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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 16 janvier 1857

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1856-1857)

(Présidence de M. Delehaye.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 459) M. Tack procède à l'appel nominal à 3 heures et un quart.

M. Crombez lit le procès-verbal de la séance d'hier ; la réduction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Tack présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à !a Chambre.

« Les membres du conseil communal et des habitants de Fize-Fontaine appellent l’attention de la Chambre sur la situation que font à l'agriculture les droits qui pèsent sur les houilles et sur les fontes. »

« Mêmes observations d'habitants de Baillamont, Alost, Zelrud-Lumay, Autgaerden, Bruges, Gimnée, Jauche, Warcoing, Sart-Dames-Avelines, Moeres, Ressaix, Genck, Oostcamp, Beauraing, Blaton, du conseil communal de Vielsalm, de l'administration communale et d'habitants de Ramillies-Offus. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi portant révision du tarif des douanes.


« La chambre de commerce et des fabriques d'Anvers présente des observations sur la partie du projet de loi relative à l'organisation judiciaire qui se rapporte aux tribunaux de commerce et demande que l'organisation actuelle de la justice consulaire soit étendue jusqu'au degré d'appel.

- Sur la proposition de M. Osyù, renvoi à la commission chargée d'examiner le projet de loi.


« Le sieur Flamand, décoré de la croix de Fer et blessé de septembre, prie la Chambre d'augmenter l'allocation de l'article 49 du budget de l'intérieur. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


« Le sieur Favresse, fermier-propriétaire à Gosselies, demande que la fabrique des briquettes à brûler, qui est érigée dans cette commune, soit tenue, comme la fabrique de produits chimiques, d'établir des appareils condensateurs. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Wynants, passementier à Liège, demande que les épaulettes soient rendues aux officiers de l'infanterie. »

- Même renvoi.


(page 460) « Les sieurs Robette et Rigaumont, militaires pensionnés, demandent une augmentation de pension. »

- Même renvoi.


« Le sieur Van Lerbeghe, employé à l'administration communale de Courtrai, combattant de la révolution, demande une pension civique. »

- Même renvoi.


« Plusieurs commissaires de police dans les arrondissements de Bruges et de Courtrai demandent la révision des lois qui fixent leurs traitements. »

M. Rodenbach. - Messieurs, la réclamation dont on vient de présenter l'analyse est très fondée, et susceptible d'être examinée mûrement ; elle émane d'un très grand nombre de commissaires de police des arrondissements de Roulers, Thielt, Bruges et Courtrai.

Je demande, messieurs, que la commission de pétitions soit invitée à faire un prompt rapport sur cette requête.

M. le Bailly de Tilleghem. - J'appuie cette proposition.

M. Lelièvre. - Et moi aussi.

- La proposition de M. Rodenbach est adoptée.


« Par dépêche, en date du 15 janvier, M. le ministre de la guerre transmet des explications sur la pétition du lieutenant général honoraire Borremans, relative à la liquidation de sa pension. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. de Wouters demande une prolongation de congé, motivée sur l'état de sa sauté.

- Accordé.

Rapports sur des pétitions

M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, par pétition adressée de Deynze le 10 décembre 1836, des négociants, industriels et particuliers à Deynze et dans les communes avoisinantes demandent la construction des bâtiments de la station de Deynze.

Les pétitionnaires signalent l'état déplorable des bâtiments de la station de Deynze et indiquent la nécessité impérieuse de leur reconstruction dans l'intérêt des voyageurs et du commerce. Ils disent que :

« Sa situation au point où quatre grandes routes se croisent, la population nombreuse et l'activité agricole et commerciale d'un grand nombre de communes qui ont le centre de leurs relations à Deynze ; le chemin de fer d'Ingelmunster par Thielt, dont elle est devenue depuis peu le point de jonction, donnent à la station de Deynze un rang fort important parmi les stations secondaires ; et cependant, jusqu'à ce jour, il ne s'y trouve pas de salle d'attente : car ce serait une dérision de donner ce nom à une espèce d'étable ou de trou à charbon, unique refuge où les voyageurs aient le droit de chercher un abri contre les injures de l'air, et pas l'ombre de magasins, dont l'existence serait si nécessaire pour garantir d'avarie les marchandises arrivant ou s'expédiant par chemin de fer.

« Cet état de choses qui paraît inexplicable quand on compare ce qui devrait se faite ici, avec ce qui s'est fait depuis des années pour des stations très inférieures sous tous les rapports à celle de Deynze, soulève des critiques et des murmures unanimes ; et s'il se prolongeait davantage, nous nous croirions fondés à nous plaindre qu'on oublie à notre préjudice les principes les plus simples de la justice distributive.

« Mais nous sommes convaincus qu'il n'en sera pas ainsi : vous venez de voter des fonds considérables pour des constructions de l'espèce dont s'agit : votre intention, sans nul doute, est que ces fonds soient appliqués aux travaux urgents et nécessaires d'abord, aux travaux de luxe ou d'agrément après ; et les travaux que nous réclamons ont été naguère signalés à la Chambre comme présentant le caractère de la plus incontestable urgence par d'honorables représentants à même d'en juger personnellement en parfaite connaissance de cause. »

Messieurs, vous comprenez l'importance de la station de la ville de Deynze où plusieurs chemins pavés viennent converger, où plusieurs chemins de fer viennent se réunir, celui, récemment ouvert, de Thielt sur Deynze, et celui d'Audenarde à Nazareth, qui n'est qu'a un pas de Deynze et qui est à la veille d'être mis en exploitation ; il est évident que dans une pareille situation, Deynze doit avoir une station quelque peu convenable pour abriter et les marchandises et les voyageurs. C'est une station où je passe assez fréquemment moi-même. Il n'y a pas moyen de s'abriter, si ce n'est sous un parapluie, car il faut rester à l'air libre.

La station de Deynze a été une des premières stations établies au chemin de fer en Belgique, et depuis cette époque déjà si éloignée on n'a pas fait le moindre travail à la station, pour l'approprier à sa destination.

Les plaintes deviennent de plus en plus nombreuses ; elles reposent sur des motifs dont on ne peut constater la légitimité, quand on voit se multiplier les chemins de fer qui aboutissent à cette station, déjà très importante par elle-même, vu que c'est la voie directe entre la France et la Belgique. Votre commission, mue par ces motifs, à l'unanimité, a l'honneur de vous proposer le renvoi de la pétition au ministre des travaux publics, afin que l'état déplorable de la station de Deynze vienne à cesser le plus tôt possible.

M. Maertens. - Je regrette que M. le ministre des travaux publics ne soit pas présent ; peut-être eût-il pu nous donner dès à présent une réponse aux plaintes que vient de vous exposer votre commission des pétitions.

J'espère que les collègues de M. le ministre voudront bien lui transmettre les observations qui seront faites relativement à l'objet dont il s'agit.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - M. le ministre des travaux publics est indisposé.

M. Maertens. - Déjà on a appelé l'attention de M. le ministre sur l'état de la station de Deynze, lorsque la Chambre, dans une demande de crédit extraordinaire, introduisit un amendement portant allocation d'un million pour achèvement de station ; alors M. le ministre n'a pas jugé convenable de donner des explications, ne sachant comment il userait de la somme mise à sa disposition, Mais sur une interpellation qui lui a été adressée au Sénat il a répondu qu'il lui serait impossible d'appliquer à la station de Deynze l'excédant des sommes qui avaient été destinées aux stations de Courtrai et de Mouscron.

