(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1855-1856)
(Présidence de M. de Naeyer, premier vice-président.)
(page 1120) M. Maertens fait l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. Ansiau lit le procès-verbal de la séance précédente. La rédaction en est approuvée.
M. Maertens présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.
« Le sieur Pierre-Philippe Denamur, maréchal des logis au 2ème régiment de cuirassiers, prie la Chambre de statuer sur sa demande de naturalisation. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« Le sîeur Leveau, ancien combattant de 1830, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir un secours. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Les conseils communaux de Boortmeebeek, Wespelaer, Winxele, Thildonck, Hever, Rymenam et Bonheyden demandent que M. le ministre des travaux publics maintienne sa décision relative au déplacement de la station de Haecht et qu'elle reçoive son exécution le plus tôt possible. »
- Même renvoi.
« Le sieur Lebègue prie la Chambre de décider si le fils d'un père étranger est astreint au service militaire en Belgique. »
- Même renvoi.
« Le sieur Pierre, maître de poste à Huy, demande qu'il soit pris en sa faveur une disposition pour l'indemniser des pertes qu'il a essuyées par suite de l’établissement des bateaux à vapeur sur la Meuse et du chemin de fer de Namur à Liège. »
- Même renvoi.
M. de Perceval. - Au nom de la commission des naturalisations, jyi l'honneur de déposer un projet de loi conférant la grande naturalisation au baron Cbarles-Joseph-Isidore de Stein d'Altenstein.
- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce projet de loi et le met à l'ordre du jour.
M. Van Overloop. - J'ai l'honneur de déposer divers rapports sur des demandes de naturalisation.
- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports et les met à la suite des objets à l'ordre du jour.
M. le président. - La discussion générale continue.
M. Sinave. - J'ai demandé hier la parole pour répliquer à M. le ministre des affaires étrangères concernant le bateau à vapeur « Belgique ». La réponse de l'honorable ministre n'est nullement satisfaisante. On devait s'attendre au dépôt sur le bureau d'un rapport sur l'enquête qui était nécessaire. Rien n'a été fait. M. le ministre se borne à dire : « Le Lloyd anglais pour coter à la première classe a exigé qu'on y ajoutât une ceinture, et quand cette ceinture sera construite, le steamer « Belgique » sera coté par le Lloyd de première classe. »
Voilà tous les renseignements que nous obtenons. Je vous le demande, lorsqu'un navire se trouve déjà depuis plus de trois mois dans un port pour recevoir des réparations, lorsque le public s'est mêlé de cette affaire, lorsque la presse s'en est occupée, lorsque tout le monde a demandé une enquête pour savoir ce qui s'était passé, voilà ce que M. le ministre nous dit ; rien de plus.
M. le ministre ajoute : « Mais cette exigence, de la part du Lloyd, n’est pas une marque de mauvaise construction du navire. Car depuis le mois d'août 1855, depuis certains désastres qui ont eu lieu, le Lloyd ne cote plus aucun navire, à quelque nation qu'il appartienne, sans exiger les travaux qu'il exige pour la Belgique. »
Messieurs, voilà une contradiction que je prie M. le ministre d'expliquer. Comment ! au mois d'août 1855, le Lloyd n'acceptait plus aucun navire sans qu'il eût reçu au préalable une ceinture, et c'est au mois de janvier que la Belgique est partie sans ceinture ! Je voudrais qu'on expliquât cette contradiction.
Evidemment, le désastre survenu est dû à l'imprévoyance, puisque le Lloyd avait formellement décidé qu'il n'assurerait plus aucun navire qui n'aurait pas une ceinture et que c'est trois mois après qu'on lance la « Belgique » à la mer sans ceinture.
Une ceinture, dit-on, n'est pas un renforcement au navire.
Messieurs, je ne veux pas m'étendre sur ce point. Tout le monde sait ce que c'est qu'une ceinture. On ne met pas une ceinture à un navire qui n'a pas réellement besoin d'un renforcement.
Maintenant, messieurs, que la faute a été commise, on se trouve dans cette pénible position : on a construit plusieurs navires et on est forcé d'y faire les réparations indiquées. C'est ainsi que la ceinture va être appliquée au « Léopold », à la « Constitution » et à la « Belgique ».
On me dira : Mais vous ne faites que critiquer ; vous critiquez tout. Lorsqu'on critique on doit, au moins, venir indiquer de meilleurs moyens.
Eh bien, messieurs, en me plaçant sur ce terrain, je n'ai pas attendu l'interpellation de M. le ministre pour justifier mes critiques.
Pour cela je n'ai qu'un mot à dire : si on avait soumis la construction de ces navires à une surveillance convenable, certainement ils n'auraient pas été construits comme ils le sont aujourd'hui. Tout le monde sait qu'on ne peut plus construire les navires en fer comme on les construisait il y a un an, qu'il faut aujourd'hui de tout autres dispositions. Aujourd'hui un grand navire doit avoir dans. sa cale, au lieu de quatre, au moins 8 ou 10 compartiments formés par des cloisons en fer qui renforcent considérablement le navire. Elles le renforcenf peut-être trop, mais il y a à cela un remède.
En Angleterre on ne construit plus autrement, toute la cale est divisée en compartiments.
Il en résulte que lorsque le navire fait eau, ordinairement l'eau ne pénètre que dans un seul compartiment, et que le navire se soutient.
Voilà, messieurs, ce qu'il faudrait faire. C'est une grande dépense, mais alors vous serez assurés, et je pense bien que d'ici à un an ni le Lloyd, ni aucune compagnie d'assurance n'accepteront plus de navires construits dans d'autres conditions.
Il y a quelques semaines, M. le ministre a dit : Vous exigez de moi ce qui est impossible ; s'il faut établir une surveillance comme celle que vous demandez, il faudrait au moins 300,000 fr. pour en couvrir les frais. Eh bien, messieurs, qu'est-ce que cela prouve ? Cela prouve que le gouvernement ne doit pas se mêler de ces choses-là, qu'il doit les abandonner à la libre action de l'industrie privée.
Je prierai M. le ministre des affaires étrangères d'avoir la bonté de répondre à la question que je lui ai posée, à savoir comment il est possible qu'au mois de janvier 1856, on ait laissé partir le navire « Belgique », alors que le règlement du Lloyd, qui exige une ceinture en fer, est du mois d'août 1855.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Messieurs, je répondrai catégoriquement à la dernière question de l'honorable M. Sinave ; il demande comment le gouvernement a permis au navire la « Belgique » de partir au mois de janvier dernier, alors que le règlement du Lloyd qui exige une ceinture en fer, est du mois d'août 1855.
