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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 11 mars 1857

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1856-1857)

(Présidence de M. Delehaye.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1019) M. Crombez procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart. Il donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier. La rédaction en est approuvée. Il présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

Pièces adressées à la chambre

« Le sieur d'Heyne-Dujardin, pharmacien à Herstal, réclame l'intervention de la Chambre pour qu'il soit ordonné au sieur Carpaix de déplacer le marteau à estamper qui fonctionne dans son atelier, s'il n'exécute les mesures prescrites pour en faire cesser les inconvénients. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Rayé, ancien militaire, demande une augmentation de pension ou un secours annuel. »

- Même renvoi.


« Le sieur Poletz, combattant de la révolution et douanier pensionné, demande le bénéfice de dix années de service accordé aux décorés de la croix de Fer. »

- Même renvoi.


« Des propriétaires, industriels, exploitants de minerais et commerçants à Morialmé prient la Chambre de donner une application temporaire aux nouveaux droits de douanes sur la fonte et le fer, d'autoriser le gouvernement à augmenter ces droits dans certaines limites et de permettre la sortie de tous les minerais de fer,' moyennant certains droits de douanes. »

« Même demande de propriétaires, industriels, exploitants de minerais et commerçants à Fraire et Yves-Gomezée.. »

M. de Baillet-Latour. - Je viens appuyer les pétitions de Fraire, de Morialmé et d'Yve-Gomezée ; elles méritent un examen sérieux et attentif ; elles signalent un état de choses qui affecte le sort d'un grand nombre d'établissements et d'une population ouvrière à laquelle la décadence de l'industrie sidérurgique menace d'enlever tout moyen d'existence.

Je prie la Chambre de prendre ces pétitions en sérieuse considération. Je demande qu'un prompt rapport soit fait sur leur contenu et je propose son renvoi à la commission d'industrie.

- Adopté.


« Des habitants de la commune de Resteigne prient la Chambre d'allouer au budget des travaux publics les fonds nécessaires à la construction d'une route de Halma à Grupont, par Chanly, Resteigne, Tellin et Bure. »

M. de Moor. - Il s'agit de la reprise, par le gouvernement, d'un chemin vicinal, destiné à devenir un important affluent au chemin de fer du Luxembourg. Je crois que l'opération serait bonne pour le gouvernement. Le chemin dont il est question part de Halma et passe par les communes de Chanly, Resteigne, Tellin, Bure, pour aboutir à Grupont où la station de la ligne ferrée sera établie. Je prie la Chambre d'ordonner le dépôt de cette pétition sur le bureau pendant la discussion du budget des travaux publics, comme cela a été décidé pour d'autres pétitions, et le renvoi, après le vote du budget, à M. le ministre des travaux publics pour qu'il veuille soumettre cette question à l'administration des ponts et chaussées et y faire droit s'il n'y voit aucun obstacle.

M. Thibaut. - Je me joins à l'honorable M. de Moor pour demander cette décision.

- La proposition de M. de Moor est adoptée.


« Par 16 pétitions, des habitants de Bruxelles demandent la jonction des chemins de fer de l'Etat dans cette ville, avec création d'une station au centre de la capitale ; et prient la Chambre de décréter que le chemin de fer projeté de Bruxelles à Louvain passera par Cortemberg. »

« Même demande d'habitants de Saventhem, Crainhem, Woluwe-Saint-Etienne, Steenockerzeel, Hermelghem, Erps-Querbs et Nosseghem. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

Ordre des travaux de la chambre

M. Lelièvre (pour une motion d’ordre). - Je demande que la Chambre veuille mettre à la suite de l'ordre du jour la discussion du projet de loi sur la liquidation des traitements d'attente.

Le rapport est déposé depuis longtemps ; il me semble qu'il est temps de s'en occuper.

M. de Renesse. - Je demande, contrairement à la proposition de l'honorable M. Lelièvre, que l'on maintienne à l'ordre du jour, après le vote du budget des travaux publics, le projet de loi sur la révision partielle du tarif des douanes ; il ne faut pas toujours intervertir l'ordre du jour, lorsque la Chambre a adopté une résolution à la suite d'une proposition formelle qui a été prise d'accord avec le gouvernement ; je demande donc que le projet de loi des douanes soit maintenu à son ordre du jour.

M. le président. - M. Lelièvre ne demande pas qu'on change l'ordre du jour. Il demande seulement qu'on mette à la suite des objets qui s'y trouvent le projet de loi sur les traitements d'attente.

M. Delfosse. - Je crois qu'il est bon d'attendre que M. le ministre des finances soit présent.

M. Lelièvre. - M. le ministre a déclaré, il y a quelques mois, qu'il était prêt à aborder la discussion. On m'a rapporté récemment que le gouvernement ne s'opposait nullement à ce qu'on s'occupât de cet objet au jour qu'il conviendrait à la Chambre de fixer.

M. le président. - Nous attendrons la présence de M. le ministre des finances.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l’exercice 1857

Discussion du tableau des crédits

Chapitre II. Ponts et chaussées. Bâtiments publics

Section II. Bâtiments publics

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion sur les articles du budget des travaux publics.

Articles 10 et 11

« Art. 10. Travaux à exécuter pour la distribution d'eau, d'après le nouveau mode, aux bâtiments civils situés à Bruxelles ; charge extraordinaire : fr. 80,000. »

- Adopté.


« Art. 11. Travaux extraordinaires d'amélioration à exécuter à l'entrepôt général du commerce d'Anvers ; charge extraordinaire : fr. 9,000. »

- Adopté.

Section III. Service des canaux et rivières, des bacs et bateaux de passage, des polders et des chemins de fer en construction
Discussion générale

M. Vanden Branden de Reeth. - Messieurs, les observations que j'ai à soumettre à la Chambre se rapportent en grande partie à la rivière la Nèthe. Cependant, comme elles, ont un certain caractère (page 1020) général, puisqu'il s'agit aussi d'autres cours d'eau qui ont été repris par l'Etat, je crois bien faire en les présentant maintenant.

Vous vous rappellerez, messieurs, que la reprise par l'Etat de l'administration de plusieurs cours d'eau a donné lieu, dans cette Chambre, à d'assez longs débats. A la suite de cette discussion, des dispositions ont été arrêtées et la loi du budget du 1er janvier 1854 portait un article 42 ainsi conçu :

« Entretien de l'Yser, de la grande Nèthe et da canal de Plasschendaele et de Nieuport, par Furnes, à la frontière de France, dont l'administration est reprise par l'Etat, à dater du 1" janvier 1854.

« La part contributive des provinces, des communes et des propriétaires intéressés, dans l'exécution des grands travaux d'amélioration, sera ultérieurement déterminée par une loi. »

Jusqu’à présent rien n'a été fait, et, après trois années d’attente, je dois constater avec peine que nous n'avons pas encore pu discuter le projet de loi destiné à régulariser toute cette affaire.

Cependant lorsque nous nous faisions, dans cette enceinte, l'écho des plaintes soulevées par les dégâts nombreux occasionnés par les inondations, lorsque nous venions appuyer les pétitions qui avaient clé adressées à la Chambre par les conseils provinciaux d'Anvers et de la Flandre occidentale, nous avions un autre but que celui d'obtenir le simple transfert d'un article du budget provincial au budget de l'Etat. C'est là, il fait bien l'avouer, le seul résultat qui ait été obtenu jusqu'à ce jour.

Toutefois une instruction complète a été faite et l'avis des conseils provinciaux intéressés a été demandé par le gouvernement. J'ai sous les yeux les procès-verbaux de la session de 1855 du conseil provincial d’Anvers et je puis assurer que la question a été examinée sous toutes ses faces et qu'elle a donné lieu à de longs et intéressants débats. Voilà, messieurs, ce qui s'est passé dans la province que j'habite, et je pense que des mesures analogues auront été prises dans la Flandre occidentale.

Permettez-moi, messieurs, de vous faire l'historique succinct de ce qui s'est passé dans la province d'Anvers.

M. le gouverneur ayant été invité par l'administration centrale à appeler l'attention du conseil provincial sur cette question, trois propositions de travaux ont été soumises aux délibérations de ce conseil.

La première de ces propositions concernait des travaux conçus sur une très grande échelle et qui auraient coûté plusieurs millions ; le conseil provincial ne s'y est pas arrêté sérieusement. Quand on veut arriver à un résultat, on ne propose pas des projets qui doivent donner lieu à des dépenses auxquelles il sera impossible de faire face.

Un second projet portait la dépense à 1,200,000 francs ; enfin un troisième, élabore par M. l'ingénieur Goddyn, qui a fait une étude spéciale de la rivière, évaluait les frais à 700,000 francs.

C'est ce dernier projet qui a surtout attiré l'attention du conseil provincial.

Cependant la ville de Lierre avait fait certaines réserves qui méritaient d’être prises en considération. Cette ville craignait que par suite des travaux nécessités pour obvier aux inondations il ne s'ensuivit pour elle des désagréments, et que l'abondance des eaux ne causât de graves inconvénients dans cette localité. Une instruction supplémentaire a été ordonnée et l'on a reconnu la nécessité de faire quelques travaux de plus, par suite desquels la dépense se serait élevée à environ 700,000 francs.

Moyennant ces travaux, l'ingénieur promettait qu'il serait apporté un remède efficace aux inondations et que la navigation ne serait gênée en rien.

Plus tard, dans les débats auxquels le projet a donné lieu dans le sein du conseil provincial, des conseillers manifestèrent encore certaines appréhensions ; les travaux exécutés pour prévenir les inondations devaient être, d’après eux, combinés avec d'autres, réclamés plus particulièrement pour assurer, en tout temps, le service de la navigation.

On a reconnu, pour faire droit à ces réclamations, qu'il serait nécessaire de faire dans les rivières quelques barrages, afin de maintenir les eaux à un tirant suffisant ; mais il a fallu, de ce chef, augmenter encore un peu l'évaluation première qui pourrait peut-être bien s'élever, d'après ces diverses exigences, à environ 900,000 fr.

Ce qui concernait la dépense était à peu près fixe. Restait la question de savoir qu’elle serait la part contributive de la province, des communes et des particuliers. Le conseil provincial s'est occupé nécessairement de cette question.

Je dois dire d'abord que le conseil provincial a cru devoir protester contre certaines dispositions de la loi ; il faisait observer qu'il était étonnant qu'on voulût appliquer à la province d'Angers un traitement différent de celui qui avait été appliqué à d'autres provinces ; que, quand d'autres rivières avaient été reprises par l'Etat, elles l'avaient été sans charge aucune ; qu'il était donc étonnant que l’on voulût faire prévaloir aujourd'hui un principe contraire. Toutefois après cette protestation, comme il y avait des dispositions légales auxquelles il fallait bien se soumettre, le conseil décida que les dépenses pourraient se répartir de la manière suivante :

Les communes, 1/24

Les propriétaires intéressés. 2/24

La province, 3/24

Et l'État, 18/24

C'est-à-dire les communes, les propriétaires et la province un quart, et l'Etat trois quarts.

La province n'était pas appelée à poser des bases définitives, mais seulement à donner son avis. Du reste, messieurs, cette proportion était celle généralement suivie, lorsque le gouvernement intervient dans des travaux de l'espèce, et remarquez bien que si la dépense en présence de laquelle nous nous trouvons est si considérable, c'est que depuis 25 ans rien n'a été fait pour cette rivière.

Les discussions que je viens de rappeler, messieurs, ont eu lieu en 1855, et l'année dernière, comme aucune décision n'avait été prise, le conseil provincial a de nouveau adressé une pétition à la Chambre.

Je ferai aussi remarquer que l'année dernière la section centrale, chargée de l'examen du budget de 1856, s'était également occupée de cette question, et elle avait exprimé le désir, non seulement que le gouvernement présentât un projet de loi, mais encore qu'un crédit figurât au budget de l'exercice prochain qui est celui que nous discutons dans ce moment.

Voilà, messieurs, la décision qui a été prise l'année dernière.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Le projet a été examiné par les sections, et la section centrale s'en est déjà occupée.

M. Vanden Branden de Reeth. - Mais si le projet a été présenté, je le considère comme une lettre morte, car je n'en trouve pas de trace...

- Un membre. - Il y a une section centrale qui l'examine.

M. Vanden Branden de Reeth. - Puisqu'il y a une section centrale qui s'occupe de l'examen de ce projet de loi, je demande qu'elle veuille bien hâter son travail et déposer sou rapport le plus tôt possible pour qu'il puisse être porté à l'ordre du jour. Il s'agit ici d'un objet que je considère comme très urgent.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Les observations de l'honorable membre sont très raisonnables, mais je pense qu'elles ne s'appliquent pas parfaitement à l'objet que nous discutons.

Par rapport aux rivières auxquelles il fait allusion, le budget des travaux publics ne contient que l'entretien ; les travaux d'amélioration se rapportent à un autre ordre d'idées, en vue duquel le gouvernement a déposé depuis longtemps un projet de loi autorisant l'administration à disposer d'une somme de 500,000 fr. pour poser un premier jalon dans la voie indiquée par l'honorable préopinant et de plus ayant pour but de fixer, conformément au budget, les paris contributives de la province, de l'Etat et des particuliers dans les dépenses à faire.

L'honorable membre cite la base de répartition proposée par le conseil provincial. Je le prie de remarquer que la part faite à l'Etat est bien lourde et que le raisonnement sur lequel il s'appuie pour justifier cette répartition n'est pas fondé. En effet la rivière appartenait aux provinces et si les provinces n'ont rien fait ou presque rien fait, ce n'est pas une raison pour que l'Etat prenne à sa charge 18/24 de la dépense nécessaire.

Messieurs, je ne veux pas discuter, en ce moment, cette question. Une discussion spéciale aura lieu prochainement, comme l'honorable membre paraît le désirer, la section centrale devant être bientôt en mesure de présenter son rapport. Je ne pouvais pas laisser passer sans observation l'énoncé de cette quotité que l'honorable membre représentait comme raisonnable pour la répartition de la dépense. Jusqu'à présent ou n'est pas parvenu à s'entendre avec les provinces et les communes intéressées.

Il est à espérer que la section centrale fera des propositions telles, qu'elles seront acceptables par toutes les parties et qu'on pourra mettre la main à l'œuvre pour l'exécution de ce travail, dont je ne méconnais pas l'importance.

M. Lelièvre. - A l'occasion du chapitre en discussion, je crois devoir recommander au gouvernement de ne pas perdre de vue les mesures propres à donner à la Sambre canalisée la profondeur que réclament les intérêts du commerce.

Je le prie de donner suite au projet, d'exécuter les travaux nécessaires pour que les bateaux puissent naviguer avec 1 mètre 80 centimètres d'enfoncement sur la partie de la Sambre située dans la province de Namur.

Depuis longtemps ces améliorations ont été signalées au gouvernement, qui, en les réalisant, rendra un service important à l'industrie du pays.

Il en est de même de certains travaux nécessaires pour améliorer la navigation de la Meuse aux abords de la ville de Namur et même entre Namur et Liège.

Je prie M. le ministre des travaux publics de vouloir veiller à ce que les études ordonnées soient terminées le plus tôt possible.

Comme le service des canaux et rivières est du ressort de l'administration des ponts et chaussées, je profite de cette occasion pour appeler l'attention de M. le ministre sur la nécessité d'améliorer la position des chefs de bureau et des commis de cette administration qui ne jouissent réellement pas d'un traitement en rapport avec l’importance de leurs fonctions et le travail que celles-ci exigent. Les agents des ponts et chaussées doivent être placés sur la même ligne que les employés de l’administration extérieure des chemins de fer de l'Etat.

Diverses réclamations ont été adressées, à cet égard, au département (1021) des travaux publics ; elles me paraissent fondées, et je prie M. le ministre de les prendre en sérieuse considération.

Il est évident qu'il est impossible de maintenir un état de choses qui est devenu intolérable pour des employés à qui on impose une besogne très étendue et qui néanmoins sont privés d'un traitement convenable. Je suis heureux d'appeler sur ce point l'attention du gouvernement.

