(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)
(Présidence de M. Delfosse.)
(page 801) M. Dumon procède à l'appel nominal à 2 heures.
M. Maertens donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.
M. Dumon présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.
« La dame Agnès Mansion demande l'établissement d'une caisse en faveur des veuves des sous-officiers de l'armée. »
- Renvoi a la commission des pétitions.
« Le sieur Vandenbrocck, docteur en médecine, soumet à la Chambre des projets de loi destinés à prévenir et à punir les sophistications des denrées alimentaires. »
M. de Perceval. - Je demande un prompt rapport sur cette requête, qui mérite à tous égards de fixer l'attention la plus sérieuse de la législature. Le pétitionnaire nous adresse un mémoire important sur la falsification des denrées alimentaires ; il signale les résultats nuisibles qu'elle engendre pour la santé publique. Les considérations émises dans cette requête sont d'un ordre très élevé, et il serait désirable qu'elles pussent amener une législation plus efficace pour réprimer sérieusement ceux qui ne craignent point de se livrer à l'odieuse spéculation de la falsification des denrées alimentaires.
M. Lelièvre. - J'appuie la demande de M. de Perceval avec d'autant plus de raison, que j'ai souvent signalé à la Chambre la nécessité de réviser la législation actuelle relativement aux sophistications des denrées alimentaires. Cette législation est incomplète et ne réprime pas suffisamment des faits graves propres à compromettre la santé publique.
- La proposition de M. de Perceval est adoptée.
« Des habitants de Poelcappelle présentent des observations contre la demande de séparer ce village de la commune de Langemarcq dont il fait partie et de l'ériger en commune spéciale. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des propriétaires et industriels à Boom prient la Chambre de prendre en considération la demande du sieur Mertens, tendant à obtenir, en faveur des défrichements des bruyères, un régime spécial de crédit. »
- Même renvoi.
« Des imprimeurs, libraires et marchands d'images, à Ypres et à Menin, demandent que les articles de librairie, expédiés de Lille, puissent leur arriver par le bureau de douane à Menin. »
- Même renvoi.
« Le sieur Houssen, facteur rural à Neuve-Eglise, détaché pour la distribution du bureau des postes à Warneton, demande une augmentation de traitement. »
- Même renvoi.
« Les sieurs Vanden Haute et Peeters, président et secrétaire d'une chambre de rhétorique établie à Anvers, demandent que les récipiendaires aux grades académiques, qui appartiennent aux provinces flamandes, soient tenus de subir un examen sur la langue et la littérature flamandes. »
- Renvoi à la section centrale, chargée d'examiner le projet de loi concernant les jurys d'examen.
« Le sieur Mertens adresse à la Chambre 110 exemplaires d'une brochure qu'il a publiée sous ce titre : « Du crédit à accorder pour le défrichement des 100,000 hectares de terres incultes qui existent encore en Belgique. »
- Distribution aux membres de l'assemblée et dépôt à la bibliothèque.
« Par dépêche du 22 février, M. le ministre des finances adresse à la Chambre un exemplaire du tableau général du commerce et de la navigation des Pays-Bas pendant l'année 1853. »
- Dépôt à la bibliothèque.
M. le ministre des finances (M. Liedts). - J'ai l'honneur, d'après les ordres du Roi, de déposer le projet de budget du département de la justice pour l'exercice 1856.
- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ce projet ; il sera imprimé et distribué. La Chambre le renvoie à l'examen des sections.
M. le ministre des finances (M. Liedts). (pour une motion d'ordre). - Il me sera impossible de déposer, dans le délai fixé par la loi, le projet de budget de l'intérieur pour l'exercice 1856, et vous en comprendrez la raison. Il est impossible d'arrêter ce projet de budget avant que celui pour l'exercice courant ait été voté. Or le délai fatal qui est le dernier jour de ce mois sera écoulé lorsque le budget de l'intérieur sera voté par le Sénat.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, les brigadiers, sous-brigadiers et préposés des douanes à Couvin, Bruly, Cul-des-Sarts, Gonrieux et Bailly, demandent une amélioration de position.
Comme la Chambre vient de prendre une décision par laquelle elle a alloué une somme de 400,000, fr. pour venir au secours de ces employés, la commission a l'honneur de vous proposer le renvoi pur et simple de la pétition à M. le ministre des finances,
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, je suis chargé de vous présenter, au nom de votre commission des pétitions, le rapport sur plusieurs séries de pétitions revêtues d'innombrables signatures. Ces pétitions émanent des différentes localités des provinces des Flandres, du Hainaut, de l'arrondissement de Nivelles, province de Brabant, etc.
Le plus grand nombre des pétitionnaires se plaignent en termes très amers et très énergiques de la manière dont on a exécuté la loi du 11 juin 1850 sur l'art vétérinaire. Ils demandent qu'un nouveau délai soit accordé aux artistes vétérinaires non-diplômes, et qu'en attendant qu'ils aient subi un examen pratique, ils soient autorisés à continuer l'exercice de leur profession. Ce sont des administrations communales, des fermiers, cultivateurs, engraisseurs et marchands de bétail ;
Les bourgmestres et échevins de Resseghem, Letterhautem, Bambrugge, Zonneghem, Vlierzeele et Borsbeke ;
Des habitants de ces communes ;
28 anciens maréchaux vétérinaires ;
Les bourgmestres et échevins des communes d'Oosterzeele, Gyzenzeele, Oomberghen, Landscauter et Hilleghem ;
Des habitants de ces communes ;
Les bourgmestre et échevins de Zelzaete et des habitants de cette commune ;
Les bourgmestre et échevins de Haesdonck, Tamise, Basele, Dickelvenne, Zemmersacke, Gavre ;
Les échevins et habitants de Vurste, de Pamel ;
Les bourgmestre et échevins d'Okeghem ;
Des habitants de Denderleeuw ;
Les échevins et habitants de Welle, de Denderhautem, d'Idderghem, de Zwyndrecht, de Mendonck, de Moerbeke, de Sinay, de Herdersem, de Wieze, de Moortsel, de Zeven-Eecken, de Saffelaere, de Melsele ;
Des habitants d'Oostacker, Destelberghen, Renaix, Sulsique, Watripont, Russeignies, Assenede, Bouchoute, Laerne, Peteghem-lez-Deynze, Caprycke, Saint-Jean-in-Eremo, Saint-Laurent, Nazareth, Zwyndrecht, Saint Paul-Waes, Zele ;
Les bourgmestres et échevins d'Audeghem, Olsene, Saint-Gilles, Eecke et Waterland-Oudeman ;
Des maréchaux vétérinaires de Pitthem, Moerkerke, Saint-André, Saint-Jacques-Capelle, Dixmude, Lessen, Alveringhem, Eggewaerts-Capelle, Lampernisse, Oostkerke, Caeskerke ;
Les cultivateurs et engraisscurs d'Iseghem, Lendelede, Wynkel-Saint-Eloi, Ouckene, Rumbeke, Dadizeele, Bixschote, Pollinchove, Boesinghe, Langemarcq, Zuydschote, Renynghe, Noordschote ;
D'autres habitants de Zeven-Ecken, de Saffelaere, d'Exaerde, de Vichte ;
L'administration communale et des habitants de Noville-sur-Mehaigne ;
Des habitants cultivateurs d'Ypres, Langemarcq, Heule, Leke, Schoore, Keyem, Zande, Vladsloo, Lichtervelde, Zuyenkerke, Dadizeele, Lisseweghe, Houthave, Meetkerke, Ujtkerke, Zwevezeele, Avelghem, Staden, Thielt ;
D'autres habitants de Pitthem et de Moen ;
Des habitants cultivateurs de Stuyvekenskerke, Oude-Capelle, Loo et Nieuwcapelle ;
Des habitants cultivateurs de Coolkerke, Gheluwe, Becelaere, Dadizeele et Houthem ;
Des fermiers cultivateurs d'Oostcamp, d'Assebroek, de Roulers, de Meulebeke, de Werken, d'Ooteghem, de Wulverghem, de Vinchem, de Wulveringhem, de Zillebeke.
