(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1851-1852)
(Présidence de M. Verhaegen.)
(page 711) M. Vermeire procède à l'appel nominal à 2 heures et demie.
La séance est ouverte.
M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.
M. Vermeire présente l'analyse des pièces suivantes adressées à la chambre.
« Plusieurs propriétaires et cultivateurs à Roulers demandent qu'on enlève, a l'époque de leur maturité, les peupliers qui croissent le long des routes de l'Etat et de la province et qu'on les remplace par une autre essence d'arbres plantés à des distances plus éloignées. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Frans Van Loo, courtier de navires à Gand, demande qu'il soit pris des mesures pour sauvegarder l'institution des courtiers maritimes. »
M. Delehaye. - Cette affaire ayant un caractère d'urgence, je prierai la commission des pétitions de faire un prompt rapport sur cette pétition. Il s'agit de la loi concernant les courtiers de navires.
- Le renvoi de cette pétition est ordonné, avec prière d'un prompt rapport.
« Art. 110. Il ne pourra être établi, à l'avenir, sans autorisation du gouvernement, aucun four à chaux ou à plâtre, soit temporaire, soit permanent, aucune briqueterie et tuilerie dans l'intérieur et à moins de 250 mètres des bois et forêts soumis au régime forestier, à peine d'une amende de 80 à 300 francs et de démolition de ces établissements. »
M. David. - J'ai l'honneur de proposer la suppression des articles 110, 111,112, 113, 114 et 115. Vous avez vu que tous ces articles apportent des restrictions à la faculté de bâtir dans un certain rayon des forêts de l'Etat, des communes et des établissements publics. Vous concevez que c'est là une véritable et grave atteinte portée à la propriété des particuliers, que de leur interdire d'user de leurs héritages conformément au Code civil.
C'est un véritable interdit que vous jetez sur une quantité de propriétés, que nous ne pourrions pas bien apprécier aujourd'hui, car la mesure qui jusqu'à présent n'était, à mon avis, illégalement appliquée qu'aux bois domaniaux, va s'étendre à tous les bois des communes et des établissements publics. Je pense même que, jusqu'à un certain point, l'article 11 de la Constitution pourrait s'opposer à l'adoption de ces articles, car on peut comparer cette interdiction à une espèce d'expropriation forcée, mais sans indemnité préalable.
Jusqu'à présent l'interdiction a été appliquée aux forêts domaniales et on s'appuyait pour l'application aux articles 17 et 18 du titre 27 de l'ordonnance de 1669 ; mais d'après des arrêts de nos cours d'appel et de cassation, jamais ces articles n'ont été publiés en Belgique ; par conséquent, ils n'avaient pas force de loi. J'ai même été même souvent étonné de voir figurer au Moniteur des autorisations de bâtir dans un tel rayon des forêts domaniales.
Quand les interdictions ne s'appliquaient qu'à un rayon entourant les forêts de l'Etat, le mal n'était pas excessivement grand. Ces forêts sont toutes assez compactes et d'une grande étendue et elles se trouvent généralement dans des pays fort peu habités. Aujourd'hui, qu'il est question de l'étendre aux forêts communales, vous sentez qu'une masse de propriétaires vont être frappés de la même interdiction, car il est indubitable que les terrains dont on ne pourra pas faire tout l'usage que la loi devrait leur accorder, perdront énormément de leur valeur. Pour appliquer ce système, vous êtes même obligés d'aller excessivement loin.
En effet, par l'article 118, vous êtes obligés d'appliquer une législation exceptionnelle à des bâtisses dans le rayon réservé des forêts. C'est ainsi que les gardes forestiers, les agents forestiers pourront y faire des perquisitions, sans être accompagnés, ni du bourgmestre, ni d'un échevin, ni d'un officier de police.
C'est une mesure exceptionnelle à laquelle vous assujettissez une partie du sol de la Belgique.
Je combats encore à ce point de vue la restriction apportée par les articles que j'ai cités tantôt.
On cherche à repeupler les Ardennes qui sont précisément le pays où se trouve la plus grande quantité de forêts ; nous allons directement contre le but que nous voulons atteindre. On cherche à faire défricher, à rendre à la culture les terrains couverts de bruyères ; comment pouvez-vous espérer d'y attirer des populations si vous leur défendez de bâtir là où il leur conviendra, si vous les astreignez à bâtir au milieu des agglomérations d'habitations déjà existantes où les terrains sont plus chers, où les dangers d'incendie sont plus grands. Vous les éloignez nécessairement.
Par la loi de 1847 sur les défrichements qui comprend aussi les repeuplements par plantation, vous allez couvrir une partie des Ardennes, des provinces de Liège et de Luxembourg de forêts. Dans un avenir plus ou moins rapproché, ces forets s'élèveront sur des terrains aujourd'hui vagues où il est permis de bâtir, il ne restera plus d'endroit à choisir pour établir des constructions, on ne pourra bâtir que dans les agglomérations d'habitations déjà existantes.
Si vous obligez les populations pauvres qui voudraient se transporter dans les pays à défricher, à ne bâtir que dans ces agglomérations, vous les mettrez dans une position mauvaise pour la bâtisse, les terrains seront très chers à acheter ; ces populations ne trouveront pas avantage à se rendre sur les terrains qu'on voudrait voir livrer à la culture qui consistent aujourd'hui en terrains incultes, en bruyères, en pâtuages qu'on trouve être de très peu de valeur, mais qui en ont beaucoup pour nos populations des Ardennes.
Je viens d'énumérer quelques-unes des raisons qui doivent vous faire rejeter les articles 110, 111, 112, 113, 114 et 115. Vous ne voudrez pas inscrire dans la loi une atteinte à la propriété, une espèce d'expropriation, vous ne voudrez pas entraver la culture et le reboisement des Ardennes ; par conséquent, vous adopterez l'amendement que j'ai l'honneur de proposer.
M. Lelièvre. - Comme on l'a fait observer avec vérité, les articles 110 et suivants renferment des dispositions trop rigoureuses et, en ce qui me concerne, je ne puis y donner mon assentiment.
On frappe de nouvelles servitudes les terrains voisins des bois appartenant aux communes et aux établissements publics. Jusqu'à présent pareilles servitudes n'étaient établies qu'en faveur des forêts de l'Etat. Le projet introduit donc une innovation qui affecte notablement les propriétés rurales contiguës aux bois des communes et des établissements publics et en déprécie considérablement la valeur. Cela est d'autant plus injuste qu'on sacrifie des biens ruraux souvent très importants en faveur de propriétés boisées qui n'ont pas la même valeur que les terrains voisins qu'on déprécie.
Il n'est pas exact de dire qu'on maintient l'état actuel des choses, puisqu'on étend la servitude à d'autres cas et en faveur d'autres bois que ceux de l'Etat.
La servitude est établie sans indemnité ; à mon avis, on doit être très circonspect en pareille matière, puisque en réalité cet ordre de choses constitue une atteinte au droit de propriété.
J'appelle surtout l'attention de la chambre sur l'article 112 qui prohibe la construction de maisons, fermes ou bâtiments dans certain rayon.
Mais un terrain dont on ne peut se servir pour bâtir est un terrain qni diminue considérablement en valeur. Je ne puis donc souscrire à semblable disposition.
D'autre part, je ne conçois pas comment, lorsqu'il s'agit de bâtir non loin des bois appartenant aux communes ou à des établissements publics l'on ait besoin de recourir au gouvernement. Si l'on veut établir de nouvelles servitudes au détriment des propriétaires riverains, la simple autorisation de la députation permanente doit suffire lorsqu'il n'est pas question des bois de l'Etat. Sous ce rapport, les prescriptions des articles 110 et suivants me semblent exorbitantes et inadmissibles. Si l'on jugeait convenable d'établir la prohibition, il me semble au moins qu'il faudrait ne pas exiger l'autorisation du gouvernement relativement aux bois communaux et à ceux des établissements publics.
En effet, il est hors de doute que la députation est à même d'apprécier convenablement des questions de ce genre et les motifs qui doivent engager, dans certains cas particuliers, a maintenir ou à faire cesser la prohibition de bâtir. En adoptant une modification en ce point, nous restons fidèles à l'économie du projet amendé qui, relativement aux bois communaux et à ceux des établissements publics, a en général choisi pour juge la députation permanente. Il s'agit du reste, en cette occurrence, de questions de localité que l'autorité provinciale peut mieux décider que le pouvoir central, éloigné des lieux où les constructions doivent être établies.
M. Orts, rapporteur. - Messieurs, la mesure que l'honorable M. David propose d'introduire constituerait un changement radical dans notre régime forestier. En Belgique comme en France, comme dans tous les pays où les forêts sont l'objet de la sollicitude du législateur, on a reconnu que l'intérêt de la conservation de ces propriétés exigeait d'écarter des lisières les établissements dont il est question dans les articles 110 à 118 ; on a compris que cela était utile à un double point de vue : d'abord pour éloigner des forêts les chances des incendies qui sont plus dangereux et plus graves dans une forêt que partout ailleurs, plus propres à compromettre la sécurité de populations entières.
D'un autre côté, les mesures de précaution que contiennent ces articles sont motivées par une considération d'un autre genre, par une exigence de bonne police. Il est presque impossible d'obtenir une surveillance active quant à la recherche des délits, si l'on ne soumet pas à certaines obligations, tendant à faciliter cette surveillance, les habitations voisines des forêts. Cela est reconnu partout ; cela est, je le répète, admis dans toutes les législations forestières.
Les honorables MM. David et Lelièvre s'effravent très fort de voir appliquer aux habitations voisines des bois des communes et des établissements publics, les mesures de surveillance existant pour les habitations voisines des bois domaniaux ; ils voient là une très grande innovation.
