(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1850-1851)
(Présidence de M. Verhaegen.)
(page 189) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.
M. A. Vandenpeereboom présente l'analyse des pétitions adressées à la chambre.
«. Les membres d'une société de rhétorique, établie à Saint-Nicolas, prient la chambre de voter au budget de l'intérieur un subside annuel en faveur de la veuve du poëte flamand Van Ryswyck. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de l'intérieur.
« Le lieutenant-colonel Guillaumot adresse à la chambre plusieurs exemplaires de la déclaration arrêtée par les arbitres choisis pour juger de la contestation survenue entre lui et un membre de l'assemblée, et demande que cette déclaration soit insérée dans les Annales parlementaires. »
- Renvoi à la commission des pétitions et distribution de l'imprimé aux membres de l'assemblée.
«. Plusieurs détenus au dépôt de mendicité de Reckheim demandent l'abrogation de la loi concernant la mendicité. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Muller-Pellering proteste contre l'opinion émise à son égard par l'administrateur de la sûreté publique. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur François réclame l'intervention de la chambre pour qu'il soit pourvu à la restauration et à l'entretien du tronçon de route qui, au sortir de Charleroy, communique avec les deux routes concédées des embranchements de la route de Beaumont et de Marchienne-au-Pont à Charleroy. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
M. Osy. - Messieurs, les observations que j'ai à faire sur le budget de l'intérieur concernent plusieurs articles sur lesquels je désirerais avoir quelques renseignements de M. le ministre de l'intérieur. Comme ces renseignements ne pourraient peut-être pas nous être donnés immédiatement, je crois devoir faire mes interpellations dans la discussion générale pour que M. le ministre ait le temps de se les procurer avant la discussion des articles.
Messieurs, je vois dans le rapport de l'honorable M. Veydt que la section centrale nous propose de porter le subside de la voirie vicinale pour 1851 de 300,000 fr. à 500,000 fr.
Pour l'année 1850 nous avons mis, par le budget et par des lois spéciales que nous n'avons pas eu le temps de discuter, étant venues à l'ordre du jour le dernier jour de la session dernière, nous avons mis à la disposition du gouvernement 800,000 francs pour la voirie vicinale ; j'ai trouvé cette somme trop forte pour les ressources de nos provinces et de nos communes ; car, l'Etat ne donnant qu'un tiers, la dépense totale d'une année pouvait se monter à 2,400,000 fr.-
Je crois qu'un crédit de 300,000 fr. pour les chemins vicinaux n'est pas suffisant, mais qu'un crédit de 800,000 fr. est beaucoup trop élevé, je me rallierai donc au chiffre de 500,000 fr. proposé par la section centrale.
Mais il est bien entendu que le gouvernement ne viendra plus nous surpendre avec des crédits supplémentaires et complémentaires, comme cela a eu lieu à la fin de la dernière session, et j'espère, avec la section centrale, que le gouvernement fera la répartition de cette somme, proportionnellement aux sacrifices que s'imposent les provinces.
Le gouvernement se rallie à la proposition de la section centrale et demande que l'article 44 soit rédigé de la manière suivante :
« Encouragements divers pour l'amélioration de la voirie vicinale ; inspection des chemins vicinaux. »
C'est ici que je diffère avec le gouvernement et la section centrale, car on ne peut pas, dans un même article, confondre les subsides avec le personnel.
Je demande donc que la section centrale nous dise quelle sera la dépense de cette inspection et je propose d'en faire deux articles séparés, l'un pour les subsides, et l'autre pour le personnel. Car, sans supposer aucune mauvaise intention, il faut que nous voyions clair dans les subsides que nous accordons, et que nous sachions combien coûtera cette inspection, qui est une nouvelle création et qu'on ne puisse pas à volonté, absorber pour le personnel une forte somme, que nous destinons en subsides pour un objet si éminemment avantageux pour notre agriculture.
Si la section centrale ne nous faisait pas une proposition, je demanderais à M. le ministre de me dire la somme dont il aura besoin pour le personnel ; et lorsque nous arriverons au chapitre VII, je vous proposerai de faire deux articles de l'article 44.,
Messieurs, j'ai trouvé à l'article 68la preuve d'une irrégularité qui se commet au ministère de l'intérieur. Dans le cahier de la cour des comptes, vous voyez une observation au sujet du jury d'examen. Aux termes des articles 3 et 6 de la loi de comptabilité, toutes les recettes, sans exception, doivent passer par le ministère des finances. Eh bien, par un arrêté du 24 juillet de cette année, M. le ministre de l'intérieur a nommé un fonctionnaire pour opérer la recette des frais d'examen et en faire la répartition entre les membres du jury. C'est là une marche tout à fait irrégulière.
Nous votons au budget un crédit de 30 mille francs pour frais d'examen et nous portons au budget des recettes une somme égale pour le produit des examens subis par ceux qui se présentent devant le jury. C'est ce que prescrivent et l'article 115 de la Constitution et les articles 5 et 17 de la loi de comptabilité.
L'arrêté du 24 juillet, en s'écartant des prescriptions de ces dispositions, soustrait au contrôle de la cour des comptes et le produit des examens et le payement des indemnités.
Voici ce que je lis dans l'arrêté du 24 juillet, dont je viens de parler :
« Art. 3. Les fonds provenant des inscriptions sont centralisés dans la caisse de l'agent comptable du jury, lequel les tient à la disposition du ministre de l'intérieur, jusqu'à la fin de la session, pour être distribués entre les membres du jury. »
« Art. 30. Dans les 20 jours qui suivent la clôture de la session, l'agent comptable présente au minisire de l'intérieur un état détaillé des recettes avec pièces à l'appui. »
Maintenant que voyons-nous à l'article 5 de la loi de 1846 sur la comptabilité.
o Toute entrée de fonds dans les caisses publiques, quel que soit le service auquel ils appartiennent, a lieu pour le compte du département des finances, qui en centralise le montant dans les livres de la comptabilité de la trésorerie.
« Art. 6. La perception des deniers de l'Etat ne peut être effectuée que par un comptable du trésor et en vertu d'un titre légalement établi. »
Je ne connais pas le fonctionnaire qui, au ministère de l'intérieur, est chargé de la recette et des dépenses relatives au jury d'examen ; ce sont les principes que j'invoque ici ; ce queje demande, c'est l'exécution d'une loi qui veut que toutes les recettes et les dépenses passent par la trésorerie.