M. Wautelet. - Messieurs, j'espérais voir figurer au budget des travaux publics un article de dépenses pour l'exécution d'un travail destiné à donner à la Sambre canalisée le tirant d'eau qu'elle devait avoir aux termes du cahier des charges qui a servi de base à la concession de cette rivière. Je l'espérais par plusieurs motifs ; d'abord, parce que, depuis longtemps, la nécessité de ce travail est généralement reconnue, que de nombreuses et pressantes réclamations sont adressées chaque jour au département des travaux publics et qu'enfin, je savais que depuis trois ans on s'occupait à faire les études de ce travail.

La nécessité de donner à la Sambre canalisée un tirant d'eau de 1 mètre 80 cent. n'est contestée par personne, elle est devenue très urgente par suite des circonstances nouvelles qui se présentent aujourd'hui.

Je dirai d'abord quels sont les motifs qui, au point de vue général, rendent ce travail désirable. La Sambre canalisée fait partie de la grande ligne de navigation de la Belgique vers Paris, Reims, Rouen et la Somme. Sur toutes ces lignes, le tirant d'eau est, à peu d'exceptions près, de 1 mètre 80 cent.

Sur la Sambre belge, au contraire, ou ne peut naviguer qu'avec un tirant de 1 mètre 50.

On comprend dès lors quels inconvénients et quelles pertes résultent pour la navigation de cette situation qui, pour un simple parcours de six à sept lieues à faire en Belgique, ne permet de naviguer sur un parcours do 80 à 100 lieues qu'avec trois quarts ou au plus avec quatre cinquièmes de la charge des bateaux.

J'ai dit que sur la presque totalité du parcours le tirant d'eau des voies navigables en France est de 1 mètre 80 ; ainsi les bateaux partant de Mons pour Paris trouvent sur toute la ligue un tirant d'eau de 1 mètre 80 centimètres ; aussi le prix du fret est en raison de cette différence, et quoique les distances soient à peu près les mêmes de Mons et de Charleroi à Paris, le fret de Mons est toujours de 3 à 4 fr. au-dessous de celui de Charleroi ; cela tient en grande partie à cette circonstance que les bateaux pariant de Mons peuvent porter 250 à 280 tonneaux, tandis que les mêmes bateaux, partant de Charleroi, ne peuvent transporter à l'enfoncement de 1 mètre 50 cent, que 200 à 220 tonneaux.

Indépendamment du parcours en Belgique, je reconnais qu'il existe quelques points sur la Sambre française et sur le canal de jonction de Sambre et Oise, où la navigation ne peut pas se faire à 1 mètre 80 cent, d'enfoncement ; mais les compagnies concessionnaires de ces deux lignes sont toutes disposées à exécuter les travaux nécessaires pour y arriver ; et comme ces travaux ne sont pas très importants, ils peuvent être facilement terminés en un seul chômage.

De sorte donc qu'il dépend uniquement de l'exécution par le gouvernement belge, propriétaire de la Sambre, d'un travail peu important, pour assurer d’une manière régulière, complète la navigation sur tout le parcours qui, comme je l'ai dit, s'étend sur 80 à 100 lieues.

Je dis qu'il est fâcheux pour le pays que ce soit en Belgique que cette entrave existe encore.

Messieurs, j'ai dit tout à l'heure que des circonstances nouvelles donnaient à ce travail un caractère d'urgence qu'il n'avait pas au même degré autrefois.

En effet, aujourd'hui s'exécutent deux lignes de chemin de fer qui vont mettre le bassin du Centre et le bassin de Mons en communication directe avec la Sambre et ces communications directes avec la Sambre aboutiront à des points situés au-dessus de la navigation vicieuse de la Belgique ; c'est-à-dire que le Centre arrivera à la frontière à l'endroit où commence la Sambre française, tandis que Mons arrivera à Hautmont (France), de sorte qu'embarqués à ces deux points, ces charbons pourront être transportés en France avec un tirant d'eau de 1 mètre 80 cent., tandis que ceux qui partent de Charleroi ne pourront naviguer sur toute la ligne qu'avec un tirant d'eau de 1 mètre 50 cent.

C'est une différence que le gouvernement ne peut laisser subsister un instant.

Ce travail, dont l'utilité est incontestable, est devenu et est encore urgent à un autre point de vue, à celui des intérêts de l'Etat, et je prie la Chambre de vouloir bien faire attention à la position qui serait faite au trésor si on maintenait la situation actuelle des choses.

Je viens de dire que la Sambre canalisée ferait partie de la ligne de navigation de Charleroi vers Paris. Eh bien, le chemin de fer du Nord, au moyen de sa ligne directe par St-Quentin, cherche à s'emparer de la plupart des transports des charbons, et à en déposséder la ligne de navigation dont la Sambre fait partie, et cela lui sera facile à cause de l'élévation du prix du fret qui est la conséquence de l'imperfection de la navigation.

Il faut, messieurs, puisque le gouvernement se fait entrepreneur d'industrie, qu'il agisse avec la même sagacité et avec autant de sollicitude pour ses intérêts que les compagnies elles-mêmes.

Le chemin de fer du Nord emploie tous les moyens pour accaparer les transports. Il fait des remises aux grands consommateurs, aux grands expéditeurs ; il donne aux environs de ses gares, à Paris et partout, des terrains, si pas à titre gratuit, au moins à des conditions très douces, afin de faciliter les dépôts de charbon, de changer le mouvement du commerce et des transports.

Evidemment, il réussira si l'on n'y prend garde et si l'on n'y met obstacle immédiatement.

Eh bien, je dis, qu'un des grands moyens pour y parvenir, c'est de restituer à la navigation tous ses moyens ; c'est de lui permettre de pouvoir diminuer les prix de transport, afin de lutter avantageusement avec le chemin de fer en réduisant les prix à un taux qu'il lui sera impossible d'atteindre.

J'attire sur ce point l'attention de M. le ministre des travaux publics. Une pétition dans ce sens a été déposée il y a un ou deux jours sur le bureau de la Chambre, elle a été renvoyée à la commission d'industrie avec demande d'un prompt rapport.

Je sais bien qu'on étudie la question et je crains que l’honorable ministre des travaux publics, comme il l'a fait à la section centrale, ne me dise que ces études ne sont pas achevées et qu'il ne sait pas encore ce qui en est du chiffre de la dépense ; mais je répondrai que d'après ce que j'ai vu dans le rapport de la section centrale, cette affaire est à l'étude depuis trois ans. Or, je dis que lorsqu'il s'agit d'un intérêt aussi grave que celui-là, on ne met pas trois ans pour faire des études qui ne demandent pas six mois, Je pose en fait que si, au lieu du gouvernement, une compagnie avait été intéressée comme le trésor l'est dans cette affaire, si un seul ingénieur n'avait pas suffi, on en aurait mis deux, on en aurait mis six au besoin ; enfin on aurait fait les études immédiatement et d'urgence, comme le fait toujours l'intérêt privé quand il s'agit ou de conserver ou d'augmenter ses revenus.

Je prierai M. le ministre des travaux publics de porter la plus grande attention à cette affaire, et comme les travaux de cette nature peuvent s'exécuter aussi bien en deux années qu'en une seule, je le prierai de vouloir bien en presser la solution, et de demander cette année même une somme quelconque à la Chambre pour pouvoir commencer ces travaux qui sont réellement urgents.

M. de Naeyer, rapporteur. - J'ai demandé la parole pour donner deux mois d'explication sur le projet de loi dont a parlé l'honorable M. Vanden Branden de Reeth.

Le projet relatif aux travaux d'amélioration de la Nèthe, de l'Yser et du canal de Plasschendaele, a été présenté dans le cours de la session dernière. Une section centrale a été constituée pour l'examiner. Cette section centrale a demandé au gouvernement deux renseignements qui nous sont seulement parvenus hier. La section centrale n'est donc nullement en retard. Je pense qu'elle pourra se réunir de nouveau dans le cours de la semaine prochaine et que le rapport pourra être présenté à la Chambre à une époque peu éloignée.

M. Osy. - Je n'ai que peu de chose à dire quant à la question sur laquelle l'honorable M. de Naeyer vient de donner des explications. Cependant, je ferai observer à M. le ministre, que s'il est vrai que le budget ne contienne que des dépenses d'entretien, nous avons cependant le droit, à l'occasion de ce chapitre, de parler des travaux à faire, de la reprise des rivières, etc. Aussi, je remercie mon honorable ami M. Vanden Branden de Reeth, d'avoir attiré l'attention du gouvernement et de la Chambre sur cet objet, et je demanderai que M. le président veuille bien faire convoquer la section centrale le plus tôt possible pour que nous puissions enfin résoudre cette affaire qui repose, je crois, depuis deux ans, dans les cartons de la Chambre. Le conseil provincial avait décidé qu'il se réunirait spécialement dès l'année dernière au mois de mars, en session extraordinaire.

Eh bien, dans sa réunion ordinaire du mois de juillet il n'a pu même s'en occuper. Si nous ne nous hâtons de prendre une décision, il est à craindre que, dans la session du mois de juillet prochain, il ne puisse encore s'en occuper.

J'espère donc que la section centrale pourra se réunir promptement et que nous déciderons cette affaire dans cette session.

Ayant la parole, je suis encore obligé de demander un renseignement à M. le ministre des finances.

Vendredi dernier nous avons reçu une pétition demandant le prompt endiguement des alluvions de l'Escaut. Depuis la réponse que m'a faite M. le ministre des finances, j'ai reçu des lettres des localités où se trouvent ces alluvions et où cette réponse de M. le ministre a jeté quelque inquiétude.

On craint qu'il ne veuille vendre ces alluvions d'après l'arrêté-loi de 1811. Il me paraît qu'en présence de la loi de comptabilité et de notre Constitution, le gouvernement ne peut vendre que publiquement, comme le fait la Hollande.

La Hollande a également eu, pendant la réunion à l'empire, le décret de 1811. Mais elle ne vend pas ses alluvions en vertu des dispositions de ce décret.

Je demande donc à M. le ministre des finances si son intention est de vendre ces alluvions publiquement et au plus offrant. S'il n'en était pas ainsi, il y aurait à craindre des spéculations qui nuiraient au trésor. Je prie donc le gouvernement de s'expliquer nettement à cet égard.

(page 1022) La semaine dernière encore, la Hollande a vendu en Zélande des alluvions ; elle les a vendues en vente publique comme tous les autres domaines de l'Etat.

Il y a eu tellement de concurrence que pour 98 hectares qui ne rapportaient rien à l'Etat, mais qui sont aujourd'hui ce qu'on appelle mûris, le gouvernement a obtenu 110,000 florins. Nous avons dans les alluvions de Santvliet 150 hectares qui dans la même proportion peuvent valoir de 300,000 à 400,000 fr. et qui ne rapportent rien à l'Etat.

J'engage donc M. le ministre des finances à nous présenter le plus tôt possible un projet de loi pour être autorisé à vendre ces alluvions ; mais je l'engage à faire le plus de diligence possible pour que les travaux puissent être exécutés cette année. Il n'est pas à dédaigner, me semble t-il, seulement d'avoir 300,000 à 400,000 francs pour des propriétés qui ne rapportent rien, mais encore de rendre à la culture une propriété de 150 hectares, ce qui, pour une localité comme celles qui avoisinent le Brabant septentrional et qui n'ont que des bruyères et des alluvions, peut être très avantageux.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - En réponse à l'interpellation de l'honorable membre, je dirai que l'intention bien formelle du gouvernement est de n'aliéner ces schorres que par voie d'adjudication publique.

La seule question que je me réserve d'examiner, c'est de savoir si, nonobstant la disposition du décret de 1811, il faut réclamer des Chambres l'autorisation nécessaire pour faire cette concession.

Ainsi, quant à la première question, elle n'est pas douteuse ; c'est par voie d'adjudication publique que l'aliénation aura lieu. Quant à la seconde, elle sera examinée avec soin, avant qu'un acte soit posé.

M. Dellafaille. - La proposition qu'a faite l'honorable M. Vanden Branden vient d'appeler l'attention du gouvernement sur un objet qui a une grande importance pour la province d'Anvers. Comme M. le ministre vient d'informer la Chambre que la section centrale est saisie depuis longtemps du dossier relatif aux travaux d'amélioration et de navigation de la Grande Nèthe, je viens insister pour que la section centrale présente des propositions immédiates, pendant la discussion même du budget actuel.

Un premier subside de 500,000 fr. avait été porté au budget de l'exercice 1854 pour trois rivières, la Senne, l'Yser et la Nèthe. Déjà une grande partie de cette somme a été absorbée par une de ces rivières. Si donc le gouvernement voulait s'entendre avec la province d'Anvers pour exécuter des travaux à la Grande Nèthe dans le courant de cette année, le restant de la somme de 500,000.fr. serait loin de suffire pour faire les travaux nécessaires.

Je me permettrai de faire observer également à M. le ministre des travaux publics, que si par l'arrêté royal de 1819 la Nèthe a été mise à charge de la province d'Anvers pour l'administration, aucune ressource nouvelle a été mise à sa disposition pour pourvoir aux travaux à y faire pendant les longues années que cette administration lui a été confiée ; il a donc été impossible à la province d'Anvers d'exécuter ces travaux.

La Grande Nèthe étant une rivière navigable et flottable, c'était à l'Etat et à l'Etat seul que cette dépense incombait.

Les frais de simple entretien de cette voie navigable ont été supportés par la province d'Anvers et là se bornaient ses obligations. Maintenant qu'il s'agit de travaux d'amélioration à y effectuer, je prie la section centrale d'avoir égard aux sacrifices que la province, les communes et les propriétaires riverains veulent s'imposer. D'autres rivières ont été améliorées aux frais exclusifs de l'Etat et ont coûté des sommes bien plus considérables.

D'autres provinces ont eu le bonheur de voir leurs rivières reprises plus tôt par l’Etat. Qu'il me soit donc permis d'exprimer le vœu que l'Etat songe enfin aux travaux à faire à la Grande Nèthe, à réparer les dommages et à rendre à la navigation une rivière qui doit tant contribuer à la prospérité d'une partie notable de la province d'Anvers.

L'année dernière, messieurs, la province d'Anvers était sur le point de s'entendre avec M. le ministre des travaux publics sur les ouvrages à exécuter. M. le ministre avait favorablement accueilli les propositions de la province d'Anvers, quand les intéressés aux travaux à faire à l'Yser sont venus élever des prétentions nouvelles qui ont empêché la conclusion de l'affaire.

Les conditions dans lesquelles se trouvent ces deux rivières, sont entièrement différentes, et il serait déplorable de retarder plus longtemps l'exécution de ceux de la Grande Nèthe dont les études sont terminées depuis longtemps et dont la nécessité se fait sentir tous les jours davantage.

M. de T’Serclaes, rapporteur. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour appuyer deux observations que la section centrale a fait consigner dans le rapport. Ces observations ne concernent pas l'objet dont on s'est occupé jusqu'à présent, mais elles portent sur l'ensemble de la section III et s'appliquent à la manière dont les crédits sont classés et répartis.

La première porte sur ceci ; l'examen des crédits relatifs aux voies navigables est rendu difficile par la classification adoptée dans le budget. On passe, par exemple, du canal de Gand au canal de Maestricht ; de celui-ci à celui de Pommeroeul, et il faut sauter par-dessus plusieurs articles pour arriver au bassin de l'Escaut. La section centrale demande qu'à l'avenir les voies navigables soient rangées dans l'ordre des bassins hydrauliques, c'est-à-dire dans l'ordre naturel des localités.

Aujourd'hui, les crédits se présentent dans un ordre purement accidentel. Ils ont été portés au budget à la suite les unes des autres, à mesure que la nécessité s'en est révélée. Nous demandons que dans les prochains budgets on substitue à l'ordre pour ainsi dire occasionnel suivi maintenant, l'ordre plus naturel des bassins hydrauliques.

Celte observation n'a d'autre but que de faciliter le travail de la Chambre.