C'est sur cette réponse que nous croyons devoir faire quelques observations. Je ne sais pourquoi les sommes que laisseront disponibles les travaux à faire aux stations de Courtrai et de Mouscron ne seraient pas appliquées à la station de Deynze, aussi bien qu''à toute autre ; car on peut invoquer en sa faveur un droit de priorité, puisque c'est une des plus anciennes qui aient été établies en Belgique.

En effet, la ligne de Gand à Courtrai est une des premières qui aient été inaugurées ; voilà donc plus de 15 ans que cette localité a sa station provisoire. Si on m'objectait son peu d'importance, je me bornerai à dire que sur 49 stations que compte la ligne de l'ouest, celle de Deynze est la 10ème ou la 11ème en rang. D'après les documents qui nous ont été distribués par le gouvernement pour l'exercice 1855, il se trouve qu'on y a délivré 57 mille billets, ce qui fait une moyenne de 104 à 105 voyageurs par jour.

Or de quoi se composent aujourd'hui les bâtiments de cette station ? D'un misérable hangar où il est impossible à quinze ou seize personnes de s'abriter.

Est-il possible de laisser dans un pareil délabrement une station où se rendent plus de cent voyageurs par jour ; les bureaux mêmes ne sont pas décents ; le chef de station et les commis ne peuvent pas s'y remuer ; le bureau de poste est établi dans une espèce de guérite qui dans la pensée du constructeur devait avoir une tout autre destination que celle qu'y a affectée le gouvernement. Je pense qu'il est de la dignité du gouvernement de mettre un terme à un pareil état de choses.

Cette station, du reste, vient de gagner en importance par l'inauguration d'une nouvelle voie, je veux parler de la ligne de Thielt à Deynze, je ne sais pas quel sera l'accroissement de trafic que produira cette ligne, mais toujours est-il qu'elle doit augmenter le nombre des voyageurs. J'espère que le gouvernement voudra prendre en considération les observations qui viennent d'être présentées et que justice, quoique tardive, sera faite à d'aussi légitimes réclamations.

M. Rodenbach. - J'ai déjà plusieurs fois appelé l'attention du gouvernement sur la nécessité d'améliorer la station de Deynze. J'ai été témoin naguère que beaucoup de marchandises s'y trouvaient à la belle étoile ; il serait plus juste de dire à la vilaine étoile.

Mais le fait est qu'il y avait une quantité de cuves de beurre et de barriques d'amidon exposées à la pluie.

Quand un gouvernement établit des chemins de fer et veut efficacement protéger le commerce, il doit aller jusqu'au bout. Si, comme je le crois, M. le ministre des travaux publics n'a pas des fonds suffisants pour agrandir et améliorer la station de Deynze, s'il doit employer ceux qui ont été mis à sa disposition pour les stations de Courtrai et de Mouscron qui, je le reconnais, ont plus d'importance que celle de Deynze, il doit nous demander un supplément de crédit. La dépense d'ailleurs, ne dépassera pas, je crois, le chiffre de 50,000 à 60,000 fr., et le gouvernement doit protection aussi bien aux petites stations qu'aux grandes ; c'est ici le cas.

Je forme des vœux dans ce sens pour qu'à la discussion du budget des travaux publics, M. le ministre propose un supplément de crédit en faveur de la station de Deynze qui, je le répète, est dans un état pitoyable.

M. de Smedt. - Je ne demande pas seulement le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics, mais je demande qu'il veuille avoir un égard sérieux à la réclamation des habitants de Deynze.

On vous a dit que le bureau même de la station de cette ville présentait un aspect indécent. Mais on dirait avec plus de raison qu'il n'y a pas de bureau. En quoi consiste la salle d'attente ? En un petit hangar de quelques pieds carrés, où se trouvent une bascule et un escalier conduisant à un grenier. Il s’y trouve des bancs, mais quels bancs ! Des ballots, des paniers d'œufs, des paniers de lapins, etc. On ne peut réellement se tenir dans ce hangar, on doit en sortir et la distance entre le hangar et les rails n'est que de 10 à 12 pieds, ce qui est très dangereux. Lorsqu'on veut prendre son billet, on est de nouveau à l'air.

Je demande que le gouvernement veuille avoir égard à cette réclamation qui est très juste. La construction qu'on réclame est nécessaire, aujourd'hui surtout que l’embranchement de Thielt donne une importance bien plus grande encore à la station de Deynze, qu'il met en (page 461) communication avec la Flandre occidentale. M. le ministre des travaux publics, qui passe souvent à cette station, devrait voir l'état dans lequel elle se trouve ; il est vrai que, comme il ne s'y arrête pas, il ne connaît peut-être pas tous les inconvénients qui résultent de cet état.

Je demande donc, tout en appuyant le renvoi de la pétition à M. le ministre, de bien vouloir y avoir égard.

M. Magherman. - Comme vient de le dire l'honorable préopinant, on ne trouve à Deynze qu'un hangar pour les marchandises, hangar assez restreint et qui ne comporte que quelques mètres de superficie. Quand les voyageurs veulent s'abriter contre les intempéries de l'air, c'est au milieu des marchandises qu'ils doivent se placer. Mais de salle d'attente, il n'y en a pas. J'en parle avec connaissance de cause, parce que Deynze est la station la plus rapprochée de l'arrondissement d'Audenarde. La construction de cette station est d'une extrême urgence ; car, comme on vous l'a dit, il est peu de stations secondaires qui aient plus d'importance.

J'insiste donc avec les honorables préopinants, pour que le gouvernement se procure les fonds nécessaires pour mettre la main à l'œuvre le plus tôt possible.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée d'Enghien, le 19 décembre 1856, des habitants d'Enghien appellent l'attention de la Chambre sur le placement des barrières dont la distance entre elles est inférieure à celle prescrite par la loi.

Messieurs, vous comprenez que votre commission n'est pas de même de vérifier les faits. Les pétitionnaires entrent dans de très longs détails pour prouver que telle barrière, placée à telle distance d'une autre, n'est pas placée conformément à la loi.

Votre commission, appréciant la gravité des faits signalés, vous propose le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.

M. Lelièvre. - A l'occasion de la pétition d'Enghien, je crois devoir appeler l'attention de M. le ministre des travaux publics sur la réclamation des habitants d'Andenne relativement à la barrière placée sur le territoire de cette commune.

Déjà, nous avons signalé l'illégalité commise en cette occurrence. Je prie M. le ministre d'examiner sérieusement la question relative à cet objet et de faire droit aux justes réclamations adressées à l'autorité supérieure.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.


Rapport sur la pétition du sieur Van Loo, relative aux courtiers de navires

M. le président. - La commission conclut au renvoi de la pétition à M. le ministre des affaires étrangères.

M. de Renesse. - Messieurs, dans un intérêt de justice et d'impartialité, je viens appuyer la réclamation du sieur Van Loo, courtier de navires à Gand : elle me paraît fondée en droit et en équité.

Les courtiers de navires ont été institués très anciennement dans un véritable intérêt public, pour sauvegarder les droits des trafiquants étrangers, et, pour les mettre à l'abri des exactions auxquelles leur ignorance parfois des mœurs et des lois des places qu'ils visitent, pourrait les exposer ; le but direct du courtage maritime était donc d'assurer la sécurité du commerce de mer.

