(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1859-1860)
(page 61) (Présidence de M. Dolez, premier vice-président.)
M. de Florisone, secrétaire, procède à l'appel nominal à 1 heure et demie.
M. Vermeire, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Florisone présente l'analyse d'une pétition adressée à la Chambre.
« Le sieur Varlez, capitaine pensionné, demande la révision de sa pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Rumbeke, le 29 juillet 1859, des habitants de Rumbeke demandent qu'il soit donné cours légal en Belgique à la monnaie d'or de France.
Même demande de commerçants à Nivelles et d'habitants de Roulers, Menin, Warneton, Néchan, Vichte, Rolleghem-Capelle, Deerlyk, Gheluwe, Courtrai, Gotthem, Denterghem, Thielt, Bruges, Cuerne, Bisseghem, Pecq, Wevelghem, Renaix, Harlebeke, Tournai, Belleghem, Houthem, Emelghem, Zandvoorde, Vive-Saint-Eloi, Ypres, Iseghem, Waereghem.
Par pétition datée de Braine-le-Comte, le 17 juillet 1859, des habitants de Braine-le-Comte appellent l'attention de la Chambre sur les pertes que l'on doit subir en acceptant en payement l'or français, et sur les entraves qui en résultent dans les opérations commerciales,
Je demanderai à la Chambre de pouvoir comprendre dans mon rapport la demande des habitants d'Estaimpuis ainsi que celle du conseil provincial du Hainaut tendantes aux mêmes fins.
Des administrateurs, propriétaires, industriels, négociants et habitants de Thuin demandent une loi qui donne un cours légal à la monnaie d'or de France.
Même demande d'habitants de Leuze, des habitants d'Holleghem tendante à ce qu'il soit donné cours légal en Belgique à la monnaie d'or de France.
Messieurs, toutes ces pétitions ont été envoyées à la commission des pétitions, avant et pendant le mois de juillet, avant le 20 du mois d'août.
Or, ce n'est que le 20 août que la grande commission qui a été nommée par le gouvernement pour examiner la question de l’or, a présenté le rapport que l'honorable ministre a déposé sur le bureau de la Chambre. Vous comprenez donc que la commission des pétitions n'a pas pu prendre connaissance de ce rapport qui ne lui a pas été envoyé spécialement à cette fin. En conséquence j'entre dans le fond de cette immense question toute palpitante d'intérêt et dont le public attend la solution avec la plus vive impatience.
Messieurs, la commission s'est donc bornée à examiner les demandes des pétitionnaires. Elle n'a pas examiné le grand rapport par le motif qu'elle n'en avait pas été saisie légalement.
Les conclusions de votre commission sont le renvoi des pétitions à M. le ministre des finances, en insistant auprès du gouvernement pour qu'il avise au moyen de remédier à l'état de gêne existant, à la situation désastreuse et insupportable qui est faite au commerce et à l'industrie par la législation actuelle sur la matière.
La commission ne s'est pas dissimulé les difficultés nombreuses dont cette question est entourée et la grande difficulté de trouver un moyen d’y obvier.
Et cependant le public, les nombreuses pétitions en sont une preuve évidente, le public attend toujours du gouvernement et de la Chambre à laquelle les pétitionnaires s'adressent comme à une espèce de providence, en attend un remède à la position pour ainsi dire intolérable qui lui est faite aujourd'hui.
Messieurs, ce sont surtout les classes moyennes et inférieures qui sont réellement victimes de cette situation. Les grands propriétaires, les banques savent s'affranchir de cet état de gêne ; ce sont, dis-je, les ouvriers, les petits trafiquants, et surtout les habitants des frontières de France qui en souffrent.
La plupart des pétitionnaires, y compris le conseil provincial du Hainaut, demandent que l'on donne cours légal à l'or de France. Votre commission, messieurs, ne s'est pas prononcée sur cette question ; elle s'est pas associée, sur ce point, au vœu émis par les pétitionnaires. Elle s’est posé la question de savoir s'il ne serait pas utile d'engager le gouvernement à accepter l'or français dans les caisses de l'Etat, par tolérance.
Aujourd'hui, le chemin de fer et les caisses de l'Etat ne le reçoivent pas ; il circule cependant ; malgré le gouvernement et malgré toutes les dispositions actuelles, l'or de France inonde le pays, il remplace nos pièces de 5 francs qui disparaissent insensiblement.
Longtemps je n'y ai pas ajouté foi ; mais aujourd'hui je dois dire, et tout le monde doit dire avec moi, que nos pièces de 5 francs disparaissent peu à peu de la circulation.
« A quoi bon, dit le public, que les coffres du trésors oient encombrés de pièces de 5 francs, si elles ne circulent pas ? i
Evidemment, messieurs, les transactions se font au moyen des pièces d'or ; tout le monde les reçoit et les donne comme il les reçoit au prix de 20 francs.
Il en résulte que le gouvernement recule plus longtemps devant l'adoption d'une mesure quelconque ; car, je le répète, quoi qu'on en ait dit, l'or circule, il arrive tous les ans en beaucoup plus grande abondance et finit par remplacer les pièces de 5 francs.
A peine existe-t-il une monnaie de billon en argent pour pouvoir échanger encore les pièces d'or de 20 francs.
La commission, en présence de cette situation si désastreuse pour les petits trafiquants, l'industrie et le commerce, a l'honneur de proposer à la Chambre le renvoi de toutes ces pétitions à M. le ministre des finances, avec invitation d'aviser aux moyens les plus convenables de remédier à cet état de choses.
Au surplus il est essentiel de ne pas perdre de vue que ce ne sont pas quelques particuliers, mais des conseils communaux des principales villes et communes, ainsi que les conseils provinciaux, qui signalent ces graves inconvénients.
M. A. Vandenpeereboom (pour une motion d'ordre). - Messieurs, je demande que le rapport qui vient d'être présenté soit imprimé. La Chambre comprendra qu’à une seule audition on ne peut pas saisir tous les arguments que l'honorable rapporteur a fait valoir dans son travail. Je demande donc que le rapport soit imprimé ; il le sera de fait par son insertion dans les Annales parlementaires ; je demande ensuite qu'on fixe un jour pour cette discussion, qui est très importante. (Appuyé.)
