(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1855-1856)
(Présidence de M. Delehaye.)
(page 829) M. Ansiau procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. Maertens lit le procès-verbal de la séance précédente. La rédaction en est approuvée.
M. Ansiau présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.
« M. le ministre des travaux publics adresse une note renfermant des explications sur les plaintes formées par plusieurs administrations communales, au sujet du service du transport des dépêches dans la province de Luxembourg. »
- Dépôt au bureau des renseignements.
« Le sieur Tack de Groote présente des observations au sujet d'un legs de la dame de Bock. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le conseil communal de Meldert demande que la société concessionnaire d'un chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain soit tenue de le prolonger jusqu'au camp de Beverloo par Winghe-Saint-Georges, Diest et Beeringen et subsidiairement, qu'il soit accordé un minimum d'intérêt de 4 p. c. pour assurer l'établissement de cette ligne. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la concession de plusieurs lignes de chemin de fer.
« L'administration communale de Bael demande que le chemin de fer projeté de Louvain au camp de Beverloo passe par Aerschot. »
« Même demande de l'administration communale de Betecom. »
- Même renvoi.
« Des habitants de Heyst-op-den-Berg prient la Chambre d'accorder à la compagnie Goddyn-Riche la concession d'un chemin de fer direc d'Anvers à Hasselt. »
- Même renvoi.
« Le conseil communal de Herenthals prie la Chambre de décider le plus tôt possible la question relative au parcours direct jusqu'à Anvers, sollicité par la compagnie du chemin de fer de la Campine. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif au chemin de fer de Lierre à Contich.
« Les sieurs Simonet, Hiret et Pieret demandent la libre sortie du minerai de fer. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi concernant la sortie du minerai de fer.
« M. le ministre de la justice transmet, avec les pièces de l'instruction, deux demandes de naturalisation. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« M. le ministre de la justice transmet à la Chambre 110 exemplaires de la Statistique des hospices et des bureaux de bienfaisance d'après les budgets de ces établissements pendant l'exercice 1853. »
- Dépôt à la bibliothèque et distribution aux membres de la Chambre.
« M. Moncheur, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé de quelques jours. »
- Ce congé est accordé.
M. le ministre de la guerre (M. Greindl) transmet à la Chambre 110 exemplaires d'une carte et des renseignements relatifs à la demande d'un crédit de 8,900,000 fr. pour les travaux du camp retranché d'Anvers. »
M. Thiéfry. - Je demanderai l'impression des renseignements.
M. le président. - Il y a quelques-uns de ces renseignements qu'il ne conviendrait pas d'imprimer. Ce qu'il y a de mieux à faire, c'est de distribuer la carte et de renvoyer les renseignements à la section centrale qui pourra ensuite statuer sur l'impression.
M. Thiéfry. - La question est renvoyée aux sections ; comment voulez-vous que nous délibérions en sections si nous ne connaissons pas les motifs qne M. le ministre développe à l'appui de son projet ?
M. le président. - Les renseignements seront d'abord déposés sur le bureau, où tout le monde pourra les consulter. Ils seront ensuite renvoyés à la section centrale, qui pourra délibérer sur l'impression.
M. Dumortier. - Si les sections se réunissaient à des jours successifs, elles pourraient examiner les renseignements de M. le ministre.
M. Loos. - Il vaudrait mieux que les pièces fussent imprimées.
M. le président. - Ne serait-il pas beaucoup plus prudent d'ordonner d'abord le dépôt sur le bureau et ensuite le renvoi à la section centrale. La section centrale verrrait quels sont les renseignements qui peuvent être imprimés sans inconvénients.
M. Loos. - Je ne sais pas si c'est à l'honorable président de la Chambre de juger s'il y a du danger à faire imprimer les pièces qui nous sont communiquées. Il est vrai que M. le ministre de la guerre n'est pas à son banc, mais trois autres ministres sont présents et peuvent donner des explications. Je crois que le président de la Chambre doit désirer avec nous la plus grande publicité possible à l'égard des documents que le gouvernement transmet à la Chambre.
M. le président. - Ce n'est pas mon opinion que je viens d'exprimer.
J'ai dû soumettre à la Chambre les considérations exprimées par M. le ministre de la guerre. Nous agirions sagement en attendant que M. le ministre soit présent et nous fasse connaître les motifs de la mesure qu'il propose.
Nous nous bornerons pour le moment à ordonner la distribution des cartes.
Projet de loi relatif à la cession du chemin de fer de Contich à Lierre
M. Prévinaire dépose le rapport de la section centrale qui a examiné la nouvelle convention relative à la cession du chemin de fer de Contich à Lierre.
- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport et en met la discussion à la suite de l'ordre du jour.
M. Brixhe. - Messieurs, le projet de loi en discussion a un petit air inoffensif auquel il faut bien se garder, à mon avis, de se laisser aller.
L'intention de la section centrale, d'ailleurs louable en soi, est visiblement de faire aujourd'hui un pas de plus dans la voie de la liberté commerciale. Il est bon cependant d'examiner si, dans le cas présent, on ne dépasserait pas le but et si, avec la décadence de notre métallurgie, on ne provoquerait pas à courte échéance le renversement complet de notre régime douanier.
Ce dernier résultat serait-il un mal ? C'est selon. Expliquons-nous.
Quelques-uns pensent que si la loi proposée ne fait pas de bien à la métallurgie, elle ne lui fera pas non plus grand mal. La houille sort librement ; pourquoi, demande-t-on sincèrement, les minerais de fer ne sortiraient-ils pas librement aussi ?
De prime abord, la question paraît simple et légitime. Cette idée, je l'avoue, doit venir à tout le monde, hormis toutefois aux hommes instruits des réalités des choses et de leurs disparates entre elles ; et l'on ne fait là en effet, qu'un rapprochement discordant pour eux, mais non, je le répète, pour le grand nombre, qui ignore le contraste profond des faits,qu'on veut assimiler bon gré malgré.
Pour ma part, je ne me mets point à la suite de tout le monde ; malgré mes convictions particulières, et quelle que soit mon insuffisance, je veux essayer d'éclairer, d'avertir, de combattre des idées préconçues, des entraînements optimistes qui me paraissent dangereux. Trop souvent le consentement du grand nombre n'a été le résultat que d'erreurs propagées, de renseignements mal pris.
Maintenant voyons donc combien l'analogie présentée est exacte, et si les deux richesses de notre sol, houille et minerais, permettent d'argumenter comme on le fait
De la frontière de France à la frontière de Prusse, et sur une largeur moyenne de 7 à 8 kilom., notre terrain houilier ,renfermant plus de cent couches de houille de plus de 50 centimètres de puissance, pénètre moyennement en profondeur au-delà d'un kilomètre. De sorte que les faits constatés et acquis à la science autorisent à affirmer que par des existences certaines, l'exploitation de la houille, sur le pied actuel, peut se perpétuer chez nous peut-être pendant vingt siècles encore.
Je sais bien qu'on a fait dire le contraire à l'ingénieur distingué qui, dirige la première division des mines ; mais on ne l'a pas compris. Ce savant ingénieur formulait des prévisions sur la durée présumable des sièges actuels d'exploitation et n'entendait nullement annoncer le prochain épuisement de la mine elle-même.
Une grande part de la production des houilles est fournie à l'exportation, soit environ deux millions et demi de tonneaux. Le double de cette quantité est consommé à l'intérieur.
Le pays n'a pas besoin de toute la production dont il laisse ainsi le tiers à la France et aux Pays-Bas. Et il est si vrai que les besoins du pays sont au-dessous de la production, qu'en ce moment même, les demandes de l'intérieur sont presque nulles dans les trois bassins du Hainaut, à Mons, au Centre et à Charleroi.
Voyons maintenant ce qu'il faut penser des minerais de fer.
Ici, messieurs, en vous rappelant les faits connus, je dois vous prier de me passer quelques expressions qui ne sont pas du langage ordinaire ; le sujet les exige et vous me pardonnerez ces réminiscences de mes anciennes fonctions au milieu des choses qui sont l'objet de cette discussion.
Je dis donc : les minerais de fer dont notre métallurgie fait usage se rencontrent au nord et au midi du terrain anthraxifère, sur le trajet du calcaire condrusien-eifelien, et s'il est vrai que d'une frontière à l'autre, de l'est à l'ouest, on ait des chances de trouver, dans ce trajet, du minerai de fer sur une superficie, en apparence, bien plus vaste que celle de la formation houillère ; il n'en est pas moins vrai également que tous les gîtes de. minerais de fer, réunis près à près, ne forment plus (page 830) qu'une faible fraction de la superficie houillère. En effet, ces gîtes miniers ne sont que des amas, des filons d'éjection, chacun d'une étendue restreinte, avoisinés, dans certains cantons, ou dispersés çà et là entre de vastes lacunes stériles, du levant au couchant du royaume. Sur ce long parcours, il n'y a de probabilités d'en rencontrer qu'aux points où les terrains horizontux, argiles et sables, laissent à nu la formation calcaire, comme par exemple, au nord, aux environs de Fleurus, de Nivelles et de Tournai. Et dans les grandes plaines qui séparent ces localités, point de minières, de minières utiles s'entend, car des fers silicates ou phosphoreux, et partant sans valeur, il y en a là comme dans la forêt de Soigne, à Louvain, dans les Flandres, la Campine et ailleurs.
Si la superficie ferrifère est relativement restreinte, ne peut-on, du moins, espérer, dira-t-on, quelque compensation dans la profondeur des gîtes ? Illusion, et c'est en vérité, plus que douteux, car, ici encore, les faits observés s'accordent pour donner une réponse négative. En effet, les exploitations de minerais de fer, gênées ou non par les eaux, n'atteignent guère qu'à un niveau moyen de 25 à 30 mètres. Or, au nord comme au midi du terrain houiller, les exploitants constatent fréquemment qu'à une certaine profondeur, nos minerais, mine brune, fer hydraté, et même nos mines violettes, fer oligiste de la Meuse, passent à l'état de fer sulfuré ou pyrite, substance qui n'a plus de valeur que pour les fabriques de produits chimiques.
Puisque dans ces faibles niveaux où se porte si vivement l'activité de nos exploitations, on on renconre déjà la pyrite, on peut dire hardiment que nos gîtes épars de minerai de fer ne plongent point à une grande profondeur.
Ainsi, gîtes non-continus, sans contiguïté, capricieux, disséminés et séparés par des espaces stérils parfois considérables Quant à leur profondeur moyenne, elle n'est pas grande (40 à 50 mètres, selon quelques ingénieurs), et si je voulais, par hypothèse, lui attribuer un chiffre notable, je dirais qu'à cent mètres le minerai de fer fait place à la pyrite,à la calamine ou au plomb sulfuré.
Que doit-on donc penser de la consistance, de l'ensemble même de ces amas dispersés, en comparaison de nos formations houillères continues qui atteignent de un et demi à deux kilomètres de profondeur à Charleroi et à Mons !
On dit, de bonne foi j'en conviens volontiers, pourquoi empêcher le développement colossal qui pourrait, semble-t-il, être aussi donné à l’exploitation des minières comme à nos houillères ?