Les maréchaux vétérinaires d'Oostnieuwkerke.
(page 802) Des fermiers cultivateurs et engraisseurs de Merkhem, Zonnebeke, Cuerne, Lendelede, Heule, Winkel-Saint-Eloi, Hulste, Bavichove, Harelbeke.
Des fermiers, engraisseurs de Hoogstaden et de Ruppelvoorde, de Moorsleden de Westcapelle, de Westroosebeke, de Melin, de Woumen, de Lathuy, de Pietrebais, de Chapelle-Saint-Laurent, de l'Ecluse, de Geest, de Saint-Remy, de Meldert, de Zantvoorde, de Thourouth, de Brielen, d'Hollebeke, de Wervicq.
A l'appui de leur demande, les pétitionnaires allèguent que, depuis l'expiration du délai accordé aux vétérinaires non diplômés, ils ont subi des pertes beaucoup plus considérables dans leur bétail, à cause de l'éloignement et de la pénurie de vétérinaires diplômés, l'état actuel des choses les oblige souvent d'attendre avec la plus grande anxiété pendant deux fois vingt-quatre heures, les secours de l’art ; bien heureux encore s'ils trouvent le vétérinaire chez lui et assez complaisant et disposé à les suivre souvent deux à trois lieues au loin. Ils se plaignent, en outre, des exigences démesurées des vétérinaires diplômés, et sans contester leurs connaissances théoriques, ils déclarent cependant qu'ils ne leur inspirent pas la même confiance que leurs vieux praticiens, riches d'expérience et qui leur ont donné des preuves réitérées de'leurs connaissances pratiques.
Ils font remarquer l'espèce de contradiction qui existe dans la loi du 11 juin 1850, en ces termes : Tandis que le propriétaire a droit de vie et de mort sur son bétail, qu'il peut le faire assommer, le faire mutiler par qui et comme il l'entend, on lui interdit de le faire saigner par qui et comme il l'entend, car après tout, disent-ils, le bétail n'est qu'un objet de commerce.
Ils terminent, en émettant le vœu que cette loi si désastreuse pour l'agriculture et qui menace le petit cultivateur de ruine, soit modifiée.
Ensuite par plus de trente pétitions de différentes localités, des maréchaux vétérinaires non diplômés sollicitent un nouveau délai, endéans lequel ils pourraient continuer à exercer leurs fonctions et être admis à subir un nouvel examen exclusivement ; ils se plaignent amèrement de la manière arbitraire dont la loi a été exécutée au sujet de l'examen pralique, qui consistait, disent-ils, dans une série de questions théoriques inabordables pour d'anciens praticiens, et soutiennent que les intentions bienveillantes du législateur n'ont pas été remplies.
Dans le nombre, il s'en trouve une, datée de Momale, province de Liège, le 9 décembre 1853, qui mérite une attention spéciale. Le sieur Centinne, artiste vétérinaire, se trouvait gravement malade au moment où il devait se présenter devant le jury pour passer son examen. Il a vainement sollicité, depuis, la faveur d'être admis plus tard ; un certificat signé de deux médecins se trouve annexé à la pétition. Il demande l'intervention de la Chambre pour obtenir cette faveur.
Par une dernière pétition datée de Nivelles le 12 février 1853, le sieur Bary, médecin vétérinaire établi dans cette ville, demande que le gouvernement régularise sa position. Le pétitionnaire a fait des études régulières et obtenu son diplôme, il se trouve établi depuis douze ans ; un autre confrère s'y trouve établi, qui seul est investi du titre de vétérinaire du gouvernement, seul il a la surveillance d'un marché hebdomadaire, seul il peut ordonner l'abattage pour cause de maladies contagieuses, seul il peut constater les contraventions à l'article 459 du code pénal, seul il peut délivrer les certificats pour la monte des étalons de l'Etat en station chez lui, seul il peut tout, à l'exclusion de son confrère qui pétitionne et qui est membre de plusieurs sociétés savantes.
Il prend la liberté d'appeler votre attention sur la position exceptionnelle que lui fait le gouvernement en prodiguant toutes ses faveurs à son collègue, ce qui rend sa position insoutenable ; il ose espérer que par votre puissante intervention sa position sera modifiée selon son mérite.
Votre commission, messieurs, a l'honneur de vous proposer le renvoi de ces nombreuses pétitions à M. le ministre de l'intérieur.
M. Rodenbach. - Messieurs, les pétitions sur lesquelles il vient de nous être fait rapport nous ont été adressées par les principaux cultivateurs de 150 communes des provinces des Flandres, de Brabant, de Hainaut, d'Anvers et de Liège. Ces pétitions sont assez importantes puisque, je le répète, les fermiers de 150 communes sont d'accord pour nous demander une modification à la loi.
