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de Kerchove de Limon Charles (1819-1882)

Portrait de de Kerchove de Limon Charles

de Kerchove de Limon Charles, Constant, Ghislain liberal

né en 1819 à Gand décédé en 1882 à Gand

Représentant entre 1863 et 1882, élu par l'arrondissement de Gand

Biographie

(Extrait de L’Echo du Parlement, 26 février 1882)

Les funérailles de M. de Kerchove de Denterghem.

(Par voie télégraphique.)

Gand, 25 février, 2 h. 40.

Les funérailles de M. le comte de Kerchove de Denterghem viennent d'avoir lieu au milieu d’un immense concours de monde.

La plupart des sociétés de Gand y assistaient.

Il y avait un nombre énorme de bourgmestres, de magistrats, de représentants de l'autorité à tous les degrés.

On voyait des délégations des sociétés libérales de tout le pays, de conseils provinciaux, de conseils communaux.

On remarquait la présence de plusieurs sénateurs, de MM. .Verhaeghe de Nayer, gouverneur de la Flandre orientale, et Heyvaert, gouverneur de la Flandre occidentale ; d'un grand nombre de membres de conseils provinciaux, toute la députation permanente du Hainaut et le conseil provincial presque au grand complet se trouvaient là. Ces messieurs étaient arrivés par train spécial.

MM. Frère-Orban, ministre des affaires étrangères, Rolin-Jaequemyns, ministre de l'Intérieur, ont assisté à la funèbre cérémonie.

La députation de la Chambre, escortée par un escadron de lanciers. était conduite par M. Descamps, président. II était accompagné de MM. Couvreur et Le Hardy de Beaulieu, vice-présidents ; d'Andrimont, Devigne, secrétaires ; d'Elhoungne, de Macar, T'Serstevens, Bouvier. Mineur, de Hemptinne, Jottrand, Olin, Goblet d'AlvieIIa, Lippens, Bergé, Paternoster, Washer, Janson, Demeur, Féron, Masquelier, Durieu, Lescarts, Gillieaux, Puissant, Vanderkindere, Willequet, Verhaeghe-de Nayer.

Le conseil communal de Gand, conduit par les membres du collège échevinal, en uniforme, était au grand complet ; l'université étais représentée ainsi que tous les corps constitués.

Aucun membre de la droite n'assistait aux funérailles.

Le deuil était conduit par les fils du défunt, M. Oswald de Kerchove, gouverneur du Hainaut ; M. Rodolph de Kerchove, conseiller provincial, et par ses gendres, M. Lippens et M. le comte de Renesse, et son frère, M. Le comte Ernest de Kerchove.

Dans la chambre mortuaire, le cercueil disparaissait sous un amoncellement de couronnes et de bouquets.

Des discours ont été prononcé à la maison mortuaire par MM. Descamps, président de la Chambre, au nom de la Chambre ; Colson, échevin, au nom du conseil communal de Gand ; d'Elhougne, représentant, au nom de la députation gantoise ; au cimetière, par M. Wagener, professeur à l'université, au nom de l'Association libérale.

Voici le discours de M. le président de la Chambre :

« Messieurs, interprète des sentiments de la Chambre des représentants , je viens , pour la seconde fois, dans le cours d'une semaine, déposer sur la tombe d'un collègue, l'expression de nos regrets les plus douloureux.

« La mort avait, depuis trois ans, frappé coup sur coup dans nos rangs ; après une trêve trop courte, hélas ! elle nous inflige, à quelques jours à peine d'intervalle, deux pertes cruelles et irréparables : elle choisit, de nouveau, ses victimes et nous enlève Van Iseghem et de Kerchove, deux de nos personnalités les plus populaires et les plus sympathiques, deux modèles de civisme et de dévouement à toute épreuve.

« Les collègues du premier magistrat de la ville da Gand vous rappelleront le rare prestige exercé par M. le comte Charles de Kerchove de Denterghem sur la population de la vieille cité flamande qu'il avait administrée pendant un quart de siècle, avec autant d'habileté et de tact que de sagesse et de constante fermeté ; ils vous apprendront le secret de l'immense et solide popularité dont il jouissait parmi la classe ouvrière surtout ; ils vous diront que, si une calamité quelconque venait à menacer les quartiers pauvres de la ville de Gand, c'était le bourgmestre qui, prodiguant, au mépris du danger, l'exemple de la plus généreuse abnégation, allait, de sa personne, relever les défaillances et porter aux malheureux les encouragements et les consolations.

« Le comte Charles de Kerchove de Denterghem élu, pour la première fois en 1863, membre de la Chambre des représentants, fit partie de cette assemblée pendant deux séries de sept années chacune.

Doué d'une remarquable rectitude de jugement, d'une expérience consommée des affaires, il traita avec succès, dès son entrée à la Chambre, diverses questions d'intérêt matériel ; nommé rapporteur de nombreux projets de lois de concessions de lignes ferrées qui devaient sillonner les deux Flandres, il fut également, dans la session de 1865-1866, chargé du rapport sur le budget des travaux publics et sur la prorogation de la loi fixant la réglementation des péages des chemins de fer ; il prit, outre, la part la plus active à l'étude et à la discussion des projets de travaux publics, intéressant tout spécialement le commerce et l'industrie de l'arrondissement de Gand.

« Ce fut, on se le rappelle, avec une persévérante énergie et une opiniâtre fermeté qu'il soutint les intérêts trop longtemps délaissés de sa ville natale dans la question du canal de Gand à Terneuzen. question qu'il eut enfin le mérite et le bonheur de voir résoudre à la pleine satisfaction de nos intérêts. De Kerchove s'occupa encore de divers travaux relatif au département des finances, de l'intérieur, et entra autres, de rapports sur des projets de lois allouant des crédits à l'instruction primaire, et destinés à la construction et à l'ameublement d'écoles.

« Cette dernière branche de l'administration l'intéressait tout particulièrement ; ce fut, en effet, l'un des titres les plus glorieux de de Kerchove à la reconnaissance publique que cette constance dans la sollicitude qu'il avait manifestée dès les premières années de sa carrière pour le développement et les progrès de l'instruction du peuple ; d'un dévouement sans bornes à toutes les idées généreuses, ses votes furent acquis à toutes les mesures qui avaient pour but l'émancipation intellectuelle et du sort des classes inférieures de la société.

« Toujours dévoué, consciencieux, fidèle aux obligations que lui imposait son mandat, il était, avant que la maladie n'ait affaibli son vigoureux tempérament, l'un des membres les plus assidus de l'assemblée ; fanatique de son devoir, nous l'avons vu une dernière fois, il y a quelques semaines à peine,. alors que le mal qui le minait avait, pour ainsi dire, épuisé ses forces, apporter péniblement à la tribune un vote qu'il considérait comme éminemment utile à son pays, et en particulier à l'arrondissement qu'il représentait si dignement.

« La perte d’un homme tel que M. le comte Charles de Kerchove de Denterghem est véritablement un deuil public ; il a traversé la vie en ne répandant autour de lui que des bienfaits ; il a bien mérité de l'arrondissement de Gand, et le pays tout entier, s'associant aux regrets de la population gantoise, conservera la mémoire de cet homme d'élite auquel nous adressons ici un solennel hommage et un suprême adieu. »

Les coins du poêle étaient tenus par MM. Descamps, président de la Chambre ; Rolin-Jaequemyns, ministre de l'intérieur; Verhaege de Noyer, gouverneur de la Flandre orientale ; Colson, échevin ; de Hemptinne, représentant de Gand, et Delecourt, sénateur de Gand. Un corbillard attelé à quatre chevaux suivait.

