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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 20 décembre 1849

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1848-149)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 285) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à midi et un quart.

La séance est ouverte.

M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier, dont la rédaction est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. A. Vandenpeereboom fait connaître l'analyse des pièces suivantes.

« La chambre de commerce et des fabriques de Verviers transmet une copie de la lettre qu'elle a adressée à M. le gouverneur de la province de Liège et dans laquelle elle s'est prononcée pour le régime de la libre entrée et de la libre sortie des denrées alimentaires. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les denrées alimentaires.


« Plusieurs cultivateurs de Forchies-la-Marche demandent le rejet du projet de loi sur les denrées alimentaires et l'établissement de droits protecteurs. »

« Même demande de plusieurs habitants de Herck-Ia-Ville. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


« Les membres de l'administration communale de Pousset demandent le rejet du projet de loi sur les denrées alimentaires, et l'établissement de droits protecteurs, la révision de la loi sur l'organisation de l'armée et la réduction du budget de la guerre au chiffre de 18,000,000. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les denrées alimentaires et du budget de la guerre.


« Le sieur Louis Desmont, quincaillier à Gand, prie la chambre de lui accorder de nouveau la naturalisation s'il ne peut être relevé de la déchéance qu'il a encourue en laissant expirer le délai fixé pour accepter la naturalisation qui lui avait été conférée. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.

Projet de loi portant le budget des voies et moyens de l’exercice 1850

Discussion générale

M. Van Grootven. - La discussion du budget des voies et moyens, qui garantit et assure la marche de tous les services publics, est sans contredit la plus importante de toutes celles qui peuvent occuper la législature. Je réclame un instant votre attention, messieurs, pour vous soumettre quelques courtes observations que l'examen de ce budget m'a suggéré.

Je pense que la chambre a agi avec prudence en refusant d'examiner le budget des voies et moyens qui lui avait été soumis à la fin de la session dernière. Cet examen aurait été inutile et illusoire, car, comme l'observe très judicieusement l'honorable M. Veydt dans son rapport si remarquable, la chambre se trouverait aujourd'hui dans l'obligation de s'occuper de la révision du travail qu'elle aurait fait alors. Il lui eût été impossible de fixer avec confiance et quelque certitude les évaluations présumées de 1850, alors qu'elle n'aurait pas connu, comme aujourd'hui, les produits obtenus des neuf premiers mois de l'exercice 1849.

Nous connaissions tous, messieurs, l'ensemble de notre situation financière; mais le rapport si détaillé et si complet de l'honorable ministre des finances nous a convaincus davantage encore que nos finances sont dans un état très peu satisfaisant et qu'elles réclament des améliorations indispensables et urgentes. Le rapport nous a rendu l'examen de notre situation financière très facile; et n'a laissé le moindre doute dans nos convictions que si nous voulons sincèrement et énergiquement travailler à améliorer notre système financier, si nous voulons diminuer enfin le déficit déjà si considérable et qui s'accroît depuis plusieurs années dans une proportion, que l'on peut sans exagération aucune qualifier d'alarmante, il est plus que temps, messieurs, d'adopter une marche tout opposée à celle que l'on a suivie jusqu'à ce jour.

Depuis plusieurs années le budget des voies et moyens, au lieu de présenter à la fin de chaque exercice un excédant de recette sur les dépenses, comme l'exige une bonne et régulière comptabilité, a donné chez nous un résultat tout à fait contraire. En effet, messieurs, l'examen de la situation générale du trésor public a dû vous montrer, comme moi, que depuis 1830 jusqu'en 1845 tous les exercices, à un ou deux près, ont été clos avec un déficit plus ou moins considérable. Les dépenses ont toujours excédé les recettes.

Tous ceux qui ont examiné avec soin la situation du trésor ont pu se convaincre de l'exactitude du fait que je signale. Ce fait est grave et donne lieu à bien des réflexions. Je vous le demande, messieurs : si nous persévérons dans le système suivi jusqu'à ce jour, de couvrir nos insuffisances de recettes sur nos dépenses par des emprunts ou des bons du trésor, où ce système nous conduira-t-il? Au lion d'une comptabilité régulière conforme aux vrais principes financiers, pourrait-on me contester qu'on a tenu constamment notre trésor dans une situation anormale et contraire à toute bonne et prévoyante gestion? Je ne le pense pas.

Vous êtes convaincus comme moi, messieurs, combien il est urgent que le trésor sorte de cette voie déplorable, de cette situation fâcheuse et inquiétante dans laquelle il se trouve depuis trop longtemps. Si nous voulons conserver le crédit public, il importe d'améliorer sans retard notre situation financière. Le premier moyen d'y parvenir, c'est d'équilibrer le budget des voies et moyens avec un excédant assez important pour parer aux insuffisances éventuelles de recettes que quelques articles du budget peuvent présenter à la fin d'un exercice. L'imprévu joue un très grand rôle dans les recettes d'un budget aussi élevé.

Le rapport de la section centrale du budget des voies et moyens présente, il est vrai, pour l'exercice de 1850, un excédant de recette de fr. 731,688-28 sur les dépenses. Si nous n'avions en 1850 qu'à pourvoir aux dépenses ordinaires de cet exercice, il se pourrait que l'équilibre existât à la fin de l'année. Mais, messieurs, indépendamment que la moindre insuffisance de recette sur quelques articles du budget peut faire disparaître cet excédant, et ce résultat est même probable, d'autres dépenses rendront la situation du trésor plus mauvaise encore à la fin de 1850, qu'elle ne l'est aujourd'hui. Je veux parler des crédits extraordinaires et supplémentaires.

Vous n'ignorez pas, messieurs, que les 5 à 6 millions de crédits supplémentaires que nous avons votés, pendant notre dernière session, ont absorbé toutes les sommes disponibles sur les exercices antérieurs. Ce chiffre, si élevé sans doute, de 5 à 6 millions, n'a cependant rien qui doive vous étonner. C'est, depuis 1830, la moyenne des crédits volés tous les ans en dehors des budgets ordinaires. Nous pouvons nous attendre à voter à peu près une somme égale pendant 1850.

M. le ministre des finances, pour satisfaire aux exigences de cette situation, dont il connaît si bien le côté dangereux, a demandé à la chambre d'être autorisé à émettre pour 5 millions de bons du trésor de plus. Ce qui portera l'émission à 15 millions en 1850 au lieu de 10 qu'elle était en 1849. La dette flottante, déjà si élevée, augmentera encore de 5 millions, non compris l'imprévu et les insuffisances de recette.

Je vais plus loin, messieurs, et je vous accorde volontiers qu'à la fin de l'exercice 1850 nous ayons maintenu l'équilibre dans nos recettes et nos dépenses ordinaires, mais n'est-il pas évident que le déficit existant se sera accru de tous les crédits supplémentaires que nous voterons , et élèvera le découvert actuel de 33,200,000 fr. à la fin de 1850 à 41,200,000? Ce résultat ne fait doute pour personne, je pense.

Une pareille situation financière, qui nous expose à tant d'éventualités n'est pas faite pour me rassurer ; loin de moi, messieurs, la pensée de reprocher au ministère actuel d'être la cause du malaise financier que nous éprouvons. Je sais qu'à son arrivée au pouvoir, if a trouvé les finances du pays dans un très mauvais état, et j'aime à croire qu'il serait déjà parvenu à les améliorer, si les événements de 1848 n'étaient venus augmenter encore ces difficultés déjà si grandes.

Si nous voulons améliorer notre situation financière, si nous voulons songer sérieusement à équilibrer nos recettes et nos dépenses, et une impérieuse nécessité nous y contraint, c'est ou à des impôts nouveaux qu'il faut recourir ou à des réductions importantes dans nos dépenses. Il n'y a pas d'alternative, il faut choisir l'une ou l'autre.

Je pense, messieurs, qu'il serait inopportun, peu prudent même de songer à faire peser des charges nouvelles sur le contribuable dont, la situation matérielle, quoi qu'on en dise, n'est pas assez prospère, et loin encore d'être remise des années calamiteuses que nous avons traversées.

Dans l'état actuel des choses, il nous reste, comme seule et unique ressource, des réductions nolables à introduire dans les dépenses publiques. C'est aux économies, c'est aux réductions qu'd faut songer, qu'il faut recourir, si vous voulez que le déficit, déjà si considérable, n'augmente encore, et ne finisse par devenir un grand embarras pour le gouvernement. On n'allonge pas, messieurs, sans danger et indéfiniment, au moyen de bons du trésor, une situation financière gênée comme la nôtre. Il faut abandonner cette voie vicieuse, il en est temps encore.

Je termine, messieurs, en vous déclarant que je suis du nombre de ceux qui ne veulent pas d'impôts nouveaux. C'est vous dire que je soutiendrai, dans la discussion des budgets qui nous seront présentés, toutes les économies, toutes les réductions réclamées, exigées par la situation financière cl compatibles avec la sécurité, la marche régulière et indispensable de tous les services de l'Etat.

M. Lelièvre. - A l'occasion de la discussion du budget des voies et moyens, je crois devoir appeler l'attention du gouvernement et de la chambre sur quelques points importants qui méritent, à mon avis, un examen sérieux, parce qu'il doit en résulter, en faveur du trésor, une augmentation de recettes qui, dans les circonstances actuelles, ne saurait être négligée.

Comme l'on sait, la loi de 1824 ne soumet à la transcription que les actes renfermant une mutation entre-vifs.

Or, les partages étant déclaratifs et non translatifs de propriété, pour me servir des termes du barreau, l'héritier est censé avoir succédé seul et immédiatement aux biens qui font partie de son lot et n'avoir jamais eu droit aux autres biens qui l'ont partie de la succession.

(page 286) Le Code civil attribue formellement les mêmes effets à la licitation parce qu'en réalité elle est un véritable mode de partage et qu'elle peut tout au plus être considérée comme un partage avec soulte.

Or, la soulte ne porte aucune atteinte à la nature du contrat faisant cesser l'indivision, elle n'altère pas le caractère qui lui est imprimé par le législation actuelle.

De ces principes découle la conséquence que, dans l'état actuel des choses, les partages d'immeubles avec retour ou plus-value et même les acquisitions par licitation de parts et portions indivises de biens immeubles faites par l'un des copropriétaires échappent au droit de transcription.

Je pense qu'il est essentiel d'apporter des modifications à cette partie de la législation. En effet, il me semble rationnel qu'au point de vue de la loi fiscale, la licitation soit considérée comme renfermant une mutation pour les parts indivises qui n'appartiennent pas antérieurement à l'adjudicataire. L'acte d'adjudication doit par conséquent être soumis au droit de transcription. Il doit en être de même du partage avec soulte, parce que, dans ce dernier cas non moins que dans le premier, il existe en réalité une cession de droits immobiliers arrêtée à prix d'argent.

La loi du 22 frimaire an VII a déjà considéré les actes dont il s'agit comme contenant mutation au point de vue du droit d'enregistrement; . il est naturel, dès lors, qu'ils conservent le même caractère en ce qui concerne le droit de transcription.

L'objet dont nous nous occupons me paraît d'autant plus important que le principe admis par nos lois actuelles a pour conséquence de soustraire à la transcription les licitations des biens qui sont indivis, même en vertu d'un titre particulier, les partages des biens de cette nature étant régis par les mêmes principes que ceux concernant les immeubles indivis à titre héréditaire; le trésor se trouve ainsi frustré des droits les plus légitimes.

Je fais donc appel à la sollicitude de M. le ministre des finances, et je l'engage à s'occuper d'un projet qui assure, dans les hypothèses que j'ai signalées, la juste perception de l'impôt.

Un autre point a été signalé par la section centrale, il concerne la loi sur les successions proposée l'année dernière par le gouvernement. Je persiste à penser que le droit en ligne directe ne saurait être admis; sauf dans le cas où le défunt a usé du droit de laisser la quotité disponible à l'un des succcssibles dans la ligne dont il s'agit.

Je repousse aussi le rétablissement du serment; mais les autres dispositions du projet ministériel me paraissent renfermer des améliorations notables de la loi du 27 décembre 1817; elles doivent produire une source de revenu pour le trésor; sous ce rapport, il serait convenable de les soumettre à l'examen de la législature, et je crois devoir appuyer à cet égard le vœu émis par la section centrale.

M. Mercier. - Le but que les anciennes administrations, comme la nouvelle, se sont toujours proposé a été d'établir l'équilibre entre les recettes et les dépenses. Les efforts qu'elles ont faits n'ont pas toujours été couronnés de succès, et le ministère actuel a dû s'apercevoir que sa bonne volonté pouvait être entravée par des circonstances analogues à celles qui ont paralysé les intentions de ceux qui l'ont précédé.

Il n'est que trop vrai, messieurs, que l'équilibre n'existe pas entre les recettes et les dépenses de l'Etat.

L'honorable M. Veydt, en terminant son rapport, a évalué à 732 mille francs l'excédant des recettes sur les dépenses pour 1830; mais pour obtenir cet excédant, il a fallu, comme il l'a l'ait observer, comprendre parmi les ressources ordinaires 900 mille francs que l'on attend de la vente de biens domaniaux : il est évident que ce produit ne peut être considéré comme une ressource ordinaire ; il a une destination particulière; il doit, d'après la loi, servir à diminuer la dette flottante. Si nous déduisons cette somme du montant des prévisions, nous trouvons un déficit de 443,000 fr. ; ce résultat n'est même pas normal, le budget des voies et moyens comprend encore 220,000 fr. d'intérêts des billets de banque ayant cours forcé, ce qui ne se reproduira plus en 1851 ; en outre une fraction de la dette flottante sera encore couverte en 1850 par des billets de banque; de telle sorte qu'en supposant les prévisions exactes, abstraction faite de 900 mille fr. provenant de la vente des biens domaniaux, il y aurait un déficit de près d'un million.

J'ai quelques observations à faire sur les évaluations, je vais les soumettre à l'appréciation de M. le ministre lui-même.

Il me semble qu'on ne peut pas évaluer à trois millions le produit du timbre.

Nous n'avons qu'une année d'expérience depuis la suppression du timbre des journaux et les autres modifications apportées à la loi sur le timbre.

Selon les prévisions établies par M. le ministre, pour cette année, dans la situation générale du trésor, le produit du timbre ne sera que de 2,750,000 fr. On n'a pas justifié des motifs pour lesquels on a cru pouvoir porter le produit à 3 millions, quand, la première année de l'application des nouvelles dispositions, on n'a obtenu que 2,750,000 fr.

Mon intention n'est pas de présenter des amendements aux prévisions, mais d'exprimer mes doutes à l'égard de quelques-unes d'entre elles.

Quant au chemin de fer, je vois que le revenu est évalué, pour cette année, à 13,330,000 fr. Je demanderai d'abord si ce produit n'a pas été influencé par le retard apporté aux modifications au tarif du canal de Charleroy. Il est naturel de supposer que ce retard a occasionné quelques transports de plus par le chemin de fer. En tout cas, abstraction faite de cette observation, à l'égard de laquelle il est bon que des explications soient données, je pense qu'il y a quelque exagération dans les prévisions M. le ministre a évalué à 6 p. c. l'augmentation qu'où peut espérer sur le produit de l'année précédente. En suivant ce mode d'évaluation, comme le produit de cette année ne sera que du 13,330,000 fr., les prévisions de 1850 ne devraient être portées qu'à 14,150,000 fr.

Je parlerai aussi des prévisions du produit du canal de Charleroy.

Le produit de ce canal, en 1849, ne sera que de 950,000 fr., selon le rapport sur la situation générale du trésor. C'est M. le ministre des finances qui a fait cette évaluation. En présence de ce chiffre, je me demande comment on peut espérer un produit de 1,200,000 fr. en 1850.

Je n'ai pas d'autres observations à faire sur les autres prévisions du budget, qui me paraissent convenablement établies; c'est sur ces trois points que je désire que des explications soient données.

M. Vermeire. - L'honorable M. Mercier évalue le produit du canal de Charleroy à 950,000 francs.

M. Mercier. - C'est l'évaluation donnée dans h situation générale du trésor.

M. Vermeire. - Toujours est-il que c'est l'évaluation admise. La section centrale évalue ce produit à 1,200,000 fr. Je crois que ces deux évaluations sont l'une et l'autre au-dessous de la vérité. Les évaluations se font sur les produits de 1849. Or, pour évaluer exactement ces produits, il faut d'abord laisser de côté les trois premiers mois de 1849, pendant lesquels on n'a fait que la moitié des recettes qu'on fait dans un temps normal.

Pendant ces trois premiers mois, nous n'avons pas eu des recettes ordinaires sur le canal de Charleroy, à cause de la concurrence écrasante que lui a faite le chemin de fer.

Pour évaluer les produits du canal de Charleroy, on doit additionner les mois d'avril à novembre, eu laissant de côté le mois de juillet, la navigation ayant été interrompue durant quinze jours, pendant ce mois. Voici cette addition :

Le mois d'avril a produit 109,922 fr. 61, mai 104,334 fr. 65, juin 107,807 fr. 61, juillet (pour mémoire), août. 118,921 fr. 35, septembre 121,107 fr. 80, octobre 119,042 fr. 09 et novembre 115,253 fr. 51. Total 796,389 fr. 60 c.

Ainsi, si les sept premiers mois ont produit environ 800,000 francs, l'année entière, avec la navigation telle qu'elle se fait actuellement sur le canal de Charleroy, doit produire, non 950,0000 ou 1,200,000 fr., mais bien 1,400,000 fr.

Je crois que nous arriverons à ce chiffre, en 1850.

J'ai voulu seulement établir que l'évaluation de 950,000 fr. me paraît erronée.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable M. Mercier demande quelques renseignements sur trois points: l'un relatif au chemin de fer; l'autre, relatif au timbre; le dernier relatif au canal de Charleroy.

Quant à ce dernier point, l'honorable M. Vermeire vient de donner une réponse, qui sera, je pense, considérée comme tout à fait satisfaisante. Il nous est très difficile de donner une évaluation exacte du produit probable à percevoir sur le canal après la réduction de 30 p. c. autorisée par la chambre. Nous avons admis une diminution de 265,000 fr., dont nous avons tenu compte dans notre évaluation. Y a-t-il de bonnes raisons pour penser que cette réduction est insuffisante, que le produit ne sera pas aussi élevé? L'honorable M. Mercier ne les donne point. Il manifeste d'une manière vague et générale des craintes à ce sujet.