M. Rodenbach. - Ne pourrait-on pas discuter cet objet en même temps que le budget des finances ?
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je crains que cette discussion ne prenne beaucoup de temps... (Interruption.) Il est possible qu'elle se termine promptement, mais aussi qu'elle soit longue ; alors le vote des budgets serait reporté fort loin. Je fais donc la proposition de fixer cette discussion après le vote des budgets. Nous voici arrivés au 20 novembre, et la plupart des budgets ne sont pas votés ; le budget des voies et moyens sera nécessairement voté avant le 1er janvier ; mais il serait désirable que les autres le fussent aussi, et le fussent en temps utile pour que le Sénat pût les discuter en liberté ; sans cela on sera forcé de rentrer dans le système des crédits provisoires contre lequel on s'est tant élevé.
M. Tack. - Ce serait retarder trop longtemps la discussion de la question sur laquelle nous venons d'entendre le rapport, que de le renvoyer après le vote des budgets.
Je proposerai un terme moyen : ce serait de fixer la discussion après le budget des finances. Il y a longtemps que la question monétaire traîne devant la Chambre ; il serait bon que le pays sût enfin à quoi s'en tenir sur cette matière importante.
Nous sommes en présence du rapport fait par M. Pirmez, au nom de la commission spéciale nommée par M. le ministre des finances. Ce rapport soulève des questions très ardues.
La commission reconnaît que la situation actuelle présente de grands inconvénients, elle propose des mesures propres à y porter remède. Il convient que le gouvernement nous dise quelle est sa pensée à l'égard de ces propositions et que l'on avise au moyen de faire cesser l'incertitude dans laquelle se trouve le commerce.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il me semble qu'il y a erreur de la part de l’honorable membre sur les matières à discuter. Je ne pense pas qu'il puisse être question du rapport de l'honorable M. Pirmez ; il s'agit de discuter le rapport sur les pétitions qui ont trait à la monnaie d'or.
Le rapport de M. Pirmez embrasse toute la question monétaire ; j'ai saisi la commission de toutes les questions, quelques-unes très difficiles qui pourront être utilement soumises à la Chambre.
C'est pour éclairer les membres de la Chambre que le rapport destiné au ministre des finances a été déposé par moi. Quand des propositions seront faites par le gouvernement à la Chambre, nous les discuterons ; jusque-là elles ne sont pas soumises à nos délibérations.
Quant au rapport qui vient d'être fait, où il n'est question que de l'or, je ne m'oppose pas à ce qu'on le discute après le budget des finances, en faisant observer toutefois que si les rapports sur les autres budgets se trouvaient prêts entre temps, il serait préférable qu'ils fussent votés.
(page 62) M. le président. - M. le ministre propose de fixer le rapport de la commission des pétitions après le budget des finances, à moins que les rapports sur d’autres budgets ne soient prêts dans l’intervalle.
M. Tack. - Avant tout, j'ai désiré savoir ce que le gouvernement compte faire pour tirer le public de l’incertitude dans laquelle il se trouve.
Le gouvernement adoptera-t-il les propositions de la commission spéciale qu'il a instituée ? en adoptera-t-il une partie ou les repoussera-t-il toutes ? en fera-t-il d'autres ? Il est essentiel qu'il s'explique.
C'est eu vue d'obtenir ces explications que je voudrais voir fixer la discussion du rapport à une prochaine séance. Si le gouvernement déclare qu'il n'y a rien à faire, ceux d'entre les membres de la Chambre qui désirent voir introduire des modifications au système monétaire, pourront alors faire telle proposition qu'ils jugent convenable.
M. Muller. - Le gouvernement s'est déjà prononcé.
M. Tack. - Si le gouvernement annonce l'intention de proposer dans un bref délai certaines mesures, dans ce cas nous pourrons attendre et un chacun pourra apprécier ses propositions, les accepter ou les combattre.
M. Pirmez. - Messieurs, je dois rectifier une erreur de l’honorable M. Tack. Le pays, selon l'honorable membre, serait dans une complète incertitude sur la question de savoir si l'or français aura ou non cours légal. M. Tack oublie que la Chambre s'est prononcée l'année dernière sur cette question ; elle l'a résolue négativement à propos d'un rapport de pétition, et la proposition dont elle a alors été saisie et qu’elle a adoptée, avait précisément pour but de faire cesser les incertitudes sur ce point de législation.
L'opinion du gouvernement s'est tout récemment encore manifestée ; M. le ministre des finances l'a clairement exposée au mois de septembre dernier.
Je ne vois aucun fait nouveau qui soit venu modifier les décisions prises. Si l'on voulait considérer la question comme encore entière, ii faudrait renoncer à faire cesser l’incertitude, car rien n'empêchera, après la discussion qui s'ouvrira bientôt, et qui sera sans doute suivie d'une nouvelle décision, rien n'empêchera, dis-je, des pétitions de venir rouvrir le débat, et il serait possible alors comme aujourd'hui de soutenir que le pays demande une solution.
Je ne m'oppose pas à ce que l'on discute à nouveau la question de l'or, mais je crois qu'il ne faut pas, pour lui donner un caractère d'urgence, méconnaître la portée des décisions de la Chambre.
M. Rodenbach. - On dit, messieurs, que l'opinion du gouvernement est connue et qu'elle est favorable au statu quo ; mais, messieurs, vous recevez de nombreuses pétitions des Flandres, du Hainaut et du Luxembourg, et entre autres, des villes de Roulers, d'Iseghem, de Courtrai, de Bruges, de Tournai, en un mot, la moitié du pays fait connaître ici ses doléances ; la question devient en quelque sorte nationale ; le petit commerce est froissé dans ses transactions ; tout se fait au bénéfice des maltôtiers. Il faut donc trouver un moyen de sortir de cet état de choses. A la Bourse de Bruxelles on cote les pièces de 20 francs ; c'est un premier pas ; que le gouvernement fasse encore un pas ; qu’il reçoive l'or français dans ses caisses au cours indiqué par lui tous les mois.
Il pourrait aussi coter de la même manière et dans le même but, les ducats de Hollande, les souverains d'Allemagne, etc.
On ne veut point battre monnaie en Belgique ; ou dit aux contribuables : Payez en argent ; mais on ne bat point de monnaie d'argent parce que l'argent est trop cher ; d’un autre côté, on ne veut pas de monnaie d'or. (Interruption.)
Il a été battu cette année pour 600 millions d'or en France. Là on n'a pas horreur de l'or,
Je sais bien que la Banque a intérêt à conserver la circulation d'au-delà de 100 millions ; si les billets de banque étaient remplacés par de la monnaie d'or, la Banque perdrait l'intérêt de ces 100 millions.
Pourquoi ne prendrait-on pas l'étalon d'or, comme en Angleterre ?
