(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1857-1858)
(page 985) (Présidence de M. Verhaegen.)
M. Crombez procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. Vander Stichelen lit le procès-verbal de la séance du 12 mai courant.
- La rédaction en est approuvée.
M. Crombez présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.
« Le sieur Mariage demande un congé de six mois pour son fils Paul, milicien au 1er régiment de lanciers. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Letoret réclame contre les prétentions du sieur Fafchamps à l’invention de la machine à traction directe. »
- Même renvoi.
« Le sieur Tulphick transmet copie de sa requête au Roi, tendante à ce que des poursuites soient dirigées contre les détenteurs des biens de la succession d'Isabelle Claesman. »
- Même renvoi.
« La dame Lehouque demande que la pension dont elle a joui à titre de veuve sans enfant du sieur Havard, ancien receveur des contributions, lui soit continuée. »
- Même renvoi.
« Le conseil communal d'Exaerde prie la Chambre d'accorder aux sieurs de Perre et de Rechter la concession d'un chemin de fer de Lokeren à Terneuzen. »
- Même renvoi.
« Le conseil communal de Wasseiges prie la Chambre d'accorder au sieur Delstanche la concession d'un chemin de fer d'Erquelinnes à Maestricht. »
« Même demande des membres du conseil communal de Poucet. »
M. Lelièvre. - Je demande le renvoi de cette pétition à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport. L'affaire a un caractère d'urgence.
- La proposition de M. Lelièvre est adoptée.
« Des instituteurs communaux dans le canton de Haeght demandent que leur position soit améliorée. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Andrieux, ancien maréchal des logis de la gendarmerie, demande la décoration de l’Ordre de Léopold. »
- Même renvoi.
« Les membres du conseil communal et des habitants de Hoogstraeten demandent fa prompte construction de la section du canal de la Campine comprise entre Turnhout et Anvers. »
- Même renvoi.
« La veuve Coppée réclame l'intervention de la Chambre pour que son fils Adolphe, milicien de la classe de 1857, obtienne un congé. »
- Même renvoi.
« Les époux Van Windekens demandent que leur fils Joseph soit libéré du service militaire. »
- Même renvoi.
« Le sieur Leclercq. ouvrier à Blandain, demande exemption du droit d'entrée auquel on veut soumettre un chariot construit en Belgique, qu'il a acheté au bureau de la douane française de Baisieux. »
- Même renvoi.
« Le sieur Roulans, militaire congédié pour, infirmité contractée au service, demande une pension. »
- Même renvoi.
« L'administration communale de Courtrai réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir la restitution des bâtiments et terrains de l'ancienne maison d’arrêt de cette ville. »
M. Tack. - Messieurs, je demande le dépôt de cette pétition sur le. bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à l'aliénation de quelques biens domaniaux.
-Adopté.
« Le sieur A.-H. Hessels, sous-officier au régiment du génie, né à Breda (Pays-Bas), demande la naturalisation ordinaire. »
-Renvoi à M. le ministre de la justice.
« M. le ministre de l'intérieur adresse à la Chambre deux exemplaires de la première livraison du tome VI des Annales de la commission royale de pomologie belge et étrangère. »
- Dépôt à la bibliothèque.
« M. le ministre de l'intérieur adresse à la Chambre un état de l'emploi des subsides de toute nature, alloués, en 1856, aux établissements d'instruction moyenne. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de l'intérieur pour l'exercice 1859.
« M. le ministre de h justice renvoie, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation du sieur A -G.-L. Rosbach, à Bruxelles. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« M. le ministre des travaux publics adresse à la Chambre 115 exemplaires du premier cahier, tome XVI des Annales des travaux publics.
- Distribution aux membres de la Chambre et dépôt à la bibliothèque.
« Le sieur J.-J. Van Doosselaere, à Gand, adresse à la Chambre, au nom de l'auteur, 110 exemplaires d'une brochure intitulée : Budget du ministère de l’intérieur pour l'année 1859. Observations sur le chapitre de l'enseignement moyen. »
- Distribution aux membres de la Chambre et dépôt à la bibliothèque.
M. de Moor, retenu à Mons par une indisposition, demande un congé de quelques jours. »
- Accordé.
L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :
« Article unique. Le traité d'amitié, de commerce et de navigation, conclu le 15 février 1858, entre la Belgique et la république du Salvador, sortira son plein et entier effet. »
La discussion générale se confond avec la discussion de l'article.
Personne ne demandant la parole, il est procédé à l'appel nominal,
Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 60 membres présents.
Ce sont : MM. de Paul, de Perceval, de Pitteurs-Hiegaerts, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, de Vrière, Dolez, H. Dumortier, Frère-Orban, Frison, Goblet, Godin. Grosfils, Jacquemyns, J. Jouret, Julliot, Lange, le Bailly de Tilleghem, C. Lebeau, J. Lebeau, Lelièvre, Loos, Magherman, Manilius, Mascart, Muller, Nélis, Neyt, Orban, Orts, Pirmez, Pirson, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Tack, Tesch, Thiéfry, Vanden Branden de Reeth, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Stichelen, Van Overloop, Wala, Allard, Coomans, Coppieters 't Wallant, Crombez, David, de Bast, de Boe, de Bronckart, H. de Brouckere, Dechentinnes, de Haerne, de Liedekerke, de Luesemans, de Naeyer et Verhaegen.
M. Manilius (pour une motion d’ordre). - Je demande la parole pour une motion d'ordre.
A la dernière séance que nous avons eue avant la vacance, j'ai pris la liberté grande d'interpeller MM. les ministres pour les prier de vouloir bien, dans la discussion générale du budget de la guerre, nous faire connaître la somme à laquelle s'élèvera la dépense à faire pour les fortifications autour d'Anvers. Je n'aurais pas soulevé cette question avant la discussion générale, si on n'en avait fait en quelque sorte la préface du budget de la guerre.
Je demanderai qu'ils veuillent bien nous faire quelques communications à cet égard. Déjà M. le ministre des finances nous a dit que les travaux à exécuter à Anvers feront partie d'une loi de travaux généraux à faire dans le pays pour lesquels un projet était préparé.
Je désirerais donc connaître l'importance des travaux spécialement affectés à la défense d'Anvers avant d'entrer dans la discussion du budget de la guerre.
J'espère que le gouvernement voudra bien répondre à ma demande et satisfaire à la promesse qu'il nous a faite.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, les travaux à exécuter à Anvers, tant pour la défense du pays que pour l'agrandissement de cette ville, s'élèvent, à la somme de vingt millions deux cent mille francs.
Le projet de loi que Je gouvernement avait annoncé dans votre (page 985) dernière séance est préparé, et d'après les ordres du Roi, je viens le disposer.
Je suppose que la Chambre désire que j'en donne lecture. (Oui ! oui !)
- M. le ministre donne lecture de ce projet.
(page 1001) « Léopold, Roi des Belges.
« A tous présents et à venir, Salut.
« Sur la proposition de nos ministres des finances, de l'intérieur, de la guerre et des travaux publics, et de l'avis de notre conseil des ministres,
« Nous avons arrêté et arrêtons :
« Notre ministre des finances présentera, en notre nom, à la Chambre des représentants, le projet de loi dont la teneur suit :
« Art. 1er. Il est accordé au gouvernement, pour l'exécution des travaux d'utilité publique ci-après désignés, les crédits suivants, savoir :
« Au ministère de la guerre :
« § 1° Pour travaux d'agrandissement de la ville d'Anvers et pour la continuation des travaux de défense : fr. 9,000,000.
« Au ministère des travaux publics :
« A. - Canaux, rivières, ports et côtes.
« § 2. Pour l'achèvement du canal de Deynze à la mer du Nord vers Heyst : fr. 1,225,000.
« § 3. Pour l'approfondissement du canal de Gand à Bruges : fr. 1,000,000.
« § 4. Pour l'élargissement de la deuxième section du canal de la Campine : fr. 1,300,000.
« § 5. Pour l'amélioration du port d'Ostende : fr. 600,000.
« § 6. Pour 1'établissement d'un port de refuge et la construction d'écluses à Blankenberghe : fr. 300,000.
« § 7. Pour l'approfondissement de la Sambre dans la partie comprise entre Mornimont et la frontière de France : fr. 1,000,000.
« § 8. Pour l'amélioration du régime de la Grande-Nèthe, de l'Yser et du canal de Plasschendaele et de Nieuport par Furnes à la frontière de France : fr. 500,000.
« § 9. Pour l'amélioration du régime des eaux de la Dendre : fr. 900,000.
« §10. Pour travaux à exécuter à l'Escaut supérieur, dans le but d'améliorer l'écoulement des eaux, la navigation et le halage : fr. 500,000.
« § 11. Pour la part de l'Etat dans la construction d'un aqueduc latéral à la Meuse, entre le bassin d'Avroi et le canal de Liège à Maestricht : fr. 210,000.
« B. - Chemins de fer.
« § 12. Pour le parachèvement des chemins de fer de l'Etat, savoir :
« Voie : fr. 2,500,000.
« Doubles voies : fr. 700,000.
« Stations et dépendances : fr. 8,115,000.
« Ensemble : fr. 11,115,000.
« § 13. Pour la construction d'un chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain par Cortenberg : fr. 3,500,000.
« C. - Bâtiments civils,
« § 14. Pour agrandissement du palais royal à Bruxelles : fr. 1,000,000.
« § 15. Pour le transfert, rue de la Loi, des ministères des travaux publics et de la justice : fr. 1,250,000.
« Au ministère de l’intérieur :
« § 16. Pour travaux de restauration et d'appropriation du palais de Liège : fr. 300,000.
« § 17. Pour appropriation de locaux et constructions nouvelles sur les terrains de l'ancienne cour du Musée à Bruxelles, affectées aux archives, musées, collections, etc. : fr. 800,000.
« § 18. Pour subsides destinés à des travaux d'assainissement : fr. 500,000.
« § 19. Pour subsides destinés à l'amélioration de la voirie vicinale : fr. 1,000,000.
« § 20. Subsides destinés à la construction et à l'ameublement de maisons d'école : fr. 1,000,000.
« Total : fr. 37,000,000.
