet de loi. Je préférerais cependant n'examiner la question que quand M. le ministre aura saisi la Chambre du projet qu'il a annoncé.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je n'ai pas annoncé de projet de loi.
M. B. Dumortier. - Il faut que le pays sache que des questions qui ont donné lieu à des pétitions couvertes de milliers de signatures sont tranchées incidemment, il faut que le pays sache quels sont ceux de ses mandataires qui veulent le laisser dans l'embarras et ceux qui veulent l'en tirer.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'année dernière, après une discussion approfondie, on a formulé une proposition ayant cette signification qu'on voulait maintenir le système établi par la loi de 1850, et cette proposition a été adoptée.
Jusqu'à présent, j'ai le droit de dire que la Chambre a consacré notre opinion et écarté les pétitions qui lui étaient adressées, parce qu'elle a confiance dans le système établi par la loi.
La proposition de M. Pirmez ne peut pas se trouver dénaturée parce que l'honorable M. Dumortier croit habile de s'y rallier ; elle aura le même caractère que la précédente décision de la Chambre.
- La Chambre consultée ordonne le dépôt des pétitions au bureau des renseignements.
La séance est levée à 4 3/4 heures.