En Angleterre, à côté de l'étalon or, on a une monnaie d'appoint. En France, l'or domine, mais on y a aussi une monnaie de billon, des francs, des demi-francs, etc. Ici vous n'avez absolument rien. Ce n'est pas étonnant ; l'Europe exporte deux fois plus d'argent qu'elle n'en reçoit.
Je dis, messieurs, que nous devons discuter cette question plus promptement que ne le demande M. le ministre ; il y a encore six budgets à examiner.
Vous voyez que nos travaux marchent lentement, excessivement lentement. S'il faut attendre que les budgets soient votés, les très nombreux pétitionnaires qui se sont adressés à nous devront patienter indéfiniment pour obtenir la satisfaction qu'ils attendent à bon droit depuis plusieurs années ; le cabinet doit savoir écouter les plaintes qui lui viennent de tous côtés, et il ne faut pas attacher une légère importance à ce fait que notre commerce, qui n'a guère que de l'or et du billon avec la France, s’élève à deux cent quatre-vingt-deux millions de francs. Si la France changeait de système monétaire, elle accorderait le temps moral nécessaire pour l'échange.
M. Tack. - Je ne puis admettre avec l'honorable M. Pirmez que la question n'est plus entière. Nous sommes entrés dans une nouvelle phase depuis une année que le gouvernement a fait connaîtra son opinion. Ce n'est pas sans motif sans doute que M. le ministre des finances a nommé une commission pour s'occuper de toutes les difficultés que comporte la question monétaire. Il ne s'agit pas seulement aujourd’hui de la question de l'or, mais de la question monétaire tout entière. Au reste, ces questions se lient intimement et se confondent. Je suis étonné que l'honorable M. Pirmez dise qu'il n'y a pas urgence Je lis en effet, dans son rapport, en ternes formels, que notre situation monétaire et grave et qu'il importe de s'en préoccuper.
Es -ce que, dans ces termes, nous pouvons accepter une remise indéfinie de la discussion de la question ? Je demande que la Chambre décide qu'elle s'occupe de cette question immédiatement après le budget des finances.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable M. Tack a incontestablement le droit d'adresser des interpellations au gouvernement et de chercher à connaître son intention. Mais il ne peut prétendre qu'une question soit à l'ordre du jour de la Chambre par cela seul que le ministre des finances a institué une commission qui lui a adressé un rapport, rapport que le ministre des finances a communiqué à la Chambre.
M. Tack. - Je ne prétends pas cela.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Que prétendez-vous alors ? Rien ne fait obstacle à ce que vous fassiez une proposition.
M. Tack. - Je ne dis pas que j'aie cette intention. Je veux exposer mon opinion.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je ne m'oppose pas à ce que vous exposiez votre opinion en temps opportun. Mais la Chambre n'est pas saisie d'une proposition quelconque ; il y a seulement des pétitions.
Certains particuliers se plaignent relativement à la monnaie d'or ; ils demandent que cette monnaie soit considérée comme monnaie légale en Belgique. Qu'est-ce que cela fait à la question de la pureté de l’étalon, de la monnaie d'argent ? Qu'est-ce que cela fait à la question de savoir si nous devons opérer quelque changement dans la valeur de notre franc, de notre demi-franc, si nous devons en faire une monnaie de billon ? Qu'est-ce que cela fait à la question de savoir si la monnaie de cuivre qui circule n'est pas dans de mauvaises conditions et doit être refaite.
Ce sont tous points dont s'occupe le rapport de l'honorable M. Pirmez et qui embrassent la question tout entière ; mais il est inutile de traiter ces matières, lorsque l'on n'est saisi que de la question spéciale du cours légal de l'or.
Nous traiterons cette question du cours légal de l'or.
L'honorable M. Pirmez a dit que la Chambre s'était déjà prononcée. Ce n'est pas le rapport que j'ai déposé qui a ouvert la question sur ce point. La commission n'a pas même été instituée pour examiner spécialement cette question ; elle l'a examinée incidemment. L'objet principal de son institution était de rechercher les moyens de conserver l'étalon monétaire tel qu'il est déterminé par la loi de 1850.
Ainsi ne donnez pas à l'objet en discussion une extension qu'il ne doit pas avoir.
Maintenant pour l'ordre du jour, je répète que la seule proposition acceptable est celle de fixer la discussion sur ces pétitions après celle du budget des finances, s'il n'y a pas d'autres rapports prêts sur les budgets.
M. Pirmez. - L'honorable M. Tack vient d'essayer de mettre les quelques mots que je viens de prononcer en contradiction avec le rapport que j'ai rédigé pour la commission des monnaies.
La Chambre s'occupe en ce moment exclusivement de la question de l'or ; j'ai dit qu'en présence des décisions prises sur ce point, une nouvelle solution n'avait rien d'urgent ; je ne crois pas qu'il y ait dans le rapport un mot d'où l'on puisse induire le contraire.
Mais la commission s'est surtout occupée de ce qui concerne la monnaie d'argent.
M. Tack. - Elle se lie intimement avec l'autre.
M. Pirmez. - Pas le moins du monde.
Il s'agit de savoir si vous aurez l'étalon d'or ou si vous conserverez l'étalon d'argent.
M. Rodenbach. - Je vous défie de rester dans le statu quo.
M. Pirmez. - Je crois que les observations de l'honorable M. Rodenbach prouvent assez qu’il y a dans ses idées une confusion complète sur cette matière.
L'honorable M. Rodenbach vient prétendre que parce que des personnes se plaignent et demandent le cours légal de l'or...
M. Rodenbach. - Il y a autre chose.
M. Pirmez. - Je renonce à répondre à l'honorable membre dont les interruptions me forceraient à aborder tout le débat.
Je me borne à constater qu'il n'y a pas la moindre contradiction entre ce que j’ai écrit et ce que j'ai dit.
Je crois qu'il faut s'occuper sérieusement de la question des monnaies d'argent, et qu'il importe que le gouvernement y porte, sans tarder, (page 63) toute son attention. Je n'ai pas écrit autre chose dans mon rapport ; quant au cours de l'or, j'ai dit que c'est une question résolue et que partant il n'y a pas urgence à s'en occuper.
M. Guillery. - Il me semble qu'il y a un moyen fort simple de concilier l’impatience, que je considère comme très légitime, des honorables membres qui demandent une prompte discussion avec les exigences de notre service.
La question des monnaies doit nécessairement se présenter à l'occasion du budget des finances. Evidemment on pourra, à l'occasion de ce budget, avoir une discussion sur les monnaies et l'avoir aussi large que l'on voudra.