Je sais bien qu'en vertu de la loi de 1850, les vétérinaires non diplômés ne pouvaient exercer légalement que pendant cinq ans. Mais il y a parmi eux une foule de pères de famille qui sont dans la misère, et les laboureurs prétendent que ces praticiens, avec leur vieille expérience, leur rendaient d'éminents services, parce qu'ils ne se faisaient pas payer cher et que leurs animaux étaient tout aussi bien traités qu'aujourd'hui. Dans plusieurs communes, un honorable député vient de me le faire observer, on ne peut obtenir de vétérinaire diplômé qu'en s'adressant à son 4 lieues ; et ce vétérinaire se fait payer 3, 4 et 5 francs par de petits fermiers. Il manque des médecins vétérinaires diplômés dans les campagnes.
Je sais que la science est nécessaire. Mais en présence du manque de médecins vétérinaires diplômés, il faudrait accorder encore quelques années aux médecins non diplômés et leur permettre de subir des examens et d'obtenir des diplômes.
Ce ne sont pas eux seuls qui le demandent ; ce sont des cultivateurs eux-mêmes, ce qui vous prouve que l'état actuel des choses donne lieu à des inconvénients.
Si j'ai bien entendu, la commission des pétitions vous propose le renvoi pur et simple à M. le ministre de l'intérieur des requêtes qui nous ont été adressées ; j'ajouterai avec demande d'explications. Je crois qu'une question d'humanité réclame ici une nouvelle mesure temporaire. On ne peut vouloir que de nombreux pères de famille restent plongés dans la misère, surtout dans un temps de cherté de vivres comme aujourd'hui. Il faudrait admettre ces vétérinaires à un examen tout à fait pralique et moins sévère que précédemment.
Il s'agit du traitement des animaux. En Angleterre où il y a le double de bétail qu'en Belgique et quatre fois plus de moutons, on n'exige pas de diplôme de ceux qui traitent les animaux ; cependant l'agriculture marche parfaitement bien.
Lorsqu'on a discuté en Belgique la loi sur l'exercice de la médecine, bien qu'il s'agît du traitement de l'espèce humaine, on a permis aux officiers de santé qui n'avaient pas passé d'examen, qui n'étaient que de simples chirurgiens, de pratiquer la médecine. Aujourd'hui encore de simples officiers de santé qui n'ont pas subi d'examens médicaux peuvent traiter les malades. On a fait une exception en faveur des officiers de santé que l'on n'a pas voulu plonger dans la misère. Et nous nous montreripns plus difficiles lorsqu'il s'agit du traitement des animaux, traitement qui peut s'exercer sans diplôme dans plusieurs pays et notamment en Amérique ! On veut forcer nos paysans à recourir à des médecins vétérinaires officiels qui les exploitent.
J'attendrai les explications de M. le ministre de l'intérieur.
M. Lelièvre. - Je ne m'oppose pas au renvoi demandé, mais je crois qu'il sera sans objet. Le projet de loi concernant la police sanitaire des animaux domestiques avait pour but de faire cesser plusieurs inconvénients auxquels donnait lieu l'ordre des choses en vigueur, l'honorable M. Rodenbach ainsi que M. le rapporteur de la commission ont voté le rejet de la proposition ministérielle. Je ne vois pas comment M. le ministre pourra satisfaire au vœu exprimé par l'honorable préopinant.
M. de Mérode. - J'appuie fortement les observations qui ont été présentées par l'honorable M. Rodenbach. Il est à ma connaissance que les habitants des campagnes se trouvent très gênés par la prohibition de se servir des anciens vétérinaires non diplômés.
Ces anciens vétérinaires avaient acquis un droit parfaitement légitime de continuer leur méthode sans être astreints à aucun examen, avaient des connaissances pratiques qui se transmettaient de père en fils et à l'aide desquelles ils avaient toujours, avant l'érection de l'école vétérinaire, traité avec succès les animaux.
Leur enlever le droit de continuer leur état, c'est une iniquité flagrante. J'ai encore eu, hier, chez moi un de ces vétérinaires. Il traitait le bétail appartenant à des fermiers que je connais, il a même soin des chevaux pour moi, et il les a parfaitement soignés. Aujourd'hui on lui défend d'exercer son état, ce qui est une injustice qu'on peut dire de première classe. Avant l'établissement d'une école vétérinaire, on n'avait pas d'artistes vétérinaires brevetés, et ces hommes qui avaient l'habitude de traiter les animaux sans autre diplôme que l'expérience, ne peuvent point passer d'examen. Mais quoiqu'ils n'aient point passé d'examen, ils traitent souvent les animaux beaucoup mieux que tous les savants de l'école. Ils savent guérir lorsque les brevetés ne guérissent pas. Dans tous les cas, il est de la plus grande iniquité de les priver d'un état qu'ils avaient embrassé dans les conditions de cette époque. Il est impossible que M. le ministre de l'intérieur ne cherche pas à leur rendre justice. J'appelle sur ce fait toute son attention, je le supplie de rétablir tous ces vétérinaires dans le droit dont ils étaient en possession et pour la conservation duquel il n'y a plus aucun examen à leur faire subir.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, l'exercice de médecine vétérinaire est réglé par la loi ; le devoir du gouvernement le devoir de tous est de faire respecter la loi. Je ne sais si la pétition signale des griefs réels, mais s'il en existe le gouvernement les fera cesser. Il n'y a donc pas le moindre obstacle à ce que la pétition soit renvoyée au ministre de l'intérieur, mais sans rien préjuger. S'il y a lieu de donner des explications, les explications seront données. Mais encore une fois c'est la loi qui est notre règle. La loi sera respectée.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Si j'ose appeler encore l'attention de la Chambre sur les nombreuses pétitions qui nous sont soumises et qui émanent de plus de 150 communes, ce n'est pas dans l'intérêt des vétérinaires non diplômés, bien que cet intérêt soit très respectable et devrait être pris en considération par la Chambre, mais c'est dans l'intérêt des petits cultivateurs. Les petits cultivateurs trouvent aujourd'hui menacés de la ruine.
(page 803) Quand un petit cultivateur a besoin des secours de l'art pour son bétail, il s'adresse au vétérinaire, et le vétérinaire ou se trouve éloigné de plusieurs lieues du domicile du propriétaire du bétail, ou bien il croit qu'il ne sera pas payé et il ne s'y rend pas ou il s'y rend tardivement. Il est au service des grands cultivateurs et ne s'inquiète pas du tout du petit cultivateur souvent fort gêné.
Messieurs, cet état de choses est tel, que les administrations locales de plus de 150 communes s'en sont émues.