Je suis persuadé qu'il suffit de signaler ces irrégularités à M. le ministre de l'intérieur, pour réformer, dans le sens de la loi, l'arrêté du 24 juillet 1850 (Moniteur, n°213).
Si, dans d'autres déparlements, on ne suivait pas la marche prescrite dans la loi de 1846, j'engage M. le ministre des finances de leur rappeler les articles 5 et 6 que je viens de signaler.
Je vois aussi que dans le budget de cette année on ne demande rien pour le palais de Liège. Vous savez que l'avant-veille de notre séparation on était venu avec une demande de crédit supplémentaire assez élevé qui a amené un débat assez irritant, sur des dépenses assez considérables faites pour l'ameublement des appartements. A cette occasion, M. le ministre de l'intérieur nous a prévenus que les dépenses pour la réparation du palais de Liège monteraient à 1,200,000 francs. J'ai pris des renseignements à Liège sur ces dépenses ; j'ai visité les lieux dans le plus grand détail, j'ai vu les dépenses qui ont été faites. J'ai eu occasion de parler aux personnes qui ont fait les plans, et voici ce que j'ai appris : Jusqu'à présent, on nous a demandé, je crois, une somme de 400,000 fr. pour la restauration de l'édifice dont il s'agit ; on n'a travaillé qu'à l'un des côtés de la cour, celle où se trouvent les bâtiments du gouverneur ; eh bien, les seules réparations faites à cette partie de l'édifice coûteront au moins deux millions. Or, comme il est impossible de ne pas réparer le tout avec le même soin, vous pouvez apprécier, dès maintenant, messieurs, quelle sera la somme à laquelle ces travaux donneront lieu ; et je ne crois pas pouvoir être taxé d'exagération, en l'évaluant à sept millions. (Interruption.)
Nous avons vu ce qui s'est passé à propos du canal latéral à la Meuse ; là aussi la dépense devait, dans le principe, s'élever à environ trois millions. Eh bien, de crédits en crédits, nous sommes arrivés à 8 ou 9 millions, et je ne doute pasqu'au premier jour on ne nous demande encore un nouveau crédit d'un million ; car ce canal est actuellement dans un tel état qu'il ne retient pas ses eaux. Quand nous discuterons le budget des travaux publics, je communiquerai à la chambre quelques renseignements que j'ai recueillis à cet égard.
Eh bien, messieurs, il est fort à craindre que le même fait ne se produise à l'occasion de la réparation du palais de Liège. Je ne dis certes pas qu'un si bel édifice ne doit pas être restauré ; mais il importe, me semble-t-il, que nous sachions ce que le gouvernement veut en faire.
Je dirai un mot aussi des écoles d'agriculture. Je crois qu'il était bon d'en établir quelques-unes ; et j'ai lu avec attention le rapport de l'inspecteur de ces établissements. Mais ce qui m'a étonné, c'est qu'on n'ait indiqué le nombre des élèves que pour une seule école ; quant au nombre des élèves des autres écoles, on n'en dit pas un mot dans le document qui nous a été distribué. Nous savons parfaitement que la dépense s'élève à 95,000 francs ; mais nous devrions bien savoir aussi quel est le but qu'on se propose.
Quant à moi, je pense que pour faire de bons fermiers la pratiquent infiniment préférable à la théorie, car je crois qu'en général on devient beaucoup plus facilement bon cultivateur en travaillant dans une ferme (page 190) qu'en allant passer quelques années dans une école. Du reste, je le répète, je ne suis pas contraire à ces institutions, mais je trouve que nous en avons trop.
Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur une explication sur l'école de Vilvorde. Je trouve à la page 176 du rapport sur les écoles d'agriculture, que l'école de Vilvorde coûte 9,600 francs, dont 2,400 francs pour traitements, 6,600 fr. pour pension des élèves et 600 fr. pour gratification aux élèves. Ainsi, pas de subsides pour achat de livres et d'instruments. Cependant, il y a, à la page 130 du rapport de M. l'ingénieur en chef, une observation critique où il est parlé d'empêcher l'achat direct d'instruments, appareils, etc., destinés à l'enseignement, et où il est dit que ces achats ont eu lieu avec les fonds de l'Etat. Comme en 1850 le gouvernement n'a pas alloué de fonds pour achat d'instruments, etc., je crois qu'il doit y avoir erreur dans le rapport de M. l'ingénieur, et si M. le ministre ne pouvait pas me donner des renseignements à ce sujet, je le prierais de vouloir bien faire examiner ce qui en est. Evidemment il y a erreur, soit dans le rapport de M. l'ingénieur, soit dans les détails qui se trouvent à la page 176, et que j'ai rappelés tout à l'heure.
M. Cumont. - J'aurai quelques renseignements à demander à l'honorable ministre de l'intérieur sur un objet qui intéresse à un très haut degré nos différentes industries.
Il est connu, messieurs, que la loi qui régit maintenant les brevets d'invention laisse beaucoup à désirer, et qu'il serait possible d'établir un autre système, qui procurerait des revenus au trésor et qui garantirait d'une manière beaucoup plus convenable les intérêts des inventeurs. Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur si le gouvernement a l'intention de réformer bientôt la législation sur cette matière.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Un projet de loi est préparé, il peut être déposé du jour au lendemain sur le bureau de la chambre.
M. Cumont. - Je remercie M. le ministre d'avoir avisé au moyen de remédier au mal qui existe.
Maintenant je demanderai quelles sont les intentions du gouvernement quant à la réunion des directions de l'industrie et du commerce dans un seul département. La section centrale du budget des affaires étrangères a exprimé, à l'unanimité moins une voix, le désir de voir opérer cette réunion, et je vois, par le rapport de l'honorable M. Veydt, que la section centrale du budget de l'intérieur a exprimé le même désir.
Il est évident pour moi, messieurs, que nul pays au monde ne possède autant d'éléments de prospérité que la Belgique, et que si ces éléments ne produisent pas tous les fruits qu'on pourrait en attendre, c'est que les institutions qui doivent leur venir en aide nous font défaut. Or, je pense que cette division des directions de l'industrie et du commerce entre pour beaucoup dans l'absence du développement complet des ressources du pays.
Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur si son intention est de continuer dans la voie actuelle, que je considère comme profondément regrettable, ou bien s'il a l'intention d'en sortir.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, en ce qui concerne la dernière interpellation de l'honorable membre, je rappellerai que déjà la motion en a été faite dans les sessions précédentes, et que le gouvernement y a déjà répondu. La direction du commerce et de l'industrie remonte, comme institution, à l'année 1833 ou 1834 ; le commence et l'industrie étaient alors réunis dans une même division avec l'agriculture et les beaux-arts ; je créai une direction spéciale pour le commerce et l'industrie.
Sous les administrations postérieures, l'on divisa cette direction en deux nouvelles branches, l'une relative au commerce, l'autre, à l'industrie ; plus tard, lors du passage, je pense, de l'honorable M. Dechamps au département des affaires étrangères, la division du commerce fut transférée à ce département. Voilà dans quelle situation nous avons trouvé en 1847 les administrations.
Je ne puis croire que la prospérité du commerce et de l'industrie puisse tenir à ce que les divisions du commerce et de l'industrie se trouvent réunies dans le même département. Sans doute la réunion dans un même département imprimerait, dans certains cas, plus de rapidité et d'unité à l'expédition des affaires. Mais, d'un autre côté, il n'est pas sans avantage qu'une même affaire soit examinée dans deux départements différents au point de vue industriel et au point de vue commercial. Les ministres ne peuvent que mûrir davantage leurs décisions, lorsqu'elles sont l'objet d'un contrôle réciproque, et c'est ce qui arrive aujourd'hui ; avant d'arrêter une mesure, les minisires se consultent, se contrôlent, et la décision ne peut que gagner en maturité.
Je répète qu'au point de vue de l'unité et de la rapidité, il y a certains inconvénients dans cette marche ; mais au point de vue de la maturité des décisions, la division actuelle présente des avantages.
En ce qui concerne la division de l'industrie, l'honorable député d'Alost voudra bien reconnaître que la manière dont les affaires industrielles sont traitées dans cette division laisse peu de chose à désirer. Je ne pense pas que l'honorable M. Cumont puisse critiquer la marche suivie par la division de l'industrie au département de l'intérieur ; je crois que les affaires attribuées à cette division y sont traitées convenablement, et avec l'intelligence des intérêts de l'industrie. Je n'ai pas à rappeler ici les nombreuses mesures, qui sont émanées de cette division et dont l'honorable M. Cumont lui-même n'a pas été le dernier à reconnaître l'utilité et l'efficacité.
Pour le moment donc, je dois dire que les ministres n'ont pas reconnu l'urgence de réunir dans un même département la division du commerce et celle de l'industrie.
Si des inconvénients graves se faisaient sentir, cette réunion pourrait s'opérer facilement par un simple arrêté royal. Mais, je le répète, jusqu'ici nous n'avons pas reconnu que les inconvénients fussent tets qu’ils dussent amener un changement dans les attributions. Le département de l'intérieur a déjà des attributions très nombreuses. Le département des affaires étrangères a sans doute des attributions très importantes, mais ces attributions ne sont pas aussi nombreuses, aussi diverses que celles du département de l'intérieur, et sous ce rapport, le chef de ce département est en mesure de donner des soins particuliers aux questions commerciales qui se lient d'ailleurs très intimement aux questions diplomatiques.
M. Cumont. - Je n'ai nullement eu l'intention d'examiner ce que font les employés des ministères de l'intérieur et des affaires étrangères, qui, je le reconnais, sont des hommes très capables et qui ont de très bonnes intentions. Mais il est évident pour moi que, pour mener ces affaires à bonne fin, il faut voir ce qui manque à la direction de notre commerce. Je regrette que M. le ministre de l'intérieur ne comprenne pas cela.
Je mets en fait que si l'on proposait à l'honorable ministre de l’intérieur de laisser administrer son département par un autre ministre qui possédât autant de capacités que nous en reconnaissons à l'honorable ministre de l'intérieur, je mets en fait, dis-je, qu'il y aurait un bouleversement général dans les affaires.
Eh bien, messieurs, voilà la position qui est faite à notre direction commerciale, non pas par la mauvaise volonté ou par le manque de connaissances, mais par le manque d'action, de manières de voir.
Nous n'avons pas de systèmes commerciaux fixes ; nous en avons tantôt d'une façon, tantôt d'une autre.
On a proposé comme panacée universelle le système des droits différentiels. Eh bien tout le monde est d'accord que ce système a eu pour résultat de froisser les intérêts existants.
Vous reconnaissez les inconvénients qui se sont présentés, vous reculez, et vous froissez de nouveau les intérêts que vous avez perdus par le système que vous avez suivi. Voilà des inconvénients que je désirerais» voir éviter.
Je prie de nouveau M. le ministre de l'intérieur d'examiner très sérieusement l'affaire et de doter enfin le pays d'une direction unique, pour arriver à une bonne direction de nos intérêts commerciaux.
M. Coomans. - Messieurs, l'honorable député d'Alost vient de dire que tout le monde est d'accord aujourd'hui pour reconnaître que le système des droits différentiels est mauvais...
M. Cumont. - N'a pas produit les résultats qu'on en attendait.
M. Coomans. - N'a pas produit les résultats qu'on en attendait, c'est-à-dire que ce système a trompé l'attente de ceux qui l'ont proposé, qui l'ont voté, et confirme l'opinion de ceux qui le maintiennent aujourdhui après l'avoir combattu.
Je dois reproduire ici une opinion que j'ai émise depuis dans une autre circonstance, c'est qu'il est très dangereux d'attaquer sans cesse les lois générales du pays, surtout en ce qui concerne le commerce et l'industrie, alors qu'on s'abstient de les réformer. En agissant ainsi, on énerve l'action de ces lois, on ébranle la foi que les travailleurs et les spéculateurs doivent avoir en elles, et l'on finit réellement par les rendre mauvaises ou inefficaces, à force de les qualifier ainsi.
Il importerait que le commerce et l'industrie sussent quelles sont les opinions du cabinet et de la majorité sur les droits différentiels, et si l’on compte les maintenir ou les supprimer.
