(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1848-1849)
(Présidence de M. Verhaegen.)
(page 88) M. de Luesemans procède à l'appel nominal à une heure et quart.
- La séance est ouverte.
M. A. Vandenpeereboom donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.
M. de Luesemans donne lecture d'une dépêche de M. le ministre de l'intérieur, accompagnant l'envoi de 110 exemplaires des nouvelles tables de mortalité, extraites du tome IV du Bulletin de la commission centrale de statistique.
- Distribution aux membres et dépôt à la bibliothèque.
M. le président. - Le gouvernement se rallie-t-il au projet de la commission?
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - M. le président, l'honorable rapporteur de la commission a bien voulu me communiquer, avant l'impression de son rapport, les diverses modifications que la commission désirait introduire dans le projet. Nous en avons conféré ensemble, et nous nous sommes mis d'accord sur tous les points.
Je demande donc que la discussion s'établisse sur le projet de la commission. Je me réserve cependant de faire quelques observations dans le cours de la discussion.
M. le président. - En conséquence, la discussion s'établit sur le projet de la commission.
La discussion générale est ouverte.
M. Lelièvre. - Le projet soumis à vos délibérations est l'un de ceux que les hommes sérieux réclament depuis longtemps avec l'impatience la plus légitime. Son importance est incontestable, il touche aux graves intérêts du commerce, au crédit public et aux droits privés les plus sacrés. Il est appelé à sauvegarder, en cas de faillite, le patrimoine commun et à empêcher que le sursis ne continue d'être un moyen d'éluder l'exécution des obligations les plus impérieuses; il a pour objet de mettre fin aux inconvénients auxquels a donné lieu, sous ces rapports, l'état actuel de la législation, et d'introduire des dispositions plus conformes à la justice et à nos institutions.
Nous le reconnaissons volontiers, la loi nouvelle contient des améliorations incontestables, elle simplifie la procédure sur les faillites, elle diminue les frais énormes résultant de cette mesure dans l'état actuel des choses, elle accélère une liquidation qui aujourd'hui se fait souvent attendre pendant nombre d'années; mais, à mon avis, il eût été possible de supprimer encore certaines formalités qu'on a cru devoir conserver, et ainsi d'entrer d'un pas plus décidé dans la voie qui doit aboutir à faire disparaître cette multiplicité de formes inutiles, vice fondamental de la législation actuelle.
D'un autre côté, le projet a été modelé sur le Code français de 1838, auquel on a emprunté la plupart des dispositions; mais on a perdu de vue les difficultés qu'a fait naître en France l'interprétation de la loi nouvelle; on a négligé presque complètement la jurisprudence des arrêts sur les questions qui se sont présentées; de sorte qu'à peine la loi serait votée en Belgique que s'élèveraient à l'instant même, concernant son exécution, des contestations sérieuses qu'il est du devoir du législateur de prévenir.
C'est ainsi, messieurs, que l'une des principales questions que lait naître le régime des faillites est de savoir si la masse créancière doit être considérée comme l'ayant cause du failli et si en conséquence les actes (page 89) sous seing privé émanés de celui-ci peuvent être opposés aux créanciers, eh bien, sur cette question, qui se présente à chaque instant, le projet est complètement muet.
On regrette de voir semblable silence relativement aux transports de créances qui, consentis avant la cessation de payement, seraient notifiés au débiteur du failli avant ou après le jugement déclaratif de la faillite.
La femme qui dans le cas de l'article 558 est admise à fournir la preuve que les biens acquis par elle ont été payés de ses deniers, sera-t-elle tenue de reproduire un acte authentique, ou bien un titre sous seing privé ayant date certaine avant la faillite sera-t-il suffisant? Telle est encore une question qu'a soulevée la législation française, que la jurisprudence a résolue et que le projet ne paraît pas même prévoir.
La femme qui, à défaut des justifications spéciales lui imposées par les articles 556 et 557, ne pourrait réclamer les droits lui attribués par ces dispositions, pourra-t-elle néanmoins se présenter comme créancière chirographaire?
Le vendeur, auquel l'article 548 enlève le privilège ordinaire, conservera-t-il l'action personnelle en résolution ?
La lacune que présente le projet sur ce dernier point a été signalée par la commission.
Enfin une foule d'autres questions, dont les cours ont eu à s'occuper, ne trouvent aucune solution dans le projet, qui renferme ainsi des lacunes importantes qu'il est indispensable de combler dans l'intérêt des citoyens.
On le sait, messieurs, les changements dans la législation multiplient les procès, si l'on ne s'attache avec soin à prévoir les difficultés qui peuvent naitre des nouvelles dispositions et à les résoudre d'une manière précise. J'ose donc appeler votre attention sur un point qui la mérite à tous égards.
La loi qu'on vous propose soulève une autre discussion dont je dois vous entretenir, c'est celle qui est relative à l'époque à laquelle doit être fixé le dessaisissement du failli.
Cette question est l'une de celles qui sous le régime actuel ont donné lieu aux débats les plus sérieux, soit devant les tribunaux, soit même au sein du parlement. Les uns sont d'avis que le failli n'est dessaisi de l'administration de ses biens que par le jugement déclaratif de la faillite; d'autres, dont je partage l'opinion, pensent que la cessation de payement constituant la faillite, il y a dessaisissement du moment que le fait existe; mais pour que ce fait existe légalement avec toutes ses conséquences, pour qu'il puisse être reconnu comme tel, il est indispensable qu'il apparaisse avec les caractères de publicité suffisants pour que les tiers soient considérés comme en étant suffisamment informés.
Un arrêt de la cour de Bruxelles du 9 février 1826, dans la célèbre affaire Grietens, a décrété ces principes; c'est, à mon avis une des rares décisions qui ont sainement apprécié la question en conciliant les principes avec le crédit public et l'intérêt des tiers.
Il porte qu'à l'exemple des deux premières circonstances indiquées par l'article 441 du Code de commerce actuel comme caractéristiques de la faillite et propres à en fixer l'ouverture, la troisième circonstance exprimé par les mots : soit par la date de tous actes constatant le refus d'acquitter ou de payer des engagements de commerce, doit avoir le caractère de publicité nécessaire pour qu'elle soit censée mettre chacun sur ses gardes, afin qu'autant que possible, personne ne soit victime de l'ignorance de faits qui n'auraient pu parvenir à sa connaissance.
A mon avis, telle est la vraie doctrine sur la matière; et remarquez-le bien, sous ce régime, que rien ne nous empêche d'adopter, ce n'est pas le dessaisissement qui donne lieu à des inconvénients, seulement les juges doivent prendre garde de ne faire remonter la faillite qu'à une époque où, d'après les circonstances, la cessation de payement doit être réputée avoir eu une publicité suffisante pour être connue des tiers.
Le principe ainsi compris est de la plus haute justice. Le débiteur dont la cessation de payement est révélée par des faits patents est dessaisi d'une manière absolue, et les actes quelconques par lui posés ne sauraient avoir aucun effet.
Je ne puis donc admettre, sous ce rapport, le projet tel qu'il est proposé par la commission.
Une disposition à laquelle il m'est encore impossible de me rallier, c'est l'article 442 qui ne permet pas de reporter la faillite à une date antérieure de plus de trois mois au jugement déclaratif, délai étendu par la commission. Messieurs, la cessation de payement est un fait que l'on doit reconnaître, son existence doit être fixée à sa véritable date et l'on ne peut changer celle-ci par une disposition législative sans créer dans la loi une contre-vérité repoussée par la nature même des choses.
Mais, messieurs, a-t-on bien pesé les conséquences de la disposition que l'on veut introduire? Les faits les plus patents, les plus notoires, attesteraient l'état de faillite à une époque déterminée, il y aurait même cessation de pavement annoncée par une convocation des créanciers et le juge pourrait se voir contraint, nonobstant l'évidence, à ne reporter l'ouverture de la faillite qu'à six mois. Pareil système pourrait même couvrir des fraudes caractérisées et légitimer des actes abusifs. Disons-le franchement, une innovation qui tend à détruire la réalité des choses n'est pas heureuse, elle ne saurait trouver place dans notre législation.
Le projet donne lieu à d'autres observations. C'est ainsi que tandis qu’il considère comme constituant soit la banqueroute frauduleuse, soit la banqueroute simple, les nouveaux faits que pour la première fois il érige en crimes ou délits, il ne prononce aucune peine et ne se réfère pas même au Code pénal, tandis que les articles 402, 403 et 404 de ce Code ne comminent des pénalités que contre les faits prévus par le Code de commerce actuel.
D'autre part, s'écartant de la loi française de 1838. l'article 381 du projet autorise la cour d'assises à annuler, même d'office, toutes conventions et actes frauduleux, et la commission a même fait un pas de plus en conférant à la cour des pouvoirs plus étendus. Pareille disposition, de nature à nuire à des tiers qui peuvent même ne pas être en cause, est d'autant plus exorbitante, que le personnel des cours d'assises étant réduit à trois juges, ceux-ci seront appelés à se prononcer en dernier ressort sur des intérêts prives très considérables et sur le mérite des conventions les plus importantes.
Ce système, innovant la législation en vigueur, me paraît dangereux, il ne sauvegarde pas suffisamment la fortune des citoyens, je ne puis lui donner mon assentiment.
J'arrive à la partie du projet relative au sursis.
L'arrêté-loi du 25 novembre 1814 contenait en cette matière des dispositions qui depuis longtemps ont été l'objet de justes critiques L'autorité ministérielle était investie du droit de décréter une mesure suspensive de toute poursuite contre un débiteur. Evidemment il y avait là une confusion de pouvoirs, il y avait empiétement sur les attributions des tribunaux. Le droit de vérifier s'il existe de justes causes de suspendre l'exécution de contrats ou d'obligations quelconques appartient naturellement au pouvoir judiciaire, parce qu'il s'agit ici d'une contestation relative aux droits civils.
Si l'article 1244 du Code civil autorise les juges à accorder des délais pour le payement dans des cas particuliers, il est impossible que le même pouvoir ne leur soit pas déféré lorsqu'il s'agit d'une suspension arrêtant l'action de tous les créanciers en général.
Une obligation est modifiée lorsque son terme est reculé, lorsque celui à qui elle est due voit son droit paralysé momentanément. Or, une mesure qui altère l'exercice de droits privés est du ressort du pouvoir judiciaire. Le projet ramène les choses au droit commun et aux vrais principes lorsqu'il confie aux cours d'appel un droit qui rentre essentiellement dans le cercle de leurs attributions.
D'un autre côté, on doit applaudir au projet, lorsqu'il restreint aux commerçants le bénéfice d'une mesure que l'arrêté de 1814 rendait applicable à tout débiteur. On conçoit cette disposition extraordinaire, lorsqu'il s'agit d'un négociant que des circonstances imprévues placent dans l'impossibilité momentanée de satisfaire à ses obligations. Les besoins du commerce peuvent justifier semblable dérogation aux principes, mais étendre cette faveur à tout débiteur quelconque, c'est évidemment faire la règle de ce qui ne doit être que l'exception ; c'est laisser à tous les débiteurs des espérances qu'il est dangereux d'entretenir; c'est porter atteinte à la foi des contrats, en général, et perpétuer des inconvénients dont la législation actuelle a fourni de nombreux exemples.
Je reproduirai, du reste, une observation que j'ai déjà présentée relativement à la première partie du projet. On me paraît encore avoir perdu de vue certaines difficultés qui déjà se sont présentées sous la législation actuelle.
Lorsqu'un sursis définitif a été accordé et que le débiteur sollicite une prolongation en vertu du paragraphe 3 de l'article 605, le tribunal de commerce sera-t-il autorisé à accorder un sursis provisoire, ou bien cette mesure ne peut-elle être décrétée qu'antérieurement à un premier sursis, comme l'ont décidé les cours de Belgique à diverses reprises? Voilà ce que ne nous apprend pas le projet, et cependant cette question peut se présenter assez souvent pour qu'elle nécessite une disposition claire et positive.