Depuis l'expiration des deux années endéans lesquelles les anciens maréchaux vétérinaires pouvaient encore exercer leur art, le petit cultivateur est exposé à perdre son bétail avant que le secours de l'art ne lui arrive. C'est ce qui n'existait pas autrefois : autrefois un maréchal vétérinaire se trouvait à portée ou dans le voisinage de chaque ferme, on l'appelait, et souvent une simple saignée rétablissait le bétail malade.
Dans plusieurs pétitions, messieurs, on fait valoir cette considération-ci :
« Comment ! nous sommes propriétaires de notre bétail, nous avons droit de vie et de mort sur notre bétail, nous avons le droit de le faire assommer, de le faire mutiler, si cela nous convient, et nous ne pourrions pas le faire traiter par qui bon nous semble, quand il est malade ! Car, après tout, le bétail n'est qu'un objet de commerce. »
Vous comprenez, messieurs, l'anomalie de cette disposition législative et combien elle est vexatoire pour les petits cultivateurs, qui n'ont souvent, qu'une seule vache.
Chacun d'eux est menacé de ruine, si l'on n'obvie pas aux inconvénients que les pétitions vous signalent et qui sont la conséquence de la loi.
Quand autrefois ils pouvaient appeler le maréchal vétérinaire, de leur voisinage, ils étaient servis à des prix très modiques.
Aujourd'hui, messieurs, les vétérinaires qui ont fait des études régulières et qui se présentent à la ferme, exigent, d'après leur tarif, un salaire qui dépasse de beaucoup les ressources des petits cultivateurs.
Vous comprenez que, dans cette position, il y a quelque chose à faire. Si un nouveau délai n'est pas accordé aux vétérinaires non diplômés, nous serons forcés de prendre l'initiative et de proposer à la Chambre une modification à la loi. Si l'état actuel des choses n'eût pas été intolérable, aurait-il provoqué les pétitions couvertes d'innombrables signatures recueillies dans plus de 150 communes ? A la Chambre on se fait difficilement une idée de l'exaspération que cette exécrable loi a produite. C'est donc bien parce qu'il y a des griefs, c'est donc bien que l'agriculture est lésée dans ses principaux intérêts, que l'on s'est adressé à vous. Il n'y a pas de loi plus désastreuse, plus contraire aux véritables intérêts de l'agriculture qui a toute notre sympathie, à laquelle nous voulons tous du bien et que nous tâchons tous de soutenir, que la loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire.
Je demande donc que M. le ministre de l'intérieur veuille aviser aux moyens de pourvoir à cette lacune, et proposer, pour les artistes vétérinaires non diplômés, un nouveau délai endéans lequel ils pourront se présenter derechef à l'examen et continuer entre-temps l'exercice de leur profession.
Messieurs, il y a encore beaucoup à redire quant à cet examen, et les vétérinaires non diplômés qui ont pétitionné se plaignent amèrement de la manière dont la loi de 1850 a été exécutée ; le jury leur a posé des questions qu'ils ne pouvaient pas résoudre au moyen de leurs connaissances pratiques ; l'examen a été plutôt théorique que pratique.
Eh bien, il se trouve que plusieurs vétérinaires à cette époque, et il y a à ce sujet des pétitions dans le dossier très considérable que j'ai sous les yeux ; il se trouve, dis-je, que plusieurs vétérinaires, empêchés pour motifs de santé de se présenter à l'examen, ont vraiment sollicité du gouvernement l'autorisation de subir un nouvel examen. Ils ont été constamment repoussés.
C'est là encore une injustice flagrante envers ceux mêmes qui sont censés avoir le plus de connaissances et qui auraient été peut-être très capables de satisfaire aux exigences de la loi.
Une dernière pétition, qui mérite tout à fait votre attention, messieurs, est celle d'un vétérinaire de Nivelles Le sieur Bary demande que sa position soit régularisée par le gouvernement.
Il se trouve dans cette localité deux vétérinaires, ayant chacun fait des études régulières et pourvus chacun d’un diplôme. L’un, et ce n’est pas le sieur Bary, a toutes les faveurs du gouvernement, l’autre n’a rien ; le médecin, favorisé par le gouvernement, seul a le droit de délivrer des certificats pour la remonte des étalons en station chez lui ; seul, il a le droit de surveiller le marché hebdomadaire qui se tient dans cette commune ; seul, il a le droit de constater les contraventions ; seul, il a le droit d'ordonner l'abattage des animaux soupçonnés d'être atteints de maladies contagieuses.
Eh bien, le pétitionnaire se plaint amèrement de cette préférence accordée à son collègue. Quoiqu'il soit diplômé, il est écarté systématiquement, il n'obtient aucune des faveurs que le gouvernement prodigue à son collègue dans la ville de Nivelles.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Messieurs, on se plaint encore une fois évidemment à tort de la pression du gouvernement. M. de Mérode et M. le rapporteur se plaignent de l’excessive influence que le gouvernement exerce, en appelant toutes les faveurs sur les médecins vétérinaires qui sont diplômés. Je demanderai àl’honorable rapporteur, comme à tous ceux qui ont quelques notions de médecine, si on peut abandonner, la médecine humaine aussi bien que la médecine vétérinaire, à l'empirisme, si on peut laisser le champ libre à qui veut être médecin ou artiste vétérinaire.
Il est évident qu'il ne peut pas en être ainsi ; le rapporteur pas plus que personne ne peut le vouloir. Il faut des règles pour l’exercice de ces professions. Or, la loi de 1850 a réglé les conditions sous le bénéfice desquelles on peut exercer la médecine vétérinaire. Il y a des maréchaux et des médecins vétérinaires ; s'il n'y en a pas assez, c'est un mal qui tous les jours diminue.
On se plaint encore de ce que les petits cultivateurs ne reçoivent pas des secours quand ils ont des animaux malades, parce que les tarifs des médecins vétérinaires sont trop élevés pour eux. Si on voulait consulter la loi sur la matière et les arrêtés d'exécution, on verrait que les petits cultivateurs, les cultivateurs indigents, quand ils ont des animaux malades, n'ont qu'à prendre la peine de s'adresser au bourgmestre pour obtenir gratuitement les soins du médecin vétérinaire du gouvernement.
- Une voix. - Cela n'est pas !
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je déclare que cela est, et que cela se pratique. J'affirme que le gouvernement a fait tout ce qu'il a pu pour que les secours arrivassent à tous ceux qui ont droit de les obtenir. Toutes les fois qu'un petit cultivateur qui a un animal malade prend la peine d'aller demander au bourgmestre les soins du médecin vétérinaire du gouvernement, il les obtient.