La deuxième observation de la section centrale est beaucoup plus importante ; nous avons été frappés de la nécessité qu'il y aurait d'établir une distinction entre les crédits destinés aux travaux d'amélioration des canaux et rivières et ceux qui concernent l'entretien ordinaire et extraordinaire.

Les deux dernières catégories pourraient former l'objet d'un seul article, sauf à le diviser en plusieurs litteras : le crédit pour les travaux d'amélioration serait divisé en plusieurs articles : ce serait quelque chose d'analogue à ce qui se fait pour les allocations destinées à l'entretien et à la construction des routes.

On pourrait ainsi beaucoup plus facilement apprécier les dépenses réellement nouvelles, et voir en quoi le capital de l'Etat est modifié ou augmenté. La section centrale de 1856 avait énoncé des propositions semblables ; elle est même allée plus loin, elle a demandé que le budget des travaux publics formât deux budgets distincts, l'un comprenant l'entretien, l'autre les constructions et améliorations grevant le capital, et que l'on en revînt au procédé en usage avant 1830 sous le régime néerlandais.

La distinction dont nous parlons est difficile à établir, je reconnais-même qu'elle est rendue impossible par l'arrêté du 19 février 1848, qui a réglé la forme extérieure des budgets des départements ministériels mais elle offrirait néanmoins une incontestable utilité, elle ferait disparaître une confusion qui menace de devenir inextricable, et qui dès à présent rend presque impossible un compte rendu fidèle des actes accomplis.

Comme c'est la seconde fois que ces remarques ont été faites par la Chambre, nous demandons qu'elles ne soient pas perdues de vue et qu'elles soient soumises à la commission qui existe, si je ne me trompe, au ministère des finances, pour examiner les questions relatives à l'application de la loi de comptabilité : cette commission ou toute autre pourrait étudier le système proposé par la section centrale de cette année-ci, et celui préconisé par nos devanciers de l'année dernière. Si des dispositions réglementaires pouvaient être prises dans cet ordre d'idées, nous avons la conviction qu'elles constitueraient une grande amélioration.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - L'honorable rapporteur de la section centrale appelle l'attention de la Chambre sur plusieurs observations consignées dans le rapport. Je reconnais volontiers que l'ordre adopté pour les articles du budget qui concernent les travaux hydrauliques, est tout à fait accidentel et qu'il serait certainement plus logique et plus commode pour ceux qui veulent se rendre compte de la part de chacun des bassins hydrographiques, de suivre l'ordre indique par la section centrale.

J'examinerai, s'il est possible de le faire, au prochain budget. A priori, je n'y vois aucun obstacle.

L'autre observation est plus importante ; mais il est aussi plus difficile d'y faire droit.

Il s'agirait de diviser le compte des travaux hydrauliques en compte de capital et compte d'entretien. Au point de vue de la comptabilité, cela présenterait peut-être un certain avantage ; on pourrait voir si les travaux effectués donnent des revenus en rapport avec les dépenses, qu'ils ont exigées.

C'est une idée assez nouvelle que de vouloir faire produire aux fonds engagés par l'Etat dans les routes et canaux, un intérêt quelconque ; il n'y a pas longtemps qu'on s'occupe de cette idée, et les travaux hydrauliques remontant à plusieurs années, il serait très difficile de trouver le premier article du compte de capital, c'est-à-dire le coût actuel des routes et canaux.

Le premier article n'existant pas, il y aurait peu d'utilité à établir un semblable compte.

De plus, messieurs, il y aurait des difficultés assez grandes pour diviser les dépenses, dont il s'agit, entre le compte de capital et le compte d'entretien. La difficulté de cette division a été démontrée lorsqu'il s'est agi de l'introduire pour les dépenses du chemin du fer ; comment déterminer, en effet, quelle est la part du capital et la part des frais d'entretien dans la dépense que nécessitent le renouvellement de la voie, le remplacement des anciens rails par d'autres rails plus forts ?

Ainsi, messieurs, je n'ose pas espérer d'arriver l'année prochaine à une solution satisfaisante de cette question.

L'honorable M. Wautelet a reproduit les observations qu'il avait déjà soumises à la Chambre dans une autre discussion, relativement à l'utilité qu'il y aurait à porter le tirant d'eau de la Sambre canalisée à un mètre 80 cent., tirant d'eau qui a été adopté d'une manière générale pour les voies navigables de la Belgique et de la France. J'ai fait étudier cette question ; le rapport de l'ingénieur en chef de la province de Hainaut m'est arrivé très récemment et je l'ai déféré à l'examen du comité consultatif des travaux publics.

(page 1023) Cependant, avant de saisir la Chambre d'une proposition, je dois encore attendre le travail de même nature que j'ai demandé à l'ingénieur en chef de la province de Namur. Je puis dire toutefois que les résultats financiers de l'opération seront favorables, comme le dit l'honorable membre, et je crois que la dépense ne sera pas aussi considérable qu'on l'avait cru d'abord. J'ai donc lieu d'espérer que cette question, dont je ne méconnais pas la difficulté, pourra recevoir sous peu une solution favorable.

M. de T'Serclaes, rapporteur. - Je remercie M. le ministre des travaux publics de ses explications et des intentions qu'il vient de manifester en faveur de modifications au système usité que nous croyons fort utile.

Il me reste à le prier de vouloir bien donner des ordres formels pour que la matière soit examinée par les comité et corps administratifs compétents, et qu'il en soit rendu compte à la Chambre lorsque l'occasion s'en présentera, et le plus tôt possible. Relativement à la distinction à établir entre les dépenses de capital et les autres, la question se représentera, avec une tout autre importance, au chapitre IV qui concerne le chemin de fer, et alors, s'il est nécessaire, la section centrale fera valoir de nouveaux arguments.

M. de Smedt. - J'appelle l'attention de M. le ministre des travaux publics sur les dégâts causés par les eaux du haut Escaut aux terres cultivées riveraines.

Ce fâcheux état de choses provoque de nombreuses plaintes. La section centrale a appuyé ces réclamations et a demandé des explications au gouvernement. M. le ministre des travaux publics a répondu ce qui suit :

« Quant aux mesures à prendre pour que les débordement périodiques de l'Escaut ne jettent pas les eaux du fleuve sur les terres cultivées, elles devraient consister à établir de long de ces terres des digues insubmersibles. »

Je dois faire remarquer que ce n'est pas le haussement extraordinaire des bords de la rivière ; certainement nous ne voulons pas cet ouvrage qui est d'une exécution impossible et aucunement nécessaire, mais nous demandons qu'une bonne police soit tenue sur les bords de la rivière, que l'administration des ponts et chaussées veille à ce que les bords soient tenus à une égale élévation, qu'ils ne soient pas abaissés partiellement, ou, pour mieux m'expliquer, qu'on n'y fasse pas des trous par où les eaux sortent du lit de la rivière et viennent inonder les terrains bas ; que cette administration veille aussi à ce que les éclusettes qui sont placées à l'embouchure des petits canaux, rigoles ou fossés, soient tenues dans un bon état pour que les eaux ne puissent pas y passer, et, ce qui serait aussi très nécessaire, que la manœuvre de ces écluses soit confiée à des gardes qui sont spécialement chargés de cette manœuvre et qui seraient sous la surveillance de l'administration des ponts et chaussées, car, comme la rivière est aujourd'hui la propriété de l'Etat, il faut, en conséquence, que le gouvernement soit chargé de la police et prenne des précautions, que les eaux de la rivière ne viennent pas faire des dommages aux terres cultivées.

Car quand la rivière ne quitte pas même son lit, les eaux débordent sur les terres cultivées, à tel point qu'il y a des centaines d'hectares de terres labourées qui sont tout à fait détruites.

Des réclamations ont été adressées au département des travaux publics.

Je prie M. le ministre d'examiner si elles ne sont pas fondées et s'il n'y a pas moyen de les prendre en considération.

J'appelle encore l'attention de M. le ministre et celle de la Chambre sur la police du halage Je désirerais que la Chambre mît à l'ordre du jour, dans le plus bief délai, le projet de loi sur la police du halage. Il n'y a aujourd'hui aucun règlement. Quand il y a peu de bateaux, ce sont les haleurs qui font la loi aux bateliers ; quand il y en a beaucoup, ce sont les bateliers qui font la loi aux haleurs.

Ces derniers constituent une espèce de république, en l'absence de toute police sur le halage ; ils n'ont aucun titre, aucune nomination, et ils prélèvent une contribution sur les pauvres ouvriers.

Il est donc nécessaire de faire cesser le plus tôt possible ces abus par le vote de la loi à laquelle j'ai fait allusion.

Je demande surtout qu'un règlement soit fait sur la police des haleurs ; car, outre le grand désordre qui existe dans le halage sur le haut Escaut, il y a de grands abus à signaler.

Il y a d'abord une injustice à signaler. C'est que des personnes se mettent arbitrairement à la tête des haleurs, perçoivent une espèce de contribution sur ces pauvres travailleurs et mettent aussi à contribution les bateliers.

Je ne puis donc qu'insister pour qu'un bon règlement soit arrêté au plus tôt sur la police du halage.

M. David. - L'honorable M. Desmet vient d'entretenir la Chambre de la nécessité de mettre à l'ordre du jour le projet de loi sur le halage et le pilotage.

La section centrale a terminé avant-hier ses travaux et elle a rejeté le projet de loi, tel qu'il a été présenté par le gouvernement. La section centrale veut s'assurer dans ce moment si l'article 415 du code pénal est applicable aux coalitions des ouvriers haleurs et pilotes. En cas de négative, M. le ministre de la justice serait prié de présenter un article supplémentaire au Code pénal pour faire rentrer ces ouvriers dans la catégorie de ceux qui peuvent être frappés par l'article 415 du Code.

Articles 12 à 15

« Art. 12. Canal de Gand au Sas-de-Gand. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 25,095. »

- Adopté.


« Art. 13. Canal de Maestricht à Bois-le-Duc. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 122,361. »

- Adopté.


« Art. 13bis. Canal de Maestricht à Bois-le-Duc. Construction de ponts tournants en remplacement du pont-levis de Neerhaeren et du passage de Soit (première moitié de la dépense) : fr. 30,000. (A porter dans la colonne des charges extraordinaires.) »

- Adopté.


« Art. 14. Canal de Pommerœul à Antoing. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 81,800. »

- Adopté.


« Art. 15. Sambre canalisée. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 114,000.

« Charge extraordinaire : fr. 5,000. »

- Adopté.

Article 16

« Art. 16. Canal de Charleroi à Bruxelles. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 77,300.

« Charge extraordinaire : fr. 36,200. »

- La section centrale propose de réduire le crédit de 17,000 francs.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je me rallie à cette rédaction.

M. Wautelet. - Messieurs, je ne parlerai pas de l'allocation pour l'entretien, mais je parlerai du canal de Charleroi lui-même.

Chaque fois qu'il est question de ce canal, le pays comme la Chambre doit regretter les dimensions excessivement restreintes du canal de Charleroi. Je voudrais que l'on s'occupât sérieusement de la question de savoir s'il n'y aurait pas lieu d'élargir immédiatement cette voie de communication.

Le canal de Charleroi est le point d'union du Nord et du Midi, de l'Escaut et de la Meuse ; il est réellement déplorable que cette jonction de deux navigations à grande section soit faite par un canal à petites sections. Il est inutile d'énumérer ici les inconvénients que cet état de choses présente déjà ; cela a été fait à diverses reprises, et tout le monde est d'accord sur ce point. On ne peut être arrêté dans l'exécution d'un travail aussi désirable que par la dépense que les travaux d'élargissement doivent occasionner.

J'ai vu figurer dans le rapport de la section centrale un chiffre qui me paraît exagéré.

Je crois qu'après une étude approfondie de la question, on n'arriverait pas à beaucoup près au chiffre de 15 millions qui est indiqué ; mais la dépense dût-elle même atteindre ce chiffre, je crois qu'on ne devrait pas reculer en présence de l'utilité incontestable que présenterait un semblable travail. Le canal de Charleroi rapporte au trésor public des sommes considérables ; évidemment, si des dimensions convenables lui étaient données, ces sommes augmenteraient encore ; elles doubleraient peut-être.

Je pense, messieurs, que si le pays reculerait devant la dépense à faire on pourrait encore tout en conservant au trésor le revenu actuel que donne le canal, mettre en concession le canal de Charleroi à une compagnie qui se chargerait des travaux d'élargissement, moyennant la perception à son profil des droits de navigation pendant un certain nombre d'années. Je soumets cette idée à la Chambre et à M. le ministre des travaux publics.

Déjà, une partie de cet élargissement a été exécutée aux abords de la Sambre et l'on peut évaluer, par le travail exécuté, à quel chiffre pourra s'élever la dépense totale pour tout le parcours. Je ne pense pas que ce chiffre puisse s'élever à plus de 10 millions de francs.

On s'effraye outre mesure, je crois, du passage des terrains au point de partage ; mais ce passage pourra s'exécuter, je pense, dans des conditions bien autrement favorables que celles qui ont eu lieu lors de la construction du canal actuel.

En effet la partie de la montagne qu'on devrait traverser sera asséchée par le percement exécuté pour le canal actuel.

C'est, du reste, une question à examiner. J'insiste surtout sur l'utilité générale de l'exécution de ce travail, que je recommande d'une manière toute particulière à la sollicitude de M. le ministre des travaux publics.

- L'article 16 est mis aux voix et adopté.

Article 17

« Art. 17. Escaut. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 32,150.

« Charge extraordinaire : fr. 24,054. »

M. Van Overloop. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour (page 1024) faire des réserves relativement à la réponse que le gouvernement a faite à une question qui lui avait été adressée par la section centrale.

La section centrale ayant demandé que le gouvernement fît connaître plus exactement la situation de l'Escaut devant le bourg de Tamise, le gouvernement a répondu en ces termes :

« Il résulte d'un rapport adressé au département des travaux publics, sous la date du 24 mai 1855, par l'inspecteur général des ponts et chaussées, que si des sondages, tels que ceux qui venaient d'être opérés à cette époque, avaient été faits depuis une dizaine d'années, on aurait vraisemblablement été dans le cas de reconnaître que le principal courant de l'Escaut s'était, pendant ces dix années, notablement rapproché de la rive sur laquelle se trouvé Tamise. »

« Ce même rapport établit que bien que, le long de la rive opposée, le fond du lit de la rivière s'élevât sur une assez grande largeur au-dessus du niveau de la marée basse, et bien qu'il y eût, dans le chenal qui longe presque immédiatement la rive, du côté de Tamise, jusqu'à 8 et 9 mètres de profondeur à marée basse, la situation n'était cependant pas dès lors assez menaçante pour qu'il y eût lieu d'aviser immédiatement aux moyens d'en conjurer les dangers.

« C'est dans cet état des choses que le département des travaux publies a donné des ordres pour que des sondages soient faits de six mois en six mois, à l'effet de constater les changements que subit le banc qui se forme en face de Tamise.

« Les sondages opérés dans le cours de l'année 1856 ont constaté que le banc existant immédiatement en face de Tamise s'est encore élevé et que la passe du fleuve s'élargit et s'approfondit.

« La situation dans laquelle se trouve la rive sur laquelle est situé le village de Tamise, semble indiquer que le moment n'est pas éloigné où cette commune devra songer à faire exécuter des travaux de défense. »

Il semble résulter de cette réponse du gouvernement, que si l'état des choses continue à s'aggraver, c'est la commune de Tamise qui devra faire à ses frais les travaux de défense. Je reconnais, qu'en principe, les voisins des cours d'eau doivent se défendre eux-mêmes ; mais la situation change quand les dangers contre lesquels on doit se défendre sont le fait d'un tiers, par exemple du gouvernement. Or, l'état de choses dont on se plaint à Tamise est, paraît-il, exclusivement le fait du gouvernement. Donc, si des travaux deviennent nécessaires, il sera de toute équité que le gouvernement les fasse exécuter à ses frais.