La raison en est parfaitement simple : c'est qu'il n'était pas écrit dans les conditions que le navire « la Belgique » serait accepté par le Lloyd avant de faire le voyage de New-York ; le navire la Belgique avait été accepté par le Lloyd et les assureurs français à Anvers ; il avait obtenu la première cote du Lloyd français ; il n'avait pas besoin de la première cote du Lloyd anglais ; ce n'est qu'ultérieurement et après que le sinistre a eu lieu, que la société des paquebots et le gouvernement ont senti la nécessité de donner encore plus de sécurité au navire, et c'est alors qu'ils ont exigé la cote du Lloyd anglais.
Il n'y a donc pas de contradiction dans mes paroles ni dans ma conduite.
M. Moreau. - Messieurs, je rends également hommage au zèle, à l'intelligence que nos consuls déploient dans l'accomplissement de leur mission et c'est parce que je reconnais que ces agents rendent de véritables services au pays, que je désire voir leur nombre s'augmenter encore.
Lors de la discussion de l'article 20 dans la quatrième section, celle-ci a demandé que le gouvernement examinât s'il ne serait pas utile au commerce et à l'industrie d'avoir des consuls non rétribués, même dans les capitales où résident des légations.
J'ai vu avec plaisir, par la réponse que le gouvernement a adressée à la section centrale, qu'il partageait en général cette manière de voir, car il fait connaître que nous avons des consuls à St-Ptiersbourg, à Stockholm, à Copenhague, à Londres, etc., etc.
Toutefois les résidences de Vienne, Berlin, la Haye, Paris, Madrid et Turin sont encore dépourvues de ces agents si utiles.
Si, dit le gouvernement, nous n'avons pas de consuls dans ces capitales, c'est parce que, dans certains cas, les avantages pratiques ont paru douteux et que, dans d'autres, des difficultés d'exécution se sont révélées.
Je ne demande pas, messieurs, que l'on crée des consulats nouveaux là où ils seraient inutiles et où des difficultés surgiraient.
Mais il me paraît que, surtout dans quelques capitales les plus éloignées de la Belgique, la présence de consuls offrirait de grands avantages.
C'est ainsi qu'il me semble que nos industriels et nos commerçants ont aujourd'hui un grand intérêt à être exactement et parfaitement renseignés sur ce qui se passe dans la capitale de l'Autriche.
Vous le savez, le gouvernement de ce pays cherche à donner une vigoureuse et salutaire impulsion à sa prospérité ; il a une tendance manifeste à étendre ses relations commerciales avec l'étranger et à abaisser les barrières douanières.
(page 1121) Déjà, il a fait un pas dans cette voie nouvelle, et j’ose dire que dans peu de temps son système commercial subira une transformation profonde.
D'ailleurs, les rapports que nous avons avec Vienne sont nombreux et fréquents, et ils le deviendront chaque jour davantage a cause des nouvelles voies de communication qu'on crée dans ce pays.
Or, il n'y a en général que des consuls qui puissent utilement s’occuper de ces soins minutieux, des renseignements détaillés, de ces mille petites choses dont les industriels et les commerçants ont a chaque instant besoin pour diriger leurs opérations avec sécurité.
Aussi c'est ce que l'Angleterre et la France ont parfaitement compris, en nommant naguère des consuls à Vienne, où elles entretiennent cependant de grandes légations, c'est ce qu'ont fait d'autres pays que l'on peut comparer au nôtre.
J'appelle donc toute l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur ce point et je l'engage à examiner si le moment n'est pas venu d'établir un consulat à Vienne, d'y avoir un agent, lorsque le gouvernement de ce pays travaille à étendre la sphère de l'activité industrielle et commerciale.
M. Deliége. - Messieurs, dans la séance d'hier un honorable membre a dit
« Je ne crois pas, comme M. le ministre des affaires étrangères, qu'il serait nécessaire d'établir des hérauts d'armes pour signaler les personnes qui prendrait indûment des titres de noblesse. Mais, ce que le gouvernement pourrait faire, ce serait d'imposer une amende aux notaires qui insèrent dans des actes des titres de noblesse qui n'appartiennent pas aux personnes à qui on les donne. C'est ce qui avait lieu sous le gouvernement, des Pays-Bas. »
Eh bien, messieurs, je crois qu'on pourrait très bien revenir à ce système.
Messieurs, la loi qui existait sous le gouvernement des Pays-Bas existe encore ; la loi prononce uue peine contre le notaire qui donne à une des parties contractantes un titre qu'elle n'a pas ; mais cette loi est tombée en désuétude, je dirai même quelle est inapplicable ; on en trouvera la preuve dans le discours de l'honorable M. Osy. Voici pourquoi cette loi n'est plus appliquée, c'est qu'il n'y a pas de liste officielle qui donne aux notaires le moyen de connaître si un contractant est noble ou ne l'est pas.
Il y a bien une liste qui a été dressée sous le gouvernement des Pays Bas, mais cette liste est incomplète aujourd'hui, elle n'a pas été complétée. Maintenant que l'éveil est donné à l'administration de l'enregistrement, elle ne manquera pas d'intervenir pour faire exécuter la loi ; Il serait important que M. le ministre des affaires étrangères voulût bien faire insérer au Bulletin des lois, comme on l'avait fait sous le gouvernement des Pays-Bas, une liste des personnes nobles qui existent en Belgique ; les notaires auraient une direction ; ils ne seraient pas exposés à être frappés d'une amende qu'ils ne peuvent pas éviter aujourd'hui.
M. Osy. - Je voulais répondre à l'honorable M. Sinave, mais je n'ai rien à ajouter à ce que vient de dire M. le ministre des affaires étrangères, la question des travaux à faire aux bâtiments de la compagnie est une affaire d'administration, les constructeurs se sont engagés à fournir pour leurs navires la cote n°1 ; le règlement qui existait en 1853 a été changé ; le Lloyd exige maintenant qu'on apporte des changements aux navires pour les admettre à la cote n 1 ; ces changements seront faits non seulement au steamer « Belgique », mais aux autres navires,
La société s'est engagée à obtenir pour les navires la cote n°1, et elle a pris les mesures pour satisfaire à cet engagement.
M. Sinave. - Je répondrai d'abord à l'honorable M. Osy qu'effectivement c'est une affaire de ménage. Mais comme nous payons quelque chose dans ce ménage, nous nous en mêlons. C'est une affaire qui nous coûte quelque chose comme trois millions. Il me semble que nous pouvons bien en dire un petit mot.