Les lois des 28 ventôse et germinal an XI, et l'arrêté du 27 prairial an X, rétablirent les dispositions relatives au courtage dans l'état où elles se trouvaient sous le régime de l'ordonnance de 1681, qui avait complètement organisé ce service public ; car une loi des 14 avril et 15 mai 1791 avait modifié cette ordonnance, en ce qu'elle permettait que le nombre des courtiers instrumentant auprès de chaque port fût illimité, tandis que, d'après l'ordonnance de 1681, leur nombre était fixé d'après les ressources de leurs attributions.

Le Code de commerce ne modifia rien à la législation antérieure ; il maintint tous les droits des courtiers ainsi que toutes les obligations qui leur avaient été imposées.

La loi exige des courtiers de navires de nombreuses garanties, leur impose de dures obligations : ils doivent se soumettre à un examen ; ils ne sont nommés par le Roi que sur une liste triple de candidats ; ils doivent verser un cautionnement pour garantir leurs opérations ultérieures ; ils doivent prêter serment ; ils ne peuvent sous aucun prétexte faire des actes de commerce ou de banque pour leur propre compte: ils ne peuvent s'intéresser directement ni indirectement dans aucune entreprise commerciale, etc.

Si, dans un grand intérêt public, cette institution légale a été maintenue sous toutes les législations qui nous ont régis, si dans beaucoup d'autres pays l'on a pareillement reconnu la nécessité de réglementer le courtage maritime d'après les mêmes principes du Code de commerce pour donner plus de garanties au commerce de l'étranger, il me paraît donc équitable que le gouvernement et les Chambres prennent en sérieuse considération les justes réclamations des courtiers de navires, lorsqu'ils se plaignent de ce que le courtage clandestin porte actuellement le plus grand préjudice à leurs intérêts, et l'on ne peut soutenir avec quelque fondement, comme paraît le croire l'honorable rapporteur M. Van Iseghem, que le courtage maritime soit entièrement libre, que le premier venu, sans commission aucune, n'offrant parfois aucune garantie réelle pour le trafiquant étranger, puisse exercer impunément cette fonction publique, qui ne peut être conférée, d'après la loi, que par le Roi ; sous ce rapport, il est incontestable que le gouvernement reconnaît lui-même l'existence légale et la nécessité des courtiers de navires, puisque le Moniteur contient parfois des arrêtés royaux portant encore nomination de ces fonctionnaires.

S'il les croyait inutiles, pourquoi continuait-il à en nommer, lorsque les places de courtiers de navires viennent à vaquer, ou pourquoi en augmente-t-il le nombre là où le besoin s'en fait sentir ?

Si donc l'existence de cette institution est reconnue par les actes mêmes du gouvernement, il me semble, que l'on ne peut contester que ces courtiers aient le droit de demander que l'on ne tolère plus le courtage des marrons, et que ceux-ci puissent continuer à leur faire une concurrence ruineuse, sans être tenus à aucune des obligations auxquelles sont astreints les courtiers légaux.

Si l'on voulait contester l'exercice illégal de ces courtiers marrons, je pourrais fournir à la Chambre la preuve, par des pièces authentiques, que des personnes entièrement étrangères au courtage légal maritime exercent cette profession, contrairement à la loi, en faisant le courtage des affrètements, et d'autres actes réservés aux seuls courtiers de navires.

Le gouvernement avait nommé une commission chargée d'examiner les modifications à apporter au Code de commerce ; cette commission reconnaissait formellement la nécessité de prendre des mesures efficaces pour protéger l'institution des courtiers légaux, et, cependant, jusqu'ici le gouvernement ne paraît avoir prescrit aucune mesure pour que la loi qui règle les attributions du courtage légitime ne reçoive plus aucune atteinte de la part des courtiers marrons.

Si l'institution du courtage légal est nécessaire, si le gouvernement lui-même soumet les courtiers de navires à l'obligation de se conformer aux prescriptions des articles 80 et suivants du Code de commerce, il faut aussi lui accorder les moyens de pouvoir exercer utilement les attributions qui lui sont légalement conférées, et empêcher que d'autres, sans mission aucune, leur portent une atteinte fâcheuse, sans être soumis à aucune des obligations imposées à ces fonctionnaires publics.

L'on ne peut argumenter de quelques jugements ou arrêts isolés, que les dispositions des articles 80 et suivants du Code de commerce ne seraient plus applicables dans l'espèce, qu'elles auraient été abrogées par les articles 118 et 119 de la loi générale des douanes de 1822, puisque, sous cette même législation, la cour de cassation de Bruxelles en a jugé autrement le 19 octobre 1826 et même le 12 juin 1834, sous l'empire de la loi générale des douanes de 1822, dont on invoque les articles 118 et 119.

Il me semble que, pour que l'une ou l'autre disposition de nos Codes doive perdre ses effets, il faut qu'une loi postérieure le stipule formellement ; or, jusqu'à présent, ceci ne me paraît pas avoir été démontré à l'évidence, quant à l'abrogation des articles précités de notre Code de commerce, ni aux autres dispositions de nos lois qui régissent cette, matière ; si donc ces lois existent encore, le gouvernement, qui est chargé de l'exécution des lois, doit aussi les faire respecter: il ne peut, par sa trop grande tolérance, laisser porter atteinte à des droits légalement établis.

Plus le commerce maritime prend de développement, plus nous avons des arrivages de l'étranger, plus aussi nous devons entourer ce. commerce de garanties de toute nature, et sous ce rapport un ban courtage légalement établi, soumis à des obligations stipulées par la loi, doit donner une plus grande sécurité aux capitaines de navires étrangers, que de se trouver, pour ainsi dire, à la merci d'intermédiaires sans titres, et, parfois, eux-mêmes intéressés directement dans des opérations commerciales ou associés pour le haut commerce maritime.

Par la pétition adressée à la Chambre par MM. les courtiers de navires à Anvers, il est démontré que dans notre métropole commerciale, où le courtage clandestin n'est jamais parvenu à s'exercer d'une manière quelque peu sérieuse, « jamais capitaine n'a été frustré dans son bien, jamais plainte n'a été faite, jamais intérêt n'a été compromis, tandis que dans d'autres ports, les intérêts des capitaines étrangers sont été souvent froissés et leurs frets perdus. »

La requête adressée, depuis peu, à la Chambre, par des capitaines de navires de différentes nations, vient corroborer la déclaration de MM. les courtiers d'Anvers, et démontrer la nécessité de maintenir le courtage légal, et en dernier lieu, la pétition déposée hier sur le bureau de la Chambre, et signée à Ostende par les hommes les plus honorables, soit comme président et membres de la chambre et du tribunal de commerce, ou en qualité de consuls étrangers, de négociants, banquiers, armateurs du haut commerce et commerçants, doit avoir une certaine importance, puisqu'elle constate t que les fonctions de courtier convenablement et légalement exercées sont utiles et de la plus haute importance, pour le commerce en général, et particulièrement encore dans un port de mer, pour les affaires de commerce maritime, où il s'agit de la sécurité des relations commerciales de la Belgique avec les pays étrangers. »

D'après ces considérations, je crois devoir, dans un intérêt de justice et de légalité, appuyer la requête de M. Van Loo, courtier de (page 462) navires à Gand, ainsi que les autres pétitions demandant le maintien du courtage légal.

J'ose espérer que le gouvernement, reconnaissant lui-même la grande utilité des courtiers légaux, prendra des mesures pour empêcher que l'on ne porte atteinte à leurs intérêts au moyen du courtage clandestin et que l'on fixera définitivement le nombre des courtiers d'après le mouvement du port où ces fonctionnaires sont commissionnés.

