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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 13 février 1858

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1857-1858

(page 283) (Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Crombez procède à l'appel nominal à 3 heures 1/4.

M. Vander Stichelen lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Crombez présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Des habitants d'Anvers prient la Chambre de voter un subside pour la veuve et les enfants du littérateur flamand Zetterman et appuient la demande de subside en faveur de la famille du littérateur flamand Vankerkhoven. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de l'intérieur.


« Des habitants de Pecq demandent que le bureau de perception des postes établi dans cette commune soit maintenu ou du moins remplacé par un bureau de distribution. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

« le sieur Renier demande que la deuxième partie du subside voté en faveur des employés inférieurs de l’État, soit payée aux régents et instituteurs des écoles moyennes, et prie la Chambre d'affecter au traitement ordinaire de ces employés, le subside extraordinaire qui est alloué en leur faveur. »

- Même renvoi.


« Le sieur Verhoeven prie la Chambre de ne pas donner suite à la demande des marchands de charbons et propriétaires de bateaux, qui a pour objet l'abolition du prix réduit auquel la houille est actuellement transportée à Zele et à Lokeren par le chemin de fer de Dendre-et-Waes. »

« Même demande d'habitants de Ste-Anne. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur la question relative à la réduction des péages sur les canaux.


« Des habitants de Gerepont demandent la réforme de la loi sur la milice dans le sens des enrôlements volontaires. »

« Par 15 pétitions, des habitants de Cappellen, Lillois-Witterzée, Fairoul, Peissant, Burdinne, Montegnée, St-Gilles, Rineffe, Locre, Montbliart, Anvers, Uytkerke, Everbeke, Andennes, font la même demande. »

- Renvoi à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.


« M. Van Overloop, obligé de s'absenter, demande un congé de huit jours. »

- Accordé.


« M. de Bast. retenu chez lui par une indisposition, demande un congé. »

- Accordé.


M. B. Dumortier (pour une motion d’ordre). - Messieurs, la Chambre est dans l'usage de s'ajourner pendant quelques jours à l'occasion des fêtes du carnaval. Pendant que nous sommes en nombre suffisant pour délibérer je vous proposerai, messieurs, de prendre une résolution à cet égard. Je proposerai à la Chambre de s'ajourner, après la séance actuelle, jusqu'à jeudi à 2 heures.

- Cette proposition est adoptée.


M. Prévinaire. - La Chambre est saisie d'une pétition et d'un rapport tout récent sur la question des péages du canal de Charleroi. Cette question a été produite à différentes reprises devant la Chambre et il est à espérer que cette fois elle recevra une solution. Mais pour que l'étude e, soit complète, je demande que la Chambre veuille bien réclamer de M. le ministre des finances la production d'un tableau résumant tous les péages sur les diverses voies de communication fluviales ou autres. Ce renseignement, pour être complet, devra comprendre non seulement l’état de choses actuel, mais une sorte de revue rétrospective, une indication chronologique des modifications introduites dans nos péages.

M. le président. - M. le ministre des finances, qui n'est pas ici en ce moment, verra l'observation de M. Prévinaire dans les Annales parlementaires et y fera droit s'il le juge à propos.

Projet de loi portant le budget du ministère des affaires étrangères de l’exercice 1858

Rapport de la section centrale

M. Van Iseghem présente le rapport de la section centrale qui a examiné le budget des affaires étrangères pour l'exercice 1858.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport, et décide qu'elle s'en occupera à la suite des objets qui se trouvent déjà à l'ordre du jour.

Motion d’ordre

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai l'honneur de communiquer à la Chambre un tableau indiquant par villes et communes rurales le nombre des électeurs et des votants, pour les années 1852, 1854, 1856 et 1857. Il en résulte que les électeurs des campagnes sont, à peu d'exceptions près, aussi zélés que ceux des villes, pour se rendre aux élections, et que le nombre des votants n'a pas été, dans les années antérieures, aussi considérable qu'aux élections du 10 décembre dernier.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution du tableau présenté par M. le ministre de l'intérieur.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1858

Discussion du tableau des crédits

Chapitre XVIII. Lettres et sciences

Article 105

« Art. 105. Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique ; publication des anciens monuments de la littérature flamande et d'une collection des grands écrivains du pays ; rédaction d'une histoire de l'art en Belgique : fr. 40,000.

« Charge extraordinaire : fr. 10,000. »

M. le président. - La section centrale réduit le chiffre des dépenses temporaires à 5,000 francs.

M. de Decker. - M. le ministre de l'intérieur se rallie-t-il à cette réduction ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, la section centrale n'adopte pas le chiffre de 5,000 fr. proposé au budget pour la rédaction d'une histoire de l'art en Belgique. J'avoue que je n'ai pas pu encore me former une idée de l'utilité d'un semblable travail, ni surtout, des conséquences financières qu'il doit entraîner.

Je me rallie donc, pour cette année, à la proposition de la section centrale, à moins que mon honorable prédécesseur ne nous donne des raisons plausibles pour le maintien du chiffre au budget de 1858.

M. de Decker. - Messieurs, je regrette vivement le parti que croit devoir prendre mon honorable successeur. Je n'ai aucun document sous les yeux ; je ne suis donc pas à même de donner à la Chambre les détails qu'aurait pu donner M. le ministre de l'intérieur actuel. Je demanderai cependant la permission de dire quelques mots à l'appui du crédit de 5,000 francs.

Messieurs, l'idée de rédiger une histoire de l'art en Belgique est un idée qui vient, non pas du gouvernement, mais des représentants naturels et officiels de l'art en Belgique.

Lors de la réorganisation de l'Académie belge, en 1846, on y a adjoint, comme vous le savez, une classe des beaux-arts.