M. Mercier. - J'ai fait des comparaisons.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Ces comparaisons sont très peu concluantes. De ce qu'on a perçu pendant quelques mois moins que pendant quelques autres mois, il ne s'ensuit pas que, dans l'année qui va suivre, il n'y aura pas un produit plus considérable sur les péages du canal. Veuillez en effet remarquer que, pour quelques mois ,les recettes ont pu être affectées par diverses causes : ainsi l'interruption de navigation, et d'autres causes qui ont été également signalées par l'honorable M. Vermeire.

Je ne trouve donc pas de raison d'estimer à plus de 265,000 fr. les réductions à opérer sur cet article.

Quant à l'article « timbre », c'est l'estimation qui a été fournie sur l'ensemble de cet article par les administrations, à la vue des produits qui ont été obtenus pendant les cinq dernières années.

On a estimé les produits à 3 millions en 1849; on estime également à 3 millions les produits en 1850. Il est vrai que, d'après les sommes qui ont été perçues jusqu'à présent, si les produits ne se relèvent pas, nous aurions une différence pour les produits de l'année 1849; nous ne parviendrons pas à faire la somme de 3 millions de francs. Mais comme l'année 1849 a encore été influencée par les événements, que la différence ne sera d'ailleurs pas très notable, on peut raisonnablement espérer qu'en 1850 le produit s'élèvera, et qu'il atteindra le chiffre de 3,000,000.

Quant au chemin de fer, le gouvernement avait estimé, lorsqu'il a présenté le budget pour 1850, que le produit serait beaucoup plus considérable. Il avait pensé que, les événements cessant d'affecter d'une manière aussi forte les recettes du chemin de fer, nous retrouverions (page 287) après un certain temps la progression qui avait clé remarquée jusqu'aux événements de 1848. L'expérience de 1849 a démontré qu'il n'en était pas ainsi. Les recettes effectives seront d'une manière assez notable en dessous des prévisions. Il importait donc, pour 1850, de ne pas se leurrer à cet égard, et nous avons cru devoir opérer une réduction de 2 millions.

En estimant à 14,500,000 francs les produits du chemin de fer, nous nous trouvons dans des conditions telles qu'il semblerait tout à fait déraisonnable de ne pas admettre que ce produit pourra être réalisé. On a obtenu, en effet, en 1847, une recette de 14,587,000 fr. En 1850, on espère une recette de 14,500,000 fr. C'est un peu moins que la recette de 1847. Il me semble que nos évaluations, sous ce rapport, sont fort admissibles.

J'ai, à l'égard des probabilités du budget des voies et moyens, à faire une observation importante à la chambre. Je la prie de bien vouloir remarquer qu'à l'exception du chemin de fer, l'ensemble de toutes les évaluations pour l'exerce 1849 se trouvera réalisé. On avait, lors de la discussion du budget de 1849, et j'en atteste le rapport même de la section centrale, élevé des doutes sur plusieurs des prévisions du projet de budget.

Or les faits sont venus confirmer toutes les prévisions. L'ensemble des recettes laissera, d'après les faits connus, un déficit de 2,274,000 fr. ; le chemin de fer seul entre dans ce déficit pour 2,200,000 fr. ; toutes les autres prévisions, dans leur ensemble, se trouvent réalisées.

Je pense donc, messieurs, que l'on peut sans inconvénient maintenir les prévisions, telles qu'elles se trouvent dans le budget soumis à la Chambre.

L'honorable M. Mercier vous a dit, messieurs, en commençant, que tous les ministères qui se sont succédé ont toujours cherché à établir l'équilibre entre les recettes et les dépenses. Je suis, en effet, parfaitement convaincu qu'aucun ministère n'a eu l'intention d'établir des déficits ; mais on a soutenu fort longtemps, dans cette chambre, que, par cela seul que l'on présentait un budget, en apparence équilibré, on se trouvait dans des conditions normales et que l'on avait complètement satisfait aux obligations imposées à tout gouvernement sous ce rapport.

On vous a dit, à cette occasion, que les déficits que l'on constatait, que le découvert qui existe encore aujourd'hui, était le résultat non pas de ce que nos dépenses ordinaires eussent été supérieures à nos recettes ordinaires, mais de travaux qui ont été entrepris, de dépenses extraordinaires qu'il a fallu faire.

J'ai fait faire à cet égard un travail qui doit donner toute espèce de satisfaction aux honorables membres de la chambre qui ont cru à l'affirmation contraire, que j'ai souvent émise. J'ai fait opérer le dépouillement de tous les budgets depuis 1850; j'ai fait séparer complètement les dépenses ordinaires et les recettes ordinaires, et ce travail a donné pour résultat que les recettes extraordinaires ont laissé sur les dépenses de même nature un excédant de plus de 9 millions, tandis que nos dépenses ordinaires ont été plus élevées que nos recettes ordinaires de 44 millions.

Il résulte de là que le déficit que nous avons aujourd'hui et qui s'élève à 35 millions de francs, comme la chambre peut le voir dans la situation du trésor, que ce déficit de 35 millions est uniquement composé d'insuffisances de recettes ordinaires sur les dépenses ordinaires.

Ainsi, messieurs, je suis autorisé à dire que, dans leur ensemble, depuis 1830, jamais les budgets n'ont été équilibrés. Il y a eu des années où les recettes ordinaires ont donné un excédant sur les dépenses ordinaires, mais il y a eu aussi un grand nombre d'années où des déficits notables ont existé. Ce sont ces déficits qui s'élèvent ensemble à 44 millions de francs. Un tableau, qui se trouve joint à l'exposé de la situation financière, renferme tous les éléments propres à éclairer la chambre sous ce rapport.

M. Mercier. - Je demanderai à M. le ministre si c'est le tableau dont il a parlé tout à l'heure qui se trouve joint à l'exposé de la situation du trésor.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Oui.

M. Mercier. - Ce tableau sera examiné avec soin et on trouvera, j'en suis convaincu, l'explication très simple, la justification plausible de l'excédant de dépenses que l'on signale. Je fais seulement remarquer dès à présent qu'on ne s'est pas toujours trouvé dans des circonstances ordinaires, de 1830 à 1847; dans cet intervalle, comme depuis 1847, on a subi l'influence d'événements ou de circonstances extraordinaires. Nous avons tous intérêt à ce qu'une juste appréciation soit faite de toute la gestion financière depuis 1830.

C'est la première fois que j'entre, pour ce qui me concerne, dans une discussion de récriminations; depuis 1847, je n'ai pas pris la moindre part à ces discussions. Le tableau qu'on vient de citer nous facilitera les moyens d'une saine appréciation, que j'appelle de mes vœux. En ce qui me regarde, les deux budgets que j'ai présentés ont été soldés par un excédant de ressources ordinaires sur les dépenses ordinaires.

J'ai déclaré moi-même, tout à l'heure, que les prévisions me paraissent généralement bien établies; quant à celles des prévisions à l'égard desquelles j'ai présenté des observations, je ne m'étais pas borné à une allégation vague, comme le suppose M. le ministre des finances; relativement au canal de Charleroy, j'avais fait une comparaison entre le produit de l'année 1849 et les prévisions de 1850. Si je prends un autre terme de comparaison, c'est-à-dire si j'applique les 35 p. c. de réduction à l’année où le produit du canal a été le plus élevé, je trouve un produit seulement d'un million 700 mille francs; il y aurait donc encore un excédant dans les prévisions.

Et remarquez bien que ma comparaison porte sur l'année pendant laquelle la navigation a été la plus active.

En ce qui concerne le chemin de fer, si l'on adoptait le raisonnement de l'honorable M. Vermeire, il faudrait réduire les prévisions du chemin de fer, car le chemin de fer aurait gagné ce que le canal de Charleroy aurait perdu en 1849.

Sans avoir égard même à cette circonstance, la base indiquée par M. le ministre des finances lui-même lorsqu'il a établi ses premières prévisions, c'est-à-dire une augmentation de 6 p. c. sur le produit probable de 1849, ne permettrait pas d'évaluer les prévisons à plus de 14,100,000 fr.

M. Veydt, rapporteur. - Messieurs, l'argument que l'honorable M. Mercier a fait valoir, en dernier lieu, pour établir que la prévision de 1,200,000 fr. est exagérée, me paraît, au contraire, venir efficacement à l'appui de cette évaluation.

En effet l'année 1847, qui est l'année la plus favorable dont il s'agit dans ce calcul, a produit 1,655,000 fr. Si nous en défalquons une somme équivalente au dégrèvement de 35 p. c. opéré sur le tarif, il nous reste encore un chiffre de 1,076,000 fr. Ne peut-on pas admettre avec confiance que cette différence de 124,000 fr., pour atteindre les prévisions de 1,200,000, que la section centrale a admises pour le budget de 1850, sera comblée?

Je le crois. Les réductions de tarif ont, quand elles ne sont pas exagérées, une influence heureuse sur les produits.

Je voudrais que toutes les prévisions eussent d'aussi bonnes bases que les recettes du canal de Charleroy pour 1850, après la diminution qu'on leur a fait subir. La section centrale n'a pas admis avec la même certitude les calculs relatifs au chemin de fer, dont les 500 mille francs au-delà de 14 millions sont plus ou moins éventuels, de même que le chiffre de 10,250,000 francs pour l'enregistrement.

En les admettant, nous ne nous sommes pas guidés exclusivement par les résultats connus de l'exercice courant ; nous avons compté sur de meilleures circonstances. Il faut non seulement qu'il y ait maintien de la légère amélioration qui s'est manifestée dans les recettes, durant ces derniers mois, mais de plus qu'il y ait progrès et que les affaires reprennent l'activité qu'elles ont eue dans des années normales. S'il n'en était pas ainsi, l'ensemble des prévisions ne se réaliserait pas.

L'honorable membre auquel je réponds a, en prenant la première fois la parole, fait ressortir que le produit de 900 mille francs, qui forme le dernier article du budget, est compris dans le chiffre total du budget. Le rapport le dit clairement, et j'y ai même rappelé le texte de l'article 2 de la loi de 1843, qui affecte à une destination spéciale les sommes réalisées par les ventes de biens des domaines. Nonobstant ce texte, la section centrale a admis la proposition du gouvernement, de faire une seule recette du tout.

Je n'ai pas recherché si c'est la première fois qu'on en agit ainsi; car, en présence de la situation que nous devons accepter, cette question n'a pas d'importance. A quoi bon, en effet, s'en tenir au texte, quand il est évident que si la dette flottante est diminuée par une recette spéciale, elle sera augmentée, d'un autre côté, par le découvert que laisserait une insuffisance de ressources pour couvrir les dépenses ordinaires? Ce n'est que dans des situations normales qu'un amortissement sur la dette flottante peut avoir lieu, au moyen des produits des biens vendus par l'Etat.

Ces 900,000 fr., s'ils peuvent être réalisés en 1850, viendront accroître la somme de 1,600,000, dont il est fait mention dans la situation du trésor, comme restant à recouvrer sur des autorisations antérieures de vendre, auxquelles il n'a pu être donné suite, précisément à cause des mêmes circonstances, qui, en paralysant une partie de nos revenus, ont aussi empêché de trouver des acquéreurs à des conditions convenables. Quand on réalisera le tout, la dette flottante pourra recevoir une diminution égale au produit de ces ventes, et la destination spéciale que la loi de 1845 a eu en vue, sera accomplie.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai une observation à faire quant à ces 900 mille francs. Ce n'est pas la première fois qu'on porte en recette ces 900 mille francs destinés à couvrir les dépenses ordinaires, malgré la loi qui avait affecté la vente des domaines à l'amortissement de la dette flottante. Depuis le vote de cette loi on a presque constamment opéré de la même manière. Ce n'est pas une innovation. On a eu tort d'opérer ainsi, mais il y avait nécessité; presque toujours on a compris le produit des biens domaniaux comme devant suppléer aux recettes ordinaires, quand on aurait dû l'appliquer à l'extinction de la dette flottante. Je fais cette observation pour constater que nous n'innovons pas sous ce rapport.

M. Mercier. - M. le ministre des finances n'a pas porté le produit de la vente des biens domaniaux parmi les ressources ordinaires, et en cela il a suivi les précédents; il est évident que ce produit, quand les exercices se soldaient en excédant de dépenses sur les recettes, n'a servi qu'indirectement à réduire la dette flottante, en comblant ou en réduisant le déficit. Jamais en produisant la balance des budgets présentés on n'a pu dire : Il y avait équilibre. Si ce million devait concourir à l'établir, c'était un million qu'on portait chaque année comme fonds extraordinaires en dehors des ressources ordinaires.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Cela revient au même.

M. Mercier. - Oui, quand il y a déficit; mais si dans la balance des budgets, ou dans la situation présentée à cette occasion, on faisait (page 288) figurer ce produit comme ressource ordinaire, on entrerait dans une fausse voie. On a toujours cherché d'abord à équilibrer les recettes et les dépenses sans les 900 mille francs provenant de la vente des domaines ; toute autre marche eût été irrégulière. Lorsqu'il y a déficit, il faut bien en subir les conséquences et y faire face par des moyens extraordinaires; mais on ne peut escompter d'avance le produit de la vente des domaines, sans faire perdre à cette ressource son véritable caractère.

M. Cools. - Il est très vrai que M. le ministre des finances n'a fait que suivre un usage auquel on s'est conformé souvent avant lui, quand il fait entrer en quelque sorte dans les prévisions ordinaires le produit de la vente des biens domaniaux.

J'ai été frappé souvent de l'inefficacité de la prescription insérée dans la loi en ce qui concerne la vente des domaines, que le produit devait servir à la réduction de la dette flottante. Par la manière dont les budgets sont formés, cette prescription est de nulle valeur.

En réalité, ce produit sert à couvrir les recettes ordinaires, et c'est là un mal. J'appelle sur cette circonstance l'attention spéciale de M. le ministre des finances. Je ne veux pas lui adresser un reproche, car, comme je le disais en commençant, il n'a fait que suivre les usages. Mais je crois qu'il y a moyen d'établir les budgets de manière que le produit de la vente des biens serve à réduire la dette flottante ; il faudrait, il est vrai, apporter quelques modifications à notre système général d'amortissement de la dette, mais je crois que, par ce moyen, on pourrait atteindre le but que je viens d'indiquer. Je recommande cet objet à l'attention du gouvernement.

M. de Theux. - En entendant les observations de M. le ministre des finances concernant les déficits des précédents budgets, j'ai été amené à jeter les yeux sur le tableau de ces déficits, et je crois au premier aperçu pouvoir me rendre compte des causes des différences qu'il a signalées.

Je remarque, en effet, que le budget de 1831 présentait un déficit de 1,478,947 fr. dans les recettes. Personne n'en sera étonné à cause de la situation dans laquelle se trouvait le pays en 1831. Le budget de 1832 présente entre les recettes et les dépenses une différence de 6,036.422 fr.; on n'en sera pas encore étonné si l'on se rappelle quelle était la situation du pays en 1832.

Le traité du 15 novembre 1831 n'a pas été ratifié par la Hollande, non plus que par la Russie. Qu'en est-il résulté ? Que pendant 1832 les armées se sont trouvées en présence de part et d'autre, et la Belgique a été entraînée à des dépenses extraordinaires. La même chose s'est représentée en 1833 jusqu'à l'époque de la convention du 31 mai, où il a été possible de réduire les dépenses de l'armée. Aussi les dépenses ont-elles excédé les recettes de 3,846,661 fr. La même chose s'est reproduite en 1839, où je vois un déficit de 8,300,000 fr.; mais on a obtenu, d'un autre côté, la remise de tous les arrérages de la dette à la Hollande, qu'on aurait dû payer de 1830 à 1839, et qui constituaient une somme bien supérieure aux excédants des dépenses sur les recettes ordinaires.

J'arrive à l'année 1841, où je trouve une différence de 13 millions 633,759 fr. entre les recettes et les dépenses. Il m'est difficile de m'expliquer cette énorme différence; je ne faisais pas partie de l'administration mais comme membre de la chambre, je pourrais me rappeler la cause de ce déficit, les documents me manquent en ce moment; cela doit tenir à quelques grands travaux extraordinaires imputés sur cet exercice ou à quelque autre grande dépense.

Il faudrait, pour s'en rendre compte, remonter aux détails des dépenses faites pendant cet exercice; comme ces détails ne se trouvent pas compris au tableau qui nous a été remis, il me serait impossible d'expliquer immédiatement ce déficit auquel, du reste, je n'ai participé en rien.

Le budget de 1842 se présente avec un déficit de 2,606,913 francs. Je fais, à l'égard de cet exercice, la même observation qu'à l'égard de celui de 1841. Je ferai des recherches et, dans une autre occasion, je serai à même d'expliquer la cause de cette différence.

Quant aux exercices 1845, 1846 et 1847, présentant également un déficit considérable, vous n'en serez pas étonné quand vous vous rappellerez l'intensité de la crise alimentaire. Le gouvernement a été obligé de faire des dépenses extraordinaires, alors que cependant il ne pouvait, vu la rigueur des circonstances, proposer de nouveaux impôts. C'est une chose qui saute aux yeux.

Je crois donc qu'il ne faut pas s'arrêter à un chiffre pris isolément, sans autre explication. Pour tirer quelques conclusions de ce chiffre, il faut se donner la peine de mettre en regard toutes les recettes et les dépenses ordinaires et extraordinaires.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je ne comprends pas bien la portée des observations qui viennent d'être faites par l'honorable comte de Theux. Elles sont adressées au ministre des finances, pour avoir exposé les faits que je viens de rappeler. Mais en réalité, elles sont tout à fait sans objet. Est-ce que j'ai prétendu qu'on avait sans raison créé des déficits s'élevant à 44 millions et qui, déduction faite de la recette extraordinaire, nous laissent avec un déficit de 35,195,000 fr., qui est le déficit actuel ? Je n'ai rien prétendu semblable. J'ai constaté des faits purement et simplement; j'ai constaté que nous trouvons cette situation après 19 ans.

Maintenant vous expliquez d'où provient cette situation ; vous expliquez qu'il y a eu des causes réelles et sérieuses pour arriver à cette situation. J'en fais bien volontiers la concession. Tout ce que j'ai désiré établir, quant à moi, c'est que, pendant un long espace de temps l'expérience démontrait que très souvent, presque toujours, on s'était fait illusion sur le montant des ressources; qu'il fallait être un peu plus prévoyant pour l'avenir, et tâcher d'assurer nos recettes de telle sorte que nous puissions compter réellement sur les prévisions que nous établissons.

Je n'insiste pas davantage : je me réfère à ce que j'ai eu l'honneur de dire dans la session précédente.