M. Maertens. - Je viens appuyer la pétition de M. Van Loo. Les détails dans lesquels vient d'entrer l'honorable comte de Renesse me dispensent de longs développements.

L'année dernière la question s'était déjà présentée à la Chambre, sur une requête adressée par le même pétitionnaire ; les conclusions tendaient alors au renvoi à la commission chargée de la révision du Code de commerce. J'ai insisté à cette époque pour qu'on s'en occupât sérieusement et qu'on voulût une bonne fois la trancher. Mais la discussion portait surtout sur des décisions récentes de la jurisprudence qui avaient singulièrement amoindri les attributions des courtiers maritimes. Cette commission étant encore saisie de la question, nous n'avons pas à nous en occuper davantage.

Nous ne pourrions discuter utilement les décisions du pouvoir judiciaire, que si l'on déférait à notre examen un projet d'interprétation.

Mais aujourd'hui les termes du rapport donnent à la question une bien plus grande extension, puisqu'ils tendent à proposer la suppression des fonctions de courtiers maritimes. En effet, le rapport, après avoir dit que les courtiers n'ont pas à se plaindre puisqu'ils conservent encore l'immense avantage de pouvoir faire les affrètements, seul droit exclusif qui leur reste, ajoute aussitôt qu'il importe d'entrer dans une voie plus libérale encore. Or, vous conviendrez que pour peu qu'on devienne encore plus libéral en cette matière, on aboutit à la suppression complète de ces fonctions.

Je n'hésite pas à dire que, dans mon opinion, il est de l'intérêt du commerce de ne pas provoquer un pareil résultat. Je sais, messieurs, qu'on a souvent insisté pour la suppression des fonctions de courtiers de toute espèce. Sans partager cette idée, je comprendrais celle des courtiers de change, d'assurance, etc., parce qu'ils ne sont en relations qu'avec des nationaux. Mais je ne pense pas que l'on puisse confondre dans la même proscription les courtiers maritimes qui ont pour mission spéciale de servir d'intermédiaire à des étrangers. En effet le capitaine étranger qui arrive dans nos ports, sans connaître notre langue, nos usages, nos lois, doit pouvoir s'adresser en toute confiance à un homme investi d'un caractère officiel.

On objecte que les relations plus fréquentes entre les peuples ont de plus en plus initié les étrangers à nos usages et à nos lois, mais s'il en est ainsi, la loi leur permet d'agir par eux-mêmes.

C'est cependant ce qui arrive rarement, et ainsi se trouve justifié le maintien d'une institution environnée de garanties destinées à sauvegarder leurs intérêts.

On prétend que dans d'autres pays on attache peu d'importance à ces fonctions ; mais qu'on ne s'y méprenne pas, dans les pays auxquels on a fait allusion la marine nationale absorbe presque toutes les affaires commerciales, tandis que chez nous la marine nationale n'entre que pour un sixième dans le mouvement général de la navigation. Cette raison me semble péremptoire. Pendant longtemps le sieur Van Loo a réclamé dans l'isolement, mais aujourd'hui il n'en est plus ainsi, les pétitions affluent de toutes parts, l'inquiétude s'est emparée des courtiers, et il importe de statuer sur leur sort. Je pense même que si la révision du Code de commerce devait se faire attendre longtemps, il serait juste d'en distraire les dispositions relatives aux courtiers, et d'en faire l'objet d'un projet de loi spécial.

J'appuie donc de toutes mes forces la réclamation du pétitionnaire, je la crois parfaitement fondée et j'espère qu'on y fera pleine et entière justice.

M. Rodenbach. - Messieurs, si je suis bien informé, on ne connaît pas les courtiers maritimes en Angleterre ni en Hollande.

Il est possible, il est même très probable que lorsqu'on s'occupera de la révision du code de commerce, il y aura des partisans du système qui existe en Angleterre et en Hollande, et qu'on demandera s'il n'y a pas moyen de supprimer non seulement les courtiers maritimes, mais peut-être aussi les courtiers de commerce et même les courtiers de change, car c'est le même principe ; mais, messieurs, aussi longtemps que la législation ne sera pas changée, je pense qu'on doit soutenir et protéger les courtiers qui sont nommés par le gouvernement. Comme vient de le dire l'honorable M. de Renesse, pour être courtier de navires il faut d'abord subir un examen, il faut payer un cautionnement, il faut prêter serment ; enfin on est réellement fonctionnaire public. A côté de ces fonctionnaires publics, il y a des hommes qu'on appelle courtiers-marrons et qui peuvent faire impunément ce que font les agents nommés par le gouvernement.

Il me semble, messieurs, que cela n'est pas rationnel, aussi longtemps que les courtiers de navires existent, il faut leur accorder de la protection.

Ou a dit à la vérité qu'il y avait des jugements qui reconnaissent aux commissionnaires marrons le droit de faire des affaires ; il paraît qu'effectivement il en est ainsi, et qu'on se base sur la loi de 1822 ; mais dans les jugements on a confondu la déclaration de gros avec celle de détails en douane. Cependant en France, et j'ai pu encore m'en assurer récemment dans les journaux et notamment au Havre et à Paris, on condamne les courtiers marrons, et c'est encore la même législation qui régit les courtiers maritimes dans les deux pays.

Il me paraît dès lors qu'il y a quelque chose à faire. Le gouvernement doit protéger des hommes à qui il a confié un mandat, une place ; il ne faut pas qu'on les mette dans l'impossibilité de le remplir, ils ont le même droit à la protection du gouvernement que les notaires et autres fonctionnaires que le gouvernement nomme aussi.

A mon avis donc, il faut qu'on maintienne intacte la position des courtiers maritimes, tant qu'on n'aura pas proclamé la liberté de cette profession.

Je suis assez partisan de cette liberté, car les notaires actuels, notamment à Anvers, ont un monopole qui leur assure des bénéfices fabuleux, 15.000 fr. par an et même au-delà ; mais il n'en est pas ainsi à Gand et dans d'autres villes.

Je le répète, messieurs, il faut que le gouvernement soutienne les courtiers maritimes qu'il a nommés.

(page 497) M. Van Cromphaut. - Messieurs, je viens appuyer la pétition du sieur Van Loo qui a si clairement exposé l'utilité de maintenir l'institution des courtiers de navires. Dans un remarquable mémoire, l'auteur de la pétition démontre à toute évidence qu'il y a de l'injustice, et je dirai même qu'il y a du danger à ne pas faire respecter la législation sur la matière.

Pour être admis comme courtier, il faut donner des preuves de capacité et réunir toutes les conditions de moralité et de solvabilité exigées par la législation. Ces agents sont assujettis à la prestation du serment, et au versement d'un cautionnement. Investis de la confiance du gouvernement, ils offrent toute garantie à la marine marchande.

Ils sont responsables de leurs actes vis-à-vis du gouvernement dont ils ont obtenu leur nomination, et ils sont astreints à se renfermer strictement dans l'esprit du Code de commerce et des lois sur la matière. Tout commerce leur est interdit, et ils deviennent punissables du moment qu'ils s'écartent de leurs attributions et obligations.

Les courtiers de navires, régulièrement nommés par le Roi et dûment assermentés, offrent toute garantie à la marine marchande.

Les capitaines de navires, en réclamant le ministère de ces fonctionnaires, trouvent dans leur entremise la protection que la législation a eu en vue de sauvegarder aux premiers.