A peine cette classe fut-elle constituée et réunie, qu'elle comprit qu'un des premiers travaux auxquels elle devait associer son nom et son autorité, c'était la rédaction d'une histoire de l'art en Belgique. Depuis lors, à différentes reprises, il a été question, dans le sein de la classe des beaux-arts, de l'exécution de ce projet ; mais vous savez que depuis 1846 jusqu'à présent, nous avons traversé une suite de crises. Il eût donc été difficile d'espérer le concours du gouvernement pour une œuvre de cette importance, concours sans lequel une pareille œuvre ne peut être menée à fin.

Une histoire de l'art belge offre un immense intérêt pour la Belgique. De toutes nos gloires nationales, celle qui résulte des beaux-arts est la plus incontestée. Eh bien, jusqu'à présent il n'existe aucun travail complet sur l'histoire de l'art en Belgique.

On a, depuis plusieurs années, recueilli une foule de matériaux ; nous avons de nombreuses monographies ; mais il n'y a pas une œuvre complète, digne de l'art national.

Au contraire, si je puis m'exprimer ainsi : nous avons le roman de l'art en Belgique ; nous n'avons pas l'histoire de l'art en Belgique. Nous avons quelques ouvrages sur l'ancienne école flamande, qui sont des recueils d'anecdotes apocryphes, tout remplis d'inexactitudes historiques et d'appréciations défectueuses, se distinguant par des injustices systématiques, soit contre la Belgique, soit contre nos illustrations.

Non seulement nous n'avons donc pas d'histoire de l'art, nous avons à détruire de funestes impressions produites par de pareils livres.

Il y a donc là une grande œuvre à faire. Cette œuvre, et cette remarque est essentielle, ne peut s'exécuter que par une association d'écrivains.

Il n'est pas un écrivain qui puisse faire à lui seul une histoire de l'art qui doit comprendre la musique, l'architecture, la peinture, la sculpture, la gravure. Il est impossible qu'une seule personne réunisse les connaissances variées et complètes qu'exige une œuvre semblable. Il faut de toute nécessité une association de savants. Pouvons-nous espérer d'avoir en Belgique, à aucune autre époque, une réunion d'écrivains distingués pouvant représenter chacune de ces spécialités de l'art ? Pour la musique, nous avons un homme dont le (page 284 nom est européen, un homme qui par l’étendue de son érudition, la solidité de sa critique et par l'élégance de son style, est regardé comme un des écrivains les distingués de l'époque.

Pour l'architecture, nous avons encore un savant, qui fait autorité dans les sciences et dans l'art. Il en est de même pour la gravure, la peinture et la sculpture. Il est impossible, je le répète, de rencontrer une réunion d'hommes capables d'achever cette œuvre avec autant de garantie de succès qu'aujourd'hui.

C'est donc là la pensée qui m'avait inspiré quand j'ai inséré dans le budget un littera pour la rédaction de l'histoire de l'art en Belgique. Je crois en avoir dit assez pour justifier l'utilité et la nécessité de l'allocation nouvelle.

M. le ministre dit qu'il n'a aucune donnée sur les conséquences financières de l'adoption de ce littera.

L'honorable ministre sait aussi bien que moi que, d'après les prévisions de ceux qui se préoccupent des beaux-arts, le sacrifice de cinq mille francs demandé ne devrait se renouveler que quatre à cinq fois au plus. C'est ce qu'on m'a formellement assuré.

Je puis difficilement admettre que le ministre ne connaisse pas, comme moi, l'étendue probable des sacrifices, sacrifices dont il ne faut pas exagérer la portée.

Messieurs, quelle que soit la décision de la Chambre, je serai toujours heureux et fier de lui avoir proposé la dépense dont il s'agit, parce qu'elle est parfaitement justifiée par l'importance de l'œuvre toute nationale qui en est l'objet.

M. Coomans. - Sur les bancs où j'ai l'honneur de siéger, je n'ai ni ami ni adversaire ; quand j'ai un devoir à remplir, je m'en acquitte sans regarder ni en avant ni en arrière. Je viens m'opposer de toutes mes forces à la proposition, généreuse en sa source, de mon honorable ami. J'ai pour cela entre autres raisons un argument qui me paraîtrait décisif, c'est que M. le ministre de l'intérieur hésite beaucoup à accepter la dépense qu'on lui offre de faire, lui qui admet très volontiers toutes les dépenses de ce genre, toutes les dépenses qu'on lui propose, notamment celles qui concernent les beaux-arts.

Il s'est même fait une sorte de spécialité en ce genre. Par conséquent, lorsque ce ministre n'accepte pas avec empressement une proposition de dépense en faveur des artistes ou des gens de lettres, j'en conclus a priori que cette dépense n'a pas de raison d'être. Un semblable argument doit avoir une influence puissante sur un député qui cherche, quoique souvent avec très peu de succès, à opérer des économies au budget.

On nous dit, du reste, que le besoin d'une histoire de l'art se fait sentir en Belgique et que nous devrions profiter de l'occasion qui se présente de la faire rédiger convenablement par des hommes qui sont particulièrement à même de s'acquitter de cette tâche.

Je ne nie pas, messieurs, que la publication d'une bonne histoire de l'art ne soit un événement heureux pour la Belgique, mais nous nous en sommes passés depuis si longtemps. (Interruption). Nous nous en sommes passés depuis si longtemps sans exciter les plaintes de personne, que je ne trouve nullement nécessaire de placer ce fruit dans les serres chaudes du budget. (Nouvelle interruption.) Je me défie de tout ce qui n'est pas le produit de la liberté ; en fait d'art surtout, le gouvernement doit s'abstenir de forcer en quelque sorte l'éclosion naturelle des œuvres de génie et de devancer le temps. Le budget n'y fait rien ; les appels de tous les ministres des finances du monde ne seront jamais écoutés au point de nous faire donner des chefs-d'œuvre quand le moment de les produire n'est pas venu. (Interruption de la part de M. H. Dumortier.) Je prie mon honorable ami, M. Dumortier, de me laisser parler ; il est naturel que j'exprime mon opinion personnelle et non celle d'autrui ; si mon honorable ami veut me répondre, il en a parfaitement le droit, et s'il me réfute, loin de lui en vouloir je lui en serai reconnaissant.