La garde civique avait envoyé une députation d'officiers, les écoles de Gand suivaient le cortège qui se terminait par un défilé interminable de sociétés.

Une foule immense stationnait sur son parcours.

Les réverbères étaient voilés.


(Extrait de L’Echo du Parlement, du 27 février 1882)

Voici le texte du discours prononcé par M. d'Elhoungne aux funérailles de M. le conte de Kerchove de Denterghem :

« Messieurs,

« Après l'hommage que le président de la Chambre des représentants vient de rendre au grand citoyen dont la mort nous plonge dans l'affliction, je ne puis, au nom de la députation gantoise, qu'ajouter des paroles bien insuffisantes pour honorer. comme il le faudrait, dans son caractère, dans ses œuvres, dans sa carrière si admirablement remplie, l'homme de bien, le collègue, l'ami que nous pleurons en ce jour de deuil.

« Mais sa mémoire n'a pas besoin de discours. vie, depuis son entrée dans la politique, s'est passée au grand jour de la publicité, sous l'œil de ses concitoyens, sous l’œil de ses ennemis aussi ; car il est de ceux qui peuvent s'honorer de leurs ennemis comme de leurs amis. C'est ainsi qu'il a conquis la plus glorieuse et la plus légitime popularité au sein de sa ville natale. C'est ainsi qu'il a acquis, parmi ses coreligionnaires politiques dans tout le pays, une estime et une confiance, dont la presse n'a cessé de retentir depuis sa fin prématurée, et que l'affluence de tant de notabilités politiques à cette triste solennité, leur émotion, leurs regrets attestent avec tant d’éloquence.

« Le comte Ch. de Kerchove de Denterghem, par sa naissance et par sa famille, par toutes ses relations, par l'éclat mème de sa position, semblait devoir appartenir de droit à l'aristocratie. Il y eût brillé sans efforts et sans luttes. La bourgeoisie et le peuple de Gand, qui se pressent aujourd’hui à ses funérailles, tous les représentants du libéralisme belge, qui entourent son cercueil, disent assez que Charles de Kerchove a su choisir une autre voie, obéir à d’autres aspirations, assigner à sa vie un autre but, s'imposer de plus nobles et de plus grands devoirs.

« Il avait reçu une éducation à la fois élevée et positive, qui développa en lai les plus généreuses aspirations. A l'école du génie civil, il compléta son instruction par les études scientifiques et pratiques, qui ont fait le plus, de notre temps, pour l'amélioration matérielle et morale des classes déshéritées.

« Doué d'un sens droit et d'un esprit résolu, homme du dévouement et du devoir, homme d'action et de travail, il n'hésita pas à embrasser la cause du progrès, de la liberté, de la vraie démocratie et, son choix fait, à y consacrer la plus grande partie de son existence. II n'usait de sa grande position que pour se vouer avec plus d'ardeur aux affaires publiques. Aux loisirs de l'opulence, il préféra le labeur, les amertumes, les soucis des fonctions électives et de la vie politique.

« Tous nous l'avons vu à l'œuvre. Pendant vingt-cinq ans, premier magistrat de la ville de Gand, aux institutions qui importent le plus au bonheur du peuple qu'il a travaillé avec un zèle admirable, en même temps qu'il poursuivait sans cesse tout ce qui pouvait développer la prospérité et l'avenir de notre grande cite industrielle. Une voix plus autorisée vous retracera ce que la ville de Gand doit à son bourgmestre vénéré : ce qu'il a fait pour l'instruction populaire, pour l'assistance publique, pour les travaux d'utilité générale ; ce qu’il était aux jours des calamités publiques, où il bravait le danger avec cette simplicité sereine qui était comme la modestie de son courage. Bon, affable, d'une bienfaisance inépuisable, il était un père pour les humbles et les malheureux. Devant les puissants, devant les adversaires qui se nomment eux-mêmes nos ennemis, devant ceux qui cherchent, par des usurpations de détail, à empiéter sur les pouvoirs publics afin de les asservir et afin de dominer la société moderne comme ils ont opprimé les générations passées, devant ceux-là, M. Charles de Kerchove se redressait de toute son énergie. II savait défendre, il savait faire respecter la loi.

« Inflexible dans ses convictions et ses principes, esclave de ses devoirs et de la légalité, il donnait à tous, sans ostentation comme sans oscillation, l'exemple du courage civil, bravant les haines, les calomnies, les injures avec un froid dédain. A la Chambre, Charles de Kerchove s'est montré le mène homme que dans sa carrière administrative, doux et ferme, fidèle à sa foi politique et à sa sollicitude pour le peuple, dévoué à son parti, sympathique à tous, respecté et aimé de tous. Quand sa réélection en 1875 signala la première revanche du libéralisme à Gand, les membres de la gauche parlementaire fêtèrent son retour parmi eux par une véritable ovation.

« Une si belle vie semblait ne pouvoir faire naître la triste appréhension d'une fin prématurée. La Providence, dans ses inexorables décrets, en avait décidé autrement. II y a peu de semaines à peine que notre population apprenait la résolution qui allait la priver de son bourgmestre vénéré.

« Nous avons encore devant les yeux l'explosion de regrets, de reconnaissance, d'affection, que souleva cette retraite. Hélas ! Ce n’est pas parce qu’il aspirait au repos que Charles de Kerchove résignait les fonctions qu’il avait si longtemps et si dignement remplies, c'est parce qu'il était à bout de forces ; c'est parce que sous les sourdes étreintes du mal qui le minait, il se sentait vaincu ; et que, de celte vie qu'Il leur avait vouée, il ne lui restait plus rien à donner à ses concitoyens et à son pays.

« Ses jours n'étaient que trop comptés. A l'émotion de sa retraite, succédait presque aussitôt la désolation de sa mort.

« II est mort comme il a vécu, l'homme du devoir et des convictions fortes, sans ostentation et sans faiblesse, sans peur et sans reproche. Il a eu aux heures des dernières épreuves la consolation suprême d'être entoure tous ceux qu'il aimait le plus, de la fidèle et courageuse compagne de sa vie, de ses fils qui sont dignes de lui, de toute cette nombreuse famille dans laquelle il revivra ; une mort admirable, après une si noble vie !

« Charles de Kerchove, tu trouveras ta récompense dans le bien que tu as fait ; ton pays, la ville de Gand, ses amis et le libéralisme entier, où tu ne comptes que des amis, garderont à la mémoire un souvenir qui ne s'éteindra pas. Charles de Kerchove, c'est la voix d'un ami qui t’adresse ici, un dernier adieu. »


(Extrait de L'illustration horticole. Revue mensuelle des serres et des jardins, Gand, Société continuentale d'horticulture, 1882, pp. 45-46)

LE COMTE CHARLES DE KERCHOVE DE DENTERGHEM

Le souvenir du Comte CHARLES DE KERCHOVE DE DENTERGHEM demeurera comme celui d'une des grandes figures de l'horticulture contemporaine. Tous ceux qui ont assisté depuis trente ans aux floralies quinquennales gantoises, se rappelleront les traits de l'homme affable et distingué qui fut pendant de longues années, comme président d'honneur d'abord, comme président effectif ensuite, à la tête de la Société royale d'Agriculture et de Botanique de Gand et dont la mort, survenue le 21 février dernier, a été considérée avec raison comme un deuil public. C'est que par son caractère il avait su conquérir d'universelles sympathies; c'est que, en outre, ses connaissances étendues en horticulture et la création de ce monument floral connu sous le nom modeste de jardin d'hiver le rendirent célèbre dans le monde entier: aussi tous les organes de la presse horticole, les uns après les autres, aiment à rendre hommage à sa mémoire.