Quant à la question des assurances, on sait très bien que sans le concours des assureurs anglais il est impossible d'assurer sur le continent un chargement tel que celui d'un de ces bateaux à vapeur. Ces chargements peuvent avoir une valeur de trois millions ; et à Anvers quelle est la plus forte assurance ? Tout au plus 500,000 francs ; et il en est de même en France. Il faut donc avoir recours à l'Angleterre. Si votre bâtiment n'est pas assuré par le Lloyd, vous ne pouvez marcher.
Messieurs, pourquoi est-ce que j'insiste sur cette affaire ? C'est que, si nous contribuons à la dépense de ce ménage, nous devons veiller à ce que tout y marche bien. Qu'est-ce que je demande ? C'est que les intérêts du trésor soient sauvegardés. Or, si vos bateaux à vapeur transatlantiques ne sont pas admis par le Lloyd, qu'arrivera-t-il ? C'est que vos trois millions ne produiront rien. C'est ainsi que vous avez déjà dépensé à Anvers 75 millions en faveurs diverses. Qu'ont-ils produit ? Absolument rien ; il n'en reste rien.
Voilà les conséquences de l'intervention du gouvernement.
Je ne demande plus au gouvernement qu'une seule chose, c'est qu'il veuille bien prendre note de la résolution de ne pas se dessaisir du subside sans s'être assuré que les navires ont obtenu la cote de première classe.
M. Veydt. - Messieurs, je suis entré à la Chambre pour entendre la fin du discours de l'honorable M. Sinave.
Les explications, qui ont été données à l'instant par M. le ministre des affaires étrangères et par l'honorable M. Osy étaient, me semble-t-il, de nature à le satisfaire complètement. Mais non. L'honorable député de Bruges revient à la charge.
Il se plaint qu’on ne lui permette pas de dire un mot sur l'entreprise des bateaux à vapeur transatlantiques. C'est bien à tort. Personne ici ne songe à le gêner. Seulement, au lieu de ces critiques, incessantes de ces paroles empreintes, en quelque sorte, de malveillance et d'hostilité, je voudrais entendre de sa part des mots d'encouragement, des conseils propres à guider et à éclairer pour bien faire. Car c'est là le but vers lequel tendent les vues et les efforts de l'administration de la société.
La tâche qu'elle a à remplir, et qu'elle poursuivra avec courage, malgré un premier revers, n'est pas exempte de difficultés.
Il faut trouver les hommes qui conviennent et les trouver de préférence en Belgique. Même ceux qui ont les connaissances et l'aptitude nécessaires ont besoin d'un certain temps pour acquérir de l'expérience. Il faut pourvoir à une infinité de choses et de détails, qui ont leur importance pour la bonne organisation du service, et dont peut dépendre le succès de l'entreprise. Serait-il juste de faire un reproche à l'entreprise, de n'avoir pas de prime abord pourvu à tout ce qui pouvait se présenter, en supposant qu'elle ait laissé quelque chose à désirer ? L'honorable M. Sinave revient sur le grief d'avoir permis que le navire « Belgique » fît un voyage d'essai d'Anvers à New-York dans la plus mauvaise saison. Mais l'administration avait déjà dû solliciter maintes fois auprès de M. le ministre des affaires étrangères des prolongations du terme accordé par la convention pour la mise en activité du service. Des causes indépendantes d'elle l'avaient obligée à dépasser le délai, elle en était contrariée, peinée même ; et après délibération, l'avis qu'il fallait faire le voyage d'essai, malgré la saison, a prévalu. On a voulu gagner du temps, et on en a perdu.
De grandes contrariétés sont venues assaillir l'entreprise. Vous en connaissez l'histoire fidèle, messieurs, par le rapport qui vous a été fait.
Je suis à même de vous donner les assurances les plus positives, par suite de la mission qui m'a été donnée, ou plutôt imposée, de concourir à l’administration de la société, qu'elle ne reculera devant aucun sacrifice pour remplir les conditions requises par le Lloyd anglais et obtenir de lui la classification A n°1 pour tous les navires. Appréciant la confiance que cette cote inspire, l'administration a stipulé dans les deux contrats de construction des navires que ceux-ci seraient faits de manière à pouvoir la réclamer en toute assurance. Mais, durant l'intervalle, c'est-à-dire depuis le commencement de 1851, le Lloyd a renchéri sur ses conditions.
Les constructeurs sont-ils obligés de se conformer à ces nouvelles exigences, sans supplément d'indemnité ? Il y a de bonnes raisons pour soutenir qu'il en est ainsi. Mais en équité il y a aussi bien quelque chose à dire dans le sens contraire.
La question a été débattue et on est arrivé à un arrangement amiable entre les parties. Tous les navires de la société seront mis en état d'obtenir le premier rang du Lloyd anglais. Ce sera une satisfaction, une garantie complète pour les compagnies d'assurance les plus difficiles, et ici je me rencontre, j'en suis heureux, avec mon honorable contradicteur, ce sera un moyen d'avoir l'entière confiance des compagnies étrangères, puisqu'on est obligé d'avoir aussi recours à elles pour arriver à couvrir tous les risques de mer de l'entreprise.
Je ne crois pas me tromper, messieurs, après les nouvelles explications données par l'honorable ministre des affaires étrangères et l'honorable M. Osy et celles que je viens d'avoir l'honneur d'y ajouter, la Chambre doit désirer d'en rester là et de voir l'entreprise à l'œuvre et en pleine activité.
M. Sinave. - J'ai demandé la parole pour un fait personnel. Messieurs, je ne pense pas que dans ce que j'ai dit il y ait le moindre mot malveillant pour qui que ce soit. Si j'ai parlé d'Anvers, c'est que le siège de la société à laquelle appartient ce navire, se trouve dans cette ville. Mais les honorables représentants de cette ville ne doivent pas supposer chez moi la moindre malveillance à leur égard.
L'honorable membre dit qu'il faut quinze ou vingt ans pour avoir de l'expérience. En vérité, s'il faut des ceintures aux navires, il faudrait bien encore des lisières à ces messieurs.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - J'ai encore un détail à ajouter.
Tout à l'heure, l'honorable M. Sinave a beaucoup recommandé qu'à l'avenir les navires fussent divisés en plusieurs chambres. Je croyais que l'honorable M. Sinave avait été visiter la « Belgique », quand il se trouvait en rade d'Anvers ; la Belgique a quatre chambres.
M. Sinave. - Cela ne suffit pas.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Je ne suis pas constructeur de navires ; je ne sais combien il faut des chambres. Mais l'honorable M. Sinave paraissait dire que le steamer « Belgique » n'avait pas sa cale séparée en chambres. Il y a quatre chambres, et ce qui le prouve, c'est que l'eau n'a fait irruption que dans l'une de ces chambres. C'est dans la chambre des machines qu'elle est arrivée et non dans la chambre des marchandises, qui sont restées parfaitement sèches.