A ceux qui me disaient : « La situation résulte uniquement des dépenses extraordinaires ; C'est ainsi que vous avez une dette flottante considérable ! » je répondais: Non. On a pourvu aux dépenses extraordinaires par des recettes extraordinaires; et ces recettes extraordinaires ont laissé un excédant. C'est sur le budget ordinaire que vous avez réellement un déficit. Le déficit de 35 millions est exactement celui que nous trouvons en comparant les recettes ordinaires avec les dépenses ordinaires, pour les exercices précédents.

Je n'ai pas eu d'autre pensée en m'exprimant comme je l'ai fait. Je ne veux pas récriminer ; je ne l'ai fait à aucune époque ; je constate des faits, rien de plus; je les livre à l'appréciation de la chambre.

M. Mercier. - Bien loin de faire un reproche à M. le ministre des finances d'avoir produit ce tableau, je l'en remercie. Ce travail a même été réclamé par la chambre. Il y a deux ans, la chambre a voté un crédit pour l'exécution d'un travail de ce genre; je le vois paraître avec plaisir. L'honorable M. de Theux ne s'en est pas plaint non plus : il a expliqué quelques-unes des différences que présente le tableau.

Pour moi, je donnerai quelques renseignements sur le déficit apparent du budget de 1841. Il y a eu, cette année, plusieurs régularisations qui ont fait imputer sur cet exercice des dépenses qui ne lui appartenaient pas. Je me rappelle qu'une de ces imputations s'élevait à 7 ou 8 millions, c'est cette année que s'est opérée une modification dans l'imputation de la dette publique.

On a considéré, depuis 1841, que les intérêts étaient dus jour par jour; ce qui a fait reporter sur cet exercice plusieurs millions qui lui sont étrangers.

N'ayant pas prévu cette discussion, je ne puis entrer dans d'autres explications en ce moment.

J'ajouterai seulement qu'une partie des ressources que nous avons cherché à créer à cette époque n'ont été votées que dans le cours de l'année; de sorte qu'elles n'ont pu faire cesser entièrement l’insuffisance des ressources.

M. de Theux. - Pas plus que l'honorable M. Mercier, je n'ai regretté que M. le ministre des finances ait produit ce tableau ; au contraire; puisqu'il nous permet à chacun de remonter aux faits et de les expliquer sous leur véritable jour. J'ai déjà donné quelques explications. Après avoir examiné le tableau en détail, je donnerai des explications d'une manière complète à la première occasion favorable.

La chambre et le pays doivent désirer que les faits relatifs à l'administration financière soient appréciés sainement et sous leur véritable point de vue. Voilà ce que nous devons désirer.

M. Dumortier. - En parlant tout à l'heure, M. le ministre des finances a cru justifier les chiffres dans le budget que nous sommes appelés à voter relativement au chemin de fer.

Si le produit de cette entreprise répondait aux prévisions portées au budget de 1847, il s'élèverait à une somme de 14 millions et demi. Je vous avoue que ce qui s'est passé jusqu'à ce jour pour le chemin de fer et les déconvenues successives que nous éprouvons, n'est pas de nature à faire croire à la valeur des prévisions ministérielles pour 1850; car, vous le savez, le chemin de fer devait rapporter 15 millions et demi pour 1849, et c'est à ce chiffre qu'il figure au budget.

Le ministère était tellement sûr de ce produit qu'il évaluait leproduit à 16 millions et demi, en 1850; les calculs étaient positifs, le résultat était certain.

Le tarif qu'on avait fait était tellement infaillible que nous, ses adversaires, nous n'avions qu'une chose à faire, c'était de nous taire. Aussi, toutes les fois que nous avons cru devoir engager cette discussion, la chambre, pleine de confiance dans la haute sagesse de M. le ministre (sagesse que je ne prétends certes pas contester), mais pleine de confiance aussi dans l'infaillibilité de ses prévisions, qui me paraît plus contestable, a accordé peu de foi à nos prévisions. MM. les ministres, même, nous ont fait la grâce de taxer nos calculs d'exagération, de déverser le ridicule sur nos prévisions. Toul ce que nous avons pu faire, c'a été de nous taire devant le ridicule dont on nous menaçait. Qu'est-il arrivé? Il est arrivé que nos prévisions ont été dépassées; tout ce que nous avions dit s'est justifié de point en point.

Quoique nous ne soyons pas doués du don de prophétie, il est bien positif que nos prévisions ont été réalisées. En effet, que voyons-nous dans les résultats constatés par le gouvernement lui-même, dans la situation du trésor? Vous y voyez que le revenu brut du chemin de fer qui, d'après les prévisions infaillibles du gouvernement, devait être de 15 millions et demi, a à peine dépassé le chiffre de 13 millions.

Voilà où je veux vous conduire. Après avoir été taxé d'exagération par le ministère, je veux avoir le jour de ma revanche, et faire remarquer de quel côté se trouve l'exagération.

Oui, il est évident que le calcul du gouvernement est exagéré, et lorsqu'on est arrivé à compter les écus qui sont dans la caisse, on peut voir de quel côté se trouve l'exagération.

Maintenant comment marchons-nous? Déjà le gouvernement le reconnaît, il doit en revenir de ses prévisions du mois de mars dernier. Le (page 289) chemin de fer qui devait d'après son budget rapporter en 1850, 16 millions et demi (car c'était le chiffre qu'on nous assurait devoir être atteint en 1850) ne rapportera plus que 14 millions et demi. Voilà déjà, messieurs une retraite de 2 millions de francs, une reconnaissance implicite de l'impuissance des tarifs que l'on a faits.

Messieurs, depuis un an, depuis la dissolution de la chambre, nous sommes occupés et fortement occupés de la question de savoir comment nous parviendrons à équilibrer les recettes avec les dépenses. Eh bien! veuillez enfin ouvrir les yeux. Oui le chancre de nos finances, c'est le chemin de fer, c'est la tarification du chemin de fer. Oui, le chancre de nos finances, c’est cette malheureuse tarification.

En effet, messieurs, le chemin de fer, d'après les documents officiels fournis par les ministres à cette chambre, vous coûtait, au 31 décembre 1847, la somme de 202 millions de francs. En présence de ce chiffre, vous pouvez, au premier coup d'œil, reconnaître à quel déficit vous arrivez par la tarification actuelle.

Cependant on a prétendu et on a soutenu que le meilleur moyen de faire rapporter le chemin de fer, c'est d'abaisser les tarifs. Plus vous abaisserez les tarifs, plus vous aurez de revenus. Abaissez, abaissez toujours, et vos revenus augmenteront. Voilà le système qu'on défendait dans cette enceinte.

Messieurs, que vous disais-je en réponse à ce système? J'avais l'honneur de dire alors à la chambre : Je sais bien qu'en matière de finances 2 et 2 ne font pas toujours 4; mais je sais aussi parfaitement bien qu'en matière de finances la moitié de 4 ne fait jamais 10.

Vous voulez toujours abaisser les tarifs, messieurs. C'est une manière de popularité très commode et qui trouve des approbateurs ; mais la circulation, la consommation ont aussi leurs limites. Je sais bien que certains économistes prétendent le contraire. Mais évidemment, en supposant que leur opinion fût fondée, en supposant que la circulation et la consommation n'eussent pas de limites, je dirais que cette absence de limite doit s'entendre d'une longue série d'années mais non par un saut d'un chiffre à un autre.

La vérité est que la circulation sur le chemin de fer en Belgique a atteint à peu près son chiffre normal. Elle est un peu plus forte, un peu moins forte suivant les années; mais on peut admettre qu'elle atteint son chiffre normal.

Quant à la circulation des marchandises, c'est différent. Il est certain que plus vous abaisserez le prix des transports sur le chemin de fer, plus vous y amènerez de marchandises. Car si vous pouvez faire transporter par le chemin de fer toutes les marchandises qui étaient transportées par le roulage et par les voies d'eau, évidemment vous augmenterez la circulation; mais à quel prix? Si malgré cette augmentation de circulation, vos recettes sont restées les mêmes (et c'est à ce résultat que nous sommes arrivés), vous avez augmenté les dépenses d'entretien, et les dépenses d'user du matériel, par conséquent vous avez augmenté la ruine du trésor public.

Une autre chose, messieurs, et qui est excessivement déplorable, ce sont les préjudices que ces expériences ont occasionnés au trésor public sur d'autres articles du budget. Ainsi l'abaissement des tarifs sur les routes en fer a amené ce résultat qu'il a fallu abaisser les tarifs sur les canaux, et que, de ce chef, le trésor a subi une perte considérable.

Ouvrez l'état de situation du trésor public à la page 127, vous verrez que le déficit sur le canal de Charleroy, pour l'année 1849, sera de 515,000 fr., que le déficit sur la Sambre canalisée sera de 102,000 fr. Voilà déjà plus de 600,000 fr. de déficit. En outre le produit des barrières de première et de seconde classe présentera un déficit de 310,000 fr. Voilà 950,000 fr. de déficit.

Et pourquoi? Parce qu'on a voulu persister dans la voie de réduire les péages sur les marchandises transportées par le chemin de fer. De manière qu'il faut ajouter déficit à déficit. Vous avez déficit par suite de l'abaissement des tarifs du chemin de fer et ensuite, pour être conséquents avec vous-mêmes, et faire face aux réclamations, vous êtes amenés à des réductions sur d'autres moyens de recettes. Vous arrivez donc ainsi à un double déficit : déficit d'une part par suite de l'abaissement des péages sur le chemin de fer, déficit d'autre part par suite de l'abaissement des péages sur les routes et les canaux.

Je parle du déficit par suite de l'abaissement des péages sur le chemin de fer. J'ai examiné avec soin les comptes rendus du chemin de fer qui paraissent mensuellement dans le Moniteur. Je trouve que, par exemple, pour le mois de septembre, pour le mois d'août, la recette sur le transport des marchandises pondéreuses est, à peu de chose près, la même que celle des mois correspondantes de l'année précédente; et pourtant, messieurs, la quantité des marchandises transportées a énormément augmenté. D'où je conclus que vous avez usé davantage le matériel, que vous avez consommé plus de coke, que vous avez fait à cet égard des dépenses que vous ne couvrez qu'à peine ou que vous ne couvrez pas du tout avec le faible excédant de recettes que vous obtenez; et quand on se trouve dans une pareille situation, je dis qu'il y a déficit. Car plus vite votre matériel sera usé, plus vite vous devrez en faire de nouveau.

Il faudra donc encore demander à la chambre des emprunts pour faire du matériel au lieu de celui que vous aurez usé, et que vous aurez usé sans profit pour le trésor public.

M. le ministre des finances voudrait attribuer le déficit du chemin de fer, en 1849, à la continuation de la situation politique, aux événements. C'est, dit M. le ministre des finances, aux événements qu'il faut s'en prendre, si le chemin de fer, qui devait rapporter 15 millions et demi en 1849, ne rapportera que 15 millions.

Messieurs, je ne puis partager cotte opinion, et je vous démontrerai tout a l'heure qu’elle n'est pas exacte, que c'est à la tarification seule qu'il faut s'en prendre.

D'abord, messieurs, il est incontestable que la situation politique de 1849 est tout autre que celle de 1848.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La recette est tout autre.

M. Dumortier. - Elle est supérieure d'un million à celle de 1848.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est un million de plus.

M. Dumortier. - Oui; mais savez-vous quelle est la différence qui en résulte? C'est qu'au lieu d'avoir 8 millions de déficit, vous n'avez plus que 7 millions.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est une erreur.

M. Dumortier. - Je prie l'honorable M. Frère de vouloir lire son propre rapport et de voir ce qu'il y dit sur le chemin de fer.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Si j'ai dit qu'il y avait déficit de 8 millions, je passe condamnation.

M. Dumortier. - Vous ne le dites pas, je le sais; mais vous faites des calculs qui le prouvent. Que disait M. le ministre des finances, alors ministre des travaux publics, dans l'exposé de la situation du chemin de fer qu'il vous a présenté l'an dernier? Il y est dit, en toutes lettres, que le chemin de fer a coûté 237,774,107 fr. 90 centimes. Voilà ce que disait l'honorable ministre des travaux publics, aujourd'hui ministre des finances.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est votre arithmétique.

M. Dumortier. - C'est la vôtre. Vos calculs sont assez concluants, pour qu'on n'ait pas besoin de les refaire. S'il y avait la moindre contestation, je demanderais à M. le greffier de me faire chercher le rapport de l'honorable M. Frère, et je le mettrais sous les yeux de la chambre.

Maintenant, messieurs, il faut défalquer du chiffre que je viens de citer les excédants de recettes sur les dépenses, depuis 1834, époque où le chemin de fer a été ouvert, jusqu'au 31 décembre 1847, où s'arrête le rapport de M. le ministre des travaux publics.

Eh bien, messieurs, si vous avez la patience de feuilleter les documents officiels présentés à la chambre par le gouvernement, aux termes de la loi, si vous avez cette patience et il n'en faut pas une très grande, vous verrez que tous ces excédants de recettes sur les dépenses s'élèvent à 35,669,067 23 Déduisez cette somme du coût bruit du chemin de fer indiqué par l'honorable M. Frère, et vous verrez que le coût net est de 202,105,040 fr. 67 c. Voilà le coût réel du chemin de fer au 31 décembre 1847.

Mais, messieurs, depuis lors nous avons encore voté des sommes considérables pour le chemin de fer. Ainsi on a employé sur l'emprunt forcé du 21 avril 1848, 5 millions pour le chemin de fer !

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Erreur.

M. Dumortier. - C'est fort commode à dire; mais je parle, moi, documents sur table et documents fournis par le cour des comptes.

Sur l'emprunt forcé du 24 mai 1848, nous avons encore employé pour le chemin de fer une somme de 2,005,611 fr. 38 c.

Voilà, messieurs, les sommes qui ont encore été employées et qu'il faut ajouter aux 202,000,000 que je citais tout à l'heure. Joignez-y les déficits de 1848 et 1849, vous arrivez ainsi à un chiffre total de 220 millions que nous coûte le chemin de fer. Mais enfin, je m'arrête au chiffre qui résulte du rapport officiel, soit 200,000,000.

Maintenant, messieurs, bien que la loi de 1834 exige que le chemin de fer couvre, non seulement l'intérêt, mais encore l'amortissement du capital qu'il a coûté, je veux bien faire, un moment, abstraction de l'amortissement et ne tenir compte que de l'intérêt. Eh bien, l'intérêt de 200,000,000 fait 10,000,000, à 5 p. c. Ajoutez à cela 9,000,000 votés au budget des travaux publics pour les frais d'exploitation; voilà 19 millions à couvrir, et si vous ne recevez que 12.000,000, vous avez un déficit de 7,000,000. Si 1849 rapporte 13,000.000, le déficit sera de 6 millions.

Comment couvrez-vous , messieurs, ce déficit de 6 ou 7 millions par an? Vous le couvrez par l'impôt. C'est-à-dire que vous faites payer ceux qui ne se servent pas du chemin de fer pour ceux qui s'en servent.

Voilà, messieurs, comment vous arrivez à des déficits dans la balance du budget de l'Etat, déficits que vous ne savez comment combler. Voilà comment vous arrivez à une situation qui fait demander la réduction de l'armée.

Oui, messieurs, la tarification du chemin de fer est le plus grand ennemi de l'armée; c'est elle qui est le chancre de nos finances, et c'est la situation déplorable de nos finances qui fait réclamer des économies sur le budget de la guerre.

Ainsi, messieurs, à quelque point de vue qu'on se place, on voit qu'il est indispensable d'augmenter les produits du chemin de fer. C'est ce que j'ai toujours réclamé, et je suis heureux de voir que, par suite de l'expérience du passé, mes paroles ont, cette année, plus d'écho qu'elles n'en ont eu précédemment.

M. le ministre des finances vient de nous dire que les revenus du chemin de fer ont augmenté d'un million, et il considère ce résultat comme immense. Mais je lui répondrai que c'est bien peu de chose comparativement (page 290) à ce qu'il avait annoncé, car, d'après ses prévisions, l'augmentation devait être de 3 millions et demi

Au surplus, voyous, messieurs, ce qu'a rapporté cette année le chemin de fer du Nord.

Au 2 décembre courant, le chemin de fer du Nord avait déjà rapporté 17,750,000 fr., et le produit total de l'année dépassera 19 millions. Voilà ce que produit le chemin de fer du Nord, et on vient de vous dire que le nôtre ne rapportera que 13 millions. Ainsi, lorsque les produits du chemin de fer du Nord se sont accrus de 5 millions de francs, les produits du chemin de fer belge ne se sont accrus que d'un million.

Cependant, messieurs, on n'a pas négligé de donner des fêles pour augmenter la circulation. Il y a eu des fêtes de tous côtés; fêtes à Liège, fêtes à Anvers, fêtes à Gand, fêtes à Namur, fêtes partout. Malgré tout cela, le chemin de fer n'a produit que 13 millions.

Voulez-vous voir, messieurs, comment la tarification belge est jugée par M. Rothschild lui-même? Permettez-moi de vous lire un court passage du compte rendu de ce grand banquier.

Je crois que l'on ne contestera pas à M. Rothschild le talent de faire des comptes.

Eh bien ! messieurs, voici ce que je lis à la page 28 du rapport, présenté par M. James Rothschild, dans la séance du 28 avril dernier, des actionnaires du chemin de fer du Nord :

« Si l'on compare notre recette à celle des chemins de fer belges, on trouve pour le premier trimestre de 1849 :

« Sur le chemin de fer du Nord une recette de 4,067,674 fr. 91.

« Sur le chemin de fer belge, une recette de 2,699,252 fr. 59.

« Différence en faveur du chemin de fer du Nord. 1,368,422 fr. 52 « Notre recette a conséquemment dépassé de 50 p. c. celle des chemins de fer belges, et cependant ces chemins ont plus d'étendue que les nôtres. »

Voilà, messieurs, un calcul qui est bien clair. Le chemin de fer français rapporte 50 p. c. de plus que le nôtre. Cette année le chemin de fer français présentera une augmentation de 5 millions sur l'an dernier, tandis que le nôtre n'a présenté qu'une augmentation d'un million. Ainsi l'augmentation n'est, en Belgique, que du cinquième de ce qu'elle est en France, et cela malgré l'augmentation considérable de notre circulation et de nos transports.

Que faut-il conclure de là? Que nous sommes entrés dans un système éminemment vicieux, système dont il faut se hâter de sortir au point de vue du trésor public. Il ne faut pas que ceux qui ne vont pas sur le chemin de fer sacrifient des sommes aussi énormes pour la commodité de ceux qui y vont ; il ne faut pas que nous réduisions les revenus de nos canaux et de nos routes de première et de seconde classe, pour nous donner le bénin plaisir de transporter toutes les marchandises en chemin , de fer et à la vapeur.