« Art. 2. Le gouvernement est autorisé à contracter, aux conditions qu'il déterminera, un emprunt d'un capital effectif de trente-sept millions de francs.
« Un crédit de soixante et quinze mille francs est ouvert au ministère des finances pour couvrir les frais de négociation et d'émission des titras de cet emprunt.
« Ce crédit fera l'objet de l'article 28 du budget de la dette publique pour l’exercice 1858.
« Art. 3. § 1er. Les dépenses nécessaires au complet achèvement des travaux repris aux paragraphes premier, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 12, 13 et 17 de l'article premier seront couvertes par les ressources ordinaires de l'Etat.
« § 2. Les crédits affectés à ces dépenses seront rattachés, savoir :
« A l'exercice 1859 jusqu'à concurrence de 4,700,000 fr ; à celui de 1860, à concurrence de 4,500,000 fr. ; à celui de 1861, à concurrence de 4,200,000 fr. ; à celui de 1862, à concurrence de 3,800,000 fr. ; à celui de 1863, à concurrence de 3,400,000 fr. ; à celui de 1864, à concurrence de 2,900,000 fr.
« § 3. La répartition de ces crédits entre les paragraphes mentionnés ci-dessus, sera faite par arrêté royal.
« Art. 4. La présente loi sera obligatoire le lendemain du jour de sa promulgation.
« Donné à Laeken, le 25 mai 1858.
« Léopold.
« Par le Roi :
« Le ministre des finances, Frère-Orban.
« Le ministre de l'intérieur, Ch. Rogier.
« Le ministre de la guerre, E. Berten.
« Le ministre des travaux publics, Partoes. »
(page 986) M. le président. - Il est donné acte à M. le ministre des finances de la présentation du projet de loi dont il vient de donner lecture.
Ce projet et las motifs qui l'accompagnent seront imprimés, distribués et renvoyés à l'examen des sections.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai l'honneur de déposer un projet de loi qui approuve la convention conclue le 27 février 1858 au sujet de la résiliation du bail de l'établissement séricicole d'Uccle consenti le 8 avril 1841, en vertu de la loi du 16 mars précédent et de la vente des terrains, bâtiments et plantations que comprend aujourd’hui cet établissement.
- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation du projet de loi qu'il vient de déposer.
Le projet et les motifs qui l'accompagnent seront imprimés, distribués et renvoyés à l'examen des sections.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai l'honneur de déposer également un projet de loi ouvrant un crédit de 258,620 fr. 69 c, pour payer la dot de S. A. R Mme la princesse Charlotte, conformément au traité de mariage conclu le 1er juin 1857, entre S. M. le Roi des Belges et S. M. l'empereur d'Autriche.
- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation du projet de loi qu'il vient de déposer.
Ce projet et les motifs qui l'accompagnent seront imprimés et distribués et renvoyés à l'examen des sections.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai l'honneur de déposer deux projets do loi portant règlement définitif des exercices 1849 et 1850.
- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation des projets qu'il vient de déposer.
Ces projets et les motifs qui les accompagnent seront imprimés, distribués et renvoyés à la commission permanente des finances.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai l'honneur de déposer un projet de loi relatif aux expropriations pour assainissement des quartiers insalubres.
- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation du projet de loi qu'il vient de déposer.
Ce projet et les motifs' qui l'accompagnent seront imprimés, distribués et renvoyés à l'examen des sections.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai l'honneur Ce déposer deux autres projets relatifs à des délimitations de communes.
- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation des deux projets qu'il vient de déposer.
Ces projets et les motifs qui les accompagnent seront imprimés, distribués et renvoyés à l'examen de commissions spéciales à nommer par le bureau.
M. le président. - Parmi les projets qui viennent d'être présentés, il en est qui concernent des règlements de comptes. Je propose à la Chambre d'en ordonner, le renvoi à la commission des finances.
- Cette proposition est adoptée.
M. le président. - Quant au projet de loi relatif à des délimitations de communes, je propose aussi d'en ordonner le renvoi à une commission spéciale, conformément aux précédents, afin de ne pas encombrer les travaux des sections.
- Cette proposition est également adoptée.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai eu l'honneur d'annoncer à la Chambre, dans sa dernière séance, que le projet de loi que le gouvernement a préparé et dont je viens de donner lecture serait imprimé dans l'intervalle des vacances. Je tiens en main la première épreuve de ce projet et de ses annexes et il s'écoulera probablement encore 48 heures avant sa distribution.
M. le président. - De sorte que les sections ne pourront être convoquées que lundi.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si les sections voulaient bien s'occuper immédiatement du projet de loi spécial relatif aux expropriations pour travaux d'assainissement, elles pourraient en terminer l'examen avant d'aborder celui du projet de loi général des travaux' publics.
M. le président. - Quand pourra-t-il être distribué ?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Demain.
M. le président. - Les sections seront donc convoquées pour demain. Nous reprenons l'ordre du jour.
M. de Terbecq. - Messieurs, j'ai lu dans le rapport sur le budget du ministère de la guerre, pour l'exercice 1859, que, par suite des discussions qui ont eu lieu, dans des sections, sur les dangers véritables que présentent les poudrières, trop rapprochées des habitations, ou situées dans l'intérieur des villes, la section centrale a signalé au gouvernement les plaintes que soulèvent ces dépôts de poudres. Dans sa réponse, M. le ministre de la guerre a objecté que les places fortes ne peuvent rester dépourvues de leurs approvisionnements en poudres et munitions, et qu'il ne pourrait en conséquence être question d'une évacuation totale ou partielle de magasins.
Le gouvernement a fait connaître en outre que, si l'on devait en temps de paix reléguer les poudres dans les ouvrages extérieurs des places, à la moindre prévision de guerre il faudrait les rentrer dans les magasins actuels et qu'il en résulterait alors des dangers plus graves que ceux dont on se plaint ; car, dit-il, le transport précipité d'une grande quantité de poudres et munitions sous l'influence de circonstances alarmantes, offrirait plus de chances d'explosion que le séjour des mêmes poudres dans des magasins construits avec soin pour cette destination et gardés avec des précautions tellement minutieuses, qu'il ne paraît pas possible de les augmenter.
Cette réponse du département de la guerre ne donne aucune espérance de voir disparaître en temps de paix les poudres qui se trouvent dans les poudrières des villes fortes. Je recommanderai néanmoins à M. le ministre de la guerre, de prendre des mesures pour qu'en temps de paix les poudres ne soient pas trop accumulées dans les magasins rapprochés des habitations. Les malheurs que l'on a eu plusieurs fois à déplorer, ces dernières années, dans quelques pays, par suite des explosions de poudrières, doivent persuader le gouvernement de faire tout ce qui est possible pour tranquilliser les habitants des villes fortes.
Quand il y aura lieu de faire des changements aux travaux de fortification à Termonde ou d'en étendre le cercle, je prierai M. le ministre de la guerre de faire examiner la question de savoir si, tout en maintenant la sécurité de la forteresse, on ne pourrait pas établir d'autres poudrières plus éloignées de la ville et les placer par exemple dans les plaines que bordent l'Escaut ou la Dendre.
J'appelle sur ce point aussi toute l'attention du gouvernement.
M. Lelièvre. - La section centrale, dans le rapport que nous discutons en ce moment, a exprimé le vœu de connaître si le gouvernement a définitivement arrêté le système défensif annoncé depuis longtemps.
A cette occasion, je crois devoir appeler l'attention du ministère sur la nécessité de prendre une résolution en ce qui concerne la place de Namur. Les fortifications qui entourent la ville n'ont plus la moindre utilité. En présence des travaux qu'a nécessités l'établissement des divers chemins de fer qui aboutissent à notre ville, il est pénible de voir subsister un état de choses qui est obstatif à tout progrès industriel et à l'agrandissement de la cité, sans qu'il en résulte le moindre avantage sérieux pour l'intérêt général.
Tous les hommes compétents reconnaissent que depuis l'établissement des chemins de fer il est impossible de maintenir un cordon de fortifications entourant la ville, qui ne peut plus présenter la moindre résistance.
L'état de choses créé par le chemin de fer constitue réellement ce qu'on appelle, en termes de l'art, le troisième parallèle et on ne peut penser sérieusement à empêcher l'entrée de l'ennemi en ville.
Les anciennes fortifications sont donc devenues sans objet, sans aucune utilité ; elles ne donnent lieu qu'à des dépenses frustratoires, tandis qu'elles sont un obstacle au développement de la cité.
J'appelle donc l'attention particulière du gouvernement sur cette question qui intéresse à un haut degré l'avenir de la ville de Namur.
Il est également important qu'on règle d'une manière équitable tout ce qui concerne les servitudes militaires qui paralysent le droit d’élever des constructions dans un certain rayon avoisinant les places fortes.
Ce régime réclame d'importances améliorations. Il est certain que l'ordre de choses en vigueur compromet, sans utilité pour l'Etat, des intérêts privés qui doivent être protégés et comprime l'essor de l'industrie.
J'espère que le gouvernement prendra à cœur d'établir un régime compatible avec le progrès dont la réalisation est le but de ses constants efforts.
Enfin, messieurs, la nécessité d'un nouveau Code pénal militaire en harmonie avec nos mœurs et nos institutions est généralement reconnue. Nous sommes encore régis par la législation hollandaise, qui n'a rien de commun avec les besoins de notre civilisation et les principes libéraux qui président à l'administration de la justice. Déjà la France nous a devancés en cette matière. J'espère que le ministère ne perdra pas de vue un objet important qui mérite de figurer au nombre des mesures libérales dont il se propose de doter le pays.
En terminant, j'appelle de nouveau l'attention spéciale du gouvernement sur la nécessité de faire cesser les dépenses considérables qui résultent du maintien des fortifications dont l'inutilité est incontestable. Cet état de choses compromet la prospérité des villes et paralyse le mouvement commercial. C'est ainsi que les fortifications de Namur sont une véritable calamité pour cette ville, tandis que leur existence est extrêmement dispendieuse pour le trésor.
Le ministère fera chose éminemment utile, dont tous les hommes du progrès lui sauront gré, s'il fait disparaître des entraves si préjudiciables à toutes les améliorations dont le besoin urgent ne peut être contesté.