Je me bornerai, pour le moment, à ces observations et sous réserve de proposer les modifications que me paraissent réclamer diverses dispositions, je pense que la loi nouvelle introduit, en général, des innovations heureuses, et que, sans être complètement satisfaisante, elle réalise cependant le progrès dans plusieurs de ses parties ; sous ce rapport, je suis disposé à lui donner un vote favorable.
M. Tesch, rapporteur. - Messieurs, il me semble qu'une discussion générale à propos de la législation sur les faillites, banqueroutes et sursis ne peut guère porter que sur la question de savoir s'il est opportun de modifier la législation actuelle ou de ne pas la modifier sur les idées générales qui ont présidé à la rédaction du projet. Nous sommes d'accord sur ces points avec l'honorable M. Lelièvre, de sorte que toute discussion ultérieure devient oiseuse.
La chambre comprendra que, dans une discussion générale, je ne puis suivre l'honorable membre sur le terrain où il s'est placé. Il a fait la critique de divers articles. Je lui répondrai, quand nous arriverons à la discussion de ces articles. Ce n'est qu'alors que la chambre pourra bien se rendre compte des difficultés qui sont soulevées par l'honorable M. Lelièvre, et de la solution que croient devoir leur donner le gouvernement et la commission.
M. le président. - J'ajouterai à ce que vient de dire l'honorable rapporteur, qu'il serait utile que l'honorable M. Lelièvre voulût bien, dès aujourd'hui, présenter les divers amendements qu'il se propose de présenter et qui seront la conséquence de la critique qu'il a faite de quelques dispositions. Nous aurions ainsi le temps de les examiner.
Il serait peut-être même utile que ces amendements fussent renvoyés à la commission. J'insiste donc pour qu'ils soient présentés aujourd'hui même.
- La discussion générale est close.
(page 90) « Le livre III du Code de commerce sur les faillites et banqueroutes; les articles 69 et 635 du même Code, ainsi que l'arrête du 25 novembre 1814 sur les sursis, sont remplacés par les dispositions suivantes : »
« Art. 437. Tout commerçant qui cesse ses payements est en état de faillite.
« Celui qui n'exerce plus le commerce peut être déclaré en faillite, si la cessation de ses payements remonte à une époque où il était encore commerçant.
« La faillite d'un commerçant peut être déclarée après son décès, lorsqu'il est mort en état de cessation de payement. »
- Adopté.
« Art. 438. La faillite est qualifiée banqueroute simple et punie correctionnellement si le commerçant failli se trouve dans l'un des cas de faute grave prévus par le chapitre premier du titre II ci-après.
« Elle est qualifiée banqueroute frauduleuse et punie criminellement, si le commerçant failli se trouve dans l'un des cas de fraude prévus par le chapitre II du même titre. »
M. Delfosse. - Messieurs, l’on pourrait supprimer les mots : « Et punie correctionnellement » qui se trouvent dans le premier paragraphe et les mots : « Et punie criminellement » qui se trouvent dans le deuxième paragraphe. Il suffit de dire quand il y a banqueroute simple, et quand il y a banqueroute frauduleuse : les pénalités sont indiquées par le Code pénal.
M. Lelièvre. - Je pense, messieurs, qu'il conviendrait d'énoncer que le Code pénal en vigueur est applicable aux nouveaux faits que la loi actuelle considère comme constituant la banqueroute simple ou la banqueroute frauduleuse.
En effet, les articles 402,403 et 404 de ce Code ne sont applicables qu'aux faits prévus par le Code de commerce actuel. En conséquence, il est essentiel de porter une disposition nouvelle qui étende les pénalités aux faits qui ne sont réputés crimes et délits qu'en vertu du projet que nous discutons.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Par cela seul que l'article porte que la banqueroute simple sera punie correctionnellement et que la banqueroute frauduleuse sera punie criminellement, il se réfère de droit aux dispositions du Code pénal qui punissent l'une et l'autre de ces banqueroutes. Je pense donc que la rédaction de l'article fait droit à l'observation de M. Lelièvre et qu'il y a lieu de la maintenir.
M. Lelièvre. - Dès que c'est entendu ainsi, je n'insiste pas.
M. le président. - M. Delfosse insiste-t-il?
M. Delfosse. - Je demande la suppression des mots que j'ai signalés comme inutiles.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je ferai observer que l'adoption de l'amendement de M. Delfosse rendrait nécessaire un amendement dans le sens de l'observation de M. Lelièvre, amendement que la rédaction actuelle rend inutile.
M. Tesch, rapporteur. - Je voulais faire précisément l'observation qui vient d'être présentée par M. le ministre de la justice. Nous devons dire dans la loi que les faits qualifiés de banqueroute simple ou de banqueroute frauduleuse seront punis soit correctionnellement soit criminellement, suivant les cas, ou bien nous devons dire qu'ils seront punis conformément au Code pénal. Il faut quelque chose dans la loi qui démontre que le Code pénal est applicable, car le Code de commerce ne commine pas les peines.
M. Delfosse. - On peut très bien, sans rendre nécessaire l'amendement de M. Lelièvre, supprimer les mots que je regarde comme inutiles. Il est certain que le Code pénal restera applicable aussi longtemps qu'il ne sera pas abrogé. Le Code pénal punit la banqueroute simple de peines correctionnelles; il punit la banqueroute frauduleuse de peines criminelles. Il suffit d'indiquer dans la loi sur les faillites quels sont les faits qualifiés de banqueroute simple, quels sont les faits qualifiés de banqueroute frauduleuse, pour que l'article 402 du Code pénal soit applicable à ces faits.
- L'amendement de M. Lelièvre est mis aux voix; il n'est pas adopté.
L'article est ensuite adopté, tel qu'il a été présenté par la commission.
« Art. 439. Les demandes de sursis seront formées, et il y sera statué conformément aux dispositions du titre IV ci-après. »
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je demanderai, messieurs, que cet article soit réservé jusqu'à la discussion du titre II du projet. Il y aura probablement alors une discussion générale sur la question de principe relative aux sursis, et il est bon de ne rien préjuger à cet égard par l'adoption de l'article dont M. le président vient de donner lecture.
- L'article est réservé.
« Art. 440. Tout failli sera tenu, dans les trois jours de la cessation de ses payements, d'en faire l'aveu au greffe du tribunal de commerce de son domicile. Le jour où il aura cessé ses payements sera compris dans les trois jours.
« En cas de faillite d'une société en nom collectif, l’aveu contiendra le nom et l'indication du domicile de chacun des associés solidaires; il sera fait au greffe du tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège du principal établissement de la société.
« Lorsqu'une société anonyme aura été déclarée en faillite, la procédure sera poursuivie contre les gérants, qui seront tenus de fournir au juge-commissaire et aux curateurs tous renseignements, et de comparaitre devant eux quand ils en seront requis. »
M. Delfosse. - Messieurs, je ne sais s'il convient que l'aveu, lorsqu'il s'agit d'une société en nom collectif, soit fait au greffe du tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège du principal établissement de la société. Ne serait-il pas préférable d'exiger que l'aveu soit fait au lieu du siège de la société ? S'il n'y avait que deux établissements, je concevrais qu'on donnât la préférence au tribunal dans le ressort duquel le principal établissement se trouve.
Mais il peut arriver qu'il y ait un grand nombre d'établissements, et que le principal établissement ait peu d'importance, relativement à tous les autres établissements réunis; il serait, je pense, préférable de faire faire la déclaration au greffe du tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège social, c'est-à-dire au lieu où sont les livres et les papiers de la société, et où les actions sont en général intentées.
Ce changement présenterait, en outre, l'avantage d'éviter les contestations qui pourraient s'élever sur la question de savoir quel est le principal établissement.
Je proposerai donc de déclarer que l'aveu sera fait au tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège social.
- L'amendement est appuyé.
M. Tesch, rapporteur. - Messieurs, je ne puis accepter cette modification. Il est bien certain que le plus souvent ce sera dans le principal établissement que se trouveront les livres, les valeurs de la société et qu'éclatera la faillite. C'est donc ce tribunal qui doit rester compétent pour en recevoir l'aveu ou pour la déclarer. La déclaration de faillite entraine l'accomplissement de nombreuses formalités, souvent une continuation de gestion d'exploitation. Les curateurs gèrent, administrent sous la surveillance du juge commissaire, du tribunal de commerce même. Le principal établissement peut se trouver à dix, vingt lieues du siège de la société. Comment, dans ce cas, cette surveillance pourra-t-elle s'exercer ? A quels déplacements n'exposeriez-vous pas les curateurs, les juges-commissaire, à quels frais la masse ne serait-elle pas soumise.
L'on nous dit qu'il peut surgir des difficultés sur la question de savoir, quel est le principal établissement, quand une société aura plusieurs établissements; mais nous ne ferons jamais de loi qui pare à toutes les difficultés. La question de savoir quel est le principal établissement est une question de fait que les tribunaux auront à décider.
Le Code est muet sur la question de savoir où doit se faire la déclaration de faillite d'une société. La jurisprudence décide que c'est au siège du principal établissement qu'elle doit être faite. La loi française a consacré ce principe et je n'ai pas vu que, jusqu'à présent, il ait donné lieu, dans ce pays, aux difficultés que l'honorable M. Delfosse a redoutées.
M. De Pouhon. - J'ai une observation à faire en faveur de l'amendement présenté par l'honorable M. Delfosse. Je citerai un exemple que nous avons ici sous nos yeux, la manufacture de glaces d'Oignies. Son siège social est à Bruxelles, tandis que son principal établissement est à Oignies. Si l'on veut qu'en cas de faillite l'aveu soit fait au greffe du tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège du principal établissement de la société , il arrivera que cet aveu sera fait là où ne sont pas les écritures de la société, où il n'y a, comme à l'établissement d'Oignies, qu'une comptabilité de fabrique, car nous avons dans le pays une foule de sociétés qui sont dans le même cas que celle dont je viens de parler,
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - L'observation de l'honorable M. De Pouhon s'applique à une société anonyme dont le siège est établi par les statuts mêmes de la société, c'est-à-dire par un acte public qui ne peut être changé qu'avec l'autorisation du gouvernement; mais il s'agit ici de sociétés en nom collectif dont le siège est établi par un acte purement volontaire et qui peut toujours être changé sans autre formalité que le dépôt d'un nouvel acte au greffe du tribunal de commerce. Si l'on ne disait pas que c'est au greffe du tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège du principal établissement de la société que l'aveu de la faillite doit être fait, il en résulterait que des fraudes pourraient être pratiquées au préjudice des créanciers ; aussi l'on pourrait transfère, le siège de la société dans tel ou tel endroit où l'on croirait plus avantageux de l'établir, tandis que l'existence du principal établissement est un fait de notoriété publique que les tribunaux reconnaîtront facilement quand il y aura contestation, ce qui d'ailleurs arrivera très rarement.
(page 91) M. Delfosse. - La question de savoir quel est le principal établissement d'une société sera très simple si cette société n'a que deux établissements, mais il n'en sera pas de même, si elle en a un grand nombre. On n'a pas non plus répondu à cette observation que j'ai faite, que si un établissement est le principal par rapport à chacun des autres établissements pris isolément, il peut, comparé à tous ces établissements réunis, avoir une importance très faible.
Je persiste à croire qu'il est préférable d'exiger que l'aveu soit fait au siège de la société, qui est l'endroit où se trouvent presque toujours les livres et les papiers de la société, l'endroit où l'on intente en général les actions.
Si l'on admettait le système de la commission et du gouvernement, il y aurait dans tous les cas un changement à faire à la rédaction.
Elle suppose l'existence de plusieurs établissements, il faudrait prévoir le cas où il n'y en aurait qu'un seul.
Je crois devoir maintenir mon amendement; on éviterait, en l'adoptant, les contestations, les procès qui pourraient surgir sur l'importance relative des établissements. Et d'un autre côté on ne s'exposerait pas à donner à un seul établissement une importance qu'il ne devrait pas avoir, si on le comparait aux autres établissements réunis. Remarquez en outre, messieurs, que cet établissement peut se trouver à une grande distance des autres établissements et du siège de la société; il y aurait dans ce cas des frais plus considérables et des difficultés de plus d'un genre.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je ferai observer que le texte du projet du gouvernement adopté par la commission est le même que celui de l'article 438 de la loi française de 1838. Nous n'avons pas entendu dire qu'en France cette disposition ait jamais donné lieu à quelque inconvénient. Je crois qu'il convient de le maintenir, puisque l'expérience est favorable, et que nous nous conformons à la loi française.
