(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1852-1853)
(Présidence de M. Delfosse.)
(page 31) M. Ansiau procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.
- La séance est ouverte.
M. Vermeire donne lecture du procès-verbal de la séance précédente : la rédaction en est approuvée.
M. Ansiau fait connaître l'analyse des pièces adressées à la chambre.
« Plusieurs habitants d'Oostnieuwkerke prient la chambre de ne point donner son approbation à la convention littéraire conclue avec la France si elle n'est accompagaée d'une convention en faveur de l'industrie linière.
« Même demande de plusieurs habitants de Vive-Saint-Eloi. »
- Même renvoi.
« Le sieur Feys, caporal au 8ème régiment de ligne, demande à recouvrer la qualité de Belge, qu'il a perdue en prenant, sans l'autorisation du Roi, du service militaire à l'étranger. »
- Même renvoi.
« Plusieurs tanneurs et corroyeurs à Malines demandent une augmentation de droits d'entrée sur la peausserie en général, sur les cuirs laqués, maroquinés, mégissés, sur les tiges de bottes et les veaux cirés provenant de France. »
- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.
« Les sieurs Dequick, Hannart et autres membres du comité central des typographes belges, demandent que dans la convention littéraire conclue avec la France on réserve le droit de réimpression des ouvrages pour lesquels leurs auteurs ne seraient pas brevetés en Belgique. »
M. Verhaegen. - Cette pétition se rattache à la convention conclue avec la France, elle est donc palpitante d'intérêt et d'actualité. Je demande qu'elle soit renvoyée à la commission des pétitions avec prière d'un prompt rapport.
M. Orts. - La pétition qui vient d'être appuyée par l'honorable M. Verhaegen et que j'appuie pour autant qu'il est en mon pouvoir, est analogue à beaucoup d'autres qui ont déjà été déposées.
Je crois que les pétitions relatives au traité avec la France pourraient être examinées simultanément, et je réclame pour elles la faveur d'un prompt rapport.
M. de Muelenaere. - Je crois qu'il serait convenable que l'observation qui vient d'être faite par l'honorable M. Orts fùt communiquée à la commission, et qu'on comprît toutes les pétitions qui concernent les négociations avec la France dans un seul et même rapport. On pourrait ainsi mieux saisir l'ensemble de cette affaire et en apprécier toute l'importance.
M. Orts. - C'est ce que je demande.
- Le renvoi à la commission des pétitions, avec prière d'un prompt rapport, est ordonné.
« Plusieurs habitants de Rumbeke prient la chambre de rejeter le traité conclu avec la France. »
« Même demande de plusieurs habitants de Cortemarcq et de Wyngene.»
M. Rodenbach. - Je demande que la chambre comprenne dans un même rapport les pétitions concernant le traité avec la France.
M. le président. - La chambre l'a déjà décidé.
Les bureaux des sections pour le mois d'octobre sont constitués comme suit :
Première section
Président : M. Osy
Vice-président : M. Mercier
Secrétaire : M. T’Kint de Naeyer
Rapporteur de pétitions : M. de Perceval
Deuxième section
Président : M. de Muelenaere
Vice-président : M. Thiéfry
Secrétaire : M. Ad. Roussel
Rapporteur de pétitions : M. Magherman
Troisième section
Président : M. de Renesse
Vice-président : M. Deliége
Secrétaire : M. Coomans
Rapporteur de pétitions : M. le Bailly de Tilleghem
Quatrième section
Président : M. Mascart
Vice-président : M. Moxhon
Secrétaire : M. Vermeire
Rapporteur de pétitions : M. Jacques
Cinquième section
Président : M. Lesoinne
Vice-président : M. de Brouwer de Hogendorp
Secrétaire : M. Van Overloop
Rapporteur de pétitions : M. H. de Baillet
Sixième section
Président : M. Destriveaux
Vice-président : M. Lange
Secrétaire : M. Lelièvre
Rapporteur de pétitions : M. Allard
La commission de comptabilité est constituée comme suit :
1ère section : M. de Man d'Attenrode ;
2ème section : M. Thiéfry ;
3ème section : M. Julliot ;
4ème section : M. Charles Rousselle ;
5ème section : M. Rodenbach ;
6ème section : M. Van Iseghem.
Projet de loi ayant pour objet la construction d'un chemin de fer d'Anvers à la frontière de Hollande
M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke) présente à la chambre un projet de loi ayant pour objet la construction d'un chemin de fer d'Anvers à la frontière de Hollande.
- La chambre donne acte à M. le ministre de la présentation de ce projet de loi qui sera imprimé et renvoyé aux sections.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre des votants, 72.
Majorité absolue, 37.
Pierre-Julien Fonfrède, sergent-fourrier au 3ème régiment de ligne, obtient 27 suffrages ;
Ernest-Christophe Freitag, musicien gagiste au régiment de chasseurs-carabiniers, obtient 33 suffrages.
Jean-Baptiste Biche, sergent-major au 1er régiment de ligne, obtient 27 suffrages.
Fidèle Staudenraus, employé à l'hôpital militaire, obtient 34 suffrages.
En conséquence, ces demandes de naturalisations ne sont pas prises en considération.
M. le président. - Avant de donner la parole à M. Destriveaux je dois consulter la chambre sur la fixalion de la prochaine séance et de l'ordre du jour.
- La chambre décide que la prochaine séance aura lieu mercredi à 2 heures.
- La commission des pétitions est invitée à préparer pour cette séance les prompts rapports qui lui ont été demandés.