M. Thiéfry. - Je me crois obligé de présenter quelques observations, afin que M. le ministre de la guerre ne suppose pas que la Chambre entière partage toutes les opinions émises dans le rapport de la section centrale.
La première et la quatrième section émettent le vœu que la solde du (page 987) soldat soit augmentée, que la somme consacrée à l'habillement de. la troupe soit majorée. Pour réaliser ce vœu, l'Etat serait entraîné dans de bien fortes dépenses, et je trouve déjà le chiffre du budget de la guerre beaucoup trop considérable : j'ai présenté, dans la séance du 14 janvier 1851, un tableau d'où il résulte que, proportionnellement à la population, il est le plus élevé de tous les pays ; on y verra également qu'avec la même somme d'argent, on entretient ailleurs plus de troupes qu'en Belgique. Si enfin ou compare les soldes du soldat des différentes armées, la comparaison sera à l'avantage du soldat belge ; je ne connais pas de pays où le soldat est aussi généreusement payé qu'en Belgique. Il y a même très peu d'années qu'une commission composé de cinq officiers, présidée par M. l'intendant en chef de l'armée, avait proposé, sur les soldes, des réductions qui devaient amener une économie annuelle de plus d'un demi-million.
On alloue au fusilier 52 centimes par jour pour solde et 18 centimes pour l'habillement : ces deux allocations ont été réunies, et les ministres de la guerre fixent la somme à retenir pour l'habillement. Il en est qui ont ordonné que le soldat verse 20 centimes par jour à sa masse, d'autres 22, 23, 25, 26 et même 28 centimes. Plus le soldat verse à sa masse, moins le prêt est élevé. La diminution des deniers de poche est par conséquent provoquée principalement par le ministre même. Que l'on donne à l'homme un habit pour 2 ans, un pantalon pour un an et ainsi du reste, on aura une solde plus élevée.
Ou réclame aussi une augmentation pour l'habillement de la troupe, et l'on ajoute à l'appui de cette opinion qu'aucun militaire servant dans l'infanterie ne peut plus apurer sa masse sans faire un sacrifice qui est en moyenne de 40 francs.
Il y a positivement de l'exagération dans ces paroles ; cependant je ne veux pas les contester, je les suppose vraies, et je soutiens que, même dans cette situation, ce n'est pas à une augmentation de la première mise qu'il faut avoir recours ; il y a d'autres moyens à employer. D'abord empêcher tous les changements d'uniforme qui augmentent les dépenses du soldat ; puis, comme je viens de le dire, adopter pour l’habillement de la troupe le mode en usage en France, en Prusse, en Autriche, dans toutes les armées enfin, sauf dans l'armée hollandaise. On n'aura pas alors besoin d'augmenter l'allocation pour la première mise ; on trouvera au contraire une économie des plus considérable.
Je lis à la page 2 du rapport de la section centrale : « La 4ème section demande que, pour le service de santé un comité d’officiers supérieurs de santé soit formé, avec la mission de soumettre à M. le ministre de la guerre les propositions à l'avancement des officiers de cette branche de l'armée. »
Plus loin, la section centrale dit :
« Le service de santé a donné lieu à une discussion. Plusieurs membres ont demandé que l’on établît au département de ta guerre un bureau, exclusivement chargé de soigner les intérêts et de défendre le personnel du service de santé. Les hommes capables éprouvent de éloignement pour cet important service, parce qu'aujourd'hui il n'y a ni contrôle, ni garantie. Toutes les armes ont leur division spéciale au département de la guerre ; le service de santé seul est exclu de ce bénéfice. »
Je crois utile, pour éclairer quelques membres de cette Chambre, d'indiquer la marche suivie pour les officiers de santé. Le grade le moins élevé est celui d'adjoint, on ne peut aujourd'hui l'obtenir sans être docteur en médecine et en chirurgie : on a ainsi l'assurance d'avoir des hommes instruits ; et remarquez bien, messieurs, que cela n'existe qu’en Belgique.
En France, en Hollande et ailleurs cette condition n'est pas imposée. Pour devenir médecin de régiment, il faut avoir subi un examen. Lorsqu'il s'agit d'avancement, le ministre de la guerre a donc toute garantie pour ce qui concerne la science ; il a en outre, pour s'éclairer, les rapports des colonels sur la conduite et sur la manière dont les officiers de santé font le service dans les régiments ; M. le ministre a enfin les propositions de l’inspecteur général du service de santé, comme il a celles des inspecteurs généraux de l’infanterie, de la cavalerie, de l'artillerie et du génie. Vouloir que les propositions d'avancement soient faites par un comité, c'est exiger que le ministre porte la plus grande atteinte à la discipline militaire. Et d'ailleurs pour motiver une semblable mesure, on ne saurait pas citer une seule injustice, et en voici la raison.
L'avancement a lieu conformément à la loi : pour les officiers subalternes moitié à l'ancienneté, moitié au choix ; et pour les officiers supérieurs, entièrement au choix. Je viens de dire qu'aucun médecin adjoint n'était admis maintenant dans le corps d'officiers de santé, sans être docteur en médecine et en chirurgie ; mais il existe encore quelques officiers qui ne sont point docteurs dans ces deux branches, ils ont commencé leur carrière avant, ou peu après 1830. Ils n'obtiennent leur avancement qu'à l'ancienneté seulement. Quant à ceux qui possèdent le diplôme de docteur en médecine et en chirurgie, tous participent à l'avancement au choix ; or cet avancement au choix a toujours été donné au plus ancien ; une seule fois on s'en est écarté, et d'après les renseignements que j'ai obtenus, cette exception a eu lieu parce que l'officier n'a pas voulu quitter Tournai ou il avait sa clientèle.
Il est donc très facile de s'assurer qu'il n'y a jamais eu un grade accordé à la faveur : aussi je défie que l’on cite un seul médecin qui ait été lésé dans ses droits à l'avancement.
A la demande de former une division spéciale au département de la guerre, M. le mini are a répondu que cela n'existe pas pour le personnel des autres armes, comme l'a supposé la section centrale ; M. le ministre aurait pu ajouter que, pendant le ministère du général Willmar, on a établi on bureau particulier pour le service de santé ; et au bout de 5 à 6 mois, on en a reconnu les inconvénients et on l'a dissous.
Il faut, dit la section centrale, soigner les intérêts et défendre le personnel du service de santé !... C'est une grande erreur de croire que ces intérêts ont été négligés. Il me suffira, pour en convaincre ceux qui ont des doutes à cet égard, de leur dire que dans aucune armée les médecins n'ont un traitement aussi élevé qu'en Belgique. Ainsi en France, un médecin divisionnaire reçoit 5,460 francs ; ce grade correspond à celui de médecin principal qui a un traitement de 6,300 fr. Le médecin d'hôpital a en France 3,540 fr. ; et en Belgique le médecin de garnison reçoit 5,500 francs ; le médecin de régiment a en France 2.590 fr., et en Belgique 4,650 fr., le médecin adjoint reçoit en France 1,860 fr., et en Belgique 2,500 fr. Dans les traitements indiqués ici pour la France, les indemnités de logement et d'ameublement sont comprises.
Il est juste d'ajouter que pour n'admettre dans ce corps que des docteurs en médecine et en chirurgie, il a bien fallu accorder des traitements plus élevés ; mais en revanche on n'y introduit que des officiers d'une certaine capacité. Pour s'assurer que les hommes capables n'éprouvent pas d'éloignement pour entrer dans ce service, que des modifications ne sont nullement nécessaires pour les y attirer, on n'a qu'à prendre l'annuaire militaire ; on ne verra aucune lacune dans les cadres, pas une seule place vacante ; il y a en outre plus de 80 élèves inscrits et attendant une nomination de médecin adjoint ; ce nombre est même tellement supérieur aux besoins du service, que l’on est obligé de surseoir à toute nouvelle admission d'élève.
Je lis encore dans le rapport de la section centrale : « Pour relever le service de santé, n'y a-t-il pas lieu d'introduire quelques réformes ? Ainsi, pourquoi ne donnerait-on pas un grade plus élevé au médecin de régiment, celui de major, etc. ? »
Je pense avoir prouvé que toutes les mesures sont prises pour donner à l'armée l'assurance que l'on ne reçoit dans le corps d'officiers de santé, que des hommes qui présentent toute garantie sous le rapport scientifique ; aussi jouit-il d'une considération justement méritée : d'un autre côté les traitements sont plus élevés que partout ailleurs, pas une seule place n'est vacante, et les besoins du service, quant au recrutement, sont assurés pour plus de 10 ans ; il n'y a donc aucun motif pour changer l'état des choses. Il faudrait, dit-on, créer 28 officiers supérieurs de plus ; nous en avons déjà 12 sur un effectif de 127, c'est un dixième. En Hollande sur 132 il y a 7 officiers supérieurs ou un dix-neuvième.
En France le corps d'officiers de santé est de 1,090 et on n'y compte que 35 officiers supérieurs, c'est-à-dire un trente-et-unième. Ces comparaisons démontrent évidemment que la proposition ne peut pas être adoptée.
Il n'y a, à mon avis, qu'une seule chose à faire pour les médecins, c'est de respecter leurs services, de profiter des connaissances et de l'expérience qu'ils ont acquises, et de ne pas les mettre à la retraite uniquement parce qu'ils ont un âge déterminé. On conservera ainsi, comme le dit très bien la section centrale, des hommes qui sont chargés d'un des plus graves et des plus sérieux intérêts de l'armée.
M. H. de Brouckere. - Messieurs, le rapport de la section centrale sur le budget de la guerre est très laconique, et j'en félicite cette section. Le budget de la guerre n'est plus aujourd'hui qu'une loi d'application, depuis que l'armée a été organisée par la loi d'une manière définitive.
Mais, de même que l'orateur qui vient de se rasseoir, j'ai été frappé des passages que j'ai lus dans le rapport sur le service de santé de l'armée. A en croire la section centrale, « les hommes capables éprouveraient de l'éloignement pour ce service » ; à l'en croire, il serait urgent de prendre des mesures pour le relever. On ne doit relever que ce qui est abaissé, je me demande s’il est vrai que le service de santé militaire soit tombé dans un tel état d'abaissement, qu'il soit nécessaire de prendre des mesures pour le relever.