La vérité est que si notre système des droits différentiels n'a pas produit tous les résultats que nous en attendions, la cause principale en est dans l'incertitude qui a toujours régné sur le maintien du système, et parfois sur son application.
Je suis certain qu'il y a des armateurs en Belgique, et en assez grand nombre, qui auraient construit beaucoup de navires, s'ils avaient pu compter sur la conservation du système des droits différentiels pour une période de 10 à 15 ans.
Sans avoir produit de vastes résultats, la loi de 1844 n'est pas restée inefficace. Dès lors, le décroissement de notre marine marchande a non seulement cessé, mais elle s'est renforcée, et nos relations transatlantiques se sont incontestablement accrues.
Mais par malheur, messieurs, quand le système des droits différentiels fut produit dans cette chambre, quand il fut converti en loi, il rencontra des adversaires de jour en jour plus ardents et plus exclusifs, surtout dans les rangs d'où est sorti le cabinet actuel ; le langage de l'ancienne opposition fit craindre que le système ne fût détruit à la suite d'un changement de ministère. Cette incertitude arrêta les armateurs, entrava les opérations de longue haleine et contribua puissamment à rendre peu efficace la législation de 1844 La Belgique a eu ce malheur depuis vingt ans et surtout depuis trois ans, d'être gouvernée un peu au hasard, sous le rapport de la législation commerciale, et de n'avoir bien su à un jour donné quels seraient le tarif et le système du lendemain.
Messieurs, en pareille matière l'incertitude est un grand mal, et je déplore le silence obstiné que garde le ministère quand il entend $(mot illisible) (page 191) ou critiquer les lois organiques du commerce. Les plus mauvaises lois sont celles qu'on change trop souvent : les meilleurs sont celles qui inspirent de la confiance et qui assurent les producteurs contre les variations de la politique et des théories.
Le commerce et l'industrie ne vivent pas de théories ; ils réclament des lois nettes, durables, des lois pratiques et d'avenir. Si les droits différentiels n'avaient pas été continuellement menacés, si un parti puissant ne les avait pas combattues dès leur naissance, elles auraient donné des résultats beaucoup plus satisfaisants que ceux que nous avons à constater aujourd'hui.
Messieurs, le même honorable membre a fait une motion très sage, ce me semble, celle de réunir les différents bureaux qui s'occupent de matières identiques et de les soumettre à une seule et même direction. Cet avis, je l'ai émis depuis plusieurs années, et jamais on n'y a opposé de bonnes raisons. Pour rentrer dans le même ordre d'idées, je dirai que je préférerais à une réunion de moyens matériels, l'unité des principes ; au lieu de se borner à réunir des employés dans une même chambre, à établir des bureaux sous le même toit, je préférerais qu'il y eût unité dans les principes professés par les divers membres du cabinet ; s'ils parvenaient à se mettre d'accord sur ce point essentiel, nous ne verrions plus un ministre nous vantez la liberté absolue du commerce, les bienfaits du libre-échange, et un autre ministre défendre et exalter le système de la protection.
Ces contradictions sont non seulement étranges, elles introduisent l’anarchie dans les affaires, inquiètent les esprits et entravent les opérations industrielles.
Réunissez vos principes, dirai-je à MM. les ministres, discutez-les, entendez-vous sur leur application et faites-en un tout rationnel, logique, complet, juste. Cela sera bien plus important que de rassembler divers bureaux dans un même département. Aussi longtemps que vous n'aurez pas de système, la fusion de vos bureaux ne portera pas de fruits.
Puisque je me suis levé, j'adresserai à M. le ministre de l'intérieur une demande qui se rapporte à quelques observations présentées par l'honorable M. Osy ; je prierai l'honorable M. Rogier de vouloir bien nous donner des renseignements supplémentaires quin ous manquent, une statistique détaillée dont les éléments seraient :
Le nombre des professeurs et autres agents rétribués dans les écoles d'agriculture, d'horticulture, etc. ;
Le nombre des élèves ;
La montant des recettes et celui des dépenses.
Jusqu'à présent nous avons voté des sommes assez considérables pour soutenir ces établissements, et les renseignements qui les concernent sont assez vagues. Les dernières nouvelles que nous en avons eues sont éparpillées dans quelques journaux plus officieux qu'officiels.
Je désire que M. le ministre veuille bien faire rédiger et mettre sous nos yeux un document complet et spécial concernant ces institutions, dont je me réserve d'apprécier la valeur au double point de vue du budget et des services rendas par elles à l'agriculture. Tout partisan que je suis de cette grande industrie, je ne suis pas indifférent aux moyens mis en œuvre pour la favoriser.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je suis prêt à donner des explications à l'honorable M. Osy sur la plupart des questions qu'il a adressées au gouvernement. La chambre désire-t-elle que je les donne maintenant ou aux articles auxquels ces questions se rapportent ?
- Plusieurs voix. - Aux articles !
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - M. Coomans doit avoir reçu le rapport sur les écoles d'agriculture que j'ai fait distribuer à tous les membres. Je le lui recommande plus particulièrement, à lui qui s'occupe spécialement de ces matières, il y trouvera des renseignements très remarquables à tous égards.
M. Coomans. - Je l'ai lu, il ne contient pas les renseignements que je demande.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je suis prêt à donner les renseignements qu'on pourra demander sur tous les services compris dans mon budget et particulièrement sur les écoles d'agriculture.
M. Coomans. - Messieurs, veuillez croire que je n'abuserais pas des moments de la chambre au point de venir demander des pièces qui seraient déjà rédigées et imprimées. Je n'ai pas trouvé, dans le document que M. le ministre nous a fait distribuer, les renseignements que je désire. Je voudrais connaître le nombre exact des élèves sérieusement instruits, ainsi que le nombre et les appointements des professeurs, le chiffre détaillé de la recette et de la dépense de chacun des établissements en question. C'est ce qui intéresse particulièrement la chambre.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Beaucoup de ces renseignements se trouvent dans le rapport ; notamment, pour plusieurs des établissements, le nombre des élèves et celui des professeurs.
- La discussion générale est close.
« Traitement du ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement des fonctionnaires, employés et de service : fr. 192,050. »
- Adopté.
