(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)
(Présidence de M. Delehaye.)
(page 1119) M. Calmeyn procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.
M. Vermeire donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée.
M. Calmeyn communique l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« Le sieur J.-P. Vansull, sergent au régiment du génie, né à Arnhem (Pays-Bas), demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« Le sieur Demeyer demande une modification à la loi sur la milice, dans le but de faciliter le remplacement des miliciens par des militaires dont le terme de service est sur le point de finir. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Les conseils communaux et plusieurs habitants de Soye, Hawenne, Floriffoux, Malonne, Temploux, Spy, demandent qu'on examine si la mise en activité des établissements de produits chimiques ne devrait pas être restreinte à certaines époques de l'année, et si la surveillance actuelle est suffisante. »
M. de Liedekerke. - Cette pétition émane de six grandes communes du bassin de la Sambre et des hauteurs qui l'avoisinent ; elle proteste contre l'effet désastreux des fabriques de produits chimiques. Je crois que des pétitions du même genre ont été adressées à la Chambre. A cause du grand intérêt et de l'urgence de la question, je demande un prompt rapport sur cette pétition et sur les autres pétitions. La pétition porte plus de mille signatures.
- La pétition est renvoyée à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.
« M. Delehaye demande un congé de quelques jours pour cause d'indisposition. »
- Ce congé est accordé.
M. le ministre des travaux publics (M. Dumon) présente un projet de loi portant cession à la société concessionnaire du chemin de fer de Lierre à Turnhout de la section du chemin de fer comprise entre Lierre et Contich.
- La Chambre donne acte à M. le ministre des travaux publics de la présentation de ce projet de loi, en ordonne l'impression et la distribution, et le renvoi à l'examen des sections.
M. Vander Donckt. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des pétitions sur un grand nombre de pétitions relatives aux dépôts de mendicité.
Je propose à la Chambre d'en ordonner l'impression aux Annales parlementaires, et d'en joindre la discussion à celle de l'article du budget de la justice relatif aux frais d'entretien et de transport des mendiants.
- Cette proposition est adoptée.
M. le président. - La section centrale conclut à l'adoption du budget sans ancun amendement. La discussion générale est ouverte. La parole est à M. Osy.
M. Osy. - La section centrale a demandé au gouvernement d'introduire le système anglais de l'application des timbres mobiles aux effets de commerce. Je conçois que, par suite du changement de ministère, le ministère actuel n'ait pu s'occuper de cette affaire. Mais je demande que M. le ministre des finances veuille bien s’en occuper, parce que cela facilitera les transactions commerciales, et même les occupations des employés du gouvernement seront diminuées.
J'ai à entretenir la Chambre d'un objet qui m'a frappé, et qui est beaucoup plus important.
Vous savez que par la loi de 1846, d'organisation de la cour des comptes, on a décrété un grand-livre de la dette publique, et que par l'article 19 de cette loi d'organisation do la cour des comptes, vous avez stipulé qu'un double du grand-livre serait déposé à la cour des comptes.
L'article 19 dit positivement que les transferts des titres d'inscription doivent, comme les titres de cautionnement, être visés par la cour des comptes et que, sans cela, ils n'ont pas de valeur. Voici, en effet, ce que porte cet article :
« Un double du grand-livre de la dette publique est déposé à la côïir des comptes.
« Elle veille à ce que les transferts et les remboursements ainsi que les nouveaux emprunts y soient exactemeat inscrits.
« Toutes les obligations d'emprunt ou de conversion et les certificats de cautionnement n'auront de force qu'autant qu'ils soient revêtus du visa de la cour des comptes. »
Pour ce qui est des cautionnements, tous les certificats sont visés par la cour des comptes et remplissent- le vœu de la loi ; mais, pour une affaire beaucoup plus importante, le transfert de la dette publique, on ne s'est pas conformé aux prescriptions de la loi. Je tiens en mains des titres d'inscriptions ; le directeur du trésor et le directeur de la dette publique certifient seuls que la transcription a eu lieu. Certainement ces fonctionnaires offrent toute garantie ; mais il y a plus de garanties encore quand vous avez le visa de la cour des comptes. La cour doit tenir le double du grand-livre ; vous comprenez que si le visa des inscriptions était fait à la cour des comptes, ce corps viserait les pièces qui sont réellement en circulation et qu'il connaît, tandis que le grand-livre n'est formé à la cour des comptes que par de simples lettres que lui écrit l'administration des finances, et il n'y a pas de visa de la cour.
J'engage M. le ministre des finances à régulariser le plus tôt possible l'exécution de l'article 19 de la loi de 1846. Je sais qu'il y a déjà beaucoup d'inscriptions dans les mains des particuliers et que la régularisation sera une opération assez longue ; mais pour donner toute garantie aux administrations et aux particuliers, il faut que la loi soit exécutée.
Messieurs, lorsqu'on remet, au département des finances, des titres au porteur de la délie de 4 1/2, pour obtenir une inscription nominative, ces lettres doivent être conservés dans les bureaux de l'administration pour être restitués à leurs propriétaires lorsqu'ils en font la demande. En 1852, quand l'honorable M. Frère a fait l'emprunt de 26 millions à 5 p. c, il n'a pas consenti à ce que les titres, une fois convertis, pussent être reconstitués au porteur.
Je pense que M. le ministre des finances d'alors aura été effrayé de l'opération qui se fait aujourd'hui à l'administration des finances. En effet, je me suis fait rendre compte de ceux qui se trouvent aujourd'hui inscrits en nom, et dont les titres au porteur doivent être conservés au département des finances. Je ne vous parle ni du 2 1/2, ni du 3, ni du 4 p. c, parce qu'on ne peut plus, une fois qu'on a donné l'inscription, transcrire au porteur. Il en est de même de l'emprunt fait en 1852 par l'honorable M. Frère. Mais, en ce qui concerne le 4 1/2 de 1852 et de 1844, d'après la teneur des obligations, le gouvernement est obligé de rendre les titres au porteur pour les inscriptions. Eh bien, d'après la note que je tiens ici, je trouve inscrite une somme de 53 millions en nom, dont l'administration des finances est obligée de conserver 53 millions en litres au porteur dans les bureaux de l'administration. Comme votre commissaire à la caisse d'amortissement, je suis obligé d'aller de temps en temps à l'administration des finances, pour vérifier quelques valeurs qui entrent dans les attributions de l'administraiion de la caisse d'amortissement et des consignations, j'ai vu où sont déposées les valeurs ; ces grandes valeurs appartenant au public, dont le gouvernement est dépositaire, se trouvent dans une cave où nous ne voudrions déposer aucune valeur.
Nous avons été obligés de recommander quelques changements, parce qu'il aurait été dangereux de laisser les choses en l'état où elles sont en cas d'incendie. Le gouvernement doit prendre des mesures pour faire cesser toute inquiétude sous ce rapport. L'état de choses que je signale peut remonter très haut, car depuis 1846 aucun des ministres des finances, qui se sont succédé, n'a vérifié les valeurs qui se trouvent déposées à l'administration ; de sorte que si on constatait un déficit résultant d'infidélités ou d'erreurs, on ne saurait sur qui faire retomber la responsabilité. Celui qui se trouverait à la tête de l'administration pourrait dire : L'enlèvement a eu lieu sous mon prédécesseur ; le prédécesseur en dirait autant, de sorte qu'il n'y aurait pas de responsabilité.
Je vois dans le rapport de la section centrale qu'une section a appelé l'attention de l'administration des finances sur la convention avec la Banque Nationale.
J'engage M. le ministre à profiter de l'occasion pour faire un arrangement avec la Banque Nationale afin de déposer dans cet établissements les valeurs qui se trouvent maintenant dans une simple cave de l’hôtel des finances ; la Banque les conserverait comme elle conserve les écus qu’elle a en dépôt.
Le gouvernement et le public seront certains qu'il ne pourra pas y avoir de pertes.
Je veux simplifier, tout en la respectant, l'application de la loi de 1846.
Aux termes de la loi les inscriptions de 4 et demi doivent être visées à la cour des comptes. Je voudrais que l’administration du grand-livre et l'administration des finances n'eussent rien à conserver ; que quand on demandera des titres au porteur, on donne un mandat titre sur la Banque Nationale visé par la cour des comptes.
En donnait son visa la cour sait que le compte d'un tel est (page 1120) diminué d'une somme de... Vous avez un contrôle et vous n'avez pas l'inquiétude d'être dépositaires de titres pour une valeur considérable.
En exécution du dernier paragraphe de l'article 19, quand M. le ministre fera la convention avec la Banque Nationale, je l'engage à tâcher de s'arranger avec cet établissement pour qu'elle se charge de la conservation des valeurs qui sont entre les mains de comptables très honorables, mais qui, étant obligés de s'absenter, doivent donner la clef à d'autres personnes, ce qui diminue singulièrement leur responsabilité.
Quand une fois les valeurs seront déposées à la Banque, le grand-livre donnera des mandats sur elle ; ces mandats seront visés par la cour des comptes, il y aura garantie pour le trésor qt pour les particuliers. •
J'attire l'attention de M. le ministre sur cet objet. Je ne demande pas une réponse immédiate, je comprends qu'il lui faille le temps de réfléchir.
Je dis, messieurs, qu'il est facile de le faire cette année, puisque le gouvernement est obligé de conclure une nouvelle convention avec la Banque Nationale avant le 31 décembre.
Des sections croient que la Banque Nationale pourrait faire le service de caissier de l'Etat à une somme moindre que celle qui est stipulée. Sous ce rapport, on pourrait peut-être tomber plus facilement d'accord avec la Banque en lui donnant un nouveau service qui exigera plus de surveillance et une augmentation d'employés. Vous n'aurez pas une économie dans le budget, mais vous serez débarrassés d'un grave sujet d'inquiétude. Je suis persuadé que tous les membres de cette Chambre qui ont occupé le ministère des finances, s'ils veulent réfléchir aux risques qu'ils ont pu courir, seraient charmés de voir régulariser cette affaire.
M. T'KInt de Naeyer, rapporteur. - Messieurs, la section centrale avait déjà appelé l'attention de M. le ministre des finances sur le renouvellement de la convention avec la Banque Nationale. M. le ministre des finances nous ayant fait connaître que des négociations étaient entamées à ce sujet, la question a été réservée. Il prendra sans doute en très sérieuse considération les observations qui viennent d'être présentées par l'honorable M. Osy.
Il est un autre point sur lequel je désire également dire quelques mots.
J'ai sous les yeux le rapport présenté, le 27 mars 1855, sur les opérations et l'administration de la caisse des dépôts et consignations pendant l'année 1854. Il en résulte que le service des dépôts et consignations n'a fait que s'accroître depuis la mise à exécution de la loi du 15 novembre 1847. C'est ainsi que les consignations qui, en 1850, ne se sont élevées qu'à 798,764 fr. ont produit, en 1854, 2,980,361 fr. Aussi voit-on figurer au budget des recettes et dépenses pour ordre de l'exercice 1856 une augmentation d'un million, et le budget des voies et moyens du même exercice estime à 30,000 fr. l'accroissement de recette qui doit être la conséquence de l'augmentation des versements à la caisse des dépôts et consignations.
Mais d'un autre côté, il ressort des observations de la commission de surveillance qu'un grand nombre de dépôts, entre autres ceux provenant des faillites et des mineurs, qui d'après les lois existantes, devraient être versés à la caisse des dépôts et consignations, sont encore soustraits à sa surveillance.
Je crois devoir appeler l'attention de M. le ministre des finances sur ce point, et je l'engage à aviser aux moyens de mettre l'institution à même de rendre plus de services.
Telle semble avoir été l'intention du législateur en décrétant la loi du 15 novembre 1847, présentée, je pense, par l'honorable ministre des finances actuel.