Je viens déjà de répondre, mais je résume et dis qu'avec ou sans la prohibition, on n'extraira toujours que quelques mille tonneaux de minerais contre des millions de tonneaux de houille, parxe que l’« avoir en terre », comme on dit au pays de Liége, l’ « avoir en terre » en minerais de fer est limité en comparaison de l’« avoir en terre » en houille. Il est en effet relativement très restreint dans ses dimensions, longueur, largeur et profondeur, ainsi que j’ai essayé de l’expliquer. Aussi, eu égard à l’importanc de nos mines de houille, la chambre de commerce de Namur dit, avec raison : « Nous faisons appel à tous les ingénieurs, à tous les intéressés eux-mêmes, et nous leur demandons si l’on peut espérer quelque chose d’analogue, d’approchant seulement, de nos amas, de nos filons et de nos couches de minerais de fer, et nous sommes sûre, dit-elle fermement, d’une réponse négative. »
Tel est le langage de la chambre de commerce d'une province qui fournit au Hainaut la presque totalité des minerais de fer fort et qui certes en offrirait volontiers le double si elle pouvait le produire. Vous le voyez, cette chambre, sans perdre de vue les propriétaires du sol, comprend cependant ce qu'on doit attendre de nos gîtes de minerais de fer ; elle sait enfin que ces gîtes ne sauraient supporter de grandes immobilisations de capitaux et que, furent-ils plus importants, plus profonds, les machines réunies à 300 à 400 chevaux des houillères ne suffiraient pas à l’épuisement des eaux éternelles du calcaire.
Messieurs, d'après les documents officiels, la production de minerais s'élève aujourd'hui à sept cent mille tonneaux environ, et loin de manquer de débouchés, les propriétaires des minières de fer, bien stimulée par une forte rémunération, ne peuvent encore pourvoir à grand-peine qu'aux stricts besoins de notre métallurgie, sans laisser d'excédant.
D'un autre côté, et ce n'est pas douteux, les maîtres des hauts fourneaux français de Mont-à-terre, de Maubeuge, Denain, Berlaymont, du Nord, de Haumont, feront usage de nos minerais, car quelques-uns d'entre eux, la chambre de commerce de Charleroi le dit, ont déjà essayé des minerais d'Espagne, rapportant, il est vrai, jusqu'à 70 pour cent, mais s'élevant, rendus, à 45 francs les cent kilog. Qu'ils ne puissent s'alimenter tous utilement de ces minerais coûteux, je ne sais, mais il en serait autrement des nôtres qui, rendus aux usines françaises, reviendraient moyennement à 21 où 22 francs les mille kilog., prix bien inférieur à celui des minerais d Espagne.
Si donc les minerais s'exportent (ce qui aura lieu ou le projet de loi n'a pas de but utile), ce sera sans tarder et aux dépens de nos propres hauts fourneaux, Et si l’exploitation prend de plus grandes proportions en surface sinon en profondeur, il y aura appauvrissement proportionnel et rapide d’une richesse minérale précieuse, mais limitée, qui n'est point perpétuelie, celle-là, il s’en faut, comme la production périodique des propriétés superficielles, en culture alimentaire, industrielle et forestière. La valeur de ces dernières va croissant de jour en jour. Celle des mines décroît de fait, en raison même de l'activité qu'on y concentre, et l'épuisement de nos minières de fer n'est pas si éloigné qu'on le pense, selon les vives appréhensions exprimées par la chambre de commerce de Namur qui doit bien s'y connaître un peu et qui est d'accord en cela avec les prévisions de nos ingénieurs les plus distingués dont les rapports ont été déposés par le gouvernement.
L’ingénieur en chef de la première division des mines à Mons dit que les gîtes de nos minerais de fer sont loin d'être inépuisables, et l'ingénieur du troisième district à Namur affirme que nos meilleures qualités 's'épuisent avec une rapidité effrayante.
Telle est, du plus au moins, l'opinion commune à tous ceux qui ayant une vue claire, cohérente des choses, comprennent ce que disent le sable, la pierre, les rochers et savent un peu déchiffrer les archives de la terre, par eux-mêmes et non par ouï-dire.
Qui donc encore a des titres sérieux d'autorité, des raisons certaines de science propres à combatire les appréhensions générales que je viens de reproduire ?
Qui donc, ayant réellement des choses une connaissance lucide et ferme, comparera encore nos chétifs amas, nos dépôts incertains de minerais, à nos vastes mines de houiile, pour promettre un long avenir aux uns comme aux autres et dès lors les soumettre formellement au même régime !
Cependant, messieurs, ce n'est point que la section centrale soit sortie de sa compétence au point de vue économique, au contraire. Seulement, et ce n'est pas sa faute, elle n'avait peut-être pas une information suffisante des faits naturels, et elle devait ainsi en faire bon marché ; elle pouvait même les dénier et se laisser aller innocemment à des illusions contre lesquelles, on n'hésite pas à le reconnaître, elle n'avait rien précisément qui pût la mettre en garde. Si du moins, dira-t-on, elle avait songé à consulter, par exemple, notre illustre géologue André Dumont, mais on ne s'avise jamais de tout.
Messieurs, je pense que le jour où la libre exportation serait décrétée, les demandes de l'extérieur afflueraient et viendraient réduire d'autant la part de notre métallurgie.
Mais, veuillez-le remarquer avec la chambre de commerce de Charleroi, ce qui est rare chez nous et plus rare encore en France, le long de notre frontière, ce sont les minerais de fer fort, qui en effet font à peine le tiers de notre production. Et ce sont ceux-là mêmes cependant que l'étranger enlèverait à nos hauts fourneaux, alors que toute l’activité si fructueuse de nos extracteurs de mines fortes ne pourvoit que tout juste aux besoins du pays.
Si la loi proposée n'amène pas la sortie, je la répète, elle ne mérite pas qu'on s'en occupe.
Mais si elle doit opérer, si les minerais de fer fort franchissent notre frontière de l'ouest, surtout avant que leur production ait reçu ce vif entrain qu'une trop aveugle confiance se complaît à lui prédire, ils feront donc défaut tout d'abord à nos hauts fourneaux
Le projet ne peut qu'être dommageable à la métallurgie. S'il était adopté, on ne construirait plus de hauts fourneaux, et ceux qui existent s'éteindraient successivement : ce serait assurer leur décadence.
Par le fait de l'exportation des minerais de fer fort, la fonte, on le voit, doit donc renchérir chez nous au-delà de ce qu'elle coûterait, prise au-dehors.
Eh bien, pour peu que je ne m'abuse pas, si ce moment arrive, comme je le pense, alors nos propres laminoirs et fabriques de fer, nos ateliers de construction, nos fonderies et ateliers de moullage demandent, tout d'une voix, la libre entrée des fontes étrangères.
Le grand mal ! dit-on. Je le sais bien, mais les choses ne s'arrêteront point là. Ce n'est pas qu'en principe, et les transitions prudemment ménagées, je voie ici, peut-être de grands inconvénients. Mais je suis persuadé, et ceci devient plus sérieux à considérer, que le jour où l'on vous demandera la libre entrée des fontes, d'autres réclameront aussi immédiatement, avec autant d'ardeur que de raison, la libre entrée des fers, ainsi que des laines, des cotons, lins et chanvres, de tous leurs fils et tissus ; la suppression des diverses primes et des privilèges commerciaux, péages et droits différentiems, de transit ou autres, qui peuvent exister encore à l’intérieur, soit sur les canaux, soit sur les chemins de fer, et à la frontière, par exemple, la réforme du régime des sucres, puisque la marine étrangère nous serait aussi moins onéreuse que la marine d’Anvers.
Si vous n'avez, messieurs, deux poids et deux mesures, pensez-vous qu'il vous sera facile honnêtement de rien refuser ? De sorte qu'à moins de déni de justice et de danger, nous arriverons de force et sans transition possible au renversement plus ou moins brusque de notre régime douanier, au naufrage des intérêts engagés et à la pterturbation de nos populations industrielles agglomérées.
Compte-t-on naïvement, par hasard, qu’on calmera sans difficulté ces grands centres en leur disant de sang-froid, du jour au lendemain : « Vous ferez autre chose ! » Or, disons-le à leur louange, les économistes sages, non les casse-cou, en adressant ce langage aux travailleurs présupposent toujours, dans leurs hypothèses, les transitions nécessaires pour conjurer l'imprévu dangereux, les ruines, les désordres que peut susciter une brutale démolition.
(page 831) Vous le voyez donc, messieurs, et sans fantasmagorie, cette petite loi des minerais de fer, si je ne me trompe, engagerait tout notre système douanier, et l’on doit le savoir à Liège aussi bien qu'à Charleroi. Néanmoins la métallurgie de Liège accueille le projet et cela va sans dire, car ses propres minerais n'iront nullement en France. Ils lui resteront, tandis que les fourneaux de la Sambre mourront d'inanition.
La forgerie de Liège est donc favorable au projet et le fait est que dans le Hainaut beaucoup pensent que les métallurgistes de la Meuse auraient assez de philosophie pour se résoudre à supplanter en France les fontes de la Sambre, dût s'ensuivre la décadence des hauts-fourneaux du Hainaut.
Mais laissons de côté des suppositions peut-être gratuites.
Je suis partisan de la liberté commerciale ; néanmoins pour y arriver j'entends ménager, échelonner les transitions. Or, que faisons-nous aujourd'hui, si ce n'est, au contraire, de mettre en jeu la totalité de notre régime douanier qui, à mon sens, sera forcément, brusquement bouleversé dans toutes ses parties importantes par les effets immédiats et inévitables de petit projet de la section. A moins toutefois qu'il ne soit sous-entendu (et il vaudrait mieux alors le dire franchement) qu'on se réserve de refuser aux uns ce qu'on aura accordé aux autres. Mais, si c'est là que l'on va, ce qu'on veut tenter peut amener autre chose que ce qu'on tente et pour ma part j'y vois entraînement, opinion égarée, parti pris et danger ; je ne puis résister seul, mais je suis décidé à ne pas m'y associer.
Je suis à bout d'arguments, messieurs, mais non de sincérité. Or, je dis de nouveau qu'à mes yeux la question des minerais de fer est certainement un danger pour la métallurgie et qu'elle peut faire naître un danger plus grand encore pour toute notre économie industrielle, pour le bon ordre intérieur. Une fois nos hauts fourneaux compromis, les charbonnages et les populations concentrées de nos mineurs tomberaient dans la souffrance. Est-il besoin d insister ?
Ce sont toutes ces graves considérations qui me portent à demander, d'accord avec la chambre de commerce de Liège même, et par motion d'ordre, que le projet de loi, pour être mieux étudié, soit ajourné à la révision de nos lois douanières.
Le système, de la section centrale veut nécessairement être utile à tous les intérêts ; qu'il les embrasse donc tous.
Que si ma motion pouvait n'être pas accueillie, si la proposition de la section centrale ne recevait d'importants tempéraments ; si la rudesse prévalant, il devait y avoir ici pour ainsi dire des vainqueurs et des vaincus, des victimes dévouées au triomphe quand même d'un principe vrai sans doute, vu de haut, mais odieux dès qu'il veut se traduire par une violente contrainte ; alors en représaille, il ne resterait plus qu'à provoquer vivement, tout de suite, l'application immédiate, générale, à tous les objets indiqués tantôt, du principe qui a si exclusivement absorbé toutes les préoccupations de la section centrale, sauf à pourvoir ensuite aux besoins du trésor par des droits fiscaux convenables.
Ce serait, dira-t-on, pousser à la coalition des intérêts. Je n'en disconviens pas. Mais les vérités économiques doivent, en fait compter avec ces intérêts, sous peine de préparer l'avenir sur les ruines du présent.
Il faut plus de patience, messieurs, dans l'éducation du nouveau régime. Il y a des droits acquis, et les plus fermes esprits consentent à tempérer, dans la pratique, les rigoureuses abstractions de la théorie pure. Car « le progiès pour être efficace doit en quelque sorte se cacher, s'accomplir lentement, et pour ainsi dire par des voies souterraines jusqu'à ce qu'il se fasse jour dans les esprits et éclate enfin dansune plus juste économie de la société. »
A ces conditions, je resterai d'accord avec mes amis les économistes. Sinon, non.
Alors, messieurs, qu'après les événements de 1848, un consciencieux écrivain, Frédéric Bastiat, avait à combattre d'autres préjugés, il disait que dans toute question économique il y a toujours et ce qu'on voit et aussi ce qu'on ne voit pas.