Art. 3. Fournitures de bureau, impresions, achats et réparations de meubles, éclairage, chauffage et menues dépenses : fr. 30,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Frais de route et de séjour, courriers extraordinaires : fr. 3,500. »
« Art. 5. Pensions. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 6,000. »
- Adopté.
« Art. 6. Secours à d'anciens employés belges aux Indes ou à leurs veuves : fr. 5,000. »
- Adopté.
« Art. 7. Secours à d'anciens fonctionnaires et employés ou à leurs veuves, qui, sans avoir droit à la pension, ont néanmoins des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 7,000. »
- Adopté.
« Art. 8. Personnel. Frais de la commission centrale de statistique et des commissions provinciales. Jetons de présence et frais de bureau : fr. 6,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Matériel. Frais de publication des travaux du bureau de statistique générale, de la commission centrale et des commissions provinciales : fr. 8,000. »
- Adopté.
M. Rousselle. - J'ai l'honneur de présenter à la chambre un amendement sur le chapitre IV du budget. Cet amendement serait ainsi conçu :
« Art. 10 Traitement des gouverneurs, des députés, des conseils provinciaux et des greffiers provinciaux.
« Charges ordinaires et permanentes : fr. 339,500. »
« Art. 11. Traitement des employés et gens de service.
« Charges ordinaires et permanentes : fr. 374,315. »
« Art. 12. Frais de route et de séjour.
« Charges ordinaires et permanentes : fr. 14.637. »
« Art 13. Loyers des locaux pour les gouverneurs, les deputations permanentes des conseils provinciaux et des bureaux.
« Charges extraordinaires et temporaires : fr. 5,800. »
« Art. 14. Frais de bureaux, d'impressions, de reliures, entrelien des meubles, éclairage, chauffage, menues dépenses.
« Charges ordinaires et permanentes : fr. 133,630.
« Charges extraordinaires et temporaires : fr. 5,000. »
« Art. 15. Dépenses imprévues.
« Charges ordinaires et permanentes : fr. 9,000. »
Total : fr. 881,682.
Peu de mots, messieurs, suffiront, je pense, pour expliquer les motifs de cet amendement. Dans l'état actuel des choses, tout est livré à l'appréciation discrétionnaire des gouverneurs ; l'action du pouvoir central ne s'exerce pas sur une dépense aussi importante. De là il est résulté de nombreuses anomalies qui déjà ont été signalées et que je me dispenserai de rappeler de nouveau à la chambre.
(page 192) Pour que le gouvernement puisse exercer son contrôle nécessaire sur les dépenses des administrations provinciales, il est indispensable qu'il ait le moyen, quand il se présentera des emplois vacants, de supprimer ceux qu'il trouvera inutiles, et d'augmenter les émoluments là où cela sera reconnu juste.
Ma proposition tend donc tout simplement à mettre M. le ministre de l'intérieur à même d'exercer sa prérogative. M. le ministre, dans l'état actuel des choses, ne peut procéder que par voie d'augmentation du crédit des administrations provinciales. Quant à moi, je pense que la somme totale de 881,682 fr., allouée au budget, est suffisante, si elle est convenablement et justement répartie. M. le ministre, pour réparer, ou plutôt pour commencer à réparer une injustice commise depuis très longtemps envers le Hainaut, avait proposé, en section centrale, d'augmenter de 2,000 fr. le crédit pour cette province. Cette proposition n'a pas été admise par la section centrale. J'en comprends parfaitement le motif, puisque je reconnais moi-même que la somme totale portée au budget suffirait pour rendre complètement justice au Hainaut, à mesure des vacances d'emplois qui surviendraient dans les autres provinces.
- La proposition est appuyée.
M. Delfosse. - Je demande l'impression de la proposition.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je demanderai à l'honorable auteur de la proposition si, dans le cas où elle serait adoptée, son intention serait d'en faire l'application au budget de 1851. Cette proposition renferme une réforme assez profonde. Aujourd'hui la répartition des allocations se fait par province et par le budget ; d'après la proposition de l'honorable M. Rousselle, au contraire (proposition que j'approuve à plusieurs égards), cette répartition se ferait administrativement par le gouvernement.
Je crois que cette proposition, vu son importance, mérite un examen sérieux de la chambre ; c'est pourquoi je conseille à l'honorable M. Rousselle de vouloir bien la livrer aux méditations de ses collègues jusqu'à la discussion du budget de 1852. C'est, je pense, le seul moyen de lui assurer des chances de succès ; car je doute que la chambre puisse, en un jour ou deux, se prononcer sur cette proposition. Du reste, j'abandonne ces observations à l'honorable M. Rousselle lui-même.
M. Veydt. - L'observation de M. le ministre de l'intérieur rentre tout à fait dans les intentions de la section centrale. Vous avez pu voir, messieurs, à la page 4 de son rapport, une note dans laquelle il est dit quelques mois de la proposition dont il s'agit. Elle a paru tellement importante à la section centrale que nou savons cru devoir nous borner à la signaler à l'attention de M. le ministre. Il en a été de même de deux autres propositions ayant pour objet d'augmenter respectivement de 2,000 francs les crédits proposés pour les provinces de Luxembourg et de Hainaut : nous avons pensé que, dans l'état actuel des choses, il convenait de ne rien changer aux allocations.
Je pense également que nous ferons bien de renvoyer au budget prochain la proposition de l'honorable M. Rousselle ; toutefois, comme l'impression en est demandée, nous pourrions renvoyer notre décision à lundi.
M. Rousselle. - Si la chambre adopte la proposition de M. le rapporteur de la section centrale, de renvoyer la discussion à lundi, il est inutile que je continue maintenant.
M. le président. - Il paraît d'après ce qui a été dit en section centrale, M. le ministre étant présent, que la solution de la question ne s'appliquerait, en aucun cas, au budget de 1851, mais au budget de 1852, si la chambre le décidait ainsi.
M. Rousselle. - En faisant ma proposition, je n'ai nullement entendu déterminer le budget auquel elle serait appliquée. Mon intention, en la soumettant à la chambre, est simplement d'arriver à rétablir le contrôle el la juste action du pouvoir central sur la distribution des fonds appliqués aux administrations provinciales, distribution qui, telle qu'elle est faite actuellement par la loi budgétaire, présente de très grandes anomalies, et même de très grandes injustices.