Les articles 8 et 9 de cette loi prouvent que l’on a voulu que tous les fonds des dépôts et consignations fussent centralisés dans une seule et même caisse, et le rapport de la section centrale manifeste le désir de voir simplifier les formes admises en matière de consignation, afin, dit le rapport de la section centrale, d'étendre les services que cette institution est appelée à rendre.
On doit savoir gré à l'honorable M. Liedts des mesures qu'il a prises en ce qui concerne le dépôt des fonds disponibles des sociétés de secours mutuels.
Le mode de procéder spécial, introduit par la circulaire du 6 janvier 1855, aux conservateurs des hypothèques, permet le versement à la caisse des consignations, de ces fonds ainsi que leur retrait, à des conditions aussi simples que peu dispendieuses.
J'engagerai M. le ministre des finances à examiner s'il n'y aurait pas moyen d'étendre ce mode à d'autres consignations, volontaires. Cela me paraît très praticable.
La caisse des consignations de France, dont l'administration a de si vastes proportions, a de plus la règle de tous les fonds des caisses d'épargnes dont l'organisation laisse encore tant à désirer en Belgique. Une extension d'attributions de la caisse des dépôts et consignations, dans le sens de ce qui se fait en France, mais avec certaines modifications, offrirait des avantages incontestables, non seulement aux intéressés, mais même au point de vue du crédit public.
Centraliser dans une seule et même caisse tous les fonds de dépôt, tous les capitaux des tiers, qui maintenant sont versés dans diverses caisses, les assujettir à un mode d'administration, à une surveillance unique, introduire, en un mot, l'unité qui est une force, dans la régie des fonds d'une même nature, c'est, me paraît-il, éviter bien des inconvénients et faciliter les opérations que le ministre des finances médite dans l'intérêt de l'Etat. Je crois que, sous ce rapport, il y a quelque chose à faire.
M. Deliége. - Messieurs, je sais que la Chambre a hâte d'en finir, nous sommes à la fin d'une session, je serai très court.
Mon intention était d'abord de m'occuper du point qui a été traité par l'honorable M. Osy, à savoir l'application du système anglais aux timbres des effets de commerce. L'adoption de ce système en Angleterre a ému plusieurs chambres de commerce. La chambre de commerce de Liège, entre autres, a envoyé au gouvernement un mémoire sur la question.
Comme je suppose que cette affaire ne nécessitera pas beaucoup d'études, j'espère que M. le ministre des finances pourra nous indiquer l'époque à laquelle il présentera à la Chambre un projet de loi et que celle époque sera la plus rapprochée possible.
J'aborde un second point traité dans le passage suivant du rapport de la section centrale ; « Quant à l'indemnité pour le caissier de l'Etat, la section centrale espère que M. le ministre des finances parviendra à régler cet objet de manière à ne pas atteindre le maximum de 200,000 francs. »
Vous savez, messieurs, que la Banque Nationale est en instance pour obtenir une augmentation d'émission de papier. Elle demande de pouvoir émettre pour dix millions en sus de la circulation actuelle.
Je crois qu'on pourrait saisir cette circonstance pour arriver à la réduction de la somme payée par le trésor à la Banque Nationale pour les services qu'elle lui rend.
J'indique ce moyen ; c'est une question à étudier.
Un troisième point est traité dans le rapport de la section centrale ; il a trait à la somme payée au receveur de Spa par la perception de la somme très forte qui provient des jeux de Spa.
J'ignore quelles sont les intentions du gouvernement relativement aux jeux de Spa ; j'ignore si la concession sera renouvelée. Mais il est évident que la remise que le receveur obtient sur cette somme est trop forte.
Il faut donc prendre des mesures pour diminuer cette charge du trésor qui est excessive. Je crois qu'on le pourrait en faisant verser directement à Verviers, comme on l'a dit déjà, les sommes provenant des jeux de Spa, sommes qui se sont élevées pendant la seule année 1849, à 260,000 fr. et que les inconvénients signalés par M. le ministre des finances peuvent facilement être évités. M. le ministre des finances a dit, dans les renseignements qu'il a fait parvenir à la section centrale, que l’agent du trésor à Spa n'avait pas mission à l'effet de poursuivre les concessionnaires dans le cas où ils seraient en retard de verser ce qu'ils doivent. Jamais ces concessionnaires ne sont en retard ; ils payent à l'instant même, mais il me semble qu'il serait convenable de donner à l'agent du gouvernement tous les pouvoirs dont un tel fonctionnaire doit être investi. Une loi serait nécessaire, mais nous faisons des lois pour moins que cela.
Enfin, messieurs, je dois indiquer un quatrième point. Il existe dans les campagnes une certaine quantité de billets de l'emprunt forcé de 1848 ; ce sont généralement des billets de cent francs ; la somme de ces billets est peu considérable. Le gouvernement ferait bien de prendre une nouvelle mesure, de donner aux porteurs un nouveau délai pour faire l'échange de leurs obligations ; ce serait là une chose utile et une chose juste. Il y a seulement sept ans que ces obligations ont été émises, et déjà elles sont frappées de déchéance ; je dis qu'il faudrait accorder un nouveau délai aux cultivateurs, gens peu habitués aux affaires. Je sais bien qu'on ne peut pas faire une exception pour les cultivateurs, mais il n'y aurait aucun inconvénient à accorder ce délai à tout le monde.
M. Lelièvre. - Messieurs, le budget des finances me donne l'occasion d'appeler l'attention du gouvernement sur la nécessité de présenter dans un bref délai un projet de loi sur la pêche, ayant pour objet d'abroger la législation en vigueur sur cette matière et de la remplacer par des dispositions en harmonie avec nos institutions. La pêche est encore réglée chez nous par l'ordonnance de 1669 qui, abrogée en partie par le Code forestier, doit encore l'être sur la matière dont nous nous occupons.
Les prescriptions de l'ordonnance répugnent à nos moeurs. Elles prononcent des peines véritablement exorbitantes. C'est ainsi que non seulement la pêche, même à la ligne flottante, tenue à la main, est prohibée en temps de frai ; mais ce fait inoffensif est puni de la peine d'un mois d'emprisonnement, qui ne peut même être réduite par le juge.
Aussi en France depuis longtemps la législation sur la pêche a été révisée, et sous ce rapport la Belgique est restée en arrière.
J'engage donc M. le ministre des finances à s'occuper de cet objet important, qui mérite toute sa sollicitude. De graves intérêts réclament sur ce point un projet de loi qui est attendu avec impatience.
Je crois devoir aussi signaler à M. le ministre la nécessité d'adopter des mesures en ce qui concerne l'évaluation des propriétés immobilières, que les parties peuvent adopter en matière de droit de succession. D'après la loi du 17 décembre 1851, les évaluations officielles ont été établies sur des bases inexactes, de sorte que les dispositions bienveillantes de la loi ne profitent réellement pas aux particuliers.
(page 1121) Dans l'état de choses actuel, ordinairement ces évaluations ne sont pas en rapport avec la valeur des immeubles à déclarer.
Je prie en conséquence M. le ministre de vouloir faire cesser un état de choses contraire à l'esprit de la loi.
Enfin j'engage le gouvernement à s'occuper de l'évaluation cadastrale de certaines propriétés qui ne figurent pas au cadastre, en sorte que la loi du 15 août 1854 sur l'expropriation forcée ne puisse être entravée dans son exécution.
Le prédécesseur de M. le ministre actuel s'est déjà préoccupé de cette question dont je recommande l'examen au gouvernement. Il importe en effet qu'une loi aussi importante, qui a produit de bons fruits, puisse être exécutée dans toutes ses disposions.
M. de Renesse. - Messieurs, dans le rapport de la section centrale sur le budget des finances, à la page 6, l'on a signalé un abus qui, existe à Spa, au détriment des intérêts du trésor.
D'après le contrat passé entre la société des jeux à Spa et le gouvernement, celui-ci prélève 50 p. c. sur les bénéfices desdits jeux et, conformément à l'article 4 de ce contrat, la société doit verser à la fin de chaque saison, et de suite après la clôture des jeux, les 50 p. c. des bénéfices nets, part de l'Etat, dans celles des caisses que M. le gouverneur de la province de Liège indiquerait à M. le directeur des jeux.
Au lieu de faire verser directement cette somme chez le caissier de l'Etat, l'agent de la Banque Nationale à Verviers, sans frais pour l'Etat, l'administration supérieure des finances paraît avoir gratifié M. le receveur de l'enregistrement à Spa de cette recette tout extraordinaire, et comme parfois la part de l'Etat dans les bénéfices nets des jeux a dépassé, notamment en 1849, le somme de 260,000 fr., il en est résulté que ledit receveur a dû toucher 2,600 fr. pour sa petite peine de renseigner et de percevoir cette recette ; c'est une perte réelle pour le trésor public, que l'on éviterait, si l'on obligeait la société des jeux à faire verser la part de l'Etat, à Verviers chez l'agent de la Banque Nationale.
Dans la réponse de l'honorable ministre des finances, à l'observation présentée à cet égard par la section centrale, l'on convient qu'il y aurait économie pour le trésor à faire verser directement le produit des jeux de Spa chez cet agent à Verviers ; mais qu'il n'a pas qualité pour faire une recette de l'espèce, et qu'il manque des moyens nécessaires pour faire les poursuites, pour contraindre la société des jeux à remplir ses obligations envers le trésor.
J'observerai à cet égard que, d'après la disposition formelle de l'article 4 du contrat d'autorisation des jeux, le gouvernement pourrait désigner cet agent pour effectuer cette recette, ainsi qu'il perçoit le versement des sommes pour les cautionnements, et d'autres recettes faites par ce caissier, pour le compte de l'Etat ; et pour contraindre la société des jeux à remplir ses obligations envers le trésor, le gouvernement a, d'après l'article 4 précité, tout le pouvoir nécessaire pour forcer cette société à verser la part de l'Etat dans les bénéfices des jeux immédiatement après la clôture des jeux. Dans le cas où cette société ne remplirait pas cette obligation de son contrat envers l'Etat, elle serait de suite déchue de son établissement de jeux à Spa.
Si, en fixant le traitement de ce receveur, l'on avait tenu compte de cette recette extraordinaire, pour le déterminer à un taux moins élevé que le comporte le bureau de Spa, je pourrais concevoir qu'il lui fût accordé en compensation le bénéfice de cette perception extraordinaire ; mais il paraît qu'il n'en est pas ainsi ; c'est un véritable cadeau que l’on fait à ce fonctionnaire, au détriment des intérêts du trésor public, dont on ne devrait pas négliger les moindres recettes, surtout dans la situation de nos finances, et lorsque chaque jour, en dehors des prévisions des budgets, l'on nous demande des crédits extraordinaires très considérables.
J'ai donc lieu d'espérer que l'honorable ministre des finances prendra des mesures, pour faire cesser cet abus, dont j'ai cru devoir entretenir la Chambre, dans l'intérêt des recettes de 1 Etat.
M. Osy. - Je remercie beaucoup l'honorable rapporteur, d'avoir attiré l'attention de M. le ministre des finances sur le rapport de la commission de surveillance de la caisse d'amortissement et des consignations. Vous avez vu, messieurs, dans ce rapport qu'à force d'instances, on est parvenu à porter à près de trois millions les consignations qui ne s'élevaient, en 1848, qu'à 700,000 francs. Mais, comme le dit l'honorable M. T'Kint de Naeyer, dans l'intérêt du trésor et surtout dans l'intérêt du public, le gouvernement devrait s'attacher à faire rester à la caisse des consignations toutes les sommes qui proviennent de mineurs ou de faillites, qui sont souvent déposées aujourd'hui dans des établissements particuliers.