Je disais, messieurs, que quand le besoin d'un livre est venu, ce livre se produit seul ; je dirai même que tous les bons livres se sont produits seuls, de même que tous les grands artistes, tous les grands écrivains, tous les grands inventeurs ont travaillé, prospéré et grandi en dehors du budget. Il ne m'est donc pas démontré, le moins du monde, que la dépense d'une cinquantaine ou d'une centaine de mille francs environ...

M. de Decker. - Il ne s'agit que de 20,000 à 25,000 francs.

M. Coomans. - Soit, bien qu'on ait parlé de sommes plus fortes. Il ne m'est pas démontré, dis-je, qu'une pareille dépense nous ferait arriver au but que l'honorable membre a en vue.

Je crains positivement le contraire ; je crains que cette intervention du gouvernement ne nous dote encore d'une de ces œuvres très médiocres, que le gouvernement a le malheur de couver quand il se mêle de tout protéger. (Interruption.)

Et puis, messieurs, en supposant que nous ayons absolument besoin d'une histoire de l'art en Belgique, ne pourrai-je pas dire que le même besoin se fait sentir, quant à une histoire de l'industrie, du commerce, de l’agriculture, du droit ou de l'art militaire ?

Si nous avons eu en Belgique de grands artistes, ce dont je suis très fier, nous avons eu également des capitaines célèbres, des négociants, des industriels habiles, qui ont rendu des services signalés au pays. Pourquoi donc le gouvernement ne ferait-il pas également l'inventaire de ces richesses ? C'est probablement parce que cela nous mènerait beaucoup trop loin et il est, par bonheur, inconséquent.

Je supplie donc la Chambre de ne pas faire un pas de plus, dans la voie dispendieuse où elle s'est engagée trop facilement.

Il faut se défier de ces sentiments généreux qui nous poussent à prodiguer aux artistes et aux littérateurs l'argent des contribuables, parce que cela coûte énormément cher et cela ne produit pas toujours le résultat que l'on espère. On se crée des illusions et l'on dépense fort inutilement l'argent des contribuables. Je doute même que nous ayons le droit de faire cette dépense. L'argent des contribuables doit servir exclusivement à solder les dépenses absolument nécessaires à la marche du gouvernement. La législature devrait se borner à organiser les grandes fonctions sociales ; elle ne devrait jamais intervenir dans des détails ruineux où les noms propres du reste jouent un trop grand rôle.

Messieurs, je vous en prie, ne désignons pas d'avance nos meilleurs artistes, nos meilleurs écrivains ; n'usurpons pas ainsi le droit du public, ne faisons pas de jaloux. Laissons les faire et bornons-nous à applaudir ou à blâmer ; que ces messieurs qui sont, très en état d'écrire un bon livre sur l'histoire de l'art se réunissent patriotiquement, qu'ils fassent leur programme, qu'ils l'exécutent et si leur ouvrage est bon, comme je le souhaite du plus profond du cœur, ils le vendront bien, ils s'enrichiront même et nous leur en saurons d'autant plus de gré qu'ils se seront procuré cette gloire sans qu'il en coûte rien à la nation.

M. Prévinaire. - Je suis aussi un très grand partisan des économies.

M. Coomans. - Mais vous n'en faites jamais ; voilà ce qui nous distingue.

M. Prévinaire. - Le mot peut être très joli sans être vrai.

Messieurs, je crois qu'en fait d'économies, il faut se placer dans cette Chambre à un autre point de vue que le simple particulier. Il ne faut pas raisonner une question d'économie sociale comme on raisonnerait une simple question d'économie privée. Un peuple ne vit pas de la vie des particuliers. Un peuple, vivant sous un régime comme celui que nous avons le bonheur d'avoir, vit d'une vie toute particulière. Il faut qu'il sache honorer les arts, qu'il sache honorer les hommes qui se distinguent, qui rendent service à la patrie. Il faut que la nation se sente vivre et ait occasion d'exprimer ce qu'elle sent.

Or, le moyen de reconnaître les services rendus, c'est de les récompenser par des témoignages éclatants, par des témoignages palpables qui parlent aux yeux de tous.

C'est par les statues qu'on élève aux grands hommes qui ont bien mérité de la patrie d'une manière tout exceptionnelle, qu'on peut rappeler aux peuples les services qui ont été rendus et qu'on excite à bien servi la patrie.

La question qui nous occupe doit entraîner à beaucoup moins de dépenses. Il ne s'agit pas d'élever des statues ; il s'agit de déposer dans un recueil les faits principaux de notre histoire artistique ; et il me semble que la Belgique est assez riche pour faire cette dépense, pour se donner ce luxe, qui n'est que la consécration de notre reconnaissance envers ceux qui ont porté le nom belge d'une manière digue.

Je trouve qu'il y a de la petitesse à marchander quelques milliers de francs, quand il s’agit de transmettre à la postérité le nom des hommes qui se sont distingués dans notre pays, dans les arts qui constituent de temps immémorial pour la Belgique son principal titre de gloire.

Avons-nous, messieurs, les éléments d'émulation que possèdent d'autres peuples Avons-nous la possibilité de nous distinguer sur les champs de bataille ?

Nous n'avons que le modeste mais glorieux honneur de défendre notre territoire ; mais nous n'avons pas le pouvoir, comme d'autres peuples, de porter au loin la guerre et de cueillir cette nature de laurier. Ce sont les arts de la paix qui doivent faire notre gloire.