Voulez-vous augmenter vos recettes d'un million immédiatement? C'est bien facile : ajoutez au budget ces deux lignes : « Les arrêtés qui ont modifié le tarif du chemin de fer et des canaux sont rapportés. » En agissant de la sorte, vous augmenteriez de deux millions vos voies et moyens.

Messieurs, il est temps que ce système d'expériences vienne à cesser. Si l'on va me répondre, je sais bien ce qu'on me dira ; on viendra me représenter comme voulant exagérer les tarifs, car c'est toujours ainsi qu'on agit à notre égard: il faut présenter son adversaire d'une manière exagérée, pour le combattre plus facilement. Je proteste d'avance contre ce système, si l'on y a recours. Non, je ne veux pas une élévation exagérée des tarifs, je veux une augmentation modérée.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Combien?

M. Dumortier. - Vous êtes ministre, c'est votre devoir de le dire...

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Vous avez une opinion.

M. Dumortier. - Je ne suis ici pour donner mon opinion autrement que pour combattre la vôtre. C'est à celui qui est chargé de faire les tarifs, d'arrêter son opinion, et je n'ai pas la prétention de les convertir.

Quand je parle d'une augmentation de tarif, on ne peut pas exiger de moi que je dise : « De tel village à tel village, de telle ville à telle ville, on payera telle somme. » La chambre ne peut pas vouloir que je lui soumette un pareil tarif; mais MM. les ministres ne savent pas présenter eux-mêmes ce tarif, qu'ils exigent de moi ; MM. les ministres sont là pour travailler, et nous pour les juger.

Messieurs, faites payer sur le chemin de fer ce que l'on fait payer sur le chemin de fer de Tournay. Le chemin de fer de Tournay vous prouve que ce n'est pas toujours en abaissant qu'on obtient une augmentation de produits. J'ai appris que la société du chemin de fer d'Entre Sambre-et-Meuse était fort peu soucieuse de continuer l'exploitation du chemin de fer avec les tarifs qui lui sont faits.

Si l'Etat ne payait pas tous les ans, au moyen de contributions, le déficit de notre chemin de fer, il y a longtemps déjà que le chemin de fer serait en faillite.

Messieurs, il y a deux moyens de sortir de cet état désastreux pour nos finances : ou augmenter le tarif, ou mettre l'exploitation du chemin de fer en concession ; vous trouverez des compagnies qui exploiteront le chemin de fer mieux qu'on ne le fait maintenant, et qui combleront le déficit annuel de nos budgets.

Nous avons un chemin de fer qui occasionne beaucoup de perte au trésor; mais, d'un autre côté, il n'y a pas en Europe un chemin de fer qui marche aussi mal que le nôtre. D'abord, les convois de vitesse n'existent pas en Belgique, à l'exception de la ligne de Malines, sur laquelle on marché très bien (Interruption.) J'entends un honorable député de Malines dire : « Pas toujours. » Il est plus à même que moi de connaître les faits ; mais à l'exception de la ligne de Malines, la vérité est qu'en Belgique on fait 6 lieues à l'heure au maximum; sur la route de Tournay, nous faisons très régulièrement quatre lieues à l'heure ; c'est-à-dire qu'avec un bon cheval anglais on marcherait avec la même vitesse.

Pourquoi n'y a-t-il pas de convois de vitesse chez nous? Parce que, les recettes étant en déficit, on cherche à économiser du coke, pour ne pas arriver à un déficit plus considérable.

En France, le chemin de fer de Paris ne fait jamais moins de 8 lieues à l'heure.

Si vous pouviez augmenter modérément le tarif, et en même temps donner au pays la vitesse qu'il réclame, personne ne se plaindrait, et vous auriez un excédant de recette considérable.

D'après ce que je viens de dire, je suis donc d'avis que si des modifications ne sont pas apportées au tarif, le chiffre de 14,500,000 fr., porté pour 1850, ne sera pas atteint.

Messieurs, nous avons fait depuis longtemps des expériences successives, par l'abaissement du tarif; eh bien, faisons enfin une expérience inverse; faisons une expérience par une élévation modérée du tarif. Voyez la ligne du Hainaut; rapporte-t-elle moins que les autres lignes? Et pourtant nous payons 25 p. c. de plus que sur les autres lignes. Ici, l'expérience est faite, vous avez la certitude d'avoir une augmentation de revenu.

Messieurs, je n'ai pas voulu laisser passer cette discussion sans présenter ces observations à la chambre. Je pourrais m'étendre beaucoup sur cette question ; je crois que cela serait inutile, et je ne veux pas abuser des moments si précieux de l'assemblée à la fin de l'exercice.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Messieurs, je m'arrête à la dernière observation qui vient d'être présentée par l'honorable-membre. J'aurai aussi présente à la pensée la nécessité de ménager les moments de la chambre, et je suivrai, non pas l'exemple de l'honorable député, mais son conseil.

Avant d'aborder ce qui concerne le chemin de fer, j'ai besoin d'ajouter un mot à ce qui a été dit, relativement au canal de Charleroy. J'ai la profonde conviction que, à moins d'événements imprévus, le produit réel de cette voie navigable ne sera point inférieur à celui qui figure au budget des voies et moyens.

Déjà, cette année, le produit s'élèvera à près de 1,100 mille francs. Donc, les prévisions pour l'exercice de 1850 ne sont que de 100 mille francs plus élevées que les recettes effectuées en 1849. Il y a lieu d'espérer que l'augmentation sera plus forte. Ici se manifeste encore une fois un phénomène qui devrait frapper l'esprit de l'honorable préopinant, s'il ne fermait pas les yeux à la lumière du jour : c'est que chaque fois qu'on modifie des tarifs de péages, sans toutefois aller à cette exagération absurde contre laquelle le préopinant nous prémunissait tout à l'heure, on améliore les recettes.

M. Dumortier. - Et le chemin de fer! et le canal de Charleroy !

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Oui, le canal de Charleroy en fournit une preuve nouvelle. En effet, pendant l'année 1849, les transports par le canal de Charleroy se sont augmentés à peu près dans la même proportion que le péage a été réduit.

- Un membre. - Il ne fallait pas opérer de réduction.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Dans ce cas les transports ne se seraient pas augmentés. Croyez-vous que la moindre recette de l'année 1849, comparée à l'année 1847, soit le fait de la réduction? Erreur qu'il est aisé de démontrer par un argument sans réplique.

Voyez la diminution qu'ont éprouvée les recettes sur les autres voies navigables, de 1847 à 1848, et voyez de combien seulement elles se sont relevées en 1849 ; vous vous convaincrez que, pendant ce dernier exercice, on n'a récupéré que le tiers environ de ce qu'on avait perdu pendant l'année précédente.

Si donc vous n'aviez pas opéré la réduction sur le canal de Charleroy, il n'y a pas de raison pour croire que vous eussiez racheté plus que le tiers de ce que vous aviez perdu en 1848. Par conséquent, puisque vous avez regagné cette année la totalité des transports que vous aviez en 1847, j'ai le droit de dire que cette fois, comme toujours, la réduction de péage a été compensée par un accroissement de transports.

M. Dumortier. - Et le trésor perd.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Il perd, mais il est loin de perdre dans la proportion de la réduction du péage. Le trésor perd; mais le commerce n'a-t-il rien gagné? Et n'est-il pas facile de concevoir qu'il y a, en définitive, production de richesses nouvelles, augmentation de travail et de bien-être pour le pays?

M. de Mérode. - Vendez du pain à perte.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Cet exemple ne paraît pas encore assez frappant à ces messieurs ; je vais en citer un autre qui n'aura pas, je le crains, le privilège de les convertir (car il faut désespérer de leur conversion), mais qui me paraît cependant de nature à produire un grand effet sur les esprits les plus incrédules.

(page 291) En 1840, une réduction considérable a été opérée sur les péages de la Sambre canalisée.

Ces péages donnaient en 1839, 366,437 fr. La réduction prend cours le 1er septembre 1840; et, la même année, le produit s'élève à 385,000; ce progrès ne s'arrête pas là.

En 1841, le produit est de 422,000; en 1842, de 436,000; en 1843, de 507,000; en 1844, de 521,000; en 1845, de 620,000; en 1846, de 647,000 ; et en 1847, de 735,000 fr.

Tout cela ne doit-il pas porter la conviction dans les esprits ? Plaindrez-vous encore le pauvre contribuable alors que, malgré la réduction de péage, selon vous, et selon nous, par l'effet même de cette réduction, une seule branche du revenu public est doublée en moins de huit ans?

De 735,000 francs, le produit est tombé en 1848 à 505,000, sous l'influence des événements politiques ; il se relève en 1849 à 620,000 francs environ; et on a apprécié à 110,000 fr., pour l'exercice prochain, l'effet de la nouvelle réduction qui a été opérée récemment. Eh bien, messieurs, je ne crains pas que les événements ne me donnent un démenti, en prédisant que la diminution de recette ne sera pas de 50,000 fr.

Or, pour 50 mille francs, auriez-vous consenti à fermer l'accès de la France à nos houilles, alors que la France nous ouvrait ses portes et réduisait elle-même les tarifs de ses voies navigables? Belle manière de ménager le pauvre contribuable !

Disons un mot du chemin de fer. La chambre n'attend pas de moi que j'entre dans tous les détails dans lesquels est entré l'honorable préopinant. C'est la sixième ou septième représentation de la bataille qu'il livre périodiquement au chemin de fer, à ce chemin de fer qui, d'après lui, est le plus mortel ennemi de l'armée.

Je ne relèverai que quelques-unes de ses observations, et je commencerai par l'exemple du chemin de fer du Nord. Pourquoi, dit l'honorable membre, le chemin de fer du Nord a-t-il donné, en 1849, cinq millions de plus qu'en 1848, tandis que le produit des chemins de fer de Belgique n'a augmenté que d'un million?

L'honorable membre semble ignorer que, pendant la dernière période de 1848 et en 1849, le chemin de fer du Nord s'est accru de plusieurs nouveaux tronçons et de tronçons considérables. Le chemin de fer belge n'a reçu, au contraire, que le simple accroissement de la ligne de Jurbise à Tournay, dont le produit ne figure dans nos recettes que pour moitié, tandis que nous supportons la totalité des frais d'exploitation.

Je regrette de ne pouvoir en ce moment citer à l'honorable membre les dates précises de l'ouverture des lignes nouvelles du chemin de fer français ; mais la première fois qu'il m'appellera encore sur le terrain (et je crois que cela ne tardera pas longtemps), je lui donnerai ce renseignement, et je lui montrerai par là combien sa comparaison est erronée.

M. Dumortier. - Ce sera curieux.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - L'honorable membre aime beaucoup les choses curieuses; je n'en veux d'autre preuve que son arithmétique. Vous l'avez entendu tout à l'heure établir, à sa manière, que le chemin de fer coûte en totalité 202 millions.

Les calculs de l'honorable M. Dumortier sont inexacts, en ce qui concerne le prix que le chemin de fer coûte à la Belgique; mais pourquoi nous opposer toujours l'exemple du chemin de fer du Nord? Pourquoi n'en pas citer d'autres?

M. Dumortier. - Tout de suite.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Vous les citerez à votre manière. Moi, je cite, documents officiels en mains, et je vous dis qu'en Angleterre le produit moyen des chemins de fer est de moins de 3 p. c; en Allemagne, de 2 7/10; en France, il n'est que de 2 1/2 environ. 11 y a un grand nombre de chemins de fer dont le produit est néant. Quels sont ceux qui sont en bénéfice? Ceux qui aboutissent à Paris. Ceux-là et celui de Saint-Etienne à Lyon exceptés, tous les autres sont en perte.

Vous nous avez dit que notre exploitation était la plus mauvaise de l'Europe. Il est triste qu'on nous rende un aussi mauvais témoignage en Belgique même. Mais je me console en pensant que ce langage a peu d'écho , et que partout ailleurs, dans tous les documents officiels qui se publient en pays étranger, on cite le chemin de fer belge comme un des mieux exploités. Vous reprochez au chemin de fer de ne pas vous conduire assez vite. Je suis très étonné, je vous l'avoue, de rencontrer ce reproche dans votre bouche; je croyais, au contraire, que ce que vous reprochiez au siècle et au chemin de fer, c'était d'aller trop vite.

M. Dumortier. - Je demande la parole pour un rappel au règlement.

L'article 10 du règlement porte : « Toute imputation de mauvaise intention, toute autre personnalité, tout signe d'approbation ou d'improbation sont interdits. » Evidemment le ministre m'impute une intention mauvaise lorsqu'il m'accuse de reprocher un siècle d'aller trop vite.

M. le président. - Il n'y a rien là qui incrimine les intentions.

M. Dumortier. - Je n'incrimine jamais les intentions des ministres.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Je regrette bien de ne pouvoir obtenir l'approbation des honorables membres placés à ma gauche, mais il est loin de ma pensée d'incriminer leurs intentions. Tout le monde sait qu'en politique, comme en fait de chemins de fer, il y a deux systèmes en présence: l'un de ceux qui veulent aller vite, et l'autre de ceux qui veulent aller plus lentement. Or, ce dernier système, lorsqu'il est soutenu de bonne foi, est tout aussi respectable que le premier.

Abandonnons cet incident et que l'honorable membre veuille accepter l'hommage que je rends à ses bonnes intentions.

Vous avez parlé de la lenteur de notre chemin de fer. Vous avez dit qu'en France la plus petite vitesse était de huit lieues à l'heure.

C'est un détail que je suis étonné de rencontrer dans la discussion des voies et moyens.

Cependant je ne veux pas le laisser sans réponse.

Je prierai l'honorable membre de consulter le dernier numéro du Journal des Chemins de Fer français, il y verra qu'en France la vitesse varie de 28 à 37 kilom. c'est-à-dire, de 5 lieues et demie à 7 lieues et demie à l'heure.

37 kilomètres est la plus grande vitesse; c'est celle du chemin de fer du Nord. Or, notre vitesse moyenne est de plus de 30 kilomètres. Pourquoi n'est-elle pas plus grande? C'est, dit-on, parce que nous voulons épargner le coke.

Erreur, erreur évidente; il y en a deux raisons. La première, c'est que nos rails ne sont pas aussi forts qu'en France. Créé avant le chemin français, notre chemin de fer l'a été successivement avec des rails de 19, 27 et enfin 34 kilog., tandis qu'en France le poids est uniformément plus fort que ce dernier.

La seconde raison, et la plus décisive, celle qui devrait exciter les sympathies de l'honorable préopinant, et le consoler de notre lenteur , c'est que, en Belgique, l'exploitation du chemin de fer se fait, avant tout, dans un but d'utilité commune, et que nous ne voulons pas desservir uniquement les grandes villes, mais encore toutes les localités que nous traversons. Nous avons une foule de haltes qui absorbent la vitesse ; c'est là la grande cause des retards.

M. de Mérode. - Voilà un mot sérieux.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Je suis charmé que l'honorable M. de Mérode le trouve tel.

Nous n'avons pas, dit-on, de convoi de grande vitesse. C'est encore une erreur.

Messieurs, nous avons des convois qui fout régulièrement le trajet de Gand à Bruxelles en 2 heures, c'est-à-dire à raison de 8 lieues par heure, et il en existe également sur les autres lignes.

J'entends avec plaisir que plusieurs honorables représentants rendent témoignage à ce que je viens de dire.

Je m'arrête ici, parce que je me souviens qu'il s'agit seulement aujourd'hui d'apprécier le chiffre de la recette probable pour l'exercice de 1850.

On nous a reproché l'exagération des prévisions de 1849. Notre malheur, prétend-on, c'est d'avoir bâti nos espérances sur nos tarifs; et le remède au mal, c'est toujours l'aggravation des tarifs.

Non, nous n'avions pas bâti nos espérances sur les conséquences des nouveaux tarifs, mais bien sur le retour de circonstances normales, sur la reprise générale des affaires commerciales et industrielles, en Belgique comme au dehors.

Est-ce notre faute, si les événements politiques n'ont pas répondu à notre attente? Quelle est la principale cause pour laquelle le chemin de fer n'a pas donné le produit que nous espérions? C'est que la métallurgie a souffert et continue à souffrir. C'est que les minerais, qui affluaient au chemin de fer en 1847, ont continué à lui faire défaut en 1849. C'est que les troubles intérieurs de l'Allemagne ont comprimé l'essor de nos exportations de ce côté. Est-ce encore une fois notre faute, ou est-ce la faute de nos tarifs? Evidemment non. En voulez-vous une preuve? Elle est dans les résultats du chemin de fer rhénan, qui n'ont été que de (erratum, page 313) 3/4 p. c. en 1848, et qui se relèvent péniblement en 1849, quoique nos tarifs n'aient pu les affecter.

Au reste, qu'est-il besoin de citer des pays étrangers? Vous n'imputerez sans doute pas aux tarifs du 1er septembre 1848, d'avoir influé défavorablement sur le produit des transports des voyageurs, puisqu'ils n'ont pour objet que le transport des marchandises. D'où vient donc que le produit du transport des voyageurs a considérablement baissé? D'une cause qui plaide contre le relèvement des tarifs, à savoir de ce qu'il s'est opéré parmi les voyageurs un notable déclassement, et que ceux de première classe sont descendus à la seconde, et ceux de seconde à la troisième. Les tableaux officiels sont là pour le démontrer.

Quant au produit des marchandises, quoi que vous en disiez, il va sans cesse en augmentant. Pendant le mois d'octobre, nos recettes ont été supérieures à celles du mois d'octobre I848, de plus de 100,000 francs. Pendant le mois de novembre, d'après les résultats provisoires qui m'ont été fournis, l'accroissement de recette a été de 136,000 fr.

Que si ce mouvement continue, si nous continuons à avoir une augmentation normale de 120 mille fr. par mois, il est évident que les prévisions du budget des voies et moyens seront atteintes. Nous avons toute raison de l'espérer. Au moment où je parle, ce ne sont pas les transports, c'est le matériel qui nous fait défaut.

Ainsi, messieurs, et c'est à quoi je veux aboutir, les prévisions portées au budget pour 1850 l'ont été en conscience, elles l'ont été d'après une juste appréciation des probabilités, et à moins d'événements extraordinaires, j'ose dire que le chiffre de nos espérances sera réalisé.

M. Dumortier. - Messieurs, j'aurai d'abord à répondre à plusieurs points du discours de M. le ministre des travaux publics.