Si l'on croit que la question monétaire est en quelque sorte indivisible, on pourra la discuter entièrement, et je trouverais assez naturel que la Chambre fût saisie de cette question, puisqu'elle préoccupe l'opinion publique.
Les honorables membres, donc, qui croient qu'on doit changer le système actuel, qui se portent les défenseurs de l'étalon d'or, auront occasion de développer leurs arguments.
Puisque nous sommes pressés de besogne, que nous avons à discuter les budgets et cette question qu'on considère comme urgente, et, je le crois, avec raison, commençons nos séances une heure plus tôt. Réunissons-nous à une heure. Comme nous ne devons pas nous réunir en section, cela ne nous coûtera pas trop de peine ; le budget des finances pourra être discuté d'une manière complète ; nous pourrons avoir la discussion la plus large sur la question monétaire, et examiner les autres budgets assez tôt au Sénat, comme on l’a très bien dit, le temps nécessaire pour les discuter à son tour.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il est incontestable qu'à l'occasion de la discussion d'un budget, les honorables membres de la Chambre peuvent adresser des interpellations au gouvernement, et soulever toutes les questions qui se trouvent à propos de discuter. Mais de ce que budget des finances doit être mis en discussion, il ne s’ensuit pas qu’il serait raisonnable, de la part de la Chambre, d’avoir à cette occasion, une discussion sur l’ensemble du système monétaire. Cela ne se rapporte pas au budget. Le budget contient un article relatif à la monnaie ; mais il s’agit d’une allocation pour payer les agents de la monnaie. Ce n’est pas là une disposition relative au système monétaire.
Je le répète, on traitera cette question si l'on veut. Mais il s'agit de savoir s'il serait raisonnable, de la part de la Chambre, d'avoir une discussion approfondie sur cette matière, lorsque tous les budgets restent à voter et que nous sommes arrivés au 19 novembre. Il y a un seul budget voté ; nous serons sans crédits au 1er janvier. Commençons par faire les choses indispensables, les choses urgentes ; exécutons la loi de comptabilité ; votons les budgets en temps utile. Ils ont été déposés dans les délais prescrits par la loi ; ils ont été déposés au mois de mars dernier, et à l'heure qu'il est, il n'y en a qu'un seul qui ait été voté.
J'insiste fortement dans l’intérêt du service public, dans l'intérêt de la régularité, pour que les budgets soient préalablement votés.
- La proposition de M. Vandenpeereboom tendante à ce que la discussion sur les pétitions relatives à la monnaie d'or ait lieu en même temps que la discussion du budget des finances, est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.
La proposition de M. le ministre des finances tendante à ce que cette discussion ait lieu après celle du budget des finances, pour autant qu'il n'y ait pas de rapports prêts sur d'autres budgets, est ensuite mise aux voix ; elle est adoptée.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Ruddervoorde, le 21 avril 1859, des habitants de Ruddervoorde demandent la canalisation d'un cours d'eau dit Riviertje, qui a sa source dans le canal de Gand à Bruges, passe la commune d'Oostamp, et traverse celles de Waerdamme et de Ruddervoorde, pour déboucher près de Thourout.
Même demande d’habitants d'Oostcamp et de Waerdamme.
Messieurs, votre commission a examiné les pétitions sur la canalisation de ce cours d'eau avec maturité. Mais elle a remarqué qu'il n'y a pas d'offre, qu’il ne se présente pas d'entrepreneur pour l'exécution de ces travaux. Les pétitionnaires voudraient que le gouvernement seul s'en chargeât.
Votre commission n'a pas cru pouvoir appuyer cette demande. Cependant vu l'utilité que présente toujours la création de nouvelles voies de communication, elle a l'honneur de vous proposer le renvoi des pétitions à M. le ministre des travaux publics.
M. Coppieters ’t Wallant. - Messieurs, je crois qu'outre le renvoi des pétitions à M. le ministre des travaux publics, il convient d'en prononcer également le renvoi à M. le ministre de l'intérieur. Comme vous avez pu le remarquer par le rapport sommaire qui vient de vous être fait, il s’agit ici d'un intérêt agricole, et sous ce rapport la question rentre également dans les attributions de M. le ministre de l'intérieur.
Je ferai du reste remarquer qu'au département de l'intérieur, on s'est déjà occupé de cette question, si les renseignements que j'ai obtenus sont exacts, dès l’année 1848, et l'on y considère la question comme très importante et comme méritant un examen sérieux.
Je demande donc que les pétitions soient renvoyées au département des travaux publics et à celui de l'intérieur.
- Le double renvoi est adopté.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Campenhout, 1859, le sieur Goossens prie la Chambre de le faire indemniser des pertes qu'il a éprouvées par suite des événements de guerre de 1830 et 1831.
Vous remarquerez, messieurs, que cette pétition se rapporte à une affaire déjà très ancienne, et il est probable que le pétitionnaire se sera adressé à plusieurs reprises au gouvernement, afin d'obtenir cette indemnité. Cependant comme il produit plusieurs certificats à l'appui de sa demande et qu'il paraît que le sieur Goossens a largement contribué à notre émancipation politique, votre commission, sans rien préjuger, vous propose le renvoi de cette requête à M. le ministre des finances.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition sans date, des exploitants de charbonnages, industriels, négociants et bateliers dans les arrondissements de Charleroi et de Namur, prient la Chambre de voter les fonds nécessaires à l'exécution des travaux d'approfondissement de la Sambre dans tout son parcours, de la frontière à Namur.
Messieurs, les pétitionnaires font valoir beaucoup d'arguments pour obtenir que ce travail, d'une utilité réelle, s'exécute dans le plus bref délai possible ; mais votre commission n'ayant pas devant elle des moyens d'appréciation qui lui permettent d'entrer dans le fond de cette question, elle se borne à vous proposer le renvoi pur et simple à M. le ministre des travaux publics.
M. de Montpellier. - La nécessité des travaux réclamés dans cette pétition n'est plus contestée aujourd'hui. En effet, dans le rapport sur divers travaux présenté dans la session précédente, au nom de la section centrale, par l'honorable M. Ernest Vandenpeereboom, nous lisons à la page 8 : « La section centrale est loin de méconnaître que d'autres travaux que ceux prévus au présent paragraphe pourraient être utilement entrepris pour améliorer la navigation sur la Sambre.