En statuant sur ma motion d'ordre, vous direz, messieurs, de quel côté, à vos yeux, est la meilleure appréciation de ces choses qu'on ne voit pas et de celles qu'on devrait voir parce qu'elles sont.
Maintenant, pour terminer, je crois pouvoir faire observer qu'en général les extracteurs de minerais, même dans les centres les plus richement dotés, ne souhaitent guère sérieusement que la continuation de leur incontestable prospérité. Ils savent que le succès de la forgerie française serait fatal à la nôtre et qu il n'y aurait plus alors pour eux qu'un déplacement de minerais et non un accroissement de demande.
N'est-il pas bien plus sage, en fabricant nous-mêmes la fonte, de conserver encore chez nous la main-d'œuvre, plutôt que de la donner gratuitement à la France qui, ne sollicitant- pas cette faveur, n'offre rien en retour ? Et quand plus tard vous voudriez la lui retirer, cette faveur, vous ne le pourriez plus et elle vous la ferait bien voir.
Encore un moi, messieurs, c'est la chambre de commerce de Liége qui parle : « Permettez-nous, monsieur le ministre, de saisir cette occasion pour vous exprimer le regret que nous éprouvons de traiter isolément des questions de la nature de celles dont il s'agit, alors que les principes invoqués et les raisons alléguées pour en justifier la solution, s'appliquent directement à d'autres objets de la production nationale, dont l'exportation reste interdite ou grevée de droits, tandis que des motifs identiques provoquent à leur égard le système de libre sortie que la section centrale revendique en faveur des minerais.
« Ces mesures, adoptées partiellement, laissent subsister dans l'économie de nos lois douanières, des inégalités choquantes et introduisent un régime exceptionnel, hostile en quelque sorte aux lois d'une justice sainement distributive. »
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Les observations que vient de présenter l'honorable préopinant ne s'appliquent pas du tout au projet qui a été soumis à la Chambre par le gouvernement. On se rappelle, messieurs, l'origine de ce projet : un propriétaire de la Flandre orientale, possédant des minerais non demandés par nos établissements qui s'en procurent de plus riches et plus à proximité de leurs usines, ce propriétaire a adressé une pétition à ta Chambre à l'effet d'obtenir la libre sortie de ce minerai qui, je le répète, n'est demandé par personne dans notre pays. La commission d'industrie ayant été consultée sur cette pétition, a donné un avis favorable et la Chambre a renvoyé cette pétition au gouvernement.
Le gouvernement a partagé l'opinion de la commission d'industrie, et après avoir consulté les chambres de commerce, qui ont également donné un avis favorable à cette demande, il a présenté à la Chambre iun projet de loi avant pour objet d'autoriser la libre sortie des minerais provenant de la partie de la Flandre orientale dont il s'agit. C'était, messieurs, une deuxième exception à la mesure générale de la prohibition à la sortie du minerai de fer, prononcée par la loi.
Une première exception avait été faite pur la loi même qui maintenait la prohibition, c'était de permettre l'exportation du minerai de la province du Luxembourg. C'est par suite de la circonstance que je viens de rappeler que le gouvernement est venu proposer une deuxième exception, son intention n'était pas d'aller plus loin.
La section centrale a amendé le projet du gouvernement en faisant d'une disposition purement exceptionnelle, peu importante en elle-même, et tout à fait inoffensive, une mesure générale.
J'ai demandé à consulter les chambres de commerce sur cette proposition. Les chambres de commerce vraiment compétentes, celles qui ont une entière connaissance des intérêts engagés dans cette question, se sont prononcées par des avis basés sur des faits contre le projet de la section centrale ; les chambres de commerce de Namur et de Charleroi pensent que l'adoption du projet de la section centrale jetterait la plus grande perturbaliou dans l'industrie métallurgique.
D'après elles, et aussi d'après l’avis des ingénieurs des mines qui ont été consultés, il résulterait de cette mesure un grave préjudice pour nos établissements métallurgiques, sans compensation pour les propriétaires de minerai ; c'est-à-dire que l'industrie se déplacerait, que le minerai qui est aujourd'hui fourni à nos établissements serait vendu aux établissements qui existent déjà ou qui seraient fondés de l'autre côté de la frontière, où la fonte est protégée par un droit énorme de 48 fr. par 1,000 kilogrammes, ce qui équivaut à 40 p. c. de la valeur ; les établissements rivaux d’un pays voisin pouvant dès lors produire à meilleur marché et conserver la protection dont je viens de parler, n'auront plus à craindre aucune concurrence de notre part et nos produits seront exclus de leur marché sans qu'il en résulte aucun avantage pour nos propriétaires de minerai.
J'ai été frappé d’une observation qui a été faite à ce sujet par la chambre de commerce de Charleroi ; il en résulte que non seulement nos propriétaires de minerai ne gagneraient rien à la mesure proposée par la section centrale, mais qu'au contraire ils y perdraient considérablement.
En effet, quelle est l'espèce de minerai qui serait demandée de l'autre côté de la frontière ? Ce serait exclusivement, du minerai de fer fort. Nous y exportons principalement de la bonne fonte d’affinage, provenant d’une combinaison de 4/10 de minerai de fer fort et 6/10 de fer tendre ou métis.
La France n’a pas besoin de se pourvoir à l’étranger de minerai de fer tendre ; elle possède cette qualité de minerai chez elle en quantité suffisante ; il ne lui manque que du minerai de fer fort ; il résulterait donc de la mesure proposée que la Belgique n’exporterait en France que les 4/10 de minerai de fer fort qui entrent dans la fabrication de la fonte, et que les 6/10 d eminerai de fer tendre, aujourd’hui employés par notre industrie, seraient soustraits à notre exploitation, du moins en très grande partie, de sorte qu’il y aurait là un bien fâcheux mécompte. Loin de gagner à la libre sortie, nos propriétaires de minerais, selon toutes les probabilités, y perdraient considérablement.
J'appelle particulièrement l’attention de la Chambre sur un pareil résultat, bien opposé ) ce qu’annoncent les auteurs de l’amendement. La Chambre de commerce de Charleroi, très compétente dans la question, l’a signalé comme devant nécessairement se produire, et la même opinion est manifestée par les ingénieurs des mines.
Je me prononce d’ailleurs contre l’ajournement de la discussion du projet de loi. Je demande que la discusison continue, et je combats l’amendement de la section centrale.
M. de Renesse. - Messieurs, chaaque fois que le gouvernement ou des sections de la Chambre croient devoir proposer des modifications à notre tarif douanier si compliqué, et qu’il s’agir de faire un pas vers une sage liberté commerciale, nous voyons presque toujours les industries privilégiées jusqu’ici par de hauts droits protecteurs, demander le maintien du privilège dont elles jouissent, parfois aux dépens de l’intérêt général du pays.
C’est ainsi que l’honorable représentants qui vient de parler croit (page 832) devoir proposer formellement l'ajournement du projet de loi actuellement soumis aux délibérations de la Chambre, jusqu'à la discussion du projet de révision de notre tarif des douanes ; c'est demander l'ajournement aux calendes grecques, car le projet de modification à notre tarif général, promis depuis longtemps, paraît ne pas devoir être présenté pendant la session actuelle ; néanmoins les consommateurs qui forment le grand nombre des contribuables, ont droit de réclamer que le gouvernement et les Chambres ne perdent pas plus longtemps de vue leurs intérêts, en introduisant dans notre tarif des droits plus modérés purement fiscaux, pour venir en aide aux ressources ordinaires du trésor public.
Je ne puis donc admettre la proposition d'ajournement faite par l'honorable M. Brixhe ; le projet de loi a reçu une instruction suffisante, chacun a pu en apprécier la portée ; et la motion d'ordre n'a donné l'occasion à l'honorable membre que de prononcer un long discours, pour combattre la libre sortie du minerai de fer ; je dois m'opposer de toutes mes forces à cette proposition d'ajournement : il faut que la Chambre se prononce sur le projet de loi en discussion.
M. Moreau. - Je renonce à la parole, puisque le gouvernement ne se rallie pas à la proposition d'ajournement.
M. Mascart. - Messieurs, ce qu'on a fait dans le passé nous explique ce qui a lieu maintenant et, miroir prophétique, ce qu'on fera dans l'avenir.
Cédant à l'opinion publique, et dans l'intérêt d'un grand nombre d'industries, l'honorable M. Liedts nous avait proposé une réforme douanière, que la section centrale, présidée par l'honorable M. Vilain XIIII, avait un peu étendue après un long examen. A son avènement au pouvoir, le ministère actuel s'est empressé de retirer le projet sous prétexte qu'il était incomplet, mais en réalité pour éviter une discussion embarrassante.
Ou veut maintenant arriver au même résultat par un moyen peu différent ; les rôles seuls sont intervertis.
Lorsque le rapport de la section centrale sur le projet actuel nous a été distribué et que nous avons entendu M. le ministre des finances demander l'ajournement de la discussion, on pouvait prédire, sans être prophète, qu'il se préparait quelque chose, qu'on voulait faire avorter la réforme telle qu'elle était sortie des délibérations de nos sections.
Je le dis, messieurs, avec une profonde conviction : si aujourd'hui la Chambre ne saisit pas l'occasion qui lui est offerte de faire acte de virilité en ébréchant ce qui nous reste du système prohibitif, si elle lâche prise par faiblesse (ou pour tout autre motif), vous n'obtiendrez rien plus tard, vous resterez dans cet état malgré les réclamations qui surgissent partout contre le système douanier qui nous régit. On sera averti des opinions économiques de la Chambre et on cherchera à éviter toutes les occasions dans lesquelles elle pourrait les appliquer, surtout à l'industrie métallurgique, la plus scandaleusement protégée, à celle qui pèse le plus lourdement sur l'industrie agricole et sur toutes les autres.
On allègue, pour justifier l'ajournement, que le minerai devient rare, qu'il est payé à un prix rémunérateur, élevé si vous voulez. Cela est vrai pour celui qu'on rencontre dans un certain rayon des établissements métallurgiques ; mais dans le Brabant, dans les Flandres, dans le Hainaut même où il n'y a pas de hauts fourneaux, que voulez-vous que nous en fassions ? Que nous le gardions pendant plusieurs siècles jusqu'à ce que vous en ayez besoin ? Mais en attendant, il nous ruine, il empêche toute production agricole. Ceux qui prétendent qu'on peut ajourner cette affaire, qu'il n'y a pas péril en la demeure, ressemblent, me paraît-il, à ces gens qui s'imaginent qu'eux repus, tout le monde a parfaitement dîné.
Voyez ce qui se passe.
L'arrondissement de Nivelles et, je crois, tous les arrondissements de la province possèdent de nombreux gisements de minerai. Presque partout où vous rencontrez un sable rouge et aride à la surface il y a une couche de minerai de fer à une petite profondeur et qui jusqu'ici n'a été extraite que pour être versée dans les ornières du chemin voisin. C'est une opération onéreuse, qu'on fait dans l'intérêt du sol que le minerai rend tout à fait improductif.
Maintenant, si par la libre sortie et l'augmentation de prix qui pourrait en résulter, tes frais d'extraction de ces dépôts étaient seulement couverts par le prix de vente, alors même que l'opération ne produisît rien par elle-même, n'est-il pas évident que plusieurs centaines d'hectares, des milliers peut-être qui ne valent pas aujourd'hui 200 fr. acquerraient bientôt une valeur décuple parce que l'agriculture pourrait ensuite en tirer parti en leur faisant produire des denrées alimentaires de toute sorte. On créerait ainsi des valeurs considérables tout en procurant un travail abondant à la classe ouvrière la plus misérable, à celle des journaliers.