Il a commencé par établir des raisonnements de deux manières. D'abord il a raisonné sur un canal au point de vue de la recette, et ensuite sur un autre au point de vue des marchandises. Il a argumenté, quant au canal de Charleroy, sur le développement des transports, et quant à la (page 292) Sambre canalisée, sur l'excédant des recettes. Il est impossible de suivre cette argumentation qui marche de la sorte et qui n'est propre qu'a embrouiller la discussion.

Que faisons-nous ici, messieurs? Nous faisons un budget des voies et moyens; nous examinons les recettes de l'Etat; nous n'avons pas à nous occuper d'autre chose. Aussi, je n'ai pas parlé de l'augmentation du transport des marchandises ; j'ai parlé du déficit des recettes, et quand vous me répondez par l'augmentation du transport des marchandises, permettez-moi de vous le dire, M. le ministre, vous vous placez à côté de la question.

Messieurs, sur le canal de Charleroy, le transport des marchandises était déjà tel, avant la réduction que nous avons votée, que l'on demandait des transports de nuit et l'élargissement des écluses. Ceci vous prouve que les tarifs n'entravaient nullement la circulation; car si les tarifs avaient entravé la circulation, on serait venu demander tout autre chose. Ce qu'on vous demandait alors vous prouve qu'avant la réduction des péages sur le chemin de fer, la circulation n'était nullement intéressée au taux des tarifs.

Qu'a-t-on fait? On est venu opérer une réduction sur ces tarifs. Et cette réduction, quelle est-elle ? Je prends l'état qui nous a été présenté par M. le ministre des finances, et j'y lis, à la page 127, que le déficit présumé sur le canal de Charleroy est de 515,000 fr., et sur la Sambre canalisée de 100,000 fr.

Vous venez me dire que les transports sont augmentés. Je le conçois. Si vous voulez supprimer toute espèce de péages, vous aurez des transports bien plus considérables encore. Ouvrez vos canaux, supprimez toute espèce de droits, et immédiatement les transports s'accroissent dans une proportion considérable. Mais encore une fois, qui payera le déficit? Ce seront les contributions qu'il faudra augmenter.

Sommes-nous ici à faire une loi pour augmenter les transports? Non ; nous avons à examiner le budget des voies et moyens, c'est-à-dire à rechercher les moyens d'équilibrer les recettes avec les dépenses, et je dis que quand le système que vous soutenez, très beau en apparence, très bien formulé, admirablement exprimé dans cette enceinte, amène de pareils résultats, il est fatal au pays.

Vous dites que, sur la Sambre canalisée, la réduction des péages, en 1840, a amené un revenu plus considérable. Je le crois bien; mais c'est que le taux des tarifs sur la Sambre canalisée était tel qu'il entravait la navigation.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Le taux des péages sur le canal de Charleroy était plus élevé.

M. Dumortier. - Il n'entravait pas la navigation. Vous ne devez pas réduire des péages qui n'entravent pas la navigation. Vous ne devez diminuer les péages que lorsque, par cette réduction, vous amenez des revenus plus considérables. Voilà comment opérerait tout homme d'affaires, tout négociant. On fait des réductions pour avoir une augmentation de recettes. Cette réduction était, en 1840, nécessaire sur la Sambre canalisée, parce que le taux des péages y empêchait la circulation. Elle n'était pas nécessaire sur le canal de Charleroy ; et la preuve, c'est qu'on demandait, et des convois de nuit, et l'élargissement des écluses.

Ainsi la perte que subit le trésor par suite de cette réduction est purement gratuite; elle s'est effectuée sans but, sans profit pour personne, si ce n'est pour ceux qui doivent se servir du canal et au détriment du trésor et des contribuables. Or, nous ne sommes pas en position de faire de pareilles largesses. Nous devons envisager la question au point de vue du trésor, et à ce point de vue nous avons à regretter des réductions qui amènent des déficits successifs.

Répondant aux observations que j'ai eu l'honneur de vous présenter relativement au chemin de fer, M. le ministre des travaux publics a commencé par dire : C'est la sixième édition de la bataille que l'honorable membre livre au chemin de fer.

Je ne livre pas bataille au chemin de fer. Je livre bataille à vos œuvres, et je vous en prie, n'identifiez pas vos œuvres avec le chemin de fer. Je reconnais que le chemin de fer est une œuvre magnifique, une œuvre nationale, mais qu'il ne doit pas coûter au pays des sommes aussi considérables.

Le déficit que nous avons annuellement, je le répète, est frappant ; il s'élève de 6 à 8 millions par an.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Comment cela?

M. Dumortier. - L'explication est bien simple. Votre chemin de fer coûte maintenant de 200 à 220 millions.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Vous avez dit 202 millions.

M. Dumortier. - Il coûtait 202 millions au 31 décembre 1847. Quand nous aurons le rapport que vous avez déposé, il y a six mois, et que malheureusement nous n'avons pas encore, nous pourrons faire le calcul exact de ce qu'il nous coûte aujourd'hui.

Mais il est incontestable que le chemin de fer nous coûte aujourd'hui de 200 à 220 millions ; calculez l'intérêt de cette somme; ajoutez-y la dépense annuelle ; vous reconnaîtrez que, comme l'an dernier, vous n'avez reçu que 12 millions, le déficit a été de 8 millions; et que cette année, ce déficit sera de 6 à 7 millions. Admettons que le déficit ne soit que de 6 millions; pouvez-vous croire que la chambre voie d'un œil froid une perte aussi considérable sur une pareille entreprise?

Il est évident, messieurs, que ce sont ces déficits accumulés qui ont amené la situation dans laquelle se trouve aujourd'hui le trésor public et qui nécessite encore une émission de 15 millions de bons du trésor.

Ce déficit provient de la tarification du chemin de fer ; là est la source de tous vos embarras. Modifiez cette tarification ; élevez modérément vos péages; rétablissez les choses dans l'état où elles se trouvaient avant le malencontreux tarif du 1er septembre, et vous obtiendrez une augmentation de recette de trois à quatre millions par an; et pour cela, messieurs, il ne faut pas des augmentations considérables; une augmentation très modérée amènera immédiatement pour le trésor une augmentation de trois à quatre millions.

Mais, dit M. le ministre des finances, nous avons sur les marchandises une augmentation de 100,000 fr. par mois. Eh bien, messieurs, Voyons ce qui en est, le Moniteur en main.

Au mois de septembre, la recette des marchandises s'est élevée à 482,145 fr.; l'année dernière elle s'était élevée à 463,514 fr.; vous avez donc eu, au mois de septembre, une augmentation de 18,000 fr. Au mois d'août dernier, la recette a été de 466,597 fr.; au mois d'août 1848, elle avait été de 457,267 fr. ; ainsi l'augmentation se réduit à 8,000fr.

Eh bien, pour obtenir ces augmentations, vous avez dû développer considérablement vos transports, augmenter dans une forte proportion vos frais de traction et vos frais d'exploitation en général. Est-ce en présence d'un semblable résultat qu'on peut venir nous parler d'une augmentation de 1,200,000 fr. par an?

J'ai parlé de la vitesse ; on m'a dit qu'en France la vitesse n'est pas plus grande qu'en Belgique. Eh bien, messieurs, je le demande, comment peut-on dire une pareille chose dans une chambre composée de 108 membres qui voyagent sur les chemins de fer, en France et en Belgique? Comment! la vitesse n'est pas plus grande en France qu'en Belgique? Mais je vous l'ai dit, messieurs, sur l'ensemble de nos routes, nous ne faisons que 6 lieues à l'heure, et sur la route de Tournay à Bruxelles nous ne faisons régulièrement que 4 lieues à l'heure, c'est-à-dire 20 kilomètres par heure, tandis qu'en France, on fait 35 kilomètres par heure.

Mais, dit M. le ministre des travaux publics, en France les chemins de fer qui rapportent sont ceux qui vont sur Paris; en Belgique nous n'avons pas de Paris et par conséquent, nous ne pouvons pas avoir des produits aussi élevés qu'en France. C'est là, messieurs, un argument très commode : Paris et la révolution française, voilà les deux grands arguments de M. le ministre des travaux publics. Quant à la révolution française, je conçois qu'on l'invoquât pour l'année dernière; mais cette révolution n'empêchera pas le chemin de fer du Nord de rapporter, en 1849, 5 millions de plus qu'il n'a rapporté en 1848, alors qu'en Belgique l'augmentation ne sera que d'un million. C'est qu'en France, messieurs, on ne fait pas la folie de transporter pour rien les voyageurs et les marchandises.

M. le ministre des travaux pubics (M. Rolin). - Et les charbons?

M. Dumortier. - Mais, messieurs, il n'est pas étonnant que la compagnie du Nord transporte les charbons à bas prix : elle lutte contre le canal de Saint-Quentin, qui appartient à d'autres. Ce n'est pas comme chez nous, où l'Etat se fait concurrence à lui-même, chose, il faut en convenir, qui est éminemment folle.

Voyons, messieurs, quels sont les résultats de tous les chemins de fer de la France, comparés à ceux qu'on obtient en Belgique.

M. le ministre des travaux publics m'a dit : « Vous citerez les chiffres à votre manière. » Oui, messieurs, nous avons deux manières de calculer : l'une est dans l'intérêt du trésor public, l'autre est au détriment du trésor public; quant à moi, je vais citer les chiffres officiels, dont je ne me suis jamais écarté.

M. le ministre des travaux publics m'a annoncé qu'il me répondra un jour. J'attendrai sa réponse comme je l'attends depuis longtemps, bien que j'aie déjà fait six campagnes contre le chemin de fer.

L'année dernière, messieurs, lorsqu'il fut question en France de faire racheter les chemins de fer par le gouvernement, on fit des évaluations, le gouvernement français publia des tableaux dans lesquels nous trouvons les recettes par ligne et les recettes par kilomètre. Tout cela se rapporte à une époque antérieure à la révolution de février. Eh bien, messieurs, il résulte de ces tableaux que les onze chemins de fer français comprenaient ensemble 1,108 kilomètres d'étendue et qu'ils rapportaient 53,999,332 fr., c'est-à-dire 544,000 fr. par kilomètre. En Belgique les chemins de fer de l'Etat avaient à la même époque un développement de 560 kilomètres, c'est-à-dire un peu plus de la moitié du développement de tous les chemins de fer français réunis.

J'ai dit que les chemins de fer français rapportaient 54 millions, d'où vous allez sans doute conclure que les nôtres rapportaient 27 millions. Eh bien, non, messieurs, dans l'année la plus prospère, nos chemins de fer ont rapporté 14 millions 800 mille fr. Ainsi nos chemins de fer dans leur ensemble ne produisent pas le tiers de ce que produisent les chemins de fer français.

Vous voyez, messieurs, combien sont inexacts les calculs qu'on nous oppose et combien est mal fondée cette argumentation que les chemins de fer qui rapportent sont ceux qui se dirigent sur Paris, puisque je viens de vous citer le résultat de tous les chemins de fer français, dans leur ensemble. Tous les chemins de fer français, mauvais et bons, rapportent, en moyenne, 48,000 fr. par kilomètre ; nos chemins de fer ne rapportent en moyenne que 26,000 fr. par kilomètre.

D'où viennent, messieurs, des résultats si différents? Ils viennent de ce qu'en France on ne fait pas la folie de vouloir tout transporter pour (page 295) rien, de ce qu'on y fait du chemin de fer, non pas un moyen de popularité, mais un moyen d'obtenir des recettes. Suivez ce système, augmentez très modérément vos tarifs et vous arriverez aussi à des résultats satisfaisants. J'aime le chemin de fer, j'en suis très grand partisan, mais je voudrais arriver, non pas à couvrir complètement l'intérêt et l'amortissement des capitaux empruntés pour le chemin de fer, ce que je considère comme, en ce moment, impossible, mais au moins à une augmentation notable des recettes, ce qui serait extrêmement facile.

Mais, dit M. le ministre des travaux publics, le chemin de fer du Nord a reçu des extensions considérables ; il n'est donc pas étonnant que ses produits se soient accrus de 5 millions.

Messieurs, d'après un travail que j'ai vu l'été dernier, le chemin de fer du Nord, dans son ensemble, était de 114 kilomètres moins étendu que le chemin de fer belge. Voilà ce que j'ai lu dernièrement. (Interruption.) Il est vrai que depuis lors des lignes nouvelles ont été mises en exploitation en France ; mais nous savons très bien que le chemin de fer de Belgique est infiniment plus étendu que le chemin de fer du Nord; d'ailleurs ces lignes nouvelles n'ont pas produit toute l'année; eh bien, notre chemin de fer exploité toute l'année ne rapporte que 13 millions, tandis que celui du Nord, moins étendu, rapporte 19 millions.

Je bornerai là mes observations. J'appelle toute la sollicitude du gouvernement sur ce point, qu'en modifiant avec modération le tarif, nous ne tarderons pas à voir le trésor public dans une situation beaucoup meilleure que celle où il se trouve maintenant.

M. de Mérode. - Messieurs, malgré tous les renseignements de M. le ministre des travaux publics, il est certain que nulle part en Europe on n'adopte le système belge comme moyen de faire fructifier les recettes du chemin de fer ; si M. le ministre peut me citer un seul pays où l'on copie nos tarifs, je passe condamnation.

L'honorable M. Dumortier a cité les tarifs du chemin de fer du Nord. Sur le chemin de fer d'Orléans, les voyageurs payent 40 à 50 p. c. de plus que sur notre chemin de fer. Sur le chemin de fer de Rouen, on paye 15 fr. pour un parcours de 110 kilomètres, et en Belgique pour aller d'Anvers à Bruxelles, on ne paye que 6 fr. 50 c, retour compris.

En Angleterre , les compagnies qui desservent exclusivement les chemins de fer viennent-elles vous emprunter les tarifs qu'on a inaugurés en Belgique? Mais aucune de ces compagnies ne vous fait cet emprunt. Donc au point de vue des recettes du trésor, le tarif belge est détestable.

Je dis que ce tarif est détestable, parce qu'il est injuste, parce que, comme l'a fait dernièrement observer un membre de l'assemblée nationale de France, les chemins de fer ne desservent que certaines directions, et que les localités qui en sont écartées n'en profitent guère.

L'arrondissement de Nivelles est un des plus populeux du pays; eh bien, je voudrais qu'on me citât des communes de cet arrondissement qui trouvent un avantage quelconque dans la perte que fait le trésor sur l'administration des chemins de fer. Je dis qu'il y a là une grande injustice.

Par suite des pertes que fait le trésor, il est incapable de pourvoir à ses besoins. On est dans un très grand embarras pour fournir les dépenses du budget de la guerre; et l'on est obligé de lésiner sur les allocations, soit pour les chemins vicinaux, soit pour les petites routes destinées à réunir les villages les uns aux autres.

Un membre de cette chambre me fait connaître que, sur le chemin de St-Nicolas exploité par une compagnie, on a augmenté le tarif pour obtenir une augmentation de recette; et qu'on a obtenu effectivement une augmentation de recette.

- La discussion générale est close.

La chambre passe au tableau du budget.

Discussion du tableau des recettes (I. Impôts)

Contributions directes, douanes et accises

Foncier

« Principal : fr. 15,500,000.

« 5 centimes additionnels ordinaires : fr. 465,000.

« 2 centimes additionnels pour non-valeurs : fr. 310,000.

« 10 centimes additionnels extraordinaires : fr. 1,550,000. »

« 3 centimes additionnels supplémentaires sur le tout : fr. 534,750. »

La section centrale adopte.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, j'ai donné communication à la section centrale d'une proposition que le gouvernement a l'intention de soumettre à la chambre dans le projet de loi qui suit le budget des voies et moyens.

Cette proposition aurait pour objet de faire rentrer dès aujourd'hui dans l'impôt des valeurs qui ne lui profitent pas.

L'impôt foncier s'accroit chaque année d'une certaine somme, par suite de l'augmentation des propriétés bâties. Cet accroissement vient en déduction du contingent général, ce qui opère une fraction de centime au profil des contribuables. Lorsqu'ultérieurement il y a un déficit quelconque, et qu'on est obligé de recourir à un impôt, on accroît la masse totale de l'impôt foncier de certains centimes additionnels, comme il en figure encore au budget. Il nous a paru beaucoup plus rationnel de faire profiter le trésor de ces accroissements de valeur, en déclarant dans la loi du budget que les valeurs nouvelles seraient, cette année, ajoutées à l'impôt. Ce sera l'objet d'une proposition que je déposerai, lorsque nous serons arrivés à l'article du projet de loi. Cette proposition aurait pour résultat d'accroître le produit du prélèvement sur les propriétés bâties de 278,000 fr.; celle somme eût été plus considérable, si nous avions pu faite entrer dans l'accroissement ce qui sera encore obtenu au 31 décembre de cette année, mats le résultat n'est pas encore connu.

Peut-être, messieurs, vaudra-t-il mieux plus tard, régler définitivement la perception de l'impôt foncier autrement qu'on ne l'a fait jusqu'à présent.

La quotité qui se perçoit aujourd'hui est de 9 centimes et 871 millièmes du revenu cadastral.

Au lieu de laisser subsister l'impôt, comme impôt de répartition, ce qui est sans objet depuis que le cadastre est entièrement fait, on en ferait un impôt de quotité en le fixant au dixième du revenu cadastral. La proposition que j'annonce et qui a pour objet de faire tourner les accroissements de valeur au profit du trésor, au lieu de venir en diminution du contingent, sera formulée dans un des articles du projet de loi. Je demande qu'on réserve à statuer sur le chiffre jusqu'au moment où il sera statué sur la question de principe qui sera posée par le projet de loi.

M. le président. - Le chiffre est réservé jusqu'après le vote sur le premier article du projet de loi.

M. Vilain XIIII. - Je demande que la proposition que vient de faire M. le ministre des finances soit renvoyée à la section centrale. Cette proposition est très importante, car elle a pour objet de changer la nature de l'impôt foncier, d'en faire un impôt de quotité au lieu d'un impôt de répartition.

Je demande donc le renvoi à la section centrale pour avoir un rapport avant la fin de la discussion du budget des voies et moyens.

M. de Theux. - Ainsi que l'a fait observer l'honorable M. Vilain XIIII, la proposition de M. le ministre des finances a une très grande importance, car à chaque révision du cadastre on pourra augmenter le revenu de la propriété foncière, et une fois établi que l'emprunt doit être du dixième du revenu, vous ne vous arrêterez plus dans la marche ascendante de l'impôt. Les experts du cadastre, agents de M. le ministre des finances, auront le plus grand intérêt à surévaluer tous les produits territoriaux, parce que le dixième sera toujours un accroissement du budget des recettes. C'est une des questions les plus graves qui puissent être soulevées, et je suis étonné qu'elle ait été mise en avant incidemment au moment où dans d'autres pays on réclame la diminution de l'impôt foncier. J'espère que la chambre ne donnera pas les mains à ce changement.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). -J'ai annoncé une proposition ayant pour objet de faire entrer en accroissement de valeurs au profit du trésor, les nouvelles valeurs qui doivent venir en augmentation d'impôt et non en déduction.