A la page 28 du rapport de la section centrale il semble, reconnu que c'est le gouvernement qui est la seule cause de l'état de choses dont je me plains. Dans une réponse faite à la section centrale par le gouvernement je lis :

« Des travaux de prolongement et d'exhaussement exécutés, sans autorisation, par un propriétaire riverain, à un épi situé sur la rive droite de l'Escaut, en aval de l'embarcadère établis vis-à-vis de la commune de Tamise, ayant été signalés comme constituant la cause de cet ensablement, le gouvernement a exigé que cet épi fût rétabli dans son état primitif. »

Voici les faits qui se sont passés devant Tamise : un propriétaire de la rive opposée avait établi sans autorisation du gouvernement deux épis. A la suite de ces travaux un ensablement s'est établi.

Immédiatement, le bourgmestre de Tamise, qui a toujours l'œil ouvert sur ce qui concerne la commune qu'il administre si bien, a averti le gouvernement ; il a fait ressortir les conséquences qui pouvaient résulter de cet état de choses illicite ; de nombreuses réclamations ont eu lieu sans résultat ; depuis cinq ans mes collègues et moi, nous nous plaignons de l'état de l'Escaut devant Tamise et ce n'est, je pense, que l'année dernière ou il y a deux ans, que le gouvernement s'est décidé à faire enlever les deux épis. Dans l'intervalle, le lit de l'Escaut s'est déplacé et les eaux du fleuve menacent d'entamer la rive sur laquelle se trouve Tamise.

L'obligation de réparer le tort qu'on cause à autrui par son fait ou par sa négligence à remplir ses devoirs, existe pour le gouvernement comme pour les particuliers ; je suppose que l'état des choses devant Tamise continue à s'aggraver et que des travaux de défense deviennent indispensables ; eh bien, si la nécessité d'exécuter ces travaux est le résultat de la négligence des agents du gouvernement, ce ne doit pas être à Tamise de les faire à ses frais.

Je n'entends pas discuter la question en ce moment, mais seulement faire mes réserves quant à la réponse faite par le gouvernement à la question posée par la section centrale.

M. Julliot. - Que la commune assigne le propriétaire.

M. Van Overloop. - La commune de Tamise n'avait rien à lui dire, la police des grandes voies navigables appartient à l'Etat ; la commune de Tamise a rempli ses devoirs en dénonçant l'état des choses. Le gouvernement n'a pas tenu compte de l'avis, c'est par suite de la négligence du gouvernement que la situation de l'Escaut est devenue dangereuse pour la commune de Tamise.

Vous comprenez, messieurs, qu'il s'agit d'une question d'équité.

Je n'insiste pas ; j'espère que la situation ne s'aggravera pas et que les travaux de défense ne deviendront pas indispensables ; mais s'ils le deviennent, le gouvernement, j'en suis convaincu, n'hésitera pas à faire ce que l'équité lui commande d'après moi et d'après mes honorables collègues. MM. de T'Serclaes et Janssens, au nom desquels j'ai fait des réserves, comme en mon nom, dans l'intérêt d'une importante commune de notre arrondissement.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - La réponse à la question de la section centrale a été faite en considérant les choses en droit d'une manière générale ; l'honorable préopinant vient de compliquer la question de droit d'une question de fait, qui n'a pas été examinée ; si, par suite des constructions qui ont été exécutées sur la rive opposée, on devait faire des travaux de défense sur la rive où est située Tamise, il y aurait à voir comment les dépenses devraient être faites, et quelle part devrait être supportée soit par le gouvernement, soit par le propriétaire qui a fait les constructions dont il s'agit.

- L'article est mis aux voix et adopté.

Article 18

« Art. 18. Lys. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 19,200.

« Charge extraordinaire : fr. 36,800. »

- Adopté.

Article 19

« Art. 19. Meuse dans les provinces de Liège et de Namur. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 27,200.

« Charge extraordinaire : fr. 220,000. »

M. Wasseige. - Je viens renouveler, à propos de cet article, les observations que j'ai présentées l'année dernière et qui sont d'autant plus opportunes cette année, que le total des dépenses à faire pour améliorer le cours de la Meuse nous est indiqué par le gouvernement. Il résulte des renseignements remis à la section centrale, que pour exécuter complètement les travaux à faire de la Meuse depuis la frontière de France jusqu'à Chokier, il faut encore une somme de 860,000 fr. ; en calculant d'après l'allocation qu'on inscrit chaque année au budget, il faudra donc encore quatre ans pour améliorer le cours de la Meuse convenablement sur tout son parcours. J'ai déjà fait remarquer que tant que les travaux n'étaient pas terminés, ils avaient peu d'utilité.

En effet, ces travaux sont destinés à donner un plus fort tirant d'eau au cours de la rivière ; s'il reste quelques parties du parcours où ce tirant ne soit pas atteint, il est évident que ce qui a été fait sur le reste ne peut servir à grand-chose.

Je prie M. le ministre de nous dire s'il ne croirait pas convenable de répartir les travaux à faire à la Meuse en moins de quatre années. L'année dernière M. le ministre a appliqué cette manière de faire aux routes en construction, il a demandé un crédit extraordinaire de 400 mille francs pour terminer les routes commencées en alléguant que, tant qu'elles n'étaient pas terminées, elles ne produiraient presque rien.

Cette raison s'applique à bien plus forte raison à la Meuse, car s'il est incontestable que les routes offrent déjà une certaine utilité dans le parcours qui est achevé, sans qu'il soit nécessaire qu'elles soient entièrement terminées, il n'en est pas ainsi pour la Meuse ; car, je le répète, dès qu'une partie, si minime que soit son étendue, reste à améliorer, à approfondir tout ce qui a été fait jusque-là est presque sans utilité.

Or, le chiffre total de la dépense est connu, il n'est pas question de l'augmenter le moins du monde, il s'agit tout simplement d'anticiper sur les échéances inscrites annuellement au budget, et cela dans un intérêt général évident, dans l'intérêt du batelage et du trésor public ; il me paraît donc que rien ne peut s'opposer à ce que M. le ministre avise, dans son prochain budget, à donner satisfaction à mes légitimes observations.

M. Thibaut. - J'appuie les observations présentées par l'honorable M. Wasseige. Il est d'autant plus nécessaire d'augmenter le crédit annuel destiné à l'amélioration de la Meuse, que le chiffre global indiqué par M. le ministre des travaux publics, comme pouvant faire face à toutes les dépenses qui restent à faire, sera très probablement insuffisant. Nous sommes donc menacés d'attendre encore longtemps le complément de travaux indispensables, si M. le ministre n'a pas à sa disposition des sommes plus élevées que celles qui sont portées aux budgets précédents.

Je n'ai pas, par devers moi en ce moment les documents qui établissent exactement le chiffre de la dépense. Mais je crois que M. le ministre des travaux publics avouera lui-même qu'il serait difficile d'assurer avec la somme de 861,000 fr., l'exécution des travaux nécessaires à la Meuse.

Je verrais donc avec plaisir que M. le ministre des travaux publics demandât une augmentation de crédit, afin de hâter les travaux et de faire exécuter en deux ans ce qui, avec le système adopté jusqu'ici, exigerait au moins un délai de quatre ans.

Dans la note remise par M. le ministre de la justice à la section centrale et qui est insérée dans le rapport, je vois que le gouvernement fait étudier la question de barrages à fermettes, pour la partie de la Meuse comprise entre Namur et Chokier. Je suppose que les frais de ces études seront imputés sur le crédit de 10,000 fr. qui figure sous le littera c de l'article 7. Mais je demanderai à l'honorable ministre des travaux publics, en supposant que ce système de barrages à fermettes soit adopté par lui, s'il compte demander un crédit spécial pour le (page 1025) mettre à exécution, ou s'il compte le faire exécuter au moyen des crédits portés chaque année au budget.

Dans ce dernier cas, je n'espère qu'il n'entrera pas dans les intentions de l'honorable ministre d'employer une partie du crédit destiné à achever les travaux d'amélioration à la Meuse vers la France, pour commencer des travaux d'une autre espèce, et appartenant à un autre système.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je crois que l'honorable membre fait erreur lorsqu'il, pense que les frais d'études doivent être imputés sur le littera c de l'article 7. Ils doivent l'être sur l'article 31, relatif aux frais d'études des canaux et rivières.

Ces frais sont au reste si peu considérables, qu'ils ne doivent pas préoccuper l'honorable préopinant ; les études sont faites par des ingénieurs et des conducteurs dont les traitements sont imputés sur l'article personnel des ponts et chaussées.

Les honorables MM. Wasseige et Thibaut trouvent insuffisante la somme portée, au budget, pour travaux d'amélioration de la Meuse de Namur à la frontière de France.

Ils demandent qu'il soit pourvu à ces travaux au moyen de crédits spéciaux et que les travaux soient exécutés en deux ans au lieu de quatre. Je crois que cette manière de procéder compromettrait les travaux auxquels s'intéressent les honorables membres ; car le vote de crédits spéciaux rencontrerait peut-être quelques difficultés, tandis que quand un crédit a pris place au budget, il est comme on l'a fait remarquer, difficile de l'en faire disparaître. Les travaux s'exécutent ainsi lentement, mais avec sécurité. Il est certain que l'on obtient ainsi des allocations relativement importantes.

Je crois que les honorables membres feront bien de s'en rapporter à la prudence du gouvernement.

M. Lelièvre. - L'année dernière l'un de mes honorables collègues avait demandé que la somme allouée par la loi de 1851 pour amélioration de la Sambre près de la ville de Namur fût employée aux travaux de la Meuse. En ce qui me concerne, messieurs, je pense que puisque l'on n'exécute pas les travaux à la Sambre, il convient d'employer la somme à des travaux qui profitent plus particulièrement à la ville de Namur, par exemple à l'ouverture de la rue de l'Escalier. Je ne puis que me référer aux observations que j'ai présentées à cet égard dans la discussion générale.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Il y a une loi qui m'empêche de le faire, attendu qu'il y a spécification dans les articles.

- L'article 19 est mis aux voix et adopté.

Articles 20 à 23

« Art. 20. Meuse dans la province de Limbourg. Entretien et travaux d'amélioration. : fr. 28,784 24 c.

« Charge extraordinaire : fr. 103,015 67c. »

- Adopté.


« Art. 21. Dendre. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 12,600.

« Charge extraordinaire : fr. 155,875. »

- Adopté.


« Art. 22. Rupel. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 17,000.

« Charge extraordinaire : fr. 31,000. »

- Adopté.


« Art. 22bis. Travaux de déplacement de la digue capitale du polder de Ruypenbroek (première partie de la dépense) : fr. 100,000. »

- Adopté.


« Art. 23. Dyle et Demer. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 23,500.

« Charge extraordinaire : fr. 20,000. »

- Adopté.

Article 24

« Art. 24. Senne. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 2,250.

« Charge extraordinaire : fr. 6,000. »

M. Dubus. - J'appelle l'attention de M. le ministre des travaux publics sur l'écoulement des eaux de la Senne. La province de Brabant a fait des sacrifices assez considérables pour améliorer le cours de cette rivière ; le budget provincial porte annuellement de ce chef une somme de vingt mille francs.

Malheureusement les travaux exécutés ne produisent que de médiocres résultats. Le canton de Vilvorde particulièrement a beaucoup à souffrir des fortes inondations, par ce motif qu'en aval de Vilvorde, c'est-à-dire depuis Sempst jusqu'au Rupel, la province d'Anvers néglige de faire les travaux indispensables à l'écoulement des eaux provenant de la province de Brabant. Il serait à désirer que le gouvernement obligeât l’administration provinciale d'Anvers à s'exécuter. M. le ministre des travaux publics a à sa disposition des moyens propres à obtenir ce résultat, et j'appelle son attention sur ce point.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Il est vrai, comme l'a dit l'honorable membre, que la province de Brabant est appelée plus directement que la province d'Anvers à concourir à l'élargissement des débouchés pour l'écoulement des eaux de la Senne.

La province d'Anvers et quelques membres de la Chambre ont cru que cet état de choses était fort nuisible aux riverains de la Senne en aval de Vilvorde. L'examen que j'ai fait de cette question me permet, d'affirmer que si le lit de la Senne n'est pas élargi entre Bruxelles et Hal, il n'y a aucun danger pour les riverains en aval de Vilvorde, et que l'état actuel des choses n'est pas périclitant pour eux.

Je veillerai de tout mon pouvoir, grâce à l'intervention que la répartition des subsides me donne dans cette affaire, à ce que les provinces s'entendent pour que les travaux s'exécutent avec assez de simultanéité et de manière qu'il n'y ait de préjudice pour personne.

- L'article 24 est mis aux voix et adopté.

Article 25

« Art. 25. Canal de Gand à Ostende. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 26,333.

« Charge extraordinaire : fr. 15,500. »

- Adopté.

Article 26

« Art. 26. Canal de Mons à Condé. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 13,000.

« Charge extraordinaire : fr. 23,000. »

La section centrale propose de réduire le crédit de 23,000 francs à 18,000 francs.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je me rallie à cette proposition.

- L'article, modifié comme le propose la section centrale, est adopté.

Articles 27 à 31

« Art. 27. Canal de jonction de la Meuse à l'Escaut. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 43,112.

« Charge extraordinaire : fr. 15,200. »

- Adopté.


« Art. 28. Canal d'embranchement vers Turnhout. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 8,025.

« Charge extraordinaire : fr. 4,209. »

- Adopté.


« Art. 29. Canal d'embranchement vers le camp de Beverloo. Travaux d'amélioration ; charge extraordinaire : fr. 14,875. »

- Adopté.


« Art. 30. Petite Nèthe canalisée. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 11,000.

« Charge extraordinaire : fr. 34,000. »

- Adopté.


« Art. 31. Moervaert. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 1,695.

« Charge extraordinaire : fr. 5,810. »

- Adopté.

Article 32

« Art. 32. Canal de dérivation de la Lys. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 4,649.

« Charges extraordinaires : fr. 3,500. »

M. Sinave. - Dans la session précédente, j'ai fait connaître à la Chambre des faits graves qui se sont passés à l'occasion du canal de Schipdonck. La Chambre a jugé qu'il y avait des motifs suffisants pour ordonner une enquête sur deux points très distincts qui ont été signalés.

Le premier concernait la conduite des fonctionnaires qui, au mépris, de tous les principes d'une bonne administration et de la loi sur la comptabilité, avaient provoqué à la cour des comptes la liquidation d'expropriations nombreuses de récoltes sur pied. Les plans, devis et cahiers des charges n'étant pas encore faits et dans l'incertitude où l'on était de ne pouvoir commencer les travaux avant deux ou trois années, ces récoltes n'auraient pas dû être détruites avant l'époque de leur maturité.

Avoir agi comme on l'a fait, c'était imposer, en toute connaissance de cause, une perte énorme au trésor, faute qu'il est impossible de justifier.

Le second point concernait les loyers des terrains qui appartenaient à l'Etat.

Quels sont ceux qui avaient tiré profit des récoltes pendant les deux ou trois années subséquentes ? M. le ministre des travaux publics a dénoncé ce fait à la justice. Une enquête judiciaire a eu lieu, qui se trouve déposée aujourd'hui sur le bureau. Je n'ai plus à m'en occuper.

Qu'il me soit permis de le dire, on n'a pas cherché à atteindre les (page 1026) vrais coupables : ce sont ceux qui, par leur négligence ont été la cause de tous ces désordres. Ceux qui ont été frappés par une mesure sévère méritent toute l'indulgence de l'honorable ministre et de la Chambre, d'engager la Chambre à les absoudre pour une faute qui n'a aucun caractère de gravité, et je prie M. le ministre de les réintégrer dans leurs fonctions sans aucun blâme, pour l'avenir de leur carrière administrative.

Pour ce qui est du premier point, une simple solution administrative aurait suffi. Dans l'enquête déposée au bureau, M. le ministre fait simplement mention que les fonctionnaires se sont reposés les uns sur les autres, en d'autres termes qu'aucune surveillance n'a été exercée. D'où il faut conclure que personne n'est responsable de ce qui s'est passé.