Les propriétaires de l'arrondissement de Nivelles se trouvent exactement dans les mêmes conditions que ceux de la Flandre orientale et je ne comprends pas dès lors qu'on ne fasse d'exception que pour cette seule province ; qu'on n'ait de soucis que pour ses intérêts. Là comme ici, « il s'agit de mettre en rapport des propriétés jusqu'ici sans valeur et de débarrasser de matières stérilisantes un sol susceptible d'être livré à l'agriculture ».
Je cite avec plaisir les termes employés par M. le ministre des finances daas son exposé des motifs, parce qu'ils me paraissent d'une justesse rigoureuse, soit qu'on les applique à la Flandre orientale, au Brabant on à toute autre partie du pays.
Maintenir la prohibition dans la crainte de manquer de minerai, crainte qui me paraît aussi chimérique qu'à la chambre de commerce de Liège ou pour empêcher ce produit de hausser de prix, n'est-ce pas évidemment arrêter le travail et frapper de stérilité une partie de notre sol, quand nous manquons de denrées alimentaires, quand nos populations souffrent de la faim et cela dans l'intérêt d'une industrie qui réalise d'énormes bénéfices ?
Ces bénéfices, messieurs, sont dus à notre tarif de douanes qui protège beaucoup trop l'industrie métallurgique. Nous sommes, nous paysans et propriétaires du sol, complètement à sa merci : on peut dire qu'elle puise dans nos poches dans la limite de ses intérêts, et qu'elle nous laisse seulement ce qu'elle ne peut nous enlever, générosité dont nous lui tenons peu compte, comme vous pensez bien.
On a produit, messieurs, de singuliers arguments pour maintenir ce qui existe. En voici un que je trouve dans les documents qui nous ont été distribués.
L'injustice, y dit-on, l'atteinte au droit de propriété (l'aveu va jusque-là) est compensée pour les exploitants de mines de fer par cette autre « injustice » qui force le consommateur à employer et à payer plus cher le minerai, ou ce qui revient à la même chose, les fontes et les fers qui en proviennent en frappant d'un droit élevé (on ne dit pas prohibitif) la fonte et les fers étrangers.
Ce langage est vraiment étrange ! n'est-ce pas exactement comme si on disait : Bons propriétaires du sol qui avez du minerai, cessez vos réclamations, terminons cette petite difficulté entre nous, sans bruit et saus noise ; nous continuerons à prendre votre minerai à un prix rémunérateur élevé s'il le faut, mais à une condition cependant, c'est que vous nous aidiez à maintenir la prohibition sur les fontes et les fers étrangers, de manière que nous puissions nous rattraper sur les consommateurs de l'excédant de prix que nous courrions vous payer.
Ce beau système pourrait être réalisé si tous les intéressés dans la question y trouvaient également leur compte.
Malheureusement il n'en est pas ainsi et c'est là ce qui doit empêcher la conclusion du marché. Ceux qui viennent mettre un bâton dans la roue sont sans doute des malivisés et, pis que cela, des ennemis du travail national ; mais comme ils sont nombreux et qu'ils ont voix au chapitre, on est bien forcé de tenir compte de leur opposition.
Il y a d'abord, les propriétaires de l'intérieur qui ont du minerai dans leurs terres, minerai qu'on ne leur demande pas plus que s'il était dans la lune, qu'ils donneraient volontiers pour rien, dont ils payeraient même en partie l'extraction si on voulait les en débarrasser. Ceux-là sont directement intéressés à l'exportation et à une augmentation de prix qui leur permette d'exécuter un travail qui ne les ruine pas.
Il y a ensuite tous les contribuables dans la proportion de la quantité de fer consommée par chacun d'eux, depuis le paysan qui n'a que sa bèche, qui est son gagne-pain jusqu'au constructeur des plus puissantes machines. Ces gens-là, qui forment un total de plusieurs millions, demandent qu'on ne fasse pas la part du lion à une seule industrie, à une pauvre petite industrie qui ne rapporte que 15, 20 ou 25 p. c.
Vouloir conserver la double prohibition dont cette industrie jouit, prohibition de l'extérieur à l'intérieur pour ses produits, prohibition de l'intérieur à l'extérieur pour le minerai, dont elle avilit le prix quand il a un prix, c'est en vérité, messieurs, trop de moitié au moins, surtout quand on prend en considération cette circonstance, que nous payons les fontes à un prix supérieur à celui des marchés voisins. Cette situation, qui ne serait tolérable que pour autant que nous les payons un prix moins élevé, doit nécessairement disparaître, aujourd'hui que le monde raisonne, que chacun sait faire le compte de ses doigts.
Mais il y a d'autres motifs qui doivent nous engager à rejeter la proposition d'ajournement pour arriver à l'adoption de la proposition de la section centrale.
Nous avons concédé les chemins de fer de Manage à Wavre et de Charleroi à Louvain, avec la garantie d'un minimum d'intérêt. Ces deux lignes traversent vingt communes, Grez, Archesnes, Wavre, Bierges, Limal, Ottignies, Court-St-Etienne, La Hulpe, etc., qui possèdent du minerai qu'on exploite en petit de ci de là, depuis un an que les chemins de fer existent. On en trouve jusqu'aux portes de Bruxelles, à Boitsfort et à Heylaert.
Si l'extraction de cette matière prenait un grand développement par suite de l'ouverture de nos frontières, le péage perçu viendrait en déduction de ce que l'Etat devra payer, aux concessionnaires. Ce serait un bénéfice net pour les contribuables sans qu'il en coûte un centime à personne tout en faisant du bien aux compagnies.
En voici un autre beaucoup plus sérieux et qui seul suffirait pour que nous purgions notre tarif de douanes des dispositions véreuses qu'il renferme, chaque fois que nous en avons l'occasion.
Je suis convaincu qu'on n'évitera pas le retour à un droit protecteur sur les denrées alimentaires avec le système partial et injuste qui nous régit, alors même que le prix du blé ne tomberait qu'à 20 francs l'hectolitre.
Depuis dix ans nous avons disette et cherté et pour conséquence élévation excessive du prix des fermages pour les baux qui ont dû être renouvelés pendant cette période. Quand le produit du sol sera tombé à la moitié de la valeur de ce qu’il a été et qu’une foule de gens seront (page 833) ruinés, même avec le prix de 20 francs qu'on considère comme rémunérateur, pourrez-vous maintenir la terre dans l'état de servitude où elle est sans lui venir en aide, sans frapper les produits agricoles étrangers d'un droit assez élevé pour les faire renchérir sur le marché intérieur au grand dommage des classes infimes de la société, de ces classes qui ont tant souffert dans ces derniers temps ?
Il y a là, messieurs, un intérêt social que|nous devons prévoir et un danger que nous contribuerons à écarter en adoptant la proposition de la section centrale, proposition qui restitue en partie au travail et à la propriété les droits dont on les a dépouillés.
M. Julliot. - Messieurs, la douane belge est une des plus bigarrées du continent ; des prohibitions à l'entrée, des prohibitions ou des primes à la sortie selon l'influence du moment, puis des droits fixés au hasard, sans liaison dans les idées qui les ont établis, voilà le tableau économique que nous déroulons aux yeux des nations voisines qui doivent se dire après examen : Comprendra qui pourra, ce que veulent ces braves gens.
Il est plus que temps de s'arrêter une bonne fois à un système déterminé et approprié aux besoins du temps, car un bon système douanier est la clef de voûte de la prospérité d'une nation.
Cherchons donc ce système et que chaque fois qu'on s'occupera d'une question douanière, on se rapproche du principe arrêté. Voilà ce qui me paraît une bonne politique, toute autre marche me semble vicieuse et je pense que ceux qui demandent qui la question douanière soit tranchée pour tous les intérêts simultanément, ne cherchent qu'à perpétuer le gâchis qui existe et dont les intérêts favorisés, s'accommodent parfaitement bien entre eux.
Selon moi, le meilleur système se résume dans la simplification des tarifs et dans une bonne recette, et comme, d'une part, on n'entend pas supprimer la douane, et que, d'autre part, le système protectionniste est usé, c'est évidemment à une douane au point de vue des recettes qu'il faut aboutir.
A cet effet on doit laisser échanger librement tous les objets d'une consommation restreinte, et n'affecter que les grandes consommations ; on peut atteindre ce but en imposant légèrement à la sortie comme à l'entrée, tous les objets de grande consommation, en ménageant, par une transition lente et prudente, les capitaux qui se sont maladroitement aventurés dans des industries boiteuses.
C'est à ce titre que je propose un droit d'entrée et de sortie qui répond à 2 1/2 p. c. à la valeur.
Le prix de revient de ce minéral est de 25 fr. le mètre cube au lieu d'extraction, il est en moyenne de 12 fr. pour frais de transport en France, où il est employé ; le droit que je propose est donc de deux et demi pour cent et ne doit effrayer aucun intérêt sérieux.
Dans ce système, le producteur de fonte belge trouvera comme compensation des droits d'entrée établis en France : 1° les frais de transports ; 2° 2 à 3 p. c. de droits à percevoir au profit du trésor belge et supportés par le consommateur français.
La section centrale nous propose de passer d'un excès à un autre, elle veut qu'en nous sauvant de la prohibition, nous nous jetions dans la liberté illimitée ; on m'a souvent reproché d'être trop radical dans mes aspirations à la liberté, mais il paraît que je suis distancé, et je m'incline devant la section centrale.
Pour moi il y a ici comme toujours deux intérêts en présence, et à moins de recourir à l'axiome sur lequel probablement la section centrale s'est appuyée, à savoir que les extrêmes se touchent, je ne sais comment justifier le fait d'avoir méconnu complètement un de ces intérêts jusqu'à ce jour, et de faire le lendemain litière complète de l'autre pour venger le premier ; ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder.
D ailleurs j'engage ceux qui combattront mon amendement à indiquer du doigt le régime douanier qu'ils préconisent comme système. Il est facile de repousser une proposition, mais il faut indiquer un autre système sous peine de reconnaître qu'on n'en a pas.
A part le principe qui me guide et qui consiste à n'imposer qu'un nombre restreint d'objets, et de faire une bonne recette en laissant la concurrence possible, je demanderai à ceux qui veulent qu'on compose avec les faits, si mon système n'entre pas dans leurs vues.
D'ailleurs cette liberté illimitée qu'on invoque pour le minerai on ne l'appliquera pas au fer et autres objets de grande consommation, loin de là, on ne procédera que trop timidement à des réformes, pourquoi donc vouloir du radical dans la question qui nous occupe, comme si l'on visait à supprimer les douaniers.
J'ai des collègues partisans des droits fiscaux, mais seulement à l'entrée ; ils repoussent tout droit à la sortie ; je ne puis être de leur avis car ils sont dans ce cas plus sympathiques aux étrangers qu'à nos nationaux. Il faut admettre qu'un droit d'entrée en Belgique est supporté par le Belge qui consomme la denrée imposée, et il est tout aussi vrai qu'un droit de sortie de Belgique impose cette dépense au consommateur étranger qui consomme le produit belge ; or dans le premier cas le trésor public prélève la recette sur le revenu belge et dans le second cas il fait sa recette sur un revenu étranger.
C'est-à-dire que ceux qui acceptent le droit fiscal à l'entrée et n'en veulent pas à la sortie, décident implicitement qu'il vaut mieux arroser le trésor belge par le travail belge que par le travail étranger. Or, pour moi le contraire est vrai, et je maintiens mon amendement qui a pour objet un droit d'un franc par mètre cube de minerai de fer à la sortie comme à l'entrée du pays.
Je verrai s'il me reste à répondre aux objections qui se produiront.
Mais qu'on veuille opposer un système à un système, et nous pourrons discuter.