J'ai ajouté qu'on pourrait même transformer, le cadastre étant arrivé à sa fin, l'impôt foncier en impôt de quotité au lieu de lui laisser le caractère apparent d'impôt de répartition. Aujourd'hui, l'impôt foncier est un impôt de répartition par abstraction; au fond, c'est un impôt de quotité, en ce sens qu'on fixe le contingent global pour tout le pays, que ce contingent se fractionne en contingent provincial et en contingent communal, et que le contingent communal aboutit à une quotité du revenu cadastral.

Cette proportion, qui est la quotité, est aujourd'hui 9/871. Je ne demande pas autre chose que de compter en recettes les nouvelles valeurs qui résultent des propriétés bâties qui doivent être soumises à l'impôt ; rien de plus. A ce point de vue, c'est une sorte de déduction pour la propriété foncière non bâtie. Qu'arrive-t-il, en effet ? Les accroissements de valeur qui ont lieu entrent, dans le contingent qui reste le même; mais la quotité diminue parce que l'accroissement vient en déduction de ce qui est à répartir. Quand il y a insuffisance on y pourvoit par voie de centimes additionnels, aussi bien sur la propriété bâtie que sur la propriété non bâtie.

Je demande que l'accroissement de valeur profite au trésor, que les propriétés bâties nouvelles, fournissent leur part de contribution.

Aujourd'hui elles viennent en déduction du contingent général, elles forment une déduction de centimes ou d'une fraction de centime par année pour chaque contribuable, tandis qu'en les laissant profiter au trésor, elles donneraient pour les propriétés à soumettre à l'impôt depuis la dernière opération, qui remonte à quelques années, 278,029 fr.

La section centrale, à qui j'ai fait la communication de cette proposition, a supposé qu'elle n'était pas formelle; car elle n'en a fait l'objet d'aucune observation.

Si on pense qu'il y a lieu de renvoyer la proposition à la section centrale, je ne m'y oppose pas; cependant réduite aux termes dans lesquels je viens de l'exposer, je crois que la chambre pourrait la voter maintenant.

M. Toussaint. - Il est évident pour tous ceux qui se sont occupés des impôts, que l'impôt foncier est au fond un impôt de quotité sous la limite du chiffre auquel le législateur veut qu'il atteigne; c'est parce que j'admets ce principe comme point de départ que j'admettrai l'extension de l'impôt comme amélioration de produit pour le trésor.

Il est naturel et légitime de faire tourner au profit du trésor l'impôt foncier appliqué aux constructions et aux valeurs nouvelles. J'insiste par un autre motif sur cette application, c'est que le principe de l'augmentation de l'impôt par la voie des constructions et des valeurs nouvelles, fournira logiquement et matériellement le moyen d'opérer les (page 294) dégrèvements reconnus nécessaires, en évitant les frais attachés à de nouvelles évaluations ou péréquations cadastrales.

Si l'on songe à frapper de l'impôt les existences imposables nouvelles, il faut bien aussi songer à dégrever les parties du pays ou les cotes d'impôt qui y auront évidemment droit; c'est en frappant les constructions nouvelles que vous en trouverez la possibilité. Or, vous savez tous, messieurs, que dans certaines parties de notre pays, où la petite culture tend à disparaître et où un nouveau mode de travail s'introduit à la place de l'ancienne industrie linière associée à l'agriculture, un dégrèvement est indispensable. Car la valeur du territoire agricole et surtout celle des habitations rurales y a diminué d'une manière effrayante. Le moyen d'opérer ce dégrèvement, sans toucher à l'ensemble des opérations cadastrales, c'est d'imposer les nouvelles constructions. J'appuie dans ce sens le renvoi de la proposition ministérielle à la section centrale.

M. Veydt, rapporteur. - Messieurs, j'avais demandé la parole avant les dernières paroles par lesquelles M. le ministre des finances a terminé son discours. C'était parce que ce qu'il avait dit d'abord tendait à faire supposer que la section centrale avait été saisie d'une proposition relative à l'augmentation du chiffre de la contribution foncière. J'en appelle, au besoin, à mes honorables collègues, membres de la section centrale. Ils diront, comme moi, qu'elle n'a eu à examiner aucun projet arrête. L'honorable ministre a annoncé qu'il ferait une proposition à la chambre, et il s'est borné à nous donner des explications qui sout consignées dans le rapport et dans une de ses annexes.

Ceci établi, j'exprime mon opinion sur la proposition elle-même. S'il doit être question de changer le caractère de l'impôt foncier pour en faire un impôt de quotité, au lieu d'un impôt de répartition, il est certain que, malgré tous les arguments qu'on fera valoir pour établir que ce changement n'a pas, en réalité, l'importance qu'on lui attribuerait, on court le risque de provoquer, en section centrale et au sein de la chambre, de longues discussions, auxquelles nous n'avons pas le temps de nous livrer. Pour atteindre le but que M. le ministre des finances a en vue, il convient, suivant moi, de se borner à la proposition, annoncée d'abord, de faire profiter au trésor l'augmentation résultant des constructions nouvelles, qui, à présent, donnent lieu, à son préjudice, à un léger dégrèvement sur le contingent de chaque contribuable. Dans ces termes, la proposition ne doit pas, suivant moi, rencontrer de sérieuses objections, et si la section centrale doit en délibérer, je crois qu'elle sera en mesure de présenter promptement un rapport à la chambre.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je crois m'être expliqué très clairement lorsque j'ai annoncé quelles propositions j'entendais formuler. J'ai dit à quel point j'en tendais me restreindre.

Puis, j'ai énoncé cette opinion qu'on pourrait même aller jusqu'à transformer l'impôt foncier, qui n'est de répartition que de nom, en impôt de quotité, et déclarer d'une manière générale que la quotité à payer par revenu cadastral est de … ; ce qui est exactement ce qui se pratique aujourd'hui. La loi fixe un contingent général ; puis il y a un contingent communal à répartir en raison du revenu cadastral. Cela donne une certaine quotité du revenu cadastral. Elle est de 9 centimes et une fraction qui approche extrêmement de 10.

Mais encore une fois, écartons complétement cette question; elle pourrait soulever un débat ; il est inutile de le faire. Je me borne à demande que l'accroissement de valeur, du chef des propriétés bâties, vienne en accroissement de l'impôt et non en diminution du contingent. Cela doit être, dès à présent, une somme de 278,000 francs.

M. Vilain XIIII. - Je demande l'impression et le renvoi à la section centrale.

M. Delfosse. - Tout le monde est d'accord; M. le ministre demande lui-même ce renvoi; il est inutile de prolonger la discussion.

- La chambre ordonne l'impression de la proposition, et le renvoi à l'examen de la section centrale.

Personnel

« Principal : fr. 8,364,000. »

- Adopée.

« 10 centimes additionnels extraordinaires : fr. 836,400. »

- Adopté.

Patentes

« Principal : fr. 2,819,000. »

« 10 centimes additionnels extraordinaires : fr. 281,900. »

« Ensemble : fr. 3,100,900. »

M. Vermeire. - Mon intention n'est pas d'abuser longtemps des moments précieux de la chambre. Je sais très bien, comme l'ont fait observer M. le ministre des travaux publics et M. Dumortier, que les projets de loi importants, dont nous avons à nous occuper avant le 1er janvier, ne permettent pas d'entamer des discussions qui devraient recommencer plus tard.

Je ne puis cependant laisser passer cet article, sans demander à M. le ministre des finances si le projet de loi de révision générale de l'impôt des patentes, qu'il nous annonce comme devant être présenté prochainement, pourra l'être dans la session actuelle.

Cette révision de la loi des patentes est d'autant plus nécessaire que cet impôt frappe souvent, d'une manière inégale et arbitraire, les classes qu'il doit atteindre. Un seul exemple, entre mille, suffira pour démontrer cette vérité à la dernière évidence.

Un propriétaire d'un haut fourneau, valant 300,000 fr., qui peut produire annuellement pour 600,000 fr. de minerai, paye un impôt de patente, variant entre 63 et 84.fr. Un individu employant 14 ouvriers paye un droit de patente de 25 fl. des Pays-Bas, ou environ 53 fr. Un batelier propriétaire d'un bateau, valant tout au plus 3,000 fr., jaugeant 70 tonneaux, paye un impôt de patente de 52 fr. 50 c.

Ainsi voilà trois patentables qui payent tous trois le même impôt. Or, il est certain que le batelier doit gagner moins que l'individu qui occupe 14 ouvriers. Tous deux sont dans une position inférieure à celle du propriétaire d'un haut fourneau, d'une valeur de 300,000 fr., produisant annuellement une valeur d'un demi-million.

Une répartition plus équitable de l'impôt des patentes aurait pour résultat de dégrever ceux qui sont injustement atteints par la loi et de donner un revenu au trésor.

Je me bornerai, messieurs, à ces seules observations, et je prierai M. le ministre des finances de bien vouloir me répondre un mot à la demande que je fais.

M. Rodenbach. -- Messieurs, j'ai eu occasion, il y a quelques jours, d'appuyer une pétition qui demandait que l'on frappât d'une patente la profession libérale d'avocat. J'ai renouvelé cette demande dans la troisième section, et j'ai vu avec satisfaction que la section centrale et M. le ministre des finances l'avaient favorablement accueillie; que, dans le projet de loi qui sera prochainement présenté à la chambre, il vous sera proposé de faire payer un droit à la profession d'avocat.

Je ne demande pas, messieurs, que cet impôt soit qualifié de droit de patente; je sais que quelques jurisconsultes, quelques avocats désirent une distinction à cet égard. Pourvu que l'impôt existe, peu m'importe la qualification qu'on lui donne. Mais je répète que les médecins exercent aussi une profession libérale, et qu'il n'est pas juste, lorsque vous les frappez de la patente, eux qui rendent souvent des services à l'humanité en traitant les pauvres, d'en exempter les avocats qui rarement plaident gratuitement.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai eu l'honneur de dire plusieurs fois déjà à la chambre que le gouvernement s'occupait activement d'une révision de la loi des patentes. Les travaux auxquels on se livre sont fort considérables. J'espère qu'ils pourront être achevés dans un bref délai. Aussitôt que je le pourrai, je déposerai le projet relatif à la révision de cette législation.

J'ai déjà eu occasion de dire à la chambre que je ne répugnais en aucune façon à faire entrer MM. les avocats parmi les contribuables de ce chef. La recette sera minime. S'il y a nécessité de modifier le nom à l'aide duquel la rétribution sera réclamée, je n'y vois aucune espèce d'inconvénient.

- Le chiffre de 3,100,900 fr. est adopté.

Redevances sur les mines

« Principal : fr. 180,000. »

- Adopté.

« 10 centimes ordinaires pour non-valeurs : fr. 18,000. »

- Adopté.

« 5 centimes sur les deux sommes précédentes, pour frais de perception : fr. 9,900. »

- Adopté.

Douanes

« Droits d'entrée (16 centimes additionnels) : fr. 10,500,000. »

- Adopté.


« Droits de sortie (16 centimes additionnels) : fr. 400,000. »

- Adopté.


« Droits de transit (15 centimes additionnels) : fr. 50,000. »

- Adopté.


« Droits de tonnage (16 centimes additionnels) : fr. 450,000. »

- Adopté.


« Timbres : fr. 35,000. »

- Adopté.

Droit de consommation sur les boissons distillées

Droit de consommation sur les boissons distillées : fr. 900,000. »

- Adopté.

Accises

Sel (sans additionnels) : fr. 4,650,000. »

- Adopté.


« Vins étrangers (26 centimes additionnels et timbres collectifs) : fr. 2,100,000. »

- Adopté.


« Eaux-de-vie étrangères (sans additionnels) : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Eaux-de-vie indigènes (sans additionnels) : fr. 3,900,000. »

Disjonction d'une disposition du budget, pour en faire une loi spéciale, portant sur la prime pour exportation d'eaux-de-vie

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, j'ai eu l'honneur de faire connaître à la section centrale que la législation actuelle accorde une prime fort considérable pour l'exportation des eaux-de-vie distillées. Jusqu'à présent on n'avait guère exporté. Mais depuis cette année l'exportation a pris un certain développement, et le trésor est menacé de subir de ce chef une perte assez notable, une perte de 90,000 à 100,000 fr.

Je pense qu'il est indispensable de prévenir les fâcheux effets de cette situation. J'ai l'honneur, par conséquent, de proposer un article qui ferait partie de la loi de budget, et qui est ainsi conçu :

(page 295) « Par modification au paragraphe premier de l'article 21 de la loi du 27 juin 1842, sur les distilleries (Bulletin officiel, n°464), la décharge des droits est évaluée dans les cas énoncés aux litteras b, c et d du paragraphe 2 de l'article 20 de la même loi, à 22 francs par hectolitre d'eau-de-vie marquant 50 degrés à l'alcoomètre de Gay-Lussac, à la température de 15 degrés du thermomètre centigrade, et proportionnellement à cette base pour les qualités inférieures ou supérieures en force,

« Seront soumis à cette décharge les droits résultant des travaux effectués à partir du jour où la présente loi deviendra obligatoire, en vertu des déclarations alors en cours d'exécution.

« Toutefois, les eaux-de-vie indigènes déposées en entrepôt public avant cette époque, en apurement des droits constatés antérieurement, ne peuvent être enlevées pour la consommation que sous payement de l'accise au comptant, calculée d'après le taux de la décharge établie au moment où elles ont été emmagasinées.

« L'exportation des eaux-de-vie indigènes, avec décharge de droit, dans les limites des quantités fixées par l'article 22 de ladite loi du 27 juin 1842, est permise par terre ou rivières et par les bureaux à désigner par le gouvernement. »

Cette mesure est indispensable, si nous voulons éviter cet inconvénient grave de voir l'exportation se développer, des intérêts se former à l'abri d'une législation vicieuse et nous trouver peut-être dans l'impossibilité de nous soustraire ensuite aux réclamations qui viendraient à surgir.

M. le président. - Pour éviter une discussion, il serait peut-être convenable d'ordonner l'impression de cet amendement et de le renvoyer à l'examen de la section centrale.

M. Mercier. - Messieurs, c'est encore là une proposition très importante; elle peut donner lieu à de longues discussions.

Lors de la discussion de la loi sur les distilleries, j'ai critiqué cette disposition; j'ai même voté contre la dernière loi sur les distilleries. Je crois que votre proposition soulèvera de nouveau la question des primes d'exportation en général. On vous dira qu'il s'agit ici d'une prime d'exportation en faveur de l'agriculture, et que vous ne pouvez la supprimer sans en agir de même envers toutes les autres primes d'exportation.

Je prévois donc une longue discussion. J'ajouterai qu'il n'y a pas pour cette disposition la même urgence que pour le budget des voies et moyens lui-même. Car il importe assez peu que cette mesure soit retardée de quelques semaines; la perte qui pourra résulter éventuellement de ce retard pour le trésor public ne sera pas bien considérable.

Je demande donc que pour abréger la discussion du budget et attendu, que le sénat aura à peine le temps de l'examiner, M. le ministre des finances consente à ce que son amendement fasse l'objet d'une loi particulière.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il me semble qu'on peut, sans inconvénient, renvoyer ma proposition à la section centrale, sauf à celle-ci, si elle voit quelque avantage à la disjoindre du budget, à la considérer comme un projet de loi spécial.

Mais quant à l'observation que vient de faire l'honorable M. Mercier, que ce serait remettre en question toutes les primes, et que ce serait enlever une prime aux agriculteurs, je n'ai pas besoin de faire remarquer qu'elle n'a aucune espèce de fondement.

Ce ne sont pas les agriculteurs qui exportent les eaux-de-vie, ce sont quelques grands distillateurs, et ainsi la prime irait fort indirectement, si ce n'est pas du tout à l'agriculture. Jusqu'à présent il y a eu fort peu d'exportations , et dès lors l'inconvénient que j'ai signalé était sans gravité ; mais nous sommes exposés à le voir prendre de grandes proportions, car l'exportation dépassera probablement 12,000 hectolitres en 1850.

J'ai cru qu'il était de mon devoir d'exposer cet état de choses à la chambre.

M. de Theux. - Je ne m'opposerai pas au renvoi à la section centrale; mais j'appellerai l'attention de la section centrale sur l'utilité pour qu'il pourrait y avoir à consulter les intéressés, ou tout au moins à leur laisser le temps de nous faire parvenir leurs observations.

Dans tous les cas, quel que soit le rapport de la section centrale, je me réserve d'appuyer la motion faite par l'honorable M. Mercier, si je reconnais qu'il vaut mieux ajourner la discussion de la proposition et en faire l'objet d'une loi spéciale.

M. Rodenbach. - Messieurs, je partage assez l'opinion que viennent d'exprimer deux honorables membres ; mais il me semble que loin de vouloir restreindre l'exportation de produits du pays et surtout de produits agricoles, il faut au contraire encourager cette exportation. On fait des sacrifices considérables pour développer l'exportation d'une foule d'objets, on accorde une prime énorme au sucre par exemple; on dépense à tout cela plusieurs millions. J'ai même appris depuis peu que l'intention du ministère est d'engager les brasseurs à fabriquer des bières fortes pour l'exportation , comme le font les Anglais : car vous savez , messieurs, que les Anglais exportent beaucoup de « porter » et d'autres bières. Il me semble donc, messieurs, que pour être conséquent et dans l'intérêt de l'agriculture, de l'industrie, du commerce, de la navigation, il faudrait favoriser l'exportation des boissons distillées lien plutôt que de la restreindre. Je dirai même que le port d'Anvers y est principalement intéressé, car c'est surtout par Anvers que se fait cette exportation. Je ne prétends pas que le gouvernement doive s'imposer des pertes pour cet objet: mais je dis qu'il doit bien se garder d'entraver une branche d'industrie qu'il faut au contraire chercher à développer.

- Le renvoi à la section centrale est mis aux voix et prononcé.

Le chiffre de 3,900,000 fr. est ensuite mis aux voix et adopté.


« Bières et vinaigres (20 centimes additionnels et timbres collectifs) : fr. 6,300,000. »

- Adopté.