Ce serait une grande garantie pour le public. J'apppelle sur ce point l'aiteniion de M. le ministre des finances et de M. le ministre de la justice, qui devrait adresser une circulaire aux tribunaux de commerce pour ce qui concerne les faillites.
Messieurs, comme le ditfort bien la commission, pour pouvoir atteindre le but que le gouvernement doit avoir en vue, c'est-à-dire pour attirer le plus possible dans la caisse les fonds qui devraient y être déposés, il lautque le gouvernement donne à la commission le moyeu de bien administrer ces fonds, dont le bénéfice augmente aussi dans une forte proportion.
En effet, il n'était en 1848 que de 98,000 fr., tandis qu'en 1854, il s'élevait à 156,000 fr. Ce bénéfice provient, messieurs, de ce que la caisse ne paye que 3 ou 4 p. c. d'intérêt et cela seulement après le 60e jour, tandis qu'elle place ses fonds en rentes sur l'Etat dont l'intérêt dépasse 4 p. c. Plus la caisse des consignations aura de dépôts, plus ses bénéfices augmenteront.
Il y a donc avantage pour le trésor à faire exécuter la loi, et il en résultera en outre une plus grande sécurité pour le public.
Eh bien, messieurs, comme je le disais, il faut qu'on donne à la commission le moyen d'exécuter la loi. Avant l'établissement de la commission de surveillance, tout se faisait à l'administration du trésor et à l'administration de l'enregistrement ; en retirant à ces administrations le travail qui a été attribué à la commission on a rendu possible une réduction du nombre de leurs employés. La caisse est administrée avec la plus sévère économie, à tel point qu'il est presque impossible de continuer à marcher ainsi ; et cependant on ne demande qu'une augmentation de 1,500 à 2,000 francs. Or, je le repète il serait facile de réaliser dans l'administration du trésor et dans l'administration de l'enregistrement de très grandes économies.
J'appelle donc toute l'attention de M. le ministre des finances sur le rapport de son prédécesseur et sur les observations de la commission et je le prie de vouloir s'en occuper dans le couraut de l'année afin qu'il puisse mettre la commission à même de rendre tous les services qu'on a droit d'attendre d'elle.
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, je ne perdrai pas de vue les recommandations faites par les honorables MM. Osy et Deliége relativement à l'usage des timbres de commerce. Cette question est à l'étude au département des finances et je promets bien volontiers à la Chambre que dès le début de la session prochaine, ou je lou soumettrai un projet de loi sur cette matière ou j'indiquerai les motifs pour lesquels je ne pourrais pas proposer une semblable mesure.
L'honorable M. Osy a touché une autre question, c'est celle qui concerne les obligations des emprunts 4 1/2 p. c. dont on demande l'inscription au grand-livre de la dette publique. L'honorable membre pense que les certificats d'inscription devraient être visés par la Cour des comptes. Ce serait, en effet, une garantie de plus. La loi n'en fait pas cependant une obligation ; j'examinerai ce qu'il y a à faire à cet égard et si les choses peuvent sans inconvénient s'arranger de la manière indiquée par l'honorable membre 'je ne m'opposerai pasà ce que cette formalité soit observée.
C'est la première fois du reste que cette observation m'est faite ; jusqu'à présent mon attention n'avait pas été appelée sur cet objet, et par conséquent je ne puis me prononcer immédiatement, ni prendre d'autre engagement que de faire droit à la demande de l'honorable membre, si après examen la mesure est jugée présenter plus d'avantages que d'inconvénients dans la pratique
Je dois convenir avec cet honorable membre que le local où se trouvent les obligations à 4 1/2 p. c. inscrites au grand-livre, ne présente pas toute la sécurité désirable.
Cependant ces valeurs sont renfermées dans des caisses placées dans une cave bien fermée et dont la porte a plusieurs clefs, de telle sorte que personne ne peut y entrer isolément.
Le directeur général de la trésorerie procède à des vérifications périodiques, assisté d un fonctionnaire qui est nanti de la seconde clef.
Je crois qu'il y aurait plus de sécurité à déposer ces obligations dans une tour telle que celle qui a été construite à l'hôtel de la Banque Nationale. Il y aurait donc lieu ou d'en établir une semblable à l’hôtel du ministère des finances ou d'entrer en arrangement avec la Banque Nationale. Je me réserve de prendre l'un ou l'autre parti, le statu quo pouvant offrir quelque danger.
Je reconnais avec l'honorable M. T'Kint de Naeyer l'utilité de donner la plus grande extension possible au service de la caisse des consignations. Déjà de grands progrès sont réalisés, mais il est désirable que ce service prenne plus de développement encore, non seulement dans l'intérêt de l'Etat, mais aussi dans celui des particuliers. Je me concerterai à cet égard avec mon honorable collègue M. le ministre de la justice.
L'honorable M. Lelièvre s'esl plaint de ce que les évaluations officielles basées sur le cadastre seraient exagérées. Il est possible qu'il y ait dans ce travail quelques défectuosités. Cependant je crois qu'en général il y a un grand avantage pour les intéressés à se référer à ces évaluations. Si elles présentent des disproportions, soit par suite d'erreurs commises, soit par l'effet du temps qui s'etl écoulé depuis le premier travail, elles peuvent être soumises à un nouvel examen. Je désire qu'elles me soient signalées, afin que je puisse juger de l'opportunité de procéder à leur révision. Toutefois, je le répète, ces valeurs, prises à un point de vue général, sont favorables aux contribuables ; j'en ai des preuves nombreuses.
L'honorable membre a parlé de la loi du 15 août 1854 relative à l'expropriation forcée ; il a fait observer que certaines propriétés ne sont pas renseignées au cadastre et que l'exécution de cette loi se trouverait parfois entravée. J'ignore à quelles propriétés l'honorable membre a fait allusion. Quoi qu'il en soit, je m'occuperai de cet objet, de concert avec mon honorable collègue du département de la justice. Sur cette question encore, des explications venant de la part de l’honorable membre seront accueillies avec empressement.
Deux honorables membres ont critiqué la remise allouée depuis longtemps au receveur du bureau de l'enregistrement de Spa, dans son application à la recette qui provient des jeux établis dans cette ville. Cette remise qui s'élève, dit-on, à 2,600 fr. peut, il est vrai, paraître (page 1122) exagérée, en raison de ce qu'elle résulte d'un petit nombre de versements qui occasionne peu de travail.
Pour satisfaire au désir des honorables membres et à celui de la section centrale, j'aviserai à prendre une mesure de nature à réduire la dépense qui résulte de cette perception. Consistera-t-elle, comme on l'a proposé, à donner à l'agent de la Banque Nationale les pouvoirs nécessaires pour faire directement la recette, et au besoin les poursuites nécessaires à cette fin ? ou bien, ne sera-t-il pas plus convenable de régler exceptionnellement la remise que toucheront désormais les receveurs sur cette recette ? Je crois, avec l'honorable M. Frère, qui fait en ce moment un signe d'assentiment, que cette dernière mesure serait la plus praticable.
Il y a cependant à prendre en considération que le receveur actuel a été nommé à cet emploi dans la prévision qu'il aurait un traitement déterminé, et dans ce traitement se trouve sans doute comprise la remise dont il s'agit. Ce que j'aurai à faire, ce sera de tâcher de donner à ce fonctionnaire, le plus promptement possible, une autre destination, afin de ne pas le froisser dans sa position ; lorsqu'un autre titulaire sera appelé au bureau de Spa, on déterminera, par voie d'exception, la remise qui lui sera accordée sur la recette des jeux.
Messieurs, quant aux titres de l'emprunt forcé de 1848, dont un honorable membre a parlé, je pense qu'il n'en existe qu'un très petit nombre dont le remboursemeut n'a pas été fait. Il faudrait une loi pour pouvoir les admettre encore ; j'examinerai avec soin s'il y a lieu de soumettre un projet de loi à la Chambre sur ce point.
L'honorable M. Lelièvre a demandé que le gouvernement s'occupe d'une nouvelle législation sur la pêche. Une commission a été nommée à cette fin. Un membre de cette commission étant décédé, je m'empresserai de la compléter, de telle sorte que son travail puisse être terminé avant la session prochaine.
M. Vander Donckt. - Messieurs, dans deux sections on a demandé la révision du cadastre. A l'époque où la Belgique a été cadastrée, il a été convenu qu'après dix ans le cadastre serait révisé, et jusqu'ici on n'y a plus touché.
Messieurs, il est évident qu'il y a des irrégularités graves dans la situation actuelle du cadastre ; qu'il y a des injustices flagrantes ; que des localités payent une contribution qu'elles ne devraient pas payer, tandis que d'autres provinces et d'autres localités ne payent pas ce qu'elles devraient payer ; c'est ce qui résulte des documents mêmes qui nous ont été communiqués.
En 1855 j'ai en l'honneur d'appeler l'attention du gouvernement sur cet objet. L'honorable prédécesseur de M. le ministre des finances a présenté un rapport sur la révision du cadastre. Eh bien, messieurs, voici ce que j'y lis :
« Art. 1er. La révision des opérations cadastrales, prescrite par la loi du 31 décembre 1855, aura lieu, en conservant pour base des estimations les valeurs moyennes résultant des actes de location ou de ventes, etc. ; elle consistera dans l'examen et la vérification des évaluations de chaque classe de nature de propriété telles qu'elles ont été arrêtées par les expertises existantes.
« Le projet de loi déposé, il n'a plus été question de la révision pendant plusieurs années, par la raison sans doute que les députés du Hainaut, de Liège, etc., qui la provoquaient en 1835, se trouvaient alors sous l'impulsion des majorations qui allaient être apportées aux contingents de leurs provinces respectives, tandis que plus tard ils se seront aperçus que, si cette révision avait eu lieu, il en serait résulté, infailliblement, de nouvelles augmentations pour ces provinces. Dans ces provinces, en effet, l'agriculture et l'industrie ont fait depuis 30 ans des progrès immenses alors que dans les provinces flamandes l'agriculture parvenue, depuis longtemps, au plus haut degré de perfection, est restée stationnaire.
Je n'apprécierai pas ici l'exactitude des observations présentées par le ministre de cette époque, mais je constate que de son aveu il y a des irrégularités, des abus, des injustices dans la répartition aciuelle de la contribution foncière. Je demande que le gouvernement veuille bien aviser au moyen de faire une répartition plus équitable des charges qui pèsent sur la contribution foncière. Je sais que beaucoup de membres reculent devant une augmentation de dépenses qui pourrait en résulter pour le trésor ; mais quand il y a des injustices et que ces injustices sont criantes, il me semble que le gouvernement ne peut pas rester plus longtemps indifférent. Qu'il se décide donc à faire la révision du cadastre. Aussi la 5ème et la 6ème section ont-elles réclamé cette région au point de vue de légalité proportionnelle de l'impôt.
Eh bien, messieurs, lorsqu'il est prouvé qu'il y a des injustices à réformer, le gouvernement ne peut pas hésiter à s'occuper de ce travail et, à ordonner la révision cadastrale. Plus nous restons dans cette situation, plus les injustices se multiplient pour les uns et soulagent injustement les autres. Je n'entrerai pas pour le moment dans de longs détails, quoique j'aie des notes toutes prêtes pour établir clairement les injustices qui existant d'une province à l'autre, d'un arrondissement à l'autre et même d'une commune à l'autre. Je me bornerai, quant à présent, à ces observations générales, je termine en appelant l'attention du gouvernement sur la nécessité de la révision du cadastre.
M. Vandenpeereboom. - Messieurs, je viens appuyer les observations que l’honorable M. Vander Donckt a soumises à la Chambre. Je pense avec cet honorable membre qu'il est plus que temps qu'on fasse droit aux nombreuses réclamations qui sont parties de diverses provinces du pays et qui ont trouvé, dans cette Chambre, un écho assez général.