- La proposition de M. Julliot est appuyée ; elle est ainsi conçue :
« Il sera perçu un droit d'un franc par mètre cube à l'entrée comme à la sortie du minerai de fer. »
M. Dechamps. - Messieurs, je viens appuyer la motion de l'honorable M. Brixhe ; je demande que la Chambre comprenne dans cette motion d'ajournement la proposition de l'honorable M. Julliot, comme celle de la section centrale, de manière à ne maintenir en discussion, ainsi que l'a proposé M. le ministre des finances, que le projet de loi tel que le gouvernement l'a présenté.
Je comprends très bien l'impression sous l'empire de laquelle la section centrale s'est trouvée placée lorsqu'elle a proposé d'étendre à tous les minerais du pays et à toutes nos frontières, le principe de la libre sortie que le gouvernement demande de n'appliquer qu'à certaines catégories de minerai des Flandres et par la voie de nos frontières maritimes.
C'est au nom d'un principe que la section centrale vous soumet sa proposition ; c'est au nom du droit de propriété, de la libre disposition de la propriété et de la liberté commerciale qu'elle réclame la liberté de sortie pour nos minerais. La section centrale n'a nullement examiné les faits, faits très importants cependant, et dont l'honorable M. Brixhe vous a fait reconnaître toute la valeur ; elle ne les a étudiés que d'une manière superficielle et insuffisante ; elle s'est bornée à affirmer que la libre sortie du minerai, loin d'être nuisible, sera favorable à l'industrie métallurgique qui se préoccupe de craintes chimériques. Nous allons apprécier la valeur de cette affirmation et combien elle est erronée.
Je veux bien appliquer le principe de la liberté commerciale au minerai de fer, mais à une condition pourtant : c'est que la France use de réciprocité et proclame aussi ce principe de liberté commerciale quant à nos fontes qu'elle frappe d'un droit de 48 fr. par tonne, qui correspond à 45 p. c. de la valeur.
Quand la France voudra bien proclamer à l'égard de nos fontes, ce principe que la section centrale demande que vous appliquiez par rapport à nos minerais, je serai loin de m'y opposer. Maïs je ne veux pas faire de la théorie contre nous et au seul profit de nos voisins.
Pour ma part, j'ai toujours été l'adversaire des prohibitions, des droits, des entraves à la sortie.
Parmi les mesures protectrices, c'est assurément une des moins intelligentes et des moins justifiables.
Mais cette fois encore, vous reconnaitrez que les principes les mieux établis, les plus rationnels, les principes en apparence les plus absolus, doivent s'incliner devant les faits et les exceptions.
Lorsqu'une partie des Flandres demandait qu'on frappât de prohibition ou d'un droit élevé la sortie des lins, comme membre de la commission d'enquête en 1840, ci plus tard comme membre du gouvernement, je me suis toujours opposé à cette mesure comme dangereuse et comme inutile, parce qu 'elle aurait eu pour effet d'empêcher le développement qu'a reçu depuis la culture du lin, et d'un autre côté parce que l’étranger aurait facilement pu trouver ailleurs le lin qu'il n'aurait plus pu se procurer chez nous.
Lorsqu’il s'est agi de prohiber la sortie des céréales, malgré les circonstances impérieuses au milieu desquelles nous nous trouvions et qui semblaient autoriser cette mesure, je me suis séparé de mes amis, je n'ai pas pu admettre cette entrave au commerce des céréales, j'ai craint que les restrictions apportées à la sortie des céréales ne fissent diminuer nos importations et ne nuisissent à nos approvisionnements.
Dans une autre occasion, on a fait à la Chambre la proposition de frapper la houille d'un droit à la sortie. Si cette proposition avait été maintenue, je l'aurais vivement combattue. Je pense que j'aurais facilement démontré à la Chambre que l'industrie de la houille est une industrie d'exportation, puisque sa production excède de plus d'un tiers, de deux millions et demi de tonneaux, la consommation intérieure. Cet excédant, s'il ne pouvait s'exporter, amènerait infailliblement pour résultat de restreindre dans des proportions considérables la production de la houille en Belgique.
Par conséquent, après un abaissement momentané dans les prix qui aurait pu suivre la mesure que l'on vous proposait, vous auriez amené inévitablement, dans un avenir prochain, un renchérissement normal dans les prix de la houille à l'intérieur.
Je pense que je vous aurais démontré que cette question de la houille a toujours été intimement liée à toutes nos négociations avec la France et se rattache ainsi directement à l'état de nos relations avec ce pays. Je vous aurais convaincu qu'une telle mesure aurait vraisemblablement exposé le pays à des représailles de la part de la France,
Messieurs, aujourd’hui que je m'oppose au changement immédiat de la législation sur le minerai de fer, que je demande l'ajournement de l'examen de cette question si grave, suis-je en contradiction avec moi-même ? Mais non, messieurs, aucun des motifs qui ont pu déterminer mon opinion dans les autres circonstances que je viens de rappeler, n'est applicable à la question de minerai. C'est le contraire qui est vrai.
Ainsi pour le minerai, l'honorable M. Brixhe, tout à l'heure et avec l'autorité de la science qu'il possède, nous a fait connaître la (page 834) situation normale de nos gîtes métallifères. Jamais on ne pourrait espérer de la libre sortie du minerai un développement dans la production, parce que cette richesse minérale est limitée ; ce qu'il faut craindre, c'est, au contraire, l'épuisement trop rapide de nos minières de fer fort.
La libre sortie ne pourrait donc pas provoquer, comme pour le lin et pour la houille, un développement plus considérable de nos exploitations minières.
D'un autre côté, le minerai que nous ne fournissons pas à l'étranger, celui-ci peut-il se le procurer ailleurs ? Les forges du Nord de la France et de la province rhénane peuvent-elles trouver ailleurs les minerais de fer fort qui leur manquent ? Non, elles ne le pourraient pas : le minerai de fer fort manque au Nord de la France et, jusqu'à un certain point, à la partie du Zollverein qui nous avoisine.
A un autre point de vue, il n'en serait pas des minerais de fer comme des céréales ; le déficit qui résulterait dans la consommation intérieure de nos exportations en France et en Allemagne, ne pourrait jamais être comblé par des importations étrangères ; ces importations sont impossibles.
Vous voyez donc la différence totale qui existe entre ces questions qu'un même principe semble dominer et que les faits séparent entièrement. Nous avons à traiter une question spéciale et tout exceptionnelle.
Messieurs, quels sont les faits ? Nous possédons abondamment en Belgique, dans l'Entre-Sambre el-Mcuse, sur les bords de la Meuse et dans une partie de la province de Liège, du minerai de fer fort de première qualité.
Ce minerai de fer fort manque absolument au Nord de la France, il manque jusqu'à un certain point à la province rhénane. Il est tellement vrai que le minerai de fer fort manque au Nord de la France, au bassin de Maubeuge et de Valencienncs, que les maîtres de forge de Denain et de Maubeuge, ont dû faire revenir de ces minerais de fer fort de l'Espagne, en supportant des frais de transport qui élevaient le prix du minerai à 45 fr. Je cois que ce fait ne peut être contesté. J'ai interrogé des maîtres de forges ; ils sont unanimes à le reconnaître. Ces minerais de fer fort que nous possédons le long de la Meuse et dans l’Entre-Sambre-et-Meuse, manquent au Nord de la France.
Or, qu’arrive-t-il ?
C'est que nous exportons presque exclusivement en France et aussi en Allemagne, nos foules d'affinage produites à l'aide de ce minerai de fer fort.
Nous avions exporté pendant un certain temps des fontes de moulage produites avec du fer tendre et mélis. Mais qu'est-il arrivé ? Cest que depuis le nivellement des zones en France, c'est-à-dire depuis que la France admet la fonte d’Ecosse au même droit que la fonte belge, ces fontes d Ecosse ont remplacé sur le marché français les fontes de moulage de Belgique.
Vous pouvez vous convaincre, par les tableaux de statistique, que depuis 1853 une diminution considérable a lieu dans nos exportations de fonte vers la France. De 50,000 tonnes, chiffre de nos exportations en 1853, celles-ci sont tombées à 30.000 tonnes, en 1855.
Or, sur quoi porte cette diminution ? Exclusivement sur la fonte de moulage. L'Angleterre nous a dépossédés.
Nous n'exportons donc plus en Frauce que de la fonte d'affinage faite avec le fer de première qualité, avec le fer de Morialmé, de Florenne, de l'Entre-Sambre-et-Meuse. Si la libre sortie du minerai était décrétée, évidemment les maîtres de forges de la frontière française, au lieu de nous acheter notre fonte d'affinage, nous achèteraient nos minerais avec lesquels ils poduiront eux-mêmes cette fonte d’affinage de fer fort qui leur manque.
Et veuillez remarquer que nos minières de fer fort sont aussi près des hauts fourneaux français de Maubeuge, de Haumont, de Denain, que des hauts fourneaux belges. Par conséquent la question du prix des transports est nulle.
Si donc la libre entrée était décrétée, les maîtres de forges français enlèveraient nos minerais au lieu d(acheter nos fontes. Ce fait est affirmé par nos maîtres de forges, dans leur pétition, par nos chambres de commerce intéressées, par nos ingénieurs des mines et par le gouvernement.
Je viens de vous dire que nos fontes de moulage ne sont plus exportées en France depuis le nivellement du système des zones. Vous voulez aujourd’hui supprimer nos exportations de fonte d'affinage, de sorte qu'aucune exportation ne serait plus possible, soit vers la frontière de France, soit vers l'Allemagne.
N'oubliez pas que les maîtres de forges français sont protégés par un droit de 48 francs par tonneau qui frappe nos fontes à leur entrée en France, c'est-à-dire par un droit de 45 p. c. de la valeur. Dans le Zollverein, le droit qui frappe nos fontes est de 25 fr. par tonne.
A l'abri de cette énorme protection, il est évident que la France produirait elle-même la fonte d'affinage que nous lui vendons aujourd'hui avec les minerais que nous aurions remis à sa disposition.
Ainsi, messieurs, ne vous le dissimulez pas, c'est un fait, pour moi, constant que si la libre sortie du minerai était décrétée, les maîtres de forges de France et de la province rhénane s'empareraient de tous nos minerais en fer fort, à l'exclusion des hauts fourneaux belges qui verraient leur activité diminuer et qui devraient bientôt s'éteindre.
Messieurs, il est un autre fait sur lequel j'appelle toute votre attention. Si la libre sortie des minerais était admise, les prix des minerais de fer fort s'élèveraient momentanément d'une manière exagérée à cause de la concurrence effrénée que se feraient les maîtres de forges belges, français et allemands appelés au partage de la production de nos minières.
Ces prix élevés interdiraient bientôt à nos hauts fourneaux la production de la fonte d'affinage qu'ils ne pourraient plus fournir à nos laminoirs en quantités suffisantes.
La fabrication des fers laminés, pour le commerce, serait donc entravée ; toutes les branches de l'industrie métallurgique se trouveraient donc atteintes à la fois ; les hauts fourneaux s'éteindraient et les laminoirs souffriraient.
Quelle serait la conséquence de ces faits graves ? C'est que cette mesure qui aurait apporté une aussi grande perturbation dans l'industrie des fers, frapperait en même temps nos minières d'alluvion.
D'abord, comme dans la fabrication de la fonte d'affinage, les fers tendres et métis entrent pour 60 p. c., tandis que le minerai de fer fort n'entre que pour 40 p. c, il est clair que la cessation de la production de la fonte d'affinage en Belgique nuira autant aux minières de fer tendre et métis qu'aux minières de fer de première qualité.
En second lieu, le ralentissement forcé imposé à nos laminoirs qui manqueront de fontes d'affinage pour la confection des fers de commerce et des tôles, portera une grave atteinte à la production de nos minerais de toute qualité.