Dans le débat qui eut lieu sur les divers articles du projet de loi, le gouvernement, par l'organe de M. le ministre des finances, je crois, nous a promis formellement l'exécution des travaux de la Sambre, qu'il considérait comme le complément de ceux de la canalisation de la Meuse. J'ai pris acte de cette promesse, et je suis persuadé que le gouvernement voudra rester conséquent avec lui-même et continuer ses sympathies aux travaux projetés.
Je ne ferai pas ici l'énumération des avantages que l'approfondissement d'une voie navigable procure à ceux qui s’en servent ; ce serait, vis-à-vis de vous, messieurs, commettre un pléonasme dont je ne veux pas me rendre coupable.
Je prie donc la Chambre de prendre cette affaire en sérieuse considération et de lui accorder la solution la plus prompte possible. J'insiste même pour que le commencement des travaux soit voté dans cette session.
- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.
M. Hymans. - Pendant que la Chambre est encore en nombre, je prendrai la liberté d'appeler son attention sur une proposition qui a été faite tout à l'heure par l'honorable M. Guillery et qui a été passée sous silence. M. Guillery a demandé que la Chambre voulût bien décider qu'elle se réunirait une heure plus tôt. (Interruption.)
Je suis véritablement surpris de cette opposition, attendu que l'heure du règlement est midi et que le règlement dit même qu'en cas d'urgence on doit se réunir avant midi.
Depuis quelque temps la Chambre a pris l'habitude de se réunir à deux heures, de ne pas siéger le lundi et d'avoir une séance blanche ou à peu près le samedi ; je ne pense pas que ce système soit de nature à hâter l’expédition des affaires, ni surtout à ajouter beaucoup à la considération du régime parlementaire que l’on cherche à déconsidérer dans les pays voisins.
Je propose à la Chambre de décider qu'elle se réunira à l'avenir, tous les jours, excepté le mardi, à 1 heure.
M. Vermeire. - Je ne répondrai que par une seule observation à celles qu'a présentées l'honorable M. Hymans.
Il est vrai que le règlement fixe à midi l'ouverture des séances de la Chambre, mais un autre article du règlement dit que, dans chaque séance, on fixera l'heure de la prochaine réunion.
Nous ne pouvons donc pas décider que nous nous réunirons d'une manière permanente, soit à midi, soit à une heure.
Maintenant, messieurs, qu'y a-t-il à l'ordre du jour ?
Il n'y a pas de rapports faits, il n'y a pas beaucoup de questions à étudier. Pourquoi donc nous réunirions-nous plus tôt que d'habitude Evidemment le service public ne l'exige pas.
M. Muller. - Sans demander que la Chambee fixe d'une manière invariable l'ouverture de ses séances à une heure qui, néanmoins devrait être habituelle, je lui soumettrai des considérations que je crois de nature à attirer son attention sérieuse.
Il est des membres de cette assemblée qui n'habitent pas Bruxelles, qui n'y ont pas leurs familles, et qui font acte d'assiduité constante ; (page 64) ceux-là peuvent désirer, tout en étant prêts à se livrer à tous les travaux nécessaires du parlement et à tenir des séances supplémentaires en cas de besoin, d'avoir par semaine deux jours à consacrer à leurs affections de famille et à leurs intérêts.
Messieurs, les travaux de la Chambre ne seraient nullement entravés si un jour ouvrable par semaine, le lundi, il n'y avait séance qu'extraordinairement, en vertu d’une décision motivée sur des affairés urgentes.
Je pense avoir le droit de parler ainsi sans pouvoir être accusé de manquer de zèle, car je n'ai pas jusqu'ici manqué d'assister ni dans les sections ni dans la Chambre. Mais qu'arrive-t-il dans le système actuel ? Le samedi, vers la fin de la séance, il est impossible de décider qu'on ne se réunira pas le lundi, parce qu'on n'est plus en nombre pour délibérer. Plusieurs membres devant partir par les différents convois, qui se dirigent vers leurs localités, il en résulte que forcément, en vertu du règlement, une séance se trouve fixée pour le lundi ; or, le lundi vous avez généralement des séances blanches, et il m'est arrivé quatre fois de me rendre à Bruxelles pour me trouver à mon poste et de ne concourir qu'à dresser un procès-verbal de carence.
Dans ma conviction, il est très facile de concilier l'activité des travaux de la Chambre avec la mesure que je propose et qui consisterait uniquement à ce qu'il soit entendu que, sauf résolution contraire, il n'y aura pas séance le lundi.
Si l'on m'objectait que, le mardi, beaucoup de membres seraient absents, comme ils le sont aujourd'hui le lundi, je répondrais par une motion : c'est que tous les jours les noms des présents soient insérés au Moniteur et, au besoin, les noms des absents.
M. le président. - Je ferai remarquer que les deux propositions qui viennent d’être faites sont contraires au règlement. Le règlement dit à l'article 12, que le président indique à la fin de chaque séance, après avoir consulté la Chambre, le jour de la séance suivante et l'ordre du jour, lequel sera affiché dans la salle. Voilà pour la proposition de M. Muller. Le règlement ordonne au président de consulter la Chambre à la fin de chaque séance sur le jour de la séance suivante. Quant à la proposition de M. Hymans, le même article dit :
« Sauf les cas d'urgence, le commencement des séances est fixé à midi. »
Ainsi, à moins de décision contraire, c'est à midi qu'il faut se réunir et dès lors, on ne peut pas décider d'une manière générale qu'on se réunira à 1 heure.
M. Muller. - Messieurs, si j'ai présenté des observations dont la Chambre reconnaît la justesse, ce n'est pas par une fin de non-recevoir qu'on les écartera, je l'espère. (Interruption.)
Violera-t-on le règlement, parce que le samedi on décidera, non à la fin, mais au commencement de la séance, s'il y aura séance le lundi suivant ? Par suite du départ d’un assez grand nombre de ses membres, la Chambre n'est souvent plus en nombre dans la soirée, et dans ce cas le règlement actuel déclare que la séance suivante est fixée au lundi à midi.
M. Hymans. - Messieurs, je n'ai pas voulu le moins du monde modifier le règlement en faisant ma proposition sur laquelle, du reste, je n'insiste pas. Je pourrai, à chaque séance, demander que la séance du lendemain soit fixée à une heure.
M. le président. - M. Muller pourra aussi demander, chaque samedi, s'il y aura séance le lundi suivant.
M. Muller. - Je suis satisfait, du moment qu'on me permet de faire cette proposition ; mais je ne vois pas de contradiction dans le règlement, car ce serait une interprétation un peu judaïque : pourquoi, en effet, le bureau ne pourrait-il pas demander, au commencement de la séance du samedi, s'il y aura séance le lundi suivant, au lieu de le demander à la fin de la séance ?