M. Coomans dit que cela ne se fait pas ; je le prie de citer un fait précis, un cas où les secours demandés ont été refusés, le gouvernement en fera justice. (Interruption.)
On me répond : Oh ! oh ! Comment voulez-vous qu'on réforme des abus si vous vous bornez à produire une allégation sans fournir de preuves ? Quand le gouvernement prescrit quelque chose, la présomption est qu'il est obéi. Je n'ai le moyen de réprimer des abus que quand des faits sont dénoncés d'une manière précise. Je répète que les arrêtés sur la matière sont exécutés.
M. de Mérode. - M. le ministre de l'intérieur nous accuse d'avoir qualifié la conduite du gouvernement de tyrannique. Nous n'avons pas parlé de la tyrannie du gouvernement ; nous avons demandé qu'une loi trop gênante fût changée ; M. le ministre peut faire une proposition pour que la liberté de faire traiter les animaux par les anciens experts qui avaient acquis de l'expérience par la pratique soit rétablie. On ne nous accordera pas par là une liberté extraordinaire.
Ce n'est pas une liberté politique nouvelle ; de celles-là on nous en donne plus que nous n'en voulons pour être vexés par ceux qui en abusent, comme je l'ai fait voir d'une manière palpable, à telles enseignes que personne ne m'a répondu.
Nous demandons une liberté dont on jouit en France et en Anglelerre où l'on n'a pas encore imaginé de réglementer la médication des animaux comme celle des hommes.
On ne peut pas tuer un homme, mais comme on peut tuer un animal, on doit être libre de le faire saigner, sans être contraint de chercher à une distance plus ou moins longue un médecin vétérinaire.
Beaucoup parmi ceux qui traitent de ces questions n'ont pas la pratique de ce qu'elles concernent. C'est parce que j'ai l'expérience propre que j’en parle en connaissance de cause.
Chaque année je mets à l'engrais 40 bœufs en pâture. (Je donne ces détails pour faire voir que je sais ce dont il s'agit.) Celui qui les traite, en France où ils sont nourris, n'est point médecin vétérinaire breveté. Et depuis 20 ans que j'ai successivement ces 40 bœufs, je n'en ai presque pas perdu. Les propriétaires qui m'entourent font de même, et, comme moi, s'en trouvent bien.
Mais arrivent ici les grands mots.
On parle d'empirisme. Que m'importe qu'un traitement curatif s'appelle empirisme ou autre chose ? Il s'agit de soigner les animaux, il s'agit de les guérir. Que ce mode s'appelle empirisme, syncrétisme ou somnambulisme, peu importe ! Chacun est libre d'en user s'il le trouve bon en France et en Angleterre. Je ne vois donc pas pourquoi nous n'aurions pas la même liberté et je ne demande pas de liberté saugrenue.
Une loi trop restrictive pourrait être améliorée. Je n'accuse pas de tyrannie le ministre de l'intérieur, mais j'appelle de tous mes vœux son attention sur un changement que nous pourrions très utilement introduire dans la loi, en une demi-séance.
Nous ne sommes pas ici les mandataires des apothicaires ou des vétérinaires, mais bien des cultivateurs, dont il importe que nous maintenions la liberté personnelle et la faculté de pouvoir soigner leur bétail comme ils l'entendent. C'est un droit qui leur appartient et qu'il faut leur rendre incessamment.
(page 804) M. Rodenbach. - Je reconnais avec l'honorable ministre de l'intérieur que la science est nécessaire au médecin vétérinaire. On ne peut le contester. Je sais aussi que la loi de 1850 a réglé le mode d'exercice de la médecine vétérinaire. Mais la loi qui a fixé à cinq ans le délai dans lequel les médecins non diplômés doivent subir leurs examens peut, sans inconvénient aucun, prolonger ce délai de deux ou trois ans. Il y a là un motif d'humanité, car vous le voyez par le nombre considérable de réclamations dont la Chambre est saisie, les cultivateurs seraient très embarrassés pour faire donner à leur bétail les soins qu'il exige si le terme de cinq ans, fixé pour les examens, était rigoureusement maintenu.
- Plusieurs membres. - La clôture !
M. Coomans. - La Chambre s'est occupée longuement d'objets beaucoup moins importants ; et j'affirme que la rigueur avec laquelle on interdit aux médecins vélérinaires non diplômés l'exercice de leur profession a soulevé dans les campagnes d'unanimes réclamations. Je désirerais appuyer les bonnes observations présentées par les honorables préopinants.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Je demande aussi que l'on ne prononce pas immédiatement la clôture. Je n'ai que quelques mots à dire.
- La clôture est mise aux voix ; l'épreuve est douteuse. En conséquence la discussion continue.
M. le président. - Ceux qui sont mécontents d'une loi peuvent user de leur droit d'initiative.
M. Coomans. - Je trouve l'observation de M. le président très juste. Aussi j'insiste pour savoir si le gouvernement est disposé à proposer ou non la modification de la loi, afin que nous sachions s'il y a lieu d'user de notre droit d'initiative.
M. de Baillet-Latour. - Faites une proposition.
M. Coomans. - Nous aviserons.
Je n'admets pas du tout avec l'honorable ministre de l'intérieur qu'il soit du devoir du gouvernement de témoigner la même sollicitude pour la santé des animaux que pour celle des citoyens belges. L'honorable ministre prétend que nul n'oserait soutenir qu'il n'y a pas de graves inconvénients à rendre libre l'exercice de la profession de médecin vétérinaire. Mais je n'hésite pas à m'inscrire au nombre de ceux qui n'y voient pas d'inconvénient.
- Un membre. - C'est trop fort.
M. Coomans. - C'est tout simple, au contraire ; ce qui est trop fort, c'est votre intervention minutieuse dans les intérêts privés.
Je dois faire remarquer à l'honorable ministre de l'intérieur qu'en Angleterre est médecin vétérinaire qui veut, et qu'aux Etats-Unis, non seulement est médecin vétérinaire qui veut, mais encore est médecin pour les hommes qui veut.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - S'en trouve-t-on mieux ?
M. Coomans. - Cela ne m'étonnerait guère. Je ne crois pas qu'il meure plus de monde en Amérique, que chez nous. Cependant, je ne veux pas aller jusque-là. Je ne vais pas jusqu'à dire que le gouvernement ne doive pas prendre des mesures de précaution quand il s'agit de la santé des hommes, bien que la chose soit soutenable quand on peut invoquer l'exemple d'une nation aussi éminemment progressiste que les Etats-Unis.