Eh bien, nous pouvons parfaitement consacrer dans un recueil spécial ce qui se trouve dans les souvenirs de nos pères.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je commence par rappeler que je n'ai pas repoussé d'une manière absolue et définitive l'allocation dont il s'agit. J'ai dit que, pour cette année, je me rallie à la proposition de la section centrale, parce que je n'ai pas de lumières suffisantes sur l'utilité de la dépense et sur les limites dans lesquelles elle pourra se renfermer.

Un honorable membre a dit que je suis très disposé à accepter toutes les dépenses de ce genre qu'on me propose ; cela est inexact ; je propose les dépenses qui me semblent justes et raisonnables, mais je n'accepte ni ne propose celles dont le chiffre est incertain et dont l'utilité ne m'est pas parfaitement démontrée.

Je ne repousse pas l'allocation, par un sentiment d’indifférence pour de semblables entreprises, encore moins par les raisons invoquées par un honorable préopinant qui se déclare partisan quand même de toutes espèces d'économies. Cet honorable membre est sans doute revenu d'anciennes opinions en ce qui concerne l’influence des subsides alloués pour la littérature.

J'ai dit que je ne suis pas fixé sur les limites de la dépense. Mon honorable prédécesseur assure que le chiffre ne devrait figurer au budget que pendant 4 ou 5 ans ; je n'ai aucune certitude à cet égard, mais je crois que si la somme était portée au budget elle y figurerait encore dans 10 ans. S'il s'agit, en effet, d'une œuvre nationale, et je veux bien lui donner ces proportions, alors il ne suffira pas d'une somme de 5,000 fr. portée au budget pendant 4 ou 5 ans.

M. de Decker. - Les matériaux d'une histoire de l’art existent ; il s'agit seulement de les coordonner.

(page 285) M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ignorais cela.

M. de Decker. - C'est fâcheux pour le président d'un Cercle artistique.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ce n'est pas au Cercle artistique que reposent les documents nécessaires pour éclaircir la question dont il s'agit. L'honorable membre qui m'interrompt aurait d'autant plus tort de se plaindre de mes procédés à son égard que je me suis rallié à tous les chiffres de son budget.

M. de Decker. - Pourquoi pas à celui-là ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je vous le dirai en particulier si vous voulez. Je voudrais faire de cela une œuvre nationale comme vous l'avez appelée, ou ne rien faire du tout. Je ne voudrais pas favoriser des intérêts particuliers aux dépens des contribuables.

Je persiste, messieurs, à adhérer à la proposition de la section centrale afin d'avoir le temps d'examiner l'utilité de l'entreprise et de me fixer sur le choix des écrivains qui seront chargés d'un pareil travail ainsi que sur les conséquences financières qu'il pourrait entraîner.

M. de Decker. - Je dois relever les expressions dont vient de se servir l'honorable ministre de l'intérieur. Il a eu l'air de dire que je serais plus disposé que lui à servir des intérêts particuliers. J'ignorais complétement qu'il pût y avoir dans cette affaire des intérêts particuliers. (Interruption.)

L'idée de ce vaste travail ne vient point des savants à qui je fais allusion, il y a d x ans, que la classe des beaux-arts de l'Académie poursuit cette idée ; et, si elle ne l'a pas soumise au gouvernement plus tôt, c'est à cause des circonstances financières où le pays s'est trouvé. Voil», messieurs, comment la rédaction d'une histoire de l'art belge est une inspiration de l'intérêt particulier. C'est une proposition faite depuis dix ans par ceux que j'ai appelés à bon droit les représentants officiels de l'art en Belgique, c'est-à-dire, par les membres de la classe de beaux-arts de l'Académie.

Après cela, l'histoire de l'art ne comporte pas ces interminables travaux dont s'effraye l'honorable ministre de l'intérieur.

Déjà ces travaux existent presque tous à l'état de matériaux ; il s'agit de les coordonner. C'est là, je pense, l'avis de tous ceux qui se préoccupent de cet objet.

La rédaction d’une histoire de l'art ne demanderait donc guère que quatre ou cinq ans, surtout si elle est confiée à des hommes qui ont consacré toute leur existence à l'étude des diverses spécialités de l'art. Ainsi, le savant qui serait probablement chargé, dans la pensée de l'Académie, de l'histoire de la musique, ce savant a passé cinquante années de sa vie à étudier cette branche de l'art. Son nom fait autorité ; il a publié un grand ouvrage qui constitue, sans contredit, un des plus beaux monuments de notre littérature contemporaine. Pour l'histoire de l’architecture, l'Académie a jeté les yeux sur un savant qui s'est livré pendant trente ans à cette spécialité et qui a fait sur ce sujet une série de publications des plus estimées. Il en est de même des autres parties de l'art, dont l'histoire serait ainsi écrite par des écrivains qui sont désignés par leurs pairs au choix du gouvernement.

Une remarque sur laquelle je me permets de revenir, messieurs, c'est que nous pouvons rarement espérer de trouver une pareille association d'hommes remarquables qui rende possible la rédaction d'une histoire complète de l'art. Or, c'est là un motif déterminant pour ne pas trop retarder ce travail.

La dépense est estimée à 20,000 ou 25,000 francs. M. le ministre de l'intérieur pouvait savoir cela ; il le sait probablement aussi bien que moi.

L'honorable M. Coomans, qui critique cette dépense, devrait, pour être conséquent, repousser toute cette partie du budget.

M. Coomans. - Je le ferai quand on voudra.

M. de Decker. - Aucune dépense n'est mieux justifiée. Nous avons des subsides pour la publication des monuments anciens de la littérature française et de la littérature flamande, pour la publication des chroniques historiques ; toutes ces dépenses sont parfaitement justifiées à mes yeux.