Qu'arriverait-il, messieurs, si les lois ne recevaient plus leur exécution, ou si l'on arrivait à supprimer l'institution des courtiers de navires ? Pour ma part, je n'hésite pas à le dire, les capitaines de navires étrangers seraient très embarrassés et souvent ils seraient livrés à des intermédiaires inhabiles qui n'inspirent aucune confiance et qui n'entourent d'aucune garantie les intérêts des navigateurs, intérêts qui seraient à chaque instant compromis.

Il en résulterait des abus et des conflits fâcheux, très nuisibles, non seulement au point de vue de l'intérêt des armateurs étrangers, mais aussi au point de vue de notre considération au dehors. Cet état de choses aurait pour effet d'amoindrir les arrivages et d'éloigner le commerce de notre pays : c'est ce que nous ne pouvons tolérer.

Une pétition datée de Bruges, inspirée, paraît-il, par le marron nage, voulant justifier le rapport de l'honorable M. Van Iseghem, dit que : « La plupart des courtiers, contrairement à toutes les prescriptions du Code de commerce, se permettent de faire des affaires pour leur propre compte et sont même armateurs. » Je réponds à ceci, que les lois sont faites et promulguées pour être exécutées, et elles doivent être appliquées du moment qu'une contravention est dûment constatée.

En vérité, messieurs, les motifs que font valoir les pétitionnaires de Bruges sont un non-sens, et ne détruisent en rien les réclamations fondées de M. Van Loo qui me paraît être seul dans le vrai. Il ne réclame pas contre l'application de cette législation, il la respecte, au contraire, comme il demande que l'on ne foule pas aux pieds les droits de courtiers légalement nommés. Mais, messieurs, les considérations que font valoir les pétitionnaires de Bruges et d’Ostende parlent pleinement en faveur du système soutenu par M. Van Loo.

Comment ! on pourrait interdire tout commerce aux courtiers légaux et on ne leur accorderait pas le bénéfice de la législation en ce qui concerne les privilèges qui leur sont dus du chef de leurs soins et des garanties qu'ils donnent aux capitaines de navires étrangers !

Le pétitionnaire de Gand ne demande autre chose que le respect des lois, sans introduction d'aucune innovation aux lois existantes. Il ne demande que la régularisation de ces lois. Il combat victorieusement le rapport de l'honorable M. Van Iseghem. Il est dans le vrai quand il dit que la Belgique ne peut être comparée à la Hollande, ni même à l'Angleterre. Ces deux pays ont leur marine marchande: capitaines et armateurs sont indigènes et peuvent veiller eux-mêmes à leurs intérêts. Il n'en est pas de même en Belgique où le commerce se fait généralement par des navires étrangers dont les intérêts doivent trouver leurs garanties dans l’intervention des agents légalement nommés et dûment assermentés. En effet, messieurs, la proportion des arrivages en Belgique peut être établie comme suit :

Sur 2,836 navires reçus en 1855, il y a eu 2,363 navires étrangers, et seulement 473 navires belges, soit 1 sur 6.

Qu'arriverait-il, si les dispositions des lois pouvaient être méconnues, sans répression ? On verrait bientôt des agents de chaque pays s'établir dans toutes les places maritimes, et ces agents accapareraient toutes les affaires de leurs compatriotes dont ils parlent la langue.

Ils auraient infailliblement la préférence sur nos nationaux pour tout ce qu'il y aurait à faire en matière de douanes et d'affrètement.

La loi, d'ailleurs, n'impose pas à la marine l'obligation de l'intervention d'un courtier. Toute liberté est laissée au capitaine de faire lui-même ses affaires. La loi a seulement pour but de garantir les intérêts des capitaines qui ont recours au ministère des agents légaux dont les actes ont de l'authenticité.

Pour tous ces motifs, je forme des vœux pour que l'institution des courtiers soit conservée intacte, et j'engage le gouvernement à prendre des mesures propres à assurer les droits de ses agents, conformément aux réclamations de M. Van Loo.

Encore une dernière réflexion qui corrobore les considérations que je viens de présenter au parlement. Dans la métropole du commerce, à Anvers même, où, certes, il y a des négociants très entendus et très capables, le commerce n'a-t-il pas réclamé avec instance un nombre plus considérable de courtiers de navires, et la chambre de commerce de cette place importante n'en a-t-elle pas confirmé toutes les convenances ? Le gouvernement à son tour, éclairé sur la question, n'a-t-il pas reconnu la même utilité en créant dernièrement quatre places nouvelles qu'un arrêté royal est venu remplir peu de temps après ? Ce seul fait, messieurs, suffit pour mettre au néant toutes les objections de nos contradicteurs : je persiste donc à opiner dans le sens des conclusions que j'ai eu l'honneur de présenter dans cette enceinte, et je me plais à croire que justice sera faite à la pétition de M. Van Loo.

(page 462) M. Lelièvre. - Les tribunaux ont eu à connaître d'une question relative aux prérogatives et aux attributions des courtiers maritimes. Cette difficulté a été résolue. Dans cet état de choses il s'agit de savoir s'il y a lieu de présenter un projet de loi spécial sur la matière.

Quant à moi, messieurs, je pense qu'il y a quelque chose à faire en faveur des courtiers maritime s, et c'est pour ce motif que j'appuie le renvoi de la pétition à M. le ministre des affaires étrangères. On ne peut évidemment prendre une autre résolution.

Les tribunaux ayant statué sur la difficulté dont ils ont été saisis, le gouvernement doit examiner s'il n'y a pas lieu de prendre des dispositions relatives aux courtiers de navires. Je ne puis que recommander l'examen de cette importante question à l'attention du ministre.

M. Osy. - Messieurs, c'est depuis un grand nombre d'années qu'à Gand, à Anvers et dans d'autres places importantes de la Belgique, il y a des réclamations contre les commissionnaires appelés vulgairement courtiers-marrons et qu'il y a aussi des réclamations des courtiers-marrons et du commerce contre les courtiers nommés par le gouvernement.

Si ceux-ci, conformément à la prescription de l'article 83 du code de commerce, ne s'étaient pas immiscés dans les affaires, certes il n'y aurait pas eu contre ce corps la réprobation dont nous avons été les témoins, il y a quelques années, et qui a engagé les commissionnaires à prendre patente et à faire concurrence aux courtiers nommés par le gouvernement.

Les choses allaient si loin que le procureur général avait donné ordre, il y a quelques années, de poursuivre ceux qui faisaient des affaires contraires au Code de commerce, et de poursuivre même les commissionnaires. Qu'a fait le gouvernement ? Il a nommé une commission chargée de réviser le Code de commerce, et à l'occasion de ce travail qu'on verra ce qu'il y a à faire.

Pour moi, je fais les vœux les plus sincères pour que dans cette branche de commerce, comme dans toutes les autres, nous arrivions à la liberté ; je désire que tout homme qui aura une patente et qui sera bien famé, puisse faire des affaires, à l'instar de ce qui se pratique en Hollande, à Londres et à Hambourg.

La chambre de commerce d’Anvers avait demandé que le gouvernement augmentât le nombre des courtiers, non seulement des courtiers de navires, mais des courtiers d'assurances, de change et de marchandises ; il y a peu de jours, le gouvernement a trouvé convenable de nommer vingt-quatre à vingt-cinq nouveaux courtiers à Anvers.

Aujourd'hui encore la chambre de commerce d'Anvers est en instance auprès du gouvernement pour qu'il en nomme vingt-quatre autres dans les quatre branches que je viens de citer. Je pense dès lors que le commerce et le gouvernement désirent arriver à la liberté dans cette matière.