En présence de cette déclaration, s'il devient inutile d'insister davantage et de revenir ainsi sur un passé irrémédiable, il est nécessaire de prendre des mesures efficaces pour prévenir de pareils désordres dans l'avenir. Au besoin, d'autres faits importants pourraient être cités pour constater les vices qui existent depuis longtemps dans l'administration des ponts et chaussées et qui paralysent complètement l'action du ministre des travaux publics, au point qu'il se trouve privé de toute garantie pour couvrir sa propre responsabilité.

Que se passe-t-il dans l'exécution des travaux ? Quand le ministre a approuvé les plans, devis, cahiers des charges et adjudications, l'administration chargée de l'exécution, nomme pour les diriger l'ingénieur auteur des plans et lui donne plein pouvoir pour faire la réception des matériaux, pour surveiller l'exécution et enfin pour accepter provisoirement et définitivement les travaux qu'il certifie faits conformément à toutes les prescriptions.

Toutes ces opérations se font sans le plus léger contrôle. C'est cet état de choses que j'ai l'honneur de signaler à M. le ministre.

Il me serait facile d'indiquer le remède, mais je préfère laisser à M. le ministre l'initiative de la proposition. Ferme dans son dessein de réprimer les abus, il se mettra, je n'en doute pas, au-dessus des susceptibilités qu'un contrôle sévère pourrait éveiller.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je regrette que l'honorable préopinant soit revenu sur les faits fâcheux qu'il a signalés l'année dernière à la Chambre. Les mesures très sévères qui ont été prises envers certains fonctionnaires publics doivent lui donner la conviction que je n'ai pas l'intention de tolérer des abus dès qu'ils sont démontrés.

L'honorable membre semble encore faire planer d'autres soupçons sur l'administration des travaux publics. Je le prie de s'abstenir de toute insinuation parce que les membres de la Chambre sont dans une position tellement privilégiée qu'il est impossible aux personnes attaquées de se défendre.

M. Sinave. - Je n'attaque personne.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Non, vous vous exprimez en termes généraux ; vous ne nommez personne. Mais si même une personne était désignée, la défense lui serait impossible. La Chambre a toujours usé d'une grande réserve en pareille circonstance et je crois qu'elle a bien fait.

L'honorable membre voudrait voir prendre des mesures pour qu'à l'avenir les abus qu'il craint ne se reproduisent plus.

Je le prie de remarquer que les réceptions de travaux ne se font pas aussi facilement qu'il le croit ; car, en province, à côté de l'ingénieur qui exécute, il y a l'ingénieur en chef qui doit donner son visa ; à l'ingénieur qui surveille certifie que les travaux ont été exécutés conformément au cahier des charges. Mais le mandat n'est donné que par l'ingénieur en chef qui a le droit de contrôle.

J'avoue qu'il y a quelque chose de vrai dans ce que vient de dire l'honorable membre ; c'est que l'ingénieur en chef est l'homme de l'administration bien plus que l'homme du ministre. Le ministre ne juge que sur pièces, et il lui manque l'œil qui va voir en province. Sous l'ancienne administration, le pays était partagé en inspections divisionnaires et chaque ingénieur en chef avait au-dessus de lui un fonctionnaire qui, dans les circonstances graves, pour les réceptions importantes, était délégué pour signer en troisième le procès-verbal de réception.

C'était une très bonne mesure, et il est à regretter que le désir d'économies ait fait supprimer ces fonctions en 1850.

Je crois qu'il n'est pas nécessaire de revenir à la création de quatre inspecteurs divisionnaires, mais que si le ministre avait à Bruxelles, auprès de lui, un homme qui serait délégué pour les inspections générales, pour assister de sa personne à des réceptions définitives et signer au certificat avec les ingénieurs qui ont exécuté les travaux, ce serait une très grande garantie.

L'inspecteur général des ponts et chaussées, qui existe au département des travaux publics, pourrait être chargé de cette mission. Mais il est seul pour tout le pays et l'extension qu'ont prise les affaires de concession de chemins de feront exigé que ce fonctionnaire, qui a une aptitude spéciale pour l'étude de ces sortes de questions, donnât tous ses moments à des travaux de cabinet, à l'étude des avant-projets de concession que le ministre doit soumettre à la Chambre.

Le moyen d'arriver au résultat signalé par l'honorable membre, serait de créer un second inspecteur, qui resterait à Bruxelles et qui aurait pour mission spéciale de se rendre dans les provinces. Je, suis d'autant plus disposé à prendre cette mesure, qu'elle n'entraînera au budget aucune dépense, ou presque aucune dépense, attendu qu'un inspecteur divisionnaire remplit en ce moment les fonctions d'ingénieur en chef, et reçoit un traitement supérieur à son grade.

J'ai déjà, en conversation particulière, fait connaître à l'honorable membre que j'étais disposé à adopter cette mesure qui mûrit depuis plusieurs mois, et je puis lui renouveler l'assurance, en séance publique, que si les ressources du budget n'y font obstacle, ce que je ne pense pas, la mesure sera mise à exécution.

M. Sinave. - L'honorable ministre m'accuse de jeter le blâme sur l'administration ; mais si je faisais partie de l'administration, je demanderais moi-même qu'il y eût un contrôle pour toutes les opérations. Je sais bien qu'il y a dans l'administration des personnes qui craignent le contrôle ; mais ceux qui remplissent fidèlement leur devoir ne le craignent pas et ne peuvent pas être compromis pour ceux qui le craignent.

Je n'ai rien à ajouter, puisque l'honorable ministre abonde dans mon sens. Je n'ai accusé personne. Je saisirai même cette occasion pour prier M. le ministre de révoquer les dispositions rigoureuses qui ont été prises envers des malheureux qui ne sont pas cause de ce qui est arrivé. Les terrains étaient pour ainsi dire abandonnés, et les personnes dont il s'agit n'ont pas cru commettre un acte blâmable en agissant comme elles l'ont fait.

M. T'Kint de Naeyer. - Messieurs, plusieurs sections ont insisté pour que le canal de dérivation de la Lys à la mer du Nord, dont il a été si souvent question dans les débats de cette Chambre, et que je voudrais bien voir disparaître, soit enfin achevé. La réponse que M. le ministre des travaux publics a donnée à la section centrale est, à peu de choses près, la même que l'année dernière. L'honorable ministre constate qu'il sera oblige de recourir de nouveau à la législature 1° pour l'achèvement de la deuxième section, c'est-à-dire de la section comprise entre Maldeghem et le canal de Bruges à l'Ecluse ; 2° pour les travaux d'établissement du chenal à la mer.

Je comprends, messieurs, que lorsque les travaux n'étaient pas complètement étudiés, le gouvernement ait tardé à demander de nouveaux crédits ; mais aujourd'hui, si je suis bien informé, tous les plans ont été définitivement arrêtés et approuvés par le corps des ponts et chaussées. Dès lors de nouvelles lenteurs seraient injustifiables, car il ne s'agit plus, en réalité, que de simples mesures d'exécution.

Il faut bien le reconnaître, messieurs, au point de vue des discussions parlementaires, la question a fait un pas immense.

La nécessité d'accélérer les travaux autant que possible n'est plus contestée. Les riverains du haut Escaut se joignent à nous pour le demander. Ils ont compris qu'il n'y a qu'un moyen de sortir de la situation fâcheuse qui leur est faite, c'est, avant tout, de dégager le fleuve des eaux que la Lys y déverse à Gand. Sans cela, les travaux de rectification ne feraient que déplacer le mal. Le crédit de 1,500,000 fr. alloué par la loi du 20 décembre 1851 ne saurait être utilement employé et l'on devra se borner à la construction de quelques barrages.

Il importe donc que les travaux soient poussés sur toute la ligne avec une activité égale à leur importance.

Si M. le ministre des travaux publics attend jusqu'à la fin de la session pour réclamer un crédit complémentaire, les adjudications ne pourront avoir lieu que dans quelques mois et ce sera encore une campagne perdue, au moins en ce qui concerne la deuxième section du canal.

Il y va des intérêts les plus graves, les plus pressants de plusieurs provinces, il y va de la dignité de la Chambre qui ne s'est jamais refusée à voter les fonds nécessaires pour des travaux décrétés en principe, il y a plusieurs années.

Je demande que toute hésitation cesse et que la loi du 20 décembre 1851 soit loyalement exécutée.

M. Vander Donckt. - Messieurs, j'appuie les observations très judicieuses que l'honorable préopinant, M. T'Kint de Naeyer, vient de faire valoir sur l'achèvement des travaux du canal de Schipdonck. Si je n'ai pas pris la parole sur l'article relatif à l'Escaut, ce n'est pas parce que les inondations ont diminué, ou que les calamités sont moindres, c'est que j'ai la confiance que l'achèvement des travaux du canal de Schipdonck doit soulager considérablement les calamités des inondations désastreuses de l'Escaut qui ont encore lieu annuellement sur les rives du haut Escaut. D'après l'avis du corps des ponts et chaussées il n'y a que l'achèvement des travaux du canal de Schipdonck qui puisse améliorer la situation des rives du haut Escaut.

Depuis mon entrée à la Chambre, messieurs, je n'ai cessé de réclamer contre ces inondations qui ravagent nos campagnes et nos belles prairies de l'Escaut. Le canal a été décrété par la loi de 1851, et les travaux de la dérivation de la Meuse, qui ont été décrétés en même, temps, sont terminés depuis longtemps, tandis que le canal de Schipdonck est encore inachevé. Comme l'honorable préopinant l'a parfaitement fait observer, les 1,500,000 francs votés pour les mesures à prendre et les travaux à exécuter sur l'Escaut restent sans emploi, en attendant que l'on voie quels sont les résultats de la construction du canal de Schipdonck, au moyen duquel on nous a constamment renvoyés pour toutes les mesures provoquées en ce qui concerne le haut Escaut.

Remarquez, messieurs, que les rives du haut Escaut se trouvent (page 1027) exactement dans la position que l’honorable M. Van Overloop a signalée pour la commune de Tamise. C'est par le fait du gouvernement, c’est pour avoir abaissé le radier d'Antoing que nous subissons ces inondations, il y à donc un double motif pour que le gouvernement obvie à ces inondations et presse autant que possible l'achèvement des travaux sur ce canal, et qu'il demande- en temps utile à la Chambre les fonds qu'il croit nécessaires à cette fin.

M. de T’Serclaes. - Messieurs, le dossier des diverses enquêtes faites sur les produits de terrains acquis pour la construction du canal de Schipdonck est déposé sur le bureau. La section centrale l'a examiné avec des intentions sévères, suffisamment justifiées par ce qui s'est passé antérieurement dans cette Chambre. Je dois reconnaître que cet examen lui a donné la conviction que le gouvernement avait fait ce qu'il devait faire, qu'il avait même d'une grande rigueur envers les agents inculpés.

Aujourd'hui il ne reste qu'une seule chose à faire, c’est d’insister pour faire verser le produit des récoltes qui appartient à l’État entre les mains des agents du trésor.

M. de Smedt. - Messieurs, si l'on tarde encore à achever le canal de Schipdonck, on s'exposera à de graves dangers : on sera obligé d'enlever beaucoup de barrages, et si les eaux supérieures arrivent en abondance, comme leur cours ne sera plus entravé par ces barrages, vous risquez de tout submerger.

On vous a signalé, messieurs, la deuxième section, celle de Maldeghem à Damme ; pour cette section, il y a un siphon à faire, et là encore l'absence de ce siphon occasionnera des inondations désastreuses dans les environs de la mer, s'il y a une crue d'eau un peu forte.

M. le ministre a dit que cette année on a beaucoup travaillé ; je crois que cela n'est pas fort exact ; on a, au contraire, marché fort lentement.

M. Sinave. - Messieurs, je ne sais pas si les honorables membres ont été sur les lieux, mais si au commencement, les travaux n'ont pas marché avec rapidité c'est que les travaux d'art, l'écluse de mer, demandaient beaucoup de soins. L'écluse de mer est maintenant dans un état tel, qu'il n'y a plus rien à craindre.

Quant au canal, je crois qu'on y travaille activement et qu'on ne peut pas y travailler plus activement. Il y a d'honorables membres qui se montrent vraiment impatients. Je siège depuis longtemps à la Chambre ; je ne cesse de réclamer l'exécution du canal de Zwynaerde, et le canal ne s'exécute pas ; et s'il s'exécutait, il n'y aurait plus d'inondation.

L'honorable M. Desmet vient de révéler le petit secret. Il y a à Gand des corporations ; vous êtes impuissants, à Gand, à leur faire entendre raison. La seule localité où il existe des vestiges de ces anciennes corporations, c'est elle où l'on se plaint. La liberté est partout, excepté chez vous. Le conseil communal de Gand est impuissant à faire comprendre à ces gens-là qu’il n'existe plus de corporations privilégiées, que cet état de choses ne peut pas continuer.

L'administration communale de Gand n'ose pas agir pour réprimer ces conflits. Il ne passe pas dans la ville de Gand un bâtiment qui ne soit inquiété par ces corporations. Vous voulez la liberté, vous voulez l'échange libre et la liberté du travail, commencez par être libres chez vous.

Il y a un devoir à remplir par M. le ministre des travaux publics, un grand devoir qu'il néglige fortement. D'où, vient que ces corporations ont tant à dire ? C'est parce qu'il n'y a pas de loi qu'on puisse appliquer à ces corporations.

J'ai déjà eu l'honneur d'engager M. le ministre des travaux publics à retirer la loi qu'il a proposée sur la police du halage et à faire ce qu'indique la section centrale, c'est à-dire demander l'application de l'article 415 du code pénal aux haleurs, et alors disparaîtront les énormes abus qui existent aujourd’hui,

Plusieurs fois des plaintes ont été portées devant les tribunaux ; la cour de Gaud notamment a déclaré qu'il n'y avait pas de dispositions législatives qu'on pût appliquer à l'espèce.

Lorsque à Gand un batelier étranger se rend à terre et qu'il n'est pas d'accord avec les membres de ces corporations, on le roue de coups et on le menace de le jeter à l’eau.

Voilà ce que j’avais à dire, en ce qui concerne, le halage et le pilotage.

Je demanderai à M. le ministre des travaux publics s'il est d'avis de proposer bientôt la coupure de Zwynaerde.

M. Maertens. - L'honorable M. Sinave semble vouloir prétendre que nous avons tort d'insister pour obtenir les fonds destinés à l'achèvement du canal de dérivation de la Lys vers la mer. Il pense qu'il serait plus utile de creuser un canal de Zwynaerde à Melle qui nous préserverait non seulement des inondations, mais viendrait mettre un terme aux exactions de certaines corporations. S'appuyant sur ce dernier point, il a dépeint l'action de ces corporations sous les couleurs les plus sombres, et ne trouve d’autre remède à opposer à leurs privilèges que d'enlever à la ville de Gand les avantages qu'elle retire de sa situation sur un des plus beaux fleuves du pays.

Quant à ce qui regarde les corporations dont a parlé l'honorable membre, je pense que le moment n’est pas venu de s'en occuper, puisque la Chambre est saisie d'un projet de loi destiné à réglementer le halage et le pilotage le long de nos fleuves et canaux, il serait inutile, je pense, de traiter aujourd'hui cette question d'une manière incidente.

Quant à la partie des observations présentées par l'honorable membre, qui rentrent dans la discussion actuelle, je n’hésite pas à dire qu’il se trompe lorsqu’il est d’avis qu’on mettra un terme aux inondations qui sésolent nos Flandres par le projet de dérivation qu'il préconise.

En effet, tous les ingénieurs qui ont étudié la question ont été unanimes pour déclarer qu’il fallait commencer par dériver la Lys avant de faire un travail sérieux pour le haut Escaut.

Cette opinion a été défendue depuis nombre d'années dans cette enceinte par ceux-là mêmes qui sont intéressés à soutenir les intérêts des riverains de l’Escaut.

Que deviendrait la situation du bas Escaut si on entrait dans cette voie désastreuse ?

L'honorable M. Dedecker, entre autres, n'a cessé, en qualité de député de Termonde, de protester contre un pareil système ; il a toujours prétendu, avec raison, que ce serait déplacer le mal, et aggraver la position des riverains du bas-Escaut au profit de ceux du haut Escaut ; que c'était là un état de choses qu'il ne pouvait accepter au nom des intérêts qu'il avait à défendre.