CHARLES CONSTANT GHISLAIN COMTE DE KERCHOVE DE DENTERGHEM naquit à Gand le 4 Juin 1819. A peine eut-il terminé ses études à l'Université de sa ville natale, à l'âge de 20 ans, qu'il prit à cœur tout ce qui touche aux progrès des arts et des sciences, au développement moral et intellectuel du peuple, au progrès de toutes les industries dont le chef-lieu de la Flandre était alors le siége. Son amour des fleurs, la grande passion de sa vie, le porta de bonne heure à donner tout son appui à ceux qui s'occupaient d'horticulture. Ses riches collections acquirent bientôt cette haute renommée qu'elles justifièrent à nos grandes expositions florales et que son goût éclairé sut leur maintenir toujours.

Depuis l'année 1848 il fit partie de la Commission administrative de la Société royale d'Horticulture et de Botanique de Gand; en 1859 il en devint le président d'honneur; à la mort du président DE GHELLINCK DE WALLE, il consentit à devenir le président effectif de la Société du Casino, la plus importante du pays, et contribua dans une large mesure à lui conserver sa prépondérance. A la même époque, il accepta la présidence du Cercle d'Arboriculture de Belgique dont il encouragea la fondation et le développement et qu'il aimait à ranger parmi les œuvres véritablement utiles à la patrie. Dans une circonstance récente, lorsque le Comité central de ce Cercle vint lui remettre le diplôme d'honneur que lui vota l'assemblée générale du 18 décembre dernier, l'estimé président promit au Cercle un concours plus actif et plus dévoué que par le passé, alors que ses fonctions administratives ne lui permettaient pas toujours de satisfaire à ce qu'il appelait ses plus chers désirs. Hélas! on était loin de songer alors au fatal dénouement qui a jeté la consternation dans le cœur de tous ceux qui connurent cet homme de bien.

Dans les importantes fonctions électives auxquelles l'appelèrent ses concitoyens, il se distingua par sa droiture, sa fidélité à ses devoirs et sa mansuétude. Conseiller provincial, bourgmestre de Gand durant vingt-cinq années, tour à tour membre du Sénat et de la Chambre des Représentants, le Comte DE KERCHOVE DE DENTERGHEM rendit d'éminents services à sa ville natale et à son pays et, malgré sa position de fortune, il ne songea au repos que lorsque la maladie ne lui permit plus de remplir toutes les fonctions dont il était revêtu. Ses traits que nous reproduisons d'après le Gardeners' Chronicle trahissent le mal qui depuis plusieurs mois donnait de vives inquiétudes à sa famille.

Les funérailles du Comte DE KERCHOVE DE DENTERGHEM ont eu lieu le 25 février, au milieu d'un concours immense de monde appartenant à toutes les classes de la société. Des députations des corps constitués, de nombreuses écoles, les sociétés les plus considérables formaient à sa dépouille mortelle un imposant cortège, et parmi elles les sociétés horticoles, le Casino, le Cercle d'Arboriculture de Belgique, la Fédération des Sociétés d'Horticulture dont il était Vice-Président, la Chambre syndicale des Horticulteurs belges, la Compagnie continentale d'Horticulture, portant de splendides couronnes funéraires, disaient assez haut de quelle reconnaissante sympathie l'horticulture entourait celui qui n'est plus. Cette sympathie, elle saura la reporter sur sa famille et spécialement sur son fils aîné, M. le Comte OSWALD DE KERCHOVE DE DENTERGHEM, gouverneur du Hainaut, connu par ses nombreux écrits horticoles et botaniques.

L'horticulture a consacré le nom du Comte DE KERCHOVE en lui dédiant des plantes parmi les plus durables; elle conservera toujours le souvenir de sa grande affabilité, de l'élévation de son caractère, de la générosité de son cœur.


(Pierre KLUYSKENS, Charles de Kerchove de Denterghem, dans Ghendtsche Tydinghen, Gand, 1982,pp. 130-138.Voir traduction ci-dessous)

Op hun Kongres van 1846 hadden de Belgische Liberalen een dubbel doel bereikt: de stichting van de eerste georganizeerde politieke partij in het land, het opstellen en doen aanvaarden van een programma, een doctrine, een toekomstplan. De Liberalen waren sterk een eendrachtig uit dit voor hen beslissend kongres getreden. Hun nederlaag te Gent, onneembare vesting van de partij, bij de gemeenteverkiezingen van 1854, verwekte dan ook geweldige sensatie in gans België.

De katastrofale uitslag van die verkiezingen was voor de Gentse afdeling van de partij, een koud stortbad en een ernstige vermaning geweest : zelfs te Gent, konden de Liberalen onverwachts het onderspit delven. Zij zouden dan ook, onmiddellijk na de benoeming en aanstelling van Delehaye, de volgende verkiezingen voorbereiden, metikuleus, hardnekkig, met al de wapens over dewelke de oppositie in ons land beschikt. Die voorbereiding welke zalleiden naar de liberale triomf van 1857, is in het Gentse, grotendeels het werk geweest van Karel de Kerchove, de zoon van de in 1854 door het kiezerskorps aan wal gezette burgemeester. Voor die beslissende verkiezingen van 1857, werd de spurt, om een uitdrukking aan de sportterminologie te ontfutselen, van heel ver ingezet.

Op 26 januari 1857, heeft in het foyer van de Minardschouwburg, de algemene vergadering plaats van de “Liberale Grondwettelijke Vereniging". Een voorzitter wordt verkozen : de 38-jarige Karel de Kerchove, de Kerchove de Limon, zoals men hem noemt om hem gemakkelijker te onderscheiden van zijn vader, graaf Constant de Kerchove de Denterghem.

De militanten van de partij hebben vertrouwen in deze kalme, bezadigde man die weet wat hij wil. De Gentse kiezers kennen hem nochtans slecht, hij is immers nooit biezonder op het voorplan getreden. Bij de gemeenteverkiezingen van 27 september wordt hij weliswaar verkozen, doch van de zestien verkozen liberalen, zijn er slechts twee kandidaten die minder 13 temmen behaald hebben dan de Kerchove, en niettemin zal hij het zijn die, na het ontslag van Delehaye, bij Kon. Besluit van 21 december van hetzelfde jaar, burgemeester van Gent zal worden benoemd.

Het prestige van de naam zal, in die jaren, niet geheel vreemd zijn geweest aan de keus van de overheid, echter ook de belofte die de jonge de Kerchove voor de liberalen vertegenwoordigt. Men heeft in de leiding van de partij begrepen dat populariteit een broos iets is en geen absolute waarborg van overwinning uitmaakt. In een stad als Gent, waar de strijd hard, onmeedogend wordt gevoerd, heeft men een nuchtere doktrinair nodig, omringd door een stafbekwame medewerkers. De oppositie, aangevoerd en opgehitst door "Le Bien Public" zal ongenadig, onvermurwbaar zijn, en op dat ogenblik weten de Liberalen niet eens dat het katoliek dagblad, enkele maanden later op de medewerking zal mogen rekenen van een jonge journalist, die zich dra zal veropenbaren als de meest geduchte debatter van het land : Willem Verspeyen, de man die een halve eeuw lang, met de pen, een strijd op leven en dood tegen de Liberalen zal voeren.