L'abus allait si loin qu'il y avait des courtiers qui non seulement faisaient des affaires comme courtiers, mais qui avaient des intérêts dans les navires ; vous aviez des courtiers de marchandises qui achetaient une cargaison entière et la vendaient en détail, qui même étaient intéresses dans l'achat de marchandises sous voiles, de manière que les courtiers étaient devenus de vrais négociants.

Dans cet état de choses, le commerce lui-même a trouvé convenable de favoriser les commissionnaires patentés, lorsqu'ils présentaient, d'ailleurs, toute espèce de garanties.

Maintenant que l'abus dont se plaint M. Van Loo existe depuis tant d’années et que, de son côté, le commerce se plaint depuis longtemps des courtiers qui font des affaires pour leur compte, il est impossible à M. le ministre de la justice de donner suite à l'article 83 du code de commerce tant contre les courtiers de navires que contre les courtiers marrons.

Il y a un jugement de la cour de cassation qui permet aux commissionnaires patentés de faire des affaires, comme les commissionnaires en font, en dehors de leur serment.

Messieurs, comme j’aime la régularité dans les affaires, je désire (page 463) beaucoup que la commission nommée par le gouvernement hâte autant que possible ses travaux et que la question dont il s'agit soit décidée par la révision du code de commerce, et alors chacun saura à quoi s'en tenir.

Pour moi, je crois que nous avons une expérience assez longue pour pouvoir adopter le système de liberté qui existe en matière d'affaires de courtage en Hollande, à Hambourg et en Angleterre.

Mais il est impossible de vouloir aujourd'hui forcer le gouvernement, quand depuis plus de trente ans les courtiers font des affaires et qu'il y a des courtiers marrons, à rétablir la stricte exécution de l'article 80 du Code de commerce. Le gouvernement a le droit d'examiner les carnets des courtiers de navires. Jamais le procureur du roi ne se fait remettre ces carnets pour voir si toutes les opérations du courtier y sont régulièrement inscrites, s'il ne s'est pas écarté des prescriptions de l'article 80 du Code de commerce, s'il s'est borné à être l'intermédiaire entre les négociants et les capitaines.

On a beaucoup parlé d'affaires rentrant dans les opérations des courtiers de navires, qu'aurait faites un de nos honorables collègues.

Je ferai observer que quand un navire est adressé à la maison de commerce à laquelle il est consigné, cette maison fait l'encaissement du fret et donne tous ses soins pour que le capitaine étranger s'acquitte de sa mission ; mais ensuite on s'adresse au courtier de navires pour procurer au capitaine tout ce dont il peut avoir besoin pour les vivres et l'armement de son navire.

On a recours encore à l'intermédiaire du courtier quand il s'agit d'affréter le navire ou de porter une contestation devant un tribunal.

Enfin quand les navires sont adressés à une maison à laquelle ils «ont consignés, cette maison fait très légitimement une partie des opérations que font d'ordinaire les courtiers de navires.

Le gouvernement n'a rien à faire dans la circonstance actuelle. Je me borne à demander qu'il hâte le travail de la commission nommée pour réviser le Code de commerce.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Je ne suivrai pas les honorables préopinants dans les développements dans lesquels ils sont entrés. Cette discussion ne me paraît pas pouvoir aboutir pour le moment. Je ne dirai que quelques mots.

La question se présente sous deux aspects : le côté juridique et le côté législatif. Quant à l'aspect juridique,, la discussion de la Chambre ne peut pas s'y porter d'une manière utile ; il s'agit de l'interprétation d'une loi, il s'agit de savoir jusqu'à quel point et dans quelle mesure les dispositions de la loi du 26 août 1822 ont modifié et étendu, article 80 du Code de commerce.

C'est un cas d'application de loi qui échappe au parlement et qui ressortit exclusivement au pouvoir judiciaire. Déjà il a eu à s'en occuper et la cour de cassation a résolu la question par un arrêt du 18 mars 1850 qui a déclaré formellement que la loi de 1822 a modifié l'article 80 du Code de commerce en ce qui concerne le monopole attribué aux courtiers de navires. Sous ce rapport il n'y a donc rien à faire, il faut laisser pleine liberté au pouvoir judiciaire.

Du reste, la jurisprudence de la cour de cassation paraît donner tort à M. Van Loo et à ceux qui ont soutenu son opinion. Il ne reste qu'à attendre et à provoquer, au besoin, de nouvelles décisions judiciaires.

Le second point à examiner est du domaine législatif ; c'est de savoir quel est le principe qu'il convient d'adopter en cette matière. Comme on l'a dit, plusieurs systèmes sont en présence. Pour les uns, il faut revenir au système du Code de commerce, qui est le monopole exclusif des courtiers ; pour les autres, c'est le Code de commerce modifié par la loi de 1822 ; c'est le statu quo ; la troisième opinion tend à la liberté absolue en cette matière.

L'occasion de débattre ces systèmes se présentera naturellement devant la commission de révision du Code de commerce.

Cette commission, constituée sur de fortes bases, fonctionne depuis la fin de 1855. Elle est divisée en deux sections, l'une siégeant à Bruxelles et s'occupant spécialement de la réyision du titre premier, l'autre siégeant à Anvers et s'occupant de la révision du titre II, qui concerne le commerce maritime proprement dit.

La section qui siège à Bruxelles est d'avis qu'il y a lieu de s'occuper de l'institution des courtiers ; elle ne s'est pas, cependant, prononcée formellement sur le système à adopter ; la seconde section n'a pas encore eu, que je sache, à s'occuper de la question.

L'intention du gouvernement est d'activer autant que possible les travaux de cette commission, qui a beaucoup travaillé déjà. Prochainement le gouvernement proposera de réunir les deux sections, et la question qui occupe en ce moment la Chambre sera ainsi soumise à la commission entière.

Le gouvernement accepte donc, sous réserve de toute sa liberté, le renvoi proposé par M. le rapporteur.

M. Verhaegen. - J'appuie les considérations qu'on a fait valoir sur la pétition dont il s'agit en ce moment. Ces considérations ont été développées par mon honorable ami M. de Renesse, de telle manière que je pense qu'il serait inutile d'y revenir.

A en croire l'honorable M. Osy.il faut faire table rase de toute espèce de courtiers ; par les raisons qu'a fait valoir l'honorable membre, il ne s'agit pas seulement de mettre de côté les courtiers de navires, il faut aussi débarrasser le commerce des courtiers, et l'on a l'air de traiter cela de corporations inutiles, de vieilleries dont on n'a plus besoin. D'autre part, on dit que c'est un monopole. Pour moi, ce n'est ni l'un ni l'autre. Il n'y a pas là de corporations, mais des officiers publics institués dans l'intérêt du commerce et aussi nécessaires que le sont les notaires dans les affaires civiles. L'intérêt général exige qu'il y ait des courtiers, comme l'intérêt général exige qu'il y ait des notaires ; car les courtiers donnent un caractère d'authenticité aux opérations qu'ils font ; leurs carnets, lorsqu'ils sont bien tenus, font foi en justice, et s'ils ont certains droits, ils ont aussi des obligations. Ce ne sont donc pas plus des corporations qu'il n'y a des corporations d'avoués, d'avocats, de notaires. Ce sont des officiers publics, chargés de remplir une mission dans l'intérêt du commerce.