« Sucres : fr. 3,000,000. »

La section centrale, d'accord avec M. le ministre des finances, a porté le chiffre de cet article à 3,500,000 fr.

- Le chiffre de 3,500,000 fr. est adopté.

Garantie

« Droits de marque des matières d'or et d'argent : fr. 130,000. »

- Adopté.

Recettes diverses

« Droits de magasin des entrepôts, perçus au profit de l'État : fr. 220,000. »

« Recettes accidentelles : fr. 10,000.

« Ensemble : fr. 230,000. »

- Adopté.

Enregistrement et domaines

Droits additionnels et amendes

« Enregistrement (30 centimes additionnels) : fr. 10,400,000. »

La section centrale, d'accord avec M. le ministre des finances, propose le chiffre de 10,250,000 fr.

M. Moncheur. - Messieurs, nous voyons dans le rapport de la section centrale, que M. le ministre des finances a annoncé un projet de loi tendant à mieux assurer la perception des droits d'enregistrement et à réprimer les fraudes qui peuvent se commettre en ce qui concerne ces droits. Je conçois que l'expérience et la longue application de la loi du 22 frimaire an VII aient indiqué des améliorations à apporter à cette loi; mais je pense, messieurs, que ces améliorations ne doivent pas seulement avoir pour but de mieux assurer la perception de l'impôt, mais qu'il est aussi des dispositions de la loi de l'an VII qu'il faut changer pour en tempérer la rigueur, attendu qu'elle est parfois inutile au point de vue fiscal, et vexatoire pour les citoyens. C'est ce qui a été reconnu en France.

L'année dernière, une pétition a été adressée à la chambre, sur cet objet, et elle a été renvoyée au gouvernement, avec demande d'explications. Ces explications n'ont pas été données, l'objet ayant probablement été perdu de vue par M. le ministre de la justice; car je crois que c'est à lui que le renvoi a eu lieu.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - De quoi s'agissait-il?

M. Moncheur. - Voici ce dont il s'agit : Vous savez, messieurs, qu'un article de la loi du 22 frimaire interdit aux notaires de faire mention d'un acte sous seing privé, ou de faire un autre acte par suite d'un premier, avant que celui-ci ait été enregistré; or, de là résultent souvent de grands embarras, et la perte d'un temps précieux pour les parties; lorsqu'une liquidation un peu importante doit se faire, et que les intéressés, qui peuvent être venus de très loin, se trouvent réunis, il arrive souvent que plusieurs actes successifs doivent être faits, et que les uns sont basés sur les autres; mais alors il est impossible aux parties de continuer leurs opérations sans désemparer, parce qu'il doit s'écouler un certain temps avant que les premiers actes, qui doivent servir de point de départ aux opérations ultérieures, aient pu être enregistrés. On sait, en effet, qu'il faut quelquefois attendre deux ou trois jours avant que cet enregistrement ait pu avoir lieu, surtout dans certaines villes où les bureaux sont encombrés d'actes à soumettre à cette formalité.

C'est cet inconvénient grave qui a été signalé à la chambre par la pétition dont j'ai parlé, émanée du notaire Brun, d'Andennes.

En France, on a porté en 1824 une loi qui permet aux notaires de faire des actes en vertu d'autres actes qui ne sont pas encore enregistrés, et cela, à certaines conditions qui mettent le trésor à l'abri de toute perte.

Ainsi le second acte ne peut pas être enregistré avant que le premier ne l'ait été, et lorsqu'un notaire remet un acte à l'enregistrement, il doit y annexer ceux qui y sont mentionnés. Tout cela doit se faire dans le délai légal, et le notaire est personnellement responsable des droits auxquels les actes sous seing privé dont il a fait mention peuvent donner lieu.

De cette manière on a évité aux particuliers les difficultés qu'ils éprouvent encore chez nous, et le fisc est parfaitement garanti contre toute espèce de fraude.

J'ai cru, messieurs, devoir appeler l'attention du gouvernement sur cet objet, qui a réellement une certaine importance; car il ne faut pas sans nécessité aggraver la position des contribuables, et il était d'autant plus opportun de le faire en ce moment, qu'il s'agit, d'après ce qu'annonce M. le ministre des finances, d'apporter des modifications à la loi sur l'enregistrement.

(page 296) M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, depuis longtemps, j'ai été frappé de la nécessité de supprimer diverses formalités inutiles et de réduire les amendes en matières d'enregistrement. J'ai fait étudier dans ce but un projet de loi analogue à celui qui a été adopté en France en 1824.

Ce projet est prêt; je compte le déposer incessamment ; il fera droit à toutes les légitimes réclamations qui se sont élevées sous ce rapport. Il aura, en outre, cet avantage, de diminuer très notablement les écritures de l'administration. La plupart des amendes sont remises ou notablement réduites.

On adresse aujourd'hui des réclamations qui doivent être instruites et qui finissent en définitive par composer des dossiers très considérables. En fixant des amendes plus modérées, en diminuant les formalités inutiles, mais en n'accordant plus aucune modération, if y aura avantage et pour le public et pour l'administration.

M. Jullien. - Messieurs, je rappellerai à la chambre qu'au mois de janvier dernier, elle a renvoyé à M. le ministre des finances, avec demande d'explications, une pétition signalant le défaut d'encaissement d'une somme d'environ 200,000 fr. qui aurait dû être perçue du chef de la vente de la forêt de Chiny. Je prierai M. le ministre des finances de vouloir bien se faire reproduire ce dossier et de fournir les explications à la chambre.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, j'aurais pu, si j'avais été averti de la demande d'explications, déposer immédiatement sur le bureau les renseignements que réclame l'honorable préopinant ; ils sont prêts; mais je me suis abstenu de les adresser à la chambre par un scrupule qu'elle partagera, je pense. Il est démontré aujourd'hui que la réclamation qui a été instruite est une réclamation anonyme. Il a été impossible de découvrir le prétendu réclamant. Je crois que la chambre doit se mettre en garde contre de pareilles dénonciations, donnant lieu à des soupçons graves à charge de fonctionnaires publics. Il est certain que la réclamation est l'œuvre d'un anonyme ; si, dans cet état de choses, la chambre croit qu'il y a lieu de déposer les explications, je suis prêt à le faire.

M. Delfosse. - S'il n'y avait que la lettre anonyme dont M. le ministre des finances vient de parler, je serais le premier à demander qu'il ne soit donné aucune suite à cette affaire. Mais il y a autre chose, il y a les interpellations que l'honorable M. Jullien a adressées l'année dernière, il y a celles que j'avais adressées moi-même.

Je me suis plaint, à l'époque où M. Smits était ministre des finances, d'un acte que je considérais comme une violation de la loi et qui exposait l'Etat à une perte considérable ; on m'a opposé alors qu'une action était pendante devant les tribunaux. Il est nécessaire que nous sachions quelles ont été les suites de cette affaire. J'insiste pour que M. le ministre des finances dépose sur le bureau de la chambre un rapport qui nous apprenne tout ce qui s'est passé.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, l'honorable M. Jullien s'était borné, dans la dernière session, à proposer le renvoi au gouvernement, avec demande d'explications, de la pétition qui était arrivée à la chambre. J'ai fait connaître à l'assemblée que cette dénonciation émane d'une personne qui ne se fait pas connaître. Si la chambre veut qu'en cet état je donne les explications, je suis prêt à le faire.

Les explications qui avaient été demandées plusieurs années auparavant, par l'honorable M. Delfosse, ont donné lieu à des explications fournies par le ministre des finances de l'époque. Je croyais qu'en ce point l'affaire était entièrement épuisée.

M. Delfosse. - Il est bien entendu que mon intention n'a pas été d'adresser le moindre reproche à M. le ministre des finances. Je comprends très bien qu'il ait hésité à donner suite à une pièce anonyme; à sa place, j'aurais fait comme lui. Ce n'est pas au nom du pétitionnaire anonyme, dont nous ne devons pas nous préoccuper, que je demande un rapport complet sur l'affaire de la forêt de Chiny. C'est dans le but de connaître la vérité, c'est pour savoir si la violation do la loi que j'ai signalée dans le temps, si l'acte imprudent que j'ai blâmé n'a pas eu pour le trésor les conséquences désastreuses que je redoutais. La chambre, j'en suis sûr, s'associe tout entière à ma demande.

M. Lelièvre. - Les explications qu'on demande à M. le ministre sont provoquées par une dénonciation anonyme. Aucun membre de la chambre ne fait siens les faits qu'elle renferme. En cet état de choses, il faut, selon moi, passer à l'ordre du jour. Un anonyme est toujours un lâche, et il n'est pas de la dignité de la chambre d'informer sur des faits signalés par une voie odieuse.

- Un membre. - On peut donner des explications sans égard à la pétition anonyme.

- La discussion est close.

Il est entendu que demain M. le ministre des finances déposera sur le bureau les explications en réponse aux interpellations qui ont eu lieu, sans égard à la pétition anonyme.

Le chiffre de 10,250,000 fr., porté à l'article enregistrement est mis aux voix et adopté.


« Greffe (30 centimes additionnels) : fr. 300,000. »

- Adopté.


« Hypothèques (26 centimes additionnels) : fr. 1,650,000. »

- Adopté.


« Successions (30 centimes additionnels) : fr. 5,500,000. »

- Adopté.


« Timbre (sans additionnels) : fr. 300,000. »

- Adopté.


« Amendes : fr. 175,000. »

- Adopté.

Recettes diverses

« Indemnités payées par les miliciens pour remplacement et pour décharge de responsabilité de remplacement : fr. 70,000. »


« Amendes en matière de simple police, civile, correctionnelle, etc. fr. 140,000. »


« Produits des examens : fr. 15,000. »


« Produits des brevets d'invention : fr. 15,000. »


« Produits des diplômes des artistes vétérinaires ; fr. 1,000. »

- Adopté.

175,000

Discussion du tableau des crédits (II. Péages)

Enregistrement et domaines

Domaines

« Produits des canaux et rivières appartenant au domaine, droits d'écluse, ponts, navigation : fr. 880,000. »


« Produits de la Sambre canalisée : fr. 510,000. »


« Produits du canal de Charleroy : fr. 1,200,000. »


« Produits du canal de Mons à Condé : fr. 130,000. »


« Produits des droits de bacs et passages d'eau : fr. 90,000. »


« Produits des barrières sur les routes de première et de deuxième classe : fr. 1,750,000. »

« Ensemble : fr. 4,580,000. »

- Adopté.

Travaux publics

Postes

« Taxe des lettres et affranchissements : fr. 2,800,000. »


« Port des journaux et imprimés : fr. 125,000. »


« Droits sur les articles d'argent : fr. 15,000. »


« Remboursements d'offices étrangers : fr. 200,000. »


« Emoluments perçus en vertu de la loi du 19 juin 1842 : fr. 60,000. »

« Ensemble : fr. 3,200,000. »

- Adopté.

Marine

Service d'Ostende à Douvres

« Produits du service des bateaux à vapeur entre Ostende et Douvres : fr. 225,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des recettes (III. Capitaux et revenus)

Travaux publics

« Chemin de fer : fr. 14,500,000. »


« Produit des cartes de circulation dans les stations et sur les chemins de fer : fr. 25,000. »

« Ensemble : fr. 14,525,000. »

- Adopté.

Enregistrement et domaines

« Rachat et transfert de rentes, y compris l'aliénation de rentes constituées : fr. 1,500. »

- Adopté.


« Capitaux du fonds de l'industrie : fr. 70,000. »

- Adopté.


« Capitaux de créances ordinaires : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Prix de vente d'objets mobiliers; transactions en matière domaniale ; dommages et intérêts ; successions en déshérence : épaves : fr. 250,000. »

- Adopté.


« Prix de vente de domaines, en vertu de la loi du 27 décembre 1822, payés en numéraire ensuite de la loi du 28 décembre 1835, pour l'exécution de celle du 27 décembre 1822 et des lois des 30 juin 1840, 18 mai 1845 et 27 février 1846 : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Prix de coupes de bois, d'arbres et de plantations; vente d'herbes ; extraction de minerai de fer, de terre et de sable : 1,100,000. »

- Adopté.


« Fermages de biens-fonds et bâtiments, de chasses et de pêches ; arrérages de rentes ; revenus des domaines du département de la guerre : fr. 400,000. »

- Adopté.


« Produits de l'école vétérinaire et d'agriculture : fr. 50,000. »

- Adopté.


« Produits de l'établissement de Ruysselede : fr. 60,000. »

- Adopté.


« Intérêts de créances du fonds de l'industrie et de créances ordinaires : fr. 120,000. »

- Adopté.


(page 297) « Restitutions et dommages-intérêts en matière forestière : fr. 100. »

- Adopté.


« Restitutions volontaires : fr. 100. »

- Adopté.


« Abonnements au Moniteur, aux Annales parlementaires et au Recueil des lois : fr. 40,000. »

- Adopté.


« Produit du quart des salaires des conservateurs des hypothèques sur les transcriptions d'actes de mutations : fr. 25,000. »

- Adopté.

Trésor public

« Produits divers des prisons (pistoles) cantines, vente de vieux effets : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Intérêts de 13,438 actions de l’emprunt de 30,000 millions de francs, à 4 p. c., provenant de l’emploi de l’encaisse de l'ancien caissier général, sans préjudice aux droits envers le même caissier, dont il est fait réserve expresse : fr. 537,520. »

- Adopté.


« Intérêts des capitaux tenus en réserve jusqu'à la liquidation définitive des créances mentionnées à l'article 64 du traité conclu entre la Belgique et le royaume des Pays-Bas, le 5 novembre 1842 : fr. 299,500. »

- Adopté.


« Produits de l'emploi des fonds de cautionnements et consignations : fr. 480,000. »

- Adopté.


« Produits des actes des commissariats maritimes : fr. 50,000. »

- Adopté.


« Produits des droits de pilotage et de fanal : fr. 575,000. »

- Adopté.


« Moitié des intérêts du cautionnement de deux millions de francs de la Société de la Dendre : fr. 42,750. »

- Adopté.


« Produit de la retenue de 1 p. c. sur les traitements et remises : fr. 240,000. »

- Adopté.


M. le président. - Un article additionnel, qui trouvera sa place avant le libellé des intérêts du cautionnement de la Société de la Dendre sera conçu en ces termes, comme au budget de l'exercice courant :

« Intérêts attribués au trésor sur les émissions de billets de banque de la Société Générale pour favoriser l'industrie nationale (loi du 22 mai 1848) : fr. 180,000. »

Discussion du tableau des recettes (IV. Remboursements)

Contributions directes

« Prix d'instruments à l'usage des employés de l'administration des contributions, etc. : fr. 1,000. »


« Frais de perception des centimes provinciaux et communaux : fr. 100,000. »

« Ensemble : fr. 101,000. »

- Adopté.


« Enregistrement et domaines

« Recouvrement de reliquats de comptes arrêtés par la cour des comptes : fr. 50,000. »

- Adopté.


« Bénéfice éventuel produit par la fonderie de canons à Liège, sur la fabrication d'armes de guerre à exporter pour l'étranger : fr. 25,000. »

- Adopté.

Avances faites par le ministère des finances

« Frais de poursuites et d'instances : fr. 5,000. »

- Adopté.


« Recouvrement sur les communes, les hospices et les acquéreurs des bois domaniaux, pour frais de régie de leurs bois : fr. 135,000. »

- Adopté.


« Frais de perceptions faites pour le compte de tiers : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Frais de perceptions faites pour compte des provinces : fr. 7,000. »

- Adopté.

Avances faites par le ministère de la justice

« Frais de justice en matière criminelle, correctionnelle, de simple police, etc. : fr. 150,000. »

- Adopté.


« Frais d'entretien et de transport des mendiants, d'indigents, d'enfants trouvés, etc. : fr. 1,000. »

- Adopté.

Avances faites par le ministère de l'intérieur

« Frais de justice devant les conseils de discipline de la civique : fr. 100. »

- Adopté.

Autres

« Pensions à payer par les élèves de l’école militaire : fr. 27,200. »

- Adopté.


« Annuités à payer par les propriétaires riverains du canal de la Campine (1ère et 2ème sections), du canal d'embranchement vers Turnhout et de la première section du canal de Zelzaete : fr. 148,000. »

M. de Renesse. - Messieurs, par la loi du 29 septembre 1842, qui a mis à la disposition du gouvernement le premier crédit nécessaire à la construction du canal de la Campine, et par celle du 10 février 1843, qui a décrété son exécution, il a été stipulé que cette voie de navigation serait exécutée avec le concours des communes et des propriétés intéressées; que, préalablement à toute exécution, les conditions de ce concours seraient déterminées par la loi.

Dès que les conditions si onéreuses de cet impôt-concours furent connues des habitants de la Campine, ils s'empressèrent d'adresser les plus vives réclamations au gouvernement et aux chambres, pour leur démontrer qu'il serait peu équitable d'imposer une charge aussi lourde à une contrée si peu riche que la Campine, peu favorisée jusqu'alors par des travaux publics, tandis que la plupart des autres parties de la Belgique avaient été dotées, surtout depuis 1830, d'un grand nombre de travaux d'utilité publique exécutés aux frais de l'Etat ; que des routes, des canaux, des chemins de fer avaient été successivement décrétés dans les provinces les plus riches du pays, sans que l'impôt-concours eut été exigé, soit de ces provinces, soit des propriétés (erratum, page 313) communales ou privées; qu'il serait injuste de faire une large application d'un principe de concours envers un pays pauvre et dénué de ressources.

Malgré la vive opposition de la part des habitants de la Campine et des représentants qui crurent devoir défendre leurs intérêts, le concours fut maintenu.

D'après l'article 4 de la loi du 10 février 1843, il fut stipulé que les propriétés assujetties au concours seraient réparties, à partir du franc-bord du canal, en cinq zones, chacune de 1,000 mètres de profondeur.

Les annuités à payer pendant 25 années consécutive sont fixées pour les propriétés :

Par hectare : de la première zone à 2 fr., de la deuxième zone à 1 fr. 40, de la troisième zone à 1 fr., de la quatrième zone à 60 c. et de la cinquième zone à 40 c.

D'après l'article 5, l'annuité est due pour les propriétés riveraines de chaque section, à partir du jour où la section aura été livrée à la navigation.

D'après l'article6, l'annuité serait rachetable à raison de 100 fr. de capital pour 7 fr. 10 d'annuité; en cas de rachat, les débiteurs auraient l'option de s'acquitter, soit par un payement en numéraire, soit par la cession de partie de leurs propriétés, jusqu'à due concurrence et aux prix suivants :

Propriétés de la première zone, par hectare fr. 130, de la deuxième zone 100 fr., de la troisième zone 80 fr., de la quatrième zone 60 fr. et de la cinquième zone 50 fr.