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In 1857 is, alles bij mekaar, een Karel de Kerchove “the right man” voor de Gentse liberalen.

Hij wordt te Gent geboren op 4 juni 1819 als zoon van Constant de Kerchove en gravin Pauline de Loose. Na zijn middelbare studies, loopt hij kollege aan de Universiteit waar hij het diploma van Ingenieur van Bruggen en Wegen behaalt, een diploma dat gewoonlijk niet leidt naar de kronkelende wegen van de politiek, behalve wanneer men thuis aan tafel zit met een vader-burgemeester en men tevens bevriend geraakt met een sterke personaliteit als François Huet, filosoof en voornaamste discipel van de Franse wijsgeer Bordas-Demoulin.

De invloed van Professor Huet, die aan de Gentse Hogeschool de wijsbegeerte doceerde, is van kapitale invloed geweest op heel wat politieke figuren uit de tijd, liberalen en toekomstige socialisten. Huet, heftig bekampt door de geestelijkheid en door de konservatieven, heeft ook op Karel de Kerchove een beslissende invloed uitgeoefend en heeft hem talrijke gedachten en principes aangeleerd, welke de jonge burgemeester naderhand in zijn politieke loopbaan zal trachten te verwezenlijken en die van hem, vrij vlug, de leider van de door nieuwe idealen bezielde liberale partij; althans in het Gentse, zullen maken.

Op 16 mei 1843 trad Karel de Kerchove in het huwelijk met Eugènie de Limon de Steenbrugghe, die hem zes kinderen zou schenken: Oswald, die later goeverneur van Henegouwen, volksvertegenwoordiger en senator zou worden, Malvina, Rodolf, Clotilda, Louisa en Adelbrecht.

Materiële of financiële zorgen zullen er in de familie de Kerchove wel nooit bestaan hebben. Wij kennen zelfs, tengevolge van een vinnige polemiek, die zijn eigen partij had uitgelokt, het approximatief bedrag van , zijn fortuin, toen hij een tijdlang burgemeester van Gent was.

De Liberalen die het in die jaren speciaal op de kloosters hadden gemunt en een scherpe kampagne voerden tegen de zg. Dode Hand, hadden in hun pers en in een “Statistique des Couvents de Gand" beweerd dat het gezamenlijk fortuin van de Gentse kloosters ruim 12.000.000 goudfrank bedroeg.

De katolieke senator Jules Lammens greep toen naar zijn beste pen en liet in “Le Bien Public” van 4 juni 1878 een open brief “en réponse à la Statistique des Couvents de Gand publiée par l'Association libérale” verschijnen, waarin hij matematisch aantoonde dat de burgemeester van Gent eigenaar was van 3.897 ha grond, met een gezamenlijk waarde van 14.866.503 goudfrank, hetgeen in onze munt omgezet, zowat een peulschilletje van 750.000.000 fr. vertegenwoordigt !

In 1849 had Karel de Kerchove zijn intrede in de politiek gedaan. In een kleine brochure, in 1898 verschenen en aan de gewezen burgemeester van Gent gewijd, schrijft G. D. Minnaert : " Als een zeer bemind lid van verscheidene verenigingen en genootschappen, deed hij in 1849 zijn intrede in het praktische staatsleven als lid van de provinciale raad, betrekking welke hij waarnam op de meest eervolle wijze. De ernstige diensten die hij daar bewees, het vrij overtuigend uitspreken zijner vrijzinnige denkbeelden, deden zijn invloed en gezag allengs rijzen. "

De tweede etappe van zijn politieke loopbaan was zijn verkiezing, begin 1857, tot voorzitter van de Liberale Grondwettelijke Vereniging, de derde zijn verkiezing tot gemeenteraadslid in oktober van hetzelfde jaar, kort nadien gevolgd van zijn benoeming tot burgemeester van Gent. Het burgemeesterschap is, in het Gentse, van oudsher een nuttige wipplank geweest voor nationale funkties : Karel de Kerchove deed in 1863 als vertegenwoordiger van het arrondissement, zijn intrede in de Kamer, enkele jaren nadien in de Senaat, maar het was niettemin aan het bestuur van zijn geboortestad dat hij het beste van zijn tijd en van zijn talent heeft gewijd.

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Wanneer men een na een de politieke loopbaan van onze burgemeesters ondeedt, komt men onvermijdelijk tot de konklusie datin elke carrière het partijpolitieke van het administratieve moet worden gescheiden, als het kaf van het koren. Een burgemeester is groot in de mate dat hij het administratieve, d.w.z. de praktische verwezenlijkingen van blijvende aard die de stad zelve en de meerderheid van de burgers ten goede komen, 133 kan of durft stellen boven de imperatieven hem door de politieke lijn of optiek van zijn eigen partij opgedrongen. Dit is slechts mogelijk in perioden zonder politiek, filosofisch of religieus fanatisme. In de tweede helft van XIXe eeuw was een dergelijke onafhankelijkheid uitgesloten omdat het plaatselijk politiek leven niet meer dan een kalke was van het nationaalleven en zijn troebel politiek klimaat.

Menig burgemeester van Gent zou in die jaren de slaaf geworden zijn van de denkbeelden en instrukties van zijn partij. Het strekt ongetwijfeld Karel de Kerchove tot eer dat hij zich terdege heeft ingespannen om aan die dwingelandij, aan die imperatieven te ontkomen. "Ik heb máar één doel, had hij bij zijn eerste optreden in de Gemeenteraad na zijn benoeming verklaard, dat is, in de mate van mijn krachten mede te werken tot de bloei en de welvaart van de stad, ter behartiging van haar belangen en het behoud van de uitnemende naam, die zij in het land geniet."

Alle burgemeesters hebben dezelfde of ongeveer dezelfde woorden gesproken, zoals zij ook allen, daags van of na hun aanstelling, de gebruikelijke serenades in ontvangst mochten nemen. Voor Karel de Kerchove die toen in de Burgstraat woonde, waren die serenades biezonder talrijk: van de Melomanen, de Koormaatschappij, het muziekkorps van de Burgerwacht, het orkest van de Grote Schouwburg.

Het is pas na het uitsterven van de laatste akkoorden, dat de zware taak begint. de Kerchove vervulde ze als kalme, gewetensvolle, bezadigde man. Hij was, schrijven zijn tijdgenoten, gezellig en gastvrij, een noeste werker, maar geen groot redenaar, "daarvoor had zijn stem noch kracht, noch buigzaamheid."

de Kerchove was een toegewijde burgemeester; men zag hem, tijdens de verschi:ikkelijke epidemie van cholera, de armste wijken van de stad bezoeken en men vertelde dat, toen de overstromingen ganse straten van de stad onder water hadden gezet, de Kerchove niet geaarzeld had 's nachts, tot boven de knieën in het water, de gesinistreerde straten en wijken af te lopen.