(page 712) Pour ma part, je ne considère pas la chose comme complètement neuve. J'ai des doutes sérieux sur le point de savoir si la législation actuelle permettrait de soustraire à ces mesures de surveillance les habitations voisines des bois des communes et des établissements publics. Le fait d'avoir soumis dès l'an X les bois des communes et des établissements publics au régime forestier me paraît suffire pour justifier l'application des mesures concernant les forêts domaniales aux forêts qu'on leur a plus tard assimilées.
Quoi qu'il en soit de cette observation, qui a cependant son importance, je dis que la mesure n'a pas toute l'étendue qu'on se plaît à lui attribuer pour la combattre.
Ainsi, il faut remarquer qu'en Belgique le terrain « forestier » est passablement limité, quant à son étendue.
Vous pouvez voir en tête du rapport le nombre d'hectares de bois, appartenant aux communes et aux établissements publics, sur toute la surface du pays.
D'un autre côté, les servitudes dont il est ici question sont considérablement amoindries par le projet de votre commission, comme elles l’ont déjà été par le projet de la commission gouvernementale, chargée de rédiger les bases du Code forestier, comme elles le seront peut être encore par les amendements que la discussion fera surgir au sein de la chambre.
Elles ont été, en effet, réduites de moitié par la première commission, de moitié par la seconde ; et je ne serais pas étonné de voir surgir et adopter des amendements qui les réduiraient encore de moitié. Ce qui, en définitive, réduirait les servitudes au huitième de ce qu'elles étaient primitivement.
Avec des tempéraments de cette espèce, cette législation que nous voulons introduire n'est pas une mesure de rigueur, et ne tend pas à déprécier un grand nombre de propriétés rurales dans notre pays.
L'honorable M. David a élevé des doutes sur la constitutionnalité de la mesure.
L'honorable M. Lelièvre a attiré votre attention sur l'injustice qu'il y aurait à établir des servitudes de cette espèce sans indemnité.
Que l'honorable M.David se rassure sur la constitutionnalité, et la chambre avec lui ; la Constitution défend d'exproprier sans indemnité ; mais elle n'a jamais défendu de grever de servitudes légales, dans des vues d'intérêt public, les terrains qui, en raison de leur situation, doivent être nécessairement grevés de charges de cette nature. La meilleure preuve de ce que j'avance, je la tire de l'interprétation donnée par nos tribunaux à la Constitution, lorsqu'il s'est agi de la création des servitudes militaires nécessitées par les besoins de la défense de nos places de guerre.
Chaque fois que l'on a élevé la question de savoir s'il y avait lieu à indemnité dans ce cas, les tribunaux en ont repoussé la demande ; ils ont dit que la Constitution invoquée par l'honorable M. David n'avait rien de commun avec les charges du genre de celles des servitudes, qu'elle avait trait à l'expropriation, c'est-à-dire à l'enlèvement complet de la propriété.
Messieurs, l'invocation de cette jurisprudence constante dans le pajs répond également à l'exorbitance que signalait l'honorable M. Lelièvre en insistant sur la sévérité de la loi. Dans les cas que je viens d'indiquer comme pour toutes les autres servitudes légales, pour les servitudes de halage, par exemple, s'il plaisait au gouvernement de transporter le chemin de halage de la rive gauche à la rive droite d'une rivière navigable, la question d'indemnité est uniformément résolue et sans hésitation.
Remarquez-le, messieurs, on fait dans le projet ce qu'on a fait dans le Code forestier de 1827, en France, à l'égard des forêts autres que les forêts de l'Etat. Pourquoi ? Parce qu'il faut être, avant tout, conséquent dans une législation que l'on crée.
Si vous assujettissez les bois des établissements publics et des communes au régime forestier, c'est parce que vous croyez que le régime forestier qui auparavant régissait les seuls bois de l'Etat est un régime plus favorable à la conservation de ce genre de propriété que toute autre législation. La conservation de cette propriété, vous la considérez comme une chose d'ordre public, d'intérêt général, puisque vous vous donnez la peinc de rédiger un Code spécial pour atteindre ce but de conservation. Eh bien ! qui veut la fin veut les moyens, qui veut un bon régime forestier doit accepter les conséquences qu'un bon régime forestier entraîne avec soi.
En 1827, je viens de le dire, on a fait en France ce que nous voulons faire aujouid'hui. S'est-on depuis lors récrié la contre les inconvénients de la mesure ? Je ne connais pas de plaintes de cette nature eu France. Je n'ai pas remarqué qu'aux diverses époques où le parlement français s'est occupé, depuis 1827, des questions qui se rattachaient directement ou indirectement au régime forestier, on ait réclame contre ces servitudes, contre l'application de ce régime aux bois des établissements publics et des communes. En est-il autrement en Belgique pour les terrains contigus aux forêts de l'Etat ?
Nous avons aux portes de Bruxelles une forêt domaniale qui a toujours été le principe de servitudes du genre de celles dont traitent les articles 110 et suivants du projet.
Cette forêt domaniale est placée au milieu de centres de populalions importantes qui tous les jours tendent a se développer. Certains faubuurgs de Bruxelles y touchent et vous savez, messieurs, quelle a été l'augmentation rapide de la population sur cette partie de notre territoire. L'existence de la forêt de Soignes comme forêt domaniale avec less servitudes qui s’ensuivent ont-elles empêché le moins du monde le développement des villages si populeux qui l'entourent ? Il suffit de parcourir les environs de Bruxelles pour être convaincu du contraire. Or ce qui se fait aux portes de Bruxelles, peut se faire dans les autres parties du pays où les accroissements de populations, les besoins de développement sont moins grands que dans les environs d'une grande ville.
Je pense donc que nous avons à l'appui du projet les précédents des législations antérieures que nous avons sensiblement adoucies, l'application faite en France d'un régime analogue depuis 1827 sans réclamation aucune, l'application de ce régime à nos forêts domaniales sans qu'on ait dans le pays critiqué cette application d'une manière bien nette, bien certaine, avec beaucoup de chance de se faire écouter, depuis l'époque où l'ordonnance de 1669 est en vigueur chez nous.
L'honorable M. David a fait une dernière observation que je dois relever, parce qu'elle tendrait à attribuer à la disposition qu'il combat un caractère de nouveauté, un caractère d'étrangeté qu'elle n'a certainement pas.
L'honorable M. David prétend que la partie de l'ordonnance de 1669 qui imposait aux terrains limitrophes des forêts domaniales les servitudes dont il est question, n'aurait pas été considérée en Belgique comme ayant force obligatoire.
Je conviens très volonliers que la question a soulevé des difficultés et que les tribunaux ont hésite à la résoudre ; mais ils ont hésité de la même manière quant à la question beaucoup plus grave de la publication de l'ordonnance de 1669 tout entière. Un grand nombre de tribunaux et de cours ont examiné cette question ; mais la majorité l'a, en définitive, résolue en faveur de l'existence de la législation.
Il y a eu de l'hésitation, cela est vrai ; mais on n'a pas admis universellement, comme le croit l'honorable M. David, que la partie de l'ordonnance de 1669 ayant trait aux servitudes ne serait plus obligatoire, Du reste, l'honorable membre a dû reconnaître que la pratique est contraire à son assertion, puisqu'il a parlé lui-même d'autorisations de construire, qui figurent journellement au Moniteur, et il était parfaitement dans le vrai ; il suffit de parcourir quelques numéros du Moniteur pour y rencontrer des autorisations de bâtir, accordées ou refusées, par exemple, dans les environs de la forêt de Soignes.
Pour ma part, j'ai, plusieurs fois, entendu prononcer, par les tribunaux correctionnels de Bruxelles et de Nivelles, des jugements contre des individus qui avaient bâti, sans autorisation, dans le rayon prohibé des environs de cette forêt. Je crois donc que cette législation est encore applicable aujourd'hui, d'après l'opinion de la majorité de nos tribunaux, en ce qui concerne les forêts domaniales.
M. David. - L'honorable M. Orts vient de nous dire qu'en adoptant les articles 110 et suivants, on n'innove en rien. Il est bien certain, cependant, qu'on innove quant aux forêts communales et des établissements publics. En consignant ces articles dans la loi, vous innovez même quant à la législation existante, car j'ai sous les yeux le Bulletin usuel des lois et arrétés, et j'y lis quant à l'ordonnance de 1669 :
« Jurisprudence belge. Les articles 17 et 18 du titre XXVII de l'ordonnance de 1669 n'ont jamais été publies en Belgique, et les dispositions pénales qu'ils contiennent ne peuvent y être appliquées. - Bruxelles,. 1 avril, 18 novembre 1819.» (Pasicrisie.)
Cet ouvrage est tout récent, il est distribué par livraisons ; il est donc très probable que si de nouveaux arrêts étaient intervenus depuis, on les y eût insérés.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il y en a dix depuis, qui déclarent que toute l'ordonnance de 1669 est applicable en vertu du Code de brumaire.
M. David. - Dans tous les cas, les jurisconsultes sont loin de s'accorder sur cette question. Qu'invoque-t-on, pour interdire de bâlir dans un certain rayon ? On invoque l'intérêt général ; mais je voudrais bien qu'on pût me dire ce que c'est que cet intérêt dans cette occurrence. On veut rendre les délits moins faciles à commettre, à cacher, en interdisant de bâtir à proximité des forêts ; mais c'est précisément dans les maisons qui se trouvent le plus rapprochées des forêts que les gardes forestiers constatent le plus facilement les délits ; et c'est dans les grandes agglomérations de maisons que la constatation des délits offre le plus de difficulté.