Mais l'honorable membre va beaucoup plus loin, il veut, détourner la navigation de la ville de Gand pour la punir de ce qu'il appelle des abus du moyen âge. Ce point de la question est fort, grave, et je dirai sans détour que la ville que j’ai l'honneur de représenter ne pourrait consentir à ses projets.

Il n'aura pas réfléchi, sans doute, que lorsqu'on dérive un fleuve, dans les conditions qu'il voudrait, c'est-à-dire en rendant la dérivation navigable, la partie délaissée s'envase, par défaut d'un courant assez rapide ; or, la partie délaissée serait celle qui traverse la ville de Gand.

Il n’est donc pas étonnant, que nous fassions nos réserves pour un état de choses qui nous enlèverait la navigation sur l'Escaut dans l'intérieur de la ville, avantage que Gand possède depuis des siècles : et qui a été sans doute la principale raison d'être de sa fondation. Ce serait faillir à notre devoir que de ne pas repousser l'éventualité d'une semblable position.

Je soutiens donc, avec plus d'insistance que jamais, la nécessité du prompt achèvement du canal de Schipdonck, et j'espère que M. le ministre des travaux publics, comprenant toute la légitimité de nos réclamations, s’empressera de demander à la Chambre les crédits nécessaires pour terminer cet utile travail.

M. Sinave. - Messieurs, je sais bien que les honorables députés de Gand ont toujours été en opposition avec nous. Ils nous ont toujours accusés d'être contraires à l'exécution des travaux qu'ils réclamaient, Nous n'avons jamais combattu les allocations de fonds. Qu'est-ce que nous avons dit ?

Si nous sommes tenus de recevoir vos eaux, au moins faites les couler le plus convenablement possible. Jamais nous ne nous sommes opposés à les recevoir.

On vient nous dire : La question doit être étudiée. Mais depuis que je fais partie de la Chambre on étudie ; on pourrait étudier comme cela pendant un siècle.

Ce que je demande qu'on fasse à l'instant, c'est qu'on empêche la perception de ce droit que vous n'avez pas le droit de percevoir ; je demande que vos corporations soient tenues de respecter les bateliers qui passent par votre ville ; qu'on ne les rançonne pas, et surtout qu'on ne les jette pas à l'eau quand on ne peut pas les rançonner.

S'il faut encore attendre quinze ans pour avoir la coupure de Zwynaerde, nous attendrons. Mais, pour le moment, je demande qu'on réprime les prétentions de vos corporations.

M. de Smedt. - Messieurs, j'ai demandé la parole quand M. Sinave m'a brusquement reproché de vouloir conserver les anciennes corporations. Mais l’honorable membre s'est trompé, il a pensé que j'avais parlé de la corporation des compagnons haleurs de la ville de Gand ; au contraire, j'ai parlé des haleurs qui se trouvent dans les stations de halage, entre Gaud et Audenarde, des haleurs de campagne ; et ici je voudrais, quoi qu'en dise M. Sinave, je voudrais que les corporations fussent rétablies. Si ces corporations existaient, ce serait au grand avantage de ces pauvres haleurs, qui auraient une meilleure position, et le travail du halage se ferait, avec plus d'ordre, et les haleurs en profiteraient beaucoup, tandis qu'aujourd'hui il y a une véritable anarchie et à leur détriment.

Messieurs, c'est, une erreur de croire qu’un coupure du Zwynaerde satisferait tous les intérêts : ce serait tout bonnement déplacer lemal et occasionner des inondations sur le bas Escaut. Une partie de l’arrondissement de Gand et tout l’arrondissement de Termonde souffriraient considérablement si la mesure préconisée par l'honorable M. Sinave devait recevoir son exécution. Je pense que l'honorable membre n'a pas assez étudié la question. S’il connaissait les conséquences de pareils travaux, il n'en aurait pas donné l'idée. Pour ma part, je proteste, contre les mesures proposées par l’honorable orateur, en ce qui concerne.la coupure de Zwynaerde, que je croirais désastreuse pour les riverains du bas Escaut, notamment dans l'arrondissement de Termonde dont je tiens mon mandat dans cette enceinte.

M. Dumortier. - Je crois que le reproche que l'honorable préopinant vient d'adresser à l'honorable M. Sinave, on peut très bien le lui renvoyer et lui dire, que s'il avait mieux étudié la question, il ne ferait pas d’opposition à ce que demande cet honorable membre. En effet, de (page 1028) quoi s'agit-il ? De décharger le haut Escaut. Or que dit la nature ? que le haut Escaut doit s'écouler dans le bas Escaut. Maintenant on vient objecter que ce qu'on propose ne ferait que déplacer le mal. Pour quiconque connaît la question, il n'y a aucun mal à faire au bas Escaut et beaucoup de bien à faire au haut Escaut. Pourquoi ? Par le motif fort simple que le haut Escaut ne demande pas à être débarrassé de ses eaux quand elles peuvent gêner le bas Escaut, mais à l'être quand le bas Escaut peut les recevoir sans en être gêné. Vous voyez qu'avec de la bonne volonté rien n'est plus facile.

Quand les eaux du haut Escaut peuvent-elles embarrasser le bas Escaut ? Pendant les équinoxes, en mars et en avril. Quand le haut Escaut demande-t-il à être débarrassé de son trop-plein d'eau ? En mai. Quand les foins sont en pousse, les eaux sont nécessaires au haut Escaut ; et quand il faut les évacuer, le bas Escaut a un vide suffisant pour les recevoir ; c'est une époque à laquelle les hautes marées sont passées et les eaux du haut Escaut ne peuvent plus lui causer de préjudice.

Vous voyez que le moyen de porter remède au mal dont on se plaint, c'est de faire la coupure de Zwynaerde avec une modification qui consiste à établir des écluses qu'on ne pourra ouvrir que quand le bas Escaut pourra recevoir les eaux sans être gêné. Il faut une mauvaise volonté qui passe toutes les bornes pour se refuser à une servitude naturelle quand elle ne peut nuire à personne.

En présence d'une pareille mauvaise volonté, la Chambre ferait bien de ne pas tenir compte des oppositions.

Mais l'honorable membre perd de vue l'origine de toute cette affaire. Vous le savez, si nous souffrons des inondations, c'est parce qu'on a élargi l'écluse d'Antoing pour recevoir en plus grande quantité les eaux de France ; si le bas Escaut ne veut pas recevoir ces eaux surabondantes, rendez aux écluses de France l'ouverture qu'elles avaient auparavant.

On a fait cette concession à la France un peu dans l'intérêt des Flandres, qui réclamaient un traitement privilégié pour les toiles ; mais alors ne devrait-on pas se prêter à faire disparaître un mal qu'on a causé dans son propre intérêt, quand rien n'est plus facile que d'y arriver sans se nuire en aucune manière, quand le trop-plein du haut Escaut peut se déverser dans le Bas-Escaut, que les hautes marées sont passées, qu'il y a chaque jour un vide de 40 mille mètres cubes ? On ne les reçoit pas parce qu'on ne veut pas les recevoir. Le vide que fait chaque jour dans le bas Escaut la marée en se retirant, est énorme ; ce vide vous pouvez en remplir une partie avec les eaux du haut Escaut sans nuire aux prairies et aux digues.

Voilà ce que nous ne cessons de réclamer au nom de la justice. Encore une fois vous avez fait le mal, vous devez le réparer, d'autant plus que dans tous les pays du monde les eaux des contrées supérieures sont reçues par les contrées inférieures. Que dirait-on des habitants de Liége s'ils se refusaient à recevoir les eaux de la province de Namur et que dirait-on des habitants de Maastricht s'ils se refusaient à recevoir les eaux de la Meuse ? Il n'y a que pour l'Escaut qu'on fasse des choses aussi monstrueuses.

Je ne saurais donc assez engager M. le ministre des travaux publics, qui doit très bien connaître les faits, à ne pas s'arrêter à ces réclamations déraisonnables, puisque en définitive nous ne demandons pas de décharger les eaux à Termonde où les hautes marées de l'équinoxe pourraient faire tort au bas Escaut. Mais Tournai et Audenarde demandent le déchargement des eaux à une époque où elles ne peuvent offrir aucun danger pour le bas Escaut.

Du reste, quand on aura mis les écluses dans les mains des ingénieurs des Flandres, qu'aurez-vous à craindre ? Pensez-vous qu'ils iront de propos délibéré inonder des provinces pour faire du tort aux riverains du bas Escaut ? Nullement ! Ils se borneront à faire écouler les eaux, lorsque ce sera nécessaire, et alors nos vingt-cinq lieues de prairies seront asséchées en temps opportun.

Puisque j'ai la parole, je dois dire quelques mots relativement à un incident qui a été soulevé il y a un moment. Je veux parler de l'affaire des terrains acquis par le gouvernement pour le canal de Schipdonck. J'ai étudié beaucoup cette affaire, et je crois qu'on s'est mis à côté de la question.

Les employés de l'Etat impliqués dans cette affaire et qui sont, à ma connaissance, des gens très honorables, s'étaient simplement permis de planter des pommes de terre sur une partie de terrain acquise par le gouvernement. Mais le gouvernement a acquis 70 hectares de terrain, et ce n'est que sur quelques parcelles que des employés de l'Etat ont planté des pommes de terre, comme cela se fait dans les stations des chemins de fer, sans que personne réclame.

De quoi s'est on plaint ? Des fermiers dont on avait acheté et payé les terrains, et qui, pendant deux ans, ont néanmoins recueilli les récoltes. Au lieu d'en faire une affaire vis-à-vis d'eux, on en a fait une affaire vis-à-vis d'ingénieurs très honorables, qui n'ont pas même été entendus dans l'enquête qui a eu lieu.

Peut-on condamner les gens sans les entendre ? L'honorable M. Sinave a demandé qu'on leur fît grâce. Je demande, moi, qu'on leur rende justice. S'ils ont mérité une réprimande qu'on la leur inflige. Mais que M. le ministre agisse envers eux paternellement, comme on doit le faire envers des fonctionnaires de l'Etat honorables, capables, dont la morale et la probité sont au-dessus de tout soupçon.

Ce qu'il y a de remarquable dans cette affaire, c'est que l'on ne s’occupe que du petit côté, la plantation de pommes de terre dans des terrains appartenant à l'Etat, tandis qu'on ne parle pas du grand côté : exploitation des terrains par les fermiers après que ces terrains avaient été achetés et payés par l'Etat. On ne parle pas des fermiers, sans doute, parce qu'ils sont électeurs. Pour moi qui ne suis pas électeur dans cette partie du pays, je ne me fais pas faute d'en parler.

M. de Smedt. - Je désire répondre à ce qu'a dit l'honorable M. Dumortier sur la soi-disant coupure de Zwynaerde.

Le raisonnement que fait l'honorable membre est tout à fait détruit par les faits et par l'expérience.

Depuis le cinquième siècle, on a déchargé les eaux du haut Escaut vers la mer du Nord, depuis un temps immémorial on a éprouvé le besoin de dériver les eaux qui arrivaient de l'Escaut à Gand vers la mer du Nord ; on a commencé cette dérivation par le fossé des Châtelains, ensuite par le canal du Sas-de-Gand, et après par le canal de la Lieve, et par une suite d'autres canaux, qui tous conduisaient ces eaux vers les baies du Zwyn et du Braekman, sentant l'insuffisance de la décharge des eaux par le bas Escaut seul, et les grands dégâts que leur surabondance produisait aux terres riveraines de cette partie de la rivière.

L'essai de ce canal de communication a été fait sous Louis XIV, quand les Français étaient à cette époque entrés en Belgique ; on en voit encore les traces dans les jardins de notre honorable collègue, M. de Naeyer ; mais alors on a vu que c'était un projet qui était mal conçu, que son exécution n'aurait pas donné les avantages que l'on pouvait présumer pour la décharge des eaux du haut Escaut, et qu'il aurait produit beaucoup de mal aux propriétés riveraines du bas Escaut, et le projet a été vite abandonné.

Revenant à mes premières observations, je dirai que chaque fois que la mer du Nord s'est éloignée du continent, de nouveaux canaux de dérivation vers la mer du Nord ont été creusés pour procurer un écoulement suffisant aux eaux supérieures qui arrivaient vers Gand, et c'est ainsi que dans ce moment on creuse le canal de Schipdonck, qui, j'espère, sera bientôt achevé.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je crois le moment venu de répondre aux interpellations qui m'ont été adressées sur cettequcstion.il me semble que le débat peut être considéré comme terminé.

L'honorable député de Gand m'a demandé si mon intention était de présenter à la Chambre un projet de loi allouant au gouvernement le crédit nécessaire pour continuer avec activité les travaux qui ont été entrepris pour la dérivation de la Lys vers la mer du Nord.

Je puis lui répondre, comme je l'ai fait à la section centrale, que mon intention est de saisir la Chambre, dans le courant de cette session et en temps utile, de la demande de crédit nécessaire pour pousser avec activité les travaux de la dernière partie du canal.

La section centrale, à cette occasion, appelle mon intention sur la nécessité de retirer le projet présenté sur la police du halage et du pilotage. Bien que la section centrale chargée de l'examen du projet ne se soit pas montrée en principe favorable à ce projet, elle ne l'a pas critiqué d'une manière absolue, puisqu'elle propose de le remplacer par des dispositions qu'elle indique à l'attention du gouvernement.

Le rapport de la section centrale ne m'étant parvenu qu'hier, je ne puis dire si les propositions de la section centrale sont en harmonie avec les vues du gouvernement.

Je crois que la section centrale n'a vu dans le projet que les dispositions relatives à la police du halage et du pilotage. Le gouvernement y voit autre chose : il croit devoir imposer des conditions à l'exercice de certaines professions, notamment pour celle des pilotes qui peuvent compromettre la vie des bateliers, les navires et leurs chargements.

Je crois que le moment n'est pas opportun pour examiner la question.

D'ailleurs, je le répète, je pourrais m'excuser de ne pas répondre complètement à l'interpellation de l'honorable membre, par cette circonstance que le rapport de la section centrale ne m'a été communiqué qu'hier seulement.

Quant aux travaux au haut Escaut, je ne puis que persister dans la ligne de conduite adoptée par mes prédécesseurs, consistant à pousser les travaux avec une certaine activité, sans compromettre les résultats qu'on peut espérer de la dérivation de la Lys. Il est certain que tant que cette dérivation n'est pas achevée, il est dangereux de formuler des systèmes et surtout d'exécuter des travaux considérables dans le haut Escaut.

M. Vermeire. - J'ai demandé la parole, quand j'ai entendu l'honorable M. Dumortier dire à la Chambre que les observations présentées par les riverains du bas Escaut étaient des réclamations égoïstes, déraisonnables.

La question qui divise les deux Escauts est très vieille, puisque, comme l'a dit notre honorable collègue M. Desmet, elle date déjà du Vème siècle. Elle a fait les frais de nos discussions chaque fois que nous avons examiné le budget des travaux publics.

Pour moi, je ne veux pas trancher la question d'une manière absolue, comme l'a fait l'honorable M. Dumortier, et je crois qu'elle vaut la peine d'être examinée de plus près. Car, si mes souvenirs sont exacts, une enquête a été ouverte dans le temps et les observations qu'ont fait valoir les riverains du bas Escaut ont assez prouvé qu'en construisant le canal de Zwynaerde, on ne ferait que déplacer le mal.

(page 1029) Tout en me référant aux observations qui ont été présentées dans le même sens par d'honorables collègues, je prie M. le ministre de ne pas donner suite aux observations qui ont été faites par l'honorable M. Dumortier.

M. Dumortier. - Messieurs, l'honorable membre invoque à l'appui de son opinion, et pour maintenir ce qu'a dit son honorable collègue, la résolution prise par une commission. Mais l'avis donné par la commission dont il s'agit ne prouve exactement rien. Cette commission a raisonné dans l'hypothèse où un canal serait ouvert hiver comme été. Mais ce n'est pas du tout de cela qu'il s'agit maintenant. Il s’agit d'un canal avec des écluses, qui ne laissent sortir l'eau que lorsque le bas Escaut peut la recevoir.