Les victimes de la mesure qu'on vous propose seront donc, en définitive, les propriétaires des minières. Lorsque la concurrence belge sera détruite, ils se trouveront à la merci du monopole des maîtres de forges du nord de la France et de la frontière rhénane. A une hausse factice et momentanée, succédera un avilissement de prix qui deviendra normal, à cause de l'absence de la concurrence belge. La situation de nos minières deviendra précaire, soumise à toutes les exigences des marchés étrangers, et l'on regrettera alors la mesure imprudente que quelques-uns auront provoquée.
La mesure, fatale à toutes les branches de la métallurgie, serait donc fatale aussi aux propriétaires de nos minières d'alluvion.
Et comment cette question s'est-elle introduite ici ? Par une pétition isolée de M. de Blois, vicomte d'Arandeau, qui réclamait l'ouverture de nos frontières maritimes pour quelques minerais des Flandres, comme nous avions permis, en 1853, l'ouverture de la frontière luxembourgeoise.
M. Julliot s'est plaint, avec raison, qu'on réformait notre législation douanière par pièces et morceaux, il s'est plaint de ce qu'il a nommé le gâchis introduit dans ces réformes sans plan préconçu et sans idée d'ensemble.
Mais c'est précisément ce dont je me plains aussi, et comment ne voit-il pas que sa proposition, jetée à l'improviste dans ce débat, est de nature à augmenter ce gâchis et cette confusion qu'il déplore ?
Cette question est grave, elle doit être examinée dans sa corrélation avec la législation sur les fers.
Or, cette législation fait partie du projet de loi de douanes élaboré par le gouvernement. Quoi de plus raisonnable que d'ajourner la question des minerais jusqu'au jour où la question des fontes et des fers nous sera soumise ?
Messieurs, la mesure proposée par la section centrale aurait trois conséquences inévitables : ia première serait la nécessité de décréter la libre entrée des fontes étrangères.
Vous savez que dans le projet de loi de douanes présenté à la Chambre et que le gouvernement à soumis à l'examen d'une commission d'enquête, on proposait de réduire à 3 francs le droit de 5 francs qui protège la production de nos fontes, et qui est trop élevé, j'en conviens ; eh bien, vous connaissez les alarmes que cette proposition a jetées parmi les maîtres de forges, vous connaissez les vives réclamations qu'ils ont élevées contre cette proposition.
Or, si la libre sortie du minerai était décrétée, évidemment au lieu d'un droit de 2 fr. sur les fontes, c'est la libre entrée qu'il faudrait établir. En effet, messieurs, nous aurions dû renoncer à l'industrie des hauts fourneaux, au moins en ce qui concerne la fonte d'affinage ; or comme déjà cette réduction dans notre tarif douanier qu'on demandait pour les fontes étrangères était motivée par la rareté et les prix élevés des fontes d'affinage en Belgique, qu'arriverait-il lorsque nous ne pourrions plus en produire ? C'est qu'on demanderait la libre entrée des fontes étrangères ; tous les maîtres de forges seraient unanimes, pour faire cette demande.
Mais il est une deuxième conséquence que la proposition de la section centrale renferme, c'est qu'il faudrait décréter à l'instant même la concessibilité des mines de fer.
En 1856 et en 1857, lorsque nous avons discuté la loi sur les mines, un long débat s'est engagé sur cette question : Faut-il concéder les mines de fer ou faut-il rester dans les termes de la loi de 1810 ? J'ai pris, part à la discussion et la Chambre a décidé alors qu'elle n'admettrait pas la concessibilité des mines de fer d'alluvion, et cela pourquoi ? Parce que les grandes sociétés métallurgiques se seraient emparées, par concession, de nos riches minières de fer, et auraient exercé ainsi un monopole en empêchant à l'avenir la création de nouveaux hauts fourneaux.
Si la libre sortie dn minerai de fer était décrétée, les hauts (page 835) fourneaux n'auraient plus qu'une ressource, qu'un moyen de se sauver, ce serait de demander la concessibililé des mines de fer, de réclamer le moyen d'entrer ainsi en partage avec les maîtres de forges français et allemands, de notre production de minerai de fer fort.
Il est une troisième conséquence, messieurs, de la proposition de la section centrale, et je viens d'y toucher, c'est la révision complète de la loi du 21 avril 1810. On a dit que cette loi était tombée en désuétude.
Je conviens que certaines parties de cette loi ne sont plus appliquées ; mais cette loi qui a fait en France l'objet d'une si longue préparation et de débats si approfondis ; celle loi que nous avons discutée de nouveau en 1837 et que nous avons maintenue dans ses parties principales ; cette loi régit encore aujourd'hui nos établissements métallurgiques et nos minières ; elle soumet les hauts fourneaux et les minières à un régime tout spécial ; elle a établi une solidarité complète, étroite, entre les hauts fourneaux et les minières.
Ainsi, lorsqu'on demande l'autorisation d'élever un haut fourneau, la loi de 1810 oblige le demandeur à faire la preuve près du gouvernement et du conseil des mines qu'il y a dans le rayon de l'usine des minières suffisantes pour alimenter ce haut fourneau sans nuire aux hauts fourneaux déjà existants, par une concurrence nouvelle et qui serait dangereuse.
En second lieu, en ce qui concerne les minières, la loi de 1810 dispose que si le propriétaire d'une minière ne l'exploite pas ou ne l’exploite pas d'une manière suffisante, les maîtres de forges, lié eux-même par cette loi, seraient autorisés à exploiter la manière.
Il est vrai qne cela est arrivé rarement ; vous en comprenez le motif : c'est que nos minières ont toujours été exploitées par les propriétaires.
La loi de 1810 repose donc sur ce principe, qu'il y a solidarité entière entre les hauts fourneaux et les minières. Elle a pour but d'assurer avant tout aux hauts fourneaux un approvisionnement certain du minerai.
Or, ne voyez-vous pas qu'en appelant les hauts fourneaux étrangers au partage de nos minières, en créant ainsi une concurrence imprévue que la loi de 1810 avait pour but d'empêcher, en privant nos hauts fourneaux des approvisionnements que le gouvernement leur avait assurés, ne voyez-vous pas que vous renversez le principe de la loi du 21 avril 1810, que vous en violez les dispositions essentielles et que vous méconnaissez les droits acquis ?
Je ne fais qu'indiquer cette question en passant ; elle est d'une importance extrême. Je dis que vous ne pouvez songer à décréter la libre sortie du minerai de fer, sans réviser en même temps toute la loi de 1810.
Je le demande à la Chambre : est-il possible, à propos d'une pétition de M. le vicomte d'Arondeau qui demande qu'on assimile par exception la frontière des Flandres à la frontière du Luxembourg et qu'on permette l'exportation, par la première frontière, d'uue certaine quantité de minerai des Flandres ; est-il possible, dis-je, de songera à discuter maintenant une question qui peut amener d'aussi graves conséquences ? Avons-nous des éléments d'appréciation suffisants pour la décider ? Evidemment non.
Je demande donc avec l'honorable M. Brixhe que la Chambre se borne à discuter et à admettre le projet de loi restreint, proposé par le gouvernement ; et qu'on ajourne à la révision du tarif des douanes la question de sortie du minerai.
Je viens de le démontrer, vous ne pouvez pas séparer la question du minerai de la question des fers. L'honorable M. Julliot demande l’établissement d'un droit d'un franc à la sortie ; or, il est fort possible, j'en conviens, que lorsque nous aurons à discuter sérieusement cette question, la Chambre renonce à la prohibition à la sortie ; et je suis même tenté de croire qu'elle substituera à cette prohibition un droit à la sortie. Mais d'après quels éléments établiriez-vous aujourd'hui un droit à làasortie ? Le droit proposé par l'honorable M. Julliot est d'un franc.
Il équivaut, d'après lui à 2 p. c. de la valeur. C'est un droit de balance et non de protection.
Mais d'après quelles données l'honorable membre a-t-il fixé ce chiffre ?
Il n'y en aurait qu'une de rationnelle ; il faudrait évidemment proportionner le droit de sortie au droit qui frappe nos fontes à l'entrée à l'étranger. Vous ne pouvez pas séparer ces deux questions. Pour fixer un droit de sortie il faudrait le calculer d'après un rendement à déterminer.
Or, le rendement des minerais varie ; pour le fer fort, il est peut-être de 46 à 48 p. c, ; le rendement du minerai métis de fer est de 30 à 40 p. c ; le rendement du minerai tendre est plus bas ; il faudrait arriver à une moyenne de rendement pour établir un droit rationnel à la sortie, de manière à être sûr que vous ne nuirez pas à une grande industrie. Encore une fois, possédez-vous ces éléments d'appréciation ? La question n'est pas mûre, elle est jetée à l'improviste dans le débat ; il est impossible que nous la discutions maintenant.
Je comprends que cette discussion puisse avoir lieu avec fruit, lorsque à propos du projet général sur les douanes, le gouvernement aura examiné cette question et qu'il l'aura examinée dans sa corrélation avec la question des fers ; le droit qui frappe les fontes étrangères doit être coordonné avec la législation qui régit la sortie de notre minerai ; d'un autre côté le droit de sortie de notre minerai doit être mis en rapport avec le droit d'entrée qui frappe nos fontes à l'étranger. Toutes ces questions devront être combinées, lorsque nous nous occuperons de jeter les bases de cette nouvelle législation douanière.
Je le demande encore, la Chambre est-elle préparée à aborder aujourd'hui l'examen de toutes ces questions ? Evidemment non. Nous prendrions une mesure les yeux fermés, et la Chambre est trop sage pour vouloir procéder ainsi.
La situation de l’industrie métallurgique est profondément modifiée depuis quelques années : nous jouissions en France, par le système des zones, en Allemagne par notre traité de 1844, de privilèges essentiels sur ces marchés pour nos fontes. Les zones ont été nivelées en France et notre traité avec le Zollverein est tombé.
Le résultat de ces deux faits, c'est que la fonte d'Ecosse nous a chassés du marché français et en partie du marché allemand. Nos exportations ont été réduites des deux cinquièmes. Il nous reste nos exportations en fonte d'affinage et c'est précisément celles-là que vous voulez frapper.
Voilà la situation de notre métallurgie, par rapport à nos relations extérieures qui sont très compromises. A l'intérieur, le gouvernement a proposé uu projet de loi abaissant d'une manière radicale le droit protecteur à l'égard des fontes étrangères.
Aujourd'hui, vous voulez frapper cette grande industrie par un autre côté, vous voulez lui enlever les minerais qui lui conservaient la supériorité sur les hauts fourneaux français et rhénans. Ne trouvez-vous pas que c'est trop d'expériences et d'épreuves à la fois et que vous dépassez toutes les limites de la prudence ?
Je crois donc que la Chambre fera sagement de se borner à adopter la proposition faite par le gouvernement La Chambre se rappellera qu'en 1853 le ministre des finances de cette époque, M. Liedts, avait cru pouvoir comprendre la sortie des minerais daas le projet de loi destiné à supprimer ce qui restait encore dans notre législation de droits ou de prohibitions a la sortie.
Après une discussion moins approfondie que celle-ci, malgré l'insistance du gouvernement qui voulait maintenir son principe, la Chambre ne l'a pas admis, elle a maintenu la prohibition à la sortie ; elle n'a pas voulu donner au gouvernement la faculté de lever la prohibition de sortie. Aujourd'hui à propos d'une proposition incidente sans portée réelle, on veut adopter une pareille mesure quand le gouvernement s'y oppose, quand les ingénieurs des mines sont unanimes pour la déclarer dangereuse, quand les chambres de commerce intéressées déclarent que vous allez nuire considérablement à une grande industrie, vous iriez, sans examen, sans étude suffisante, trancher une question des plus graves ! J’ai trop de confiance dans la sagesse de la Chambre pour croire qu'elle adhère aux propositions de la section centrale.