Toutes ces publications que l'on fait depuis vingt ou trente ans ont jeté une véritable considération sur le nom belge et honorent le gouvernement belge. Une histoire de l'art en Belgique est une chose qui nous intéresse tous plus directement peut-être et plus immédiatement ; car, c'est l'art qui a donné à notre couronne nationale ses plus beaux fleurons.

Si M. le ministre de l'intérieur qui a bien voulu jusqu'à présent admettre comme siennes toutes mes propositions ; si M. le ministre persiste à faire une exception pour ce crédit, je le regrette beaucoup. Je ne le regrette pas pour moi ; ceux qui se préoccupent de la gloire de l'art belge sauront que, quant à moi, j'ai fait tout ce qu'il était possible de faire pour la réalisation de ce projet important. Si M. le ministre juge plus convenable de s'y opposer, libre à lui.

Je fais mienne la proposition d'allouer 5,000 francs pour la publication d'une histoire de l'art en Belgique.

- La somme de 40,000 francs (charges ordinaires) est mise aux voix et adoptée.

M. le président. - Pour les charges extraordinaires, il y a deux chiffres : 1° le chiffre de 5,000 fr. proposé par la section centrale et adopté, pour cette année, par le gouvernement ; 2° le chiffre de 10,000 fr. proposé par H. de Decker.

- Le chiffre le plus élevé, celui de 10,000 fr., est mis aux voix et n'est pas adopté.

Celui de 5,000 fr. est ensuite mis aux voix et adopté.

Articles 106 à 118

« Art. 106. Observatoire royal ; personnel : fr. 18,020. »

- Adopté.


Art. 107. Observatoire royal ; matériel et acquisitions : fr. 6,200. »

- Adopté.


« Art. 108. Bibliothèque royale ; personnel : fr. 27,360. »

- - Adopté.


« Art. 109. Frais de la fusion des trois fonds de la bibliothèque royale et frais de la rédaction du catalogue général ; charge extraordinaire : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 110. Bibliothèque royale ; matériel et acquisitions : fr. 33,320. »

- Adopté.


« Art. 111. Musée royal d'histoire naturelle ; personnel : fr. 10,220. »

- Adopté.


« Art. 112. Musée royal d'histoire naturelle ; matériel et acquisitions : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 113. Subside à l'association des Bollandistes pour la publication des Acta sanctorum ; charge extraordinaire : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 114. Archives du royaume ; bureau de paléographie ; personnel : fr. 27,650.

« Charge extraordinaire : fr. 1,800. »

- Adopté.


« Art. 115. Archives du royaume ; matériel : fr. 3,000. »

- Adopté.


« Art. 116. Archives de l’État dans les provinces ; personnel : fr. 20,200. »

- Adopté.


« Art. 117. Frais de publication des inventaires des archives ; frais de recouvrement de documents provenant des archives tombées dans des mains privées ; frais d'acquisition ou de copies de documents concernant l'histoire nationale ; dépenses de matériel des dépôts d'archives dans les provinces ; subsides pour le classement et pour la publication des inventaires des archives appartenant aux provinces, aux communes, aux établissements publics ; dépenses diverses relatives aux archives. Recouvrement d'archives restées au pouvoir du gouvernement autrichien ; frais de classement, de copie et de transport, etc. : fr. 7,000.

« Charge extraordinaire : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Art. 118. Location de la maison servant de succursale au dépôt des archives de l’État ; charge extraordinaire : fr. 3,000. »

- Adopté.

Chapitre XIX. Beaux-arts

Articles 119 à 131

« Art. 119. Subsides à de jeunes artistes pour les aider dans leurs études ; encouragements à de jeunes artistes qui ont déjà donné des preuves de mérite ; voyages dans le pays et à l'étranger pour les aider à développer leurs talents ; missions dans l'intérêt des arts ; secours à des artistes qui se trouvent dans le besoin ou aux familles d'artistes décédés ; encouragements à la gravure en taille-douce, à la gravure en médailles, aux publications relatives aux beaux-arts ; subsides ; souscriptions ; acquisitions d'œuvres d'un intérêt artistique ou archéologique ; subsides aux sociétés musicales, aux sociétés instituées pour l'encouragement des beaux-arts, aux expositions locales, etc. ; commandes, acquisitions d'œuvres d'artistes vivants ou dont le décès ne remonte pas à plus de dix ans ; subsides aux établissements publics pour aider à la commande ou à l'acquisition d'œuvres d'art ; dépenses diverses ; académies et écoles des beaux-arts autres que l'Académie d'Anvers ; encouragements pour la composition musicale, la peinture, la sculpture, l'architecture et la gravure ; pensions des lauréats : fr. 135,500. »

- Adopté.

(page 286 « Art. 120. Académie royale d'Anvers : fr. 31,750. »

- Adopté.


« Art. 121. Conservatoire royal de musique de Bruxelles. Dotation de l’État destinée, avec les subsides de la province de Brabant et de la ville de Bruxelles, à couvrir les dépenses tant du personnel que du matériel : fr. 50,340. »

- Adopté.


« Art. 122. Conservatoire royal de musique de Liège. Dotation de l’État destinée, avec les subsides de la province et de la ville de Liège, à couvrir les dépenses tant du personnel que du matériel : fr. 24,360. »

- Adopté.


« Art. 123. Musée royal de peinture et de sculpture. Personnel : fr. 8,240. »

- Adopté.


« Art. 124. Musée royal de peinture et de sculpture. Matériel et acquisitions ; frais d'impression et de vente du catalogue : fr. 23,400. »

- Adopté.


« Art. 125. Musée royal d'armures et d'antiquités. Personnel : fr. 4,900. »

- Adopté.


« Art. 126. Musée royal d'armures et d'antiquités. Matériel et acquisitions ; frais d'impression et de vente du catalogue : fr. 8,000. »

- Adopté.