Dit zijn gebaren die de populariteit van een burgemeester een paar graden doen stijgen, zo ook de grote liefde van Karel de Kerchove voor planten en bloemen. Een burgemeester die zich niet kan entoeziasmeren voor een roos of een nieuwe variëteit van plant, vrucht of bloem, zal te Gent vroeg aflaat zijn matten mogen oprollen.

Graaf Karel de Kerchove de Denterghem, groot van gestalte, grand seigneur in zijn allures, met mooie, lange baard, zachte blik, was hetgeen men noemt een reprezentarief man. De baard is ten andere lange tijd een onmisbaar attribuut geweest van het burgemeesterschap te Gent : na de Kerchove, droegen ook Lippens en Braun een mooiverzorgde baard.

De Kerchove zag bloemen graag, hij was tevens een kenner van bloemen. Sedert 1859 voorzitter van de Koninklijke Hofbouwmaatschappij, bezat hij aan de Nieuwe Wandeling prachtige serren en de mooiste Wintertuin van de stad; er ging geen prijskamp voorbij zonder dat de burgemeester er aan deelnam, er was geen prijskamp zonder ereprijs of erepalm voor hem.

Die liefde voor de bloemen vinden wij terug in zijn administratieve verwezenlijkingen. Hij wenste een stad met brede straten en brede lanen, met parken en bloemperken. Die liefhebber van bloemen wou licht en lucht in zijn stad, vooral in de ongezonde wijken. Zijn voornaamste verdienste in dit domein, was de aankoop door de stad van de gronden van de gewezen Citadel om ze om te vormen tot dit heerlijk Park dat de trots van Gent en de Gentenaren werd. de Kerchove begon het werk dat zijn opvolgers zouden voortzetten. Ook werd tijdens zijn burgemeesterschap ijverig gewerkt aan de nieuwe wijken o.m. op Rooigem, en aan het aanleggen van de Bylokeen Ekkergemlanen.

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Het was een lang burgemeesterschap, een kwart eeuw, voldoende om in menig domein nuttig en blijvend werk te verrichten.

Ging zijn bezorgdheid als mens; naar een fraai en. zonnig uitzicht van de stad, zo ging zijn belangstelling als politieker, naar het onderwijs, in zeker opzicht ook, mede onder de invloed van de gedachten van Professor Huet, naar een weliswaar nog tamelijk bescheiden vorm van sociale verwezenlijkingen.

In die jaren dachten de Liberalen dat het beste middel om voor de partij de toekomst te verzekeren, het vermenigvuldigen was van de officiële scholen, waar zij een vast en trouw kliënteel hoopten te kunnen vormen. Voor die schoolpolitiek kreeg de Kerchove zijn partij als een man aan zijn zijde, niet het minst zijn rechtstreekse medewerkers als Callier, Vermande!, Colson, de Maere, Wageneren Laurent. Het aantalleerlingen van de stadsscholen steeg tijdens zijn burgemeesterschap, van 5.000 tot 19.000; talrijke nieuwe scholen werden gebouwd, o.m. twee rijksnormaalscholen, terwijl andere scholen werden vergroot of heringericht, als het Atheneum en de Middelbare School.

In die tijd was de grootste vreugde van burgemeester, stadsbestuur en ouders, de schoolkinderen te zien defileren. Met honderden, met duizenden trokken ze zingend door de straten bij de minste gelegenheid; voor de grote gebeurtenissen, het internationaal kongres van de sociale wetenschappen, de inhuldiging van het standbeeld van J acob van Artevelde, de komst van de koning, werden het eindeloze défilees, met witte handschoenen, witte kousen, witte lintjes en strikjes in het haar.

Het was ook onder zijn bestuur dat in 1873 het burgerlijk hospitaal naar de plannen van Pauli en De Waele werd ingericht, dat de nieuwe gebouwen van het Instituut der Wetenschappen werd opgetrokken, dat het Muziekkonservatorium in nieuwe, degelijke lokalenwerd ondergebracht, dat de tekenen schilderakademie volledig heringericht werd, en dat aan de haven van Gent belangrijke werken werden uitgevoerd, o.m. het graven van het Verbindingskanaal dat de Vaart op Terneuzen met de Brugse Vaart verbond, de verbetering van de inrichting van het Stapelhuis en zijn omgeving van 1866 tot 1878, de verdieping en verbreding van het Kanaal van Terneuzen. Op 2 juni 1879 werd het laaste vak, van Rieme tot aan de Hollandse greris ingehuldigd en vaarden drie grote steamers van de lijnvaart op Engeland voor het eerst, zonder gelicht te moeten worden, de haven van Gent binnen.

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Er zijn in de loopbaan van Karel de Kerchove twee gebeurtenissen welke men moeilijk over het hoofd kan zien : de staking van de Gentse wevers in 1859 en de verdrijving van de begijntjes uit het oud Begijnhof van Ste-Elisabeth.

De stakingen van 1859, meer bepaaldelijk de zaak van de herberg "In het zwart hondeken", zijn een bladzijde die herhaalde malen werd opgewekt o.a. in de historische roman van Anseele "Voor 't volk geofferd" en in het werk van Destrée en Vandervelde "Le socialisme en Belgique". In hèt begin van deze eeuw werden zij nogmaals, tijdens een diskussie in de Kamer van Volksvertegenwoordigers, in zitting van 20 april1904, opgerakeld door Emiel Vandervelde: "En 1859, zo verklaarde spreker, c'était pourtant un libéral, ce bourgmestre de Gand, qui allait au local de l Association ouvrière confisquer le pauvre argent que les ouvriers tisserands gantois étaint parvenus à réunir pour créer un fonds de résistance".

De zoon van wijlen Karel de Kerchove, graaf Oswald de Kerchove de Denterghem, toen senator, stuurde ogenblikkelijk de socialistische leider een brief, welke niet onbeantwoord bleef en daar beide tegenstrevers hun brieven in de pers lieten verschijnen, ontstond er heel wat kabaal in de politieke middens, hetgeen Oswald de Kerchove aanzette een brochure "La Grève des Tisserands Gantois en 1859" uit te geven. In dit werkje dat op een aantal officiële teksten steunt tracht hij de houding van zijn vader in deze beruchte en pijnlijke zaak te rechtvaardigen en de ware verantwoordelijkheden te bepalen.

Het was een van de tragische bladzijden uit de ontvoogdingsstrijd van de werklieden geweest. In 1859 beteugelden artikels 414 en volgende van het Strafwetboek nog steeds hetverenigings-en stakingsrecht van de arbeiders. Welnu, begin 1859, was de toestand hachelijk in de Gentse katoenindustrie; fabrieken werden gesloten, de lonen verminderd, er heerste een zekere agitatie, meetings werden ingericht, werklieden gingen aan 't staken.

Het is dat ogenblik dat een slecht geïnspireerd magistraat die wellicht beter de wet dan de mensen kende, de prokureur des konings de Villegas, uitkoos om de politie opdracht te geven in de herberg "In het zwart hondeken" beslag te leggen op de kas die de opbrengst van de omhalingen of "rondekens" ten voordele van de stakende werklieden bevatte, de Villegas had dit bevel gegeven, zonder zelfs de burgemeester, hoofd van de politie, te raadplegen.