M. Dellafaille. - A l'occasion de la discussion du budget des (page 1122) affaires étrangères, le conseil provincial d'Anvers s'est adressé à la Chambre pour obtenir la restitution d'une somme de. 15,000 fr. que cette administration avait votée en 1841 pour l'établissement d'un service de bateaux à vapeur entre Tamise et Anvers. Ce service a fonctionné pendant dix ou onze ans. En 1853 le gouvernement a trouvé que ce service ne donnait pas des produits suffisants et il a cru convenable, au point de vue de l'intérêt de l'Etat, de le supprimer.
Cette pétition de la députation permanente du conseil provincial d'Anvers a été renvoyée à la section centrale qui en a proposé le dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget et son renvoi à M. le ministre des affaires étrangères avec demande d'explication. Comme je ne vois pas figurer au budget dont nous nous occupons, une somme destinée à restituer ces 15,000 fr., je demanderai à M. le ministre des affaires étrangères quelle est son intention, relativement à la pétition qui se trouve déposée sur le bureau, j'attendrai la réponse que voudra bieu me donner M. le ministre à cet égard.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Messieurs, l'honorable M. Moreau a appelé tout à l'heure mon attention sur la convenance qu'il y aurait à nommer un consul à Vienne. Déjà depuis, six à huit mois je me suis occupé de cette question et je suis en correspondance avec notre ministre à Vienne pour tâcher de la résoudre.
L'observation qui a été faite par l'honorable M. Deliége me semble très juste. Je prends avec plaisir l'engagement de faire insérer au Bulletin des lois une liste de toutes les personnes qui ont été anoblies depuis le dernier arrêté du roi Guillaume ; mais jé préviens la Chambre que ce travail peut-être de longue durée.
L'honorable M. Dellafaille m'interpelle pour savoir si je serais disposé à proposer à la Chambre de rembourser à la province d'Anvers le subside de 15,0000 francs que cette province a verse dans les caisses de l'Etat, lorsque le service de navigation entre Anvers et Tamise a été organisé. Je réponds négativement, j'ai examiné les pièces, les engagements qui ont été pris en 1841 par la province et par le gouvernement.
De la part du gouvernement, il n'y a eu aucune espèce d'engagement pris sinon de construire un bateau à vapeur et de commencer le service. Le gouvernement a demandé que la province d'Anvers voulut bien contribuer à la dépense et elle y a contribué pendant 10 ans, pour 1,500 fiancs par an. Cette somme à été considérée par le gouvernement comme un subside, pour couvrir une partie de la perte, qui s'est élevée, en moyenne, à 6,000 francs par an. Mais le gouvernement, je le répète, le gouvernement n'a pris aucune manière l’engagement de continuer ce service à perpétuité. La province d'Anvers n'a pas demandé que le gouvernement prît un engagement semblable ; mais si elle l'avait demandé, j'ai devant moi des pièces qui prouvent que le gouvernement n'y aurait pas consenti.
Le ministre des travaux publics ne s'est pas seulement adressé à la province d'Anvers pour obtenir un subside, il s'est adressé aussi à la commune de Tamise, pour qu'elle s'engageât à construire un embarcadère.
La commune de Tamise prit cet engagement par une résolution actée dans la séance du 1er mai 1841.
Le ministre des travaux publics répondit au conseil communal de Tamise qu'il ne pouvait pas prendre cet engagement et pria le conseil de vouloir bien révoquer cet article de sa délibératîon. Or voici ce que le conseil communal a décidé le 25 juin suivant :
« Art. 1er. La condition susmentionnée est retirée. »
Il est impossible de constater plus formellement qu'en 1841 le gouvernement n'a pris aucun engagement de continuer ce service.
Ainsi, messieurs, la province d'Anvers a payé pendant 10 ans un subside de 15,000 francs. L'Etat a continué le service pendant douze ans ; l'Etat, nécessairement, a le droit de le cesser. En conséquence il me serait impossible de proposer à la Chambre un crédit de 15,000 fr. au profit de la province d Anvers.
M. Lelièvre. - Je désire obtenir une explication de M. le ministre des affaires étiangères. Le gouvernement a été autorisé à conclure avec les gouvernements voisins, et à charge de réciprocité, des conventions ayant pour objet d'autoriser des sociétés anonymes étrangères à contracter en Belgique et à ester en justice. Je désire savoir si des conventions pareilles ont déjà été arrêtées et avec quels gouvernements elles ont été consenties.
Je désire aussi connaître si le gouvernement croit devoir maintenir le mode de nomination en vigueur, relativement aux membres des chambres de commerce. Cette question ayant souvent été soulevée dans cette enceinte, je prie M. le ministre de vouloir la soumettre à une étude spéciale sur les changements qu'on pourrait introduire à l'état de choses existant.
M. Dellafaille. - J'aurai l'honneur de faire observer à l'honorable ministre des affaires étrangères que l'affaire de l'embarcadère de Tamise et celle du subside accordé par la province d'Anvers pour l’établissement d'une navigation à vapeur entre Anvers et Tamise, sont deux choses essentiellement différentes. Pour l'embarcadère, la commune de Tamise tenait à ne pas entreprendre cette construction, sans avoir la certitude que le service de navigation continuerait à perpétuité, et il dépendait de cette commune de maintenir cette condition ou de déférer au désir exprimé par l'Etat.
Il est vrai, comme l'a dit l'honorable ministre des affaires étrangères, que la durée du service n'a pas été fixée par les deux parties contractantes, mais il est certain qu'il ne peut être entré ni dans le vues de l'Etat, qui appréciait alors cette ligne navigable comme devan procurer des avantages marqués au railway national, ni à la province d'Anvers qui entendait favoriser par ce nouveau service de bateaux à vapeur, les communes si populeuses et si industrielles de Boom, Tamise, Puers, Bornhem et Niel, de fixer à un terme de dix années la durée de ce service.
Nul doute que la province d'Anvers n'eût repondu par un refus formel aux propositions de l'Etat, s'il eût stipulé une condition si désavantageuse.
Je pourrai admettre à la rigueur que par suite de l'omission des conditions de la durée du contrat, passé entre l'Etat et la province, celui-ci a le droit de lui assigner un terme ou de régler de commun accord avec la province la durée du service.