M. le président. - J'avais l'honneur de faire remarquer qu'on ne pouvait, sans déroger au règlement, décider en principe qu'il n'y aurait pas de séance les lundis ; mais le samedi, on peut, au commencement de la séance, demander s'il y aura séance le lundi suivant.
- Plusieurs membres. - A mardi.
M. le président. - S'il n'y a pas d'opposition....
M. Guillery. - Messieurs, véritablement je ne comprends plus rien à nos discussions. On vient de discuter pendant une demi-heure le point de savoir ts l'on pourra fixer à un jour plus ou moins prochain la discussion de la question monétaire, discussion que plusieurs membres de la Chambre réclament avec instance. Je ne partage pas l'opinion des pétitionnaires ; mais je reconnais que dans les populations il existe le plus grand désir de voir la Chambre se prononcer de nouveau sur la question.
Nous venons de déclarer que d'ici aux vacances de Noël nous n'avons pas assez de temps pour discuter à la fois les budgets et la question monétaire, et on veut prendre un jour de vacance, on trouve extraordinaire que les séances commencent à une heure ! Messieurs, siégeons les lundis, et commençons nos séances à une heure ; à ce compte il n’y aura pas excès de travail ; nous aurons des vacances le 18 décembre, c'est bien assez. Nous avons déjà eu deux séances blanches.
M. Muller. - Messieurs, je m'aperçois que l'honorable M. Guillery n'a tenu aucun compte de la position des membres de cette assemblée qui viennent se consacrer aux affaires du pays et qui n'habitent pas, comme lui, Bruxelles, qui n'y ont pas leur foyer domestique.
Si la proposition que j'ai faite avait pu tendre d'une manière quelconque à entraver ou à retarder les travaux de la Chambre, je m'en serais abstenu.
Puisque je ne suis pas parvenu à le convaincre, j'ajouterai d'autres considérations que je n'avais pas encore fait valoir et que je recommande aux méditations de la Chambre.
Si, au moyen de six séances qui commencent à deux heures de relevée pour finir entre 4 heures et demie et 5 heures, vous comptez faire les affaires du pays beaucoup mieux qu'avec 5 séances d'une durée plus longue, vous êtes dans une erreur complète.
D'un autre côté, ne perdez pas de vue que si c'est une position honorable que celle de membre de la Chambre, elle n'est pas, à coup sûr, lucrative.
Il faut donc pouvoir maintenir, au sein de cette assemblée, les éléments de la bourgeoisie ; il faut que les électeurs puissent choisir dans ses rangs des représentants qui élèvent la voix en faveur de ses intérêts.
On admettra que les représentants ne possèdent pas tous de fortune telle qu'ils puissent transporter tous leurs familles, leurs pénates à Bruxelles ; on admettra aussi que lorsqu'ils réclament un seul jour par semaine pour leurs devoirs de famille et leurs intérêts, ce n'est pas trop, et que si l'on veut se livrer aux travaux parlementaires résolument, avec zèle, et d'une manière constante, le mardi, le mercredi, le jeudi, le vendredi et le samedi, les affaires du pays n'en souffriront pas.
Voilà comment je réponds aux observations de l'honorable M. Guillery. J'exprime avec franchise devant le parlement et devant le pays, cette opinion que je crois juste et conforme à l'esprit populaire de nos institutions représentatives, tandis que l’on devrait craindre, avec la pratique qui a lieu aujourd’hui, d'écarter de la Chambre tous ceux qui ne possèdent pas l'aristocratie des richesses, et qui tiennent à remplir consciencieusement le mandat législatif.
- La Chambre, consultée, décide qu'elle ne se réunira pas lundi prochain ; elle fixe sa prochaine séance à mardi.
M. le président. - A quelle heure la Chambre veut-elle se réunir mardi prochain ?
- Des membres. - A deux heures.
- D'autres membres. - A une heure.
M. Allard. - Messieurs, à quoi bon décider qu'il n'y aura pas de séance lundi, si on veut fixer la séance de mardi à une heure ? Il faudra que les membres, étrangers à Bruxelles, reviennent le lundi au soir ; la plupart des convois du matin n'arrivent qu'à une heure.
- La Chambre, consultée, fixe la séance de mardi prochain à deux heures.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée du 30 mars 1859, des propriétaires, à Bruxelles, demandent la révision de la loi sur le déguerpissement.
La question soulevée par les pétitionnaires n'est pas neuve ; elle a surgi plusieurs fois dans cette enceinte. La Chambre se rappellera qu’un de nos anciens collègues, l'honorable M. Lelièvre, avait déposé une proposition de loi tendante à modifier la législation sur la matière. Les pétitionnaires demandent que le gouvernement autorise par une loi spéciale les commissaires de police, après qu'une sommation verbale aura eu lieu, à faire effectuer le déménagement sous leurs yeux par les intéressés.
- L'orateur donne lecture de cette pétition.
Messieurs, votre commission n'a pas de proposition à vous soumettre à cet égard ; elle se borne à vous demander d'ordonner le renvoi pur et simple de la pétition à M. le ministre de la justice.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Saint-André, le 21 mars 1859, des habitants de la Flandre occidentale demandent qu’il soit pris des mesures pour améliorer le chemin de terre qui côtoie les remparts extérieurs de la ville de Bruges, depuis la porte d'Ostende jusqu'à la porte Maréchale.
Messieurs, votre commission a examiné cette pétition avec toute l'attention qu'elle comporte, mais je crois que c'est là une communication vicinale qui incombe aux administrations respectives des localités ou ces chemins vicinaux sont situés. Elle n'a donc pas pu émettre un avis favorable sur la demande des pétitionnaires. Cependant, vu qu'il pourrait y avoir utilité à empierrer ou paver ces chemins, elle s'est bornée à vous proposer le renvoi au ministre de l'intérieur.
- Cette proposition est adoptée.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Dadizeele, le 30 avril 1859, le sieur Lannoy, brasseur à Dadizeele, réclame l'intervention de la Chambre, pour qu’il soit pourvu aux places vacantes dans l'administration de cette commune.
Messieurs, le pétitionnaire se plaint de ce que des vacatures existent depuis plusieurs mois dans le conseil communal de Dadizeele, et sollicite l'intervention de la Chambre, pour qu'il soit pourvu aux places vacantes. Votre commission ignore si le gouvernement y a pourvu depuis, car la pétition date du 30 avril 1859. Il ne nous a pas été (page 65) donné de présenter le rapport plus tôt. La commission, dans le doute, propose le renvoi au ministre de l'intérieur.