Eh bien, je n'hésite pas à dire que c'est le contraire qui est vrai. Le personnel du service de santé de l'armée est un corps véritablement d'élite, c'est un corps modèle et il est considéré comme tel, non seulement en Belgique, mais encore à l'étranger. Je crois pouvoir ajouter que, dans aucun pays, il n'existe un corps médical aussi bien composé, aussi bien organisé, d'abord parce que tous les membres qui le composent (il y a très peu d'exceptions) ont passé leurs examens de docteur en médecine et en chirurgie, avec distinction.
En second lieu pour arriver aux grades, supérieurs, il faut passer des examens d'une sévérité presque incroyable. Ensuite parmi les membres du corps dont je parle, il se trouve plusieurs écrivains dont les ouvrages sont lus avec avidité en Belgique et au-dehors. Ajouterai-je que le quart des membres de l'Académie de médecine de Belgique appartient au corps médical de l'armée ? Ajouterai-je que parmi ces membres il en est plusieurs qui appartiennent à l’Académie de médecine de Paris ?
Maintenant, messieurs, si j'en venais à parler des services rendus par le corps médical de l'armée, je vous signalerais ce seul fait que les trois plus grands fléaux qui, sévissaient sur l'armée belge comme sur plusieurs autres armées, s'ils n'ont pas disparu, sont arrivés à des proportions extrêmement minimes : c'est la galle, l'ophtalmie militaire, et une troisième maladie que je n'ai pas besoin de nommer.
(page 988) Je le répète, donc, messieurs, c'est à tort que la section centrale a présenté le service de santé unitaire comme ayant besoin d'être relevé ; c'est à tort encore que la section centrale a dit ou plutôt a répété après une section, que les hommes capables éprouvaient de la répugnance pour ce service. Cela est complètement inexact. D'abord il y a, comme je viens de le dire, un grand nombre d'hommes éminemment capables dans le service de santé militaire et j'oserais défier que l'on me citât des hommes capables qui auraient manifesté de la répugnance pour ce service.
De tout cela je conclus que ce qui avait besoin d'être relevé, ce n'est pas le service de santé militaire, mais le passage du rapport de la section centrale auquel j'ai répondu.
M. Rodenbach. - J'ai écouté avec attention les honorables préopinants. Je partage en grande partie leur opinion en ce qui concerne le service de santé de l'armée Mais un honorable député de Bruxelles nous a dit que plusieurs sections, notamment la première et la quatrième, ont demandé que l'on majorât encore le budget de la guerre.
Lorsque nous avons discuté, il y a quelques mois, le précédent budget, j'ai cité des chiffres que je ne répéterai pas. Je vous ai dit que le produit des trois contributions principales, le foncier, le personnel et les patentes, s'élèvent à 32,500,000 fr. et que les dépenses du budget de la guerre, y compris les pensions militaires, s'élèvent à 36 millions ; et que nos trois principales ressources, nos trois principales branches de contributions ne suffisent pas pour payer le budget de la guerre. Je ne puis dès lors partager l'opinion de quelques sections qu'il faudrait encore augmenter certains traitements. Je crois au contraire qu'il faudrait penser à de sérieuses économies.
M. le ministre des finances vient de nous présenter un projet de loi portant une dépense de 20,200,000 fr. pour travaux de fortifications autour de la ville d'Anvers et dans ce même projet de loi il est question d'autres travaux dispendieux qui oblige le gouvernement à faire un emprunt de 36 millions. Nous sommes déjà en présence d'une dette de 636 millions qui exige des intérêts énormes. Nous allons contracter une nouvelle dette. Ce sont toujours des augmentations, et si nous ne songeons pas à faire des économies, il faudra finir par augmenter les impôts. Je crois, messieurs, que les contribuables ne sont pas très disposés à supporter de nouvelles charges. Nous payons déjà des sommes considérables à l'Etat ; ajoutez à cela les droits d'octroi, abonnement, charges provinciales et locales, tout cela réuni est un impôt exorbitant.
L'honorable ministre de la guerre avait témoigné le désir de défendre lui-même son budget ; je regrette que l'état de sa santé l'en ait empêché. J'aurais eu encore différentes autres observations à lui présenter.
On nous a parlé, dans une précédente séance, de la présentation d'une loi ayant pour objet d'adoucir les charges de la milice. Cet adoucissement est nécessaire et je pense qu'on s'en occupe au ministère de l'intérieur ; j’espère que dans la prochaine session on nous soumettra un nouveau projet.
Il faut sérieusement penser à la réforme des lois de milice. La France a fort adouci sa législation sur la conscription et a assuré à ses soldats des avantages considérables. Les avantages du système français sont évidents au point de vue militaire. Le maréchal Vaillant a fait disparaître ce trafic honteux, le remplacement militaire, et a assuré l'avenir des sous-officiers et soldats de toutes les armes. Une dotation est créée dans l'intérêt de l'armée sous la surveillance de l'Etat, et 22,000 personnes, un septième des hommes qui tirent au sort payent chacun 2,000 francs au gouvernement pour s'exempter du service. Par ce système d'exonération, on assure un sort aux sous-officiers et soldats qui, après 25 années de service, ont une pension de 365 fr. par an.
Je ne dis pas, messieurs, qu'il n'y ait rien de mieux à faire, mais il est certain qu'en France on sait comment il faut s'y prendre pour organiser une bonne et belle armée, puisqu'elle passe pour la première de l'Europe.
Je répète, messieurs, que nous devons absolument entrer dans une nouvelle voie, car il est incontestable que notre système de milice est une énorme charge pour les familles privées de fortune, et dont bien souvint les fils doivent par leur travail subvenir aux besoins de leurs parents.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Notre honorable collègue le ministre de la guerre espérait assister à la discussion de son budget ; il en avait le vif désir ; ce matin il s'est senti dans un état de santé qui ne lui a pas permis de se présenter aujourd'hui à la Chambre. Il m'a chargé d'exprimer ses regrets et ses excuses à l'assemblée.
Je répondrai quelques mois à l'honorable préopinant.
Il s'est enquis des intentions du gouvernement au sujet du projet de loi relatif à la milice, je dirai que le projet de loi est préparé.
Je me suis entendu avec mon collègue de la guerre ; le projet sera soumis à une commission mixte composée de fonctionnaires, de spécialités de l'ordre civil et de l'ordre militaire. J'espère qu'à l'ouverture de la prochaine session nous pourrons déposer ce projet de loi. La fin de la cession actuelle sera, je pense, assez chargée pour que nous n'apportions pas des projets de loi nouveaux d'une certaine importance.
L'honorable préopinant a parlé de l'élévation du budget de la guerre ; je crois que ses observations sont un peu tardives.
Elles eussent été opportunes au moment où la Chambre s'est occupée de l’organisation de l’armée, organisation pour laquelle, si je ne me trompe, l'honorable M. Rodenbach a voté.
L'honorable membre a trouvé aussi que la Belgique payait beaucoup d'impôts. Je pense qu'une pareille observation n'est pas non plus à sa place : la Belgique paye beaucoup moins d'impôts que la plupart des autres pays. En outre, depuis de longues années on n'y a pas créé de nouveaux impôts, sauf la loi sur les successions. Or, cet impôt a produit des résultats tellement utiles, qu'aucun membre de cette Chambre ne viendrait, je pense, en demander la suppression. Si les ressources de la Belgique augmentent, c'est par suite de l'accroissement de la prospérité publique qui exerce une heureuse influence sur le revenu lui-même.
C'est aussi parce que nos ressources augmentent, grâce à la prospérité publique, que le gouvernement peut venir vous proposer de décréter l'exécution de grands travaux publics, travaux qui tourneront encore au profit du trésor en venant accroître les ressources du pays.
D'autres honorables membres ont bien voulu prendre la défense du service de santé qui avait donné lieu à des objections de la part de la section centrale ; je n'ai rien à ajouter aux considérations qu'ont présentées les honorables MM. Thiéfry et H. de Brouckere.
Je demande pardon à la Chambre, si je n'entre pas dans de plus longs détails ; moi-même, je ne suis pas dans un état de santé qui me permette de prendre une part très active à la discussion.
M. de Perceval. - Messieurs, en ma qualité de rapporteur, je vais résumer la discussion générale.
L'honorable M. Vanden Broeck de Terbecq a exprimé le désir de voir disparaître des places fortes, au moins en temps de paix, les dépôts de poudre.
Dans le rapport que j'ai eu l'honneur de faire au nom de la section centrale, se trouvent exposés les motifs, péremptoires à mon avis, qui doivent amener chez l'honorable membre la conviction qu'il est impossible de faire droit aux vœux qu'il manifeste.
Il faut bien, après tout, que les populations de nos places fortes acceptent les conséquences de la position faite à la ville qu'ils habitent, et qu'ils se résignent à subir les conséquences matérielles d'une bonne défense éventuelle du pays !
Il ne faut pas que les habitants des places fortes caressent uns illusion et se bercent de chimères ; je comprends leurs désirs ; mais il est impossible au département de la guerre d'y faire droit.
Messieurs, les délibérations de la section centrale ont particulièrement porté sur l'organisation du service de santé ; à l'unanimité de ses membres, elle a fût sienne l'observation émise par la quatrième section dont l'honorable M. Pirson était rapporteur ; elle a soumis à M. le ministre de la guerre la question de savoir s'il n'y avait pas lieu d’introduire des modifications dans le service tel qu'il fonctionne actuellement et de le relever, pour qu'il réponde à la haute mission qui lui incombe.
Elle n'a rien fait de plus, elle n'a rien fait de moins.
Et tout d'abord qu'il me soit permis de le dire : la personnalité de l'honorable inspecteur du service de santé n'est pas en jeu ; les observations consignées dans le rapport n'ont nullement eu pour but d'atteindre cet officier supérieur dans sa délicatesse, dans son talent, voire même dans son génie. Nous avons pris une position plus digne de la législature ; nous ne nous sommes pas préoccupes de la question de personne ; nous nous sommes exclusivement occupés du principe, c'est-à-dire du service considéré en lui-même, et pour lui-même. Nous nous sommes demandé : Y a-t-il opportunité d'apporter quelques modifications dans le régime de santé ? Tel qu'il est organisé aujourd'hui, répond-il à la juste attente du pays ?