- L'amendement de M. Delfosse est mis aux voix; il n'est pas adopté.
L'article 440 est adopté.
« Art. 441. Le failli joindra à son aveu :
« 1° Le bilan de ses affaires ou une note indiquant les motifs qui l'empêcheraient de le déposer;
« 2° Les registres tenus en exécution des articles 8 et 9 du Code de commerce ; ces registres seront arrêtés par le greffier, qui constatera l'état où ils se trouvent.
« Le bilan contiendra l'énumération et l'évaluation de tous les biens mobiliers et immobiliers du débiteur, l'état des dettes actives et passives, le tableau des profits et des pertes, le tableau des dépenses; il devra être certifié véritable, daté et signé par le débiteur.
« Le greffier certifiera au bas de l'aveu du failli et des pièces y annexées la date de leur remise au greffe et en délivrera récépissé, s'il en est requis.
« La remise au greffe de toutes autres pièces concernant la faillite sera constatée de la même manière, sans qu'il soit nécessaire d'en dresser aucun autre acte de dépôt. »
M. Orts. - Je demande la parole pour faire une interpellation à l'organe du gouvernement ou de la section centrale, plutôt pour que la disposition ne laisse aucun doute dans l'esprit de ceux qui auront à l'appliquer, que pour lever un doute qui me serait personnel.
En ce qui me concerne, je trouve la solution dans des règles d'interprétation qui me sont plus familières qu'aux commerçants ordinaires. Mais comme tout le monde n'est pas avocat, je désirerais que la chose fût un peu plus claire.
Il est bien entendu que par ces mots : « Les registres tenus en exécution des articles 8 et 9 du Code de commerce, » la commission et le gouvernement comprennent les registres qui sont nommés dans ces deux articles, quoique cependant ils n'aient pas été tenus en observant toutes les formalités qu'impose le Code de commerce pour la tenue régulière des livres. On sait qu'en pratique ces formalités ne sont pas généralement suivies. Je voudrais donc que le commerce fût averti par la réponse que le gouvernement donnera à mon interpellation que quoiqu'on n'ait pas fait coter, parapher, etc., ses registres, on n'en est pas moins tenu, en vertu de l'article 441, de les déposer.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Cela ne me paraît pas douteux. Le failli joindra à son aveu tous ses registres tels qu'ils seront et dans l'état où ils se trouveront.
M. Tesch, rapporteur. - Il sera tenu de joindre tous ses registres.
- L'article est mis aux voix et adopté.
« Art. 442. La faillite est déclarée par jugement du tribunal de commerce rendu, soit sur l'aveu du failli, soit à la requête d'un ou de plusieurs créanciers, soit d'office.
« Par le même jugement ou par un jugement ultérieur rendu sur le rapport du juge-commissaire, le tribunal de commerce déterminera, soit d'office, soit sur la poursuite de toute partie intéressée, l'époque à laquelle a eu lieu la cessation de payement.
« Sauf l'exception portée à l'art. 620, cette époque ne peut toutefois être fixée à une date de plus de six mois antérieure au jugement déclaratif de la faillite,
« A défaut de détermination spéciale, la cessation de payement sera réputée avoir lieu à partir du jugement déclaratif de la faillite, ou à partir du jour du décès, quand la faillite aura été déclarée après la mort du failli.
« Aucune demande tendante à faire fixer l’ouverture de la faillite à une époque autre que celle qui résulterait du jugement déclaratif ou d'un jugement ultérieur, ne sera recevable après le jour fixé pour la clôture du procès-verbal de vérification des créances, sans préjudice toutefois à la voie d'opposition ouverte aux intéressés par l'article 473.
M. Delfosse. - Messieurs, le projet du gouvernement faisait fixer le jour de l'ouverture de la faillite par le tribunal. La commission a modifié cette disposition du projet, par la raison que c'est la loi elle-même qui fixe le jour de l'ouverture de la faillite. Il y a ouverture de la faillite dès qu'il y a cessation de payement. Dans l'opinion de la commission, à laquelle parait se rallier M. le ministre de la justice, le tribunal ne doit pas fixer le jour de l'ouverture de la faillite, il doit seulement déterminer l'époque de la cessation de payement.
Je ne viens pas combattre cette proposition ; je l'approuve. Mais elle rend nécessaire une modification au dernier paragraphe de l'article. Au lieu de : « Aucune demande tendante à faire fixer l’ouverture de la faillite à une époque, etc. » Il faut dire : « tendante à faire fixer l'époque de la cessation de payement. »
Je ferai la même observation pour l'article 473 auquel la commission renvoie. Il y est aussi question de l'ouverture de la faillite.
M. Tesch, rapporteur. - C'est juste.
M. le président. - M. Delfosse propose de substituer aux mots ; « l'ouverture de la faillite », ceux-ci : « l'époque de la cessation de payement. »
- Cet amendement est mis aux voix et adopté. L'article ainsi modifié est adopté.
« Art. 443. Dans les dix premiers jours de chaque mois, les receveurs de l'enregistrement enverront au président du tribunal de commerce un tableau des protêts des lettres de change acceptées et des billets à ordre enregistrés dans le mois précédent. Ce tableau contiendra :
« 1° la date du protêt ;
« 2° les nom, prénoms, profession et domicile de celui au profit duquel l'effet est créé ou du tireur;
« 3° les nom, prénoms, profession et domicile du souscripteur du billet à ordre ou de l'accepteur de la lettre de change ;
« 4° la date de l'échéance;
« 5° le montant de l'effet;
« 6° la mention de la valeur fournie, et
« 7° la réponse donnée au protêt. »
M. Allard. - Cet article, tel qu'il est rédigé, n'est pas assez explicite et prête matière à interprétation.
Au président de quel tribunal les receveurs de l'enregistrement enverront-ils le tableau dont fait mention cet article?
Sera-ce au président du tribunal dans le ressort duquel le protêt a été fait?
Mais un billet à ordre peut être créé payable à un domicile élu autre que le domicile réel du souscripteur; le domicile élu peut être situé dans un autre arrondissement que le domicile réel.
Si information du protêt d'un billet à ordre ne doit pas, en cas de domicile élu, être donnée au président du tribunal du domicile réel, comment ce dernier pourra-t-il connaître la position commerciale de ses justiciables?
La même observation peut s'appliquer à tous les cas de protêt en matière de lettres de change non acceptées et payables dans un autre arrondissement que celui qu'habite le tireur.
La lettre de change non acceptée est un moyen de battre monnaie. Le protêt d'une pareille lettre de change n'est pas toujours, mais est souvent, un indice certain que le tireur se trouve dans une situation de fortune bien précaire.
Il est (erratum, page 107) donc utile que le président du tribunal du domicile du tireur ait connaissance d'un protêt, d'une lettre de change non acceptée et payable dans un autre arrondissement.
En conséquence, j'ai l'honneur, messieurs, de vous proposer l'amendement suivant :
Ajouter après les mots : « au président du tribunal de commerce, » ceux-ci : dans le ressort duquel le protêt a été fait. Ajouter un paragraphe nouveau ainsi conçu :
« Semblable tableau sera envoyé au président du tribunal de commerce du domicile des souscripteurs d'un billet à ordre ou d'une lettre de change non acceptée, lorsque ce billet à ordre ou cette lettre de change seront payables dans un ressort judiciaire autre que celui habité en Belgique par celui qui les aura souscrits. »
M. Tesch, rapporteur. - Comme il est très difficile, à une simple lecture, de juger de cet amendement, j'en demanderai le renvoi à la commission.
- Cette proposition est adoptée et l'article 443 est tenu en réserve.
M. le président. - La commission pourra se réunir demain matin.
M. Tesch, rapporteur. - Oui, M. le président, je demanderai qu'elle soit convoquée pour dix ou onze heures.
M. le président. - De cette manière, nous pourrons reprendre, au commencement de la séance, les articles qui auront été réservés.
« Art. 444. Le failli, à compter du jugement déclaratif de la faillite, est dessaisi de plein droit de l'administration de tous ses biens, même de ceux qui peuvent lui échoir tant qu'il est en état de faillite.
« Tous payements, opérations ou actes faits par le failli, et tous payements faits au failli depuis ce jugement sont nuls de droit. »
(page 92) M. Jullien. - Messieurs, sous l'empire de la législation actuelle, on admet généralement que l'état de faillite n'affecte pas les droits attachés à la puissance paternelle et à l'autorité maritale. Ainsi, l'on décide que le failli peut autoriser son épouse à contracter, qu'il peut l'autoriser à ester en justice; mais il y a dissidence sur le point de savoir si l'état de faillite ne dessaisit pas le mari de l'administration des biens de sa femme, si cette administration ne passe pas aux mains des syndics jusqu'à ce que la femme ait fait prononcer judiciairement la séparation de biens. On se demande si, nonobstant l'état de faillite, le mari reste saisi du droit de percevoir les revenus des biens de sa femme, s'il conserve le droit de percevoir les revenus de ses enfants mineurs, à l'exclusion de toute participation de la part des syndics; on se demande, en un mot, si les syndics ne pourraient point, eux, prendre l'administration soit des biens de la femme, soit des biens des enfants mineurs, acquitter les charges inhérentes à cette administration, prélever l'excédant et le faire entrer dans la masse. La question me paraît assez importante pour être résolue dans la loi qui nous occupe.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Messieurs, il me serait difficile de répondre immédiatement à une interpellation du genre de celle que vient de faire l'honorable M. Jullien. Je demande si l'honorable membre entend proposer un amendement à l'article en discussion; dans ce cas je désirerais qu'il voulût formuler cet amendement et qu'il fût renvoyé à la commission.
Je pourrais bien donner une solution de la question soulevée par l'honorable M. Jullien, mais je n'exprimerais que mon opinion personnelle, laquelle ne pourrait faire autorité. Je désire donc que l'honorable M. Jullien veuille bien présenter un amendement s'il croit que l'article doit être modifié.
M. Lelièvre. - Messieurs, les droits appartenant au père sur les biens de ses enfants sont un attribut de la puissance paternelle. Les époux ne peuvent y déroger (article 1388 du Code civil.) C'est aussi à titre de la puissance paternelle que le père a la jouissance lui attribuée par l'article 384 à charge de remplir certaines obligations, et cela est si vrai que l’article 384 est placé sous la rubrique de la puissance paternelle. Or, la faillite n'enlève pas au failli les droits lui compétant en vertu de lois d'ordre public. Sous ce rapport la question soulevée par M. Jullien ne me paraît pas présenter un doute sérieux. Il en est de même du droit d'administration compétant au mari sur les biens de son épouse. Ce droit lui-même est une conséquence de l'autorité maritale que l'époux ne perd pas par l'effet de sa déconfiture. Quant à l'usufruit légal, il est même affecté spécialement à l'entretien et à l'éducation des enfants.
M. Tesch, rapporteur. - Je pense que la chambre n'est pas un bureau de consultation, et qu'elle doit avant tout poser des principes qui, plus tard, seront appliqués par les tribunaux. Il est impossible que, soit le gouvernement, soit le rapporteur, puisse donner instantanément des solutions à toutes les questions que l'un ou l'autre membre pourrait poser.
Pour répondre à la question posée par l'honorable M. Jullien, je dois dire que les tribunaux et les cours ont décidé que les créanciers profiteront des biens de la femme ou des enfants mineurs du failli, en supportant les charges auxquelles la jouissance de ces biens donne lieu. C'est dans ce sens que la commission entend l'article.
Evidemment, les curateurs peuvent intervenir dans l'administration puisque, tant que la séparation des biens n'est pas prononcée, les revenus des biens de la femme appartiennent à la communauté et doivent, par conséquent, profiter à la masse.
Il en est de même des biens des enfants dont le père a l'usufruit. Il ne s'agit pas seulement ici de la puissance paternelle, il s'agit d'un revenu dont le père a la jouissance.