Mais il n'en est pas de même quand il s'agit de la santé des animaux ; et il est certain qu'il peut résulter de graves inconvénients de la manière dont on applique la loi qui a créé un privilège exclusif pour les médecins diplômés.
Quoi ! messieurs, la liberté est admise dans des cas nombreux où il peut être dangereux d'en abuser : ainsi le campagnard est libre d'envoyer ses enfants à l'école qui lui convient, fût-elle dirigée par un ignorant ou un fripon ; il est libre d'aller à l'église qui lui convient lorsqu'il y a deux églises dans la commune, dont l'une est peut-être exploitée par un charlatan religieux ; il est libre de s'abonner au journal qui lui convient, même aux journaux que le gouvernement déclare mauvais, très mauvais. Mais ce même campagnard, qui est libre d'envoyer ses enfants à l'école qui lui convient, de traiter ses enfants en toute liberté, au risque de compromettre leur moralité, il n'est plus libre de faire saigner sa vache par qui bon lui semble. Comme l'a dit l'honorable M. Vander Donckt, il est libre de tuer sa vache, mais il n'est pas libre de faire saigner, même élémentairement, par un homme en qui il a confiance. Il ne peut appeler que le médecin diplômé du gouvernement. Je suis loin de prétendre que les médecins vétérinaires du gouvernement ne méritent pas toute la confiance des cultivateurs. Je désire même que cette confiance s'accroisse sans cesse. Mais reconnaissons qu'il y a des médecins vétérinaires non diplômés qui ont prouvé par une longue expérience qu'ils sont dignes de la confiance des cultivateurs, et laissons à ceux-ci un peu de liberté dans cet ordre d'idées. Ils n'en abuseront pas, car leur intérêt nous est garant du soin avec lequel ils s'assureront du savoir-faire des empiriques. Soyons conséquents.
Nous ferons bien de parler un peu moins de libertés et d'en laisser un peu plus à nos concitoyens.
Je puis confirmer ce qu'a dit l'honorable comte de Mérode, des difficultés réelles qu'a créées dans nos campagnes l'excessive rigueur avec laquelle on a traqué les médecins vétérinaires non diplômés.
J'ajoute qu'il en est résulté un mécontentement très vif et un véritable dommage pour la bourse des cultivateurs peu aisés. Je demande donc formellement à l'honorable ministre si son intention est de modifier cet état de choses. La mienne est d'en poursuivre la réforme.
- Plusieurs membres. - C'est notre intention aussi.
M. Coomans. - Nous agirons de concert.
M. Vander Donckt, rapporteur. - L'honorable ministre vient de nous dire que lorsque le petit cultivateur demande au bourgmestre l'autorisation de faire traiter gratuitement sa vache, le vétérinaire doit le faire. Nous savons tous ce qui en est de ces traitements gratuits ; je vous demande si le médecin vétérinaire est bien disposé à s'occuper de cela, alors qu'il a à faire d'autres visites qui sont largement rétribuées ; s'il ne préférera pas aller soigner les animaux de ses pratiques riches pour ne s'occuper des animaux, qu'il doit traiter gratuitement, que lorsqu'il aura du temps de reste.
Messieurs, pour vous montrer la sévérité dont on a fait preuve dans la loi contre laquelle on réclame, je me permettrai de vous citer un fait. Lorsque, sous l'Empire, Napoléon a voulu réorganiser tout ce que la révolution avait désorganisé, et lorsqu'il s'est occupé de la médecine et des hommes de l'art chargés de donner des soins à l'humanité, il a porté un décret en vertu duquel tous les empiriques qui exerçaient avec avantage depuis cinq ans et qui obtiendraient un certificat de l'administration locale, pourraient continuer l'exercice de leur art et que ce certificat leur tiendrait lieu de diplôme. J'ai connu des hommes de l'art de cette catégorie arrivés à un âge très avancé, qui n'ont jamais rencontré la moindre difficulté de la part de l'administration supérieure dans l'exercice de leur profession.
Comparez cette manière d'agir, alors qu'il s'agissait de la vie humaine, de ce qui nous est le plus cher, car après tout le bétail n'est qu'un objet de commerce, avec la sévérité dont on a fait preuve, dans la loi sur l'exercice de la médecine vétérinaire, envers les anciens praticiens, envers les maréchaux vétérinaires qui depuis nombre d’années ont exercé dans nos campagnes avec succès et y ont traité le bétail de nos petits cultivateurs en se contentant d'une rémunération infiniment plus modique que celle qu'exigent les vétérinaires diplômés. Jugez de l'énorme préjudice que porte cette loi aux intérêts des cultivateurs.
Je croîs devoir appeler toute l'attention de l'honorable ministre sur les pétitions nombreuses dont j'ai eu l'honneur de lui proposer le renvoi.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - On interpelle le gouvernement sur le point de savoir s'il entend faire cesser le système légal introduit par la loi de 1850. Ma réponse est fort simple. Le devoir comme l'intention du gouvernement est de faire exécuter la loi qu'il doit respecter.
Si des abus résultent de l'exécution de la loi, si ces abus sont portes à ma connaissance, s'ils me sont dénoncés, n'importe par qui, je les ferai cesser.
M. de Mérode. - Ils sont dénoncés.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Ils ne sont pas vérifiés. Loin d'être vérifiés, ils ne sont pas même précisés. On se borne à des assertions vagues. (Interruption.)
Je n'attaque les intentions de personne. Je suppose qu'on a l'intention de parvenir à assurer un bon service dans l'exercice de la médecine vétérinaire, mais, encore une fois, ce service ne peut être abandonné au hasard, et je suis convaincu que la loi de 1850 a ramené un peu d'ordre dans une matière où il n'y en avait guère, quoi qu'on puisse penser de l'aptitude des maréchaux vétérinaires qui n'étaient souvent que de simples maréchaux ferrants.
Il a fallu une loi ; la législature a porté cette loi. Cette loi, je la crois bonne, et jusqu'à ce qu'on me démontre qu'une modification y est indispensable, je m'abstiendrai d'en proposer une.
Mais chaque membre a le droit d'user de son initiative. Si l'honorable M. Coomans est tellement convaincu qu'il y a des abus à faire cesser, la voie lui est ouverte ; qu'il fasse une proposition ; le gouvernement l'examinera, et s'il est convaincu, comme l'honorable membre, de la nécessité de cette réforme, il y donnera très volontiers les mains. Jusque-là le gouvernement n'a l'intention de rien proposer.