« Art. 127. Entretien du monument de la place des Martyrs, des jardins et des arbustes ; salaire des gardiens : fr. 2,000. »

- Adopté.


« Art. 128. Dernier cinquième du crédit de 518,000 francs alloué par la loi du 21 juin 1855, pour l'achèvement de la colonne du Congrès national ; charge extraordinaire : fr. 103,600. »

- Adopté.


« Art. 129. Monuments à élever aux hommes illustres de la Belgique, avec le concours des villes et des provinces ; médailles à consacrer aux événements mémorables : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Art. 130. Subsides aux provinces, aux villes et aux communes dont les ressources sont insuffisantes pour la restauration des monuments ; travaux à faire pour la restauration et la conservation de l'ancien phare de Nieuport ; subsides pour la restauration et la conservation d'objets d'art et d'archéologie appartenant aux administrations publiques, aux églises, etc. ; travaux d'entretien aux propriétés de l’État qui ont un intérêt exclusivement historique : fr. 40,000.

« Charge extraordinaire : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Art. 131. Commission royale des monuments. Personnel. Frais de copie : fr. 2,100. »

- Adopté.

Article 132

« Art. 132. Commission royale des monuments. Matériel et frais de déplacement : fr. 5,400. »

M. Coomans. - Messieurs, je prierai M. le ministre de l'intérieur d'examiner avec beaucoup de soin s'il ne serait pas bon de supprimer les deux tiers de nos expositions nationales des beaux-arts et de les réduire à une exhibition triennale et centrale. Je n'ai pas la prétention de faire autorité en cette matière ; mais quand je vois des artistes qui comptent parmi les plus éminents, et dont nous nous enorgueillissons, exprimer l'avis qu'il conviendrait de n'avoir qu'une seule exposition nationale en Belgique tous les trois ans, je suis très porté à croire qu'ils ont raison au point de vue de l'art.

Comme je me place surtout au point de vue du trésor public et de l'intérêt des contribuables, je serais heureux de trouver là une occasion pour opérer une économie sans nuire à nos artistes.

Je prie donc M. le ministre de faire examiner cette question avec beaucoup de soin. Je déclare, pour ma part, que je serais heureux de la voir résoudre dans le sens que j'ai indiqué.

Il saute aux yeux que la Belgique ne peut pas produire tous les ans plusieurs chefs-d'œuvre.

Or, il faudrait que chaque exposition nationale en renfermât au moins quelques-uns. S'il n'y avait qu'une seule exposition nationale tous les trois ans, on laisserait aux artistes le temps de faire de bonnes et belles choses et de se tenir à la hauteur de leur réputation et de la renommée artistique de la Belgique.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'examinerai la question.

- Personne ne demandant plus la parole, l'article 132 est mis aux voix et adopté.

Chapitre X. Service de santé

M. le président. - La discussion est ouverte sur le chapitre XX (Service de santé).

M. Rodenbach. - Messieurs, à propos du chapitre XX (service de santé), j'ai, dans l'intérêt de l'hygiène publique et de l'humanité, quelques idées à soumettre à mes honorables collègues, ainsi qu'à M. le ministre de l'intérieur. J veux parler de la vaccine.

Messieurs, dans plusieurs de nos provinces, notamment dans celles de Liège et de Limbourg, il n'existe pas de règlement. Là, rien n'astreint on n'engage même les médecins à vaccine, parce qu'ils ne sont pas rétribués.

M. Deliége. - Il y a des médailles !

M. Rodenbach. - Je le sais ; mais il n'y a que cela.

Dans la province de Namur on n'accorde que 200 ou 300 francs de primes pour toute la province ; ailleurs il y a des règlements, mais tout cela est tombé en désuétude ; on néglige même d'envoyer aux commissions médicales, copie des registres des personnes qu'on a vaccinées. C'est un vice administratif.

Le législateur ainsi que les autorités provinciales devraient s'en occuper, d'autant plus que depuis quelque temps la variole, autrement appelée la petite vérole, fait des ravages non seulement dans les communes rurales, mais dans les ville de nos provinces et même dans la capitale où l'on a constaté beaucoup de décès par suite de la variole.

J'ai consulté plusieurs médecins, et ils ne sont pas d'accord ; il en est qui prétendent qu'il faut revacciner tous les dix ans. parce que le vaccin qu'on prend sur les bras des enfants n'a plus la même efficacité, la même vertu que précédemment.

Autrefois le gouvernement faisait venir de la société Jennérienne de Londres la matière pour vacciner. Des docteurs m'ont assuré que très souvent ce vaccin était trop vieux, qu'il faudrait en faire venir tous les six mois de l'Angleterre.

Il est probable que si l'on accordait des primes, ou pourrait trouver en Belgique le cow-pox sur les pis des vaches.

En France, on s'occupe sérieusement de cette question, et même le ministre de la guerre, le maréchal Taillant, a mis à l'étude la revaccination de l'armée.

J'ai été surpris, messieurs, en recevant il y a quelques jours du docte professeur Guadet, chef de l'enseignement à l'institut impérial des aveugles de Paris, un remarquable ouvrage qui traite des personnes affligées de cécité, où il est dit qu'avant la découverte de l'immortel Jenner, la moitié des enfants envoyés à l'institut avaient perdu la vue par suite de la petite vérole.

Il y avait autrefois au-delà de trente mille aveugles, en France, et aujourd'hui depuis la découverte de Jenner il n'y en a plus que vingt-cinq mille.

Je prie M le ministre d'avoir égard aux observations que je viens de présenter.

Les médecins, comme je l'ai dit, ne sont pas d'accord. Les communes devraient porter à leur budget une somme pour payer les sage-femmes qui vaccinent, et l'on pourrait faire supporter la dépense un tiers par la commune, un tiers par la province et un autre tiers par le gouvernement.