Eh bien, quoi qu'en ait dit l'honorable M. Thiéfry, quelques vives qu'aient été les récriminations de l’honorable M. de Brouckere, nous persistons à croire qu'il y a lieu de changer le régime actuel, dans une certaine mesure.
L'honorable M. Thiéfry m'a, pour ainsi dire, interpelé personnellement ; et, commentant une phrase du rapport, il m'a sommé en quelque sorte d'indiquer les lacunes qui existent dans le service de santé. Ces lacunes, je vais les énumérer et je pense que mon honorable collègue regrettera bientôt lui-même d'avoir insisté avec tant d'assurance sur la défense qu'il a prise du régime actuel.
La première et la plus sérieuse lacune que je signale au gouvernement et sur laquelle j'appelle la sérieuse attention de la Chambre, c’est la non observance des lois et règlements.
Je tiens en mains un arrêté qui porte la date du 5 janvier 1831, et qui n'est pas abrogé. Il traite de l'organisation du personnel du service de santé ; j'y lis un article 24 ainsi conçu :
« Les médecins et pharmaciens en chef, ainsi que les médecins principaux, se réuniront tous les ans sous la présidence de l'inspecteur général du service de santé, au jour à fixer par le commissaire général de la guerre, pour délibérer sur les besoins du service et les modifications que l'expérience pourrait exiger d'y introduire. Ils se réuniront, en outre, extraordinairement chaque fuis que le commissaire général de la guerre le trouvera convenir dans l'intérêt du service. »
Voilà un langage bien explicite ; une règle de conduite très nettement tracée à M. l'inspecteur général.
Vous l'avez entendu, messieurs, tous les ans, les officiers supérieurs se réuniront, sous la présidence de l'inspecteur, pour délibérer sur les. intérêts de ce service.
Eh bien, nous disons à M. le ministre de la guerre : « Il existe un page 989) arrêté qui n'est pas exécuté, qui dort, on ne sait trop pour quels motifs, dans les cartons du département de la guerre. S'il est utile, pourquoi ne pas en exiger l'application, la mise en vigueur ? S'il est inutile, rapportez-le. Mais aussi longtemps qu'il n'est pas remplacé par toute autre disposition, pourquoi permettre qu'il ne soit pas observé ?
Le ministre de la guerre de cette époque qui a introduit ce règlement dans l'organisation du service de santé, s'est efforcé d'atteindre un but : il a voulu que tous les ans on délibérât sérieusement, utilement, en dehors de tout esprit de parti et de toutes considérations personnelles sur les intérêts du service.
Ce règlement, messieurs, n'a été mis en exécution qu'une seule fois, en 1846 ou en 1847 ; je ne saurais pas bien fixer la date.
Pourquoi ne pas continuer à réunir tous les ans les officiers supérieurs de cette branche importante de notre armée ? En élevant une prétention de cette nature et en soumettant cette observation à M. le ministre de la guerre, y a-t-il là de quoi froisser qui que ce soit ? La section centrale est-elle donc si coupable, quand elle demande l'exécution d'un arrêté qui n'est pas abrogé et qui favorise le service de santé dans une large et salutaire mesure ?
Je passe à une autre lacune, à laquelle j'ai fait aussi allusion dans mon rapport ; il s'agit encore une fois d'une disposition ministérielle qui n'est pas non plus observée.
Le 3 décembre 1849, M. le ministre de la guerre prit un arrêté par lequel M. l'inspecteur général était autorisé à ne proposer à l'avenir, comme médecins de régiment, pour les régiments d'élite et des guides, que des officiers de santé de ce grade, qui seront dans le cas d'être promus des premiers au grade de médecin de garnison, et comme médecins de bataillon, pour les mêmes corps ainsi que pour l'école militaire, que ceux des officiers de cette catégorie qui appartiendront à la première classe, et qui, ayant subi l'examen de médecin de régiment, peuvent espérer d'être élevés des premiers à ce dernier grade. Or, cette disposition ministérielle n'a pas été appliquée. En 1854 et en 1855, lorsque les médecins de régiment aux guides et au régiment d'élite ont été nommés, on a choisi les deux plus jeunes médecins de régiment pour ces places de choix et stables de la garnison de Bruxelles, au lieu d'y appeler les deux plus anciens ou ceux qui peuvent espérer devenir sous peu médecin de garnison. Je voudrais savoir pour quels motifs l'on a été à l’encontre du texte formel des dispositions ministérielles dans cette circonstance.
Je n'entends froisser personne ni contester le talent de qui que ce soit ; mais il doit m'être permis de défendre ici les intérêts et le mérite du médecins plus anciens que les titulaires actuels, et qui, parce qu'ils résident en province, sans relation directe avec l'inspection générale, ne sauraient être oubliés quand il s'agit des positions de choix.
Encore une fois, je le répète, je ne m'occupe pas ici des personnes ; je ne me préoccupe que de l'exécution des règlements, des arrêtes et des questions de justice distributive que l'on doit respecter, quelle que soit la position que l'on occupe. Est-ce là, je le demande, tomber dans des exagérations ? Ne peut-on plus, sans froisser une individualité qui veut, en quelque sorte, réclamer pour ses actes les bénéfices de l'irresponsabilité et de l'inviolabilité, examiner les défectuosités du service médical, tel qu'il est en vigueur aujourd'hui ?
D’honorables membres se sont élevés contre la création, au département de la guerre, d'un bureau spécial chargé de surveiller et de défendre les intérêts du service sanitaire. Nous soutenons que pour prévenir tout abus, et dans le but d'éviter cette espèce de découragement et de froissement qui existe dans le personnel de ce service, il importe d'organiser un bureau spécial au département de la guerre. Nous pouvons sans inconvénient revenir aux anciens errements. Sous le ministère de M. le général Willmar, MM. Lepage et Merchie étaient détachés dans ce but au département de la guerre. Pourquoi ne pas revêtir à ce qui a été pratiqué très utilement à cette époque ?
Je suis étonné que l'inspecteur général ne soit pas le premier à engager le ministre à rétablir ce bureau ; cela lui éviterait bien des ennuis, peut-être même des appréciations erronées de sa conduite.
Je passe au personnel du service médical, et je soutiens que les cadres ne sont pas complets. Le grade de colonel est supprimé de fait ; car il n'y a pas de médecin en chef.
L'honorable M. Thiéfry nous disait tout à l'heure : Ouvrez l'Annuaire et vous verrez qu'il n'y a pas une seule vacature ; je lui en signale une ; elle est très importante.
M. Thiéfry. - Cette place est réservée pour l'état de guerre.
M. de Perceval, rapporteur. - C'est une lacune très importante, je le répète, car si l'inspecteur général venait à se retirer, ce serait un lieutenant-colonel qui deviendrait d'emblée général pour remplacer l'inspecteur.
Un honorable orateur a soutenu que jamais le service médical militaire n'avait été en souffrance ; mais, messieurs, ai-je besoin de vous rappeler qu'il était tellement en souffrance, il y a deux ans, qu'il a fallu voter de nouvelles dispositions législatives pour amener les jeunes médecins dans le service de santé et pour remplir les vides qui existaient dans les cadres ? La Chambre doit se rappeler que l'initiative de ces mesures a été prise par M. le général Greindl qui en soutenait l'urgence, parce que, disait-il, le personnel était loin d'être au complet.
Si en ce moment les cadres n'offrent plus de vacatures, ou peut hardiment l'attribuer aux mesures adoptées à cette époque.
M. Thiéfry. - Je ne m'occupe que de l'état actuel.
M. de Perceval. - Je maintiens ma première observation, et je dis que si l'inspecteur venait à quitter demain le service, vous devriez donner le grade de général à un lieutenant-colonel, parce qu'il n'existe plus de colonel.
La loi concernant le service de santé porte qu'il y aura 4 médecins principaux. Ils existent, en effet, mais ils ne résident pas dans les chefs-lieux des 4 divisions territoriales.
L'honorable M. Henri de Brouckere a pris une part très active à la discussion de cette loi, il a défendu avec chaleur les intérêts du service médical militaire, il nous a trop habitués à son éloquence pour que j'aie besoin d'en parler. Aussi, suis-je très étonné de l'entendre critiquer aujourd'hui une partie du rapport qui rentre dans l'opinion qu'il a émise en 1847. A cette époque, il s'est élevé avec une grande énergie dans le sens des idées que la section centrale a consignées sommairement dans son travail.
Je passe sous silence les discours prononcés alors par l'honorable membre ; je me contente d'y renvoyer mes honorables collègues ; ils viennent à l'appui de l'opinion de la section centrale avec tant de force, que quand j'ai entendu l'honorable député de Mons demander la parole à l'ouverture de cette discussion, j'ai cru qu'il allait appuyer les vœux de la section centrale.
Messieurs, nous avons quatre divisions territoriales ; la loi sur le service sanitaire de l'armée a créé quatre médecins principaux ; ils doivent se trouver au siège des quatre divisions territoriales, à Anvers, à Liège, à Gand et à Mous.
Telle était la pensée du gouvernement, et voici comment s'exprimait, dans la séance du 26 janvier 1847, le ministre de la guerre, le général Prisse, en préconisant ce système admis par la Chambre :
« Ces médecins principaux se trouvant de fait aux chefs-lieux des divisions territoriales, il importe de leur accorder les moyens de surveillance dévolus aux directeurs de l'artillerie, du génie et de l'administration. L'échelon du grade se trouverait mieux justifié qu'il ne l'est aujourd'hui, et des rapports constants d'inférieur à supérieur imposeraient aux premiers une vigilance plus active, en même temps qu'il permettrait d'obtenir de ces derniers le concours du contrôle que l'inspecteur général ne peut exercer que d'une manière fort incomplète, malgré le zèle le plus louable. »
Et plus loin, dans la même séance :
« Dans le service de santé de l'armée, le gouvernement a cru pouvoir se borner (…), pour chaque division territoriale, à un médecin principal (…) »
Je demanderai maintenant à l'honorable M. Thiéfry si nos quatre médecins principaux résident aux chefs-lieux des quatre divisions territoriales ? Pourquoi n'y a-t-il pas à Liège un médecin principe ? Pourquoi n'y a-t-il pas à Mons un médecin principal ? Et pour quels motifs s'en trouve-t-il deux à Bruxelles où il ne doit en résider aucun ?