Développements et prise en considération
La proposition de MM. Destriveaux et consorts est ainsi conçue :
« Art. 1er. L'article 55 de la loi du 21 juillet 1844 et de celle du 17 février 1849 sur les pensions, ainsi conçus :
« Toute veuve qui se remarie perd ses droits à la pension »,
Ainsi que les statuts qui en sont la conséquence, sont abrogés et remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. 2. Toute veuve sans enfants qui se remarie est soumise aux conditions suivantes :
« A. Si la pension dont elle jouit est inférieure à cinq cents francs, elle est réduite d'un huitième ;
« B. Si elle s'élève de 500 à 1,200 fr., la réduction est d'un sixième ;
« C. Si la pension est de 1,200 fr. et au-delà, la réduction est d'un quart.
« Art. 3. Les enfants mineurs, issus du mariage dissous par la mort du mari, jouiront, jusqu'à l'âge de 18 ans accomplis, de la moitié de la pension nominale, la réduction tombant entièrement à la charge de la mère remariée.
« Art. 4. Les enfants nés du nouveau mariage n'ont aucun droit à la survivance de tout ou partie de la pension de la femme remariée. »
M. Destriveaux. - Messieurs, les articles 29 et suivants de la loi du 21 juillet 1844 ordonnent l'institution des caisses de pensions au profit des veuves et des orphelins des magistrats, fonctionnaires employés par le trésor public, etc.
Elles sont alimentées par les retenues faites sur les traitements et suppléments de traitements, et ne peuvent en aucun cas être subsidiées par le trésor public. Les pensions ont une double destination de durée : Pour les veuves, elles sont viagères quelle que puisse être la longévité de la titulaire.
Pour les orphelins, la durée est temporaire et cesse quand ils ont atteint l'âge déterminé.
La raison de cette différence est sensible ; plus la veuve avance en âge, plus les besoins de son existence se multiplient, et plus diminuent les moyens d'y pourvoir.
L'orphelin, au contraire, acquiert avec l'âge, la connaissance et la pratique des métiers ou des arts qui peuvent lui donner des ressources dans la vie.
Les pensions ou les quartiers ne peuvent être saisis et ne sont cessibles que jusqu'à concurrence d'un cinquième pour dette envers le trésor public et d'un tiers pour les causes exprimées aux articles 203, 205 et 214 du Code Civil. (Article 45 de la loi.)
La condamnation à une peine infamante emporte la privation de la pension ou du droit à l'obtenir, sauf la modification en cas de grâce ou de réhabilitation.
Mais une disposition bien remarquable accorde, dans le cas prévu dans le précédent paragraphe, sur le trésor public, à la femme et aux (page 32) enfants mineurs du condamné une pension égale à celle qu'ils auraient reçue de la caisse des veuves et des orphelins si le condamné était décédé.
Ainsi donc le cas de condamnation à une peine infamante n'emporte que conditionnellement et non définitivement la privation de la pension. La loi adoucit même sa sévérité en faveur de la femme ou des enfants mineurs du condamné.
Rapprochons la portée de la loi de l'article 55 des lois du 21 juillet 1844 et du 17 février 1849.
« Toute veuve qui se remarie perd ses droits à la pension. »
Il n'y a rien là de conditionnel, tout est absolu, définitif ; et s'il y a des enfants mineurs du premier mariage, il n'y a pour eux ni adoucissement, ni expectative.
Le second mariage n'est pas cependant en soi un acte immoral que les lois puissent reprouver, encore moins punir.
L'individu frappé de mort civile était encore capable de recevoir, par testament, à titre d'aliments (article 28 du Code Civil). La rente viagère ne s'éteignait pas par la mort civile du propriétaire, le payement devait en être continué pendant sa vie naturelle (article 1982 du Code Civil) et ce que ne permettait pas le Code Civil, dans le cas de mort civile, ce que n'autorise qu'avec adoucissement la loi de 1844, en cas de condamnation à une peine infamante, la même loi la prononce sans appel en cas du second mariage de la femme.
Sur quoi se fonde donc une pareille sévérité ? Serait-ce sur un intérêt financier ? Ce serait un motif bien faible ; et encore n'existe-t-il pas, le second mariage ne change en rien l'élévation ni la durée de la pension.
Est-ce parce que la femme trouvant un protecteur et une augmentation de fortune dans une seconde union, ses besoins et ses droits à la pension cessent ? Mais a-t-on prévu le cas où elle recueillerait une riche succession ? Disons donc que ce n'est pas sous l'empire d'une hypothèse qu'on doit priver une femme d'une ressource acquise par les travaux d'un premier mari et sa propre économie en contribuant aux retenues.
Ajoutons que forcer une femme à ne présenter pour apport dans une seconde union que le retrait définitif d'une partie et peut-être de la totalité de ses moyens d'existence, c'est rendre cette union bien souvent impossible ; et alors que peut-il arriver ? Qui osera répondre que la morale, que la loi conserveront leur empire ? et que la passion n'entraînera pas ceux qui sont ainsi séparés par la loi à s'unir par la passion ? Ils seraient sévèrement jugés ; mais le scandale n'en existerait pas moins. C'est pour éviter de si funestes conséquences, que le projet de loi dont il s'agit vous a été présenté, messieurs ; vous en méditerez les principes, les dispositions, et votre sagesse décidera.
- Personne ne demandant la parole, la prise en considération est mise aux voix et prononcée, et la proposition est renvoyée à l'examen des sections.
La séance est levée à 3 heures et un quart.