Messieurs, vous voudrez bien vous rappeler que lors de la discussion de la loi sur la contribution personnelle, il fut reconnu que les évaluations du cadastre étaient fautives et ne pouvaient servir de bases à la loi en discussion ; pour ce motif un grand nombre de membres de la Chambre demandèrent l'ajournement de la discussion jusqu'à ce que il cadastre fût revisé.
Plusieurs des honorables collègues qui siègent aujourd'hui sur le banc ministériel se joignirent alors à nous pour demander cette révision ; M. le ministre de l'intérieur, si ma mémoire est fidèle, insista beaucoup sur la nécessité de cette révision, il présenta même un amendement en ce sens qui fut adopté, et la Chambre ajourna la discussion de la loi sur la la contribution personnelle jusqu'à ce qu'on fit la révision du cadastre au moins quant aux fonds bâtis. La Chambre décida en outre que ce travail devait être terminé avant le 1er novembre 1855.
Je demanderai à M. le ministre des finances de vouloir bien faire connaître si des études ont été commencées afin de faire droit à cette décision de la Chambre.
Pour moi, je ne me contenterai pas d'une révision partielle, en ce qui concerne les fonds bâtis. Comme l'a dit l'honorable préopinant, le cadastre, tel qu'il existe actuellement, consacre des injustices tellement flagrantes, qu'elles sont devenues intolérables.
Comme tout impôt, l'impôt foncier, pour être juste, doit se percevoir en raison du revenu réel. Il en était ainsi quand la loi de péréquation a été arrêtée ; mais depuis lors la valeur des propriétés a subi de tels changements que la péréquation cadastrale, votée en 1848, est aujourd'hui une véritable iniquité. En effet, l'augmentation de la valeur locative réelle a été beaucoup plus grande dans certaines parties du pays que dans d'autres, la base de l'impôt est restée la même ; il en résulte donc un privilège réel pour certaines provinces, pour certaines communes, et même pour certaines propriétés d'une même localité.
J'ai dit que la valeur localive des terres est augmentée dans des proportions bien différentes. D'après la statistique officielle, la valeur locative réelle des biens fonds comparée aux évaluations du revenu cadastral imposable est aujourd'hui augmentée :
Dans la province de Namur de 200 p. c., de Luxembourg de 133, dans les provinces de Liège, de Brabant et de Limbourg de 100, dans la province d'Anvers de 75, dans celle de Hainaut de 71, dans celle de la Flandre orientale de 66, et dans la province de la Flandre occidentale de 50 p. c. seulement.
En présence de ces faits officiels n'est-il pas indispensable de réviser les évaluations cadastrales ?
D'ailleurs, messieurs, des variations très grandes sont survenues aussi entre les diverses communes d'une même province ; car les travaux d'utilité publique ont augmenté la valeur générale des propriétés dans certaines localités. Cette observation s'applique encore aux biens d'une même commune.
La création de routes, de chemins de fer, de canaux a donné une plus-value aux biens-fonds situés à proximité de ces voies de communication nouvelles. C'est un fait incontestable.
Il est inutile de démontrer en effet que la direction d'une route peut exercer une grande influence sur la valeur des terres dont elle facilite l'exploitation. Je crois pouvoir ajouter que dans certaines villes la valeur localive réelle des immeubles a considérablement diminué par suite des circonstances. A Ypres par exemple, le retrait de la garnison a fait subir à la valeur locative des maisons une dépréciation que je ne crains pas d'évaluer à 40 et même à 50 p. c.
Le gouvernement a parfaitement apprécié le changement qui s'est opéré dans la valeur différentielle des biens-fonds ; il l'a compris surtout quand ses intérêts ont été engagés. Lorsque nous avons voté la loi sur les successions en ligne directe, pour éviter les difficultés auxquelles peuvent donner lieu les expertises, le gouvernement a déclare qu'il était disposé à prendre les évaluations cadastrales pour base du payement de ce droit.
Mais plus tard ayant reconnu que la valeur territoriale était modifiée d'une manière différente suivant les provinces et les cantons, il n'a pas admis purement et simplement cette base, mais il a fixé des multiplicateurs différents du revenu cadastral pour déterminer la valeur vénale des propriétés.
Un arrêté royal de 1852 a arrêté ces multiplicateurs. En jetant les yeux sur le tableau qui y est joint, on peut se rendre compte de la variation qu'a éprouvée la valeur vénale des terres ; dans quelques cantons le multiplicateur officiel est de 30, 35 et 50 p. c. maximum, tandis que dans d'autres il est de 100 à 150. Ces chiffres sont les meilleures raisons qu'on puisse alléguer en faveur de la révision cadastrale.
On a fait une objection qui pour moi n'en est pas une ; on a dit ; La révision cadastrale coûtera beaucoup d'argent, on parle de 5 millions. La Belgique n'a pas reculé devant des dépenses bien plus importantes ; quand il s'agit d'être juste et de faire cesser des privilèges en matière d'impôt, que la Constitution condamne, nous ne devons pas nous laisser arrêter par une question d'argent.
(page 1123) Du reste après avoir révisé le cadastre ne pourrait-on pas échelonner le dégrèvement sur plusieurs années et récupérer ainsi une partie des frais que cette opération aurait occasionnés ?
Et si la révision ne peut immédiatement se faire, ne serait-il pas au moins possible de changer la péréquation et de modifier ainsi le contingent à payer par les diverses provinces ? Ce serait là une mesure transitoire qui pourrait avoir de bons résultats.
J'appelle sur cette idée l'attention du gouvernement et j'insiste en tous cas sur la nécessité de réviser le cadastre ; le mal est patent ; le remède est connu ; pouvons-nous refuser de guérir le mal parce que le remède est un peu cher ? Le gouvernement et la Chambre ne voudront pas, j'en ai la confiance, perpétuer un privilège en matière d'impôt au détriment d'une catégorie de contribuables !
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Je reconnais, messisurs, combien il serait désirable, qu'on pût procéder à la révision des évaluations cadastrales. Il y a réellement des inégalités choquantes ; comme l'a dit l'honorable préopinant, c'est une question de dépense qui a arrêté le gouvernement et la Chambre.
Le gouvernement a présenté un rapport sur cet objet ; en présence de ce rapport, la Chambre n'a pas décidé qu'il serait procédé à de nouvelles évaluations. Ce travail exigerait une dépense de 5,225,000 francs. Je doute que le mode de couvrir cette dépense que vient d'indiquer l'honorable M. Vandenpeerenboom puisse être mis à exécution, car les provinces qui devraient être dégrevées ne voudraient pas continuer à payer l'impôt d'après l'ancien taux.
Ce serait taxé d'injustice ; du moment que l'on connaîtrait la répartition basée sur l'égalité proportionnelle, on en réclamerait l’application immédiate d'après les résultats obtenus.
Si nous ne nous trouvions pas dans des circonstances où de grandes dépenses obligatoires doivent être faites, le gouvernement serait disposé à présenter à la Chambre la révision du cadastre.
Ce serait une mesure très équitable ; mais dans un moment où vous avez à faire des dépenses considérables qui sont indispensables, il serait difficile d'imposer une pareille charge au trésor.
Ainsi que l'a fait observer l'honorable membre, la révision du cadastre serait surtout nécessaire pour les propriétés bâties, bien qu'il se refuse à admettre l'une sans l'autre.
En ce qui concerne les propriétés bâties, l’opération n’exigerait qu’une dépense d’un million. Si l’on prenait le contingent de toutes les propriétés, bâties, et qu’on le soumît à de nouvelles évaluations, nous aurions une base exacte pour asseoir notre contribution personnelle.
La raison principale pour laquelle l'on n'a pu donner suite au projet présenté à la Chambre pour modifier les bases de cette contribution, c'est que les évaluations cadastrales offrent tant de disparates selon les communes et les provinces, qu'on ne peut les adopter pour bases de la contribution personnelle, et que tout système d'impôt assis sur la valeur localive qui n'a pas pour base un cadastre régulièrement formé, sera toujours défectueux.
Il y a donc, outre le rappel à l'égalité proportionnelle, un second motif très puissant pour rectifier les évaluations des propriétés bâties. Bien que la dépense qui résulterait de cette opération partielle soit beaucoup moins considérable, je doute cependant que la Chambre se décide à la voter en ce moment.
M. Vander Donckt. - Je répondrai seulement deux mots à l'honorable ministre des finances. Il est d'accord avec nous sur les erreurs et les injustices qui existent aujourd'hui. Seulement, il croit que la Chambre reculerait devant la dépense. Mais quand on n'a pas d'argent pour rendre justice, il ne faut pas avoir de budget de la justice ; car il faut faire la justice coûte que coûte, ou il ne faut pas de justice. Si c'est fondé, si l'injustice est flagrante, si la nécessité de réviser le cadastre est démontrée, ce n'est pas devant une dépense de cinq millions qu'il faut s'arrêter, dût la propriété foncière la payer ; car quand il s'agit de rendre justice on ne peut pas s'y refuser.
Vous me direz que le cadastre ne sera jamais parfait. Je suis d'accord avec vous que jamais on ne fera un ouvrage parfait. Mais ce que nous réclamons, c'est qu'on redresse les injustices par trop flagrantes. Il y a, entre certaines communes de la Flandre orientale et des communes du Brabant, une différence des deux tiers. Je ne serais pas en peine de prouver que tandis que dans telle commune du Brabant on paye un franc, on en paye trois dans telle autre commune voisine de la Flandre orientale.
Je vous demande si des disproportions semblables sont plus longtemps tolérables eu Belgique, dans un pays où la Constitution veut une juste répartition de l'impôt !
Ce n'est pas de la justice distributive, ni une juste répartition de l'impôt, alors que les uns payent relativement aux autres dans une très grande disproportion.
Je désire appeler votre attention sur ce point-ci ; en général les propriétés ont augmenté de valeur, mais dans le Brabant et dans les environs de Bruxelles plus que dans aucune autre partie du pays. Ainsi je vois dans le Moniteur du 9 avril 1853 que la ville de Bruxelles a revendu au prix de 21,692 francs, un terrain situé à Ixelles, le long de la chaussée de Wavre qu'elle avait acheté 6,000 francs en 1827. Je demande s'il y a dans les autres provinces une augmentation de la valeur des propriétés non bâties qui puisse être comparée à celle-ci.
On me dira peut-être ; Ceci est une affaire exceptionnelle. Il ne faut pas s'arrêter aux exceptions. Mais en général dès que le cadastre a été formé, on s'est trouvé devant des différences énormes. On a échelonné sur 3 années la contribution foncière de la Flandre orientale, parce que la diminution que cette province a subie, en comparaison des autres provinces était trop forte, et pour qu'elle ne pesât pas sur les autres provinces d'une manière trop sensible. Pendant ces 33 années, nous avons payé plus que nous ne devions, pour que la transition fût moins sensible.
Les différences sont telles que l’on a payé :
Sur les propriétés foncières, prairies et terres : dans la Flandre orientale fr. 103,81 et dans les autres sept provinces fr. 52 à 63.
Sur les bois : dans la Flandre orientale fr. 23 et dans les autres sept provinces fr. 21 à 63
Ainsi il y a des injustices à redresser, et, comme je le répète, les injustices sont si flagrantes, si fortes, et d'autre part que nous sommes en présence d'une loi formelle qui porte que tous les dix ans le cadastre sera révisé, je fais un appel à votre justice, messieurs, je demande que vous ordonniez la révision du cadastre. J'ose espérer qu'on fera justice.