Jusqu'à présent, l'expérience l'a démontré, on ne s'est pas plaint, quant aux forêts des communes et des établissements publics, des constructions limitrophes des forêts ; jusqu'à ce jour, aucun fait ne s'est présenté qui soit de nature à nous engager à rien innover quant à cette législation.
L'honorable M. Orts nous a dit aussi que le terrain boisé n'est pas très étendu en Belgique ; mais, messieurs, nous avons à peu près 160,000 hectares de bois. Si cette superfiue ne formait qu'un bloc, je conviendrais, avec l'honorable membre, que la défense de bâtir dans un certain rayon ne serait pas très onéreusc ; mais il n'en est nullement ainsi, et pour peu qu'on connaisse le pays, on doit se dire qu'une commune qui a, par exemple, mille hectares de bois ne les possède pas en un seul bloc, mais éparpillés sur tous les points de son territoire, de manière que l'interdiction pèsera pour ainsi dire sur tous les coins d'une commune.
On a dit encore, et l'honorable rapporteur l'a répété, que le régime subsiste en France. L'honorable rapporteur a trop bien étudié la loi du Code français pour ne pas savoir que l'article 153 du Code français de 1827 autorise les constructions tout autour des bois communaux et des bois (page 713) des établissements publies mesurant moins de 250 hectares ; mais comme il est rare qu'un bois communal ait plus de 250 hectares d'étendue, il est clair qu'on a voulu faire jouir d'une exception tacite toutes les forêts communales.
Quant aux constructions dans le rayon que l'on voudrait réserver par la loi, en France on a admis un tout autre système que celui qu'on voudrait voir adopter. Si l'intérêt général était en jeu dans cette question, je ne m'opposerais pas à l'adoption des articles 110 et suivants du projet en discussion, mais je ne vois aucun inconvénient pour la bonne surveillance des forêts, tandis que j'y vois de graves inconvénients pour les propriétaires riverains de toutes ces forêts et une atteinte formelle à leurs droits de propriété. Je maintiens ma demande de suppression.
M. Orban. - Je considère aussi les dispositions dont l'honorable M. David demande la suppression comme un emprunt malheureux fait à une législation qui ne correspond ni aux intérêts ni aux principes qui existent aujourd'hui.
Je conçois qu'à l'époque de l'ordonnance de 1669, alors que la population était rare, qu'à côté des forêts se trouvaient en grande partie des terres qui n'étaient point livrées à la culture, que les moyens de surveillance et de conservation étaient imparfaits, je conçois qu'alors on ait eu recours à un surcroît de précautions semblables et à des mesures aussi exceptionnelles. Mais aujourd'hui que la population s'est multipliée partout, alors que vous avez une police forestière parfaitement organisée, j'avoue que je ne conçois point le maintien de ces dispositions qui, évidemment, sont peu en harmonie avec les principes qui nous régissent aujourd'hui.
D'un autre côté, il me semble que ces restrictions sont en opposition avec le principe même de la propriété telle qu'elle est constituée par nos lois. Le principe de la propriété doit être le même pour tous.
La propriété est soumise aux mêmes conditions, soit qu'elle se trouve dans les mains de l'Etat, soit qu'elle se trouve dans les mains des particuliers. Elle ne doit, en tant que propriété de l'Etat, jouir d'aucun privilège particulier.
Je conçois que l'on établisse des servitudes dans l'intérêt général, mais non point dans l'intérêt particulier de propriétés de l'Etat, ce qui est bien différent. Lorsque des servitudes sont établies dans l'intérêt général, relativement aux fortifications, par exemple, c'est parce qu'elles sont inévitables, qu'elles sont réellement réclamées par l'intérêt de tous. Mais on ne peut admettre une servitude dans l'intérêt des propriétés de l'Etat, car ces propriétés ne sont point dans une autre position que celles des particuliers, et l'intérêt général exige la même conservation de ces forêts que de toutes les autres.
La preuve la plus manifeste que les forêts peuvent parfaitement être conservées sans l'aide de ces mesures vexatoires qui empiètent sur les droits particuliers et que par conséquent elle ne sont pas réclamées par l'intérêt général, c'est que les forêts des particuliers, qui ne sont pas moins nombreuses que celles de l'Etat ni moins précieuses à conserver, se passent très bien de ces précautions que vous voulez établir d'une manière exceptionnelle.
Messieurs, l'honorable M. Orts vous a dit qu'on ne voulait rien faire de neuf, que la législation qu'on veut établir existe depuis longtemps, qu'elle a toujours été en vigueur et qu'elle n'a amené aucun inconvénient.
En effet, nous n'avons vu aucun inconvénient résulter de cette disposition de l'ordonnance de 1669 ; nous voyons aux abords des forêts des habitations se construire, des villages s'élever, se multiplier, prendre de l'extension, et des établissements de la nature de ceux qu'on veut proscrire s'élever partout.
Qu'est-ce que cela prouve ? Que la législation existante était si peu en harmonie avec nos mœurs et nos besoins, qu'elle n'a existé qu'a la condition de ne pas être appliquée et de rester une lettre morte.
La non-application de cette législation prouve mieux que tout ce que je pourrais dire combien elle est surannée, abusive ; nous ne devons pas faire un Code nouveau pour reproduire servilement des dispositions d'un autre siècle qui ne sont pas en harmonie avec l'époque actuelle. Le but d'une législation nouvelle est de corriger ces anomalies, et c'est ce que vous ne faites pas.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'honorable M. Orban dit que la législation que nous voulons ressusciter n'a existé qu'à la condition de n'être pas appliquée. L'honorable membre devrait savoir que si des habitations s'élèvent à proximité des forêts, c'est en vertu d'autorisations accordées par le gouvernement.
M. Orban. - On ne les refuse jamais.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Certainement on les refuse, et très souvent. C'est à raison de la moralité des individus qui demandent que l'autorisation est accordée ou refusée.
Il faut revenir à l'objet spécial de l'article 110 ; il ne faut pas que la discussion s'égare. Il ne s'agit pas ici de maisons : l'article 110 interdit l'établissement de briqueteries, tuileries, fours à chaux ou à plâtre, à moins de 250 mètres de la lisière des forêts : remarquez que ce sont des usines au moyen desquelles il est facile de faire disparaître instantanément une très grande quantité de bois. Ce serait la dévastation des forêts que de permettre au milieu ou à proximité des forêts l’établissements de fours à chaux, à plâtres, des tuileries ou des briqueteries.
Je n'ai que quelques mots à répondre aux honorables MM. David et Orban. pour des raisons tirées de la pratique même des choses. L'honorable M. David a dit que nous voulions innover parce qu'il a trouvé dans un arrêt un passage duquel il résulterait que l'ordonnance de 1669 n'est pas appliquée en ce qui concerne ces articles.
M. David. - C'est un arrêt de la cour de cassation.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - La jurisprudence constante aujourd'hui, c'est que l'ordonnance de 1669 a été publiée en Belgique, par suite du Code de brumaire, qui a déclaré que jusqu'à la publication d'une loi nouvelle, l'ordonnance sur les bois et forêts serait appliquée par les tribunaux.
Voilà quelle est la jurisprudence maintenant.
Pour ce qui concerne les législations étrangères, nous pouvons citer la loi française de 1827 qui contient des dispositions plus sévères et n'a jamais été l'objet d'aucune critique ; l'article 151 porte qu'aucun four à chaux ou à plâtre, briqueterie ou tuilerie ne pourra être établi dans l'intérieur ou à moins d'un kilomètre des forêts sans l'autorisation du gouvernement sous peine d'une amende de 100 à 150 fr.
En France, on n'a pas fixé la distance à 500 mètres comme le propose le gouvernement ou à 250 mètres comme le propose la commission, mais à un kilomètre.
C'est une très bonne mesure de police de ne pas permettre de construction à une certaine distance des forêts. Par l'article 116, vous remarquerez qu'on excepte les maisons et usines qui font partie des villes, villages ou hameaux ; par conséquent la disposition ne sera applicable qu'aux maisons isolées.
Or, il y a un intérêt de sécurité à ne pas permettre la construction de maisons isolées ; dans beaucoup de provinces, des règlements existent qui défendent de construire des maisons à une certaine distance des habitations agglomérées.
M. Orban. - M. le ministre a oublié mon argument principal. J'ai demandé pourquoi, si la mesure est nécessaire, indispensable à la conservation des forêts, si son absence doit en entraîner la dévastation, pourquoi elle est spéciale aux forêts de l'Etat. Le Code forestier n'est pas destiné à assurer la conservation des forêts de l'Etat seulement, mais celle des forêts en général. Si les forêts des particuliers n'ont pas besoin de ces mesures exorbitantes pour être conservées, pourquoi sont-elles nécessaires pour la conservation des forêts de l'Etat, qui ont des moyens de conservation plus complets, plus nombreux que les particuliers. Le gouvernement a à sa disposition des agents nombreux, actifs, ayant l'autorité nécessaire pour constater les délits commis dans les forêts de l'Etat, mieux qu'ils ne peuvent l'être dans les forêts des particuliers.
Voilà où je trouve le vice principal de la disposition, c'est dans le caractère exceptionnel qu'on veut lui donner. A quel titre établissez-vous un privilège en faveur des forêts de l'Etat ? Quel motif avez-vous à faire dans un cas ce que vous ne faites pas dans l'autre ? Un seul, c'est que vous êtes législateurs et que ces forêts appartiennent à l'Etat. Or c'est une mauvaise raison, à mon avis, que celle-là.