Mais il serait contraire à toutes les règles de la justice d'abandonner à l'arbitraire d’une des parties contractantes la décision à prendre en cette matière, alors que la dépense pour la création des bateaux à vapeur a été faite à frais commun. Car, messieurs, veuillez bien le remarquer, le subside de 15,000 fr. alloué par la province d'Anvers, s'il a été payé en dix annuités comme M. le ministre vous l'a fait remarquer, ne l'a pas été pour dix annuités, ou un service de dix ans, mais bien avec l'intention formelle de participer à une dépense globale dont devait résulter un service durable ; si tel ne devait pas être le service à crée par l'Etat, la province sans nul doute eût donné la préférence aux conditions qui lui étaient proposées par les sociétés privées.
Je puis admettre en présence de cet état de choses que la prétention de la province d'Anvers peut paraître avoir quelque chose d'exorbitant (en réclamant la restitution de la totalité du subside alloué par elle pour l'établissement du service en question) ; mais il est juste aussi de reconnaître que de part et d'autre l'Etat et la province avaient le droit, en l'absence de toute condition de durée du service clairement exprimée, de le considérer comme devant se continuer autant que l'existence normale des bateaux à vapeur dans les conditions ordinaires pouvait le permettre.
Cette durée est au moins de vingt-cinq années, et à ce titre, messieurs, la province aurait le droit de réclamer de l'Etat les deux tiers de son subside. Aujourd'hui ce bateau à vapeur rend encore journellement des services à l'Etat, il sert à remorquer les navires du commerce et certains voyages du bas du fleuve à Anvers lui rapportent plusieurs centaines de francs.
Ce navire, messieurs, créé à frais commun est évidemment une propriété commune et à l'Etat et à la province, et j'ose compter sur les vues d'équité de M. le ministre des affaires étrangères en lesquelles j'ai toute confiance, pour lui recommander de vouloir bien régler cette affaire avec la province d'Anvers en prenant pour base d'une indemnité équitable ou la valeur actuelle du navire ou la proportion du subside accordé par la province en 1841.
M. Van Overloop. - Je remercie l'honorable M. Della Faille de son interpellation. Messieurs, la commune de Tamise est beaucoup plus intéressée à cette affaire que la province d'Anvers. Je veux bien reconnaître que le gouvernement n'a pas pris d'engagement par écrit envers la commune de Tamise, pas plus qu'envers la province d'Anvers, mais toujouis est-il qu'il y a une obligation morale, une obligation d'équité ou bien de rétablir le service de navigation entre Anvers et Tamise, ou, bien d'indemniser la commune de Tamise ainsi que la province d'Anvers, des frais que le gouvernement, par son fait, leur a occasionnés.
Comment ! messieurs, le gouvernement dit à la commune de Tamise : Je vais exploiter un service de bateaux à vapeur entre Anvers et Tamise à la condition, notamment, que vous créerez un embarcadère qui vous coûtera 24, 000 fr. ; la commune accepte, le gouvernement entreprend son service, et puis, au bout d'un petit nombre d'années le gouvernement trouve convenable de cesser son exploitation. Cela n'est pas conforme à l'équité. Dans les relations entre particuliers, cela ne se pourrait pas.
Je ne demande pas que le gouvernement entreprenne de nouveau le service à ses risques et périls ; je suis beaucoup plus modéré ; je demanderai à l'honorable ministre des, affaires étrangères s'il est parfaitement disposé à accueillir avec la plus grande bienveillance toute proposition qui serait faite par une compagnie particulière, à l'effet de rétablir le service de navigation à la vapeur entre Anvers et Tamise, et si, au besoin, pendant un certain nombre d'années, eu égard à la position toute spéciale que le gouvernement a faite à la commune de Tamise, l'honorable ministre des affaires étrangères serait disposé, pendant peu d'années, à accorder un subside à l'effet de faciliter l'établissement de ce service de navigation.
Voilà une question que je pose à M. le ministre des affaires étrangères, et j'espère qu'il y répondra avec sa bienveillance habituelle.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - L'honorable M. Lelièvre m'a demandé avec quelles puissances nous avons fait des conventions pour reconnaître de part et d'autre les sociétés anonymes. Nous n'avons conclu de convention semblable qu'avec la France. En Angleterre il n'y a pas, à proprement parler, de sociétés anonymes, de sorte que là il n'y a rien à tenter quant à la réciprocité. Je suis en négociations avec la Prusse et avec divers Etats de l'Allemagne ; mais je ne suis pas certain d'aboutir.
Quant à une réorganisation des chambres de commerce, cette éventualité (page 1123) ne m'a pas encore occupé ; elle n'a pas même été signalée à mon attention ; il me semble que cette question doit être renvoyée à la commission qui est chargée d'élaborer un nouveau Code de commerce.
L'honorable M. Van Overloop me demande si je serais disposé à faire accorder un subside à une nouvelle société qui se constituerait pour faire le service entre Anvers et Tamise.
Messieurs, quelque sympathie que j'aie pour ce service, je ne puis pas prendre cet engagement devant la Chambre. J'ai déjà eu l'occasion d'expliquer deux fois la manière dont j'envisageais cette affaire. Mais que l'honorable membre veuille soumettre la question à la Chambre, qu'il présente un amendement à mon budget, et si l'assemblée est d'avis qu'il y a équité a ce que ce service soit constitué au moyen-d'un subside, je promets à l'honorable membre de ne pas en faire une question de portefeuille ; j'accepterai le subside avec plaisir, et, ma responsabilité sauve, j'organiserai le service avec une très grande sympathie, d'abord pour l'arrondissement de Saint-Nicolas, puis pour mes intérêts particuliers.
M. Van Overloop. - Messieurs, je remercie M. le ministre des affaires étrangères des paroles bienveillantes qu’il vient de prononcer. J'espère que pour le prochain budget une compagnie se présentera et qu'elle pourra, faire un appel aux sentiments de sympathie de M. le ministre des affaires étrangères.
- La discussion générale est close.
On passe aux articles.
« Art. 1er. Traitement du Ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement du personnel des bureaux : fr. 108,491. »
- Adopté
« Art. 3. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 3,500. »
- Adopté.
« Art. 4. Secours à des fonctionnaires et employés, à leurs veuves ou enfants, qui, sans avoir droit à la pension, ont des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 1,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Matériel : fr. 37,600. »
- Adopté.
« Art. 6. Achat de décorations de l'Ordre de Léopold, sans que l'on puisse augmenter ce chiffre par des imputations sur d'autres articles : fr. 8,000. »
- Adopté.
« Art. 7. Missions en Allemagne : fr. 101,000. »
- Adopté.
« Art. 8. France : fr. 45,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Grande-Bretagne : fr. 62,000. »
- Adopté.