Il y a, je crois, un vice dans la manière dont l'opération de la vaccine se fait. Lorsque les docteurs vaccinent, ils devraient au bout de dix jours visiter les enfants pour s'assurer si la vaccine a réussi ; mais on s'en rapporte aux parents, aux mères de famille qui ne sont pas compétentes. Il arrive parfois que le vaccin n'a pas pris parce que le virus n'était pas de bonne qualité. Je ne crois pas devoir en dire davantage, je suis convaincu que M. le ministre examinera la question, elle est très grave. C'est une question humanitaire. Quand il s'agit d'hygiène publique, on doit s'en occuper sérieusement.

M. Deliége. - Mon honorable collègue, M. Rodenbach, vient de dire qu'on ne faisait rien pour encourager la vaccine. C'est une erreur ; d'abord dans la province de Liège, il est prouvé par le journal officiel qu'une quantité d'hommes de l'art et de sage-femmes reçoivent la médaille d'or, qui n'est accordée que pour cent opérations. De plus, dans les hôpitaux de Liège, et des environs, on vaccine gratuitement. Une troisième mesure a été prise qui a produit les meilleurs résultats ; l'accoucheur ou la sage-femme qui ont présidé à ta naissance de l'enfant, le suivent de l'œil et quand le moment est venu le vaccinent.

S'il y a eu à Liège quelques cas de petite vérole on a constaté que c'étaient des enfants qui avaient été vaccinés.

Je me rappelle une quatrième mesure prise pour pousser à la vaccination : généralement on ne reçoit dans les écoles que les enfants vaccinés ; les instituteurs leur demandent, en entrant à l'école, s'ils ont été vaccinés.

Vous voyez qu'on s'occupe de cet objet dans la province de Liège.

M. Rodenbach. - L'honorable préopinant est dans l'erreur ; je me suis assuré au département de l'intérieur, qu'il n'y a pas de règlement à Liège.

L'honorable membre dit qu'on encourage et qu'on pratique la vaccine dans la province de Liège. J'en doute, car c'est dans cette province que l'an passé il y a eu le plus de cas de variole. Cela n'est pas étonnant, puisqu'on ne salarie point les hommes de l'art qui vaccinent les pauvres, on ne s'assure pas ensuite si le vaccin a pris, parce que (page 287 l’opération est faite gratuitement ; il en est de même dans toute la Belgique.

L'honorable membre a parlé du certificat qu'on demande à l'entrée à l'école ; on est très léger sur ce point. Il suffit qu'un enfant ait reçu un coup de bistouri dans le bras et qu'on voie une cicatrice pour donner un certificat, afin qu'on le croie vacciné. C'est là le vice ; je répète que dans plusieurs provinces il n'y a point de règlement ; et comme il s'agit d'une question d'humanité, je suis convaincu que M. le ministre de l'intérieur, qui nous a donné des preuves de sa philanthropie, s'en occupera.

M. Coomans. - Un mot sur la vaccine, quoique je ne sois pas médecin, mais les honorables MM. Rodenbach et Deliége ne le sont pas non plus. Ils viennent d'exprimer deux opinions diamétralement opposées : l'un se plaint de ce que le gouvernement ne vaccine pas assez, l'autre trouve, au contraire, qu'il vaccine suffisamment. Moi, je crois que le gouvernement ferait très bien de ne pas vacciner du tout. (Interruption.) Je crois, je le répète, que le gouvernement ferait bien de ne pas vacciner du tout et de laisser en ceci, comme en beaucoup d'autres choses, une entière liberté aux familles. Si je n'avais à faire valoir que mon opinion, personnelle, on en contesterait sans doute la valeur et non sans raison ; mais je puis m'abriter, cette fois, derrière des autorités dont on reconnaîtra certainement toute l'importance.

Vous savez messieurs, qu'il y a, en Allemagne une école de médecins qui attaquent, depuis un certain nombre d'années, la vaccine, à laquelle ils reprochent de n'être que d'une efficacité très douteuse et d'être, d'un autre côté, la cause de certaines maladies fort graves qui se sont propagées eu Europe depuis une cinquantaine d'années. A les en croire, la vaccine vicie le sang.

Un savant éprouvé, en qui nous devons tous avoir une grande confiance, puisque nous l'avons placé à la tête du service sanitaire de l'armée belge, a déclaré, non seulement dans des conversations particulières, mais encore, si je suis bien informé, au sein même de l'Académie de médecine que la vaccine était une fâcheuse pratique. (Interruption.)

Je vois M. le ministre des finances me faire un signe de dénégation ; mais j'affirme que telle est la déclaration que cet honorable fonctionnaire m'a faite plusieurs fois en présence de personnes mieux à même que moi d'apprécier son opinion. Ce fonctionnaire et d'autres savants encore doutent donc que l'on fasse bien d'exiger des certificats de vaccine, et ils déclarent que, s'ils en avaient le pouvoir, ils n'exigeraient plus ces certificats des miliciens ni des élèves des écoles du gouvernement. Vous comprenez, messieurs, que je ne me crois pas apte du tout à trancher la question : mais je trouve ici un nouvel appui à la thèse très libérale que je soutiens on toute chose ; qui est la liberté du citoyen et l'abstention de l’État. Je désire que le gouvernement examine la question de très près.

Il serait, en effet, par trop fâcheux de continuer à dépenser des sommes considérables et de causer des vexations aux familles pour n'obtenir que des résultats douteux et peut-être même nuisibles. Je ne sais même pas jusqu'à quel point on pourrait forcer un père de famille qui aurait la conviction profonde que la vaccine est plus dangereuse qu'utile, à faire subir cette opération à ses enfants.