M. Vander Donckt. - Je ne puis pas admettre non plus la proposition qui vous est soumise par la section centrale. Les orateurs que vous venez d'entendre et qui l’ont repoussée ont traité la question d'une manière approfondie, mais ils ont fait une exception pour le minerai des Flandres, dont ils admettent la libre sortie. Je désire attirer l'attention de la Chambre sur une pétition qui se trouve déposée sur le bureau et par laquelle des industriels des Flandres ont demandé l'autorisation d'ériger uu haut fourneau dans les Flandres ; mais l'érection de cet établissement est subordonnée à la décision qu'on prendra quant à la libre sortie du minerai de fer. Si cette libre sortie est admise il sera impossible de commencer une industrie qui n'est pas exercée aujourd hui, ces industriels n'érigeront pas leur établissement, comme ils le disent dans leur pétition.
La plupart des honorables membres qui ont combattu la proposition de la section centrale se sont bornés à demander le maintien de la prohibition de sortie par les frontières autres que celles par lesquelles le gouvernement demande d'autoriser la libre sortie. Dans ce cas, on mettrait les Flandres dans une position exceptionnelle.
J'appelle l'attention du gouvernement sur ce point : ce serait accorder à des étrangers une faveur au préjudice des industriels des Flandres pour le cas où cette industrie pourrait prendre racine dans ces localités. C'est tout ce que j'avais à dire à cet égard.
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Je crois devoir répondre quelques mois à l'honorable préopinant ; il se méprend sur les conséquences de la mesure proposée à la Chambre. Elle ne peut nuire à personne, puisque aucun établissement métallurgique n'existe dans la Flandre orientale.
Il s'agit d'une simple autorisation qui serait accordée au gouvernement de permettre la libre sortie du minerai de fer de certaines localités de cette province. Si l'état de choses actuel se modifiait, le gouvernement aurait à aviser ultérieurement d'après les nouveaux faits qui se produiraient.
M. Visart. - Messieurs, après ce qu'a dit l'honorable M. Dechamps, qui est entré dans de grands développements sur la question dont la Chambre est saisie, et partageant son opinion sur tous les points qu'il a traités, ma tâche se trouve restreinte à peu de chose.
Je crois qu'on doit donner suite à la proposition du gouvernement, que nous devons admettre la sortie du minerai des Flandres, comme le demandait une pétition sur laquelle j'ai eu l'honneur de faire un rapport au nom de la commission d'industrie.
Nous ne donnerons pas, en agissant ainsi, une arme contre nous, comme on le ferait si on étendait la mesure aux autres frontières, ce qui permettrait d'enlever nos fers forts, et nous aiderions la classe ouvrière de la partie des Flandres, dont il s'agit, à subsister, cette classe (page 836) qui souffre encore aujourd'hui, frappée qu'elle est par le renchérissement des subsistances, venant à la suite de la perturbation qui a frappé le commerce des lins.
L'honorable M. Vander Donckt a dit qu'il ne fallait pas donner suite à la proposition du gouvernement, à raison du projet qu'on avait d'ériger un haut fourneau dans les Flandres près des gîtes de minerai dont il s'agit. Ce projet ne pourra pas, selon moi, se réaliser. Le transport du charbon serait trop onéreux pour laisser de la vitalité à une pareille entreprise ; la pierre calcaire devrait aussi y être conduite à grands frais : ce minerai est très pauvre, on déplace ordinairement le minerai vers les bassins houillers.
Je voterai donc contre la proposition de la section centrale, je voterai aussi contre la proposition d'ajournement, mais je donnerai mon assentiment au projet présenté par le gouvernement.
M. de Mérode. - Je suis grand partisan des intérêts agricoles, mais il n'est pas nécessaire à ces intérêts que l'on expose à la mine des intérêts métallurgiques aussi importants que ceux du Hainaut, spécialement du pays de Charleroi si connu par l'industrie de ses forges et fourneaux.
S'il y a, selon les indications de l'honorable M. Mascart, des mines dans l'arrondissement de Nivelles qui ne soient point exploitées et qui puissent trouver au-dehors un débouché manquant en Belgique, je pense qu'il serait à propos de ne pas interdire une exportation qui ne nuirait à personne.
Cependant, je ne crois pas que les mines de l'arrondissement de Nivelles trouvent hors des frontières un placement. Celles qui l'obtiendraient sont les mines de fer fort qui deviennent rares dans le pays. Je le sais, parce que je fréquente spécialement la contrée où sont les gîtes de ce minerai ; je le sais, en outre, parce que mon intérêt propre trouverait son avantage au transport libre du minerai de fer fort de Belgique en France qui me donnerait la facilité de l'exploiter dans deux fourneaux où l'on use du combustible forestier. Mais les raisons très lucidement exposées et en pleine connaissance de cause par MM. Brixhe et Dechamps ne me permettent pas, en ma qualité de représentant belge, de voter dans cette enceinte une mesure qnt serait très nuisible à la forgerie du Hainaut sans préjudice pour d'autres parties du pays.
Messieurs, depuis plus de 45 ans je vis dans les régions où se pratique la production du fer, et j'ai vu des usines périr par défaut de minerai ; c'est donc une question très grave à mes yeux que celle qui regarde leur exploitation et leur exportation.
Quant à l'exportation limitée que propose le gouvernement, je l'admets sans ajournement, parce qu’elle a été suffisamment examinée et qu’elle n’offre poinr de danger.
Mais je vous engage instamment, messieurs, à n'en point adopter d'autres d'une manière en quelque sorte fortuite, et sans que vous puissiez suffisamment en appréciez la portée. Les hommes qui ont en France une mision politique doivent soutenir les intérêts de leurs commettants.
Nous avons ici à remplir le même devoir, non seulement pour l'arrondissement qui nous envoie dans cette Chambre, mais pour tout le pays.
L'arrondissement que je représente possède des minerais communs qui ne sont pas exploités, mais la sortie de la mine de fer fort ne leur procurera aucun débouché.
Je ne demanderai donc pas l'amoindrissement des établissements métallurgiques du Hainaut, pour un résultat qui ne se réalisera point. Probablement assez d'occasions se présenteront de défendre les vrais besoins de l’arrondissement de Nivelles pour exciter à propos mon zèle en sa faveur.
M. Moreau. - Messieurs, (erratum, page 859) à voir ce qui se passe, je crains bien que jamais nous ne parvenions à modifier d'une manière efficace notre tarif douauier qui cependant a tant besoin de réformes profondes.
Je sais bien qu'en principe, qu'en théorie, on adopte en général des principes libéraux en matière douanière, que surtout on déclare mauvaise toute prohibition à la sortie.
Mais vienne l'occasion d'appliquer ces principes, de rendre ainsi fructueuse, si je puis le dire, la volonté si ferme qu'on manifeste, alors si des intérêts prives s'y opposent avec cette persistance tenace qui est toujours leur apanage, bientôt on fléchit, bientôt on trouve un prétexte plus ou moins futile pour reculer devant l’application des principes qu'on professe hautement.
Les plus timides demandent qu'on attende au moins des temps meilleurs, ou bien l'époque à laquelle une réforme générale sera introduite dans notre système douanier, les autres tâchent de nous effrayer, en nous disant. Prenez garde, vous allez jeter la perturbation dans une industrie vivace, la miner complètement, que sais-je ! l'anéantir. Ne voyez-vous pas à la frontière ces concurrents terribles qui n'attendent que le moment opportun pour nous dévorer ?
Et de cette manière, messieurs, le but que l'on reconnaît exister, que l'on constate, continue à se maintenir, heureux encore si au lieu de faire un pas en avant, ou ne recule poiut de deux.
Quant à moi, messieurs, je crois qu'il faut une bonne fois en finir avec toutes ces restrictions qui ne sont plus de notre siècle.
Nous ne vivons plus, grâce à Dieu, daus un temps où l'on croyait qu'en se réservant exclusivement certaines matières premières pour les usines indigènes, on les faisait seules prospérer ; dans on temps où l’on croyait que par ce moyen, on ruinait les établissements similaires étrangers, en les privant des matières indispensables pour les maintenir en activité.
A-t-on oublié que l'Angleterre, se faisant les mêmes illusions que les propriétaires de hauts fourneaux, avait prohibé jadis les laines et les machines à la sortie et qu'elle n'a pas tardé à reconnaître, par les faits qui se passaient sous ses yeux, qu'elle s'était trompée, et qu'en agissant ainsi, elle ne faisait que nuire à ses propres intérêts ?
N'est-il pas exact de dire que si la houille et la fonte étaient prohibées à la sortie nous verrions bientôt ces industries actuellement si prospères languir ; nous verrions beaucoup de houillères cesser de travailler, la plupart des hauts fourneaux s'éteindre, de manière que si même le prix de ces marchandises diminuait, la baisse ne serait que momentanée ?
C'est donc à la liberté qu'on a laissée aux transactions qui ont pour objet ces matières premières qu'on doit principalement attribuer la prospérité de ces établissements et les bonnes conditions de production dans lesquelles ils se trouvent.
Eh bien, adoptez pour le minerai de fer les mêmes mesures et vous verrez ces minières se multiplier, ces exploitations s'agrandir, employer les procédés les plus perfectionnés, les plus économiques, et de cette manière, produire mieux et à meilleur compte ; ce qui, sans nul doute, sera profitable aux maîtres de forge indigènes eux-mêmes.
C'est là, messieurs, un des motifs qui ont déterminé la section centrale à amender, comme elle l'a fait, le projet de loi.
Ce que demande la section centrale n'est que l'extension de la mesure proposée par le gouvernement.
En effet, un principe est déposé dans la loi de 1853, c'est, d'une manière générale, la prohibition du minerai de fer qu'on y décrète, sauf une seule exception.
Que fait aujourd'hui le gouvernement ? Il s'est dit. La mesure générale établie par cette loi n'est pas bonne, elle ne donne pas satisfaction à beaucoup d'intérêts respectables, car, à une première exception, il faut y ajouter une seconde, que sais-je ! dans quelque temps, peut-être une troisième, une quatrième, si des intérêts lésés trouvent des échos dans cette Chambre.
Eh bien, de son côté, la section centrale, abondant dans le sens du gouvernement, fait un pas de plus pour avoir quelque chose de permanent, elle a pensé que la prohibition à la sortie du minerai de fer ne pouvait satisfaire tous les intérêts et elle vous demande qu'au lieu de faire tant d'exceptions, vous alliez un peu plus loin, elle vous demande qu'au lieu d'ouvrir un dixième, un cinquième de nos frontières au minerai de fer, vous lui permettiez de franchir la frontière dans toutes les directions ; elle a pensé que ce serait là le seul moyen rationnel de donner de la stabilité à nos lois douanières ; car rarement on change ce qui est bon, vrai et juste.
Il y a même plus dans le cas dont il s'agit, c'est qu'en adoptant le projet de loi, vous méconnaissez le principe d'égalité de tous devant la loi.
Lorsque l'honorable M. Thibaut proposa un amendement à la loi sur les denrées alimentaires pour permettre la sortie du grain du pays par mer, que lui répondit M. le nanisire de l'intérieur ?
« Il me paraît impossible de soumettre les propriétaires belges à un double régime qui ferait que ceux qui seraient voisins de la mer auraient la libre et entière disposition de leurs produits, pourraient en tirer un prix plus élevé, en les vendant au-dehors, tandis que les propriétaires habitant le milieu ou l'autre extrémité du pays n'auraient plus la libre disposition de leur propriété, la verraient frappée d'une prohibition de sortie, » et M. le ministre de l'intérieur concluait avec raison en disant : « Ce double régime n'est pas admissible. »
Or, changez quelques mots, quelques expressions et les paroles de l'honorable ministre de l'intérieur s'appliqueront au projet de loi.
Comme lui, nous disons : Ce double régime auquel M. le ministre des finances veut soumettre les propriétaires des minerais du fer est inadmissible, ceux qui sont voisins de hauts fourneaux doivent avoir, comme ceux qui en sont plus éloignés, ia liberté de disposer de leur propriété, de retirer un prix plus élevé de leurs produits, en les vendant au-dehors.