M. Jullien. - Je suis entièrement de l'avis de notre honorable collègue M. Tesch. J'aurais formulé un amendement pour dissiper toute espèce de doute si je n'avais désiré que le gouvernement s'expliquât préalablement sur les questions que j'ai soulevées. Puisqu'il y a doute sur la solution qu'elles doivent recevoir, je formulerai un amendement, et je demande que la chambre veuille bien suspendre le vote de l'article 444.
M. Orts. - Messieurs, je crois qu'il serait excessivement dangereux de vouloir, par un amendement, lever la difficulté soulevée par l'honorable M. Jullien. Quelque rédaction qu'on adopte, la difficulté subsistera toujours, puisqu'il s'agit d'appliquer les effets de la faillite du mari aux droits qu'il a sur les biens de sa femme. Or, ces droits ne sont pas fixes, invariables; ils dépendent des conventions matrimoniales, qui peuvent varier à l'infini selon la volonté des parties. Si M. Jullien veut, par son amendement, prévoir les cas où les époux sont mariés sous l'un des régimes définis par la loi, il n'atteindra pas le but dans les cas où, par leur contrat de mariage, ils ont dérogé d'une manière quelconque soit au régime de la communauté, soit au régime de la séparation des biens, soit au régime dotal. Je crois donc qu'il vaut beaucoup mieux laisser à la jurisprudence le soin de faire, ici comme partout ailleurs, l'application aux cas spéciaux, de principes qui sont clairs et qui, jusqu'à présent, n'ont pas donné lieu à de bien grandes difficultés.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - J'ajouterai, messieurs, qu'il est impossible que la loi actuelle décide toutes les questions qui peuvent se présenter relativement aux faillites; il restera toujours un certain nombre de questions et de questions très importantes qui devront être abandonnées à l'appréciation de la jurisprudence et décidées d'après les principes du droit commun. Il serait très dangereux de vouloir, à cet égard, introduire dans la loi des règles fixes et absolues. Cela donnerait lieu à des inconvénients beaucoup plus graves que ceux qu'on veut éviter.
M. Jullien. - Si j'ai présenté les observations que j'ai eu l'honneur de soumettre à la chambre, c'est que l'article 444 du projet me paraît ajouter à l'article 442 du code actuel.
En effet, ce dernier article se bornait à disposer que le failli, à compter du jour de la faillite, est dessaisi de plein droit de l'administration de tous ses biens, tandis que le paragraphe final de l'article en discussion porte en outre que tous payements, opérations ou « actes faits par le failli à tous payements faits au failli depuis le jugement », sont nuls de droit. Il m'a semblé d'après cela que je devais appeler l'attention de la chambre sur la question de la capacité du failli relativement à l'administration des biens de sa femme et relativement à l'administration des biens de ses enfants, car si la discussion n'avait pas été amenée sur ce point, on aurait pu croire que l'article 444 frappait le failli d'incapacité radicale et absolue, quant à cette double administration.
Je demande, en conséquence, que la chambre suspende le vote de l’article jusqu'à ce que j'aie pu déposer mon amendement et qu'il ait été examiné par la commission.
M. le président. - M. Jullien demande qu'on tienne en réserve l'article 444.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je demanderai que l'honorable M. Jullien veuille bien déposer aujourd'hui cet amendement, pour être renvoyé à la commission.
M. Jullien. - C'est ce que je ferai.
- La chambre tient en réserve l'article 444.
« Art. 445. Sont nuls et sans effet, relativement à la masse, lorsqu'il auront été faits par le débiteur depuis l'époque déterminée par le tribunal comme étant celle de la cessation de ses payements ou dans les dix jours qui auront précédé cette époque :
« Tous actes translatifs de propriété mobilière ou immobilière, à titre gratuit, ainsi que les actes, opérations ou contrats commutatifs ou à titre onéreux, si la valeur de ce qui a été donné par le failli dépasse notablement celle de ce qu'il a reçu en retour;
« Tous payements, soit en espèces, soit par transport, vente, compensation ou autrement pour dettes non échues, et pour dettes échues, tous payements faits autrement qu'en espèces ou effets de commerce;
« Toute hypothèque conventionnelle ou judiciaire et tous droits d'antichrèse ou de nantissement constitués sur les biens du débiteur pour dettes antérieurement contractées. »
M. Thibaut. - Je désirerais savoir si par le mot « acte », dont on se sert dans le deuxième paragraphe de cet article on entend spécialement le actes de donation qui constatent la transmission d'effets mobiliers ou immobiliers, ou si l’on comprend dans ce mot même les cadeaux qui se transmettent de la main à la main, sans qu'il en soit dressé d'acte.
M. Tesch, rapporteur. - C'est encore une de ces questions qu'il faut laisser à la prudence des tribunaux de résoudre. La nullité dépendra des circonstances et surtout de la valeur de l'objet donné. Mais, dans tous les cas, celui qui a reçu un don manuel pourra être condamné à le rapporter à la masse, comme si le don avait été fait par acte authentique
M. Delfosse. - Messieurs, si les intéressés ne se plaignent pas de la donation d'un effet mobilier, le tribunal ne sera pas appelé à annuler la donation; mais si les créanciers se plaignent, le tribunal devra déclarer l'acte nul, alors même que l'objet donné n'aurait pas une grande valeur. Il est incontestable que si les intéressés se plaignent, les tribunaux devront prononcer la nullité, puisque la loi la prononce d'une manière absolue; la loi ne laisse ici aucun arbitraire aux tribunaux.
M. Orts. - Messieurs, pour mettre le langage de la loi d'accord avec le langage du Code civil auquel on renvoie, il faut ou supprimer dans le paragraphe final le mot « antichrèse » ou substituer au mot « nantissement » le mot « gage », car l'antichrèse est un nantissement.
M. Tesch, rapporteur. - Dans l'opinion de la commission, le mot « nantissement » est employé pour le mot « gage ».
M. Orts, - En ce cas, je proposerai de remplacer le mot « nantissement » par le mot « gage ». Alors nous serons d'accord avec le Code civil.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je ne m'oppose pas à cet amendement.
- L'article 445, avec ce changement, est mis aux voix et adopté.
« Art. 446. Tous autres payements faits par le débiteur pour dette échues et tous autres actes à titre onéreux par lui passés après la cessation de ses payements et avant le jugement déclaratif, pourront être annulés, si de la part de ceux qui ont reçu du débiteur ou qui ont trait avec lui, ils ont eu lieu avec connaissance de la cessation de payement. »
- Adopté.
« Art. 447. Les droits d'hypothèque et de privilège valablement acquis pourront être inscrits jusqu'au jour du jugement déclaratif de la faillite
« Néanmoins les inscriptions prises dans les dix jours qui ont précédé l'époque de la cessation de payement, ou postérieurement, pourront être déclarées nulles, s'il s'est écoulé plus de quinze jours entre la date de l'acte constitutif de l'hypothèque ou du privilège et celle de l'inscription. »
- Adopté.
« Art. 448. Tous actes ou payements faits en fraudé des créanciers sont nuls, quelle que soit la date à laquelle ils ont eu lieu. »
- Adopté.
(page 93) « Art. 449. Dans le cas où des lettres de change auraient été payées après l'époque fixée comme étant celle de la cessation de payement et avant le jugement déclaratif de lu faillite, l'action en rapport ne pourra être intentée que contre celui pour le compte duquel la lettre de change aura été fournie : s'il s'agit d'un billet à ordre, l'action ne pourra être exercée que contre le premier endosseur.
« Dans l'un et l'autre cas, la preuve que celui à qui on demande le rapport avait connaissance de la cessation de payement à l'époque de l'émission du titre devra être fournie. »
- Adopté.
« Art. 450. Le jugement déclaratif de la faillite rend exigibles, à l'égard du failli, les dettes passives non échues : si le failli est le souscripteur d'un billet à ordre, l'accepteur d'une lettre de change, ou le tireur à défaut d'acceptation, les autres obligés seront tenus de donner caution pour le payement à l'échéance, s'ils n'aiment mieux payer immédiatement.
« Toutefois, les dettes non échues et ne portant pas intérêt, dont le terme serait éloigné de plus d'une année, ne seront admises au passif que sous déduction de l'intérêt légal calculé depuis le jugement déclaratif jusqu'à l'échéance.
« En cas de payement immédiat par l'un des coobligés d'un billet à ordre ou d'une lettre de change non échue et ne portant pas intérêt, il sera fait sous déduction de l'intérêt légal pour le temps qui reste à courir jusqu'à l'expiration du terme. »
- Adopté.
« Art. 451. A compter du jugement déclaratif de la faillite, le cours des intérêts de toute créance non garantie par un privilège, par un nantissement ou par une hypothèque, est arrêté à l'égard de la masse seulement.
« Les intérêts des créances garanties ne peuvent être réclamés que sur les sommes provenant des biens affectés au privilège, au nantissement ou à l'hypothèque. »
- Adopté.
« Art. 452. A partir du même jugement, toute action mobilière ou immobilière, toute voie d'exécution sur les meubles ou sur les immeubles, ne pourra être suivie, intentée ou exercée que contre les curateurs à la faillite.
« Le tribunal peut néanmoins recevoir le failli partie intervenante. »
- Adopté.
Article 453
« Art. 453. Le jugement déclaratif de la faillite arrête l'exercice de la contrainte par corps sur la personne du failli, ainsi que toute saisie à la requête des créanciers chirographaires et non privilégiés sur ses meubles et immeubles.
« Si, antérieurement à ce jugement, le jour de la vente forcée des meubles ou immeubles saisis a déjà été fixé et publié par des affiches, cette vente aura lieu pour le compte de la masse.
Néanmoins, si l'intérêt de la masse l'exige, le tribunal pourra, sur la demande des curateurs, autoriser la remise de la vente à une autre époque.
M. Lelièvre. - Je désirerais obtenir quelques explications sur cet article. Entend-on arrêter les poursuites en expropriation ? En cas d'affirmative, comment cette disposition cadre-t-elle avec le Code de procédure qui défend au débiteur l'aliénation des immeubles saisis, du moment que la saisie immobilière lui a été dénoncée. Or, ce que le débiteur ne pourrait pas faire, comment les curateurs qui administrent son avoir auraient-ils plus de droit que lui ?
D'un autre côté, du moment que les placards ont été dénoncés aux créanciers inscrits, la saisie immobilière ne peut plus être rayée sans leur consentement. Comment concilie-t-on cette disposition avec l'article que nous discutons ?
Si l'on persiste à maintenir le projet en ce qui concerne la saisie immobilière, je désire savoir de quelle adjudication il est question dans le paragraphe 2. S'agit-il de l'adjudication préparatoire ou bien seulement de la vente définitive ?
Enfin si l'on admet le principe que la faillite suspend les poursuites en expropriation forcée, ne convient-il pas d'énoncer que les frais faits par le poursuivant jusqu'au moment de la faillite seront prélevés par privilège sur le prix de la vente subséquente ?
La disposition que nous examinons ne me paraît pas claire, elle donnera lieu à des difficultés; il serait préférable, à mon avis, de la restreindre à la vente forcée des objets mobiliers.
M. Tesch, rapporteur. - Si l'honorable M. Lelièvre avait voulu lire toute la loi et le rapport de la commission, il aurait trouvé la solution des difficultés qu'il soulève.
Voici ce que porte l'article 568 :
« S'il n'y a pas de poursuites en expropriation des immeubles, commencée avant le rejet ou l'annulation du concordat, les curateurs seuls seront admis à poursuivre la vente; ils seront tenus d'y procéder dans la huitaine sous l'autorisation du juge-commissaire , suivant les formes prescrites parl a loi du 12 juin 1816.
« Les curateurs pourront toujours arrêter les poursuites commencées, en procédant dans les mêmes formes, avec l'autorisation du tribunal de commerce, le failli appelé, à la vente des immeubles saisis.
« Ils feront, dans ce cas, notifier au créancier poursuivant et au failli les lieu, jour et heure auxquels il y sera procédé.»