De politiekommissaris werd nogal koeltjes onthaald, trok zich terug, bracht verslag uit aan de burgemeester die ten stadhuize met de goeverneur van de provincie overleg pleegde. Beide waren het volkomen eens : het optreden van het Parket was "inopportun et odieux".

de Kerchove poogde toen met de uitbater van de herberg te onderhandelen, doch zonder enig sukses; toen beval het Parket aan Rijkswacht en Politie in de herberg binnen te dringen; zij werden met stenen onthaald doch konden uiteindelijk de hand leggen op de kas die 850 fr. 24 cent, bevatte !

Het verslag van goeverneur De Jaegher aan de Minister van Binnenlandse Zaken is een ware akte van beschuldiging, een kaakslag aan de prokureur des konings; het totaal gebrek aan takt en aan mensenkennis van deze magistraat had het ergste kunnen veroorzaken. In elk geval blijkt het wel dat Karel de Kerchove in deze aangelegenheid weinig verwijt treft, maar dat men hem andermans domheid en brutaal optreden in de schoenen heeft willen duwen.

In het tweede voorval, de verdrijving van de Gentse begijntjes, is integendeel de houding van de Kerchove onmogelijk goed te praten. Hij heeft in deze àangelegenheid slaafs de antiklerikale mentaliteit en instrukties van zijn partij gevolgd, zonder ook maar iets te beproeven om de aanslag op de rechten van de begijntjes en op een van de mooiste Gentse stadsgezichten, te verhinderen. Als hoofd van het kollege en van de meerderheid in de gemeenteraad, was hij de verantwoordelijke en blijft hij de verantwoordelijke voor het gebeuren ook voor het nageslacht dragen. De antiklerikale meerderheid had besloten dat de begijntjes, kost wat kost, onder om het even welk voorwendsel, uit het Begijnhof Ste Elisabeth zouden verdreven worden en dat men dit gezegend oord zou verminken en van zijn karakter en atmosfeer beroven door het aanleggen van nieuwe, rechtlijnige straten, de vernieling van tuintjes en konventen. Het Verzoekschrift van de Grootjuffrouwen die herinnerden aan al hetgeen de begijntjes in het verleden voor Gent en zijn inwoners hadden gedaan, werd verworpen; de grachten werden gedempt, de ingangspoort werd verwijderd, de huizen en konventen aan vreemde personen verhuurd en in een laatste gebaar van barbaarse woede werden de mooiste getuigen van het verleden afgebroken en gesloopt alsof men elk spoor van hun bestaan voor eeuwig had willen doen verdwijnen.

Uiteindelijk werden de begijntjes, in 1874, uit het Oud Begijnhof van Ste-Elisabeth verdreven.

Het was en blijft een vlek en een smet op het burgemeesterschap van hem die in deze aangelegenheid de moed niet heeft gehad neen te zeggen aan zijn partij en aan zijn direkte medewerkers. *

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Karel de Kerchove was bijna een kwart eeuw burgemeester van Gent, toen hij zijn krachten zag afnemen; hij streed moedig tot het uiterste; wanneer hij inzag dat hij zijn mandaat voortaan niet meer naar behoren zou kunnen uitoefenen, schreef hij een brief aan de Gemeenteraad waarin hij de leden ter kennis bracht dat hij ontslag als burgemeester van de stad indiende. Drie dagen later begaf een afvaardiging van de Raad zich naar zijn woning om hem te danken voor al hetgeen hij voor zijn geboortestad had gedaan. Het was zijn laatste troost; hij overleed kort nadien op 21 februari 1882.

Gent bracht hem een laatste grandioze en postume hulde. Zijn marmeren borstbeeld werd in de Gemeenteraadszaal geplaatst, zijn portret in de stadsscholen. Zijn naam werd gegeven aan een school, het Instituut de Kerchove.

Zijn talrijke vrienden en bewonderaars richtten hem, in 1899, een monument op aan de ingang van het Citadelpark, werk van Leroy en Marchand. Aan de laan zelve werd in 1918 zijn naam geschonken.


(Traduction du texte qui précède)

Lors de leur Congrès de 1846, les libéraux belges avaient atteint un double objectif : la fondation du premier parti politique organisé du pays et l’élaboration ainsi que l’adoption d’un programme, d’une doctrine, d’un plan pour l’avenir. Les libéraux étaient sortis forts et unis de ce congrès décisif pour eux. Leur défaite à Gand, bastion imprenable du parti, lors des élections municipales de 1854, provoqua donc une énorme sensation dans toute la Belgique.

Le résultat catastrophique de ces élections fut pour la section gantoise du parti un véritable choc et une sévère mise en garde : même à Gand, les libéraux pouvaient, de façon inattendue, être vaincus. C’est pourquoi, immédiatement après la nomination et l’entrée en fonction de Delehaye, ils se mirent à préparer minutieusement et avec acharnement les prochaines élections, utilisant toutes les armes à la disposition de l’opposition dans le pays. Cette préparation, qui aboutirait au triomphe libéral de 1857, fut à Gand, en grande partie, l’œuvre de Charles de Kerchove, le fils de l’ancien bourgmestre évincé par les électeurs en 1854. Pour ces élections décisives de 1857, la course, pour reprendre un terme emprunté à la terminologie sportive, fut lancée de très loin.

Le 26 janvier 1857, l’assemblée générale de l’Association Constitutionnelle Libérale se tint dans le foyer du théâtre Minard. Un président fut élu : Charles de Kerchove, 38 ans, que l’on appelait « de Kerchove de Limon » pour le distinguer plus aisément de son père, le comte Constant de Kerchove de Denterghem. Les militants du parti avaient confiance en cet homme calme et pondéré qui savait ce qu’il voulait. Les électeurs gantois le connaissaient cependant peu, car il n’avait jamais particulièrement cherché à se mettre en avant. Lors des élections municipales du 27 septembre, il fut élu, certes, mais parmi les seize libéraux élus, seuls deux candidats obtinrent moins de suffrages que de Kerchove. Pourtant, c’est lui qui, après la démission de Delehaye, fut nommé bourgmestre de Gand par arrêté Royal du 21 décembre de la même année.

Le prestige de son nom ne fut pas étranger à ce choix des autorités à l’époque, mais aussi la promesse qu’il représentait pour les libéraux. Les dirigeants du parti avaient compris que la popularité était une chose fragile et ne constituait pas une garantie absolue de victoire. Dans une ville comme Gand, où la lutte était acharnée et impitoyable, il fallait un doctrinaire pragmatique, entouré d’une équipe compétente. L’opposition, menée et attisée par Le Bien Public, se montra impitoyable et inflexible. À ce moment-là, les libéraux ne savaient même pas que ce journal catholique bénéficierait, quelques mois plus tard, de la collaboration d’un jeune journaliste qui s’affirmerait rapidement comme le débatteur le plus redoutable du pays : Willem Verspeyen, un homme qui, pendant un demi-siècle, mènerait une lutte acharnée contre les libéraux avec sa plume.

En 1857, tout bien considéré, Charles de Kerchove était « l’homme de la situation » pour les libéraux gantois.

Né à Gand le 4 juin 1819, fils de Constant de Kerchove et de la comtesse Pauline de Loose, il fit ses études secondaires avant d’entrer à l’université, où il obtint le diplôme d’ingénieur des ponts et chaussées. Ce diplôme, en général, n’ouvre pas la voie sinueuse de la politique, sauf si, à la table familiale, on grandit auprès d’un père bourgmestre et si l’on se lie d’amitié avec une personnalité influente comme François Huet, philosophe et principal disciple du penseur français Bordas-Demoulin.