Les courtiers maritimes sont institués en vertu de la loi, et l'article 80 du Code de commerce ne fait que reproduire les dispositions d'anciennes lois. L'article 80 du Code de commerce est-il abrogé ? Faut-il l'abroger ? C'est une double question. C'est la question juridique qu'a posée M. le ministre de la justice. C'est la question législative.

Je n'ai pas à m'occuper ici de ces questions. Nous n'avons qu'une chose à dire, c'est que les courtiers de commerce existent en vertu de l'article 80 du Code de commerce, et qu'ils existeront aussi longtemps que cet article ne sera pas abrogé.

Maintenant si des courtiers se permettent de faire des affaires pour leur propre compte, ce n'est pas une raison pour décider qu'il n'y aura plus de courtiers.

S'ils font des affaires pour leur compte, il faut les poursuivre : il faut les punir. S'il y a des courtiers marrons qui s'immiscent dans des fonctions qui ne leur appartiennent pas, il faut les punir. On ne se débarrasse pas comme cela d'une disposition législative. Comment ! les courtiers marrons viendraient dire aux courtiers maritimes : Puisque vous faites des opérations pour votre compte, ce que vous n'avez pas le droit de faire, nous allons nous immiscer dans vos fonctions !

Ce serait le renversement de toutes les lois. Il n'y a qu'une chose à faire, c'est que le gouvernement tienne la main à ce que l'on poursuive tous ceux qui se mettent en contravention avec les lois, courtier.maritimes ou courtiers marrons.

On dit qu'il y a un arrêt. Mais il y a une erreur capitale qui sert de base à cet arrêt. On prétend qu'une loi de 1822 abroge l'article 80 du code de commerce.

C'est une erreur : la loi de 1822 fait une distinction essentielle entre les déclarations en gros et les déclarations en détail, et l'article 80 du code de commerce ne serait abrogé, d'après la loi de 1822, que quant aux déclarations en détail, et nullement pour les déclarations en gros.

L'article 119 de la loi de 1822 est positif à cet égard.

Je crois donc que les intéressés devraient faire dresser de nouveaux procès-verbaux et poursuivre l'affaire jusqu'en cassation. S'il y avait deux arrêts qui se contrediraient, il y aurait lieu à interprétation législative. Le renvoi au gouvernement n'aura aucun résultat.

Quant à la révision de l'article 80 du Code de commerce, nous n'avons pas à nous en occuper. Mais si j'avais à me prononcer sur ce point, je me prononcerais pour le maintien de l'article 80 du Code de commerce.

M. Magherman. - Je me proposais de présenter des observations dans l'ordre d'idées développé par M. le ministre de la justice. Pour ne pas tomber dans des redites et pour ne pas abuser des moments de la Chambre, je renonce à la parole.

M. Dumortier. - L'honorable M. Verhaegen a dit en partie ce que je voulais dire. Il a fait remarquer que la cour de cassation a confondu entre les déclarations de détail et les déclarations en gros, qu'il était nécessaire que les intéressés saisissent de nouveau les tribunaux de la question.

Mais permettez-moi de le dire, cela fait une position étrange aux intérêts. Voilà des personnes qui sont nommées par le gouvernement après examen, qui doivent fournir un cautionnement, et qui, après avoir fourni ce cautionnement, sont sous l'interdiction de faire des affaires, tandis que cette interdiction ne pèse pas sur les courtiers marrons qui n'ont pas fourni de cautionnement. Est-il possible de conserver deux positions aussi antipathiques ? Voilà cependant la position qui est faite aux courtiers. N'ont-ils pas mille fois raison de réclamer contre cet état de choses ?

On dit que le côté législatif devait être soumis au gouvernement, M. le ministre de la justice a dit qu'il saisirait de cette question la commission instituée pour la révision du code de commerce. Mais la révision des codes ne va pas vite.

Il s'écoulera plusieurs années avant que cette révision ait lieu. Dans l'intérêt des courtiers de commerce on ne peut maintenir l'interdiction de faire des affaires pour leur propre compte, tandis que cette interdiction ne pèse pas sur les courtiers marrons.

L'honorable M. Orts est venu se plaindre de ce qu'à Anvers des courtiers maritimes se sont associés. C'est un abus qu'il faut réprimer. Mais l'honorable membre en conclut que tout le monde peut commettre des abus et violer la loi C'est ce que je ne puis admettre. Je dirai avec l'honorable M. Verhaegen qu'aussi longtemps que l'article 80 du Code de commerce qui institue les courtiers existe, il faut le respecter.

Je ne sais si le gouvernement ne ferait pas bien de saisir les tribunaux de la question dans l'intérêt de la loi. Sans doute les intéressés peuvent le faire ; mais cela les entraînerait dans des frais qu'il convient de leur éviter ; car l'état actuel des choses ne peut être maintenu jusqu'à la révision du Code de commerce.

(page 464) De deux choses l'une, ou les courtiers doivent être autorisés à violer la loi, ou n'autorisez pas tout le monde à la violer.

Pour moi, il y a une chose que je ne comprends pas bien dans l'arrêt de cour de cassation : c'est que, d'après cet arrêt, le gouvernement des Pays-Bas, qui a porté la loi de 1822 et tous les gouvernements qui se sont succédé depuis tout à l'heure 34 ans ne savaient pas ce qu'ils faisaient en nommant des courtiers maritimes. Car, d'après le système de la cour de cassation, il ne devrait plus y avoir de courtiers. Or, j'ai peine à croire que tous les gouvernements se soient trompés à ce point. Je ne puis comprendre que le gouvernement hollandais qui faisait la loi lui-même sans que les Chambres pussent l'amender, n'ait pas su ce qu'il faisait et que le lendemain de la promulgation de la loi, il ait nommé des courtiers alors qu'ils étaient supprimés..Or, les courtiers maritimes, après la loi de 1822, ont continué à opérer sous l'empire du Code comme auparavant ; ils ont fait des déclarations en gros comme précédemment ils avaient seuls le pouvoir de les faire.

Je suis porté dès lors à supposer qu'il y a eu erreur de la part des tribunaux, et comme cette erreur porte un préjudice considérable à une classe de citoyens dont l'inutilité n'a pas été proclamée, qui existent en vertu du code, je crois que le gouvernement ferait très bien, en attendant la révision dont il nous a parlé, de saisir lui-même les tribunaux de la question, pour la faire décider.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - L'action publique appartient (erratum, p. 492) au ministère public.

M. Sinave. - Sans doute aussi longtemps que le chapitre V du code de commerce subsistera.il faut qu'il soit exécuté. Mais que reste-t-il à faire dans cette situation ? C'est de faire ce que le gouvernement fait, c'est de détruire le monopole par la concurrence ; c'est de nommer courtiers toutes les personnes qui demandent à l'être ; nous pouvons ainsi, sans rien modifier à la loi, remédier à tous les abus. Vous venez de l'entendre, le gouvernement a nommé une vingtaine de courtiers maritimes depuis trois mois, et il en nommera encore.

Mais je ne partage pas l'opinion de l'honorable M. Verhaegen ; il y a réellement eu corporation, et corporation telle ici qu'il n'est pas possible de la maîtriser. Vous êtes complètement dans la dépendance des courtiers. On a beau dire : S'ils s'associent, s'ils font des affaires, poursuivez-les. Le négociant a t-il donc le temps d'entamer des poursuites devant les tribunaux ?