Je me borne à ces courtes observations que j'ai en devoir présenter en partie pour atténuer les regrets exprimés par l'honorable M. Rodenbach.

- La discussion est close.

Articles 133 à 137

« Art. 133. Frais de route et de séjour pour l'inspection des établissements dangereux, insalubres ou incommodes ; personnel, dépenses diverses et travaux relatifs à cette inspection ; charge extraordinaire : fr. 12,000. »

- Adopté.


« Art. 134. Frais des commissions médicales provinciales ; police sanitaire et service des épidémies : fr. 43,000. »

- Adopté.


« Art. 135. Encouragements à la vaccine ; service sanitaire des poils de mer et des côtes ; subsides aux sage-femmes pendant et après leurs études, 1° pour les aider à s'établir ; 2° pour les indemniser des soins de leur art qu'elles donnent aux femmes indigentes ; subsides en cas d'épidémie ; impressions et dépenses diverses : fr. 26,300. »

- Adopté.


« Art. 156. Académie royale de médecine : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 157. Conseil supérieur d'hygiène publique ; jetons de présence et frais de bureau : fr. 4,200. »

- Adopté.

Chapitre XXI. Eaux de Spa

Article 138

« Art. 138. Subside pour les établissements publics de la commune de Spa : fr. 20,000. »

- Adopté.

Chapitre XXII. Traitements de disponibilité

Article 139

« Art. 139. Traitements temporaires de disponibilité ; charge extraordinaire. : fr. 10,594 16. »

- Adopté.

Chapitre XXIII. Dépenses imprévues

Article 140

« Art. 140. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 9,900. »

- Adopté.

Second vote, vote de l’article unique et vote sur l’ensemble

M. le président. - Tous les articles du budget ont été successivement votés ; quelques-uns ayant été amendés, je demanderai à la Chambre si elle entend procéder immédiatement au second vote de ces articles.

- Voix nombreuses. - Oui ! oui !

- Les derniers amendements adoptés au premier vote sont successivement mis aux voix et définitivement adoptés.


« Article unique. Le budget du ministère de l'intérieur est fixé, pour l'exercice 1858, à la somme de sept millions neuf cent vingt-neuf mille huit cent trente-trois francs soixante-cinq centimes (tr. 7,929,853-65 c), conformément au tableau ci-annexé. »

- Adopté.


M. de Renesse. - Plusieurs pétitions relatives au budget de l'intérieur, et concernant notamment l'instruction primaire, ont été déposées sur le bureau pendant la discussion du budget. J'en demanderai le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. de Moor. - Je viens, avec mon honorable ami M. le comte de Renesse, demander le renvoi à M. le ministre de l'intérieur, des pétitions des instituteurs primaires, ces pionniers de la civilisation, comme l'honorable M. Rogier lui-même les désignait dans un discours qu'il a prononcé eu leur faveur dans la session dernière.

- Ce renvoi est ordonné.


Il est procédé à l'appel nominal sur l'ensemble du budget.

67 membres y prennent part.

64 répondent oui.

1 (M. Coomans) répond non.

2 (MM. de Naeyer et de Portemont) s'abstiennent.

Ont répondu non : MM. Desmaisières, Desmet, de Terbecq, Devaux, de Vrière, d'Hoffschmidt, Dolez, Dubus, H. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Frère-Orban, Frison, Goblet, Godin, Janssens, J. Jouret, M. Jouret, Landeloos, Lange, Laubry, J. Lebeau, Magherman, Mascart, Moreau. Orban, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Savart, Tack, Thiéfry, Vanden Branden de Reeth, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Vervoort, Veydt, Wala, Ansiau, Anspach, Crombez, David, de Baillet-Latour, de Boe, de Bronckart, Dechentinnes, de Decker, de Haerne, Deliége, de Luesemans, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Paul, de Perceval, de Pitteurs-Hiegaerts, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren et Verhaegen.

Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. de Naeyer, rapporteur. - Messieurs, je n'ai pas voté contre le budget de l'intérieur, parce qu'il renferme des dépenses indispensables pour assurer la marche de plusieurs services inhérents aux véritables attributions du gouvernement.

Mais il m'est impossible de donner un vote favorable à ce budget, aussi longtemps que je ne verrai pas réaliser des économies par la simplification des rouages administratifs et par la suppression d'une foule de dépenses purement facultatives, qui résultent de l'intervention de l’État dans le domaine de l'activité privée.

M. de Portemont. - Je me suis abstenu pour les mêmes motifs.

Projet de loi maintenant la session de Pâques, en 1858, pour tous les jurys d’examen universitaires

Vote de l’article unique et vote sur l'ensemble

Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, la Chambre passe à la délibération sur l’article.

(page 288) « Article unique. La disposition transitoire contenue dans l'article 58 de la loi du 1er mai 1857, sur les jurys d'examen pour les grades académiques, est rendue applicable à la session de Pâques de l'année 1858. »

- Il est procédé au vote par appel nominal sur ce projet de loi, qui est adopté à l'unanimité des 65 membres présents.

Ce sont : MM. Desmaisières, Desmet, de Terbecq, Devaux, de Vrière, d'Hoffschmidt, Dolez, Dubus, H. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Frère-Orban, Frison, Goblet, Godin, Janssens, J. Jouret. M. Jouret, Landeloos, Lange, Laubry, J. Lebeau, Magherman, Moreau, Orban, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Savart, Tack, Thiéfry, Vanden Branden de Reeth, E. Vandenpeereboom. Vander Donckt, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Vervoort, Veydt, Wala, Ansiau, Anspach, Coomans, David, de Baillet-Latour, de Boe, de Bronckart, Dechentinnes, de Decker, de Haerne, de Luesemans, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Naeyer, de Paul, de Perceval, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren et Verhaegen.

- La séance est levée à 3 heures et demie.