Ce qui prouve évidemment que si, au moment de la faillite, des poursuites en expropriation sont commencées, ces poursuites devront être continuées; du reste le rapport s'en explique clairement :
« Cet article (article 568) consacre implicitement le principe que jusqu'au rejet ou jusqu'à l'annulation du concordat,, les créanciers peuvent poursuivre l'expropriation des immeubles sur lesquels ils ont hypothèque. Votre commission, tout en maintenant ce droit, a pensé qu'il fallait donner aux curateurs, etc. »
Viennent les considérations qui s'appliquent aux paragraphes introduit comme amendements à l'article 568.
M. Lelièvre. - M. le rapporteur est d'avis que la poursuite en expropriation n'est pas arrêtée par la faillite, mais l'article que nous discutons énonce positivement le contraire. En effet, le paragraphe premier porte que le jugement déclaratif arrête la saisie sur les immeubles et le paragraphe 2 décrète tellement la suspension de la poursuite immobilière que, dans le cas où le jour de la vente est fixé, l'adjudication doit avoir lieu pour le compte de la masse. Or, dans cette hypothèse, subsistent tous les inconvénients que j'ai signalés.et ils me paraissent assez graves pour être pris en considération.
M. Tesch, rapporteur. - Que l'honorable membre veuille lire l'article 453 jusqu'au bout :
« Art. 453. Le jugement déclaratif de la faillite arrête l'exercice de la contrainte par corps sur la personne du failli, ainsi que toute saisie à la requête des créanciers chirographaires et non privilégiés sur ses meubles et immeubles. »
Ainsi, les saisies ne sont arrêtées qu'à l'égard des créanciers chirographaires et non privilégiés, mais les créanciers hypothécaires ont droit de poursuivre l'expropriation.
M. Lelièvre. - L'honorable M. Tesch est dans l'erreur un créancier chirographaire muni d'un titre exécutoire peut poursuivre l'expropriation, et nulle loi n'exige qu'on soit créancier hypothécaire pour recourir à cette voie d'exécution. S'il en est ainsi, l'article qui nous occupe arrêtera l'expropriation, contrairement à toutes les règles du Code de procédure et donnera lieu à des difficultés sérieuses dont, nonobstant mes instances, on n'a pas indiqué la solution.
M. Tesch, rapporteur. - La loi commerciale dérogera au Code de procédure en ce sens ; on ne peut pas laisser les créanciers chirographaires non privilégiés poursuivre dans leur intérêt la vente des biens du failli quand le prix doit profiter de la masse.
L'expropriation ne sera, du reste, pas arrêtée, mais elle sera poursuivie pour le compte et au nom de la masse, à moins que les curateurs ne veulent faire vendre conformément à la loi de 1816.
- L'article 453 est mis au voix et adopté.
Article 454
« Art. 454. Toutes voies d'exécution, pour parvenir au payement des créances privilégiées sur le mobilier dépendant de la faillite, seront suspendues jusqu'à la clôture du procès-verbal de vérification des créances, sans préjudice de toute mesure conservatoire et du droit qui serait acquis au propriétaire des lieux loués d'en reprendre possession.
« Dans ce dernier cas, la suspension des voies d'exécution établies au présent article cessera de plein droit en faveur du propriétaire. »
- Adopté.
« Art. 455. Le gouvernement pourra, sur l'avis conforme des cour d'appel respectives, nommer des liquidateurs assermentés près des tribunaux où le nombre et l'importance des faillites l'exigeront. »
- Adopté.
« Art. 456. Dans les arrondissements où sont établis des liquidateurs assermentés, les curateurs aux faillites seront choisis parmi eux, à moins que, pour cause d'éloignement, de parenté, d'intérêts opposés ou d'autres motifs de suspicion légitime, la bonne administration de la faillite exige un autre choix.
« A défaut de liquidateurs assermentés, et dans le cas où, conformément au paragraphe précédent, le tribunal de commerce croira devoir faire un autre choix, les curateurs seront nommés parmi les personnes qui offriront le plus de garanties pour l'intelligence et la fidélité de leur gestion.
« Ces curateurs auront les mêmes droits, les mêmes attributions, et seront soumis à la même surveillance et aux mêmes obligations que s'ils avaient été choisis parmi les liquidateurs assermentés. »
- Adopté.
« Art. 457. Le Roi fixe le nombre des liquidateurs assermentés, sur l'avis de la cour d'appel et du tribunal de commerce, selon les besoins du service.
« Ils sont nommés par le Roi sur deux listes doubles présentées par les mêmes corps. »
- Adopté.
« Art. 458. Les liquidateurs assermentés sont nommés pour cinq ans et conservent, dans tous les cas, cette qualité jusqu'à la prestation de serment de leurs successeurs. Ils peuvent être nommés de nouveau.
« Le liquidateur assermenté, qui n'aura pas été continué dans ses fonctions, terminera néanmoins les opérations qui lui auront été confiées et la liquidation des faillites auxquelles il aura été nommé curateur. »
- Adopté.
(page 94) « Art. 459. Les liquidateurs assermentés sont soumis à la surveillance du tribunal de commerce. Ils peuvent être révoqués par le Roi.
M. Orts. - Pour compléter le système de garantie introduit par le gouvernement et pour ajouter à la surveillance du tribunal de commerce la surveillance d'une autorité permanente aussi intéressée que le tribunal de commerce à la bonne administration des faillites, je propose d'ajouter après : « tribunal du commerce », les mots : « et du parquet ».
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - A première vue, je ne vois grand inconvénient à adopter l'amendement de l'honorable M. Orts; cependant je demanderai le renvoi à la commission. Je ferai une seule observation ; c'est qu'il y aurait peut-être une certaine anomalie à faire intervenir les parquets dans la surveillance d'agents nommés par le tribunal de commerce et qui ne s'occupent que d'affaires commerciales.
M. Tesch, rapporteur. - Je crains que l'adoption de l'amendement proposé ne fasse naître une foule de complications, de conflits entre les tribunaux de commerce et les parquets, mais je ne m'oppose pas à un renvoi à la commission.
- La chambre ordonne le renvoi de l'article 459 et de l'amendement de M. Orts à la commission.
« Art. 460. Les liquidateurs nommés prêtent, dans les quinze jours de leur nomination, à l'audience publique du tribunal de commerce, le serment de bien et fidèlement s'acquitter des fonctions de curateur aux faillites et de toutes autres missions qui pourront leur être confiées par ce tribunal. »
- Adopté.
« Art. 461. Les honoraires des curateurs sont réglés par le tribunal de commerce, suivant la nature et l'importance de la faillite, d'après les bases qui seront établies par un arrêté royal. »
- Adopté.
« Art. 462. Le tribunal de commerce pourra, à toutes les époques, remplacer le juge-commissaire de la faillite par un autre de ses membres, ainsi que révoquer les curateurs ou l'un d'eux, les remplacer par d'autres ou en augmenter le nombre.
« Les curateurs dont la révocation sera demandée, seront préalablement appelés et entendus en chambre du conseil. Le jugement sera prononcé à l'audience. »
- Adopté.
« Art. 463. Le juge-commissaire est chargé spécialement d'accélérer et de surveiller les opérations, la gestion et la liquidation de la faillite ; il fera, à l'audience, le rapport de toutes les contestations qu'elle pourra faire naître ; il ordonnera les mesures urgentes nécessaires pour la sûreté -et la conservation des biens de la masse, et il présidera les réunions des créanciers du failli.
« Les ordonnances du juge-commissaire sont exécutoires par provision. Les recours contre ces ordonnances seront portés devant le tribunal de commerce. »
- Adopté.
« Art. 464. Le procureur du roi peut assister à toutes les opérations de la faillite, prendre inspection des livres et papiers du failli, vérifier sa situation et se faire donner par les curateurs tous les renseignements qu'il jugera utiles. »
- Adopté.
« Art. 465. Tout jugement rendu en matière de faillite est exécutoire par provision ; le délai ordinaire, à compter de la signification pour en interjeter appel, n'est que de quinze jours.
« Ne seront susceptibles d'opposition, ni d'appel, ni de recours en cassation :
« 1° Les jugements relatifs à la nomination ou au remplacement du juge commissaire, à la nomination ou à la révocation des curateurs;
« 2° Les jugements qui statuent sur les demandes de sauf-conduits ou de mise en liberté provisoire et sur celles de secours pour le failli et sa famille ;
« 3° Les jugements qui autorisent à vendre les effets ou marchandises appartenant à la faillite;
« 4° Les jugements qui prononceront sursis au concordat, ou, conformément à l'article 554, § 2, la remise de la vente d'objets saisis;
« 5° Les jugements statuant sur les recours formés contre les ordonnances du juge-commissaire rendues dans les limites de ses attributions. »
- Adopté.
« Art. 466. Par le jugement qui déclarera la faillite, le tribunal de commerce nommera un juge-commissaire et ordonnera l'apposition des scellés. Il désignera un ou plusieurs curateurs, selon l'importance de la faillite. Il ordonnera aux créanciers du failli de faire au greffe la déclaration de leurs créances dans un délai qui ne pourra excéder vingt jours à compter du jugement déclaratif, et il indiquera les journaux dans lesquels ce jugement et celui qui pourra fixer ultérieurement l'époque de !a cessation de payement seront publiés, conformément à l'article 472.
« Le même jugement désignera les jours et heures auxquels il sera procédé, au palais de justice, à la clôture du procès-verbal de vérification des créances et aux débats sur les contestations à naître de cette vérification. Ces jours seront fixés de manière à ce qu'il s'écoule cinq jours au moins et vingt jours au plus entre l'expiration du délai accordé pour la déclaration des créances et la clôture du procès-verbal de vérification, et un intervalle semblable entre cette clôture et les débats sur les contestations.
Le tribunal pourra, par le même jugement, charger le juge-commissaire d'exercer toutes les attributions dévolues au juge de paix, en vertu des dispositions du présent Code concernant les faillites.
- Adopté.
« Art. 467. Lorsque le failli ne se sera pas conformé aux article 440 et 441, ou qu'il aura sciemment fourni des renseignements inexacts sur sa situation, le tribunal, par le même jugement ou par un jugement ultérieur, ordonnera le dépôt de sa personne dans la maison d'arrêt pour dettes ou sa garde par un officier de police ou de justice ou par un gendarme.
« La disposition de tout jugement qui ordonnera le dépôt ou la garde du failli sera immédiatement exécutée, à la diligence soit des curateurs, soit du procureur du roi. »
- Adopté.
« Art. 468. Si le tribunal estime que l'actif peut être inventorié en un seul jour, il ordonnera qu'en présence du juge-commissaire, il sera immédiatement procédé à l'inventaire sans apposition préalable des scellés. »
M. Jullien. - Vous venez, messieurs, d'adopter la disposition finale de l'article 466, qui porte autorisation pour le tribunal d'investir le juge-commissaire de toutes les attributions dévolues au juge de paix, en vertu des dispositions concernant les faillites.
L'article 468 me paraît être la conséquence de ce principe. Mais cet article est rédigé de manière à faire une obligation au tribunal, lorsqu'il estime que l'actif peut être inventorié en un seul jour, d'ordonner qu'il sera procédé à l'inventaire, en présence du juge-commissaire à la faillite. Cependant il peut arriver que le lieu d'ouverture de la faillite soit à une très grande distance du lieu où siège le tribunal.
Je ne pense pas qu'il soit entré dans la pensée de la commission d'ordonner que le tribunal de commerce envoie dans ce cas un juge-commissaire; car les frais de transport de ce juge-commissaire seraient plus considérables que les frais de transport du juge de paix du lieu de la faillite.
Je propose donc de rédiger l'article 468 dans les mêmes termes que l'article 466, et de dire : « Si le tribunal estime que l'actif peut être inventorié en un seul jour, il pourra ordonner, etc. »
M. Tesch, rapporteur. - Je demande que l'amendement soit renvoyé à la commission.
M. Jullien. - Je ne m'oppose pas au renvoi. Mais mon amendement n'est qu'une conséquence de l'article 466.
- Le renvoi de l'amendement à la commission est ordonné. L'article est tenu en réserve.