M. de Muelenaere. - Je dois reconnaître que le moment est assez peu opportun pour grever le trésor d'une dépense de plus de cinq millions.
Cependant, comme l'a dit M. le ministre des finances lui-même, il existe entre les diverses provinces du royaume et même entre les divers cantons d'une même province, des inégalités tellement choquantes, en matière d'évaluation foncière, que réellement cet état de choses ne peut se perpétuer à l'infini.
Je ferai remarquer en outre que cette dépense de cinq millions ne devrait pas être imputée sur un seul exercice. La révision ne pourra se faire qu'en 4 ou 5 ans. Peut-être même ce temps ne suffira-t-il pas. Ce ne serait donc au plus qu'une dépense d'un million par an. Le budget pourrait bien supporter cette dépense-là pour établir l'égalité proportionnelle entre les diverses provinces, les divers cantons et les divers propriétaires du même pays. Cette dépense a tous les caractères d'une mesure d'utilité publique.
La révision du cadastre est vivement sollicitée depuis longtemps. Quoi que fasse le gouvernement, il faudra bien finir par rendre justice, par faire droit aux plaintes qui chaque année se produiront avec plus de vivacité. Je recommande donc cet objet à la plus sérieuse attention du gouvernement.
- La discussion générale est close.
« Art. 1er. Traitement du ministre ; fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitements des fonctionnaires, employés et gens de service : fr. 487,200. »
- Adopté.
« Art. 3. Honoraires des avocats et des avoués du département. Frais de procédures, etc.
« Charge ordinaire ; fr. 81,500.
« Charge extraordinaire ; fr. 4,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Frais de tournées ; fr. 7,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Matériel : fr. 46,000. »
- Adopté.
« Art. 6. Service de la monnaie : fr. 42,000. »
- Adopté.
(page 1124) « Art. 7. Achat de matières et frais de fabrication de pièces de monnaie de cuivre ; charge extraordinaire : fr. 100,000. »
- Adopté.
« Art. 8. Magasin général des papiers : fr. 110,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Documents statistiques : fr. 19,500. »
- Adopté.
« Art. 10. Traitements des directeurs et agents du trésor : fr. 123,000. »
- Adopté.
« Art. 11. Frais de bureau, de commis, de loyer, etc., des directeurs et agents : fr. 25,300. »
- Adopté.
« Art. 12. Caissier général de l'Etat : fr. 200,000. »
- Adopté.
« Art. 13. Surveillance générale. Traitements : fr. 334,900. »
- Adopté.
« Art. 14. Service de la conservation du cadastre. Traitements : fr. 304,700. »
- Adopté.
« Art. 15. Service des contributions directes, des accises et de la comptabilité. Traitements fixes : fr. 1,211,600. »
- Adopté.
« Art. 16. Idem. Remises proportionnelles, et indemnités (crédit non limitatif) : fr. 1,443,200. »
- Adopté.
« Art. 17. Service des douanes et de la recherche maritime : fr. 3,975,950. »
- Adopté.
« Art. 18. Service de la garantie des matières et ouvrages d'or et d'argent : fr. 47,900. »
- Adopté.
« Art. 19. Suppléments de traitements : fr. 25,000. »
- Adopté.
« Art. 20. Traitements temporaires des fonctionnaires et employés non replacés ; charge extraordinaire : fr. 55,000. »
(Les crédits portés aux articles 13, 14, 15, 17, 18, 19 et 20 du présent chapitre pourront être réunis et transférés de l'un de ces articles aux autres, selon les besoins qui résulteront de la mise à exécution de l'organisation de l'administration des contributions dans les provinces.)
- Adopté.
« Art. 21. Frais de bureau et de tournées : fr. 68,840. »
- Adopté.
« Art. 22. Indemnités, primes et dépenses diverses : fr. 284,200. »
- Adopté.
« Art. 23. Police douanière : fr. 5,000. »
- Adopté.
« Art. 24. Matériel : fr. 117,800. »
- Adopté.
« Art. 25. Frais généraux d'administration de l'entrepôt d'Anvers : fr. 19,450. »
- Adopté.
« Art. 26. Traitement du personnel de l'enregistrement et du timbre.
« Charge ordinaire : fr. 390,880.
« Charge extraordinaire : fr. 1,500. »
« (La partie du crédit concernant les traitements des seconds commis pourra être transférée, jusqu'à concurrence d'une somme de 6,380 fr., à l'article 31, littera C, relatif aux frais de bureau des directeurs.) »
- Adopté.
« Art. 27. Traitement du personnel du domaine.
« Charge ordinaire : fr. 98,000.
« Charge extraordinaire : fr. 8,260. »
- Adopté.
« Art. 28. Traitement du personnel forestier : fr. 241,900. »
- Adopté.
« Art. 29. Remises des receveurs. Frais de perception (crédit non limitatif) : fr. 850,000. »
M. Vander Donckt. - Messieurs, il existe, en ce qui concerne les conservateurs des hypothèques, une sorte d'anomalie dans la loi. Depuis la loi de 1851 surtout, les particuliers se trouvent dans le cas de devoir consulter beaucoup plus fréquemment qu'autrefois les registres des conservateurs. Dans quelques bureaux on vous refuse la communication de ces registres, et l'on vous oblige à demander un extrait. Dans d'autres bureaux, au contraire, moyennant un franc, ce qui se faisait presque généralement autrefois dans tous les bureaux, vous pouvez consulter les registres, et si vous demandez un extrait, on vous le délivre moyennant payement.
Je demanderai à l'honorable ministre des finances pourquoi ce qui se fait dans un bureau ne se fait pas dans d'autres. Ainsi à Gand on peut consulter les registres moyennant un franc, et après vous être convaincu de la position de votre débiteur ou après avoir fait l'examen que vous désiriez concernant les inscriptions inscrites, vous demandez un extrait si vous le voulez. A Audenarde cela se faisait également, mais aujourd'hui on ne le peut plus, par suite d'une circulaire de l'honorable prédécesseur de M. le ministre des finances, plusieurs receveurs des domaines ne permettent plus l'inspection des registres.
A Courtrai, on ne peut non plus obtenir communication des registres si ce n'est en demandant un extrait.
Je ne demande pas que M. le ministre des finances me réponde immédiatement, mais j edésire qu'il veuille examiner s'il ne serait pas plus rationnel de généraliser la mesure et de permettre que dans tous les bureaux ou puisse, moyennant la rétribution d'un franc, prendre communication des registres.
Souvent pour une bagatelle, on est obligé de prendre un extrait, et comme on paye 1 franc par article, lorsque le débiteur se trouve dans une position critique, vous êtes obligé de payer 8, 9 et 10 fr. par un extrait, tandis vous aviez simplement besoin de connaître la position de votre débiteur.
- L'article est adopté.
(page 1125) « Art. 30. Remise des greffiers (crédit non limitatif) : fr. 45,000. »
- Adopté.
« Art. 31. Matériel : fr. 52,620. »
- Adopté.
« Art. 32. Dépenses du domaine.
« Charge ordinaire : fr. 90,000.
« Charge extraordinaire : fr. 10,000. »
« Art. 33. Administration centrale. Traitements. Frais de route et de séjour : fr. 7,400. »
- Adopté.
« Art. 34. Administration centrale. Matériel : fr. 1,500. »
- Adopté.
« Art. 35. Remises proportionnelles et indemnités des fonctionnaires chargés de la recette et du contrôle (crédit non limitatif) : fr. 3,500. »
- Adopté.
« Art. 36. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 17,500. »
- Adopté.
« Art. 37. Secours à des employés, veuves et familles d'employés qui, n'ayant pas de droits à une pension, ont néanmoins des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 7,500. »
- Adopté.
« Art. 38. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 12,000. »
- Adopté.
L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :
« Le budget du ministère des finances est fixé, pour l'exercice 1856, a la somme de dix millions neuf cent quatre-vingt-deux mille six cents francs (10,982,600 fr.), conformément au tableau ci-annexé. »
- Adopté.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi, qui est adopté à l'unanimité des 76 membres présents.
Ce sont : MM. Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verhaegen, Vermeire.Vervoort, Vilain XIIII, Visart, Wasseige, Anspach, Boulez, Brixhe, Calmeyn, Closset, Coomans, Coppieters 't Wallant, de Bronckart, de Brouwer de Hogendorp, de Decker, de Haernc, Delfosse, de Liedekerke, Deliége, Félix de Mérode, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Perceval, de Pitteurs, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, Desmaisières, de T'Serclaes, Devaux, de Wouters, Dubus, Dumon, Dumortier, Frère-Orban, Goblet, Jacques, Jouret, Lambin, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Maertens, Manilius, Mascart, Matthieu, Mercier, Orts, Osy, Prévinaire, Rodenbach, Charles Rousselle, Sinave, Tack, Thibaut, Thiéfry, Thienpont, TKint de Nacyer, Tremouroux, Van Cromphaut, Vanden Branden de Reeth, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Hoorebeke et Delehaye.
M. le président. - Le gouvernement se rallie-t-il à la rédaction de la commission ?
M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Oui, M. le président. Cette rédaction a été arrêtée de commun accord entre la commission et le gouvernement.
M. le président. - Le projet de loi se compose d'un article unique ainsi conçu ;
« Art. 216. Tout propriétaire de navire est civilement responsable des faits du capitaine, et tenu des engagements contractés par ce dernier, pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition.
« Il peut, dans tous les cas, s'affranchir des obligations ci-dessus par l'abandon du navire et du fret.
« Toutefois, la faculté de se libérer de ces obligations par l'abandon n'est pas accordée à celui qui est, en même temps, capitaine et propriétaire ou copropriétaire du navire. S'il n'est que copropriétaire, le capitaine n'est responsable des engagements contractés par lui, pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition, que dans la proportion de son intérêt.
« Le recours du propriétaire ou des copropriétaires contre leurs assureurs ne sera pas compris dans l'abandon. »
M. le président. - La discussion est ouverte. La parole est à M. Sinave.
M. Sinave. - Messieurs, la commission dans son nouveau rapport me fait le reproche d'attribuer à son initiative et non à celle du gouvernement certaines dispositions du projet de loi primitif, modifiant l'article 216 du Code de commerce. Si j'ai commis cette erreur, c'est que l'ancien ministre des affaires étrangères s'était rallié au projet de la commission, et que l’honorable ministre de la justice et la commission, « qui l’avait voté à l’unanimité », il se ralliait à son tour au même projet. Je n'ai donc pas mérité ce reproche et je ne puis comprendre la susceptibilité de la commission. Si les amendements que j'ai proposés ont provoqué des changements notables au projet primitif, ce n'est pas, me semble-t-il, une raison pour repousser un travail qu'elle a élaboré de commun accord avec le gouvernement.
Maintenant, permettez-moi de dire quelques mots sur les changements apportés à ce projet de loi.
Ce projet, comme on le sait, contient cinq paragraphes ; quatre amendements ont été déposés par moi. Les deux derniers, contre lesquels aucune objection sérieuse n'a pu s'élever et qui se rapportent aux deux derniers paragraphes du projet, avaient seuls grande importance. Le gouvernement a reconnu la nécessité de les adopter. La commission les a aussi adoptés, mais avec moins de bonne grâce, car, il semble, par son nouveau rapport, qu'elle regrette le projet primitif puisqu'elle essaye encore de le défendre par des arguments impossibles.
Mon quatrième amendement se rapporte au cinquième paragraphe du projet. Il demande la suppression des mots : « assurance sur le fret ». L'assurance sur le fret est prohibée par l'article 347 du Code en vigueur. Le nouveau rapport de la commission soutient qu'un arrêté royal en date du 9 octobre 1849 aurait modifié cet article, en approuvant les statuts d'une société d'assurance d'Anvers, comme si un arrêté royal pouvait modifier une disposition législative. Il est évident que cet arrêté est fait en violation de la loi et qu'il est nul ; aussi les tribunaux doivent annuler les assurances sur le fret et les Chambres prendre l'initiative pour mettre fin à cette pratique illégale.