C'est en présence d'une pareille demande, faite depuis plusieurs années, que j'ai dit que les réclamations contre un pareil système ne peuvent être dictées que par l'égoïsme.

- L'article est adopté.

Articles 33 à 40

« Art. 33. Canal d'écoulement des eaux du sud de Bruges. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 34. Canal de Liège à Maestricht. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 39,435 90 c.

« Charge extraordinaire : fr. 3,500. »

- Adopté.


« Art. 35. Grande-Nèthe. Travaux d'entretien : fr. 9,000.

« Charge extraordinaire : fr. 1,000. »

- Adopté.


« Art. 36. Yser. Travaux d'entretien ordinaire et extraordinaire : fr. 3,190.

« Charge extraordinaire : fr. 10,976 66 c. »

- Adopté.


« Art. 37. Canal de Plasschendaele. Travaux d'entretien ordinaire et extraordinaire : fr. 2,500.

« Charge extraordinaire : fr. 12,400. »

- Adopté.


« Art. 38. Plantations nouvelles, entretien des plantations existantes : fr. 25,000. »

- Adopté.


« Art. 39. Frais d'études pour le service des canaux, des rivières et des chemins de fer en construction : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 40. Entretien des bacs et bateaux de passage et de leurs dépendances : fr. 27,000. »

- Adopté.

Section IV. Ports et côtes
Article 41

« Art. 41. Port d'Ostende. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 48,545.

« Charge extraordinaire : fr. 109,500. »

M. Sinave. - Je désire présenter une observation à M. le ministre.

On vient d'adjuger des travaux pour le port d'Ostende. Cette adjudication s'est faite régulièrement ; il y a eu concurrence suffisante et des soumissions plus basses que le prix fixé par le cahier des charges.

Mais il arrive ce qui est arrivé déjà pour une autre adjudication. Après quelques jours, on annonce que l'adjudication n'est pas admise ; mais vient une personne qui s'offre à faire les travaux à quelques milliers de francs de moins que le plus bas soumissionnaire et l'on se propose de donner l'entreprise à ce nouveau venu on de faire une réadjudication.

Je n'hésite pas à déclarer que si M. le ministre persiste dans cette voie, il détruira toute concurrence. Quand une adjudication a été faite régulièrement, le gouvernement ne doit pas, sans motifs très sérieux, refuser de l'approuver ; agir autrement, c'est poser un mauvais acte d'administration.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - L'honorable M. Sinave n'est pas complètement renseigné. Il est vrai qu'une adjudication a eu lieu et a donné un résultat satisfaisant ; mais après l'adjudication une offre plus basse a été faite.

L'intention du gouvernement est, non pas d'adjuger de la main à la main à cet entrepreneur qui a fait un rabais de 10,000 francs, mais de provoquer une nouvelle adjudication publique en prenant comme base de cette adjudication l'offre la plus basse qui a été faite.

Je ne pose pas cela en règle générale, mais je crois que dans le cas actuel, c'était poser un acte de bonne administration.

M. Sinave. - Je ne savais pas que l'intention de M. le ministre fût de provoquer une nouvelle adjudication. Mais comme il y avait eu un précédent où une pareille adjudication avait été annulée et où l'entreprise avait été donnée de la main à la main, j'ai cru qu'on voulait eu agir de même.

Je continue cependant à croire que lorsqu'une adjudication est faite convenablement, on ne peut pas, pour quelques milliers de francs, annuler cette adjudication.

M. Osy. - Messieurs, l'objet dont vient de parler l'honorable M. Sinave est, d'après moi, très grave.

Il y a un mois environ, s'est faite une adjudication où la mise à prix du gouvernement était, je pense, de 450,000 fr. Il y avait des soumissionnaires ; la plus basse soumission était de 395,000 fr. ; donc un rabais sur le cahier des charges du gouvernement de 55,000 fr.

Quelques jours après, quelqu'un fait savoir au gouvernement qu'il entreprendra à 10,000 fr. au-dessous de la plus basse soumission. Le gouvernement fait sans doute très bien de chercher à faire une économie de 10,000 fr. Mais je crains que si le gouvernement persiste dans ce système, il n'écarte à l'avenir tous les soumissionnaires sérieux et que dans d'autres occasions il ne paye très cher l’économie qu'il fait. Car vous comprenez que celui qui est venu offrir un rabais de 10,000 fr. aurait pu se présenter lors de l'adjudication.

Le gouvernement dit qu'on a toujours agi de la même manière dans ces circonstances.

Eh bien, messieurs, je trouve que c'est une très mauvaise marche : tout le monde est prévenu des adjudications publiques, et ce n'est pas quand on connaît le résultat qu'on peut être admis à offrir un rabais. Le gouvernement peut gagner à cela 10,000 fr. une fois, mais il y perdra beaucoup aux adjudications ultérieures.

M. Prévinaire. - Messieurs, j'appuie l'observation de l'honorable M. Osy. L'article 21 de la loi de comptabilité pose de la manière la plus rigoureuse le principe que tous les marchés de l'Etat doivent se faire avec concurrence. L'article 22 indique ensuite les cas où le gouvernement peut traiter de gré à gré. Le cas où l'adjudication a été faite à des conditions inacceptables est prévu, mais lorsqu'il n'y a pas urgence, la saine application de la loi de comptabilité exige qu'on ait recours à une adjudication publique ultérieure.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je suis tout à fait d'accord avec l'honorable membre. La proposition qui m’a été faite après l'adjudication n'est pas approuvée comme opération de gré à gré, mais elle sert de base pour la mise à prix d'une nouvelle adjudication. Quelques honorables membres de la Chambre semblent critiquer cet acte, mais je pense que la question est au moins très controversable. Certainement je n'ai pas violé la loi de comptabilité et je ne pense pas non plus que la mesure que j'ai prise puisse exercer une influence défavorable sur les adjudications futures. La Chambre n'accorde pas les fonds avec une telle prodigalité, qu'il faille dédaigner un rabais de dix mille francs sur une entreprise.

L'honorable M. Prévinaire examine si un ministre peut traiter de gré à gré lorsqu'il est possible d'obtenir ainsi un rabais de 7 p. c. par exemple sur une adjudication importante. Je ne dois pas cacher a la Chambre que j'ai agi une fois dans ce sens parce qu'on pouvait croire qu'il y avait entente entre les soumissionnaires, Il en est résulté pour l'Etat une économie de 70,000 francs, et j'ai obtenu aux adjudications subséquentes des soumissions beaucoup plus raisonnables.

M. Dellafaille. - Je ferai remarquer à l'honorable ministre des travaux publics, qu'il faudrait, dans la réadjudication qu'il vient d'ordonner, se réserver de voir s'il n'acceptera pas le premier adjudicataire qui a déjà produit au gouvernement un avantage de 55,000 francs.

Il serait bien fâcheux que cet adjudicataire fût écarté alors qu'il s'est peut-être retiré d'une coalition.

M. Prévinaire. - Je ne veux pas faire de reproche à l'honorable ministre des travaux publics parce qu'il a usé, dans les meilleures intentions du monde, d'un moyen d'obtenir un rabais ; mais je fais remarquer que ce moyen n'est pas parfaitement conforme à la loi de comptabilité. La loi de comptabilité pose formellement le principe de la concurrence ; seulement dans certains cas spéciaux elle autorise la concession d'une entreprise de gré à gré, mais alors il faut que le ministre examine à fond toutes les circonstances qui peuvent l'éclairer sur le point de savoir s'il se trouve dans l'un de ces cas.

Voici, messieurs, ce que porte l'article 22 de la loi de comptabilité :

« Il peut être traité de gré à gré :

« 1°…

« 2° …

(page 1030) « 8° Pour les fournitures, transports ou travaux qui n'ont été l’objet d’aucune offre aux adjudications, ou à l'égard desquels il n'a été proposé que des prix inacceptables ; toutefois lorsque l'administration a cru devoir arrêter et faire connaître un maximum de prix elle ne doit pas dépasser ce maximum. »

Voilà, messieurs, les principes de la loi de comptabilité. Ils excluent, ainsi que M. le ministre l'a, du reste, reconnu avec beaucoup de justesse, ils excluent les marchés de la main à la main qui n'auraient pas d'autre motif que l'espoir d'obtenir un rabais sur des prix reconnus acceptables.

Le gouvernement ne peut traiter de la main à la main que lorsqu'il y a impossibilité de recourir à l'adjudication publique ; hors ce cas, l'adjudication avec concurrence doit être la règle.

J'ai voulu, messieurs, faire ressortir les principes de la loi de comptabilité, parce que la question est très grave. Il est excessivement important, au point de vue de l'intérêt des travaux publics, que le gouvernement n'écarte pas les entrepreneurs qui présentent des garanties et soumissionnent une entreprise à des conditions loyales et consciencieusement étudiées.

Autant il serait dangereux de concéder, lorsque les soumissions sont exorbitantes, autant il le serait d'entrer dans la voie des concessions de gré à gré, qui engagerait sérieusement la responsabilité gouvernementale et priverait l’Etat de tous les avantages d'une concurrence sérieuse.

Comme M. le ministre me paraît partager de tous points cette manière de voir, je n'insisterai pas sur cette question.

- Personne ne demandant plus la parole, l'article 41 est mis aux voix et adopté.

Article 42

Art. 42. Port d'Ostende. Construction d'un phare de premier ordre (première moitié de la dépense), charge extraordinaire :fr. 112,500. »

- Adopté.

Article 43

« Art. 43. Port de Nieuport. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 23,120.

« Charge extraordinaire : fr. 99,300. »

M. le ministre des travaux publics, d'accord avec la section centrale, propose de porter à 107,500 francs le chiffre qui figure à la colonne des charges extraordinaires.

- L'article 43, au chiffre total de 140,420 francs, est mis aux voix et adopté.

Article 44

« Art. 44. Côte de Blankenberghe : fr. 112.700.

« Charge extraordinaire : fr. 27,200. »

M. Coppieters. - Messieurs, l'.intention de la Chambre et du gouvernement a été appelée depuis longtemps sur la nécessité d'approfondir le canal de Blankenberghe et de construire un port de refuge pour les bateaux de pêche. Il est inutile d'entrer dans des développements pour faire comprendre à la Chambre la haute importance de ces travaux, au point de vue de l'alimentation publique, du développement de notre marine marchande et même de la sécurité de la navigation le long des côtes si dangereuses de la mer du Nord.

La nécessité des travaux dont il s'agit n'a été contestée par personne, et M. le ministre a bien voulu, il y a quelque temps, nous promettre de faire étudier la question avec tout le soin qu'elle comporte.

J'ajoute que M. le ministre s'est empressé de tenir sa promesse et qu'il a transmis pour ainsi dire, immédiatement, les ordres nécessaires à la direction des ponts et chaussées de la Flandre occidentale. Je suis heureux de pouvoir l'en remercier ici.

Je ne prends la parole que pour demander à M. le ministre si, aujourd'hui que les études sont très probablement terminées, il ne lui serait pas possible de faire connaître à la Chambre les intentions du gouvernement à l'égard de l'exécution de ces travaux, ou tout au moins de nous indiquer l'époque prochaine à laquelle il pourra se prononcer.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, comme l'a dit l'honorable préopinant, l'exécution du travail que j'ai promis à la Chambre a été confiée à M. l'ingénieur en chef de la Flandre occidentale. J'ai reçu, il y a déjà quelque temps, la première partie du rapport de ce fonctionnaire, la partie historique ; c'est une des plus importantes, puisqu'elle tend à démontrer l'obligation pour l'Etat de donner aux eaux de cette partie des Flandres un écoulement vers la mer du Nord ; mais la Chambre comprendra que dans les matinées des jours où l’on discute son budget, un ministre a fort peu de temps à donner à d'autres affaires. Je crois me souvenir que dans la correspondance d'aujourd'hui se trouvait la seconde partie du rapport de l'Ingénieur ; je n'en ai pu faire une lecture attentive ; et il me paraît impossible de rien dire pour le moment ; je me réserve de donner des explications à une prochaine occasion.

M. Coppieters 't Wallant. - Je me déclare satisfait de la réponse de M. le ministre, d'autant plus que la manière dont il vient de se prononcer sur l'obligation du gouvernement de faire exécuter les travaux dont il s'agit, me donne toute garantie que les nombreux intérêts engagés recevront, dans un avenir peu éloigné, pleine et entière satisfaction.

M. Sinave. - Il existe une compagnie qui avait fait des offres : Est ce que les relations avec cette société ont complètement cessé ou subsistent-elles encore ?

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, la compagnie ayant négligé de mettre des fonds à la disposition du gouvernement pour les frais d'études, je dois la considérer comme ayant abandonné ses offres relativement à ce projet.

- L'article 44 est mis aux voix et adopté.

Article 45

« Art 45. Phares et fanaux : fr. 1,000.

« Charge extraordinaire : fr. 500. »

- Adopté.

Section V. Personnel des ponts et chaussées.
Article 46

« Art. 46. Traitements des ingénieurs et conducteurs des ponts et chaussées, frais de bureau et de déplacement : fr. 590,143 32 c.

« Charge extraordinaire : fr. 6,800. »

- Adopté.

Article 47

« Art. 47. Traitements et indemnités des chefs de bureau et commis, des éclusiers, pontonniers, gardes-ponts à bascule et autres agents subalternes des ponts et chaussées : fr. 423,917 86 c. »

Le gouvernement propose d'augmenter le chiffre :

1° D'une somme de 4,000 francs pour les éclusiers et pontonniers du canal de Charleroi.

2° De 900 francs, pour le traitement d'un agent spécial qui serait chargé de la police permanente des courts biefs du même canal.

La section centrale admet la première augmentation, mais elle rejette la seconde.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, le gouvernement doit maintenir le chiffre de 900 fr. Il est destiné à salarier un agent dont le concours utile ne peut être contesté. Vous savez l'important revenu que procure au trésor la navigation sur le canal de Charleroi. Cette navigation, malgré tout le zèle des agents, éprouve encore des lenteurs considérables. La section centrale a admis la première des deux augmentations ; il s'agit d'une mesure qui produira de bons résultats. Une autre mesure également utile consiste à créer un conservateur spécial du canal qui sera chargé de surveiller le mouvement des bateaux, le service du halage, les éclusiers....

L'augmentation est insignifiante, et elle doit produire d'heureux résultats pour les recettes du trésor. Je pense donc que la Chambre ne se refusera pas à voter cette somme de 900 fr.

M. de T'Serclaes, rapporteur. - Messieurs, j'exposerai en peu de mots les raisons qui ont engagé la section centrale à repousser l'augmentation de 900 fr.

Le gouvernement a d'abord pétitionné un supplément d'indemnité pour les employés chargés de la manœuvre des écluses ; la section centrale a reconnu l'utilité de cette première augmentation ; mais elle n'a pas cru qu'il fût nécessaire de salarier un agent subalterne qui serait chargé de surveiller les éclusiers. En supposant que la manœuvre des écluses donne lieu actuellement à des plaintes, la section centrale accorde au gouvernement les moyens nécessaires pour faire cesser ces plaintes et activer cette manœuvre par l'allocation de primes.

Aujourd'hui le gouvernement a le droit et c'est un devoir pour lui de se montrer sévère à l'égard des éclusiers, et d'exiger de leur part, dans l’accomplissement des obligations qui leur sont imposées, tout le zèle possible.

Ce service coûte fort cher à l'Etat : les agents sont logés, ils ont traitements et indemnités, sous-éclusiers et ouvriers à leurs ordres, le tout aux frais du trésor. Nous en avons fait l'observation en deux endroits du rapport, et nous ne pouvons admettre que ce service ne puisse pas satisfaire complètement aux exigences du public, au moyen des larges allocations qui sont votées chaque année : il est possible que ces agents soient chargés d'écritures et de détails de comptabilité, étrangers à leurs fonctions, mais ce serait là un abus qu'il conviendrait de faire cesser.