S'il y avait un bureau spécial au département de la guerre en dehors de l’inspection générale, tous ces abus n'existeraient pas, ou au moins le personnel de ce bureau pourrait-il les signaler à l'attention de M. le ministre de la guerre.
M. Thiéfry. - Les questions de garnison sont du domaine administratif.
M. de Perceval. - C'est le pouvoir législatif qui a créé les quatre médecins principaux, se basant sur les considérations émises par M. le ministre de la guerre de cette époque pour arrêter à 4 le nombre des médecins principaux. Et je viens de vous donner l'opinion de M. le général Prisse à l’appui de son système.
Je désire qu'il y ait au département de la guerre un bureau spécial chargé du service sanitaire de l'armée, pour qu’il y ait moins de favoritisme dans les positions ; pour qu'on donne les positions de choix, les avantages de la stabilité, les services faciles, les belles positions qu’amènent les régiments d'élite et les dépôts aux plus méritants, aux plus zélés et qu'on ne méconnaisse pas l'ancienneté. On fera disparaître ainsi plus d'un sujet de mécontentement qui existe dans le personnel de ce service.
A tort ou à raison, on croit qu'il y a des favorisés et des victimes. Eh bien, que l’on ait un contrôle permanent au département de la guerre, et que l'on appelle tous les ans les médecins principaux à délibérer sur les intérêts du service sanitaire de l'armée, sous la présidence de l'inspecteur général, ainsi que le veut l'arrêté du 5 janvier 1831.
Tous les ans les inspecteurs généraux discutent et contrôlent les propositions faites séparément. L'on veut ainsi entourer le ministre de toutes les garanties nécessaires pour asseoir un jugement impartial. Ce qui se pratique pour l’infanterie, la cavalerie et les armes spéciales, pourquoi donc ne pas l’adopter pour le service sanitaire de l'armée ? Est-ce que la discipline souffre de ce que les propositions d'un général sont discutées tous les ans dans la réunion des inspecteurs généraux ?
Vous n'avez à la tête du corps médical qu'un seul homme qui dispose de tout : déplacement, assignation et partage du service, mutations, avancement, faveurs, récompenses, etc., etc. ; tout est livré à l'appréciation, à l'arbitraire, il faut bien dire le mot, d'un seul homme, dont l'action s'exerce sans contrôle aucun. Eh bien, quel danger peut-on (page 990) trouver à permettre aux médecins principaux de se réunir tous les ans et de produire leur contingent de lumières et de connaissances ? Mais, messieurs, on trouverait dans l'institution de cette espèce de conseil supérieur des garanties qui manquent actuellement au corps médical.
Eh, messieurs, est-ce donc une chose si extraordinaire et si nouvelle que nous demandons ? Mais cela existe en Angleterre, en Prusse, en France. Tous les ans, les médecins principaux s'y réunissent, discutent les intérêts du service sanitaire de l'armée, font au ministre de la guerre les propositions qu'ils jugent utiles, et je ne pense pas que la discipline militaire en souffre dans aucun de ces pays.
Messieurs, la section centrale demande à l'honorable chef du département de la guerre qu'il examine aussi la question de savoir s'il n'y a pas lieu d'introduire quelques changements dans les grades accordés aux médecins militaires.
Ainsi, elle pense que l'on peut élever au grade de colonel les médecins principaux, au grade de lieutenant-colonel nos sept médecins de garnison. Quant aux 28 médecins de régiment, on pourrait les diviser en deux catégories et accorder à ceux de la première, composée de 14 médecins, le grade de major. Je crois, bien que cette expression ait paru froisser l’honorable M. de Brouckere, que cette mesure contribuerait puissamment et efficacement à relever le corps médical de notre armée.
M. H. de Brouckere. - Je commence par déclarer d'une manière bien certaine que je ne sois nullement en contradiction aujourd'hui avec ce que j'ai dit en 1847. Mais cela importe fort peu à la Chambre. Ce qui est important, c'est de savoir si aujourd'hui encore mes assertions sont fondées.
Eh bien, tout ce que vient de dire M. le rapporteur de la section centrale me confirmerait, si c'était nécessaire, dans la pensée que j'ai eu parfaitement raison ; car il n'a pas dit un seul mot d'où il résulte que le service de santé militaire soit abaissé ; il n'a pas dit un seul mot d'où il résulte que les hommes capables éprouvent de la répugnance pour le service de santé militaire.
Qu'a fait M. le rapporteur de la section centrale ? Il a cherché à vous démontrer que le service de santé militaire pouvait laisser à désirer dans son organisation. Voilà la seule chose que l'honorable membre a, je ne dis pas prouvée, mais cherché à démontrer. Eh bien, en supposant qu'il en soit ainsi, en supposant que ce serait une bonne mesure de réunir les chefs du service sanitaire à certaines époques, en supposant que ce serait une bonne chose de nommer dès à présent un médecin en chef de l'armée ; en supposant qu'il y ait eu dans les nominations quelque chose à redire, ce que j'ignore, est-ce que tout cela prouverait que le service de santé a besoin d'être relevé, qu’il est dans l'abaissement, que les hommes capables ont de la répugnance pour ce service ? En aucune manière.
Je laisse à M. le ministre de la guerre le soin d'examiner si des réunions périodiques des principaux membres du service sanitaire doivent avoir lieu ; je n'y attache, pour ma part, aucune espèce d'importance. Je lui laisse le soin de décider s'il faut, en temps de paix, nommer un médecin en chef de l'armée ; il était entendu, si je ne me trompe, qu'il ne serait pourvu à cette place que si la guerre devenait imminente. Faut-il revenir sur cette décision ; et convient-il que le gouvernement pourvoie dès à présent à cette place ?
Je n'y fais, pour ma part, aucune espèce de difficulté. Mais il est un point sur lequel il m'importe de dire un mot.
M. 1e rapporteur de la section centrale représente ici, comme on l'avait fait en section centrale, le service sanitaire comme manquant de toute espèce de contrôle au département de la guerre. Or, je vois dans le rapport même la réponse de M. le ministre de la guerre à cette assertion . Voici comment est conçue cette réponse.
« L'influence de l'inspecteur général du service de santé est de la même nature que celle des inspecteurs généraux de l'artillerie, du génie, etc., avec cette différence que l’avancement des officiers de santé dépend aussi des rapports des chefs militaires sur leur zèle, leur exactitude dans le service, leur manière d'être à l'égard des malades, etc.
« Les notes respectives de l'inspecteur général du service de santé et des chefs de corps, des généraux de brigade et des inspecteurs généraux de troupes, sont centralisées à la division du personnel, et le ministre les examine avec la même impartialité que celles qui concernent les autres armes. »
Voilà, messieurs, la réponse de M. le ministre de la guerre. Maintenant veut-on que ce contrôle, que M. le ministre présente comme étant le même que pour les autres armes, soit rendu plus sévère ? J'appelle moi-même sur ce point l'attention de M. le ministre de la guerre et je l'engage à prendre, s'il y a lieu, les mesures qu'il croira utiles pour donner une entière satisfaction à tous les officiers du service de santé. Mais, messieurs, pour l'honneur de l'armée et du pays. tenons toujours pour certain qu'aujourd'hui le corps du service de santé de l'armée est composé d'hommes extrêmement recommandables et par leur conduite et par leurs capacités.
M. Thiéfry. - Après les observations que vient de présenter l'honorable M. de Brouckere, il me restera peu de chose à dire pour répondre à l'honorable rapporteur de la section centrale.
Il paraît que les lacunes signalées par le rapport sont en réalité bien minimes. Que l'on place ou que l'on ne place pas dans le régiment des grenadiers ou dans celui des guides des officiers qui sont des premiers à obtenir de l'avancement, c'est là, me semble-t-il, un fait auquel il serait bien difficile d'attribuer la valeur d'un grief sérieux, alors surtout, chacun le sait, que les officiers de santé tiennent à la garnison où ils se trouvent, à cause des relations qu'ils y ont établies et de la clientèle qu'ils se sont créée.
L'honorable M. de Perceval se plaint de ce qu'il n'y a point de médecin en chef. Si le service n'en souffre pas, pourquoi en nommer, pourquoi faire cette dépense ? On n'a jamais fait un grief au département de la guerre de ne pas avoir rempli les cadres des officiers généraux. Pendant bien des années le budget de la guerre a contenu l'allocation nécessaire au traitement de lieutenants généraux et de généraux majors dont les places étaient vacantes, et je ne sache pas qu'on ait réclamé pour qu'on remît ces officiers dans les cadres d'activité. Quand le service marche convenablement, il importe peu qu’il y ait quelques grades non pourvus d’emploi et, comme l’a très bien dit l’honorable M. de Brouckere, la place de médecin en chef est réservée pour le cas où l’armée devrait être mise sur le pied de guerre.
M. le rapporteur s'est prévalu d'un règlement plus ou moins ancien, pour supposer qu'il y avait obligation d'envoyer les officiers supérieurs du service de santé dans certaines garnisons. L’honorable M. de Perceval a oublié que la dernière loi qui a été faite pour l'organisation du service de santé, est la loi de 1853, et que dit-elle ? Que le corps d'officiers de santé est composé d'un inspecteur général, d'un médecin en chef, de quatre médecins principaux, de sept médecins de garnison, etc. Mais elle ne fixe pas la résidence. Nulle part on ne prescrit la composition des garnisons. Cela rentre dans les attributions du pouvoir exécutif ; c'est au ministre de la guerre à agir sous sa responsabilité.
Messieurs, l'honorable rapporteur a prononcé un mot que j'ai entendu avec peine parce qu'il ne saurait point citer un seul fait à l'appui de son opinion, il a parlé de favoritisme. Il n'y a pas de corps où il y ait moins de favoritisme que dans le service de santé de l'armée. J'ai prouvé très clairement que jamais un grade n'avait été accordé à la faveur, et M. le rapporteur ne l'a pas contesté ; quant aux décorations, sauf pour les cas d'épidémie dangereuse, elles ont toujours été données au plus ancien ; parce que, une fois que chacun a passé son examen et que l'on fait bien son service, il n'y a pas de raison pour en proposer un autre. Le mot de favoritisme n'a donc ici aucune signification et on ne doit prononcer ce mot qu'avec les preuves en main. Je n'en dirai pas davantage.