Vous me direz. C'est un homme qui a fait un serment, c'est un courtier juré. Voilà une fameuse objection ! L'agent de change fait pour des millions d'affaires pour son compte, et les neuf dixièmes des affaires qu'il fait, ce sont des affaires de jeu, déclarées nulles par la loi. Poursuit-on ces agents de change ? Cela est impossible.

D'honorables membres ont dit : Dans les Pays-Bas, en Angleterre, il n'y a pas de courtiers jurés, parce que la marine est presque toute nationale. Cette assertion est inexacte en ce qui concerne les Pays-Bas. On dit que la marine étrangère excède de beaucoup la marine nationale.

Eh bien, voici un tableau qui prouve le contraire. Les navires hollandais sont de 600 mille tonneaux et les navires étrangers de 900 mille tonneaux.

Je crois, messieurs, que le gouvernement est dans la bonne voie et que nous devons attendre le résultat de l'enquête dont nous a parlé M. le ministre. Il ne s'agit du reste pas seulement des courtiers maritimes, mais de toute espèce de courtiers et agents de change.

Il faut une mesure générale, et mon opinion est qu'il faut suivre le principe qui existe dans les Pays-Bas et en Angleterre ; le Code dans ce premier pays n'a jamais été exécuté ; ni avant ni après la loi de 1822, il n'y a eu de courtier juré. Je crois que le gouvernement doit en attendant persévérer dans le système qu'il a adopté et nommer courtiers ou agents de change toutes les personnes qui demandent à remplir ces fonctions et qui offrent les conditions nécessaires pour les remplir.

M. le ministre des affairss étrangères (M. Vilain XIIII). - Messieurs, j'ai déjà eu l'occasion d'exposer deux fois à la Chambre mes principes en fait de courtiers de navires, de courtiers de commerce et de courtiers d'assurance, ainsi que mon opinion concernant le lipage. On a trouvé alors que mon opinion était passablement radicale, tellement radicale que j'ai été traité de révolutionnaire.

Je ne la répéterai pas aujourd'hui, parce que je croirais commettre une inconvenance vis-à-vis la commission qui a été instituée pour réformer cette partie du Code de commerce. Elle est beaucoup plus compétente que moi pour présenter au gouvernement une solution. Par conséquent, je réserve mon opinion et je ne l'exprime plus quant au fond de la question.

Je n'ai pris la parole que pour répondre un mot à l'honorable M. Dumortier.

Il a cherché à apitoyer la Chambre sur le sort des courtiers. J'ai eu dernièrement à nommer quatre courtiers de navires à Anvers. Plus de soixante concurrents m'ont demandé à être nommés et l'ont demandé avec instance ; ils se sont fait recommander par une quantité de membres de la Chambre, par une quantité de personnes, les plus haut placées appartenant au commerce d'Anvers.

Il me semble que si la position était si mauvaise, ces différentes personnes, qui faisaient le commerce pour leur compte, n'auraient pas demandé au gouvernement à avoir cette charge, à être obligées de prêter serment, à déposer le cautionnement de 2,000 fr. pour lequel le gouvernement leur paye un intérêt de 4 p. c, et de ne pouvoir pas faire le commerce, délit qui n'est plus poursuivi depuis trente ans.

Je regretterais vraiment d'avoir eu tant d'embarras pour créer tant de malheureux. Le fait est qu'après avoir nommé des courtiers maritimes, je me suis permis de dire à l'un d'eux qui était venu me remercier : Je vous fais mon compliment, le Roi vous a fait un beau cadeau, et on m'a répondu : « Mais oui ; c'est une affaire de 20,000 fr. par an !» J'affirme la réponse. J'ajoute qu'il y a un courtier de commerce à Anvers qui gagne tous les ans 60,000 fr. Il les gagne très légitimement, parce qu'il est très capable, très intelligent, très actif, et il n'aurait pas la nomination du gouvernement, qu'il les gagnerait encore ; mais enfin il m'est impossible de m'apitoyer sur le sort des courtiers.

M. Tesch. - Messieurs, la discussion qui nous occupe présente, à mon avis, une question de droit et une question de fait. La question de droit a été soumise aux tribunaux et si l'on trouve que les tribunaux ont mal jugé, il faut suivre la méthode indiquée par l'honorable M. Verhaegen, il faut se pourvoir de nouveau devant eux. C'est le seul procédé à suivre.

L'honorable M. Dumortier nous a dit que les tribunaux s'étaient trompés, que si le gouvernement, qui a promulgué la loi générale des douanes de 1822, avait entendu supprimer le monopole des courtiers, il n'aurait pas nommé des courtiers immédiatement après la promulgation de cette loi.

L'honorable M. Dumortier verse dans une erreur complète : Quand on a fait la loi de 1822, on n'a pas révoqué entièrement l'article 80 du code de commerce, on n'a pas enlevé aux courtiers, maritimes leurs attributions, on ne leur en a enlevé aucune ; seulement, on a donné, par la loi du 22 août 1822, à d'autres personnes le droit de leur faire concurrence en douane pour certains actes, actes déterminés et limités, comme le droit d'assister les capitaines en douane, qui leur est maintenu ; bien entendu que d'autres agents expéditeurs peuvent aussi faire de ces déclarations mêmes, et aussi à raison d'autres opérations, telles que les affrètements, par exemple, dont ils sont au besoin seuls les intermédiaires ; on peut continuer à nommer des courtiers, et dès lors il n'y a aucune espèce d'argument à tirer de ces nominations.

Du reste, messieurs, il m'est assez difficile à croire que si toutes les considérations qu'on vient de faire valoir avaient le moindre fondement, on aurait laissé entièrement de côté ces arguments dans une affaire qui a été jugée par le tribunal et la cour d'appel de Gand et la cour de cassation.

Maintenant, messieurs, quant à la question de fait, je crois que la chose dont il faut avant tout s'occuper, c'est l'intérêt du public.

Le public se plaint-il ? Si le public se plaint, je comprends qu'on donne satisfaction à ses plaintes ; mais si le public ne se plaint pas pourquoi mettre des entraves à la liberté ? Mon opinion est qu'il faut respecter la liberté en tout ce qui ne nuit à personne. Il faut donc voir avant tout s'il y a des inconvénients à maintenir les facilités que la loi de 1822 accorde à la navigation et au public, car nous ne sommes pas ici pour défendre les intérêts de certaines corporations, nous sommes ici, avant tout, pour soigner et sauvegarder les intérêts du public et ceux du commerce et de la navigation.

- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.

Projet de loi sur le jury d’examens universitaire

Rapport de la section centrale

M. le président. - Ce matin la section centrale, chargée d'examiner les amendements de M. Orts et de M. de La Coste, s'est réunie.

M. Orts a retiré sa proposition et la section centrale a repoussé celle de M. de La Coste. Demain, à l'ouverture de la séance, le rapport sera présenté ; la Chambre est-elle d'avis de reprendre la discussion demain ?

M. Delfosse. - Si le rapport est déposé à l'ouverture de la séance de demain, il ne sera pas imprimé. La section centrale était d'avis que la discussion fût reprise lundi.

- La Chambre, consultée, décide qu'elle reprendra la discussion lundi.


M. le président. - Nous avons à l'ordre du jour de demain la discussion du budget de la guerre.

M. de Moor. - Cette discussion ne pourra pas se terminer demain.

M. le président. - Alors on en remettra la suite à un autre jour.

M. de Moor. - J'aurais voulu qu'une discussion si importante ne fût pas scindée.

- La séance est levée à quatre heures trois quarts.