On a donc le droit d'exiger la plus grande régularité possible du service des éclusiers et du moment surtout qu'on leur accorde une augmentation d'indemnité.

Nous n'avons pas compris la nécessité d'une surveillance spéciale, et la demande du crédit de 900 francs pour cet objet a paru à la section centrale bien faiblement motivée ; cette surveillance ne serait exercée que par un agent d'un ordre tout à fait inférieur, car avec 900 fr. d'appointements on ne peut salarier qu'un agent de police subalterne dont il est impossible d'attendre de grands services.

Si c'est un employé qu'on veut introduire avec l'intention d'augmenter plus tard son traitement, il vaudrait mieux alors demander tout de suite la somme nécessaire pour le rémunérer. Ainsi d'une part, le service des éclusiers mieux indemnisé, et d'autre part la pensée qu'un employé à 900 francs ne peut aider à atteindre le but que se propose le gouvernement, tels sont les motifs qui ont déterminé la section centrale à rejeter à l'unanimité la majoration de 900 francs.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je dois commencer par dire que l'on ne peut prêter au gouvernement l'intention d'enlever la création d'un nouvel agent par des moyens détournés. S'il n'a pas demandé une somme plus forte, c'est que les agents subalternes de rivières et canaux ne reçoivent pas un traitement plus élevé. Les prime qu'on accorde aux éclusiers, dit-on, sont suffisantes pour qu'ils accomplissent leurs devoirs ; mais il y a, dans le service d'un canal, une foule (page 1031) de détails qui exigent une surveillance continue : il y a l'entrée et la sortie de l'écluse, la surveillance du halage ; ces manœuvres sont considérables et donnent lieu à des mains-d'œuvre très importantes, pendant lesquelles il ne faut pas perdre de temps ; le bon vouloir, de l'éclusier sera sans effet si tous les individus qui doivent concourir aux manœuvres ne sont pas stimulés par la présence d'un surveillant. J'ajoute, toutefois, que la sécurité publique n'est pas compromise et je m'en rapporte volontiers à ce que fera la Chambre.

M. Prévinaire. - Si la section centrale n'insiste pas, je ne prendrai pas la parole.

M. de T'Serclaes. - J'ai défendu, comme je le devais, la résolution de.la section centrale. Je la crois raisonnable et bien fondée, il appartient à la Chambre de décider.

M. Prévinaire. - J'ai eu occasion de voir sur le canal de Charleroi combien est grande la négligence et la nonchalance des haleurs, et combien il se fait de dépenses d'eau inutilement. Cela m'a fait comprendre combien la centralisation de certains pouvoirs dans les mains d'un agent, même inférieur, aurait d'utilité. Aujourd'hui le canal de Charleroi peut à peine suffire aux transports qu'on lui demande. La dépense d'eau est une grande question, car on a dû songer à dériver des ruisseaux, à monter des machines et à construire à grands frais des réservoirs pour l'alimentation du canal.

Les haleurs se prêtent peu à l'entrée des bateaux dans les écluses, les bateliers font cette manœuvre avec une grande nonchalance ; il en est de même quand il s'agit de faire sortir les bateaux, on trouve plus simple de dépenser une grande quantité d'eau. Ce service devrait se faire à bras d'homme, c'est le batelier avec ses haleurs qui devrait opérer cette manœuvre ; il trouve plus simple de le faire au moyen d'une grande perte d'eau.

On dit que les éclusiers devraient surveiller ces opérations ; mais ils ont une foule de choses à faire qui ne le leur permettent pas ; un agent, si inférieur qu'il soit, qui ne ferait que se promener, qui surveillerait les haleurs, au besoin les dénoncerait ou, si vous aimez mieux, les signalerait à des agents supérieurs, rendrait de grands services ; en pressant le passage des bateaux aux écluses, la navigation serait plus prompte et moins coûteuse en ce que cela diminuerait la dépense d'eau. Comme la dépense d'eau est une grande question au point de vue du trésor, j'appuie la demande de M. le ministre et j'espère que la Chambre l'adoptera.

- L'article 47, tel qu'il est proposé par le gouvernement, est mis aux voix et adopté.

Article 48

« Art. 48. Frais des jurys d'examen et des conseils de perfectionnement ; missions des élèves ingénieurs et conducteurs de l'école spéciale du génie civil : fr. 12,000.3

- Adopté.

Chapitre III. Mines

Article 49 à 59

« Art. 49. Personnel du conseil des mines. Traitements : fr. 41,700. »

- Adopté.


« Art. 50. Personnel du conseil des mines. Frais de route : fr. 600. »

- Adopté.


« Art. 51. Personnel du conseil des mines. Matériel : fr. 2,400. »

- Adopté.


« Art. 52. Subsides aux caisses de prévoyance et récompenses aux personnes qui se distinguent par des actes de dévouement : fr. 45,00. »

- Adopté.


« Art. 53. Impressions, achats de livres, de cartes et d'instruments ; publication de documents statistiques, encouragements et subventions, essais et expériences : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 54. Traitements et indemnités du personnel du corps des mines : fr. 146,000. »

- Adopté.


« Art. 55. Frais des jurys d'examen et des conseils de perfectionnement ; missions des élèves de l'école des mines : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 56. Commission des procédés nouveaux. Frais de route et de séjour : fr. 600. »

- Adopté.


« Art. 57. Commission des procédés nouveaux. Matériel, achat de réactifs, d'appareils, etc. : fr. 1,400 »

- Adopté.


« Art. 58. Commission des Annales des travaux publics. Frais de route et de séjour : fr. 1,100. »

- Adopté.


« Art 59. Commission des Annales des travaux publics. Publication du recueil, frais de bureau, etc. : fr. 3,900. »

- Adopté.

Chapitre IV. Chemins de fer, postes, télégraphes, régie, service d’exécution

Première section. Voies et travaux.

- Plusieurs voix. - A demain ! à demain !

Ordre des travaux de la chambre

M. Lelièvre (pour une motion d’ordre). - Je demande la parole pour une motion d'ordre.

M. Lelièvre. - Je renouvelle la motion d'ordre que j'ai faite de mettre à la suite de l'ordre du jour le projet de loi concernant les traitements d'attente.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Je n'étais pas arrivé quand l'honorable membre a fait sa motion au commencement de la séance, et la Chambre a désiré attendre que je fusse présent pour y donner suite ; je déclare que je ne fais aucune objection à ce que l'objet dont a parlé l'honorable membre figure à l'ordre du jour après ceux qui y sont déjà.

M. Dumortier. - Messieurs, l'affaire dont il s'agit est très grave pour la Chambre.

- Un membre. - C'est pour cela qu'il faut la vider.

M. Dumortier. - C'est pour cela qu'il faut l'examiner. On convie la Chambre à se de juger de douze votes. Je demande que la Chambre, si elle veut mettre l'objet dont il s'agit à son ordre du jour, fixe une date certaine et longtemps avant le jour où devra s'ouvrir la discussion, afin que chacun soit préparé et ait eu le temps de lire les pièces qui sont nombreuses. La Chambre a rejeté douze fois les toelagen.

Maintenant au nom de la chose jugée, on nous convie à changer la chose jugée.

Je crois que cela mérite un très sérieux examen.

M. Lebeau. - C'est pour la deuxième foi peut-être que je me vois appelé à appuyer la simple demande de la mise à l'ordre du jour de questions dont la Chambre est saisie depuis dix à douze ans.

Je ne comprendrais pas que la Chambre, en rejetant cette demande, se rendît coupable d'un déni de justice complet, obstiné, persévérant, alors que l'ordre du jour est épuisé et que la Chambre est menacée de chômer.

Il ne s'agit pas, en ce moment, de savoir si les personnes intéressées dans ce grave débat ont tort ou raison. Ce qu'il faut, ce qu'on veut, c'est qu'on le déclare par une décision formelle. On ne demande rien de plus.

Je le répète, sans exagération, la Chambre se rendrait coupable d'un déni de justice si elle n'abordait pas cette discussion devant laquelle elle recule depuis une dizaine d'années au moins.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Je demande que l'on n'entre pas dans le fond de la question.

M. Lebeau. - Je ne crois pas l'avoir fait.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Aussi n'est-ce pas pour l'honorable membre que je fais cette observation.

Il ne s'agit pas de discuter en ce moment si les intéressés ont tort ou raison. Il s'agit seulement de mettre cet objet à l'ordre du jour. Or avant que le budget des travaux publics puisse être voté, avant que la Chambre ait examiné le projet de modification du tarif des douanes, il s'écoulera probablement 15 jours ou trois semaines. Ainsi chaque membre aura le loisir d'examiner le projet de loi sur lequel l'honorable M. Lelièvre a appelé l'attention de la Chambre.

Il me semble que la suite du projet à l'ordre du jour ne peut être refusée. S'il est vrai que la demande ne soit pas fondée, l'honorable M. Dumortier peut être tranquille, elle sera rejetée. Mais nous qui la croyons juste, nous demandons que la question soit jugée.

M. Lelièvre. - Lorsque nous aborderons la discussion du projet de loi, je démontrerai que la question n'a nullement été jugée par la Chambre.

Je me borne à demander que l'objet soit mis à l'ordre du jour. Il s'agit d'aborder l'examen d'un rapport qui a été déposé il y a plus d'un an. Je ne demande pas qu'on discute le projet avant les autres propositions qui lui sont soumises, mais je me borne à réclamer, ce qu'on ne peut me refuser sans déni de justice, la mise à l'ordre du jour d'un objet qui devait y figurer depuis longtemps.

M. Dumortier. - Je demande à répondre quelques mots à ce qu'a dit l'honorable M. Lelièvre ; car il ne faut pas que les membres puissent se tromper aussi grandement qu'ils le feraient, si les paroles de l'honorable membre restaient sans réponse.

L'honorable membre nous dit qu'il y a déni de justice et que l'on réclame depuis dix ans. L'honorable membre se trompe. Ce n'est pas depuis dix ans, c'est depuis 27 ans que la Chambre est saisie de ces réclamations, et chaque année, pendant dix ans, la Chambre les a rejetées. Il n'y a donc pas de déni de justice. La Chambre, sur la proposition de l'honorable M. Savart. à une immense majorité a déclaré qu'elle refusait les fonds, et que les pétitionnaires n'avaient aucun droit par suite du traité, ni même sans le traité. La Chambre a rejeté dix fois le crédit en déclarant qu'il n'y avait pas de droit, et plus tard, la Chambre, appelée à faire un projet de loi, a déclaré par deux votes, au premier et au (page 1032) second vote que le jugement n'était pas fondé, et qu'elle ne payerait pas. Voilà ce que la Chambre a décidé, et il n'y a pas un seul membre dans cette enceinte, ayant voté avec la majorité, qui me donnerait un démenti.

L'honorable M. Lebeau voudrait donner une interprétation de notre vote. Mais il faisait partie de la minorité. Or, il n'appartient pas à un membre de la minorité de déterminer la portée d'un vote de la majorité. C'est à nous, membres de la majorité, à déterminer la portée de nos votes et non à ceux qui nous ont combattus.

Que l'honorable membre cherche à faire revenir la Chambre sur son vote, je le conçois bien. Mais la question est si bien jugée d'une manière irrévocable, que M. le ministre des finances a renoncé à ester en justice pour ne pas reconnaître aux tribunaux le droit de condamner la Chambre à voter ce qu'elle a dix fois refusé ; car là est la question. Il s'agit d'une question extrêmement grave. Il s'agit de la plus sérieuse de nos prérogatives, de l'indépendance du parlement vis-à-vis des corps judiciaires.il s'agit de prérogatives que nous ne pouvons nous dispenser de transmettre à nos successeurs sans manquer à nos devoirs, sans violer la Constitution. La Chambre ne peut aborder à l'improviste une discussion aussi grave.

M. Lebeau. - Quoiqu'on me reproche de crier bien haut, je crierai beaucoup moins haut que l'honorable préopinant.

Je pourrais dire que les faits, tels qu'il les expose, sont du roman, mais non de l'histoire. Ce serait anticiper sur la discussion et je ne veux pas discuter. Je demande seulement que l'on discute, et qu'on ne déclare pas qu'on ne discutera jamais, ce que l'on voudrait encore.

M. Dumortier. - Du tout, je demande que l'on fixe un jour…

- Plusieurs membres. - On est d'accord.

M. Lebeau. - On vous dit que tout ce que renferme le projet a été condamné par la Chambre. Mais savez-vous de quoi vous êtes saisis ? D'un projet de loi présenté il y a environ dix ans par l'honorable M. Liedts, ministre des finances, ancien membre du congrès, après avoir examiné toutes les pièces, après avoir traité avec les intéressés, qui ont consenti à des très grands sacrifices et après avoir pris l'avis d'une commission dont j'ai fait partie. C'est une espèce de transaction qu'on présente à la Chambre ; et l'on vient dire que la question ne mérite pas même d'être examinée, ou bien l'on veut rendre cet examen impossible, en enterrant le projet dans les cartons de la Chambre.

J'ai dit avec raison que ce serait un scandale.

Je demande donc que la Chambre, dans l'intérêt de sa dignité et par respect pour les décisions de l'ordre judiciaire sur lesquelles s'appuient les intéressés et pour l'initiative du gouvernement, mette cet objet à l'ordre du jour.

M. Dumortier. - Je demande la parole pour un fait personnel.

Je suis réellement surpris que l'honorable membre vienne me représenter comme demandant de passer à l’ordre du jour sur la question dont il s'agit, moi qui ai été autorisé par l'assemblée à faire le rapport de la minorité de la commission sur cette question, et qui crois l'avoir fait de manière à réfuter toutes les observations des honorables membres.

Je dis donc que je ne conçois pas comment on peut venir me représenter ici comme demandant à passer à l'ordre du jour sur cette question. Je désire au contraire qu'elle soit examinée. Mais ce que je ne veux pas, c'est qu'on vienne proposer de mettre ce projet à l'ordre du jour à la fin d'une séance, lorsque la Chambre n'est plus en nombre, et lorsque, par cette mise à l'ordre du jour, la question pourrait arriver à l'improviste et sans qu'on sache le jour où la Chambre s'en occupera.

Je ne demande qu'une chose : c'est que le jour de la discussion soit fixé. Lorsqu'il s'agit d'une question où la Chambre, à douze reprises différentes et malgré l'opinion de l'honorable M. Lebeau, a maintenu des prérogatives, où elle a décidé que les personnes dont il s'agit n'avaient aucun droit ; la Chambre ne peut revenir à la légère sur sa résolution. Et puisqu'on parle de déni de justice, savez-vous qui l'on accuse ici ? Ce sont toutes les assemblées délibérantes qui se sont succédé. Car si un déni de justice a été posé, c'est la Chambre qui s'en est rendue coupable ; et je suis étonné que l'on se permette de lancer une pareille accusation contre toutes les législatures qui se sont succédé.

M. Lebeau. - L'honorable M. Dumortier me reproche d'avoir crié bien haut que les législatures précédentes avaient commis un déni de justice envers les personnes intéressées dans le débat actuel.

Je crois avoir dit cela en criant beaucoup moins haut que l'honorable membre.

Il prétend avoir fait l'histoire des péripéties par lesquelles a passé l'affaire dont il s'agit. C'est le roman qu'il faudrait dire. Le moment de le prouver arrivera, je l'espère, à moins qu'on ne parvienne à l'empêcher de venir, comme on y a réussi jusqu'à présent.

Je n'entends rien préjuger sur le débat ; ce que je veux, c'est qu'on ne le décline plus comme on l'a fait depuis longtemps ; c'est qu'on aborde enfin une question qu'il est de la justice et de l'honneur de la Chambre de décider.

M. Lelièvre. - Pour faire cesser ce débat, je propose de fixer la discussion à mardi prochain en 15 jours, c'est-à-dire au 31 de ce mois.

M. le président. - Je ferai remarquer que la Chambre, n'étant plus en nombre, ne peut prendre de résolution.

- La séance est levée à 4 heures et demie.