M. le ministre de la justice disait que l'établissement de maisons isolées était en lui-même une mauvaise chose, au point du vue de la police et qu'il était déjà prohibé par la plupart des règlements provinciaux qui ne permettent pas d'en établir à une certaine distance des habitations agglomérées sans une autorisation spéciale. Mais puisque cette règle existe, contentez-vous en, elle s'appliquera d'une manière générale et n'aura pas ce caractère exceptionnel que prohibent les principes.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'honorable préopinant nous dit de nous contenter des règlements portés par les provinces, et qui interdisent la construction de maisons isolées, il dit qu'il y sera pourvu ainsi d'une manière générale. Ceci n'est pas exact ; car ces mesures ne sont pas prises dans toutes les provinces, et nous n'avons pas d'action sur les provinces où elles n'ont pas été prises.
L'honorable M. Orban reconnaît que, dans beaucoup de provinces, il existe des mesures qui empêchent la construction de maisons isolées à une certaine distance des maisons agglomérées, et il approuve cette mesure, parce que, dit-il, les maisons isolées deviennent un danger pour la sécurité géuérale.
L'honorable M. Orban dit qu'il ne voit pas pourquoi l'on soumettrait à une règle exceptionnelle les bois des communes et des établissements publics.
Il n'y voit pas d'autre raison que celle-ci : c'est qu'il s'agit de l’Etat, et que nous sommes législateurs.
Il ajoute que c'est une mauvaise raison. Je le regrette ; car, il y a deux jours, il provoquait l'application du même principe.
M. David. - Vous l'avez combattu.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Oui, je l'ai combattu, parce qu'on proposait de soumettre les propriétés de l'Etat à un genre de servitude auquel n'auraient pas été soumises les autres propriétés boisées. Vous soumettiez, daus ce cas, le propriétaire une action que vous refusiez à l'Etat. Ici. il s'agit de toute autre chose.
Dans le Code qui nous occupe, il y a bien des mesures qui sont prises (page 714) pour les bois de l'Etat, des communes et des établissements publics, et qui ne sont pas prises pour les bois des particuliers.
Ainsi, nous respectons les propriétés particulières ; nous avons même refuse de prendre des mesures relatives au défrichement. Nous laissons le propriétaire maître de défricher comme il l'entend.
L'honorable M. Orban dit que les propriétés de l'Etat sont mieux gardées que celles des particuliers. Je ne le crois pas. L'œil du maître vaut mieux que celui de l'administration.
C'est précisément parce que les bois de l'Etat et des communes n'ont pas cette garantie qu'offre toujours l'intérêt privé, que des mesures plus rigoureuses doivent être prises.
Quand un délit est commis dans un bois particulier, et que le propriétaire en a connaissance, on est sûr qu'il sera bientôt découvert.
M. Thibaut. - Si c'est un incendie, dans tous les cas, on cherchera à découvrir le coupable. On en a pour garant la crainte qu'on aura de voir brûler les maisons voisines.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Sans doute. Mais les incendies, seront toujours rares. Ce qu'il faut éviter, ce sont les coupes de bois. Ainsi, si une tuilerie, un four à chaux est à une distance rapprochée de la forêt, on enlèvera un arbre, on le mettra dans le four a chaux, et, quelque temps après, toute trace du délit aura disparu ; on aura fait disparaître le corps du délit même.
Je sais parfaitement que les incendies offrent de plus grands dangers ; mais ils sont toujours rares ; ce qu'il faut surtout avoir en vue, c'est la facilité de commettre des délits et d'en faire disparaître les traces.
Voilà la raison qui, comme l'a dit l'honorable M. Orts, a fait adopter cette disposition dans tous les pays où il y a une législation forestière.
Nous faisons une loi pour renforcer la police des forêts, non pour l'affaiblir Si nous faisons disparaître cette disposition, loin d'améliorer la surveillance, nous la rendrons impossible.
M. David. - Le principal argument que fait valoir M. le ministre de la justice, pour demander le maintien de l'article 110, c'est que les bois abattus seraient immédiatement consommés dans des fours à chaux, des briqueteries ou des tuileries. Quant à moi, je prétends que des bois frais serviraient plutôt à éteindre qu'à allumer le feu, que la chaux resterait à l'état de pierre calcaire. La difficulté n'est donc pas aussi grande qu'il le dit.
D'un autre côté, est-ce que les gardes forestiers ne sont pas tenus à faire une tournée tous les jours ; et leur surveillance ne se porte-t-elle pas particulièrement sur les points où il est le plus probable qu'il sera commis des délits forestiers. C'est ainsi que les choses se passent pour les forêts, qui sont des propriétés particulières.
Si vous empêchez la construction des fours à chaux, à proximité des forêts, vous ferez un tort réel à l'agriculture. Car, dans bien des endroits on n'établit pas des fours à chaux, mais on amasse la pierre calcaire, et on la pile sur le terrain qu'on veut amender. Si vous interdisez ce mode de fabrication, vous augmenterez le prix de revient de la chaux, et vous empêcherez de l'employer pour l'amendement du sol.
Je persiste à croire que l'article doit être supprimé.
M. Coomans. - Je n'ai qu'une question à adresser au gouvernement ou à l'honorable rapporteur. Ces servitudes profiteront-elles aux bois à planter plus tard ?
M. David. - Certainement !
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Quand ils seront soumis au régime forestier.
M. Coomans. - Bien entendu.
- L'article 110 est mis aux voix et adopté.
« Art. 111. Il est également défendu d'élever à l'intérieur ou dans le même rayon de ces forêts, si ce n'est dans les coupes en usance, aucune maison sur perches, loge, baraque ou hangar, sans l'autorisation du gouvernement, à peine de 40 francs d'amende et de démolition. »
M. Orban. - Je demande une modification à cet article. Je propose d'y supprimer les mots : « ou dans le même rayon de ces forêts. »
C'est la conséquence de l'opinion qui a été développée par l'honorable M. Lelièvre, par l'honorable M. David et par moi.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je pense qu'il faudrait rédiger ainsi le commencement de l'article : « Il est également défendu d'élever à l'intérieur ou dans le rayon mentionné à l'article précédent. »
M. Orts, rapporteur. - Pour la correction du texte, il vaut mieux répéter le chiffre de 250 mètres, et dire : « Il est également défendu d'élever à l'intérieur ou dans le rayon de 250 mètres de ces forêts. »
M. Orban. - Je voulais appeler la chambre à se prononcer de nouveau sur notre opinion à l'occasion de l'article 111. Mais comme la disposition de l'article 112 est beaucoup plus rigoureuse, en ce qu'elle s'oppose à la construction des maisons dans un rayon déterminé, je remets ma proposition à l'article 112 dont nous demandons la suppression.
- L'article 111 est mis aux voix et adopté.
Art. 112. A l'avenir, aucune construction de maisons, fermes ou bâtiments en dépendant, ne pourra être faite à une distance moindre de 100 mètres de la lisière des mêmes bois, sans l'autorisation du gouvernement, sous peine de démolition.
« Toutefois les maisons ou fermes actuellement existantes, pourront être conservées, réparées et reconstruites sans autorisation. »
M. Orban. - Messieurs, comme je le disais, de toutes les dispositions dont l'honorable M. David demandait la suppression, celle-ci est la plus rigoureuse et en même temps la moins nécessaire. Dans l'article 110 on prohibe sous certaines conditions l'établissement d'usines, de fours à chaux, etc., où peuvent se consommer les produits des forêts, où l'on peut faire disparaître les preuves du délit, et où par conséquent le danger de délits est le plus considérable.
Dans l'article 112 c'est toute espèce de construction que l'on prohibe. Vous concevez combien la certitude s'aggrave de cette généralité. Je demanderai par conséquent, si quatre de mes collègues veulent bien s'unir à moi, que la chambre se prononce sur cette disposition par appel nominal.
M. David. - Les développements que j'ai eu l'honneur de vous présenter tantôt viennent également à l'appui de la suppression de cet article. Mais j'appuierai plus fortement à propos de l'article 112, que je ne l'ai fait tantôt, sur la disposition de la loi française relative au même objet, c'est-à-dire la construction de fermes ou de maisons à proximité de forêts
Voici ce que dit l'article 153 de la loi française : « Aucune construction de maisons ou fermes ne pourra être effectuée sans l'autorisation du gouvernement à la distance de 500 mètres des bois et forêts soumis au régime forestier, etc., etc. »
Mais le quatrième paragraphe de cet article stipule ce qui suit : « Sont exceptés des dispositions du paragraphe premier du présent article les bois et forêts appartenant aux communes et qui sont d'une contenance au-dessous de 250 hectares. »
Messieurs, s'il y a eu des raisons en France pour exempter les terrains avoisinant les forêts communales ou les forêts des établissements publics de la prescription de l'article, nous pouvons, dans la loi belge, également exempter les terrains qui se trouvent dans le voisinage des forêts domaniales.
J'insiste donc sur la suppression de l'article 112.
M. Lelièvre. - Je dois émettre une reflexion que m'a suggérée l'observation de l'honorable M. Coomans. Il s'agit de savoir si les prohibitions dont nous nous occupons seront applicables aux bois à planter ultérieurement. La négative me paraît certaine ; il ne peut, en effet, dépendre des communes et des établissements, en convertissant ultérieurement en bois une terre arable, de grever le fonds voisin d'une servitude onéreuse. Il est évident que, par leur fait et leur seule volonté, les communes et autres ne peuvent créer une servitude en leur faveur.
Dans mon opinion, la servitude n'est créée qu'en faveur des bois existants. J'ai cru devoir proposer cette observation afin qu'on ne puisse conclure de la discussion, que nous avons adopté une disposition exorbitante contraire à tous principes.