M. Dolez. - Messieurs, ayant eu l'honneur de présider la section centrale qui a examiné le budget de la guerre, vous trouverez tout naturel que, sans prendre part à un débat qui porte sur des matières auxquelles je suis peu initié, je vienne restituer à l'opinion émise par la section centrale, sa véritable portée que mes honorables collègues et amis, M. H. de Brouckere et M. Thierry ont complètement méconnue..
Il n’est pas entré dans la pensée de la section centrale, ni dans la pensée d'aucun de ses membres de considérer le service de santé de l'armée belge comme un service abaissé. Loin de là, messieurs, c'est à cause de son importance, c'est à cause de l'intérêt tout spécial qu'elles portent à ce corps et à la considération dont elles entouraient les hommes distingués qui y figurent, que la section centrale l'a signalé d'une manière toute spéciale à l'attention de M. le ministre de la guerre. Ce serait donc, messieurs, faire porter la pensée de la section directement contre son but que de l'interpréter comme le faisaient tout à l’heure mes honorables collègues. Nous n'avons adressé de blâme à personne, nous n'avons critiqué aucun fait, mais, au nom de l'importance du service auquel se trouve confiée la vie de nos soldats, nous avons, par simple question, demandé à M. le ministre de la guerre s'il ne croyait pas que l'organisation d'un comité consultatif au département de la guerre pût donner des garanties à cet important service ? Dans ce même ordre d'idées, et pénétrés que nous étions de la valeur des médecins de l'armée, nous avons demandé à M. le ministre d'examiner si les grades attribués aux membres du service de santé étaient à la hauteur du mérite des hommes qui figurent dans ses rangs et à l’importance de la mission qu'ils avaient à remplir.
Je demande comment, en posant ces questions, la section centrale aurait pu motiver d'une manière sérieuse et méritée l'interprétation que mes honorables collègues ont donnée à l'œuvre de la section centrale. La section centrale n'a point avancé que des abus ni des injustices auraient été commis dans la collation des places ou dans la marche du service. Mais elle a pensé qu'il était possible de faire mieux encore dans l'intérêt du service et dans celui des hommes distingues qui le composent. Le rapport de la section centrale signale, par exemple, à M. le ministre de la guerre la question de savoir s'il ne serait pas utile de donner aux médecins de régiment le grade de major, comme tous les soldats lui en donnent le titre.
Il a paru à la section centrale que le grade de capitaine n'était pas en harmonie avec l'importance du médecin de régiment, avec les conditions de savoir, d'expérience et d'ancienneté requises pour atteindre cette position ; elle a de plus pensé qu'il existait une véritable anomalie à donner au médecin de bataillon, après un certain nombre d’années de service, le même grade de capitaine, avec cette seule différence de la deuxième à la première-classe. La section centrale, sans résoudre (page 991) la question, veuillez-le remarquer, car jamais section centrale ne se montra plus modeste, plus prudente dans son travail, s'est bornée à demander à M. le ministre de la guerre s'il ne croyait pas qu'il serait utile, dans l'intérêt du service de santé de l'armée, de donner le grade de major aux médecins de régiment ?
Cette demande n'est point inspirée par une injuste défiance dans le mérite de nos médecins militaires, mais la section centrale ne fait que proclamer une vérité que nul ne contestera, quand elle dit, suivant les paroles textuelles de son rapporteur, « que les hommes de science et d'un talent réel ne peuvent s'y trouver dans une trop forte proportion, et que dût-on les attirer en donnant aux médecins des grades plus élevés que ceux que l'on confère aujourd'hui, encore ne faudrait-il pas hésiter un instant à adopter cette mesure, parce qu'il s'agit, dans l'occurrence, d'un des plus graves et des plus sérieux intérêts de l'armée. »
Je dois donc répéter en terminant, messieurs, que MM. Thiéfry et de Brouckere ont mal saisi la pensée de la section centrale. En s'occupant du service de santé de l'armée, elle a montré toute la sollicitude dont elle l'environnait, et les hommes distingués que ce service compte en grand nombre dans ses rangs ne peuvent y trouver qu'un témoignage de la manière élevée avec laquelle nous apprécions leurs talents et leurs soins pour l'intérêt si précieux de la santé de nos soldats.
M. Loos. - M. le rapporteur, répondant à un honorable député de Termonde à propos des réclamations soulevées dans la plupart des sections au sujet des dépôts de poudre, a traité d'une manière que je regrette les plaintes qui se sont fait jour. Il a dit que les villes de guerre ne pouvaient se méprendre sur leur situation, qu'elles devaient en prendre leur parti, c'est-à-dire que le danger qu'elles couraient, elles devaient le subir.
Messieurs, je crois au contraire qu'il ne faut pas faire courir aux places de guerre des dangers inutiles. Après les épouvantables catastrophes qui se sont produites depuis quelques années, je crois qu'il y a lieu de s'occuper un peu de ce qu'il convient de faire, quant aux dépôts de poudre en temps de paix. Les places fortes ont assez de dangers à courir en temps de guerre, sans les exposer, en temps de paix, à des dangers inutiles. Je crois donc que les plaintes qui ont été élevées dans les sections ne sont pas dénuées de fondement... (Interruption) J'entends dire par M. le rapporteur que ces plaintes sont exagérées. Je ne le pense pas. De quoi se plaint-on ? Je vois, entre autres, que la sixième section signale le danger des dépôts de poudre à l'intérieur des villes.
Eh bien, messieurs, est-il raisonnable, en temps de paix, d'avoir des dépôts de poudre à l'intérieur des villes ? Il y a dans toutes les places fortes des ouvrages avancés, des locaux situés dans un rayon assez éloigné pour que là une explosion ne puisse pas produire des désastres comme ceux que nous avons eu à déplorer dans ces derniers temps.
On a dit qu'il y aurait alors, en cas de guerre, des transports à effectuer, qui seraient plus dangereux que le dépôt dans un magasin ; mais, messieurs, la guerre c'est l'exception, et fort heureusement elle ne s'est pas produite depuis vingt-sept ans ; or faut-il subir des dangers pendant un quart de siècle en vue d'une éventualité qui ne se réalisera peut-être pas même au bout de ce temps ?
J'engage beaucoup le ministre de la guerre à prendre les précautions les plus minutieuses tant pour les dépôts que pour les transports de poudres. Je crois qu'il est de son devoir de satisfaire aux réclamations qui ont été faites à cet égard.
- La discussion générale est close.
Les articles 1 à 28 sont successivement adoptés sans discussion. Ils sont ainsi conçus.
« Art. 1er. Traitement du Ministre : fr. 21,000. »
« Art. 2. Traitement des employés civils : fr. 154,810.
« Charge extraordinaire : fr. 1,950. »
« Art. 3. Supplément aux officiers et sous-officiers employés au département de la guerre : fr. 14,000 »
« Art. 4. Matériel : fr. 40,000.”
« Art. 5. Dépôt de la guerre : fr. 19,000. »
« Art. 6. Traitement de l'état-major général : fr. 777,277 35. »
« Art. 7. Traitement de l'état-major des provinces et des places : fr. 303,112 45. »
« Art, 8. Traitement du service de l'intendance : fr. 150,729 75. »
« Art. 9. Traitement du service de santé des hôpitaux : fr. 217,890 75. »
« Art. 10. Nourriture et habillement des malades ; entretien des hôpitaux : fr. 532,400. »
« Art. 11. Service pharmaceutique : fr. 120,000. »
« Art. 12. Traitement et solde de l'infanterie : fr. 11,910,943 75.
« Les crédits qui resteront disponibles, à la fin de l'exercice, sur les chapitres II, III, IV et VIII, concernant le personnel, pourront être réunis et transférés, par des arrêtés royaux, à la solde et autres allocations de l'infanterie, ce qui permettra le rappel sous les armes, pendant un temps déterminé, d'une ou de deux classes de miliciens qui appartiennent à la réserve.
« Art. 13. Traitement et solde de la cavalerie : fr. 3,586,770. »
« Art. 14. Traitement et solde de l'artillerie : fr. 2,983,950 »
« Art. 15. Traitement et solde du génie : fr. 798,083 50. »
« Art. 16. Traitement et solde des compagnies d'administration : fr. 267,872 80.
« Les hommes momentanément en subsistance près d'un régiment d'une autre arme compteront, pour toutes leurs allocations, au corps où ils se trouvent en subsistance. »
« Art. 17. Etat-major, corps enseignant et solde des élèves : fr. 158,391 65. »
« Art. 18. Dépenses d'administration : fr. 29,004 75. »
« Art. 19. Traitement du personnel des établissements : fr. 40,660. »
« Art. 20. Matériel de l'artillerie : fr. 761,500. »
« Art. 21. Matériel du génie : fr. 700,000. »
« Art. 22. Pain : fr. 1,792,650. »
« Art. 23. Fourrages en nature: fr. 3,017,000. »
« Art. 24. Casernement des hommes : fr. 652,500. »
« Art. 25. Renouvellement de la buffleterie et du harnachement : fr. 100,000. »
« Art. 26. Frais de route et de séjour des officiers : fr. 95,000. »
« Art. 27. Transports généraux : fr. 75,000. »
« Art. 28. Chauffage et éclairage des corps de garde : fr. 70,000. »
M. Muller. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale sur la demande d'un crédit extraordinaire fait par le département des travaux publics pour les exercices 1855, 1856 et 1857.
- Ce rapport sera imprimé et distribué. La Chambre le met à l'ordre du jour de demain.
M. Orban. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi portant acquisition et échange de biens enclavés dans le domaine de Tervueren.
- Même décision que pour le rapport précédent. Toutefois, sur la proposition de M. Lelièvre, la Chambre maintient à l'ordre du jour de demain, en première ligne, le rapport sur le Code pénal, après le vote du budget de la guerre.