L'honorable ministre de la justice a conclu avec moi qu'on ne pouvait se prévaloir d'une erreur commise et que mon amendement tendait à remettre le projet de loi en harmonie avec l'article 347 du Code de commerce.
Tant que sera en vigueur le Code actuel, il faut l'exécuter dans toutes ses dispositions. Il faut maintenir la défense d'assurer le fret. Mais doit-on ou non modifier cette disposition dans un nouveau Code ? C'est une question dont nous n'avons pas à nous occuper. La commission dans son rapport préconise un système qui n'existe dans aucun pays et que nous ne pourrions admettre. Elle voudrait pouvoir assurer le fret des marchandises qui ne sont pas encore à bord du navire prétextant que le Code ne déclare nulle que l'assurance du fret des marchandises existantes à bord. Mais ce serait là couvrir un risque imaginaire et faire une assurance que le Code repousse à l'égal des jeux de hasard avec lesquels elle a une analogie bien grande.
A l’appui de ce système, elle soutient que « le fret est, en grande partie, la compensation des frais d'armement ». Je le veux bien ; mais ces frais sont évidemment faits en vue de gagner ce fret ; ce sont des débours réels que la loi permet d'assurer (article 334) et non des bénéfices à faire ; quoique compris dans le fret, ils sont complètement distincts de celui-ci par les sens que la loi y attache, et qu'on y attache vulgairement.
(page 1126) Enfin la commission ajoute ; « Avant le départ du navire, la moitié du fret est acquise ; celui qui rompt le voyage et le chargeur qui retire ses marchandises avant le départ ne sont-ils pas obligés de payer la.moitié du fret ? »
C'est parfaitement juste, mais ce n'est pas là une question de risque à couvrir par une assurance maritime, c'est tout simplement une indemnité due par celui qui brise ses engagements, pour défrayer l'armement qui est perdu. Alors aucun recours n'existe contre les assureurs, quand bien même ces frais auraient été couverts par eux.
Dans les pays où l'assurance sur le fret est autorisée, elle est fondée sur les marchandises existantes à bord du navire avec une destination certaine. Ce système présente du moins un fonds de réalité que l'autre n'a pas.
La commission a admis mon amendement et a supprimé de sa rédaction la partie qui concerne l'assurance sur le fret.
Mon troisième amendement demande la suppression du quatrième paragraphe. Le gouvernement a reconnu la justesse de mon amendement. La commission s'y rallie et le quatrième paragraphe est supprimé
Mes deux premiers amendements qui se rapportent au second et au troisième paragraphes n'ont aucune importance réelle. La commission maintient la rédaction du second paragraphe. Moi je n'avais proposé qu'un simple changement de rédaction, comme le constate le rapport. Elle formule une nouvelle rédaction au troisième paragraphe. Ce paragraphe n'est qu'une question d'appréciation sur laquelle je ne reviendrai pas.
Les changements faits au nouveau projet de loi m'engagent à m'y rallier.
M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Messieurs, j'aurai peu de chose à répondre à l'honorable M. Sinave, parce qu'au fond, nous sommes d'accord.
L'honorable membre a d'abord critiqué une disposition d'un arrêté royal du 9 octobre 1849, comme permettant les assurances sur le fret, et comme constituant ainsi une violation manifeste de l'article 347 du Code de commerce qui déclare huilés les assurances sur le fret.
Je ferai remarquera cet égard, que la légalité de cet arrêté peut se justifier parfaitement, si on a soin de faire la distinction qui est admise en doctrine et en jurisprudence entre le fret acquis et le fret à faire. Le fret que la loi défend est le fret qui reste à faire, c'est-à-dire une chose incertaine, une pure éventualité, qui échappe au principe de l'assurance. Mais on a toujours considéré dans la pratique qu'il y avait à côté de ce fret incertain un fret en quelque sorte déjà réalisé qu'on appelle fret acquis et qui pouvait valablement être assuré.
Du reste, c'est une discussion purement incidente, et qui ne touche en rien à la loi dont la chambre s'occupe. Je l'abandonne.
L'honorable M. Sinave m'a paru critiquer la rédaction du premier paragraphe qui est le principe de la loi, et il a fini par dire que dans son opinion, ces mots « tenu des engagements » qui s'y trouvent, sont inutiles et qu'il aurait suffi d'y mettre les mots : « le propriétaire est tenu de tous les faits du capitaine. »
Si telle est la pensée de l'honorable membre, ce serait une erreur de sa part, ce sont ces mots nouveaux : « tenu des engagements » qui sont la base même de la loi, ou pour mieux dire, qui sont toute la loi. C'est parce qu'il s'agit d'introduire une disposition complètement nouvelle que ces mots « tenu des engagements » ont été insérés dans le projet de loi.
D'après la jurisprudence la plus récente, les propriétaires en faisant abandon du navire et du fret, ne peut être déchargé de la responsabilité qu'en ce qui concerne les faits illlicites du capitaine qu'il emploie ; mais en ce qui touche les engagements contractés par le capitaine, cette responsabilité est indéfiniment engagée. Le propriétaire y reste soumis, malgré l'abandon qu'il ferait du navire. Ceci faisait aux propriétaires de navires et armateurs une position intolérable, injuste et ruineuse pour le commerce maritime. C'est pour améliorer cette situation que le principe de la loi a été adopté et qu'on a inséré les mots : « tenu des engagements. » Les rayer serait tout simplement maintenir l'état de choses qu'il est urgent de changer. Cette rédaction est du reste absolument calquée sur celle de la loi française de 1841, loi qui, dans ce pays, a produit les meilleurs résultais, en donnant satisfaction aux intérêts du commerce.
L'honorable membre a paru critiquer encore les mots « ci-dessus » qui se trouvent daus le deuxième paragraphe après les mots : « des obligations ».
Les mots « ci-dessus » se trouvent également dans la loi française ; ils ne sont peut-être pas très corrects ; mais ils ont le mérite d'être parfaitement clairs ; or, ce qu'il faut rechercher avant tout dans les lois de ce genre, c'est la clarté.
Je bornerai là pour le moment mes observations, me référant du reste au rapport de la commission, avec laquelle le gouvernement, comme je viens de le dire, est d'accord.
M. Lelièvre. - J'avais demandé la parole pour faire une observation analogue à celles que vient de présenter M. le ministre de la justice. Je pense qu'il faut maintenir les mots « tenu des engagements contractés par le capitaine ». Ils ont pour but de faire cesser le doute que faisait naître la législation actuelle. En effet un arrêt de la Cour de cassation de France du 1er juillet 1814 a décidé que l'article 216 du Code de commerce ne concerne que ceux des engagements du capitaine « qui résultent soit de sa faute soit d'un délit ou d'un quasi-délit » et non ceux qu'il a contractés légalement. Ainsi, dit la Cour, le propriétaire d'un navire ne peut en l'abandonnant avec le fret se soustraire au remboursement de l'emprunt à la grosse fait par le capitaine pour le radouber.
La cour de Bruxelles, par arrêt du 26 avril 1849, décide également que le propriétaire d'un navire est responsable des engagements contractés par le capitaine en cours de voyage dans les bornes de son mandat, tels, par exemple, que la vente des marchandises pour subvenir au radoub et aux réparations du navire. En conséquence, il ne peut, dit la cour, se décharger de cette responsabilité en abandonnant le navire et le fret.
Eh bien, c'est pour mettre fin aux inconvénients auxquels cette jurisprudence pouvait donner lieu, que le projet est présenté. Il y a donc lieu de maintenir la disposition du paragraphe premier tel qu'il est proposé.
Toutefois, il me semble qu'on pourrait améliorer la rédaction du paragraphe 3 et dire : « Toutefois la faculté de faire l'abandon n'est pas accordée à celui qui est en même temps capitaine et propriétaire, etc. »
C'est au surplus la rédaction de la loi française du 14 juin 1841. Elle me paraît plus laconique que celle du projet.
M. Deliége. - Messieurs, je crois qu'on pourrait améliorer la rédaction de l'article. Dans le langage ordinaire, dans les actes de notaires, par exemple, nous nous servons souvent de ces mots : « ci-dessus », « ci-dessous » ; mais les lois ne doivent pas s'exprimer de cette manière. Dans le deuxième paragraphe, au lieu de : « s'affranchir des obligations ci-dessus », je propose de dire : « s'affranchir de ces obligations ». Dans le troisième paragraphe, tout au commencement, il est dit : « la faculté de se libérer de ces obligations », je propose de supprimer ces mots : « de ces obligations » qui deviennent inutiles par le changement que je propose au paragraphe 2. Cette rédaction me paraît plus correcte.
M. Sinave. - L'honorable M. Deliége vient de proposer la suppression des mots « ci-dessus ». C'est précisément ce que j'ai demandé ; je pense avec l'honorable membre qu'il y a lieu de supprimer dans le même paragraphe les mots : « de ces obligations » qui se trouvent dans la première ligne ; maintenant il y a dans le troisième paragraphe ces mots ; « pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition ». Ces mots sont inutiles. J'en demande la suppression ; ils sont déjà énoncés dans le premier paragraphe.
M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Je ne puis me rallier au retranchement que propose l'honorable M. Sinave. Une loi n'est pas un discours académique ; il faut qu'elle soit claire, surtout en matière de commerce, il faut qu'elle apprenne aux négociants quelssont ses droits et ses devoirs ; la seule lecture doit suffire pour les lui indiquer.
Je demande le maintien des mots : « pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition. » S'ils étaient supprimés, il y aurait dans l'article quelque chose d'indéterminé et de trop général qui pourrait faire naître des équivoques. Une loi ne saurait être assez explicite. Je crois donc qu'il est bon de conserver la rédaction telle qu'elle a été proposée par la commission.
Quant au second paragraphe, on a demandé de supprimer les mots : « ci-dessus », et de remplacer le mot « les » par « ses », et de dire : « Il peut dans tous les cas s'affranchir de ses obligations. »
Remarquez cependant, messieurs, qu'il est question de deux personnages, le capitaine et le propriétaire. En mettant ses obligations, n'y aura-t-il pas quelque équivoque, à propos duquel des deux on veu parler ?
M. Deliége. - Ce n'est pas « ses », mais « ces obligations ».
M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - e n'insiste pas, dès que la chose est ainsi entendue.
Je me bornerai à demander le maintien des mots : « pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition ».
M. Lelièvre. - Je déclare me rallier à la rédaction proposée par l'honorable M. Deliége, rédaction présentant le même sens que l'amendement que j'ai proposé.
M. Van Iseghem, rapporteur. - Au commencement de son discours l'honorable M. Sinave m'a fait un reproche, parce que dans le rapport j'ai dit qu'il s'était trompé, que le troisième paragraphe n'était pas l'œuvre de ia commission, mais que ce paragraphe se trouvait dans le projet primif du gouvernement ; il était de mon devoir de rétablir la vérité et je tenais d'autant plus, que l'honorable membre avait dit dans un discours, lu dans la séance du 2 avril dernier : « Mais au lieu de maintenir la rédaction du paragraphe premier, et de faire ce simple changement au deuxième paragraphe, la commission a préféré copier le Code hollandais, et ajouter, sans nécessité, trois nouveaux paragraphes. »
Je n'ajouterai que peu de mots aux paroles qui viennent d'être prononcées par l'honorable ministre de la justice, relatives à l'assurance sur fret. Tous les jours des polices d'assurances sont signées par l'entremise des courtiers pour assurer les frets. Dans ces polices on insère (page 1127) les mots : « Par dérogation à l'article 347 du Code de commerce, une telle compagnie assure une telle somme pour fret d'un tel navire. C'est un contrat volontaire qui se signe entre deux parties et l'assurance sur fret est devenue un usage commercial.
