Tielemans Jean-François
né en 1799 à Bruxelles décédé en 1888 à Bruxelles
Ministre (intérieur) entre 1830 et 1831 Représentant entre 1847 et 1848, élu par l'arrondissement de Bruxelles(Extrait de A. FRESON, dans Biographie nationale de Belgique, t. XXV, 1930-1932, pp. 246-250)
TIELEMANS (Jean-François), jurisconsulte et homme politique, né à Bruxelles, le 15 novembre 1799. mort dans cette ville, le 5 juillet 1888. Il appartenait à la bourgeoisie commerçante. Après avoir terminé brillamment ses études d'humanités à Bruxelles, il fit ses études de droit à l'Université de Liége ; docteur eu droit en 1823, il avait pris comme sujet. de thèse : De jure et natura legitimae secundum jus civile et hodiernum (Liége, Collardin, 1823 ; in.4°, 23 p.). Il se fit inscrire au barreau de Bruxelles, mais ses goûts le portaient plutôt vers la politique et le journalisme, et il défendit les idées libérales dans le Journal de Gand. En 1827, le Ministre de l'instruction publique lui donna une mission en Allemagne pour y aller étudier les divers systèmes que le protestantisme et le joséphisme allemands suivaient dans leurs relations gouvernementales avec l'Eglise catholique. Tielemans résida à Berlin et à Vienne et revint à Bruxelles en 1828. Le 6 octobre 1828, il fut nommé référendaire au Ministère des affaires étrangères. En octobre 1829, il alla s'installer à La Haye.
Tielemans, avec son ami de Potter, n'avait pas cessé son opposition au gouvernement. Outre de nombreux articles au Belge et au Courrier des Pays-Bas, il avait publié en 1827 un mémoire sur les délits de presse d'après le projet de Code pénal ; la même année, un mémoire en faveur de M. Weissenbruch sur la question de savoir quelle est la responsabilité de l'imprimeur quand l'auteur d'un écrit incriminé est connu ; eu 1829, une lettre à Van Maanen sur la responsabilité ministérielle (Coché-Mommens, 1829, in-8°, 52 pages). Cette brochure déplut fort au Ministre de la justice. La correspondance de Tielemans et de de Potter fut saisie, Tielemans fut arrêté le 15 février 1830, transféré à Bruxelles et poursuivi en cour d'assises, avec de Potter et Barthels, pour excitation à la révolte contre le gouvernement. Après un procès retentissant, Tielemans fut condamné à sept années de bannissement. Il se réfugia à Paris et y devint président d'un comité de secours aux Belges.
Dès que Tielemans eut connaissance de la révolution de septembre, il revint à Bruxelles se mettre à la disposition du Gouvernement provisoire. Le 6 octobre, il fut nommé membre de la commission de la constitution, et immédiatement après administrateur général de l'intérieur. II prit une grande part aux discussions de la commission de 1a constitution ; il essaya en vain de décider la commission à ne pas trancher la question de la forme du gouvernement ; il fut seul à voter pour la république et ne signa pas le projet de constitution présenté par la commission le 27 octobre 1830 ; il écrivit an gouvernement provisoire, le 7 novembre 1830, une lettre, reproduite par Huyttens (t. IV, p. 43), lui demandant de laisser cette question de la forme du gouvernement à la décision du Congrès sans manifester d'opinion, tout en proposant qu'au bout de trois ans un nouveau Congrès fût convoqué pour statuer définitivement sur l'établissement de la monarchie ou de la république.
Comme administrateur général de l’Intérieur, Tielemans déploya la plus grande activité ; il eut, au milieu de difficultés sans cesse renaissantes, à organiser l'administration centrale, à réorganiser les administrations provinciales et communales, à procéder aux élections des conseils communaux, à diriger l'instruction publique, à s'occuper des travaux publics, à pourvoir aux nécessités de l'agriculture, du commerce et de l'industrie, etc., etc. A la séance du 9 décembre du Congrès national, Tielemans fit un remarquable rapport sur la situation du département de l'intérieur, reproduit dans Huyttens (t. IV, p. 336), ce rapport montre bien les difficultés de la situation, la gravité et la complexité des questions qui posaient chaque jour et qu'il fallait résoudre.