L’influence de François Huet, qui enseignait la philosophie à l’université de Gand, fut déterminante pour de nombreuses figures politiques de l’époque, libérales et futures socialistes. Huet, vivement combattu par le clergé et les conservateurs, exerça aussi une influence décisive sur Charles de Kerchove, lui transmettant de nombreuses idées et principes que ce dernier cherchera à concrétiser dans sa carrière politique. Ces principes firent rapidement de lui le leader d’un parti libéral gantois inspiré par de nouveaux idéaux.

Le 16 mai 1843, Charles de Kerchove épousa Eugénie de Limon de Steenbrugghe, qui lui donna six enfants : Oswald, qui deviendrait plus tard gouverneur du Hainaut, député et sénateur ; Malvina ; Rodolf ; Clotilda ; Louisa et Adelbrecht. La famille de Kerchove ne connut probablement jamais de soucis matériels ou financiers. À la suite d’une vive polémique déclenchée par son propre parti, on connaît même approximativement le montant de sa fortune à l’époque où il était bourgmestre de Gand.

Les libéraux, qui, à cette époque, ciblaient particulièrement les couvents et menaient une campagne virulente contre ce qu’ils appelaient la « mainmorte », avaient affirmé dans leur presse, ainsi que dans une Statistique des Couvents de Gand, que la fortune totale des couvents gantois s’élevait à plus de 12 millions de francs-or. En réponse, le sénateur catholique Jules Lammens publia dans Le Bien Public du 4 juin 1878 une lettre ouverte intitulée Réponse à la Statistique des Couvents de Gand publiée par l’Association libérale, dans laquelle il démontra mathématiquement que le bourgmestre de Gand possédait 3.897 hectares de terres, d’une valeur totale de 14 866 503 francs-or, ce qui, converti dans notre monnaie actuelle (en 1982), représente environ 750 millions de francs belges.

En 1849, Charles de Kerchove fit ses débuts en politique. Dans une petite brochure parue en 1898 et dédiée à l’ancien bourgmestre de Gand, G. D. Minnaert écrit : « En tant que membre très apprécié de diverses associations et sociétés, il fit son entrée dans la vie publique en 1849 comme membre du conseil provincial, une fonction qu’il exerça de la manière la plus honorable. Les services sérieux qu’il y rendit, ainsi que l’expression convaincante de ses idées libérales, firent progressivement croître son influence et son autorité. »

La deuxième étape de sa carrière politique fut son élection, début 1857, à la présidence de l’Association Constitutionnelle Libérale. La troisième fut son élection comme conseiller communal en octobre de la même année, suivie peu après de sa nomination au poste de bourgmestre de Gand. Le poste de bourgmestre a, depuis toujours à Gand, servi de tremplin utile vers des fonctions nationales : Charles de Kerchove entra à la Chambre en 1863 comme représentant de l’arrondissement, puis, quelques années plus tard, au Sénat. Cependant, il consacra le meilleur de son temps et de son talent à l’administration de sa ville natale.

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Lorsqu’on examine les carrières politiques de nos bourgmestres, on arrive inévitablement à la conclusion qu’il faut séparer, dans chaque carrière, l’aspect partisan de l’aspect administratif, comme on sépare le bon grain de l’ivraie. Un bourgmestre est grand dans la mesure où il parvient ou ose placer les réalisations administratives – c’est-à-dire les projets concrets et durables profitant à la ville et à la majorité de ses habitants – au-dessus des impératifs dictés par la ligne politique ou la vision de son propre parti. Cela n’est possible que durant des périodes exemptes de fanatisme politique, philosophique ou religieux. Dans la seconde moitié du XIXème siècle, une telle indépendance était exclue, car la politique locale n’était qu’un reflet du climat politique national, souvent troublé.

De nombreux bourgmestres de Gand furent alors asservis aux idées et aux instructions de leur parti. Il est à l’honneur de Charles de Kerchove d’avoir fait tout son possible pour échapper à cette domination et à ces impératifs. « Je n’ai qu’un seul objectif, déclara-t-il lors de sa première intervention au conseil communal après sa nomination, c’est, dans la mesure de mes forces, de contribuer à la prospérité et au bien-être de la ville, de défendre ses intérêts et de préserver la renommée exceptionnelle dont elle jouit dans le pays. »

Tous les bourgmestres ont prononcé ces mots ou des mots similaires, et tous ont également reçu, le jour de leur nomination ou peu après, les sérénades habituelles. Pour Charles de Kerchove, qui habitait alors dans la Burgstraat, ces sérénades furent particulièrement nombreuses : des Mélomanes, de la Société chorale, de la fanfare de la Garde bourgeoise et de l’orchestre du Grand Théâtre.

Ce n’est qu’après la fin des derniers accords que commence la lourde tâche. De Kerchove l’accomplit en homme calme, consciencieux et pondéré. Ses contemporains écrivent qu’il était chaleureux et accueillant, un travailleur acharné, mais pas un grand orateur : « Sa voix manquait de puissance et de souplesse pour cela. »

De Kerchove fut un bourgmestre dévoué : on le voyait, lors de la terrible épidémie de choléra, visiter les quartiers les plus pauvres de la ville. On raconte que, lorsque des inondations submergèrent des rues entières, de Kerchove n’hésita pas à parcourir, en pleine nuit, les zones sinistrées, de l’eau jusqu’aux genoux. Ces gestes augmentaient naturellement la popularité d’un bourgmestre. Tout comme sa grande passion pour les plantes et les fleurs, une qualité essentielle pour un bourgmestre de Gand : un dirigeant incapable de s’enthousiasmer pour une rose ou une nouvelle variété de plante, de fruit ou de fleur risquait de devoir rapidement quitter ses fonctions dans cette ville.

Le comte Charles de Kerchove de Denterghem, grand de stature, avec des manières de grand seigneur, une belle longue barbe et un regard doux, incarnait l’image même d’un homme représentatif. D’ailleurs, la barbe fut longtemps un attribut incontournable du bourgmestre à Gand : après de Kerchove, ses successeurs Lippens et Braun portèrent également une barbe soignée.

De Kerchove aimait les fleurs et en était un fin connaisseur. Président de la Société royale d’horticulture depuis 1859, il possédait à la Nieuwe Wandeling de magnifiques serres et la plus belle serre d’hiver de la ville. Il participait à toutes les compétitions florales et en repartait toujours avec des prix ou des distinctions honorifiques.

Son amour des fleurs se reflétait dans ses réalisations administratives. Il rêvait d’une ville avec de larges rues et avenues, des parcs et des parterres de fleurs. De Kerchove voulait apporter lumière et air à la ville, surtout dans les quartiers insalubres. Sa contribution majeure dans ce domaine fut l’achat, par la ville, des terrains de l’ancienne Citadelle, pour les transformer en un magnifique parc qui devint la fierté de Gand et de ses habitants. De Kerchove initia ces travaux, que ses successeurs poursuivirent. Durant son mandat, on aménagea également de nouveaux quartiers, notamment à Rooigem, ainsi que les avenues de Bijloke et d’Ekkergem.

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Ce fut un long mandat de bourgmestre, s’étalant sur un quart de siècle, période suffisante pour accomplir des réalisations utiles et durables. Si ses préoccupations en tant qu’homme se portaient sur l’esthétique et la luminosité de la ville, ses intérêts en tant que politicien se concentraient sur l’éducation, et, dans une certaine mesure, sur des réalisations sociales modestes, influencées par les idées du professeur Huet.