« Art. 469. Le greffier du tribunal de commerce adressera sur-le-champ au juge de paix, s'il y a lieu, au procureur du roi et aux curateurs, avis des dispositions du jugement qui auront ordonné l'apposition des scellés, le dépôt ou la garde de la personne du failli et nommé lesdits curateurs.
« Le juge de paix pourra, même avant le jugement, apposer les scellés soit d'office, soit sur la réquisition d'un ou de plusieurs créanciers, mais seulement dans le cas de disparition du débiteur ou de détournement de tout ou partie de son actif. »
- Adopté.
« Art. 470. Les curateurs nommés entreront en fonctions immédiatement après le jugement déclaratif; s'ils n'ont pas été choisis parmi les liquidateurs assermentés; ils prêteront préalablement, devant le juge-commissaire, le serment de bien et fidèlement s'acquitter des fonctions qui leur sont confiées; ils géreront la faillite en bons pères de famille, sous la surveillance du juge-commissaire, et, s'il y a lieu, ils requerront sur-le-champ l'apposition des scellés.
« Les scellés seront apposés sur les magasins, comptoirs, caisses, portefeuilles, livres, papiers, meubles et effets du failli.
« En cas de faillite d'une société en nom collectif ou en commandite, les scellés seront apposés non seulement dans le siège principal de la société, mais encore dans le domicile de chacun des associés solidaires.
« Dans tous les cas, le juge de paix donnera, sans délai, avis de l'apposition des scellés par lui faite au président du tribunal de commerce et aux curateurs nommés à la faillite. »
- Adopté.
« Art. 471. Ne seront point placés sous les scellés, ou en seront extraits et remis aux curateurs :
« 1° Les livres du failli, après avoir été arrêtés par le juge de paix, qui constatera par son procès-verbal l'état dans lequel ils se trouvent ;
« 2° Les effets de portefeuille à courte échéance ou susceptibles d'acceptation, ou pour lesquels il faudra faire des actes conservatoires : le bordereau en sera remis au président ;
« 3° Les objets sujets à dépérissement prochain ou à dépréciation imminente ;
« 4° Les objets servant à l'exploitation du fonds de commerce dans le cas prévu par l'article 475 ;
« 5° Les objets compris dans l'état mentionné à l'article 476.
« Les objets mentionnés au présent article seront de suite inventoriés par les curateurs en présence du juge de paix qui signera le procès-verbal. »
(page 95) M. Tesch, rapporteur. - A la fin du paragraphe 2, il faut substituer au mot « président » les mots « juge-commissaire ».
- L'article, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 472. A la diligence des curateurs et dans les trois jours, le jugement déclaratif de faillite, et celui qui aura fixé ultérieurement la cessation de payement seront et demeureront, pendant trois mois, affichés dans l'auditoire du tribunal de commerce. Ils seront insérés par extraits dans les journaux qui s'impriment dans les lieux ou dans les villes les plus rapprochées des lieux le failli a son domicile ou des établissements commerciaux, et qui auront été désignés par le tribunal de commerce.
« Il sera justifié de cette insertion par un exemplaire de chaque journal dans lequel elle aura eu lieu, certifié par l'imprimeur et légalisé par le bourgmestre dans les trois jours de sa date. »
- Adopté.
« Art. 473. Le jugement déclaratif de la faillite et celui qui en aura fixé l'ouverture seront susceptibles d'opposition de la part des intéressés qui n'y auront pas été parties.
« L'opposition ne sera recevable que si elle est formée par le failli dans la huitaine, et par toute autre partie intéressée dans la quinzaine de l'insertion de ces jugements dans celui des journaux mentionnés à l'article 472 qui s'imprime dans le lieu le plus voisin de leur domicile. »
M. Delfosse.- Ici vient l'observation que j'ai faite tantôt. Aux mots : « qui en aura fixé l'ouverture; » il faut substituer :« qui aura fixé la cessation de payement. »
- L'article, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 474. Si un débiteur, en faisant l'aveu de sa faillite, a déclaré que son actif est plus que suffisant pour payer toutes ses dettes, et s'il a demandé un sursis, le tribunal de commerce, sans arrêter la marche de la faillite, pourra ordonner la vérification immédiate de l'état de ses affaires par un ou plusieurs experts; et si, d'après le résultat de cette vérification, il reconnaît que l'actif du débiteur dépasse réellement son passif, il ordonnera la convocation immédiate des créanciers, et il sera procédé comme il est dit au titre IV. »
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je pense que cet article doit être réservé par le même motif que j'ai dit tout à l'heure pour l'article 439, jusqu'à la discussion du titre spécial sur les sursis.
- La chambre décide que cet article est tenu en réserve.
« Art. 475. Dans le cas prévu par l'article précédent, et dans tous les cas, si le failli a demandé un concordat et si l'intérêt des créanciers l'exige, le tribunal, sur le rapport du juge-commissaire, et après avoir entendu les curateurs, pourra ordonner que les opérations commerciales du failli seront provisoirement continuées par ceux-ci ou par un tiers sous leur surveillance. Le tribunal, sur le rapport du juge-commissaire, et après avoir entendu les curateurs, pourra toujours modifier ou révoquer cette mesure. »
- Adopté.
« Art. 476. Les curateurs pourront, avec l'autorisation du juge-commissaire, délivrer au failli et à sa famille, des vêtements, bardes, linges, meubles et effets nécessaires à leur propre usage. Les curateurs rédigeront un état de ces objets. »
- Adopté.
« Art. 477. Le failli pourra, en outre, obtenir pour lui et sa famille des secours alimentaires, qui seront fixés par le tribunal, sur la proposition des curateurs et le rapport du juge-commissaire. »
- Adopté.
« Art. 478. Les curateurs pourront, sur l'autorisation du juge-commissaire, vendre immédiatement les objets sujets à dépérissement prochain ou à dépréciation imminente.
« Les autres objets ne pourront être vendus, avant le rejet du concordat, qu'en vertu de l'autorisation du tribunal, qui, sur le rapport du juge-commissaire, et le failli entendu ou dûment appelé, déterminera le mode et les conditions de la vente. »
- Adopté.
« Art. 479. Les lettres adressées an failli seront remises aux curateurs, qui les ouvriront ; si le failli est présent, il assistera à leur ouverture. »
M. Coomans. - Je dois soumettre à la chambre un doute que la lecture de cet article fait naître dans mon esprit.
La Constitution porte que le secret des lettres est inviolable. Il me semblerait assez étrange qu'on ne tînt pas compte de cette disposition.
M. Tesch, rapporteur. - Je ne pense pas que l'article de la Constitution puisse être interprété dans un sens aussi large et aussi absolu. Si le secret des lettres est inviolable, ce principe doit nécessairement subir quelque modification dans un intérêt semblable à celui dont il s'agit en ce moment. L'article de la Constitution n'a jamais été entendu dans le sens que veut lui attribuer l'honorable M. Coomans.
L'article de la Constitution consacre une garantie contre le gouvernement et ses agents, mais n'a jamais eu d'autre but, d'autre portée. Les curateurs succèdent, du reste, au failli, quant à l'administration des biens, et cette administration rend indispensable l'ouverture des lettres qui peuvent contenir des valeurs qui appartiennent à la masse.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - J'ajouterai, messieurs, qu'en France, où le principe de l'inviolabilité du secret des lettres existe comme en Belgique, la même disposition a été insérée dans la loi et n'a soulevé aucune espèce d'objection.
M. Thibaut. - Je partage le scrupule de l'honorable M. Coomans, et il me semble qu'il serait facile de tout concilier en disant, par exemple : « Les lettres adressées au failli seront remises aux curateurs et ouvertes par le failli en leur présence. »
M. Tesch, rapporteur. - L'amendement que propose l'honorable membre ne change absolument rien au principe que l'on combat.
Nous disons que si le failli est présent, les lettres seront ouvertes en sa présence, mais que, quand il est absent, elles seront ouvertes malgré son absence. Il est impossible d'agir autrement : comme je l'ai dit, les lettres peuvent contenir des valeurs et des valeurs importantes, et il faut bien pouvoir les ouvrir en l'absence du failli sous peine de laisser ces valeurs en souffrance.
M. Coomans. - Messieurs, l'une des observations faites par l'honorable M. Tesch me force d'insister sur celles que j'ai eu l'honneur d'adresser à la chambre. Il a dit que, dans l'intérêt de la sûreté publique, on doit bien quelquefois faire une petite entorse à cet article de la Constitution.
Eh bien, messieurs, il est défendu d'ouvrir les lettres même dans l'intérêt de la sûreté publique. C'est même au point de vue politique que l'article a été inséré dans la Constitution.
Eh bien, à fortiori ne peut-on pas violer le secret des lettres dans un intérêt financier, qui ne concerne que quelques citoyens. Si le secret des lettres devait être violé, j'aimerais mieux qu'il le fût dans l'intérêt de tous, au point de vue politique, que dans l'intérêt d'un créancier .
M. Lelièvre. - Messieurs, la question que nous discutons ne peut présenter un doute sérieux. Les lettres dont il s'agit sont la propriété du failli qui a pour représentant ses curateurs. Ceux-ci sont donc les mandataires légaux du failli, et par conséquent ils ont droit de faire ce que ce dernier pourrait faire lui-même. C'est ainsi qu'une lettre adressée à un interdit doit être ouverte par le tuteur de celui-ci. Il me semble donc qu'on ne peut hésiter sur un point aussi évident.
M. Le Hon. - Messieurs, comme l'honorable M. Lelièvre vient de l'expliquer très bien, l'article en discussion est la conséquence du dessaisissement du failli. La correspondance adressée à ce dernier subit le sort de toutes les choses qui se rattachent à ses affaires et à sa fortune. Sans nul doute, les lettres qui n'ont aucun rapport à ses intérêts, ni aux droits de ses créanciers, doivent être mises à l'écart et déposées en lieu sûr, s'il est absent; mais comme il est impossible de distinguer les unes des autres sans en prendre connaissance, le droit de les ouvrir toutes me semble un des attributs nécessaires de la gestion des curateurs. Quoique l'on fasse, c'est la conséquence naturelle et logique de la situation du failli.
La Constitution, en déclarant le secret des lettres inviolable, a posé un principe général de garantie pour tous les citoyens considérés comme étant en possession de leurs droits. Cette garantie me paraît même consacrée plutôt vis-à-vis de l'autorité publique qu'à l'égard des citoyens entre eux. Et, en effet, la Constitution déclare aussi la propriété inviolable; mais il est évident que la disposition constitutionnelle est dirigée contre l'usurpation ou les entreprises du pouvoir. A-t-on jamais eu la pensée de soutenir que cette garantie d'inviolabilité mettait obstacle à la dépossession forcée d'un débiteur ou d'un failli pour l'exécution de leurs engagements et le payement de leurs dettes?
L'inviolabilité de la correspondance ne peut être prise dans une autre acception que celle de la propriété. Le commerçant tombé à l'état de faillite aura beau invoquer l'article 22 de la Constitution on lui répondra avec raison que la gestion de ses biens ne lui appartient plus ; que tous les actes et papiers, que toutes les relations qui s'y rattachent sont du domaine des curateurs de sa faillite; que, par conséquent, ceux-ci ont le droit et le devoir d'ouvrir les lettres qui lui sont adressées, par cela même qu'ils ont intérêt à les connaitre.
Je persiste donc à penser que la garantie constitutionnelle d'inviolabilité ne concerne en aucune façon le cas dont il s'agit, et serait détourné de son but comme de son véritable sens si on la faisait servir à protéger les citoyens contre les conséquences légales de leurs engagements.
M. Coomans. - Messieurs, il n'y a pas de comparaison à établir entre les deux faits cités par l'honorable M. Le Hon. Je puis être dessaisi de ma propriété pour cause d'utilité publique, mais la Constitution ne dit pas que le secret des lettres pourra être violé pour cause d'utilité publique; il n'en est pas question.
L'argument de l'honorable M. Lelièvre ne me semble pas plus fort. Tout ce qui appartient au failli, dit-il, appartient aux intéressés qui le représentent; une lettre lui appartient; donc les intéressés peuvent l'ouvrir.