Tielemans fit partie, comme ministre de l'intérieur, du premier ministère du Régent (26 février – 13 mars 1831). Le second ministère du Régent le nomma gouverneur de la province d'Anvers, puis, le 4 juin 1831, gouverneur de la province de Liège ; il occupait ces fonctions avec fermeté et distinction, mais son libéralisme déplut au Ministre de l'intérieur, de Theux, qui voulait le remplacer par un catholique. Le 4 octobre 1832, Tielemans fut nommé par le ministre de la justice, Raikcm, avocat général près la Cour de cassation ; le lendemain, le comte Vandensteen était nommé gouverneur de la province de Liège. Tielemans n'avait pas demandé ce changement et ne pouvait d'ailleurs pas remplir ses fonctions car il n'avait que trente-trois ans, alors que la loi exigeait l'âge de trente-cinq ans pour entrer à la Cour de cassation. Cette espèce de révocation fit scandale. Tielemans reprit sa place au barreau ; le 9 octobre 1834, il fut nommé conseiller à la Cour d'appel de Bruxelles. Président de chambre le 13 août 1859, il devint premier président en octobre 1867. Il occupa ces hantes fonctions jusqu'en 1871.
En mai 1832, étant gouverneur de la province de Liége, Tielemans se pré-senta à Liége, pour la Chambre des représentants ; il avait pour concurrent M. de Behr, premier président, qui fut élu à deux ou trois voix de majorité et dont l'élection fut validée après des discussions passionnées. En 1847, Tielemans fut élu représentant pour l'arrondissement de Bruxelles ; mais survint la loi sur les incompatibilités et il opta pour ses fonctions judiciaires.
Tielemans fut conseiller communal de Bruxelles pendant vingt et un ans, de 1855 à 1877 ; il prit la part la plus active aux travaux du conseil et devint vite un des conseillers les plus populaires de la capitale. Il fut aussi un des fondateurs de l'Université libre de Bruxelles. Le 12 juillet 1836, il fut nommé professeur de droit administratif ; recteur de 1849 à 1861 ; depuis lors il siégea, comme membre permanent au conseil d'administration. Ce fut un des plus brillants professeurs de l'université ; il occupa sa chaire pendant trente-trois ans et créa la science administrative en Belgique. En 1834, il avait fondé, avec Charles de Brouckere, le Répertoire de l’administration et du droit administratif de Belgique. Cet ouvrage devait comporter vingt volumes ; les deux premiers volumes parurent en 1834 ; le troisième en 1836 ; le quatrième et le cinquième en 1838. Charles de Brouckere, dont la collaboration avait été peu active, ne s'en occupa plus, et Tielemans signa seul le sixième volume qui parut en 1843, le septième en 1846, et le huitième en 1856. L’ouvrage resta inachevé, mais jusqu'à sa mort Tielemans y travailla et ne cessa de réunir les éléments nécessaires à son achèvement. Quoi qu'il en soit, cet ouvrage, véritable monument de droit administratif est encore souvent consulté ; il reçut, en 1865, le prix quinquennal des sciences morales et politiques.
Tielemans publia, dans différentes revues ou en brochures, un grand nombre d'articles ou études juridiques ou politiques, notamment : L’Union et la Constitution, réponse à un anonyme (Liége, Jeunehomme, 1832, in 8°, 58 p.) ; De la charité publique (Bruxelles, Weissenbruch, 1855, in 8°, 182 p.) ; De la propriété industrielle (Rev. Trim., t. III, 1854, p. 5) ; Avant-projet de loi sur les cours d’eau non navigables ni flottables, rapport de la commission extraparlementaire (Bruxelles, Seghers, 1857) ; Etude sur le legs de M. Verhaegen (Bruxelles, Weissenbruh, 1863, in 8°, 42 p.) : L’acceptation des dons ou legs faits aux fabriques d’église doit-elle être l’objet d’une délibération du conseil de fabrique, ou suffit-il d’une délibération du bureau des marguilliers ? (Revue communale, t. III, 1870, p. 20.)
Elu correspondant de la classe des lettres de l’Académie royale de Belgique, le 12 mai 1873, Tielemans fut élu membre le 4 mai 1878, directeur en 1887. Il fut nommé grand cordon de l’ordre de Léopold en 1880. Il parvint à la plus extrême vieillesse sans avoir connu les infirmités de l’âge ou les éclipses de l’intelligence.
BIBLIOGRAPHIE
Journal des tribunaux, numéro du 29 juin 1930.