- La discussion est close.
M. le président. - Il y a deux propositions : celle de la commission des pétitions qui propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur, et celle de M. Rodenbach qui propose d'ajouter, avec demande d'explication.
M. Rodenbach. - Je retire ma proposition.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M. le président. - L'article unique de ce projet de loi est ainsi conçu
« Article unique. Les limites séparatives entre la ville de Liège et les (page 805) communes de Grivegnée, de Herstal et de Jupille sont fixées conformément à la ligne B F tracée en brun sur le plan annexé à la présenté loi ; ligne formant l'axe de la Meuse. »
M. Lelièvre. - Le projet de loi propose de distraire de la commune de Jupille une parcelle de terrain à laquelle les autorités et les habitants de cette commune attachent une grande importance. On ne peut enlever à des communes peu populeuses des portions de territoire sans de graves motifs d'utilité publique, et le projet de loi ne démontre pas l'existence d'inconvénients réels qui résultent de l'état de choses actuellement en vigueur. Je désire que M. le ministre de l'intérieur nous donne des renseignements précis sur la nécessité de la mesure énoncée au projet qui ne me paraît pas suffisamment justifié. Il me semble qu'il existe d'autres moyens de prévenir les difficultés que peut faire naître la perception de l'octroi, sans qu'il soit besoin d'exproprier la commune de Jupille d'une parcelle qui a pour elle certaine utilité.
J'attendrai les explications du gouvernement avant de me prononcer définitivement sur le projet en discussion.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je commence par établir qu'il n'y a aucune espèce d'intérêt que l'on puisse apercevoir pour la commune de Jupille à contester la rectification qu'il s'agit de faire homologuer par la Chambre. Il n'y a pas de maison sur ce petit morceau de terrain qu'on propose de réunir non à la ville de Liège, comme la commune de Jupille le dit abusivement, mais à la commune de Herstal. En fait, il s'agit uniquement de régulariser les limites en ce sens qu'au lieu d'une limite qu'on ne peut apercevoir on en ait une bien tracée.
La Meuse, qui autrefois formait cette limite, a disparu de la localité où elle se trouvait. Il s'agit de reporter l'ancienne limite qui était sur l’axe de la Meuse ancienne à la Meuse actuelle, redressée par suite de la dérivation, et cela est demandé dans le but de faciliter la perception de l'octroi, sans qu'il en résulte de charge pour qui que ce soit.
Aujourd'hui la ligne de l'octroi se trouve sur un terrain où l'on ne peut reconnaître aucune limite. Pour que les employés de l'octroi et les habitants qui viennent des communes voisines puissent savoir le point où l'on touche le territoire de Liège, il a été nécessaire d'indiquer une nouvelle limite et de la reporter sur l'axe de la rivière redressée.
La commune de Jupille n'a pu indiquer aucun motif à l'appui de son opposition.
La ville de Liège n'a d'autre intérêt à cette question qu'un motif d'ordre et de régularisation de la ligne d'octroi. Personne ne peut en souffrir, la rectification au contraire profitera à tout le monde.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'article unique du projet qui est adopté à l'unanimité des 62 membres votants.
Un membre (M. Lelièvre) s'est abstenu.
Ont pris part au vote : MM. David, ec Baillet-Latour, de Bronckart, de Haerne, de La Coste, Della Faille de Leverghem, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Naeyer, de Perceval, de Portemont, de Renesse, de Royer, de Ruddere de Te Lokeren, de Steenhault, de Theux, de T'Serclaes, Devaux, de Wouters, Dumon, Jacques, Janssens, Jouret, Julliot, Lambin, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Lejeune, Lesoinne, Maertens, Magherman, Mercier, Moreau, Osy, Pirmez, Rodenbach, Sinave, Thiéfry, Thienpont, Tremouroux, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Grootven, Van Iseghem, Van Overloop, Van Remoortere, Vilain XIIII, Visart, Wasseige, Allard, Anspach, Boulez, Brixhe, Calmeyn, Coomans, Coppieters 't Wallant, Dautrebande et Delfosse.
M. Lelièvre. - Je me suis abstenu, parce que je ne suis pas convaincu de l'utilité de la mesure énoncée au projet.
Il est procédé au scrutin pour la prise en considération de plusieurs demandes en naturalisation ordinaire. En voici le résultat :
Nombre des votants, 64 ; Majorité absolue, 33 ;
Jeam-Baptiste-Joseph Druart, pontonnier, né à Gussignies (France), le 1er brumaire an V, domicilié à Farciennes (Hainaut), a obtenu 10 voix.
André Weinandy, propriétaire-cultivateur, né à Noortrange (grand-duché de Luxembourg), le 2 juin 1828, domicilié à Bourcy (Luxembourg), 12.
Vincent Prum, domestique, né à Clervaux (grand-duché de Luxembourg), le 6 avril 1823, domicilié à Neufvilles (Liège), 62.
Renier-Hubert-Guillaume Schols, négociant, né à Maestricht, le 23 avril 1809, domicilié à Sichen-Sussen-et-Bolré (Limbourg), 41.
Lambert-Guillaume Ackermans, commis aux écritures, né à Nuth (partie cédée du Limbourg), le 27 janvier 1820, domicilié à Bruxelles, 10.
Jean-Guillaume Vroemen, ébéniste, né à Beek (partie cédée du Limbourg), le 2 octobre 1821, domicilié à Bruxelles, 10.
Zandy Verger, négociant en soieries, né à Maestricht, le 9 février 1822, domicilié à Liège, 10.
Henri Van Es, commerçant, né à Maestricht, le 9 février 1820, domicilié à Bourg-Léopold (Limbourg), 10.
Hubert-Ferdinand Moreau, sans profession, né à Maestricht, le 15 novembre 1819, domicilié à Uyckhoven (Limbourg), 57.
François-Joseph-Hubert Peerboom, fabricant de pompes et de chaudrons, né à Galoppe (partie cédée du Limbourg), le 1er juillet 1815, né à Aubel (Liège), 56.
Michel Boever, curé, né à Goesdorf (grand-duché du Luxembourg), le 19 août 1796, domicilié à Awenne (Luxembourg), 53.
Nicolas Schroeder, cultivateur-propriétaire, né à Everlange (grand-duché de Luxembourg), le 5 octobre 1821, domicilié à Post (Luxembourg), 57.
Guillaume-Antoine-Hubert Schols, négociant, né à Maestricht, le 28 janvier 1825, domicilié à Fall-Mheer (Limbourg), 55.