Je ne dirai rien de l'autorisation que le gouvernement a lui-même donnée par un arrêté du 9 octobre 1849, à la société anversoise d'assurances maritimes d'assurer le fret. M. le ministre a répondu à cet égard à l’honorable député de Bruges.
Le fret est divisé en deux ; la chose acquise et le bénéfice à espérer. La moitié du fret est acquise avant le départ du navire en compensation des frais d'armement qui sont faits, et il serait très curieux de voir qu'on ne pourrait pas assurer cette moitié, qui revient définitivement au navire, et surtout du moment que les deux parties déclarent déroger à une certaine disposition du Code.
Je ne m'oppose pas au changement de rédaction proposé par l'honorable M. Deliége ; cette nouvelle rédaction ne change en rien l'esprit de la loi. Mais je suis contraire, et je prie la Chambre de ne pas accepter la suppression des mots pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition qui se trouvent à la cinquième ligne du paragraphe 3, suppression proposée par l'honorable député de Bruges. Il est mieux de répéter deux fois la même chose que de laisser des doutes et des lacunes dans une loi. Pour ma part, je désire des lois claires et positives ; je suis ennemi des procès et je ne les chercherai jamais.
MM. les ministres des affaires étrangères et de la justice ayant annoncé la nomination d'une commission pour étudier la révision du Code de commerce, je ne dirai rien, en ce moment, en réponse au long discours que l'honorable M. Sinave a lu dans notre séance du 24 avril dernier, quand il a attaqué les raisons mises en avant par moi, pour engager le gouvernement à s'occuper de la révision du Code. Tout ce que je puis faire comme organe du commerce, c'est d'engager le gouvernement à s'occuper sérieusement et promptement de cette révision qui est réclamée par plus d'un intérêt.
M. Vervoort. - Je crois devoir donner quelques explications sur la signification des mots : « faire abandon ou se libérer par l'abandon ».
Ces mots ont fait l'objet d'une discussion dans le sein de la commission, et elle s'est arrêtée à la rédaction suivante : « Toutefois la faculté de se libérer de ces obligations par l'abandon n'est pas accordée à celui qui est en même temps capitaine et propriétaire ou copropriétaire du navire... »
Il est permis au propriétaire de se libérer par l'abandon du navire et du fret, parce que le capitaine est un mandataire obligé qui agit au loin en dehors de la surveillance du propriétaire.
Il n'est pas même permis à celui-ci de conduire son propre navire s'il n'est diplômé. Il est dès lors équitable de le dégager des obligations contractées par son mandataire moyennant l'abandon du navire au fret.
Si quelqu'un csl à la fois capitaine et propriétaire du navire, la position change, les motifs de la dérogation à la règle générale disparaissent et le capiiaine ne pourra pas, s'il est propriétaire ou copropriétaire du navire, se libérer de ses obligations par l'abandon.
Le texte du projet de loi portait en premier lieu ; Toutefois, la faculté de faire l'abandon n'est pas accordée au propriétaire, s'il est en même temps capitaine du navire. J'ai demandé la modification de ces termes, parce qu'il doit toujours être permis de faire l'abandon du navire ; seulement l'abandon n'opérera pas l'extinction complète des obligations contractées par celui qui est en même temps capitaine et propriétaire ou copropriétaire.
Le copropriétaire d’un navire doit subir la loi de la majoiité aux termes d'une disposition du Code de commerce ; si la majorité décide qu'il sera fait abandon du navire et du fret, au lieu de payer les sommes pour lesquelles elle est engagée, la part du capitaine copropriétaire sera comprise dans l'abandon.
Mais le créancier, le porteur de la lettre à la grosse, par exemple, aura le droit d'exiger la différence qui existera entre la valeur de la part du capitaine dans le navire et le moulant de sa part dans les dettes. Ainsi, quand le capitaine sera copropriétaire du sixième de la valeur du navire ; et que la majorité se prononcera pour l'abandon, il ne sera pas entièrement dégagé par cet abandon ; le créancier fera évaluer la part du capitaine, et celui-ci aura à suppléer jusqu'à concurrence du sixième du montant de la lettre à la grosse.
De cette façon les intérêts de tous sont sauvegardés ; si d'une manière absolue, on avait interdit au capitaine copropriétaire le droit de faire l'abandon de sa part dans le navire on aurait pu nuire inutilement à ses intérêts et à ceux de ses copropriétaires.
La disposition proposée est claire, et en l'adoptant nous aurons atteint le but que nous nous proposons, d'améliorer cette partie du Code de commerce.
M. Sinave. - L'honorable M. Vervoort a soutenu l'opinion de la commission, mais la rédaction qu'elle propose ne me paraît pas atteindre le but qu'elle a en vue. Il semble d'après cette rédaction que le capitaine ne peut pas faire l'abandon. J'avais proposé une rédaction qui lui reconnaîtrait la faculté de faire abandon tout en maintenant sa responsabilité personnelle en cas de copropriété, dans la proportion de sa part de propriété.
Mais il ne me semble pas qu'avec la rédaction proposée le capitaine puisse faire abandon. Il est seulement dit que la faculté de faire abandon n'est pas accordée. C'est le contraire qu'il faudrait dire. Si l'opinion de l'honorable M. Vervoort qui est la mienne doit prévaloir, il faudrait une autre rédaction. Je suis d'opinion que le capitaine doit faire abandon, propriétaire ou non propriétaire.
Comme vient fort bien de le dire l'honorable M. Vervoort, qu'arrivera-t-il lorsque le capitaine aura un quart du navire ?
Les propriétaires des trois quarts pourront faire abandon, le capitaine ne le pourra pas. La conséquence de la rédaction de la commission sera un procès.
L'honorable M. Vervoort se rallie-t il à la rédaction suivante que j'avais proposée dans la commission ; « Toutefois le propriétaire qui sera en même temps capitaine du navire sera responsable des engagements pris par lui, pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition, s'il est copropriétaire dans la proportion de son intérêt ? «
Je demande à ces messieurs s'ils comprennent bien la portée de cet amendement
M. Vervoort. - Je puis faire une concession à l'honorable M. Sinave, et admettre la suppression de quelques mots dans le dernier paragraphe ; mais je ne partage pas son avis sur la rédaction du second.
La loi ne saurait être plus claire ; j'ai exprimé la pensée de la commission. L'honorable M. Sinave partage sa manière de voir.
Nous avons reconnu qu'il faut laisser au capitaine la faculté de faire l'abandon de sa part de propriété dans le navire. D'un autre côté, nous sommes d'avis qu'il reste obligé dans la proportion de son intérêt. Il faut laisser le capitaine dans le droit commun, et ne pas entraver sa participation à l'acte d'abandon.
Mais il ne s'affranchira pas entièrement de son obligation par l'abandon. C'est ce que disent les termes de la loi.
M. Sinave. - C'est clair.
M. Vervoort. - Evidemment.
Je vois en définitive que nous sommes parfaitement d'accord.
Après la discussion à laquelle nous venons de nous livrer, il est impossible qu'il s'élève une difficulté sur le sens de la loi.
M. Coomans. - Il me semble que la Chambre est bien d'accord sur le sens à donner à l'article. Il est certain que les explications données par l'honorable préopinant sont des plus claires Mais l'observation de l'honorable M. Sinave est très exacte. Les explications de M. Vervoort sont opposées au sens de la loi, au seul sens raisonnable qu'on puisse y donner. En effet, l'honorable membre veut, comme nous tous, que le capitaine puisse faire l'abandon sans se libérer par cet abandon. Mais que dit l'article ? Que la faculté de se libérer par l'abandon n'est pas accordée au capitaine. Cela veut dire qu'il ne peut faire l'abandon.
- De toutes parts. - Non, cela veut dire qu'il ne peut se libérer.
M. Coomans. - Je sais bien qu'il y aura moyen de faire là-dessus des discours. Mais la phrase en elle-même est tout au moins douteuse. Elle cesse de l'être après les explications très claires de notre honorable collègue ; mais des explications ne suffisent pas pour déterminer le sens d'une loi, lorsque la rédaction est en opposition avec ces explications.
Il faudrait donc, ce me semble, une autre rédaction, telle que celle-ci : « Toutefois l'abandon ne le libère pas de ses obligations. »
M. Lelièvre. - C'est absolument la même chose.
M. Vervoort. - Il me semble que la rédaction de l'honorable M. Coomans ne diffère point de celle de la commission ; seulement le style de la phrase proposée par la commission est plus en harmonie avec les paragraphes précédents.
L'honorable M. Coomans demande qu'il soit dit que le capitaine ne se libère pas par l'abandon. Nous demandons que la faculté de se libérer par l'abandon ne lui soit pas accordée. S'il ne se libère pas, il n'a pas la faculté de se libérer.
En vérité, je n'aperçois pas ici de différence.
La pensée est clairement rendue par le texte de la commission, et j'insiste pour le maintien de ces mots : « la faculté de se libérer par l'abandon n'est pas accordée à celui qui est en même temps capitaine et propriétaire ou copropriétaire du navire. » Il résulte de là que le capitaine pourra faire l'abandon de sa part conjointement avec ses copropriétaires, mais il ne se trouvera pas libéré, et il y aura un compte à faire entre lui et les créanciers.
Encore une fois, après ces explications, toute contestation devant les tribunaux me paraît impossible.
M. Coomans. - J'abandonnerai volontiers le membre de phrase que j'ai indiqué, si tel est le désir de la Chambre. Mais je dois justifier la part très imprévue que j'ai prise à ce débat.
L'honorable M. Vervoort soutient en ce moment que la phrase qu'il défend est parfaitement claire. Cependant je dois faire observer qu'il a éprouvé le besoin de nous faire un long discours, dont je le remercie du reste, pour déterminer le sens de la phrase.
M. Vervoort. - A cause de l'amendement de l'honorable M. Sinave.
M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Je dois dire que je me rallie complètement aux observations présentées par l'honorable M. Vervoort.
(page 1128) Je comprends très bien qu'il ait expliqué dans un discours d'ailleurs très bien conçu, comment la commission est arrivée à cette rédaction. Il y a eu une discussion assez longue sur les différentes rédactions. J'ai soutenu pour un instant une rédaction opposée à celle de l'honorable M. Vervoort. L'honorable membre m'a prouvé que sa rédaction valait mieux, et je l'ai acceptée. C'est cette rédaction qui me paraît la plus claire de toutes, et je demande que la Chambre l'accepte.
- La discussion est close.
Les deux changements de rédaction proposés par M. Deliége sont mis aux voix et adoptés.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'article unique du projet ; il est adopté à l'unanimité des 60 membres présents.
Ce sont : MM. Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Vervoort, Visart, Wasseige, Anspach, Boulez, Brixhe, Calmeyn, Closset, Coomans, Coppieters 't Wallant, de Bronckart, de Decker, de Haerne, Delfosse, Deliége, F. de Mérode, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Perceval, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de T'Serclaes, Devaux, Dubus, Dumon, Frère-Orban, Jacques, Jouret, Lambin, Lange, Laubry, le Bailiy de Tilleghem, Lebeau, Lejeune, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Maertens, Manilius, Mascart, Matthieu, Mercier, Orts, Rousselle. Sinave, Tack, Thibaut, Thiéfry, Thienpont, Tremouroux, Van Cromphaut, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom, Vander Donckt.
- La séance est levée à cinq heures.