- Cette proposition est adoptée.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée du 19 avril 1859, des meuniers dans les deux Flandres demandent que la loi leur permette de faire usage de balances romaines.
Par une autre pétition de 1859, des meuniers d'Anvers demandent que le gouvernement fasse de nouveau examiner la question.
Elle a été longuement débattue dans cette Chambre, le gouvernement a nommé des commissions qui ont fait des rapports ; des tempéraments ont été apportés par le gouvernement, votre commission se borne à vous proposer le renvoi au ministre de l'intérieur.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - C'est une affaire épuisé, on a donné délai sur délai, le renvoi est sans objet.
M. Van der Donckt, rapporteur. - D'honorables membres ont demandé un prompt rapport ; c'est qu'ils attachent de l'importance à la question ; pour leur donner une satisfaction, nous avons proposé le renvoi au ministre de l'intérieur.
- Cette proposition est adoptée.
M. Van der Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Pitthem, le 18 avril 1859, la dame Vermandere, supérieure et directrice de l'établissement charitable de Pitthem et de l'école dentellière qui en fait partie, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir décharge d'un droit de patente qui lui est imposé.
Messieurs, cette question, qui a été également longuement discutée dans le sein de cette Chambre, se présente aujourd'hui sous un autre aspect.
La pétitionnaire dit qu'elle n'est pas industrielle, qu'elle n'a pas un commerce de dentelles et que les certificats qui sont joints à sa pétition prouvent que des fabricants et des négociants en dentelles s'entendent directement avec les élèves de l'école, que ces fabricants sont patentés, qu'ils livrent le fil, la matière première pour faire la dentelle, ainsi que les dessins ou patrons que, par conséquent, c'est abusivement qu'on frappe la supérieure de l'établissement d'un droit de patente pour lequel elle ne réalise aucun bénéfice.
Dans cet état de choses, pour le cas où les faits articulés seraient exacts, la commission croit, sans rien préjuger, devoir proposer le renvoi au ministre des finances.
M. Muller. - Je ne comprends pas le but du renvoi au ministre des finances de la pétition d'une dame qui réclame l'intervention de la Chambre, pour être déchargée d'un droit de patente qui lui a été imposé. Nous avons en Belgique des lois qui tracent la voie des réclamations, en matière d'impôts, qui désignent les autorités appelées à statuer sur ces réclamations. Dans ces lois, je ne vois figurer nulle part le ministre des finances comme étant compétent.
Quand on vous a imposé une patente que vous croyez ne pas devoir, c'est à la députation permanente que vous devez adresser votre réclamation ; si elle a statué et que vous prétendiez qu'elle a violé la loi, le recours vous est ouvert devant la cour de cassation.
Ce n'est pas la première fois que je le dis dans cette enceinte, on abuse les pétitionnaires par des renvois aux ministres, qui n'ont pas à statuer ; ces pétitionnaires s'imaginent que la Chambre peut se substituer tantôt à l'administration publique, tantôt au pouvoir judiciaire, et, c'est ici le cas ; je le répète, une loi a chargé la députation de statuer sur les réclamations en matière de patente, sous le contrôle de la cour de cassation, et lorsqu'on n'a pas usé de ces garanties dans les délais prescrits, l'affaire est close.
Je défie qu'on me cite une disposition qui permette au ministre des finances de rembourser, de sa propre autorité, une somme ainsi légitimement exigée.
Je me résume : le renvoi proposé pourrait avoir pour conséquence de continuer à induire la pétitionnaire en erreur, je proposerai plutôt d’y substituer l'ordre du jour.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La question de la patente des dentellières s'est déjà présentée devant la Chambre, j'ai donné alors des explications complètes sur le droit ; j'ai aussi annoncé que des réclamations ayant été faites, j'ouvrirais une instruction, une enquête pour constater les faits. L'enquête a eu lieu, elle a compris, si j'ai bon souvenir, 663 établissements ; il est résulté de l'examen auquel on s'est livré, qu'un certain nombre d'établissements se trouvent dans les conditions prévues par la loi pour être exempts de la patente ; je viens de donner des instructions aux directeurs des contributions pour indiquer la marche à suivre en retraçant les principes dont l'application doit être faite aux divers établissements. C'est ce qui s'exécute en ce moment.
Le recours de la part des intéressés reste ouvert. Il pourra s'exercer, comme vient de le dire l'honorable M. Muller, devant la députation permanente et ensuite devant la cour de cassation. Mais comme il l'a fait remarquer aussi, je suis absolument sans pouvoir. La loi est là. Sur le fait on peut discuter. Le tribunal statuera. Le tribunal, c'est la députation permanente ; c'est enfin la cour de cassation.
M. Vermeire. - En présence des explications qui viennent d'être données par M. le ministre des finances, je crois pouvoir me borne à une seule observation.
Lorsqu'on est frappé d'une taxe que l'on croit n'être pas due, je pense qu'on peut avoir recours au gouvernement pour lui demander d'examiner si la loi est dûment appliquée et d'ordonner au besoin le remboursement de la somme indûment perçue. (Non ! non !)
- Un membre. - On doit s'adresser à la députation permanente.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Et c'est une grande garantie pour les contribuables.
M. Vermeire. - En ce qui concerne les écoles dentellières, je crois que, dans la plupart des cas qui se sont présentés, la patente n'était pas due. De plusieurs côtés, on a confondu les écoles dentellières avec les fabriques de dentelles ; c'est ce qui explique que plusieurs réclamations aient été adressées à la chambre et au gouvernement.
Mais les écoles dentellières se sont extrêmement développées dans les Flandres, où l'on ne trouvait pas d'autre occupation à donner aux ouvrières. Plutôt que de voir les enfants pauvres courir en vagabondant par les rues, on a cru qu'il était utile de leur donner quelque occupation. Les personnes charitables se sont réunies et ont créé des écoles d'apprentissage, où on leur a appris à faire de la dentelle.
Je crois, messieurs, qu'au lieu de décourager ces établissements, il faut encourager l'établissement de ces écoles d'apprentissage, surtout dans les communes où il n'y a pas suffisamment de travail pour les ouvriers. Le développement qu'ont pris les écoles d'apprentissage est une des causes principales de la cessation presque complète de la mendicité dans les Flandres.