Vous comprenez, messieurs, qu'il m'est impossible d'entrer dans tous les détails de la question ; c'est une affaire de gouvernement ; c'est au pouvoir central qu'il appartient de voir ce qui convient pour l'administration de chaque province. Je désire que les gouverneurs ne soient pas seuls chargés de faire cette distribution. Je signalerai un seul fait qui, je pense, frappera la chambre ; c'est qu'en laissant aux gouverneurs la fixation des grades et des traitements, ces fonctionnaires exercent nécessairement une influence sur la fixation des employés des gouvernements provinciaux. Cela n'existe pas dans les administrations de l'Etat. Ma proposition n'a d'autre but que de changer cet état de choses, tout en laissant au gouvernement, je le répète, le soin de l'appliquer à tel budget qu'il croira convenable, lorsqu'il sera suffisamment édifié sur la nécessité de la mettre en pratique.
M. le président. - Ainsi, la proposition de M. Rousselle serait imprimée ; la discussion en serait renvoyée à lundi, et le vote des articles du chapitre IV serait tenu en suspens.
M. Jullien. - Messieurs, je crois devoir faire observer à la chambre que nous sommes dans l'impossibilité et que nous serons dans l'impossibilité lundi d'asseoir une opinion raisonnée sur la proposition de l'honorable M. Rousselle.
L'honorable M. Rousselle propose un système entièrement nouveau ; il veut livrer exclusivement à l'arbitraire ministériel la distribution des fonds votés par la loi du budget pour le service des administrations provinciales. C'est là, messieurs, une proposition infiniment grave.
Convient-il de mettre sous le contrôle exclusif et à la disposition absolue d'un chef de département ministériel des sommes aussi importantes que celles que nous volons, pour couvrir les dépenses du service des gouvernements provinciaux ?
Telle est la question que soulève la proposition de l'honorable M. Rousselle.
Eh bien, messieurs, pour ma part, malgré la haute confiance que m'inspire le chef du département de l'intérieur, j'ai certains scrupules sur la question de principe que je viens d'indiquer. Les chambres jusqu'à présent ont alloué les fonds nécessaires pour le service des administrations provinciales avec assignation déterminée pour chaque province.
M. le ministre de l'intérieur ne paraît pas non plus vouloir accepter, sans un examen ultérieur, la proposition de l'honorable M. Rousselle ; il convient lui-même qu'elle doit faire l'objet d'une étude toute spéciale, très approfondie. Cette étude, messieurs, ne peut se faire qu'au moyen des renseignements qui seront fournis par les gouvernements provinciaux eux-mêmes. La chambre sera donc dans l'impossibilité de se prononcer avec connaissance de cause sur la proposition de l'honorable M. Rousselle, la discussion fùt-elle remise à lundi ou à mardi.
Je me joindrai donc à M. le ministre de l'intérieur pour prier l'honorable M. Rousselle, dans l'intérêt même des travaux de cette chambre, dans l'intérêt du vote du budget, de bien vouloir retirer sa proposition, sauf à la renvoyer à M. le ministre de l'intérieur, pour en faire l'objet d'une instruction séparée.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai cru devoir soumettre à la chambre la gravité de la question et l'engager à y réfléchir.
Quant à moi, je n'ai pas besoin de la méditer. Je m'en suis occupé depuis que l'honorable M. Rousselle l'a produite en section centrale. Au fond, cette proposition est très claire et rentre, à certain point de vue, dans les convenances du gouvernement. Il s'agit d'un accroissement d'influence et d'autorité pour le ministre, et aussi comme compensation, d'un accroissement d'embarras. Voilà pourquoi, tout compensé, je ne me suis pas montré très ardent à appuyer la proposition de l'honorable M. Rousselle ; mais elle a certainement un côté pratique très utile.
Il y a aujourd'hui entre les provinces certaines inégalités qu'il serait désirable de voir disparaître. Si le gouvernement avait la libre disposition des fonds affectés aux divers services dans les provinces, il pourrait successivement faire disparaître ces inégalités.
Je ne me dissimule pas, messieurs, les difficultés administratives qu'il rencontrerait dans cette répartition ; mais enfin s'il devait en naître un bien, il devrait passer sur ces difficultés.
Si le système de M. Rousselle n'est pas admis, il faudra tâcher de faire législativement, par la voie du budget, ce que l'honorable M. Rousselle propose de faire par la voie administrative et tâcher d'arriver d'année en année à une répartition un peu plus juste.
Je ne crois pas qu'il y ait des provinces qui reçoivent trop ; mais il est évident qu'il est certaines provinces qui ne reçoivent pas assez. La province de Hainaut notamment est dans ce cas.
- Un membre. - N'y a-t-il pas des provinces qui ont trop ?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Toutes se plaignent de ne pas avoir assez. Plusieurs ont évidemment un budget trop peu élevé, et si nous nous étions trouvés dans d'autres circonstances depuis quelques années, je n'aurais pas hésité à proposer certaines augmentations pour quelques provinces.
Cette année, pressé par l'évidence des réclamations de la province de Hainaut, j'avais proposé à la section centrale une augmentation de 2,000 francs.
Depuis lors, d'autres provinces ont réclamé, mais je n'ai pas cru devoir donner suite à leur réclamation.
M. Mercier. - La question est de savoir si l'on imprimera l'amendement.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Non, il s'agit de savoir si dès lundi on discutera la proposition de l'honorable M. Rousselle. Quant à moi, je n'ai pas besoin de nouvelles lumières. La question, je le répète, est très claire ; l'honorable M. Rousselle l'a expliquée ; je l'ai moi-même expliquée ; mais il s'agit de savoir jusqu'à quel point il convient d'accorder au ministre cet accroissement d'autorité.
M. Mercier. - L'amendement est-il en discussion ?
M. le président. - La question qui est en discussion est celle-ci : Renverra-t-on à lundi l'examen de l'amendement de M. Rousselle, et suspendra-t-on, en attendant, la délibération sur les divers articles du chapitre IV ?