(page 1128) (Addendum) >M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, Je suis chargé de vous présenter le rapport de votre commission des pétitions sur une nouvelle série de nombreuses pétitions tendantes à la révision des lois sur le domicile de secours, sur les dépôts de mendicité et leur suppression,.
Voici l'analyse de ces différentes requêtes.
Par pétition, datée de Clermont, le 13 décembre 1854, le conseil communal vous expose que depuis longtemps toutes les communes rurales se plaignent, avec raison, des charges fort lourdes que font peser sur elles les lois actuelles sur les dépôts de mendicité et le domicile de secours, et demande leur révision.
Même demande de l'administration communale de Clercken, en date du 18 mai 1854.
Par pétition de Sulsiquc du mois d'avril 1855, les sieurs Leurere-Mosa et Aelgoet, président et secrétaire du comité dirigeant de la ferme de bienfaisance de Sulsique, prient la Chambre de s'occuper de la pétition de cette commune tendante à obtenir une nouvelle loi sur les dépôts de mendicité et l’établissement des fermes de bienfaisance.
Por pétition, datée de Leefdael, le 4 mai 1854, le conseil communal et autres habitants notables vous exposent qu'en France, sous la restauration on n’a pas cru devoir appliquer la loi sur le domicile de secours, et que depuis on y a formellement aboli les droits qu'ont ici les établissements de bienfaisance, de récupérer des communes les frais faits par leurs indigents ; ils osent vous supplier de voir si, à l'occasion des projets sur la bienfaisance dont vous allez vous occuper, il n'y a pas lieu de réviser la législation sur le domicile de secours ; les communes intéressées n'ayant aucun moyen de surveiller les pauvres qui les ont quittées, ne sont pas à même de leur fournir les moyens et les conseils qui sont propres à prévenir la misère et les charges que souvent leur inconduite occasionne.
Par pétition, datée d'Orroir, le 29 janvier 1854, le conseil communal dOrroir a l'honneur de vous exposer que les finances de la commune sont réduites à l'état le plus précaire par suite des frais qu'elle est obligée de payer aux dépôts de mendicité, le conseil se trouvant d'un côté devant l'obligation légale de payer, d'un autre côté, devant l'impossibilité d'y faire honneur, devra cesser d'administrer la commune et résigner douloureusement son mandat.
Il désire cepeudant vivement éviter cette fâcheuse extrémité, et vous supplie de réformer les lois actuelles sur les dépôts de mendicité.
Mêmes demandes des conseils communaux de Ghislenghien, Hollebeke, Evregnies, Attre, Brugelettc, Gages, Gibecq, Meslin-l’Evêque, Hieres, Lanquesaint, Ressaix, Bouvignies, Ostiches, Mainvault, Houtaing et le sieur Criquelion qui présentent un mémoire volumineux sur ce sujet.
Par pétition, dalée d'Aubel, le 27 novembre 1854, le conseil communal demande la suppression des dépôls de mendicité. Il appuie sa demande par les considérations suivantes ;
« Messieurs, dans votre séance du 15 novembre courant vous avez accueilli et renvoyé à votre commission des pétitions, des demandes des conseils communaux de Hombourg, Teuven, Gemmenich et Sippenaeken, tendant à la suppression des dépôts de mendicité.
Nous venons, messieurs, unir nos vœux à ceux qui vous ont été exprimés par ces conseils, en vous priant de vouloir bien abolir une institution qui absorbe le plus beau des deniers des communes, sans aucune utilité pour elles.
« Ces dépôts n'apportent aucun soulagement à la classe indigente, ne font même qu'accroître ses besoins, en ce sens que dans beaucoup de communes les revenus qui pourraient être employés à secourir bon nombre d'indigents sont absorbés par quelques-uns, qui souvent sont précisément ceux qui en ont le moins besoin. La commune que nous administrons a notamment eu à payer des sommes importantes pour l'entretien au dépôt d'individus valides, qui étaient en état de pourvoir eux-mêmes à leur subsistance par le travail, mais qui trouvaient plus commode de prendre, au dépôt de Reckheim, logement et pension aux frais de la commune.
« Cet abus, qui met à la merci de quelques vagabonds les finances des communes, ne se trouve compensé par aucun avantage. Les dépôts ne sont plus un moyen de répression de la mendicité, ils en assurent au contraire le libre exercice, car les administrations communales, dans la crainte de voir les indigents prendre volontairement ou forcément le chemin du dépôt, n'osent adopter aucune mesure pour arrêter les mendiants, les couvrent même de leur égide si quelque officier de police veut les contrarier dans leur métier. Le dépôt en un mot est la sauvegarde du vagabond, et n'est un épouvantail que pour les administrateurs des deniers communaux.
« Nous nous associons donc, messieurs, à nos collègues des communes précitées, pour vous prier de vouloir bien ordonner l'abolition des dépôts de mendicité. »
Par pétilion, datée de Thimister, le 12 octobre 1854, le conseil communal prie la Chambre d'examiner s'il n'y a pas lieu de supprimer les dépôts de mendicité.
Même demande du conseil communal de Herve.
Même demande du conseil communal de Fouron-Saint-Martin.
Même demande du conseil communal d'Ulbeek.
Même demande du conseil communal de Hombourg.
Même demande du conseil communal de Teuven.
Même demande du conseil communal de Gemmenich.
Même demande du conseil communal de Sippenaeken.
Même demande du conseil communal de Charneux.
Même demande du conseil communal de Fouron-Saint-Pierre.
Même demande du conseil communal de Batice.
« Les pétitionnaires font valoir les considérations suivantes à l'appui de leur demande.
« Depuis longtemps, toutes les communes du royaume se plaignent avec raison des charges que font lourdement peser sur elles la législation sur le domicile de secours et l'entretien des mendiants dans les dépôts.
« Il importe, ce nous semblc, de porter un remède efficace à cette plaie qui ronge les finances communales.
« Nous prenons donc la liberté d'appeler toute votre attention sur cet objet important en vous priant d'examiner s'il n'y a pas lieu de supprimer, comme nous le croyons, les dépôts de mendicité.
« Dans notre opinion, messieurs, ces établissements sont ruineux pour les communes, donnent lieu à une source d'abus, n'ont aucune utilité.
« D'abord il est constant que les dépenses occasionnées par l'entretien des mendiants ont augmenté depuis quelques années à tel point qu'elles nous enlèvent une partie notable de nos revenus, et certes rien ne peut nous assurer que dans peu de temps, la commune ne sera pas frappée de ruine ou d'insolvabilité ; car cette triste éventualité dépend entièrement de la volonté d'individus presque toujours fainéants, qui peuvent trouver qu'il est commode de se faire héberger aux dépens de la commune, et malheureusement le dernier exposé de la situation du royaume constate que la funeste tendance de grand nombre d'habitants est telle que les charges communales qui, en 1831, ne s'élevaient pas de ce chef à 300,000 fr., ont atteint et même dépassé le chiffre de 600,000 francs depuis 1845, et sont même allées en 1847 à plus de 900,000 francs.
» Aussi n'est-il pas rare de voir quelques reclus vagabonds valides, qui ne méritent aucune considération, se faire une hôtellerie des dépôts de mendicité, absorber autant et plus que les revenus du bureau de bienfaisance et voter ainsi un argent qui serait si utilement consacré à venir en aide à des malheureux dignes de pitié et d'intérêt.
« Sous l'empire, les dépôts de mendicité étaient des maisons de correction, qui ont été imparfaitement organisées ; depuis lois, ils sont devenus peu à peu des espèces d'ateliers de charité, où on ne travaille ni beaucoup, ni productivement, des asiles ouverts aux individus que l'habitude de l'oisiveté ou le vice ont poussés à la mendicité.
« Au 1er janvier 1854 ( porte l'exposé de la situation administrative de la province de Liège), le dépôt de Reckheim avait une population de 533 personnes valides et 77 seulement invalides ; aussi voit-on les mêmes individus être admis successivement dans les dépôts souvent six ou sept fois et même jusqu'à treize fois. D'un autre côté l'institution des dépôts de mendicité, quelle que soit l'amélioration qu'on ait apportée dans leur organisation, n'a pas répondu à sa destination. Etablis pour prévenir et réprimer la mendicité, ils n'ont pas atteint leur but, ils n'ont pas amendé les fainéants, les repris de justice ; an contraire ceux qui en sortent ne peuplent que trop souvent les prisons. Heureux encore si le séjour plus ou moins prolongé dans ces établissements d'ouvriers encore honnêtes, n'a pas exercé sur eux une action démoralisatrice en les exposant à perdre leurs habitudes laborieuses et à se dépraver.
(page 1129) Loin donc de diminuer le nombre des mendiants, ces maisons l'ont augmenté ; et fussent-elles même organisées de manière à obtenir ce bon résultat, peut-on croire qu'elles exerceront une grande influence sur la suppression de la mendicité, alors qu'on sait qu'elles ne peuvent contenir que 4,000 à 5,000 reclus et qu'au 1er août dernier il existait en Belgique 73,296 mendiants ; 40,916 hommes et 32,382 femmes.
« Les dépôts de mendicité nourrissent donc à peine le quatorzième des individus qui se livrent à la mendicité, et en grevant pour ee petit nombre de mendiants reclus, les communes d'une charge s'élevant de 600,000 à 900,000 fr., on prive celles-ci de ressources dont elles pourraient plus utilement disposer pour soutenir des ménages pauvres et ainsi les empêcher de contracter l'habitude de mendier.
« Les sacrifices qu'on impose aux communes produisent donc un résultat contraire au but qu'on se propose. Il n'est donc pas étonnant, que presque toutes elles demandent l'abolition d'un système qui entraîne de si funestes conséquences.
« Toutefois, messieurs, nous ne demandons pas l'impunité pour les individus valides qui, pouvant se livrer au travail, préfèrent se mettre à charge de la société ; ceux-là évidemment commettent un délit qu'il faut punir ; mais nous pensons que le moyen le meilleur de corriger ces êtres dégradés, c'est de les renfermer pendant un temps plus ou moins long dans nos prisons cellulaires, dussent les communes supporter en tout ou en partie les frais de cet emprisonnement.
« Ce genre de punition paraît avoir produit d'excellents résultats sur les individus considérés comme incorrigibles, pourquoi n'en ferait on par l'essai ?
« Quant aux autres mendiants, il nous paraît qu'on doit laisser à la charité publique et privée le soin de les secourir dans chaque commune ; la mendicité ne serait donc un délit que lorsque la personne qui s'y livrerait habituellement serait valide, ou lorsqu'elle aurait lieu, hors le territoire de la commune.
« Il appartiendrait aux administrations locales de prendre, sous le contrôle de l'autorité supérieure, les mesures nécessaires pour décider le mode le meilleur de diminuer, si pas entièrement supprimer la mendicité.
« En résumé, messieurs, on est généralement d'accord pour reconnaître que ce qui existe ne vaut rien, il faut donc le changer. La question, nous le savons, n'est pas facile à résoudre, mais il est temps de l'examiner sérieusement ; aussi croyons-nous avoir fait chose utile en vous présentant quelques considérations qu'ont fait naître les intérêts financiers de notre commune compromis par l'état actuel des choses. »
Votre commission, messieurs, en présence des nombreuses demandes sur lesquelles elle a déjà présenté ses conclusions, demandes qui se renouvellent chaque jour et pour ainsi dire sans cesse, émanant de la plupart, sinon de la généralité de toutes les communes rurales du royaume, et considérant les motifs très fondés qu'ils allèguent à l'appui de leurs pétitions, croit pouvoir appeler l'attention toute spéciale du gouvernement sur cet objet, afin qu'il leur soit fait justice dans le plus bref délai possible, et dans ces termes, elle a l'honneur de vous en proposer le renvoi à M. le ministre de la justice.