M. Orts. - Messieurs, je veux faire à la chambre une seule observation, sans rentrer dans la discussion qui vient d'avoir lieu. L'article 153 du Code français esl beaucoup plus rigoureux que le Code belge, en ce sens qu'il porte la distance du rayon prohibé à 500 mètres-des bois et forêts soumis au régime forestier. On n'en demande pas autant, et la chambre serait peu disposée, je pense, à accepter l'article 153 du Code forestier français.
Avec un rayon de 500 mètres, je conçois que la servitude devienne tellement rigoureuse qu'elle comporte nécessairement pour sa justification l'exception portée par le paragraphe 4.
Mais lorsqu'on réduit le rayon comme nous le faisons, et lorsqu'on prend en considération que la disposition n'est pas applicable aux maisons et usines qui font partie des villes, villages ou hameaux, formant une population agglomérée, la disposition du projet belge est évidemment plus modérée que celle du Code français.
M. Moncheur. - Si l'on admet la servitude proposée par le projet, de ne pas pouvoir bâtir à proximité des bois, il faut tout au moins admettre aussi une exception dans le sens de celle qui existe en France.
Qu'a objecté l'honorable rapporteur contre la proposition de l'honorable M. David ? C'est que l'article 153 du Code français est plus sévère que la disposition dont nous nous occupons, en ce sens qu'il exige l'éloignement des maisons à 500 mètres, tandis que nous n'exigeons cet éloignement qu'à 100 mètres. Mais, messieurs, cet éloignement, même à 100 mètres seulement, sera souvent impossible aux petits particuliers.
En effet, souvenez-vous, messieurs, que, d'après une disposition que nous avons déjà adoptée, les boqueteaux eux-mêmes, lorsque les communes le demanderont, pourront être soumis au système forestier.
Or, si dans un pays aussi couvert de boqueteaux que nos provinces de Namur, de Liège et de Luxembourg, vous interdisez de bâtir des maisons à cent mètres, même de ces petits boqueteaux ou des bois d'une contenance peu considérable, vous allez mettre en interdit une quantité énorme de terrains. Il faut donc évidemment faire une exception. Si vous ne voulez pas l'admettre à l'égard des bois aussi étendus qu'en (page 715) France, car les bois de 250 hectares ne sont déjà plus si communs, vous devez au moins en faire une à l'égard des bois d'une contenance modre, par exemple de 100 ou de 50 hectares.
Sans cela, je le répète, vous empêcherez les petits propriétaires d'établir leurs constructions sur le seul terrain qu'ils possèdent, ou bien vous les forcez tout au moins de demander l'autorisation au gouvernement, et cela parce que son terrain sera contigu à un bois de 2 ou 3 hectares de contenance.
J'appuierai donc tout amendement qui introduirait une exception analogue à celle qui se trouve dans l'article 153 du Code forestier français.
M. David. - Déjà aujourd'hui on ne pourrait pas nous fixer sur l'étendue des terrains qui vont être mis en interdit par la loi que l'on vous propose d'adopter. Mais depuis la loi de 1847 sur les défrichements, vous ne pourriez prévoir la quantité immense de terrains qui seront reboisés dans nos Ardennes. Or, tous ces terrains seront plus tard soumis au régime forestier et à l'interdit que l'on veut établir.
Je prie la chambre d'y faire attention. Ce sera évidemment entraver le défrichement des Ardennes. Ce sera empêcher les populations d'aller s'y établir pour contribuer à la mise en culture des parties qui en sont susceptibles.
Je prie la chambre de peser ces considérations, et si l'article devait être adopté comme la commission et le gouvernement l'ont formulé, je proposerais à la suite de l'article 117 un article additionnel qui reproduirait textuellement le paragraphe 4 de l'article 153 de la loi française ; et à l'article 112, dans le cas où il serait adopté, je demanderais que l'on ajoutât après « reconstruites » les mots « et augmentées », afin que, quand une fois un particulier reconnu d'une moralité incontestable et de bonne conduite aurait été autorisé à bâtir à proximité d'une forêt, soit du gouvernement, soit d'une commune ou d'un établissement public, il ne fût pas obligé de réclamer une nouvelle autorisation pour augmenter ses constructions. On aurait toutes les garanties désirables par la première autorisation, puisque pour l'obtenir, l'individu aurait dû prouver qu'il est de bonne conduite et qu'il ne présente aucun danger pour la forêt près de laquelle il voudrait construire.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je ne crains pas du tout les dangers signalés par l'honorable M. David : je suis très convaincu que la disposition que nous voulons introduire n'empêchera en rien le reboisement dans le Luxembourg ; je crois, au contraire, qu'en prenant certaines mesures de police, nous assurons la conservation des taillis dans les propriétés qui seront reboisées. On est bien plus sûr d'arriver au reboisement en agissant ainsi qu'en prenant certaines mesures qui auraient pour effet de diminuer tôt ou tard nos forêts.
La disposition que vous proposez ne tend, en définitive, qu'à diminuer les mesures de police ; or, il est bien certain que si vous affaiblissez la surveillance des bois, le reboisement devra en souffrir ; non seulement on reboisera moins, mais encore les parties reboisées seront détruites.
Maintenant, à entendre l'honorable M. David, on croirait qu'il s'agit d'une chose nouvelle et anormale : mais savez-vous quel est le rayon qu'établissait l'ordonnance de 1669 ? C'était un rayon d'une demi-lieue ; cela résulte de l'article 18.
Voilà quelle était la législation de 1669. L'honorable M. Orts vous a dit tantôt quelle est la législation actuelle en France : le rayon y est de 500 mètres ; et c'est en raison de ce rayon très étendu qu'une exception a été faite pour les bois qui ne dépassent pas une certaine contenance. Que vous propose aujourd'hui la commission ? Est-ce le rayon d'une demi-lieue dont parle l'ordonnance de 1669 ? Est-ce le rayon de 500 mètres établi par la législation française ? Nullement, ce n'est qu'un rayon de cent mètres et bien certainement on ne peut pas soutenir qu'en réduisant à ce rayon la distance à laquelle on ne pourra pas construire certaines maisons, on coure le moindre danger, soit de grever la propriété d'une servitude sérieuse, soit d'empêcher le reboisement.
Il est un autre point encore que je soumets à l'attention de la chambre, c'est que, à entendre les honorables membres qui demandent la suppression de l'article, on dirait qu'il s'agit d'une défense absolue et qui ne pourrait être levée en aucun cas. Il n'en est rien. On ne dit pas d'une manière absolue que jamais, en aucun cas, nul individu ne pourra construire dans le rayon de cent mètres, mais on laisse au gouvernement le soin d'apprécier, selon les circonstances, jusqu'à quel point les constructions qu'on se propose d'élever peuvent devenir dangereuses, et on lui laisse la faculté d'autoriser ou de refuser.
Il y aurait peut-être des inconvénients à mettre, d'une manière absolue dans la loi que jamais on ne pourra construire ; mais il n'y en a évidemment pas quand on laisse au gouvernement la faculté d'accorder des autorisations dans certains cas. (Aux voix ! aux voix !)
M. David. - M. le minisire de la justice prétend qu'il n'y a aucun inconvénient à maintenir la défense de bâtir dans un certain rayon ; mais il faut n'avoir pas lu l'article 117 pour soutenir cela ; en effet, d'après cet article, l'individu qui aura même obtenu l'autorisation de bâtir dans le rayon de cent mètres, pourra être chassé de son habitation, s'il encourt deux condamnations correctionnelles pour délits forestiers, c'est-à-dire pour le simple vol de deux fagots, que l'administration forestière évalue ordinairement à 3 ou 6 francs.
Ainsi, pour un fait si peu important, on sera exposé à consommer la ruine de toute une famille.
M. Delfosse. - Les observations de l'honorable M. David ont été soumises à la commission et elles ont produit ce bon effet que la commission a atténué considérablement la rigueur de l'ancienne législation et du Code français en vigueur. Ainsi qu'on vous l'a dit, d'après le Code français on ne peut construire sans autorisation à une distance moindre de 500 mètres ; le projet du gouvernement réduisait cette distance à 250 mètres, la commission la réduit à 100 mètres. C'est là une atténuation dont l'honorable M. David devrait tenir compte. Je ne doute pas que la disposition ainsi modifiée n'obtienne l'approbation de la majorité de la chambre, même par appel nominal.
M. Coomans. - Je voudrais bien qu'on résolût le problème que j'ai modestement exposé tout à l'heure. Quand j'ai demandé si ces servitudes s'étendraient aux bois à former dans l'avenir, MM. les ministres de la justice et des finances ont répondu affirmativement ; l'honorable M. Lelièvre, au contraire, s'est prononcé pour la négative. Voilà des autorités respectables et contradictoires qui laissent mon jugement suspens.
L'honorable M. Lelièvre vient de dire que les tribunaux en jugeront ; mais c'est précisément ce que je voudrais éviter ; moi, dans le doute, je m'abstiens ; mais les avocats ne s'abstiennent jamais, au contraire ; c'est pourquoi je désirerais que la chambre décidât la question aujourd'hui même, dans l'intérêt des parties intéressées.
Je conçois, à la rigueur, qu'on établisse ces servitudes pour des bois et des forêts existants, parce qu'ils ont acquis, en quelque sorte, des droits qu'il faut respecter ; il faut, ce me semble, faire ce qui est nécessaire pour en assurer la conservation.