Mais, messieurs, il ne s'agit pas ici d'un chiffon de papier, il s'agit d'un droit politique; le chiffon de papier, oui, appartient aux créanciers, mais le droit politique d'ouvrir ses lettres et d'en prendre seul connaissance, ce droit n'appartient qu'au failli. D'après l'argumentation de M. Lelièvre, les syndics pourraient venir également voter pour le failli dans les élections.
M. Delfosse. - Je pense, que l'on ferait bien de remettre le vote de cet article à demain. La question soulevée par l'honorable M. Coomans ne laisse pas que d'être assez délicate, elle mérite que l'on y réfléchisse au moins un jour. Je sais bien que le failli est dessaisi de l'administration de ses biens, mais il n'a pas pour cela cessé d'être homme et d'avoir des relations autres que les affaires de commerce. Un de ses amis, ne s'attendant pas à une faillite, peut lui adresser des lettres d'une nature intime, confidentielle. En les ouvrant, ce n'est pas dans les affaires du failli que vous vous immiscez, ce n'est pas son secret, c'est celui d'un (page 96) tiers que vous découvrez. Je ne dis pas que la disposition soit contraire à la Constitution, mais je dis qu'il y a peut-être quoique précaution h prendre. Nous avons voté aujourd'hui un très grand nombre d'articles, remettons à demain le vote de celui-ci. Il y a des scrupules qu'il faut respecter.
M. Orts. - Messieurs, je crois qu'il suffit de montrer les conséquences extrêmes du scrupule de l'honorable M. Coomans pour faire apprécier combien il est peu fondé. Si la disposition constitutionnelle relative au secret des lettres est tellement absolue qu'elle n'admet aucune exception, il en résultera qu'après le jugement prononçant .l'interdiction, une lettre adressée à un fou ne pourra pas être ouverte par son curateur, il en résultera que les directeurs de pensionnats ne pourront plus exercer leur droit de police sur la correspondance de leurs pensionnaires. (Interruption.) Le failli est un homme que la loi déclare incapable de gérer ses affaires ; un fou est un homme que la loi déclare incapable de gérer ses affaires; dans une certaine mesure les positions sont identiques et ce qu'on fait pour l'un on peut le faire pour l'autre.
M. Devaux. - Messieurs, si l'article de la Constitution avait le sens que lui attribue l'honorable M. Coomans, on ne pourrait plus faire de perquisition à domicile chez les accusés, car il faudrait respecter le secret non seulement des lettres cachetées, mais encore de celles qui sont ouvertes; la Constitution ne fait pas de distinction ; vous ne pourriez donc pas vous enquérir du crime d'un accusé.
Certainement le secret des lettres est un droit, mais c'est un droit qu'on peut perdre. Ici le failli le perd par suite d'un jugement. Si vous ne pouvez pas ouvrir des lettres cachetées, les curateurs n'auront pas le droit de lire les lettres déjà ouvertes, car, je le répète, la Constitution ne distingue pas.
M. Thibaut. - Messieurs, je suis peu touché de l'argumentation de l'honorable M. Devaux. Qui dit secret, dit quelque chose de fermé, de caché; or, une lettre ouverte n'a pas ces caractères.
Je fais encore une observation pour appuyer la proposition de l'honorable M. Delfosse qui demande que l'on tienne l'article en suspens.
Voici cette observation :
On a dit que les lettres adressées au failli sont un bien du failli, et que, par conséquent, les administrations du bien du failli peuvent les ouvrir. Or, si je ne me trompe pas sur la portée d'un article que nous avons tenu en réserve, et auquel l'honorable M. Jullien doit présenter un amendement qui sera discuté demain, les biens de la femme doivent aussi venir sous l'administration des curateurs; si les lettres adressées au failli sont un bien du failli, il en sera de même des lettres adressées à sa femme; et comme les curateurs d'une masse faillie auront même l'administration des biens de la femme du failli, il s'ensuivra donc que les curateurs pourront lire les lettres adressées à la femme du failli ; admettrez-vous cette conséquence?
M. Tesch, rapporteur. - L'article n'est pas nouveau; il se trouvait dans l'ancien Code. Or, il est évident que si la disposition de la Constitution qu'on invoque, est si absolue, dès ce moment, l'article du Code de commerce aurait été aboli par la Constitution ; eh bien, depuis lors cependant, il n'a pas cessé d'être observé, et jamais on n'est venu prétendre que cette manière d'agir était inconstitutionnelle. La charte française contenait la même disposition que notre Constitution quant au secret des lettres; et cependant l'article que l’on critique aujourd'hui a passé dans la législation française, et personne n'a manifesté les scrupules constitutionnels que l'honorable M. Coomans vient d'exprimer.
M. Lelièvre. - Si le système de l'honorable M. Coomans était admis, il faudrait aller jusqu'à prétendre que l'héritier ne pourrait ouvrir la lettre adressée à son auteur. Il ne peut en être ainsi, la lettre est la propriété du failli; or, les curateurs qui sont substitués au failli doivent nécessairement pouvoir ouvrir des lettres qui renferment peut-être des valeurs mobilières ou des renseignements nécessaires à l'administration de la faillite. Enlever le droit en question aux curateurs, ce serait, en nombre d'occasions, rendre impossibles tous actes de gestion de la part de ceux-ci.
M. Mercier. - Messieurs, j'appuie le renvoi proposé par l'honorable M. Delfosse. Nous ne devons pas jouer sur les mots. La Constitution dit que le secret des lettres est inviolable; il est toujours indiscret, mais légalement il n'est pas défendu de lire une lettre ouverte, mais il est défendu de la décacheter, de l'ouvrir, de la lire ; il y a ici une grande distinction à faire. La question mérite d'être examinée, et, en conséquence, j'appuie la proposition de l'honorable M. Delfosse.
- Le renvoi de l'article à la commission est mis aux voix et prononcé.
Art. 480. Les curateurs rechercheront et recouvreront, sur leurs quittances, toutes les créances ou sommes dues au failli. Les deniers prove- \ nant des ventes et recouvrements faits par les curateurs seront, sous la | déduction des sommes arbitrées par le juge-commisssaire, versés à la caisse des consignations dans les huit jours de la recette. En cas de re- ; tard, les curateurs devront les intérêts commerciaux des sommes qu'ils n'auront pas versées, sans préjudice à l'application des articles 450 et 462.
- Adopté.
« Art. 481. Les sommes versées à la caisse des consignations pour le compte de la faillite ne pourront être retirées que sur mandats des curateurs visés par le juge-commissaire. La remise en sera faite sans autres formalités, sur ces mandats, qui pourront être délivrés au profit ou à l'ordre des créanciers de la faillite. »
- Adopté.
« Art. 482. Lorsque le tribunal aura ordonné le dépôt du failli ou la garde de sa personne, le juge-commissaire pourra, d'après l'état apparent de ses affaires, proposer de lui accorder sa mise en liberté ou un sauf-conduit provisoire. Si le tribunal accorde le sauf-conduit, il pourra obliger le failli à fournir caution de se représenter, sous peine de payement d'une somme que le tribunal arbitrera, et qui, le cas avenant, sera dévolue à la masse.
Si le juge-commissaire ne propose pas la mise en liberté, le failli pourra présenter sa demande au tribunal, qui statuera en audience publique, après avoir entendu le juge-commissaire.
- Adopté.
« Art. 483. Le failli ne peut s'absenter sans l'autorisation du juge-commissaire. Il sera tenu de se rendre à toutes les convocations qui lui seront faites, soit par le juge-commissaire, soit par les curateurs.
« Dans tous les cas où la présence du débiteur incarcéré ou gardé hors de prison sera nécessaire aux opérations de la faillite, il sera, sur l'ordre du juge-commissaire, extrait de la prison ou du lieu où il est gardé et conduit là où sa présence sera requise. »
- Adopté.
« Art. 484. Le failli pourra comparaître par fondé de pouvoir, s'il justifie de causes d'empêchement reconnues valables par le juge-commissaire. »
- Adopté.
« Art. 485. Les curateurs appelleront le failli auprès d'eux pour clore et arrêter les livres et écritures en sa présence. »
- Adopté.
« Art. 486. Les curateurs procéderont immédiatement à la vérification et à la rectification du bilan. S'il n'a pas été déposé, ils le dresseront à l'aide des livres et papiers du failli et des renseignements qu'ils pourront se procurer, et ils le déposeront au greffe du tribunal de commerce, »
- Adopté.
« Art. 487. Le juge-commissaire est autorisé à entendre le failli, ses commis et employés et toute autre personne, tant sur ce qui concerne la vérification ou la formation du bilan, que sur les causes et circonstances de la faillite. »
- Adopté.
« Art. 488. Lorsqu'un commerçant aura été déclaré en faillite après son décès, ou lorsque le failli viendra à décéder après l'aveu de sa faillite, sa veuve, ses enfants ou ses héritiers pourront se présenter ou se faire représenter pour le suppléer dans la formation du bilan, ainsi que dans toutes les opérations de la faillite. »
- Adopté.
« Art. 489. A compter de leur entrée en fonctions, les curateurs seront tenus, sous leur responsabilité personnelle, de faire tous les actes pour la conservation des droits du failli contre ses débiteurs.
« Ils seront aussi tenus de requérir l'inscription des hypothèques sur les immeubles des débiteurs du failli, si elle n'a pas été requise par lui; l'inscription sera prise au nom de la masse par les curateurs, qui joindront à leur bordereau un certificat du greffier constatant leur nomination.
« Ils seront tenus, en outre, de prendre inscription, au nom de la masse des créanciers, sur les immeubles du failli dont ils connaîtront l'existence. L'inscription sera reçue sur un simple bordereau énonçant qu'il y a faillite et relatant la date du jugement par lequel ils auront été nommés. »
- Adopté.
« Art. 490. Dans les trois jours de leur entrée en fonctions, les curateurs requerront, s'il y a lieu, la levée des scellés, et procéderont à l'inventaire des biens du failli, lequel sera présent ou dûment appelé.
« Les curateurs pourront, avec l'autorisation du juge-commissaire, se faire aider, pour sa rédaction comme pour l'estimation des objets, par qui ils jugeront convenable. »
- Adopté.
« Art. 491. L'inventaire sera dressé par les curateurs à mesure que les scellés seront levés ; le juge de paix y assistera et le signera à chaque vacation; la minute sera déposée, dans les vingt-quatre heures de sa clôture définitive, au greffe, où les curateurs pourront en prendre copie sans frais et sans déplacement.
« Il sera fait récolement des objets qui, conformément à l'article 471, n'auront pas été mis sous les scellés ou qui en auront été extraits et inventoriés. »
- Adopté.
« Art. 492. En cas de déclaration de faillite après décès, lorsqu'il n'aura point été fait d'inventaire antérieurement à cette déclaration, ou en cas de décès du failli avant l'ouverture de l'inventaire, il y sera procédé immédiatement dans les formes du précédent article, en présence des héritiers ou eux dûment appelés. »
- Adopté.
« Art. 493. L'’inventaire terminé, les marchandises, l'argent, les papiers, les titres actifs, meubles et effets du débiteur, seront remis aux curateurs, qui s'en chargeront au pied dudit inventaire. »
- Adopté.
« Art. 494. Les curateurs pourront, avec l'autorisation du juge-commissaire, et le failli dûment appelé, transiger sur toutes les contestations (page 97) qui intéressent la masse, même sur celles qui sont relatives à des actions et droits immobiliers.
« Lorsque la transaction portera sur des droits immobiliers, ou quand son objet sera d'une valeur indéterminée ou qui excède 300 fr., la transaction ne sera obligatoire qu'après avoir été homologuée, sur le rapport du juge-commissaire. Si la contestation sur laquelle il aura été transigé était de la compétence du tribunal civil, la transaction sera homologuée par ce tribunal.
« Le failli sera appelé à l'homologation; il aura, dans tous les cas, la faculté de s'y opposer. Son opposition suffira pour empêcher la transaction, si elle a pour objet des biens immobiliers.