Je ne discute pas le droit. Je sais que celui qui a des ouvriers travaillant pour lui et bénéficiant sur son commerce, est astreint à la patente. Mais d'autre part lorsque des écoles dentellières ne sont que des écoles d'apprentissage, je pense que la patente n'est pas due. J'engage donc toutes les personnes qui se trouveraient lésées, par la mesure qui a été prise, à s'adresser immédiatement à leurs juges compétents, à la députation permanente. C'est le seul but que j'ai eu en demandant la parole.
M. Tack. - Je n'entends pas entrer dans le fond du débat. Comme le dit M. le ministre des finances, cette question a été discutée dans une séance précédente. Mais je crois qu'il ne convient pas d'accueillir la pétition de la dame Vermandere par un dédaigneux ordre du jour.
Cette pétition date du 18 avril 1859. Elle vous a été adressée peu de temps après que cette question avait été débattue. Vous avez renvoyé les autres pétitions à M. le ministre des finances, pourquoi n'en feriez-vous pas de même de celle-ci ?
Je demande donc que la pétition soit renvoyée purement et simplement, et sans rien préjuger à M. le ministre des finances.
M. Muller. - Il n'a pas été dans mon intention d'attacher un caractère de dédain à l'ordre du jour. Je crois avoir assez clairement expliqué le but que j'avais en vue.
J'ai dit que si vous renvoyiez la pétition à M. le ministre des finances, vous égareriez encore d'autres pétitionnaires, et vous les égarerez de telle sorte, qu'ils laissent passer les délais pendant lesquels ils pourraient réclamer devant leurs seuls juges naturels. Voilà le grave inconvénient de tous ces renvois à MM. les ministres sur des objets dont la solution n'est pas de leur compétence.
Si l'on veut substituer le dépôt au bureau des renseignements à l'ordre du jour, je ne m'y oppose nullement.
M. Tack. - Je n'ai pas cru que l'honorable M. Muller voulait attacher à sa proposition une idée de dédain. Mais l'ordre du jour par lui-même a ce caractère... (interruption) ou est considéré comme tel.
M. Muller. - Je ne suis pas de cet avis.
M. Tack. - C'est pourquoi je préfère le dépôt au bureau des renseignements.
- Le dépôt au bureau des renseignements est ordonné.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Merxem, le 2 mai 1859, des habitants de Merxem demandent que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour faire exécuter les travaux de réparation de la route de communication entre la station du chemin de fer de l'Etat à Anvers et la partie nord de la province vers les cantons d'Eeckeren, de Brecht et vers la Hollande.
Même demande d'habitants d'Anvers.
II paraît qu'il s'est élevé une difficulté entre l'autorité provinciale et la ville d'Anvers. L'autorité provinciale se borne à signaler la divergence d'opinion entre le gouvernement et la ville d'Anvers relativement à la question de savoir à qui incombent les frais que nécessiteront ces travaux généralement reconnus urgents.
Votre commission n'a pas les éléments d'appréciation suffisants pour juger à qui incombe l'obligation de faire les travaux en question. Elle se borne à vous proposer le renvoi à M. le ministre des travaux publics.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Seraing, le 7 mai 1859, le sieur Iweins prie la Chambre d'améliorer la position des commissaires de police qui remplissent les fonctions de ministère public près des tribunaux de simple police.
C'est peut-être la centième pétition qui est adressée à la Chambre pour demander qu'on améliore la position des commissaires de police (page 66) qui remplissent les fonctions de ministère public près les tribunaux de simple police et de paix.
Votre commission, considérant qu'un projet de loi sur la réorganisation de l'ordre judiciaire est sur le point de nous être présenté (et il en était déjà question sous le prédécesseur de l'honorable ministre actuel), se borne à vous proposer le renvoi de la requête à M. le ministre de la justice.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition dotée de Schaerbeek, le 9 mai 1859, le sieur Vandenvenhuysen, séquestré à la maison de santé à Schaerbeek, demande à être mis en liberté ou tout au moins à être soumis à un examen de docteurs, pour constater son état mental.
Le pétitionnaire a été colloqué dans une maison de santé. Il paraît qu'il a des moments lucides, pendant lesquels il prétend être illégalement privé de sa liberté et il s'adresse à la Chambre pour obtenir son élargissement.
Votre commission, n'étant pas à même de juger de la position du sieur Vandenvenhuysen, vous propose le renvoi pur et simple de la pétition à M. le ministre de la justice.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition de Schaerbeek, le 3 mai 1859 des habitants de Schaerbeek demandent la réunion des faubourgs à la capitale.
Messieurs, il y a un dossier énorme de pétitions émanant de toutes les localités intéressées c'est-à-dire des faubourgs, qui demandent aujourd'hui la réunion à la ville.
Vous vous rappellerez que lorsque l'incorporation à Bruxelles du Quartier-Léopold a été demandée à la Chambre et obtenue, ces mêmes pétitionnaires s'opposaient de toutes leurs forces à la réunion. Aujourd'hui, revenus à de meilleurs sentiments, ils croient bien faire en demandant la réunion des faubourgs à la ville. Ils y voient des avantages sous le rapport de la bienfaisance, de la police, etc.
Votre commission, sans se prononcer sur la question, vous propose le renvoi pur et simple de ces pétitions à M. le ministre de l'intérieur.
- Ce renvoi est ordonné.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée d'Orchimont, le 30 avril 1859, le sieur Etienne, ancien facteur des postes du canton de Gedinne, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir un secours ou être réintégré dans ses fonctions.
C'est par mesure disciplinaire que le pétitionnaire a été révoqué de ses fonctions. Il s'adresse aujourd’hui à la Chambre. Le pétitionnement est libre. Mais nous n'avons pas pu apprécier les motifs qui ont exigé cette mesure disciplinaire, et votre commission ne peut que vous proposer le renvoi de la requête à M. le ministre des travaux publics.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par dépêche sans date, M. le ministre de l'intérieur transmet des explications sur la pétition du sieur Verbrugghe, se plaignant de l'arrestation de son fils mineur, et demande qu'il soit donné lecture de ces explications.
Messieurs, si la Chambre le désire, je lui donnerai lecture des explications de M. le ministre. Mais peut-être que la Chambre, dans le but de gagner du temps, pourrait en ordonner l'insertion aux Annales parlementaires, elle pourra ainsi mieux apprécier les explications de M. le ministre, qu'à une simple lecture fugitive.
Je conclus donc à l'insertion de ces explications aux Annales parlementaires.
- Ces conclusions sont adoptées.
La séance est levée à 3 heures.