A ce point de vue, il me paraît qu'on peut justifier, ou tout au moins excuser les mesures assez rigoureuses que nous consacrons ; mais il en est autrement pour les bois et les forêts à venir. Dans la Campine, par exemple, on projette des boisements assez considérables ; eh bien, je ne voudrais pas laisser peser sur toutes les propriétés de plusieurs arrondissements une cause de dépréciation. Convient-il de laisser à une certaine catégorie de propriétaires la faculté de créer arbitrairement des servitudes ? Je ne le pense pas.
Je désire donc, sans discuter le fond, que la chambre se prononce sur cette question très importante de savoir si nous disposons pour l'état actuel des choses ou si nous étendons ces privilèges à l'avenir, c'est-à-dire au hasard et selon le caprice des communes et des hospices.
M. Orts. - Quant à moi, je suis parfaitement d'avis, comme M. le ministre de la justice, que, par cela même qu'un bois à venir sera soumis au régime forestier, il y sera soumis de la même manière que les bois présents.
Cela ne me paraît pas faire l'ombre d'un doute ; si un doute existe dans l'esprit de l'honorable M. Coomans, il y a un moyen de le faire disparaître ; que l'honorable membre, au lieu de faire un discours, fasse un amendement et la question sera résolue dans l'un ou dans l'autre sens.
En l'absence d'une solution législative, je crois que les tribunaux n'hésiteront pas longtemps à donner la préférence à la solution que l'on vient d'indiquer ici, à l'aide des explications du gouvernement d'une part et celles de la commission d'autre part.
Voici d'ailleurs ce qui arrivera. Il ne faut pas s'exagérer la portée de la chose. Si une commune vient à boiser un terrain dénué de culture, il est incontestable que par le fait de ce boisement la commune ne pourra pas faire disparaître ou reculer les maisons qui se trouvent à l'entour sur des terrains à bâtir ; elle devra respecter l'état des choses existantes, et l'applicabilité du régime forestier ne sera possible que pour les constructions postérieures au boissement.
M. David. - J'avais proposé d'ajouter à l'article, dans le cas où il serait adopté, le mot « augmenter », qui ne figure pas au projet de la commission.
M. Orts. - Le mot « augmenter », que l'honorable M. David veut introduire dans l'article, se trouve dans le Code français, dont cet article est la reproduction. Le gouvernement et la commission ont fait disparaître ce mot, parce qu'ils ont vu qu'aucune disposition du Code forestier français n'avait ouvert la porte plus large aux abus que le malheureux mot « augmenter » inscrit dans la rédaction de 1827. En effet, sous le prétexte d'augmentation, il est possible d'aller, en fait de construction, aussi loin qu'on le voudra ; le mot est vague, sa portée n'a pas de limites.
On pourra dire, par exemple, qu'adjoindre à un hangar une ferme susceptible d'être appliquée à l'exploitation de quatre cents hectares de terre serait une simple augmentation. C'est là ce que nous ne voulons pas, ce que nous ne pouvons raisonnablement vouloir.
- L'article est mis aux voix.
L'appel nominal étant demandé, il y est procédé.
61 membres ont pris part au vote.
46 ont répondu oui.
15 ont répondu non.
En conséquence, l'article du projet de loi est adopté tel qu'il a été présenté.
Ont répondu oui : MM. de Decker, Delehaye, Delescluse, Delfosse, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode (Félix), De Pouhon, Dequesne, de Renesse, de Royer, de Steenhault, Destriveaux, de Theux, d'Hoffschmidt, Frère-Orban, Jouret, Julliot, Lange, Lebeau, Loos, Moxhon, Orts, Pirmez, Rodenbach, Rogier, Roussel (A.), Rousselle (Charles), Tesch, Thibaut, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Van Cleemputte, Vandenpeereboom (E.), (page 716) Hoorebeke, Van Iseghem, Vermeire, Veydt, Allard, Boulez, Bruneau, Cans, Coomans, Cumont, Dautrebande, de Baillet (Hyacinthe) et Verhaegen.
Ont répondu non : MM. de La Coste, de Perceval, Desoer, Dumont (Auguste], Dumortier, Jacques, Lelièvre, Lesoinne, Moncheur, Orban, Osy, Vanden Branden de Reeth, Van Renynghe, Cools et David.
« Art. 113. La démolition des bâtiments et établissements ordonnée en vertu des trois articles précédents aura lieu dans le mois à dater de la signification du jugement qui la prononce. »
Le gouvernement se rallie à la rédaction de la commision.
- L'article est adopté.
« Art. 114. Nul individu habitant les maisons ou fermes actuellement existantes dans le rayon de 100 mètres, ou dont la construction aura été autorisée en vertu de l'article 112, ne pourra établir aucun atelier à façonner le bois, aucun chantier ou magasin de bois, de charbon ou de cendre, pour en faire le commerce, sans la permission spéciale du gouvernement, sous peine de 40 francs d'amende, et de la confiscation des bois, cendres et charbons. »
Le gouvernement se rallie à la proposition de la commission.
- L'article est adopté.
« Art. 115. Aucune usine à scier le bois ne pourra être établie dans l'enceinte, et à moins de 250 mètres de distance des bois et forêts soumis au régime forestier, qu'avec l'autorisation du gouvernement, sous peine d'une amende de 100 à 500 francs et de la démolition dans le mois à dater du jugement qui l'aura ordonnée. »
Le gouvernement se rallie à la rédaction de la commission.
M. Lelièvre. - Je propose de remplacer les mots : « et de la démolition dans le mois à dater du jugement qui l'aura ordonnée », par les suivants : « et de la démolition dans le mois à dater de la signification du jugement qui l'aura ordonnée ». En effet, si la démolition est ordonnée par un jugement par défaut, il serait injuste de faire courir le délai pour procéder à la démolition à partir du jugement même ; et lorsqu'il s'agit même d'un jugement contradictoire, il est encore équitable de ne faire courir le délai qu'à partir de la signification. Du reste, la chambre a adopté ce principe dans l'article 113, et il me semble dès lors rationnel de l'inscrire dans notre disposition.
M. Orts. - C'est la conséquence du système général que la commission a adopté et auquel le gouvernement se rallie ; c'est par inattention que l'amendement n'a pas été introduit.
- L'article 115 est mis aux voix et adopté avec la modification proposée.
« Art. 116. Sont exceptées des dispositions des articles 112, 114, 115, les maisons et usines qui font partie des villes, villages ou hameaux formant une population agglomérée. »
Le gouvernement se rallie à la rédaction de la commission.
- L'article est adopté.
« Art. 117. Les autorisations accordées en vertu des articles 110, 111, 114 et 115 pourront être retirées par le gouvernement, à ceux qui auront subi plus de deux condamnations pour délits forestiers.
« Les autorisations accordées, en vertu de l'article 112, pourront être retirées dans le même cas, de l'avis conforme de la députation permanente. »
Le gouvernement se rallie à la rédaction de la commission.
M. de Theux. - Messieurs, je ne saisis pas bien le sens de cet article. Je demanderai si une maison construite en vertu d'une autorisation devra être démolie lorsqu'il y aura une décision qui retire l'autorisation accordée. Je conçois que quand la construction n'est pas élevée on retire l'autorisation, mais une fois qu'elle est élevée il me semble excessivement dur d'en ordonner la destruction ; ce peut être une peine extrêmement sensible, préjudiciable.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je crois que l'autorisation doit pouvoir être retirée dans tous les cas ; tel est le sens de la disposition ; elle est nécessaire, indispensable. Le tempérament qu'y apporte la commission peut être, dans certains cas, assez dangereux. Quel est le but que nous poursuivons par l'insertion de ce chapitre ? C'est d'éviter les délits forestiers. Maintenant, qu'il soit constaté qu'un individu abuse de l'autorisation qui lui a été accordée, que deux jugements viennent l'établir, il est tout simple qu'on ait le droit de lui retirer l'autorisation ; cette mesure résultera d'un fait dépendant de sa volonté.
Ici encore nous sommes beaucoup moins sévères qu'on ne l'est en France.
En France, ces maisons peuvent être démolies après une seule condamnation. Lorsqu'un individu a été condamné une fois, on peut lui retirer l'autorisation et faire démolir les bâtiments.
Cet individu a prouvé par sa conduite qu'il est dangereux de le laisser construire à une distance moindre que celle généralement fixée par la loi.
M. Orban. - Je ne sais si la rédaction de la commission n'est pas plus mauvaise que la rédaction primitive. D'après la rédaction primitive, l'autorisation était révoquée, lorsque l'individu qui en jouissait avait commis un délit. C'est une chose que je conçois parfaitement. Mais, d'après moi, on a substitué aux expressions du projet primitif des expressions qui pourraient faire supposer que l'autorisation pourrait être retirée, lorsqu'un délit aurait été commis non par celui qui jouirait de la maison, mais par celui-là seulement qui aurait obtenu l'autorisation. Sous ce rapport, je crois que la rédaction devrait être modifiée.
M. Coomans. - Il y a en effet une différence considérable entre les deux rédactions. Il faut qu'elle existe, puisque j'avais à demander au gouvernement les explications que vient de donner mon honorable ami, sans m'être concerté avec lui. La rédaction gouvernementale est beaucoup plus sévère que celle de la commission ; il peut en effet se présenter des cas tels que celui-ci : une veuve habitera avec ses fils, qui commettront des délits forestiers : elle ne tombera pas sous l'application de cet article, puisqu'elle n'aura pas subi de condamnation.
M. Orts. - Dans la pensée de la commission, son article a exactement le même sens que celui du gouvernement. Elle a voulu atteindre les mêmes faits, frapper les mêmes individus de la même manière, dans les mêmes circonstances.