La rente annuelle à payer pendant 25 années consécutives, par les propriétés riveraines du canal de la Campine, est portée aux développements du budget des voies et moyens, au chapitre des remboursements.

Pour la première section du canal à 24,676 fr., pour la deuxième section à 29,654 fr. 80 et pour le canal d'embranchement vers Turnhout à 22,962 fr. 10. Total 77,292 fr. 90.

Ce concours annuel est réellement une charge accablante pour une contrée offrant si peu de ressources par elle-même : au lieu d'en retirer les capitaux au moyen de cette surcharge extraordinaire des contributions, il faudrait plutôt tâcher de les y attirer, pour y faire procéder avec plus d'activité au défrichement des terrains incultes, à leur culture, soit au moyen des irrigations, soit à leur boisement.

Ce concours forcé, appliqué en premier lieu à la Campine, ne me paraît pas équitable, lorsque surtout la plupart des autres localités du pays en ont été exemptées jusqu'ici; il aurait dû, avant tout, être appliqué à tous les travaux d'utilité publique, exécutes depuis 1830 aux frais de l'Etat.

Avant la loi du 10 février 1843, il n'avait jamais été question de faire revivre les dispositions de la loi du 10 septembre 1807; il paraît même qu'en France, ni sous le royaume des Pays-Bas. ni en Belgique, le concours à charge des particuliers n'a pas été invoqué, sauf le concours à la construction du canal de Zelzaete, et encore ce concours est fixé sur une tout autre base que celui de la Campine. Au moyen de la construction du canal de Zelzaete, il s'agissait d'assainir, d'assécher des terrains humides et marécageux ; directement, par le fait de son creusement, on a donné une plus-value réelle aux propriétés riveraines, il n'en est pas de (page 298) même pour la Campine, où il faut faire des frais assez considérables, soit pour l'irrigation des terrains incultes, soit pour leur culture on grains, ou pour leur boisement.

Si nous examinons les pétitions adressées aux chambres, par les habitants de la Campine, nous pouvons nous convaincre facilement que, si ce concours forcé était maintenu, il serait très fatal aux intérêts de cette contrée, si peu riche.

Ce concours me paraît, en outre, exagéré dans son application ; je ne citerai, à cet égard, que les faits qui se rapportent à la première section de ce canal, située sur le territoire de la province de Limbourg; il est démontré, par les pétitions des habitants de cette contrée, que cet impôt onéreux, réparti sur une population de 6,612 âmes, s'élève annuellement, pendant 25 années, à plus de 24,655 fr. ; en capital, cette charge extraordinaire atteint le chiffre énorme de 616,375 fr., sur une dépense environ de 1,300,000 fr. que cette section du canal a coûtée; ce qui fait annuellement près de 4 fr. par tête ; le principal de la contribution foncière, personnelle et des patentes, monte pour cette contrée imposée à 17,660 fr., par conséquent l'impôt-concours dépasse annuellement la contribution ordinaire de 7,095 fr.; donc, chaque franc de contribution paye 1 fr. 40 de concours.

Si l'on prend isolément la commune de Lommel, pour faire l'application de cet impôt-concours, les résultats en sont encore plus énormes ; le concours égale et surpasse très souvent le revenu net cadastral; chaque habitant y est imposé à une contribution annuelle de 6 fr. 50 c, et pour les propriétés imposées, ce concours s'élève à plus de trois fois la contribution foncière.

Il suffit d'avoir cité ces données, pour pouvoir juger que cet impôt extraordinaire est intolérable pour les habitants de la Campine, et qu'il ne peut être maintenu.

Aussi, par suite de l'établissement d'un concours si onéreux, il est résulté, que, depuis la construction du canal, les propriétés cultivées, loin d'avoir augmenté de valeur, ont sensiblement diminué ; ce qui doit être attribué à la surcharge écrasante de cet impôt extraordinaire.

Si la loi sur le concours doit recevoir son exécution, la Campine subirait une perte très notable ; car, cette surcharge des contributions arrêteraient les projets de défrichement et d'amélioration; elle serait contraire au but que la canalisation de la Campine devrait atteindre; il est en outre à observer que les irrigations, qui pourraient donner une plus-value plus immédiate aux propriétés riveraines du canal, ne sont guère possibles pour la plupart des terrains de la première section, où le canal a dû être exécuté en déblais de 5 à 6 mètres de profondeur, où, par conséquent, les irrigations au moyen du canal ne peuvent être appliquées aux défrichements des bruyères.

Le conseil provincial du Limbourg, prenant en considération les justes réclamations des habitants de la Campine, a cru devoir s'adresser au gouvernement, pour obtenir l'abrogation de la loi du 10 février 1843; il a pensé qu'il serait peu équitable de maintenir cet impôt odieux et onéreux, pour cette contrée si peu favorisée de la nature, lorsque, depuis 1830, un grand nombre de travaux publics ont été exécutés aux frais de l'Etat, sans que ce concours ait été stipulé pour les autres parties riches et populeuses de la Belgique.

Je viens appuyer les justes réclamations des habitants de la Campine: j'espère que le gouvernement, mieux informé sur le résultat fâcheux de l'impôt-concours, par l'enquête qui vient d'avoir lieu, prendra en sérieuse considération la position tout exceptionnelle de cette contrée, par la charge accablante qui a été imposée à ses habitants. Cette application du principe du concours n'aurait certes pas été exigée de la Campine si, lors de la discussion de la loi du 10 février 1843, l'on n'avait été induit en erreur par des appréciations et des calculs exagérés, qui ont été en partie la cause que ce concours extraordinaire a été établi, au grand détriment des intérêts d'une contrée qui n'a été que trop longtemps délaissée, par tous les gouvernements, qui se sont succédés jusqu'ici en Belgique; l'on peut, en outre, observer que la construction du canal de la Campine est un ouvrage d'un intérêt général, devant profiter à plusieurs provinces ; qu'il serait peu équitable d'exiger que la contrée traversée par ce canal soit seule chargée de cet impôt-concours, pendant un espace de 25 années.

M. Coomans. - Je n'ajouterai qu'un mot aux observations très fondées de l'honorable M. de Renesse. La partie financière de la loi du 8 février 1843 n'est pas à l'abri de la critique; celle qu'a faite l'honorable préopinant est très juste. Je suis convaincu que personne d'entre vous ne le contestera, cette loi a introduit un principe nouveau, celui qui tend à faire contribuer aux travaux d'utilité publique les propriétaires qui sont censés en profiter. Si ce principe était généralement appliqué, s'il avait été suivi pour la construction des canaux, des routes, certes la Campine ne se plaindrait pas, elle subirait la conséquence d'un principe juste en soi, équitablement, généralement applique ; mais sous un autre rapport, la loi dont nous demandons l'abrogation partielle est étrange, elle soumet à la même contribution toutes les propriétés riveraines, bien qu'il y ait des propriétés qui, loin d'avoir gagné à la construction du canal, y ont perdu. La preuve de cette assertion est très facile.

Le canal a été construit au point de vue agricole, pour favoriser les défrichements au moyen des irrigations, mais il est évident que l'irrigation n'est possible que pour les terrains placés au-dessus du niveau des eaux, et il y a une foule de terres que le canal ne pourra pas arroser parce qu'elles sont plus hautes que lui, et que depuis le commencement du monde l'eau coule de haut en bas. Comment voulez-vous donc que les propriétés situées au-dessus du niveau soient irriguées?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Et le transport des engrais!

M. Coomans. - Je ne viens pas nier que la construction du canal soit une chose précieuse pour la Campine; la Campine en remercie la législature; mais il est inexact de dire que ce canal soit également utile à tous les riverains. S'il leur a profité, il a profité plus encore aux villes qui sont en rapport avec la Campine ; Liège y trouve un débouché nouveau pour ses produits industriels et autres.

Je finis en priant de nouveau l'honorable ministre des finances de vouloir bien examiner attentivement la question, et après s'être convaincu que les réclamations sont justes, conviction qu'il acquerra sans doute, de prendre l'initiative et de proposer l'abrogation d'une loi qui n'a pas donné un sou au trésor et qui est aussi impraticable qu'injuste.

M. de Theux. - Cette question me paraît absolument de la compétence de MM. les ministres de l'intérieur et des travaux publics. Eux seuls peuvent apprécier les résultats de l'enquête quand elle aura été faite.

Si la loi sur le concours des riverains du canal de la Campine est fondée en justice, vous vous rappellerez qu'on a décidé le concours en même temps que l'emprunt sans une enquête préalable.

En admettant une disposition si générale, on a donné lieu à une foule de réclamations. Le gouvernement a ordonné une enquête. Il serait difficile d'émettre une opinion, avant d'avoir étudié cette enquête à fond.

M. Bruneau. - Il y a un ancien proverbe qui conseille de ne pas réveiller le chat qui dort. Les honorables membres auraient bien fait de suivre ce conseil et de se contenter du passage suivant du rapport :

« Les annuités à payer par les propriétaires riverains du canal de la Campine (première et deuxième sections), du canal d'embranchement vers Turnhout, et de la première section du canal de Zelzaete, figurent dans cet ensemble de recettes pour 148,500 fr. somme égale à celle du budget de 1849. Mais cette année-ci, comme les années précédentes, il n'est rien rentré, sauf une somme insignifiante dans le courant de 1845. A la suite des réclamations faites au nom des riverains, une commission a été nommée par les départements des travaux publics et des finances, et en attendant ses conclusions, le recouvrement des annuités a été suspendu.

« On ne peut se dispenser de faire figurer au budget une recette qui est la conséquence d'une loi. Seulement il est plus que probable qu'elle ne sera pas recouvrée en 1850. »

Que peut-on demander davantage? Qu'on attende les résultats de l'enquête. La chambre apprécie les intentions des honorables membres. Mais mieux aurait valu ne pas réveiller la question.

M. Coomans. - Ces faits ne m'étaient pas inconnus. Je sais parfaitement que les propriétaires riverains n'ont pas encore concouru. Si je réveille le chat qui dort, c'est que je sais qu'il n'est pas méchant, et que notre cause est tellement bonne que nous ne craignons pas de la soumettre à la chambre en toute circonstance.

Mais si nous en parlons, ce n'est pas pour le plaisir d'interrompre les travaux de la chambre, c'est que le chiffre qui figure à titre de non-valeurs au budget pèse sur les propriétaires riverains comme une menace, c'est que la perspective très fâcheuse d'avoir à concourir plus tard au payement des annuités arrête les défrichements.

Les propriétaires ne défrichent pas aujourd'hui, parce qu'ils craignent que, s'ils parviennent à tirer quelque chose du sol ingrat qui leur appartient, le fisc ne vienne en prendre une partie. Aujourd'hui, il ne le fera pas : il ne demandera pas 2 fr. sur un hectare qui (erratum, page 373) rapporte 50 c. Mais le jour où vous aurez effacé cette non-valeur dans votre budget, vous n'aurez pas perdu un centime cl vous aurez satisfait à des réclamations réellement fondées.

- L'article est adopté.

Trésor public

« Recouvrement d'avances faites par le ministère de la justice aux ateliers des prisons, pour achat de matières premières : fr. 825,000. »

- Adopté.


« Recettes accidentelles : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Versements à faire par les sociétés anonymes, les concessionnaires de chemins de fer, de routes, de canaux et de ponts : fr. 88,000. »

- Adopté


« Abonnement des provinces, pour réparations d'entretien dans les prisons : fr. 23,600. »

- Adopté.


« Abonnement des provinces, pour le service des ponts et chaussées : fr. 61,200. »

- Adopté.


« Chemin de fer rhénan. Dividendes de 1849 : fr. 160,000. »

- Adopté.

Fonds spécial

« Produit des ventes de biens domaniaux, autorisées par la loi du 5 février 1843 : fr. 900,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des recettes (V. Recettes pour ordre)

Chapitre premier. Trésor public

Articles 1 à 7

(page 299) « Art. 1er. Cautionnements versés en numéraire dans les caisses du trésor public de Belgique, par des comptables de l'Etat, par des receveurs communaux, des receveurs de bureaux de bienfaisance, des préposés aux bureaux de station de l'administration du chemin de fer, etc., pour garantie de leur gestion, et cautionnements fournis par des contribuables pour garantie du payement de droits en matière de douanes, d'accises, etc. : fr. 1,200,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Caisses des veuves des fonctionnaires civils : fr. 1,000,000.’

- Adopté.


« Art. 3. Caisse des veuves et orphelins des officiers de l'armée : fr. 160,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Caisses des pensions et de prévoyance des instituteurs primaires : fr. 150,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Masse d'habillement et d'équipement de la douane : fr. 250,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Subsides offerts pour construction de routes : fr. 300,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Parts des communes dans les frais de confection des atlas des chemins vicinaux : fr. 20,000. »

- Adopté.

Chapitre II. Contributions directes, douanes et accises

Articles 8 à 13

« Art. 8. Répartition du produit d'amendes, saisies et confiscations en matière de contributions directes, douanes et accises : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 9. Frais d'expertises de la contribution personnelle : fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 10. Droits de magasin des entrepôts au profit des communes : fr. 40,000. »

- Adopté.


« Art. 11. Recouvrement d'impôts au profit des provinces : fr. 2,680,000. »

- Adopté.


« Art. 12. Recouvrement d'impôts au profit des communes : fr. 2,320,000. »

- Adopté.


« Art. 13. Taxe provinciale sur les chiens : fr. 260,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Fonds de tiers

Enregistrement et domaines
Articles 14 à 16

« Art. 14 Amendes diverses et autres recettes soumises aux frais de régie : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 15. Amendes de consignations et autres recettes non assujetties aux frais de régie : fr. 1,000,000. »

- Adopté.


« Art. 16. Recouvrement de revenus pour compte de provinces, déduction faite des frais de régie : fr. 470,000. »

- Adopté.

Consignations
Article 17

« Art. 17. Consignations de toute nature : fr. 1,500,000. »

- Adopté.

M. le président. - Nous sommes arrivés au terme du budget. Le vote sur l'ensemble est suspendu, puisque deux propositions ont été renvoyées à la section centrale.

Pièces adressées à la chambre

M. David (pour une motion d’ordre). - Lorsqu’au commencement de la séance on a analysé les pétitions, je n’ai pas eu connaissance d’une pétition très importante de la chambre de commerce de Verviers. C’est pendant la séance que j'en ai pris connaissance.

Vous en avez ordonné le dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les denrées alimentaires. Je viens vous demander de réformer cette décision et d'ordonner le renvoi à la commission des pétitions avec demande d'un rapport avant la discussion de la loi sur les denrées alimentaires.

Voici l'importance de cette pétition.

Dans le rapport de la section centrale sur les denrées alimentaires, on s'est étayé d'un rapport de la chambre de commerce de Verviers de 1845; on prétend que cette chambre a demandé alors un droit de fr. 1-70 sur les grains. Effectivement, elle l'avait demandé. Mais elle avait fait une masse de réserve.

En 1848, on l'a consultée, et elle a conclu à la libre entrée.

Je demanderai donc que ce soit rectifié au moyen d'un rapport de la commission des pétitions.

M. le président. - Je ferai observer que la discussion sur le projet de loi sur les denrées alimentaires commencera demain.

M. Tesch. - Depuis la présentation du rapport, la chambre a ordonné le dépôt des pétitions sur le bureau, pendant la discussion du projet de loi sur les denrées alimentaires. Il doit en être de même pour cette pétition. Si vous vous écartiez de ce précédent, il faudrait ordonner le renvoi à la section centrale qui aurait à vérifier jusqu'à quel point la citation qu'elle a faite est conforme à la vérité.

M. de Bocarmé. - Dans ce cas, on doit renvoyer toutes les pétitions à la section centrale.

M. Tesch. - L'honorable membre oublie que la discussion commencera demain ou après-demain.

- Plusieurs membres. - C'est impossible. Il y a deux seconds votes.

M. le président. - Le tableau des amendements à la loi sur les banqueroutes n'est pas encore imprimé. Voici donc l'ordre du jour de demain : 1° budget des voies et moyens; 2° caisse de retraite (second vote) ; 3° denrées alimentaires.

M. Tesch. - Il me semble qu'il est impossible de faire d'ici à demain un rapport qui devra nécessairement embrasser toutes les pétitions. Car on ne peut faire une distinction entre la pétition de Verviers et celles qui nous sont venues des autres points de la Belgique. Je demande donc que la chambre maintienne sa décision.

M. Rousselle. - Je ne vois pas pourquoi on ferait une exception pour la pétition de la chambre de commerce de Verviers.

L'honorable M. David nous a dit que les citations du rapport sont textuelles, mais qu'en 1848 la chambre de commerce de Verviers a émis un autre avis. Les membres de la chambre pourront avoir connaissance de ce nouvel avis, en prenant lecture de la pétition, qui sera déposée sur le bureau, comme toutes les autres pétitions présentées depuis le dépôt du rapport de la section centrale.

M. David. - Je demande à modifier ma proposition, en ce sens que la pétition soit renvoyée à la section centrale pour faire, si possible, un rapport verbal à la séance de demain.

- La chambre, consultée, décide qu'elle maintient sa première décision.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du ministère de la justice, pour la fabrication, dans la prison de Saint-Bernard, de toiles destinées à l'exportation

Dépôt

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - J'ai l'honneur de déposer un projet de loi demandant ouverture d'un crédit de deux millions pour la continuation des travaux de l'établissement de Saint-Bernard, et portant en recette au budget de 1850 une somme équivalente de deux millions.

Je joins au projet un exposé complet de la situation et des résultats des travaux jusqu'à ce jour, avec toutes les pièces à l'appui.

- La chambre donne acte à M. le ministre de la présentation de ce projet de loi, en ordonne l'impression et la distribution, et le renvoie à l'examen des sections.

Projet de loi assimilant des marchandises non dénommées aux tarifs des douanes

Dépôt

Projet de loi qui déclare diverses marchandises libres à la sortie

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai l'honneur de présenter à la chambre deux projets de loi :

Le premier a pour objet de donner connaissance à la chambre de l'arrêté royal par lequel des marchandises non dénommées au tarif des douanes ont été assimilées;

Le second a pour objet, conformément à la loi votée le 16 juillet dernier, de faire connaître à la chambre et de soumettre à son approbation l'arrêté qui a levé un grand nombre de prohibitions à la sortie.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ces projets de loi. La chambre en ordonne l'impression et la distribution et les renvoie à l'examen des sections.

La séance est levée à quatre heures et demie.