Guillaume Robbers, employé à la Banque, né à Mook (partie cédée du Limbourg), le 11 germinal an XII, domicilié à Anvers, 55.
Paul-Louis-César de Grenus, consul général de Belgique près la confédération suisse, né à Féchez (Suisse), le 22 juin 1800, domicilié à Genève, 55.
Pierre-Julien Fonfrède, adjudant sous-officier au 3ème régiment de ligne, né à Bordeaux (France), le 5 mars 1817., 49.
Désiré-Guillaume-Joseph Rodenhorst, agent de police, né à Werlte (Hanovre), le 15 janvier 1829, domicilié à Schaerbeek (Brabant), 54.
Grégoire Vanmierlo, propriétaire, né à Hannut (province de Liège), le 19 novembre 1819, domicilié à Soignies, 56.
Jean Schneider, facteur rural, né à Pétange (grand-duché de Luxembourg), le 21 décembre 1823, domicilié à Martelange, 58.
Gérard Strous, garde-digues au canal de Maestricht à Bois-le Duc, né à Neer (partie cédée du Limbourg), le 17 septembre 1804, domicilie à Neeroeteren (Limbourg), 55.
Gaspard-Hubert Janssen, marchand plombier, né à Maestricht, le 6 janvier 1819, domicilié à Liège, 55.
Jean Manderscheid, tailleur, né à Wiltz (grand-duché de Luxembourg), le 12 décembre 1810, domicilié à Udangc (Luxembourg), 56.
Jacques Drissen, chef magasinier, né à Tegelen (partie cédée du Limbourg), le 18 mai 1814, domicilié à Anvers, 56.
Jean-Louis Schloesser, marchand de tabac, né à Felscheid (grand-duché de Luxembourg), le 14 avril 1808, domicilié à Bruxelles, 56.
Nicolas Wagner, propriétaire, né à Heiderscheid (grand-duché de Luxembourg), le 25 juin 1832, domicilié à Courtil (Luxembourg), 57.
François Bertrang, docteur en sciences physiques et mathématiques, né à Ingeldorff (grand-duché de Luxembourg), le 25 juin 1823, domicilié à Ixelles (Brabant), 56.
Pierre Mouzin, propriétaire, né à Rollingergrund (grand-duché de Luxembourg), le 16 mars 1800, domicilié à Nimy-Maisières (Hainaut), 57.
Nicolas Becker, propriétaire, né à Strassen (grand-duché de Luxembourg), le 5 février 1813, domicilié à Arlon, 57.
Nicolas Diesel, propriétaire, né à Luxembourg, le 15 juillet 1811, domicilié à Arlon, 57.
Jean-Henri Bosser, docteur en médecine, né à Venloo (partie cédée du Limbourg), le 13 avril 1812, domicilié à Ampsin (Liège), 56.
Charles Peusch, teinturier, né à Fischbach (grand-duché de Luxembourg), le 5 avril 1805, domicilié à Neufchâteau, 57.
Henri-Hubert Claessens, marchand de fer, né à Voerendael (partie cédée du Limbourg), le 29 juillet 1821, domicilié à Visé, 56.
Frédéric-Henri-Charles-Alexandre Van Laer, ancien militaire, né à Maesbrée (partie cédée du Limbourg), le 23 juin 1829, domicilié à Saint-Willebrord-lez-Anvers, 54.
Pierre Sinner, menuisier, né à Boevange (grand-duché de Luxembourg), le 16 juillet 1822, domicilié à Arlon, 56.
Jean-Pierre Origer, cultivateur, né à Hantcharage (grand-duché de Luxembourg), le 21 octobre 1824, domicilié à Waltzing (Luxembourg), 56.
Piètre Schaack, maréchal ferrant, né à Arsdorf (grand-duché de Luxembourg), le 22 février 1823, domicilié à Fauvillers (Luxembourg), 56.
Constantin-Servais Bruck, marchand de vins, né à Wiltz (grand-duché de Luxembourg), le 2 octobre 1822, domicilié à Warnach (Luxembourg), 56.
Prosper Mangin, gendarme à cheval ; né à Mersch (grand-duché de Luxembourg), le 14 juin 1831, domicilié à Beeringen (Limbourg), 56.
Jean-Henri-Joseph Suylen, curé, né à Sittard (partie cédée du Limbourg), le 15 octobre 1814, domicilié à Julémont (Liège), 52.
(page 806) Simeon Storemans, barbier et cordonnier, né à Weert (partie cédée du Limbourg), le 15 décembre 1816, domicilié à Bocholt (Limbourg), 55.
Samuel Verger, négociant, né à Maestricht, le 13 août 1819, domicilié à Bruxelles, 55.
Pierre Burquel, cultivateur, né à Grevenmacher (grand-duché de Luxembourg), le 19 octobre 1815, domicilié à Dochamps (Luxembourg), 55.
Jean-Mathieu Suntjens, meunier, né à Ruremonde (partie cédée du limbourg), le 14 août 1816, domicilié à Vilvorde (Brabant), 55.
Alvisius Possing, chapelier, né à Irrel (Prusse), le 4 juin 1822, domicilié à Rochefort (Namur), 56.
Guillaume-Hubert Meertens, domestique, né à Wylré (partie cédée du Limbourg), le 7 octobre 1818, domicilié à Berncau (Liège), 57.
Nicolas Possing, chapelier, domicilié à Echternach (grand-duché de Luxembourg), le 5 novembre 1818, né à Rochefort (Namur), 56.
Frédéric Possing, chapelier, domicilié à Ettelbruck (grand-duché de Luxembourg), le 18 avril 1788, domicilié à Rochefort (Namur), 56.
Simon Warcken, propriétaire, né à Mersch (grand-duché de Luxembourg), le 18 fructidor an XIII, domicilié à Freux (Luxembourg), 57.
En conséquence, les demandes des sieurs Prum, Moreau, Peerboom, Boever, Schroeder, Schols, Robbers, de Grenus, Fonfrède, Bodenhorste, Vanmierlo, Schneider, Strous, Janssen, Manderscheid, Drissen, Schloesser, Wagner, Bertrang, Mouzin, Becker, Diesel, Bosser, Peusch, Claessens, Van Laer, Sinner, Origer, Schaack, Bruck, Mangin, Suylen, Storemans, Verger, Burquel, Suntjens, A. Possing, Meertens, N. Possing, F. Possing, Warcken, sont prises en considération.
- La séance est levée à 4 heures et demie.