L'honorable M. Orban croit que le mot « retirées » présente un doute. Je ne le pense pas, parce que, pour retirer quelque chose à quelqu'un il ne faut pas nécessairement que cette personne l'ait reçue immédiatement de celui qui la retire, il suffît que son auteur, que celui qui la lui a transmise l'ait reçue.
L'expression « retirées » est donc parfaitement exacte. Nous l'avons substituée au mot « révoquées », comme le mot « ceux » aux mots « individus qui en jouissent », pour que la rédaction fût plus correcte ; mais le sens est précisément resté le même.
Puisque que j'ai parole, je ferai en terminant remarquer à l'honorable M. de Theux combien l'intervention du pouvoir judiciaire est ici pleinement rassurante.
L'arbitraire administratif n'est point à craindre. Lorsqu'il y aura eu plus de deux condamnations pour délits forestiers, prononcées par la magistrature inamovible et indépendante, le gouvernement obtiendra la faculté de retirer ou de ne pas retirer à celui qui avait reçu l'autorisation, une faveur dont il se sera montré indigne parce qu'il s'en est fait une arme pour violer la loi.
M. Lelièvre. - Je pense qu'il est entendu que les deux condamnations pour délits forestiers doivent s'entendre de délits commis personnellement par l'individu à qui l'autorisation est accordée ; en conséquence notre article ne serait pas applicable si cet individu n'avait été condamné que comme civilement responsable des faits d'autrui. Autoriser en ce dernier cas le retrait de la permission serait une disposition exorbitante à laquelle je ne pourrais me rallier. L'individu qui n'est que civilement responsable, est étranger au délit lui-même, et ce n'est qu'à raison de circonstames particulières qu'il encourt la pénalité. Il ne peut être mis sur la même ligne que le délinquant lui-même, sous le rapport de la perversité. A mon avis, il faut restreindre l'article aux délits commis personnellement par celui qu'on veut frapper de la mesure rigoureuse énoncée en notre article. Je désire avoir une réponse catégorique à cet égard, mais je dois voter contre l'article, si l'on prétend lui donner une portée exagérée.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je crois que l'article doit être appliqué, alors même que l'individu qui jouit de la concession n'est que civilement responsable. Sans quoi il serait trop facile d'éluder la loi : le chef de famille profiterait de délits forestiers commis par ses ouvriers, ses domestiques, ses enfants, et l'autorisation ne pourrait lui être retirée. Cela n'est pas admissible. Il faut prendre des mesures pour réprimer l'abus. Il n'y a pas d'autre moyen que de rendre le chef de famille responsable des délits forestiers commis, soit par lui-même, soit par les siens.
M. de Theux. - La rédaction de la commission me paraît présenter une ambiguïté que je dois signaler à la chambre. Le premier paragraphe porte : « Les autorisations accordées en vertu des articles 110, 111, 114 et 115 pourront être retirées par le gouvernement à ceux qui auront subi plus de deux condamnations pour délits forestiers. » Le mot « retirées » implique qu'il s'agit seulement de celui qui a obtenu l'autorisation, et qu'elle ne pourrait être enlevée à un autre. Il y aurait lieu, je crois, de modifier cette rédaction.
J'appellerai l'altention de M. le ministre de la justice sur ce point, qu'on a eu en vue de punir les récidives, puisqu'il faut plus de deux condamnations pour que l'autorisation puisse être retirée. Ordinairement, pour qu'il y ait récidive, il faut que les deux délits aient été commis dans un délai déterminé. Si un individu commettait deux délits forestiers à vingt ans d'intervalle, serait-il obligé de démolir sa maison ? Cela me paraîtrait extrêmement dur. Il me semble qu'on devrait déterminer le délai dans lequel les deux condamnations devraient être prononcées.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'honorable comte de Theux doit admettre que le gouvernement n'abusera pas de la faculté qui lui sera accordée. On ne peut admettre qu'un gouvernement fasse le mal, pour le plaisir de le faire.
Il est évident que si un individu commet deux délits forestiers, à six ans d'intervalle, le gouvernement ne lui ordonnera pas de démolir la maison qu'il aura été autorisé à construire. Je ne pense pas que l'on puisse pousser la rigueur à ce point.
Je ferai observer, en deuxième lieu, que quand il s'agira d'habitations, l'autorisation, d'après le paragraphe ajoute par la commission, ne pourra être retirée que de l'avis conforme de la députation permanente. Sous ce rapport, il y a un remède dans ce paragraphe.
(page 717) Lorsque le gouvernement a accordé l'autorisation d'établir des constructions à une distance rapprochée d'une forêt, il a supposé que celui à qui il a accordé cette faveur en était digne. Cependant, si la conduite de ce dernier, constatée par deux condamnations, prouve que l'autorisation a été accordée à un délinquant habituel, il faut que le gouvernement ait la faculté de la retirer.
Le gouvernement, comme je le disais tantôt, ne fera certes pas démolir des bâtiments considérables, lorsqu'il s'agira de délits de mince importance. Mais lorsqu'un indidivu, par exemple, aura établi une scierie, qu'il aura été abattre des arbres dans la forêt voisine, qu'il les aura dépecés, il faut bien que le gouvernement ait le droit de faire disparaître cette usine qui sert à dévaster le bois, qu'il puisse retirer l'autorisation qu'il a donnée au préjudice de la forêt près de laquelle l'usine est établie.
Ainsi, comme je vous l'ai dit, nul n'a le droit de se plaindre, pas même celui auquel on retire l'autorisation.
Evidemment, toute mesure peut donner lieu à des inconvénients, mais il faut admettre que les hommes qui auront à exécuter celle-ci, l'exécuteront d'une manière raisonnable et ne chercheront pas à user de rigueur lorsque la rigueur sera inutile.
M. Delfosse. - La disposition, telle qu'elle est amendée par la commission, me paraît présenter toutes les garanties désirables. Ou il s'agit de constructions peu importantes, tels que fours à chaux, briqueteries, tuileries, hangars, et il faut, pour que l'autorisation soit retirée, d'abord deux condamnations pour délits forestiers, ensuite la volonté du gouvernement ; ou il s'agit de constructions plus importantes, et alors la commission exige quelque chose de plus, elle exige, en outre, l’avis conforme de la députation permanente. Il me semble que cela doit rassurer les plus timorés.
Quant au premier paragraphe de la commission, il a le même sens que le projet du gouvernement, il n'en diffère que par la rédaction, qui est plus ciaire, plus simple et meilleure ; le projet du gouvernement n'a pas un sens aussi absolu qu'on paraît le croire. Il n'y a pas seulement « pourront être révoquées par le gouvernement », il y a aussi : « lorsque les individus qui en jouissent ». Ces mots expliquent et limitent le sens de la phrase précédente.
M. David. - Les considérations qu'a fait valoir l'honorable M. de Theux, me paraissent d'une grande valeur. La loi ne peut avoir en vue, dans cet article, que les délinquants de profession et vous pouvez être parfait honnête homme et subir plusieurs procès-verbaux pour délits commis dans les forêts.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Des condamnations.
M. David. - Même des condamnations.
Tous les délits ne se résument pas en vol, en enlèvement de bois dans les forêts. Si vous avez une maison, une habitation rurale près d'une forêt, votre bétail peut s'échapper ; lorsque vous le cherchez d'un côté de la forêt, il peut se trouver de l'autre. Le garde rencontre ce bétail dans un taillis qui n'est pas défensable, il le saisit, et vous subissez une condamnation.
Car on ne manquera de prétendre que vous cherchiez votre bétail dans un endroit où vous saviez qu'il ne se trouvait pas, parce que votre intention était de le laisser paître dans la forêt.
Voilà des cas absolument indépendants de la volonté des personnes, et cependant celles-ci pourraient être obligées à abandandonner leurs maisons sans indemnité aucune.
Je crois qu'il faut agir ici comme pour les cas ordinaires de récidive, qu'il faut fixer un terme soit de dix ans, soit de six ans, dans lequel les deux condamnations devront avoir été prononcées pour que l'expulsion puisse être ordonnée.
M. Thibaut. - Je trouve aussi le paragraphe 2 de l'article 117 trop sévère. Je crois qu'il a été introduit dans le projet de la commission par suite d'une fausse interprétation de la législation française. M. le ministre de la justice a lu tantôt le second paragraphe de l'article 154 du Code forestier français ; mais en comparant ce second paragraphe au premier paragraphe du même article, on voit que les démolitions à la suite de révocations de permissions dont il a parlé ne s'appliquent qu'aux ateliers à façonner le bois, aux chantiers ou magasins pour faire le commerce des bois.
Ainsi, d'après la législation française, l'administration ou le gouvernement ne peut ordonner la démolition de maisons ou de fermes, droit que le gouvernement reclame aujourd'hui. Seulement, en France, lorsqu'on a donné l'autorisation d'établir des ateliers, des chantiers ou des magasins, cette permission peut être retirée et ces constructions doivent être démolies.
Je trouve que le projet belge aurait dû se borner à reproduire la disposition du Code français.
M. Coomans. - Je crois que dans aucun cas nous ne pouvons voter la rédaction de la commission, parce qu'elle n'a pas le sens que nous voulons lui donner. Nous voulons atteindre non seulement les familles dont le chef aura commis des délits forestiers, mais aussi celles dont les membres ou les domestiques auront commis de semblables délits. Or, d'après le texte de la commission, l'article ne serait pas applicable, lorsque le chef de la famille qui a reçu l'autorisation, se serait abstenu de mal faire.