« Art. 10. Italie : fr. 37,000. »
- Adopté.
« Art. 11. Pays-Bas : fr. 39,000. »
- Adopté.
« Art. 12. Russie : fr. 62,000. »
- Adopté.
« Art. 13. Brésil : fr. 18,000. »
- Adopté.
« Art. 14. Danemark, Suède et Hambourg : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 15. Espagne : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 16. Etats-Unis : fr. 18,000. »
- Adopté.
« Art. 17. Portugal : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 18. Turquie: fr. 27,000. »
- Adopté.
« Art. 19. Indemnités à quelques secrétaires et attachés de légation ; charge extraordinaire : p. m.. »
- Adopté.
« Art. 20. Traitements des agents consulaires et indemnités à quelques agents non rétribués : fr. 90,000. »
- Adopté.
« Art. 21. Frais de voyage des agents du service extérieur et de l'administration centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses : fr. 70,500. »
- Adopté.
« Art. 22. Indemnités pour un drogman, six cavasses, employés dans diverses résidences en Orient et pour un capou-oglan : fr. 7,030. »
- Adopté.
« Art. 23. Frais divers : fr. 67,970. »
- Adopté.
« Art. 24. Missions extraordinaires, traitements d'agents politiques et consulaires en inactivité : p. m. »
- Adopté.
« Art. 25. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 4,000. »
- Adopté.
« Art. 26. Ecoles de navigation. Personnel : fr. 16,720. »
- Adopté.
« Art. 27. Ecoles de navigation. Frais divers : fr. 7,280. »
- Adopté.
« Art. 28. Chambres de commerce : fr. 12,000. »
« Art. 29. Frais divers et encouragements au commerce : fr. 14,900. »
- Adopté.
« Art. 30. Encouragements pour la navigation entre les ports belges et étrangers, sans que, dans aucun cas, les engagements, puissent obliger l'Etat au-delà du crédit alloué pour l'exercice 1857, et sans que les conventions conclues pour les lignes sur le Brésil et le Levant.
« Frais divers : fr. 113,350.
« Art. 31. Idem. Personnel : fr. 700. »
- Adopté.
(page 1124) « Art. 32. Service de navigation à vapeur entre Anvers et New-York, subside accordé en vertu du n°1 de l'article 10 de la convention du 29 mai 1853 : fr. 28,800.
« Service de navigation à vapeur entre Anvers et Rio de Janeiro, remboursement des droits de tonnage, de pilotage, de phares et fanaux, spécifiés à l'article 6 de la convention du 25 avril 1854 : fr. 26,868.
« Service de navigation à vapeur entre Anvers et le Levant, remboursement des droits de tonnage, de pilotage, de phares et fanaux, spécifiés à l'article 9 de la convention du 12 novembre 1855 (crédits non limitatifs) : fr. 20,276.
« Ensemble : fr. 75,944. »
- Adopté.
« Art. 33. Pêche maritime. Personnel : fr. 7,550. »
- Adopté.
« Art. 34. Pêche maritime. Primes: fr. 92,050. »
- Adopté.
M. Vermeire. - Messieurs, je ne viens pas m'opposer à l'adoption de ce crédit, quoique, en général, les primes ne soient que l'exagération de la protection. Mais aujourd'hui que le vent souffle du côté de la liberté commerciale ; le temps est arrivé où il faudra, sinon supprimer complètement les primes, au moins les diminuer considérablement.
Dans un discours qui a été prononcé à la séance du 14 décembre 1855 par M. Van Isegbem, je lis ce qui suit :
« Le matériel flottant de nos bateaux de pêche s'élève à une somme de 2,600,000 fr. et le produit de la pêche excède annuellement une somme de 1,500,000 fr. ; c'est de l'argent que nous trouvons en mer, et pourquoi donner ce bénéfice à une nation voisine ? Ce serait une mauvaise politique de le faire et une perte pour le pays. »
Je demanderai d'abord si ce produit est le produit net ou le produit brut ; si c'est le produit brut, il faudrait en défalquer les frais qu'on est obligé de faire pour obtenir le produit net.
Je demanderai encore à combien s'élèvent ces frais ? Si, au contraire le produit indiqué est le produit net, je ferai observer que si avec un capital de 2 millions 600 mille fr. on obtient un bénéfice de 1,500 mille fr., on pourrait se passer de primes.
Je ne veux pas faire d'amendement ; je ne propose pas de supprimer ce chiffre ; mais je demanderai s'il ne serait pas convenable de diminuer graduellement les primes dans un avenir plus ou moins rapproché, de manière à arriver à la suppression complète d'ici à trois ou quatre ans.
M. Van Iseghem, rapporteur. - Le produit de la pêche que j'ai indiqué dans la séance du 14 décembre 1855 est le produit brut ; il me serait impossible de dire d'une manière positive quel peut être le produit net, mais ce que je sais, c'est que les armateurs ne retirent presque aucun intérêt de leur argent, et je doute qu'ils obtiennent en moyenne 2 à 3 p. c. Je m'oppose de toutes mes forces à une diminution de la prime ; ce serait tuer cette industrie, car elle est maltraitée par tout le monde ; les octrois et les règlements des villes rendent le poisson très cher au consommateur et en entravent la vente, au grand détriment des pécheurs ; de plus la France soumet le poisson belge à un droit prohibitif et nous devons admettre à un faible droit depuis nombre d'années le poisson hollandais. Il ne faut pas perdre de vue que la pêche est une industrie très périlleuse, car encore avant-hier un bateau s'est perdu totalement ; quand les pêcheurs partent, ils retournent souvent presque sans poisson. Ces voyages leur causent alors beaucoup de pertes. On doit comprendre aussi que la pêche est la pépinière des matelots. Je crois que toutes ces considérations militent en faveur du maintien de la prime.
Comme l'honorable M. Vermeire ne fait aucune proposition, je n'en dirai pas davantage pour le moment.
M. Rodenbach. - Je pense aussi que le moment n'est pas venu de supprimer la prime accordée à la pêche nationale ; vous savez que le traité avec la Hollande a froissé considérablement l'intérêt de nos pêcheurs. En général ils ne sont pas dans l'aisance. Depuis trois ans et surtout pendant l'année calamiteuse que nous venons de passer, la vie est augmentée d'un tiers ; le moment serait mal choisi pour réduire l'encouragement qu'on accorde à notre pêche. Toutes les nations repoussent ses produits, la France les frappe d'un droit prohibitif, la Hollande également ; partout la pêche nationale jouit de tarifs fortement protecteurs, nous sommes le seul pays qui reçoive le poisson étranger moyennant un droit peu élevé, il y aurait plus que de l'injustice à retirer à nos pêcheurs les faibles subsides qu'on leur accorde.