Le langage vrai de l’honorable ministre de l'intérieur est donc la condamnation formelle du système que veut faire prévaloir son collègue des finances.
Aussi je ne doute pas que, conséquent avec lui-même, il appuiera la proposition de la section centrale.
L'honorable M. Dechamps a dit que si l'amendement de la section centrale était adopté il faudrait réviser la loi de 1810. Je ne partage pas, messieurs, cette opinion.
L'amendement de la section centrale ne touche en rien à ia loi de 1810, à l'ensemble de notre législation sur les mines, parce que les articles 59 et suivants de la loi de 1810 ne sont plus en vigueur, et c'est ce que semblent reconnaître eux-mêmes ceux qui combattent la proposition de la section centrale.
Car admettons que ces articles de la loi de 1810 soient encore aujourd'hui applicables aux exploitations de minerai de fer.
Admettons que le propriétaire du fonds qui contient du minerai de fer d’alluvion soit tenu de l'exploiter en quantité suffisante pour le fournir aux besoins des usines établies dans le voisinage.
Admettons que lorsque les propriétaires extrairont du minerai de fer (page 837) pour le vendre aux maîtres de forges, le prix doive en être réglé entre eux de gré à gré ou par des experts.
S'il en est ainsi, en quoi, je vous le demande, la prohibition à la sortie de cette substance métallique serait-elle préjudiciable aux maîtres de forges ?
Comment sa suppression leur serait-elle nuisible, puisque ceux-ci, en invoquant les articles 59 et suivants de la loi de 1810, auraient toujours la certitude d'avoir des approvisionnements suffisants pour alimenter leurs usines et cela à des prix avantageux, à des prix réduits, à des prix, comme le porte la loi, fixés par des experts à défaut de convention ?
D'après leur manière même de voir, nos adversaires ont donc mauvaise grâce de s'opposer à la libre sortie d'une chose qui ne peut pas leur faire défaut et qu'ils pourront toujours obtenir à meilleur compte que leurs concurrents étrangers.
Mais, disent-ils, vous allez fournir aux maîtres de forges français ce qui leur manque, vous allez les placer dans des conditions meilleures de production que nous.
En d'autres termes il faut que nous ayons tout le minerai belge à notre entière disposition, pour que nous puissions prospérer, il faut que nos intérêts privés et excessivement privilégiés déjà, l'emportent sur ceux de tous les propriétaires de minerai de fer aux droits desquels nous voulons être complètement subrogés.
Voilà quelles sont les prétentions exagérées des maîtres de forges, qui se font les mêmes illusions que les fabricants anglais qui jadis, par les mêmes motifs, demandaient la prohibition à la sortie de la laine et des machines.
Ce sont là des exigences que l'expérience a condamnées depuis longtemps.
L'honorable M. Deschamps, vient de reproduire les observations consignées dans les rapports des chambres de commerce et ceux de messieurs les ingénieurs des mines.
Examinons aussi brièvement que possible la valeur de ces documents. Le gouvernement a consulté cinq chambres de commerce, celles de Liège, Mons, Tournai, Charleroi et Namur.
Les trois premières sont favorables à la proposition de la section centrale, les deux dernières seulement la combattent.
Il n'était pas bien difficile de prévoir ce résultat et il n'y a nul doute que si on avait demandé l'avis des autres chambres de commerce, ils n'eussent été conformes à l'opinion de la section centrale.
Constatons donc d'abord que la majorité des chambres de commerce consultées approuve l'amendement que nous proposons.
De plus, la chambre de commerce de Charleroi elle-même reconnaît avec franchise que la prohibition à la sortie du minerai de fer est une mesure contraire aux principes économiques qu'elle a adoptées.
Mais dominée, comme celle de Namur, par la crainte que la France ne nous enlève nos bons minerais de fer fort, au moyen duquel elle fabriquerait toutes les espèces de fonte que nous lui vendons, ces chambres de commerce ne peuvent appuyer une proposition qui causerait, disent-elles, la ruine de notre industrie sidérurgique.
Pour prouver ce qu'elles avancent, elles se livrent à des calculs d'où il résulterait que les maîtres de forges français retireraient tant d'avantages de la libre sortie du minerai de fer que nous ne pourrions plus leur tenir concurrence sur leur propre marché.
Messieurs, quant à moi, il suffirait que la prohibition du minerai de fer consacrât une injustice, pour ne pas la maintenir. Toutefois, afin de dissiper les vives alarmes de ces deux chambres de commerce, j'ai pris aussi des renseignements à bonnes sources et voici ce que m'ont appris des hommes très compétents en cette matière.
Le minerai de fer étant, comme vous le savez tous, une matière pondéreuse et de peu de valeur, ne peut être transporté avantageusement qu'à de faibles distances.
Quand on doit faire venir d'un endroit distant de plus de 25 lieues, sa valeur est déjà doublée, d'où naturellement il résulte qu'il n'y a que les usines françaises les plus rapprochées de la frontière belge qui puissent se procurer du minerai en Belgique.
Or quelles sont ces usines ?
On peut, ce me semble les ranger en trois catégories : Les premières sont celles des Ardennes, Les secondes, celles de Valenciennes,
Et les troisièmes celles qui sont situées dans les environs de Maubeuge.
Les usines des Ardennes ont de l'excellent minerai de fer à leur disposition ; ainsi, de ce côté, pas de ces craintes que l'on met en avant.
Celles de Valenciennes traitent en général des minerais peu riches, qu'ils retirent des environs de Valenciennes même, de Bavay et du Boulonais.
Leur position géographique, par rapport au bassin minier de Sambre-et-Meuse ; sera toujours un obstacle à ce qu'elles se fournissent de minerais belges autres que ceux du pays de Tournai ou des Flandres.
Restent donc les hauts fourneaux de Maubeuge ; ceux-ci, qui sont échelonnés le long de la Sambre, sont, à la vérité, dans de bonnes conditions pour recevoir les produits miniers de Sambre-et-Meuse.
Mais ils emploient des limonites hydratés dont le rendement n'est que de 24 à 25 p. c, et qui ne leur coûtent, rendus à pied d'oeuvre, que fr. la tonne.
Ces minerais leur donnent du bon fer, qui ne le cède en rien à celui qui est fabriqué à Charleroi.
Or, quel intérêt ces hauts fourneaux auraient-ils de s'approvisionner de minerais de fer belges, si ce n'est celui d'avoir, non pas comme le disent les chambres de commerce, des minerais de fer fort, mais bien des minerais plus riches dont le rendement soit plus considérable que ceux dont ils font usage ?
Ainsi si ces usines viennent nous acheter des minerais de fer, ce seront ce qu'on appelle des mines violettes qui contiennent jusqu'à 50 p. c. de métal.
Ce qu'il leur faut, ce ne sont pas, comme l'avance l'honorable M. Dechamps, des minerais de bonne qualité ou de fer fort ; non, elles en ont qui leur reviennent à meilleur marché qu'en Belgique, il ne leur coûte que 9 francs la tonne, tandis que le minerai de même qualité donnant 30 à 32 p. c. de fer coûte rendu à Charleroi 18 francs la tonne. Ainsi ce minerai transporté à Maubeuge aurait là une valeur de 22 fr. et si les maîtres de forges français font venir même d'Espagne des minerais au prix exorbitant de 45 fr., ce n'est pas parce qu'ils renferment du fer fort, mais parce qu'ils sont extrêmement riches en métal.
Ces faits vous démontrent que les hauts fourneaux de Maubeuge ne nous enlèveront pas un kilogramme de minerai de Sambre-et-Meuse. Mais ils pourront venir s'approvisionner sur les bords de la Meuse qui renferment des minerais très riches en mines violettes et dont le rendement considérable compensera peut-être les frais d'un transport assez long.
Voilà, messieurs, à quoi se réduisent les fortes appréhensions des deux chambres de commerce.
En résumé, si vous permettez la libre sortie du minerai de fer, ceux de Tournai et des Flandres, qui n'ont aucune valeur pour nous, pourront aller à Valenciennes, et ceux des bords de la Meuse se diriger vers Maubeuge.
Et la chambre de commerce de Namur elle-même est forcée de reconnaître que ces mines violettes forment des gisements inépuisables.
Enfin un autre avantage qui serait la conséquence de l'adoption de la mesure proposée par la section centrale, c'est que des minières de fer qui sont situées en Belgique près de la frontière française entre Mons et Maubeuge pourraient-être avantageusement exploitées.
Ces filons ne sont que le prolongement de ceux qu'on extrait déjà en France ; nos hauts fourneaux même pourraient donc profiter de cette exploitation, et des richesses ne resteraient pas inutilement enfouies dans le sein de la terre.
Vous parlerai-je maintenant des rapports des ingénieurs des mines ? J'en dirai peu de chose, car vraiment, ils ne me paraissent avoir été produits dans ce débat, comme on dit au barreau, que pour l'opportunité de la cause.
Cela est, ce me semble, apparent pour tout le monde ; ils ne font d'ailleurs que reproduire, eu les exagérant, les observations des chambres de commerce de Namur et de Charleroi ; à peine même consentent-ils à laisser sortir le minerai de la Flandre orientale, car, disent-ils, ce n'est qu'à titre d'essai et provisoirement qu'il faut aller jusque-là.
Si, messieurs, les fatales prédictions que renferment ces rapports ont quelque fondement, il est très heureux que le ministère actuel soit arrivé au pouvoir en temps opportun pour défendre les intérêts des maîtres de forges et empêcher la ruine de nos hauts fourneaux ; et n’eût-il fait que cela de bon, que le pays devrait s'en féliciter.
Car l'honorable prédécesseur de M. le ministre des finances maintenant en fonctions avait une conviction sur ce point tout autre que la sienne, lorsque en 1853 il a proposé la libre sortie du minerai de fer.
Cependant, il m'est bien permis de croire qu'il n'a pas agi à la légère, et qu'au contraire il avait consulté toutes les autorités compétentes avant de prendre une résolution de cette importance.
L'on me concédera donc que, s il a fait cette proposition, c'est qu'alors on ne pensait pas, comme aujourd'hui, que la libre sortie du minerai de fer pouvait jeter la perturbation dans l'industrie sidérurgique si florissante et le ruiner complètement.
Du reste, messieurs, pour apprécier quelle foi vous devez ajouter à ces rapports, vous n'avez qu'à ouvrir celui de l'ingénieur du troisième district : et vous y lirez que la mesure proposée aura pour effet de supprimer nos débouchés en Allemagne.
Et cependant vous n'avez pas oublié qu'en 1850 la frontière du Zollverein a été ouverte au minerai de fer et que nous avons conservé nos débouchés dans ce pays.
Je vous le demande, en présence de ce fait que devienne les assertions de ces rapports ?
D'ailleurs s'il fallait adopter le système des maîtres de forges, à quoi en serions-nous réduits ?
Pour être conséquents nous devrions-nous opposer à la construction de tout canal, de tout chemin de fer qui feraient arriver chez nous leurs produits à meilleur compte ou pourraient leur procurer à plus bas prix les matières premières dont ils font usage, teues que la houille, par exemple.
Je crois, messieurs, vous avoir démontré qu'il n'existe aucun motif plausible pour ne pas faire disparaître de notre législation douanière la prohibition à la sortie du minerai de fer, que les craintes de deux chambres de commerce et des ingénieurs de mines sont chimériques et que leurs alarmes n'ont aucune espèce de fondement.
Et en fût-il même autrement, maintenir cette prohibition, c'est faire chose injuste, contraire à l'égalité de tous les intéressés devant la loi (page 838) conserver un privilège exorbitant au détriment du plus grand nombre et en faveur de quelques intérêts privés ; c'est ce que je ne puis admettre.
- La séance est levée à 5 heures.