Je préférerais donc soit la rédaction du gouvernement, soit l'intercalation de ces mots : « pourront être retirées par le gouvernement aux ménages dont un membre aura subi, etc. » (Interruption). Je constateque tel est le sens que le gouvernement veut donner à l'article. Or, il ne suffit pas de faire des commentaires sur un texte de loi ; il faut que le texte suit aussi clair que possible.
Voici une autre observation que je prends la liberté de vous soumettre.
Je conçois que le gouvernement puisse, doive même retirer l'autorisation en cas de récidive, c'est-à-dire que le gouvernement doit être autorisé à faire démolir le hangar, l'usine ou la maison dont il s'agit. Mais cette peine, cette aggravation de l'amende est si forte, que le gouvernement hésitera souvent à s'en prévaloir. Tout en étant convaincu qu'il y a danger à permettre la continuation du séjour sur la lisière du bois, il reculera cependant devant la ruine de toute une famille.
Je pense que l'on peut voter l'article en sous-entendant que le gouvernement se contentera presque toujours du déménagement des délinquants. Si la famille du délinquant sort de cette maison, et si une autre famille qui désire l'habiter, est agréée par le gouvernement, je ne vois pas pourquoi celui-ci s'obstinerait à faire démolir des constructions fort innocentes.
Si tel est le sens que l'on donne à l'article, je le voterai volontiers.
M. Delfosse. - Dans le cas cité par l'honorable M. Coomans, si la disposition de la commission n'était pas applicable, celle du gouvernement ne le serait pas non plus. Je répète que le sens est le même ; il n'y a de différence que quant à la rédaction.
Je ne comprends pas les craintes que l'on manifeste. La commission ne s'est pas bornée à exiger l'avis de la députation permanente ; elle exige l'avis conforme. On ne peut pas supposer que le gouvernement et la députation permanente s'entendront pour prendre sans nécessité des mesures trop rigoureuses contre un malheureux qui aura subi deux condamnations.
M. Coomans. - L'honorable M. Delfosse ne me comprend pas : loin de trouver la rédaction de la commission trop sévère, je la trouve trop tolérante ; puisque, dans beaucoup de cas, le gouvernement ne pourrait pas se débarrasser d'un délinquant alors que le chef de famille n'aurait pas encouru de condamnation.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je crois que l'article, tel qu'il est rédigé, serait applicable au cas cité par l'honorable M. Coomans : le chef de famille serait condamné comme civilement responsable. Cela dépend des individus qui habiteraient avec lui. Il faut appliquer ici les principes généraux de la responsabilité civile ; nous ne pouvons pas nous en écarter, même dans ce cas-ci.
Sur quoi la responsabilité civile est-elle fondée ? Sur ce qu'on suppose que la personne, par exemple le chef de famille, aurait pu empêcher l'individu de commettre le délit. Eh bien, nous appliquons les principes généraux de la responsabilité civile : quand un individu sera responsable vis-à-vis des tribunaux, il le sera également vis-à-vis du gouvernement, en ce qui concerne le retrait de l'autorisation qui lui aura été accordée. Pour qu'il n'y ait aucun doute à cet égard, je proposerai de remplacer les mots : « pour délits forestiers », par ceux-ci : « du chef de délits forestiers » : on comprendrait ainsi les condamnations prononcées contre l'individu comme civilement responsable.
M. Orts. - L'honorable M. Coomans me semble donner à cette disposition une portée qu'elle n'a pas. Il est incontestable, comme vient de le dire M. le ministre de la justice, que celui qui est condamné comme civilement responsable est réellement un condamné aux yeux de l'administration ; il ne peut y avoir aucun doute à cet égard. Mais ce qui n'existe pas, c'est l'extension que l'honorable membre veut donner à la disposition ; il veut que l'on considère comme un même délinquant le fils majeur de celui qui a l'autorisation de bâtir une des constructions dont parle l'article 117 et le père.
M. Coomans. - Lorsqu'il habite avec lui.
M. Orts. - Eh bien, cela n'existe pas ; le père qui habite avec son fils majeur n'est pas plus civilement responsable en droit forestier qu'en droit commun, l'article 172 du projet le dit ; que si le fils majeur est complice de son père ou réciproquement, ils seront condamnés tous les deux, et la difficulté disparaît.
M. Lelièvre. - En justice et en équité on n'est pas responsable des faits d'autrui, on ne répond que de ses actions, C'est déjà une extension exorbitante que, dans certains cas, rendre un individu responsable des délits commis par les personnes désignées en l'article 172. Mais l'honorable M. Coomans voudrait aller plus loin ; il prétendrait établir la responsabilité donnant lieu au retrait de l'autorisation, alors même qu'il s'agirait d'un délit commis, non par le père, mais par l'enfant majeur. Messieurs, l'enfant majeur peut quelquefois êlre classé dans la catégorie des personnes dont parle l'article 172.
En effet, suivant les circonstances que les tribunaux apprécieront, il peut être considéré comme l'ouvrier, le voiturier ou le subordonné du père. Cela dépend des faits particuliers de chaque affaire. Je crois qu'il n'est pas possible de sortir de ces limites, si nous ne voulons violer toutes les règles de l'imputabililé légale. Rendre le chef du ménage responsable, dans tous les cas, des faits commis par ses enfants majeurs, ce serait sanctionner une sévérité véritablement draconienne, à laquelle la chambre ne voudra pas s'associer, surtout qu'il s'agit d'une mesure qui peut avoir pour conséquence la ruine du propriétaire, la démolition de constructions importantes.
M. de Mérode. - L'observation de l'honorable M. Lelièvre serait juste s'il ne s'agissait pas du droit d'habiter près d'une forêt. Mais (page 718) je suppose qu'il existe aux environs d'une forêt une maison habitée par un vieillard impotent et ses fils ; un délit est commis dans la forêt voisine ; les habitants de cette maison sont naturellement soupèonnés d'en être les auteurs ; mais les fils, qui seuls ont pu le commettre, n'étant pas censés les propriétaires de l'habitation, il en résultera que, dans ce cas, le principe de la responsabilité civile ne pourra pas recevoir son application. C'est pourquoi l'observation de M. le ministre de la justice ne me paraît pas fondée ; il faudrait cependant trouver un remède contre le mal que je viens de signaler.
- La substitution des mots : « du chef de délits forestiers » à ceux : « pour délits forestiers », proposée par M. le ministre de la justice, est mise aux voix et adoptée.
L'article 118, ainsi modifié, est adopté.
M. le président. - M. Coomans a déposé un article additionnel qui se rattacherait à l'un de ceux qui ont été adoptés dans la séance d'hier ; il est ainsi conçu :
« Quiconque enlèvera des nids ou des œufs d'oiseaux sera puni d'une amende de 2 à 6 francs. »
Il conviendrait, je pense, d'en ordonner le renvoi à la commission s'il est appuyé. (Oui) oui !)
- Cet article additionnel est appuyé.
M. le président. - M. Coomans est admis à le développer.
M. Coomans. - Messieurs, nous avons pris, en faveur de la sylviculture, des mesures assez sévères que je ne blâme pas. Ainsi, par l'article 106, nous avons défendu hier l'enlèvement des gazons, des fraises, des myrtilles, des noisettes, comme l'a constaté notre laborieux et savant rapporteur ; mais nous avons, ce me semble, à réprimer un abus plus grave, à savoir l'enlèvement des nids d'oiseaux. Quiconque a habité la campagne sait quels ravages la jeunesse exerce dans les bois. Nul n'ignore qu'on escalade les arbres avec des éperons ou crocs et des cordes, qu'on risque de se rompre le cou, et qu'on abîme plus ou moins les arbres pour dénicher des oiseaux qui, la plupart, sont utiles à l'agriculture, en ce qu'ils débarrassent les forêts de la vermine, des chenilles, des hannetons et autres insectes malfaisants.
S'il y avait la moindre utilité publique ou privée à dénicher les oiseaux, je ne voudrais pas priver les amateurs de ce divertissement, quoiqu'il soit parfois dangereux ; mais comme il n'en résulte pas le moindre profit pour personne, comme il donne lieu à divers inconvénients, je propose de l'interdire.
Messieurs, mon amendement a un simple but : il tend d'abord à garantir les bois et les forêts, tant publics que privés, des dévastations que l'enfance y exerce ; en second lieu a prévenir des accidents, et en troisième lieu à conserver, dans l'intérêt de l'agriculture, toutes sortes d'oiseaux qui se nourrissent d'insectes.
Voilà divers motifs qui me semblent suffisants pour justifier mon article additionnel.
En vain me dirait-on que les oiseaux les plus intéressants ont déjà été l'objet de la faveur de la législature, qui a protégé le rossignol, la fauvette, le vanneau même, je pense, par la loi sur la chasse. Je ferai observer que nous n'avons pas même, à ce point de vue très restreint, atteint notre but, puisque nous n'avons pas défendu l'enlèvement des œufs. Ensuite nous n'avons pas empêché la destruction de toutes sortes d'oiseaux utiles et plus modestes qui, bien qu'ils n'aient pas la jolie voix du rossignol, n'en rendent pas moins des services réels dont nous devons tenir compte.
Je me réserve de répondre aux objections qui pourront m'êlre faites.
M. le président. - M. le ministre de la justice se rallie-t-il à l'amendement qui vient d'être déposé par M. Coomans ?
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Non, M. le président. J'examinerai l'amendement qui vient d'être présenté, la commission aussi l'examinera.
- Le renvoi de l'amendement à la commission est ordonné.
M. Van Cleemputte, au nom de la commission des naturalisations, dépose un rapport sur plusieurs demandes en naturalisation.
- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport| et en met la discussion à la suite de l'ordre du jour.
La séance est levée à 5 heures.