M. Vermeire. - Je regrette que l'honorable député d'Ostende n'ait pas pu indiquer le produit net de la pêche nationale, subsidiée par l'Etat. C'était un des meilleurs moyens d'apprécier la question. Je crois que ce produit net doit être très élevé, car en 1842 nous ne comptions que 180 chaloupes de pêche et en 1856, nous en avons 240, ce qui fait une augmentation de 60, ou de plus de 30 p. c. Il faut qu'il y ait des bénéfices assez importants pour qu'on donne une pareille extension à une entreprise industrielle. Je ne fais pas de proposition, je désirerais seulement que le point que j'ai indiqué fût éclairci.
M. Sinave. - Cet article n'a soulevé aucune critique dans la section centrale, mais tant que le système douanier qui existe maintenant et paraît devoir se maintenir encore ne sera pas changé, il n'y aura pas le moindre changement à apporter au régime de la pêche ; c'est l'industrie la plus précaire qn'il y ait, je crois que pour le moment il ne convient de prendre aucune disposition ayant pour but de supprimer on réduire la prime. Si par la suite le libre échangé prévaut, si on laisse entrer sans droit les fers et tous les tissus, la pêche suivra le sort de toutes les autres industries. Jusque-là il n'y a rien à faire.
- L'article 34 est mis aux voix et adopté.
« Art. 35. Coutume à Lamina, chef des Nalous, pour l'exercice 1855 : fr. 5,000. »
- Adopté.
« Art. 36. Pilotage. Personnel : fr. 170,850. »
- Adopté.
« Art. 37. Pilotage. Remises à payer aux pilotes et autres dépenses relatives au pilotage (crédit non limitatif) : fr. 200,610. »
- Adopté.
« Art. 38. Sauvetage. Personnel : fr. 14,300. »
M. Sinave. - Il y a quelques années, le gouvernement a reconnu que le système de sauvetage était très incomplet, qu'il était plus convenable, au lieu de traitement fixe, de donner des gratifications selon le risque que courraient les hommes qui se livrent au sauvetage des naufragés.
Pour Ostende ce régime a été mis en pratique, il a eu les résultats les plus heureux, mais on ne l'a pas adopté pour Nieuport, Blankenberghe et autres localités.
Comme j'ai eu l'honneur de le dire hier, le rapport sur le budget a été déposé la veille du jour où la discussion a été ouverte, je n'ai pu prendre connaissance de tous les documents déposés, je sais seulement en quoi consistent ceux qui concernent le chapitre dont nous nous occupons. Les raisons données par le gouvernement pour ne pas établir partout sur la côte le même régime de sauvetage qu'à Ostende et qui ne se trouvent pas dans le rapport, sont celles-ci : c'est qu'il ne se trouve pas sur le littoral un seul homme capable de manœuvrer un aviron.
Si cela est vrai, on devrait apprendre la manœuvre de l'aviron aux habitants de la côte même, au lieu de l'apprendre aux douaniers. Mais prétendre qu'il n'y a pas de rameurs sur la côte, c'est une erreur ; il n'en manque pas ; et si celui qui a fait un rapport au ministre devait lutter avec eux à l'aviron, je le plaindrais fort.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - J'ai un rapport officiel qui me dit qu'il n'y a que quatre avirons et un canot à Blankenberghe. Je n'ai pas été le vérifier.
M. Sinave. - Vous avez parfaitement raison, quand vous dites qu'il n'y a qu'un canot. Il y a 70 chaloupes. Mais si vous dites qu'il n'y a pas à Blankenberghe des gens capables de manœuvrer des avirons, vous me permettrez d'en douter.
Je déclare qu'à bord de tous les bateaux-pêcheurs il y a des avirons de 7 à 8 mètres. S'ils savent manœuvrer des avirons de cette force, ils sauraient assurément en manœuvrer d'une force moindre.
A Adinkerke, il y en a, les chaloupes de pêche ont la plupart des canots.
On fait observer qu'à Knocke le sauvetage est difficile. Mais il n'est pas nécessaire qu'il y ait à Knocke un service de sauvetage.
Il y en a un à Heyst, et près de là il y en a un à Cadsand (royaume des Pays-Bas).
Ainsi sur un très petit espace, il y a trois services de sauvetage.
Dans toutes ces localités qu'à-t on fait ? On a chargé de ce service les douaniers. Les douaniers ont un traitement de 7 à 8 cents francs. Ils obtiennent en outre un traitement fixe comme matelots de sauvetage.
(page 1125) Je prie M. le ministre de faire examiner la question et de ne pas faire au littoral l'affront de dire qu'il n'y a qu'à Ostende qu'il y ait des personnes capables de manœuvrer des avirons.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Je désire répondre quelques mots à l’honorable membre.
Le service du sauvetage est extrêmement important. Il ne faut pas qu'on puisse dire qu'un navire viendra échouer sur la côte belge sans qu'on lui porte secours. Or, d'après tous les renseignements que j'ai recueillis, il n'y a qu'à Ostende que ce service est établi avec une régularité que je voudrais voir régner partout.
Ce service n'est pas fait par des fonctionnaires payés par l'Etat, par des fonctionnaires qui soient chargés d'attendre qu'un navire soit en détresse pour lui porter secours.
A Ostende, il y a une quantité de canotiers, de marins, de rameurs, de personnes qui savent manier les rames, qui peuvent à l'instant être appelés par le commissaire maritime, ou par les autres personnes qui dirigent le sauvetage pour aller au secours d'un navire en détresse.
A Ostende donc, personne n'est payé au moyen de traitements fixes. Mais il est accordé des indemnités, des primes aux personnes qui sauvent des navires. Partout ailleurs, d'après les renseignements officiels que j'ai recueillis, que j'ai sous les yeux et dont je pourrais donner lecture à la Chambre, si ce n'était pas aussi ennuyeux et aussi fatigant, dans toutes les localités au bord de la mer, il n'y a pas de canotiers, de rameurs en nombre suffisant pour que, lorsqu'un navire en détresse est en vue, on puisse immédiatement requérir des personnes qui se mettent de suite à la disposition de l'autorité, des volontaires pour sauver le navire signalé.
En présence des renseignements que j'ai demandés à deux ou trois reprises et auxquels j'ajoute foi, il faut nécessairement que le gouvernement ait surtout le littoral des brigades de sauvetage organisées. Nous les avons organisées au meilleur marché possible.