M. Orts. - Messieurs, l'ordre du jour n'est pas très chargé. Il est donc nécessaire d'activer les travaux des sections centrales. Or, une section centrale est chargée de l'examen de la proposition de loi qui a été déposée par l’honorable M. J. Jouret ; cette section centrale a désiré connaître l'avis du gouvernement sur la question ; le gouvernement a demandé le temps d'examiner ; il y a de cela deux mois. Je prierai MM. les ministres des finances et des travaux publics de nous dire si la section centrale recevra bientôt la réponse du gouvernement.
(page 992) M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, il a été reconnu par le gouvernement que les péages sur nos voies navigables présentent une foule d'anomalies ; il est indispensable que l'ensemble du système soit révisé, pour qu'on puisse arriver à une conclusion équitable. En conséquence, le gouvernement a décidé que cette question serait soumise à une commission, composée de telle sorte que les divers intérêts qui sont en présence y soient représentés.
M. Prévinaire. - Messieurs, je regrette infiniment la position que prend le gouvernement, au sujet de cette proposition de loi dont la Chambre est saisie depuis trois mois, car c'est le 25 février que l'honorable M. Jouret et d'autres membres l'ont déposée', en vertu de leur droit d'initiative. Il me semble que le gouvernement ne devait pas attendre jusqu'à la fin du mois de mai pour déclarer, comme vient de le faire M. le ministre des finances, que le gouvernement ne pouvait pas examiner cette question isolément ; il ne fallait pas deux mois d'étude pour formuler une semblable conclusion.
Je trouve que cette conclusion est assez fâcheuse en présence des intérêts sérieux qui sont engagés dans la question ; en présence de la position si difficile où se trouvent tant de familles, par suite de la condition où se trouve aujourd'hui le canal de Charleroi, tant au point de vue des péages qu’à celui de l’abaissement des eaux.
Je demande, moi, que la section centrale dépose son rapport ; lorsque la discussion viendra, le gouvernement pourra venir proposer l'ajournement auquel il nous convie aujourd'hui, et nous verrons alors ce que la Chambre décidera.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, je crois que l'honorable préopinant confond des choses qui n'ont rien de commun entre elles ; il nous parle de l'abaissement des eaux, à propos d'une question de péage. Je ne sais pas trop ce que l'abaissement des eaux a de commun avec la proposition qui a été soumise à la Chambre.
L'honorable membre regrette l'attitude que le ministère prend dans cette affaire. Notre position ne peut en rien gêner les allures de l'honorable membre. II a usé de son droit d'initiative ; que la Chambre discute la question, nous ne nous y opposons pas. Nous venons déclarer, et nous le démontrerons dans la discussion, que l’on ne peut donner, avec justice, une solution isolée à cette question.
M. de Naeyer, rapporteur. - Pourquoi ?
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Parce que d'autres sont dans des conditions analogues à ceux que la proposition a en vue et que vous ne vous en occupez pas. Vous voulez supprimer une situation qui subsiste depuis fort longtemps et qui a créé certains intérêts ; les intérêts que vous voulez compromettre ont également le droit de se défendre et d'être entendus.
La question n'est pas nouvelle ; elle a été agitée pendant un grand nombre d'années ; elle a déjà fait l'objet d'une proposition de la part de l'honorable M. de Steenhault, proposition qui n'a pas eu de suite. L'honorable M. J. Jouret a repris la proposition et la section centrale a demandé l'opinion du gouvernement sur la question des péages. Le gouvernement a examiné cette question, et il est convaincu qu'on ne peut pas discuter isolément la proposition dont la Chambre est saisie. C'est cette opinion que nous sommes disposés à défendre.
M. Orts. - Messieurs, je crois parfaitement inutile de discuter la question du fond, quand la question de forme doit seule nous occuper maintenant.
Or, de quoi s'agit-il ? Une section centrale a été nommée pour examiner une proposition de loi émanée de l'initiative parlementaire, proposition dont la portée est beaucoup plus modeste que celle qu'on veut lui donner dans le débat anticipé auquel on se livre.
En effet, 1'honorable M. J. Jouret a proposé tout simplement de rétablir un système d'égalité pour la perception des péages sur le canal de Charleroi. La proposition est bonne ou mauvaise, c'est ce que nous examinerons quand elle viendra à la discussion publique.
La section centrale a demandé au gouvernement son opinion sur la valeur de la proportion de l’honorable» M. Jouret. Il était naturel, puisqu'on touchait à une question de péages, de demander au gouvernement ce qu'il pensait de la proposition. Le gouvernement, après y avoir réfléchi deux mois, vous dit aujourd’hui que la proposition de l'honorable M. Jouret ne peut pas être examinée, discutée et à fortiori votée isolement ; et qu’elle doit être rattachée à un système général.
Cela signifie, dans la pensée du gouvernement, qu'il n'est pas de l'avis de l’honorable M. Jouret. Le gouvernement aurait pu faire cette déclaration depuis longtemps ; la Chambre aurait alors procédé à l'examen de la question, et elle aurait peut-être trouvé de bonnes raisons pour la résoudre affirmativement. Mais dans tous les cas, la question ne serait plus pendante.
Je demande au nom de la section centrale, si nous pouvons considérer la réponse verbale que vient de faire M. le ministre des finances, comme la réponse écrite que nous attendons du gouvernement, comme l’expression de la pensée du gouvernement, à savoir qu’il est défavorable à la proposition de l'honorable M. Jouret.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, je ne me suis pas expliqué sur le fond de la proportion. je me suis exclusivement attaché à faire comprendre que, dans l’opinion du gouvernement, la question des péages était complexe ; que la question du péage sur le canal de Charleroi ne pouvait pas être examinée isolément.
Remarquez bien que la proposition s'applique uniquement à la surtaxe qui grève les transports partant du Centre. Il y a d'autres réclamations dont ne s'occupe pas l'honorable M. Jouret ; ces réclamations sont relatives à l'ensemble des péages sur le canal de Charleroi. (Interruption.) Vous examinerez une partie de la question. (Nouvelle interruption.)
Est-il vrai, oui ou non, qu'il existe des réclamations qui s'appliquent à l’ensemble des péages sur le canal de Charleroi ?
M. le président. - Il serait plus simple de mettre cet incident à l'ordre du jour de demain.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il n'y a pas d'autre incident que celui-ci : l'honorable M. Orts interpelle le gouvernement pour savoir s'il a une opinion formée sur la proposition de l'honorable M. Jouret, et il se plaint qu'on ait mis deux mois à réfléchir sur cette question. Il comprendra comment les choses se sont passées : l'affaire a été soumise par la section centrale au département des travaux publics ; comme elle concerne aussi les voies et moyens, elle a dû être renvoyée, ensuite au département des finances ; il a fallu qu'on examinât toutes les questions de péages qui se rattachent à celle-là ; et pour le faire, il a fallu un certain temps ; indépendamment des travaux nombreux auxquels le cabinet a dû se livrer et dont nous venons de vous donner une-preuve par la présentation du projet qui vous a été soumis, nous avons dû suivre aussi beaucoup d'autres affaires. Le retard dont on se plaint s'explique donc fort naturellement. L'honorable membre pense le contraire, eh bien, que la section centrale fasse son rapport, nous le discuterons.
M. Orts. - Je n'entends pas le moins du monde récriminer, j'ai voulu seulement demander, par égard pour les convenances du gouvernement, si nous pouvions considérer la réponse verbale qui vient d'être faite par M. le ministre comme tenant lieu de celle qu'attendait la section centrale.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Certainement.
M. Orts. - Tout est dit.
M. le président. - Peut-on mettre à la suite de l'ordre du jour la discussion du rapport sur l'affaire de Peneranda ?
M. Coppieters ’t Wallant. - Messieurs, le rapport dont il s'agit touche à des questions d'une importance trop grande, pour que la Chambre puisse en être saisie d'une manière inattendue. Il faut qu'on fixe un jour spécial pour cette discussion, afin que tous les membres qui s'intéressent aux questions graves que soulève la requête de Peneranda, puissent être présents et n'être pas pris au dépourvu.
M. Lelièvre. - Je propose de fixer cette discussion à lundi.
M. Coppieters 't Wallant. - La question est de la plus haute importance ; je trouve la terme de lundi trop rapproché, je propose de prendre un jour habituellement consacré aux pétitions, vendredi de la semaine prochaine.
M. Vander Donckt. - Le rapport sur l'affaire Peneranda a été inséré aux Annales parlementaires depuis dix jours avant notre petite vacance.
Chacun a pu l'étudier, examiner le dossier qui est extrêmement volumineux et se former une opinion. Il a été décidé, quand l’insertion aux Annales a été ordonnée, qu'on fixerait ultérieurement un jour pour la discussion. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas fixer cette discussion à lundi ou mardi prochain.
M. B. Dumortier. - Comme l'honorable M. Coppieters, je trouve que la question que soulève la pétition de Peneranda est extrêmement grave et je demande à la Chambre de vouloir bien faire imprimer le rapport comme document parlementaire afin qu'on puisse l'avoir sous les yeux.
M. Vander Donckt. - Cette affaire est en effet des plus importantes, mais le rapport ne vaut pas la peine d'être imprimé comme document parlementaire, il se borne à faire l'historique de l’affaire, ceux des honorables membres qui veulent l'examiner à fond sont obligés d'examiner de volumineux dossiers et les longues discussions auxquelles elle a donné lieu et les rapports faits par tous les ministres des finances qui en ont été saisis.
M. B. Dumortier. - Nous venons d'entendre le président de la commission des pétitions dire que son rapport ne vaut pas la peine d’être imprimé. Je demande qu'à l'avenir la commission nous fasse des rapports dignes d'être imprimés.
M. Vander Donckt. - J'ai dit que mon rapport ne valait pas la peine d’être imprimé comme document parlementaire, d'abord parce qu'il n'est pas d'usage d'imprimer autrement qu'aux Annales parlementaires les rapports sur les pétitions et en second lieu parce qu’il ne pouvait pas résumer tout ce que contient le volumineux dossier que j’ai indiqué, ce qui seul aurait pu motiver la mesure exceptionnelle proposée par M. Dumortier.
- La Chambre consultée met à l'ordre du jour de lundi prochain la discussion du rapport sur la pétition de Pèneranda.
La séance est levée à 4 heures trois quarts.