M. Rousselle. - M. le président, mes amis désirent que je retire mon amendement. Ils me disent : Reprenez la proposition de l'honorable ministre de l'intérieur, par laquelle ce ministre, se rendant à l'évidence de l'injustice qui a été commise envers la province de Hainaut dans la répartition des fonds, a demandé, pour commencer la réparation de cette injustice, d'augmenter de deux mille francs le crédit destiné à cette province. Si cette proposition de l'honorable ministre, reproduite par moi, pouvait avoir des chances de succès devant la (page 193) chambre, je n'hésiterais pas à consentir à ce que l'examen de ma proposition fût renvoyé à une autre session. Mais vous comprenez, messieurs, que si je n'ai pas l'espérance de voir commencer la réparation de l'injustice que j'ai signalée, je ne pourrais retirer ma proposition, car elle tend uniquement à ne pas aggraver les charges de l'Etat, mais en ménageant les moyens de réparer les injustices au fur et à mesure qu'il arriverait des extinctions dans les emplois surabondants ou trop payés de certaines autres provinces.
M. Moncheur. - Messieurs, je considère la proposition de l'honorable M. Rousselle comme extrêmement importante, et je crois qu'il est impossible de la discuter même lundi ou mardi prochain ; je proposerai formellement l'ajournement de la discussion de cette proposition jusqu'à l'examen du budget de l'intérieur pour 1852. Cet examen aura lieu dans cette session, par conséquent il pourra venir encore en temps utile.
Messieurs, quant à moi, au premier abord du moins, je ne pourrais lui donner mon assentiment. Je crois, d'une part, que cette centralisation nouvelle que l'on voudrait introduire dans l'administration aurait de très graves inconvénients, et je suis persuadé, d'autre part, qu'il est bon que les gouverneurs aient la faculté de récompenser le zèle quand il se produit et qu'ils puissent par conséquent, comme ils l'ont fait jusqu'ici, fixer les traitements de leurs employés.
Dans tous les cas, je dis que la proposition de M. Rousselle est grave et qu'il n'y a pas d'urgence de la discuter puisque l'état de choses actuel existe depuis plus de 30 ans. Je propose donc l'ajournement.
M. Rousselle. - Messieurs, je retire ma proposition, puisqu'il paraît que la chambre désire avoir plus de temps pour s'éclairer. Je n'aime pas à brusquer les résolutions de la chambre ni à obtenir une décision sur laquelle elle ne serait pas entièrement édifiée. Mais il est impossible, messieurs, en retirant ma proposition, de ne pas reprendre celle que M. le ministre avait soumise à la section centrale et qui avait pour objet d'augmenter de 2,000 francs le crédit demandé pour la province de Hainaut. Voici, messieurs, mes motifs à l'appui de cette proposition.
La moyenne du traitement des agents des gouvernements provinciaux pour tout le royaume, est de 1,192 fr. par agent ; la moyenne pour le Hainaut n'est que de 997 fr. ; si vous appliquiez au Hainaut la moyenne du royaume, et en ne demandant que cette moyenne, nous serions fort conciliants et eu égard à l'importance de notre province et de l'immensité du travail qui s'y fait, eh bien, si vous appliquiez cette moyenne au Hainaut, le crédit de cette province devrait être augmenté de 10,336 fr. Or l'honorable ministre, dont je reprends la proposition, ne demandait que 2,000 fr. c'est-à-dire moins du cinquième de cette somme.
M. le président. - Cette proposition viendra aux articles concernant le Hainaut.
M. Veydt, rapporteur. - Messieurs, il me semble qu'elle devrait venir en premier lieu, comme question de principe, en quelque sorte, et ainsi elle concerne tout le chapitre IV. La section centrale n'entend pas méconnaître qu'il y aurait quelque chose à faire. M. le ministre s'en est déjà occupé ; il nous a soumis l'analyse de toutes les opinions qui ont été émises, et il nous a proposé d'augmenter de 2,000 fr. le crédit destiné à la province de Hainaut. Cette augmentation est justifiée, suivant moi ; mais il y aurait également des augmentations à proposer pour d'autres provinces, par exemple pour le Luxembourg et pour le Brabant, qui se plaignent de l'insuffisance de leurs crédits.
La section centrale a donc pensé que cette question devait faire l'objet d'un examen d'ensemble et que dès lors il n'y a pas lieu de voter, pour le moment, aucune augmentation quelconque pour telle ou telle province en particulier.
M. Delfosse. - Messieurs, il faut avant tout mettre aux voix l'amendement de l'honorable M. Rousselle. La résolution que la chambre prendra sur cet amendement peut être de nature à exercer de l'influence sur le vote des allocations destinées à d'autres provinces.
- La chambre décide qu'elle statuera en premier lieu sur les articles relatifs à la province de Hainaut.
L'amendement de M. Ch. Rousselle, qui a pour objet d'augmenter de 2,000 fr. l'ensemble des crédits demandés pour le Hainaut, est d'abord mis aux voix ; il n'est pas adopté.
- Les articles 22, 23 et 24, concernant la province de Hainaut, sont ensuite adoptés avec les chiffres primitifs.
Ils sont ainsi conçus :
« Province de Hainaut.
« Art. 22. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,700. »
« Art. 23. Traitement des employés et gens de service : fr. 52,840. »
« Art. 24. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 18,930. »
La chambre revient à l'article 10, qui est ainsi conçu :
« Province d'Anvers.
« Art. 10. Traitement du gouverneur, des députés du eonseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,000. »
- Adopté.
« Art. 11. Traitements des employés et gens de service : fr. 41,000. »
- Adopté.
« Art. 12. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 18,300. »
- Adopté.
« Province de Brabant.
« Art. 13. Traitement du gouverneur, des députés du j conseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,700. »
- Adopté.
« Art. 14. Traitement des employés et gens de service : fr. 49,575. »
- Adopté.
« Art. 15. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 18,700. »
- Adopté.
« Province de la Flandre occidentale.
« Art. 16. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,700. »
- Adopté.
« Art. 17. Traitement des employés et gens de service : fr. 41,300. »
- Adopté.
« Art. 18. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,250. »
- Adopté.
« Province de la Flandre orientale.
« Art. 19. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,700. »
- Adopté.
« Art. 20. Traitement des employés et gens de service : fr. 45,000. »
- Adopté.
« Art. 21. Frais ce route, matériel et dépenses imprévues : fr. 18,500. »
- Adopté.
« Province de Liège.
« Art. 25. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,700. »
- Adopté.