« Les curateurs pourront aussi, avec l'autorisation du tribunal de commerce, le failli dûment appelé, déférer le serment litisdécisoire à la partie adverse, dans les contestations dans lesquelles la faillite sera engagée. »
- Adopté.
« Art. 495. Les curateurs pourront employer le failli pour faciliter et éclairer leur gestion. Le juge-commissaire fixera les conditions de son travail. »
- Adopté.
« Art. 496. En toute faillite, les curateurs, dans la quinzaine de leur entrée en fonctions, seront tenus de remettre au juge-commissaire un mémoire ou compte sommaire de l'état apparent de la faillite, de ses principales causes et circonstances et des caractères qu'elle paraît avoir.
« Le juge-commissaire transmettra immédiatement le mémoire avec ses observations au procureur du roi. S'il ne lui a pas été remis dans le délai prescrit, il en préviendra le procureur du roi et lui indiquera les causes du retard. »
- Adopté.
« Art. 497. Si le failli est poursuivi du chef de banqueroute simple ou frauduleuse, s'il y a mandat d'amener, de dépôt ou d'arrêt décerné contre lui, le procureur du roi en donnera connaissance sans délai au juge-commissaire, et, dans ce cas, celui-ci ne pourra proposer et le tribunal ne pourra accorder ni mise en liberté ni sauf-conduit. »
- Adopté.
« Art. 498. Les créanciers du failli sont tenus de déposer au greffe du tribunal de commerce la déclaration de leurs créances avec leurs titres, dans le délai fixé au jugement déclaratif de la faillite. Le greffier en tiendra état et en donnera récépissé.
« Les créanciers sont avertis à cet effet par les publications et affiches prescrites par l'article 472. Ils le seront en outre par une circulaire chargée à la poste, que les curateurs leur adresseront aussitôt qu'ils seront connus. Cette circulaire indiquera les jours et heures fixés pour la clôture du procès-verbal de vérification des créances et les débats des contestations à naitre de cette vérification.
« Les bulletins de chargement seront et demeureront annexés à la minute de la circulaire, qui sera visée par le juge-commissaire. »
- Adopté.
« Art. 499. S'il existe des créanciers étrangers, à l'égard desquels le délai fixé par le jugement déclaratif de la faillite serait trop court, le juge-commissaire le prolongera à leur égard selon les circonstances ; il sera fait mention de cette prolongation dans les circulaires adressées à ces créanciers, conformément à l'article 498. »
- Adopté.
« Art. 500. La déclaration de chaque créancier énoncera ses nom, prénoms, profession et domicile, le montant et les causes de sa créance, les privilèges, hypothèques ou gages qui y sont affectés et le titre d'où elle résulte.
« Cette déclaration sera terminée par une affirmation conçue dans les termes suivants :
« J'affirme que ma présente créance est sincère et véritable, ainsi Dieu me soit en aide.
« Elle sera signée par le créancier, ou en son nom par son fondé de pouvoirs ; dans ce cas, la procuration sera annexée à la déclaration, et elle devra énoncer le montant de la créance et contenir l'affirmation prescrite par le présent article. »
- Adopté.
« Art. 501. La déclaration contiendra, de la part du créancier non domicilié dans la commune où siège le tribunal, élection de domicile dans cette commune.
« A défaut d'avoir élu domicile, toutes significations et toutes informations pourront leur être faites ou données au greffe du tribunal. »
- Adopté.
« Art. 502. La vérification des créances aura lieu de la part des curateurs à mesure que la déclaration en sera faite au greffe; elle sera opérée en présence du juge-commissaire et à l'intervention du failli, ou lui dûment appelé. Les titres en seront rapprochés des livres et écritures du failli.
Les créances des curateurs seront vérifiées par le juge-commissaire. Un procès-verbal des opérations sera dressé par les curateurs et signé à chaque séance par eux et le juge-commissaire. Il indiquera le domicile des créanciers et de leurs fondés de pouvoirs. Il contiendra la description sommaire des titres produits, mentionnera les surcharges, ratures et interlignes, et exprimera si la créance est admise ou contestée.
« En cas de contestation ou si la créance ne paraît pas pleinement justifiée, les curateurs ajourneront leur décision jusqu'à la clôture du procès-verbal de vérification, et si, au moment de cet ajournement, le créancier n'est pas présent en personne ou par fondé de pouvoir, ils lui en donneront immédiatement avis par lettre chargée à la poste. »
- Adopté.
« Art. 503. Après la déclaration de chaque créance et jusqu'au jour fixé pour les débats sur les contestations qu'elle soulève, le juge-commissaire pourra, même d'office, ordonner la comparution personnelle du créancier ou de son fondé de pouvoirs et de toutes personnes qui pourront fournir des renseignements. Il dressera procès-verbal de leurs dires. Il pourra aussi ordonner la représentation de ses livres ou demander, en vertu d'un compulsoire, qu'il en soit rapporté un extrait fait par le juge du lieu. »
- Adopté.
« Art. 504. Dans la séance fixée pour la clôture du procès-verbal de vérification, toute créance déclarée qui sera contestée ou qui n'aura pas encore été admise, sera examinée contradictoirement. Les curateurs signeront sur le titre de chacune des créances admises et non contestées la déclaration suivante : Admis au passif de la faillite de........pour la somme de.......le.......
« Le juge-commissaire visera la déclaration et renverra, au tribunal toutes les contestations relatives aux créances non admises. Toutefois, s'il y a des contestations qui, à raison de la matière, ne sont pas de la compétence du tribunal de commerce, elles seront renvoyées devant le juge compétent, pour la décision du fond, et devant le tribunal de commerce, pour y être statué, conformément à l'article 506, jusqu'à concurrence de quelle somme le créancier contesté pourra prendre part aux délibérations du concordat. »
- Adopté.
« Art. 505. Le failli et les créanciers vérifiés ou portés au bilan pourront assister à la vérification des créances et fournir des contredits aux vérifications faites et à faire. Après la clôture du procès-verbal de vérification, les contredits aux vérifications faites et comprises dans ce procès-verbal ne pourront, à peine de nullité, être formés que par actes signifiés aux créanciers déclarants, et déposés au greffe avec les pièces justificatives, deux jours avant l'audience fixée pour les débats sur les contestations.
« Les contredits aux vérifications qui seraient faites après la clôture du procès-verbal de vérification devront, sous la même peine, être signifiés dans les dix jours qui suivront l'admission de la créance contestée. Toutefois, ce délai ne courra, à l'égard des créanciers admis postérieurement à cette dernière époque, qu'à compter de la vérification de leurs créances. »
- Adopté.
« Art. 506. Au jour fixé par le jugement déclaratif pour les débats sur les contestations, le juge-commissaire fera son rapport, et le tribunal ainsi saisi, sans attendre l'expiration des délais qui auront été prolongés en vertu de l'article 499, procédera, sans citation préalable, par urgence, toutes affaires cessantes, et s'il est possible, par un seul jugement, à la décision de toutes les contestations relatives à la vérification des créances. Ce jugement sera rendu après avoir entendu contradictoirement, s'ils se présentent, les curateurs, le failli et les créanciers opposants et déclarants.
« Les contestations qui ne pourront recevoir une décision immédiate seront disjointes ; celles qui ne seront pas de la compétence du tribunal seront renvoyées devant le juge compétent. Le tribunal pourra toutefois, dans l'un et l'autre cas, décider par provision que les créanciers contestés seront admis dans les délibérations pour la formation du concordat, pour une somme qui sera déterminée par le même jugement. S'il ne statue pas à cet égard, les créanciers contestés ne pourront prendre part aux opérations de la faillite, tant qu'il ne sera intervenu de décision sur le fond de la contestation.
« Aucune opposition ne sera reçue contre les jugements portés en exécution du présent article, ni contre ceux qui statueront ultérieurement sur les contestations disjointes. Le jugement qui prononcera une admission provisionnelle de créanciers contestés, ne sera, en outre, susceptible ni d'appel ni de recours en cassation. »
- Adopté.
« Art. 507. Toutes contestations, concernant la liquidation des faillites qui seraient de la compétence des tribunaux civils, y seront portées à bref délai et jugées par urgence. Il en sera de même pour toutes les contestations de cette espèce qui seront portées devant les cours d'appel. »
M. Allard. - Je crois qu'il est nécessaire d'ajouter à la fin de la première phrase de cet article, après les mots par « urgence », les mots « toutes affaires cessantes », qui se trouvent au paragraphe de l'article précédent.
M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je pense que les mots par urgence suffisent. Les mots toutes affaires cessantes imposeraient aux tribunaux une règle qui, dans certaines circonstances, pourrait entraver le cours de la justice. Je crois qu'il suffit d'insérer dans la loi que ces affaires seront jugées par urgence.
M. Tesch, rapporteur. - Il est certain qu'il y a un grand intérêt (page 98) à ce que ces affaires soient promptement jugées. Mais il ne faut pas aller jusqu’à dire qu'elles sont de toutes les plus urgentes, qu'il faut cesser le jugement de toutes les autres affaires pour juger les affaires de faillites. Il peut y avoir d'autres affaires, telles que les questions d'état, les affaires électorales, les affaires de divorce, etc., qui seront beaucoup plus urgentes. Nous ne pouvons donc admettre un amendement qui obligerait les tribunaux à cesser le jugement de toutes les autres affaires, pour juger les affaires de faillites.
M. Allard. - Je n'insiste pas.
- L'article 507 est adopté.
« Art. 508. Jusqu'au jugement à intervenir sur les contestations, toutes les déclarations de créances, les pièces produites à l'appui et tous actes, procès-verbaux, contredits et requêtes y relatifs, resteront déposés au greffe et seront, à toutes réquisitions, communiqués aux intéressés. »
- Adopté.
« Art. 509. Il sera tenu au greffe, pour chaque faillite, un tableau divisé en colonnes et contenant, pour chaque créance déclarée, les énonciations suivantes :
« 1° Le numéro d'ordre;
« 2° Les nom, prénoms, profession et résidence du créancier qui aura déposé sa déclaration et ses titres ;
« 3° La date de ce dépôt ;
« 4° Le montant de la créance déclarée ;
« 5° La désignation sommaire des biens ou objets sur lesquels on prétend qu'elle serait hypothéquée ou privilégiée;
« 6° Son admission au passif ou son rejet par les curateurs:
« 7° La date de cette admission ou de ce rejet ;
« 8° Les contredits;
« 9° Les noms des opposants;
« 10° Les dates des contredits;
« 11°Le jour auquel le procès-verbal de vérification sera clos ;
« 12° Le jour où s'ouvriront les débats sur les contestations;
« 13° Le sommaire de la décision définitive;
« 14° La date de cette décision, et
« 15° Les autres renseignements qu'il pourra être utile de porter à la connaissance des intéressés.
« Ce tableau sera dressé par le greffier; les énonciations exigées y seront faites successivement jour par jour et au fur et à mesure que les faits et circonstances auxquels elles se rattachent se reproduiront. il sera, à toute réquisition, communiqué aux intéressés. »
- Adopté.
« Art. 510. A défaut de déclaration et d'affirmation de leurs créances dans le délai fixé par le jugement déclaratif de la faillite, et prolongé en vertu de l'article 499, les défaillants connus ou inconnus ne seront pas compris dans les répartitions ; toutefois ils pourront déclarer et affirmer leurs créances jusqu'à la dernière distribution des deniers inclusivement. Leurs déclarations ne suspendront pas les répartitions ordonnées; mais si de nouvelles répartitions sont ordonnées après ces déclarations, ils y seront compris pour la somme qui sera provisoirement déterminée par le juge-commissaire, et qui sera tenue en réserve jusqu'à ce que leurs créances aient été admises. Dans tous les cas, les frais auxquels la vérification et l'admission de ces créances auront donné lieu resteront à leur charge, et ils ne pourront rien réclamer sur les répartitions ordonnées avant leurs déclarations ; mais ils auront droit à prélever sur l'actif non encore réparti les dividendes afférents à leurs créances dans les premières répartitions, s'ils justifient avoir été dans l'impossibilité de faire leur déclaration et affirmation dans le délai prescrit. »
- Adopté.
La suite de la discussion est renvoyée à demain.
La séance est levée à 4 heures.