À cette époque, les libéraux estimaient que le meilleur moyen d’assurer l’avenir de leur parti était de multiplier les écoles officielles, espérant y former une clientèle fidèle. Pour cette politique scolaire, de Kerchove eut le soutien unanime de son parti, y compris de ses proches collaborateurs comme Callier, Vermandel, Colson, De Maere, Wagener et Laurent. Sous son mandat, le nombre d’élèves des écoles communales passa de 5 000 à 19 000. De nombreuses écoles furent construites, dont deux écoles normales nationales, tandis que d’autres, comme l’athénée et l’école moyenne, furent agrandies ou rénovées.

À cette époque, le plus grand plaisir du bourgmestre, de l’administration municipale et des parents, était de voir les écoliers défiler. Par centaines, par milliers, ils parcouraient les rues en chantant à la moindre occasion. Pour les grands événements – le congrès international des sciences sociales, l’inauguration de la statue de Jacob van Artevelde, la visite du roi – ces défilés étaient interminables, avec gants blancs, chaussettes blanches, rubans et nœuds blancs dans les cheveux.

Sous son administration, en 1873, l’hôpital civil fut aménagé selon les plans de Pauli et De Waele, de nouveaux bâtiments furent construits pour l’institut des sciences, le conservatoire de musique fut relogé dans des locaux adaptés, l’académie de dessin et de peinture fut entièrement réorganisée, et des travaux importants furent réalisés au port de Gand. Parmi ces derniers figuraient le creusement du canal de liaison entre le canal de Terneuzen et celui de Bruges, l’amélioration de l’entrepôt et de ses environs (1866-1878), ainsi que l’approfondissement et l’élargissement du canal de Terneuzen. Le 2 juin 1879, le dernier tronçon, de Rieme à la frontière hollandaise, fut inauguré, permettant à trois grands vapeurs de la ligne vers l’Angleterre d’entrer pour la première fois dans le port de Gand sans être allégés.

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Deux événements marquants de la carrière de Charles de Kerchove ne peuvent être ignorés : la grève des tisserands gantois en 1859 et l’expulsion des béguines de l’ancien béguinage Sainte-Élisabeth.

La grève de 1859, en particulier l’affaire de l’auberge Au Petit Chien Noir, est une page douloureuse de l’histoire, évoquée notamment dans le roman historique d’Anseele Offert pour le peuple et dans Le Socialisme en Belgique de Destrée et Vandervelde. En 1904, lors d’un débat à la Chambre, Émile Vandervelde raviva cette affaire en déclarant : « En 1859, c’était pourtant un libéral, ce bourgmestre de Gand, qui alla dans le local de l’Association ouvrière confisquer le maigre argent que les tisserands gantois avaient réussi à réunir pour créer un fonds de résistance. »

Le fils du défunt Charles de Kerchove, le comte Oswald de Kerchove de Denterghem, alors sénateur, adressa immédiatement une lettre au chef socialiste, à laquelle ce dernier répondit. Comme ces lettres furent publiées dans la presse, elles provoquèrent un vif tumulte dans les milieux politiques, poussant Oswald à publier une brochure intitulée La Grève des Tisserands Gantois en 1859. S’appuyant sur des documents officiels, il tenta de justifier l’attitude de son père dans cette affaire controversée et douloureuse.

Cette grève représentait une page tragique de la lutte pour l’émancipation des ouvriers. En 1859, les articles 414 et suivants du code pénal limitaient encore sévèrement les droits d’association et de grève. À cette époque, la situation dans l’industrie cotonnière gantoise était critique : des usines fermaient, les salaires diminuaient, et une agitation sociale gagnait les ouvriers, conduisant à des grèves. C’est alors qu’un magistrat mal inspiré, le procureur du roi de Villegas, donna l’ordre à la police de saisir les fonds de grève conservés à l’auberge Au Petit Chien Noir. Agissant sans consulter le bourgmestre, chef de la police, de Villegas déclencha une vive controverse.

Lorsque le commissaire de police informa le bourgmestre, ce dernier, en consultation avec le gouverneur de la province, jugea cette intervention « inopportune et odieuse ». Malgré des tentatives de négociation infructueuses avec le propriétaire de l’auberge, l’intervention eut lieu, et la caisse, contenant 850 francs 24 centimes, fut confisquée ! Cette action symbolisait la tension entre les travailleurs et les autorités dans un contexte de bouleversements sociaux.

Le rapport du gouverneur De Jaegher au ministre de l’Intérieur constitue un véritable acte d’accusation, une gifle pour le procureur du roi. Le manque total de tact et de connaissance humaine de ce magistrat aurait pu entraîner les pires conséquences. Quoi qu’il en soit, il apparaît clairement que Charles de Kerchove est peu à blâmer dans cette affaire, mais qu’on a cherché à lui faire porter la responsabilité de la stupidité et des actions brutales d’un autre.

Dans le second incident, l’expulsion des béguines gantoises, l’attitude de De Kerchove est, au contraire, impossible à défendre. Dans cette affaire, il a suivi aveuglément la mentalité anticléricale et les instructions de son parti, sans tenter quoi que ce soit pour empêcher l’atteinte aux droits des béguines ou à l’un des plus beaux panoramas urbains de Gand. En tant que chef du collège échevinal et de la majorité au conseil communal, il était responsable de cet événement et le restera aux yeux de la postérité. La majorité anticléricale avait décidé, coûte que coûte et sous n’importe quel prétexte, de chasser les béguines du Béguinage Sainte-Élisabeth. Ce lieu béni fut défiguré et dépouillé de son caractère et de son atmosphère par la création de nouvelles rues rectilignes, la destruction de jardins et de couvents.

La pétition des Grandes Demoiselles, qui rappelait tout ce que les béguines avaient accompli pour Gand et ses habitants dans le passé, fut rejetée. Les canaux furent comblés, le portail d’entrée fut enlevé, les maisons et couvents furent loués à des étrangers, et, dans un dernier geste de rage barbare, les plus beaux témoins du passé furent détruits comme si l’on voulait effacer toute trace de leur existence à jamais. En 1874, les béguines furent finalement expulsées de l’ancien Béguinage Sainte-Élisabeth.

Cet acte reste une tache indélébile sur le mandat de bourgmestre de celui qui n’a pas eu le courage de dire non à son parti et à ses collaborateurs directs.

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Charles de Kerchove fut bourgmestre de Gand pendant près d’un quart de siècle. Lorsqu’il sentit ses forces décliner, il continua à lutter courageusement jusqu’au bout. Mais, réalisant qu’il ne serait plus en mesure d’exercer correctement son mandat, il écrivit une lettre au conseil communal pour annoncer sa démission. Trois jours plus tard, une délégation du conseil se rendit à son domicile pour le remercier de tout ce qu’il avait accompli pour sa ville natale. Ce fut son ultime consolation : il mourut peu après, le 21 février 1882.

Gand lui rendit un dernier hommage grandiose et posthume. Un buste en marbre fut placé dans la salle du conseil communal, et son portrait dans les écoles de la ville. Une école reçut son nom : l’Institut De Kerchove.

En 1899, ses nombreux amis et admirateurs lui érigèrent un monument à l’entrée du parc de la Citadelle, œuvre de Leroy et Marchand. En 1918, une avenue fut également baptisée en son honneur.