« Art. 26. Traitement des employés et gens de service : fr. 43,800. »
- Adopté.
« Art. 27. Frais de route, frais de loyer, matériel et dépenses imprévues.
« Charges ordinaires : fr. 18,690.
« Charges extraordinaires : fr. 5,800. »
- Adopté.
« Province de Limbourg.
« Art. 28. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,700. »
- Adopté.
« Art. 29. Traitement des employés et gens de service : fr. 33,000. »
- Adopté.
« Art. 30. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 14,997. »
- Adopté.
« Province de Luxembourg.
« Art. 31. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,700. »
- Adopté.
« Art. 32. Traitement des employés et gens de service : fr. 31,800. »
- Adopté.
« Art. 33. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 15,200. »
- Adopté.
« Province de Namur.
« Art. 34. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 37,700. »
- Adopté.
« Art. 35. Traitement des employés et gens de service : fr. 36,000. »
- Adopté.
« Art. 36. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 14,700. »
- Adopté.
« Art. 37. Traitement des commissaires d'arrondissement : fr. 166,800. »
- Adopté.
(page 191) « Art. 38. Emoluments pour frais de bureau : fr. 81,200. »
- Adopté.
« Art. 39. Frais de route et de tournées : fr. 22,500. »
- Adopté.
« Art. 40. Frais d'exploits relatifs aux appels interjetés d'office, en vertu de l'article 7 de la loi du 1er avril 1843 : fr. 500. »
- Adopté.
« Art. 41. Traitement des vérificateurs et aspirants vérificateurs des poids et mesures : fr. 33,400. »
- Adopté.
« Art. 42
« Frais de bureau : fr. 6,150.
« Frais de tournées : fr. 11,850.
« Ensemble : fr. 18,000. »
- Adopté.
« Art. 43. Matériel : fr. 2,000. »
- Adopté.
« Art. 44. Encouragements divers pour l'amélioration de la voirie vicinale : fr. 300,000. »
M. le président. - La section centrale a augmenté ce chiffre de 200,000 francs.
M. Osy propose de faire de l'article deux articles séparés, et de dire :
« Art. 44. Encouragements divers pour l'amélioration de la voirie vicinale.
« Art. 45. Inspection des chemins vicinaux. »
Le total des deux articles serait de 500,000 francs ; d'après l'amendement de M. Osy, le gouvernement aurait à proposer la répartition de cette somme entre les deux articles.
- L'amendement de M. Osy est appuyé.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je ne vois pas d'inconvénient à me rallier à la division proposée par l'honorable M.Osy. J'indiquerai ultérieurement le chiffre destiné à l'inspection. Ce chiffre ne sera pas considérable ; une partie des frais d'inspection sera imputée sur l'allocation de l'agriculture, l'inspection comprenant à, la fois l'agriculture et la voirie vicinale.
M. Rodenbach. - Messieurs, je ne pense pas qu'à propos de la discussion sur le chapitre concernant la voirie vicinale, il soit inopportun d'appeler la sérieuse attention de M. le ministre de l'intérieur sur les inondations qui ont eu lieu au mois d'août dernier.
Messieurs, ces inondations ont causé beaucoup de ravages, notamment dans la Flandre occidentale, et entre autres dans le district que j'ai l'honneur de représenter ; de petits ruisseaux, de petites rivières débordent périodiquement, et ces débordements font un tort immense à l'agriculture.
Je sais que, pour prévoir les inondations des grandes rivières dans le royaume, l'administration fait faire beaucoup de travaux. Je me suis adressé aux ponts et chaussées pour demander s'ils ne pouvaient s'occuper de semblables mesures d'améliorations pour les petites rivières ; il m'a été répondu que cet objet regardait le budget de l'intérieur ; j'ai cru alors devoir m'adresser au gouvernement provincial, et là on m'a fait connaître que le règlement provincial de la Flandre occidentale n'arme pas les autorités d'un pouvoir suffisant pour faire effectuer les travaux.
J'attire toute l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur ce point. Je pense qu'il faudra peut-être provoquer un nouveau règlement et nommer des commissaires-voyers. Car tout cela reste aujourd'hui dans un état pitoyable. Tous les trois ou quatre ans, le Mandel notamment déborde, et ces inondations ruinent une foule de particuliers. Il en est de même d'autres petits ruisseaux de la Flandre occidentale : depuis 50 à 60 ans, l'autorité a très peu fait pour remédier à ce déplorable état de choses. J'invite instamment M. le ministre de l'intérieur à vouloir bien s'occuper de cet objet : ce sera un grand bienfait pour l'agriculture, Je le répète, le règlement provincial paraît très vicieux, en ce sens qu'il laisse l'administration sans pouvoir, suffisants pour faire faire des travaux.
M. Cools. - Messieurs, d'après ce qu'a dit tout à l'heure l'honorable ministre de l'intérieur, l'inspecteur des écoles d'agriculture et des chemins vicinaux toucherait son indemnité, en partie sur le crédit des chemins vicinaux, et en partie sur le crédit de l'agriculture.
Cette imputation sur deux articles différents me paraît anomale. La chambre se rappellera que, pour d'autres fonctionnaires et notamment pour des fonctionnaires du département des travaux publics, elle s'est opposée à ce que leur traitement fût prélevé sur deux articles différents.
Puisque l'indemnité qu'on se propose d'allouer sur le crédit, des chemins vicinaux à l'inspecteur dont il s'agit, n'est pas très considérable, ne serait-il pas plus rationnel d'augmenter d'autant l'indemnité qui doit être prélevée sur le crédit de l'agriculture ? De cette manière, l'indemnité totale de ces agents serait prise sur un seul et même article ; ce système, je le répète, est conforme aux précédents de la chambre.
Puisque nous ne votons pas de chiffre aujourd'hui je soumets cette observation à M. le ministre de l'intérieur, pour qu'il veuille bien y réfléchir d'ici à lundi.
- La suite de la discussion sur l'article 44 est remise à lundi.
M. le président. - M. le ministre de l'intérieur a adressé à la chambre 110 exemplaires d'une brochure relative à l'inauguration du monument destiné au Congrès national et à la Constitution.
- Distribution aux membres de la chambre et dépôt à la bibliothèque.
La séance est levée à 4 heures.