A Knocke, j'ai engagé de concert avec le département des finances des marins qui font simultanément le service de la douane et du sauvetage.
Ils n'ont un traitement entier ni du département des finances ni du département des affaires étrangères. Mais ces départements leur font un traitement à eux deux.
Jamais notre service de sauvetage n'a soulevé la moindre plainte, la moindre difficulté. Et c'est la première fois, je crois, qu'on le critique.
M. Sinave. - Vous me permettrez de faire une observation à l'honorable ministre.
Il me semble qu'il n'est pas tout à fait au courant de ce qui existe sur le littoral.
Quant au matériel, aux hangars, aux embarcations, aux rames, tout cela appartient à l'Etat. Il ne s'agit que des hommes. M. le ministre dit qu'il n'y a pas à Knocke le matériel nécessaire. Mais les embarcations et le matériel de l'Etat sont là. Il y a un directeur. Je ne demande pas qu'on touche à l'état-major. Mais que fait-on ? On emploie des douaniers. Un douanier ne reste pas fixement à son poste. Il ne connaît pas les bancs.
Il change de résidence comme un militaire change de garnison. La douane ne reste jamais au même endroit. Je pense donc qu'il faudrait charger de ce service les hommes qui habitent la côte, de préférence atix douaniers...
Un petit traitement de 250 francs suffirait à ces gens-là ; aujourd'hui il est alloué aux douaniers.
Quant aux autres endroits, à l'exception de Knocke, à Nieuport, Blankenberghe, Heyst et Adinkerke, il n'y a pas le moindre doute qu'on ne puisse exercer là le sauvetage aussi bien qu'à Ostende.
Notez une chose, c'est que si un service de sauvetage est nécessaire à Ostende, la distance entre Adinkerke, Nieuport, Blankenberghe et Heyst est si faible, qu'en cas de sinistre, il serait porté secours, même quand il n'y aurait pas de service de sauvetage, parce que ces localités sont en vue l'une de l'autre.
Si un service est en danger en vue de nos côtes, l'un ou l'autre pêcheur s'en apercevra, et soyez sûrs que ce sont eux et non les embarcations du gouvernement qui viendront au secours. Avant que les employés du sauvetage aient fait leurs préparatifs, les pêcheurs qui sont constamment à la mer, ou qui, s'ils ne sont pas à la mer, ont leurs embarcations échouées, arriveront en cinq minutes, et ce seront eux qui feront le sauvetage ; ce ne seront pas les employés du gouvernement.
Je ne demande pas la suppression de ce service. Mais s'il n'est pas possible de faire comme à Ostende, je demande qu'on emploie des gens de la côte.
- L'article 38 est adopté.
« Art. 39. Etablissement d'une station à l'est de Nieuport : fr. 5,100. »
- Adopté.
« Art. 40. Paquebots à vapeur entre Ostende et Douvres. Traitement du personnel des paquebots : fr. 137,200. »
M. le président. - La section centrale propose les deux articles ci-après :
« Paquebots à vapeur entre Ostende et Douvres et passage d'eau.
« Art. 40. Traitements du personnel des paquebots, des bateaux à vapeur de 1 Escaut et du personnel à terre : fr. 100,706.
« Art. 40bis. Vivres : fr. 36,500. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Je me rallie à cette rédaction.
M. Sinave. - Messieurs, depuis que je fais partie de la Chambre, je fais annuellement la même démonstration ; je demande au gouvernement de livrer le service des paquebots entre Douvres et Ostende à une société particulière. La question a été agitée à la section centrale ; la majorité n'a pas été de mon avis. Je sais qu'il y a des objections pour et contre ce que je demande ; mais je prie M. le ministre d'examiner de très près la question.
Comme la section centrale ne propose rien, je me bornerai à ces observations.
- Les articles 40 et 40bis sont adoptés.
« Art. 41. Paquebots à vapeur entre Ostende et Douvres et passage d'eau Traitements des courriers et agents : fr. 14,350. »
- Adopté.
« Art. 42. Passage d'eau. Personnel : fr. 11,850. »
- Adopté.
« Art. 43. Police maritime. Personnel : fr. 27,000. »
- Adopté.
« Art. 44. Police maritime. Primes d'arrestation aux agents et vacations aux experts et agents chargés de la surveillance de l'embarquement des émigrants (crédit non limitatif) : fr. 4,000. »
- Adopté.
« Art. 45. Matériel des divers services. Traitements des gardiens du matériel : fr. 2,000. »
- Adopté.
« Art. 46. Matériel des divers services. Frais divers : fr. 302,500. »
- Adopté.
« Art. 47. Personnel : fr. 3,000. »
- Adopté.
M. le président. - L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :
« Article unique. Le budget du ministère des affaires étrangères est fixé, pour l'exercice 1857, à la somme de deux millions cent cinquante-cinq mille huit cent cinquante et un francs (2,155,851 francs), conformément au tableau ci-annexé. »
- Cet article est adopté.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du budget qui est adopté à l'unanimité des 73 membres présents.
Ce sont : MM. Mascart, Matthieu, Mercier, Moncheur, Moreau, Osy, Rodenbachi, Rogier, Rousselle, Sinave, Tack, Thiéfry, Thienpont, T'Kint de Naeyer, Van Cromphaut, Vanden Branden de Rceth, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Van Remoortere, Vermeire, Veydt, Vilain XIIII, Visart, Ansiau, Anspach, Boulez, Brixhe, Closset, Coomans, Coppieters 't Wallanl, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, de Haerne, de La Coste, Delfosse, Deliége, Della Faille, de Mérode-Westerloo, de Naeyer, de Perceval, de Portemont, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, Desmaisières, de Steenhault, de T'Serclaes, Devaux, Dumon, Jacques, Jouret, Lambin, Landeloos, Lange, Laubry, le Bailly de Tillegbem, Lebeau, Lejeune, (page 1126) Lelièvrc, Lesoinne, Loos, Maertens, Magherman, Malou, Manilius et Delehaye.
M. le président. - Il reste à la Chambre à se prononcer sur les conclusions de la section centrale relativement à une pétition de la députation permanente du conseil provincial d'Anvers, qui demande que le gouvernement restitue à cette province le subside de 15,000 fr. qu'elle lui a voté pour l'établissement d'un service régulier de bateaux à vapeur entre Anvers et les communes du littoral de l'Escaut jusqu'à Tamise.
La section centrale propose le dépôt de cette pétition sur le bureau pendant la discussion du budget, et puis son renvoi à M. le ministre des affaires étrangères, avec demandé d'explications.
- Ces conclusions sont adoptées.
La séance est levée à 4 heures.