Rolin Hippolite libéral
né en 1804 à Gand décédé en 1888 à Gand
Ministre (travaux publics) entre 1848 et 1850 Représentant entre 1848 et 1852, élu par l'arrondissement de Gand(Extrait de : J.L. DE PAEPE – Ch. RAINDORF-GERARD, Le Parlement belge 1831-1894. Données biographiques, Bruxelles, Commission de la biographie nationale, 1996, p. 491)
Docteur en droit de l’université de l’Etat de Gand (1827)
Etudes de droit à Berlin (1829-1830)
Conseiller communal (1839-1842, 1847-1848), puis échevin de Gand (1842-1847)
Ministre des travaux publics (1848-1850)
Avocat à la cour d’appel de Gand (1827-1848, 1850-1888) ; avocat d’affaires, président du Bureau de vérification des titres et du contentieux dans les sociétés du financier André Langrand-Dumonceau (1864)
Eligible au sénat.
Mandat dans plusieurs sociétés industriels (métallurgie, chemins de fer, travaux publics, charbonnages)
(Extrait de : A. FRESON, dans Biographie nationale de Belgique, t. XIX, 1907, col. 825-828)
ROLIN (Hippolyte), avocat et homme politique, né à Courtrai. le 7 septembre 1804, mort à Gand, le 8 mars 1888. Fils d'un négociant de Courtrai, il fit de brillantes études dans un lycée de Paris, puis à la faculté de droit de l'université de Gand. Docteur en droit en 1827, il publia plusieurs dissertations juridiques, parmi lesquelles nous citerons son mémoire couronné sur la preuve des délits : de delictorum probatione (Gand, H. Vande Kerkhove, 1826, in-8° reproduit dans les Annales Academiae Gandavensis, et tiré à part en 1827) et sa thèse de doctorat sur la juridiction des juges belges à l'égard des étrangers : de jurisdictione judicum nostrorum erga extraneos (Gand, H. Vande Kerckhove, 1827 ; in-4°). En 1829-1830, il suivit, à Berlin, les cours de de Savigny et de Hegel, dans l'intimité desquels il fut reçu, ainsi que dans celle de Schleiermacher. Il se destinait au professorat et résidait encore à Berlin quand la révolution belge éclata. Les électeurs de Courtrai lui offrirent un siège au Cou grès national. Il le refusa et vint s'établir à Gand comme avocat. C'est dans cette ville qu'il épousa Mlle Hellebaut, fille du premier professeur de droit civil de l'université de Gand.
Il conquit rapidement une place brillante au barreau gantois. Son éloquence chaude et pénétrante lui valut maints triomphes devant la cour d'assises, spécialement dans les procès politiques qui surgirent, à la suite de la Révolution, C'est ainsi que, lors de l'affaire Grégoire, il obtint l'acquittement de ses clients impliqués dans cette conspiration. En janvier 1832, quand le général Niellon proclama la mise en état de siège de la ville de Gand et fit arrêter Steven pour délit de presse, le jeune avocat publia une brochure où il protesta avec autant d'éloquence que de courage contre ces mesures violentes : Sur la mise en état de siège de la ville de Gand, /'arrestation de M. Steven et l'arrêté de M. Niellon (Gand, H. Vande Kerekhove, 1832, in-8°)
Il ne put d'ailleurs se soustraire à la vie politique. Conseiller communal, échevin des travaux publics, président de l'Association libérale, il était, à Gand, le chef du parti libéral constitutionnel quand survinrent les événements de 1848. Il fit une campagne énergique, à l'Association libérale et devant le corps électoral, contre les orangistes et les républicains ; les élections du 13 juin 1848 furent un triomphe pour sa politique. Le cabinet libéral de 1847 devant se reconstituer, Frère-Orban, minist.re des travaux publics, prit le portefeuille des finances, et on fit les plus vives instances auprès de Rolin pour qu'il acceptât d'entrer au ministère. La situation du pays était grave. Rolin se décida à abandonner sa clientèle et à accepter le pouvoir. Le 18 juillet 1848, il fut nommé ministre des travaux publics ; quelques jours après, le 26 juillet, il fut, à une élection. partielle, nommé sans lutte représentant pour l'arrondissement de Gand.
Rolin n'avait accepté le pouvoir que provisoirement, par dévouement pour son pays et pour ses idées. Il donna sa démission deux ans après, le 12 août 1850, dès qu'il jugea que la situation du pays lui permettait de se retirer. Il ne revint que rarement à la Chambre et, aux élections de juin 1852, il déclina le renouvellement de son mandat.
Rolin se consacra exclusivement depuis lors à son cabinet d'avocat. II eut de grands succès, comme avocat d'affaires et comme avocat d'assises. II fut plusieurs fois élu bâtonnier. Comme l'a dit un de ses confrères, sa parole « d'une pureté et d'une élégance accomplies était servie par une érudition juridique très vaste et très sûre, et peu de jurisconsultes ont possédé comme lui le droit romain ainsi que notre ancien droit. » (Flandre libérale, 2 mars 1888).
En décembre 1868, il eut l'honneur de représenter le barreau belge aux funérailles de Berryer, et au banquet qui fut offert le lendemain par le barreau de Paris aux avocats étrangers, il prononça un admirable discours qui fit sensation. « Vous nous apprenez, lui répondit Jules Favre, que pour parler dignement de la liberté, il faut être citoyen d'un pays libre ».
Homme d'un goût éclairé, il s'intéressait vivement aux beaux-arts et prit une part active au mouvement artistique de la ville de Gand ; c'est lui qui fonda, en l853, la Société royale pour l'encouragement des beaux-arts, qu'il présida longtemps. Il était grand-officier de l’Ordre de Léopold et de la Légion d’honneur.
(Extrait de l'Indépendance belge, du 11 mars 1888)
Nous apprenons, avec un profond regret, la mort de M. Hippolyte Rolin, avocat près la cour d'appel de Gand, ancien bâtonnier, ancien conseiller communal de Gand et échevin de cette ville, ancien membre de la Chambre des représentants, ancien ministre des travaux publics.
M. Rolin s'est éteint jeudi matin, après une courte maladie. Il était chargé d'années, et sa vie, d'une extrême activité, avait tout entière été consacrée au travail. Mais l'âge et le labeur avaient respecté l'admirable organisation de ce robuste vieillard, et il portait allègrement ses 83 ans sonnés. M. Rolin avait brillé au barreau de Gand, à côté de qui confrères qui s'appelaient Metdepenningen et D'Elhoungne. Sa parole était d'une pureté et d'une élégance accomplies. On se rappelle encore l'admiration qu'elle excita un jour à Paris, dans un banquet offert à Berryer. Elle était servie par une érudition juridique très vaste et très sûre. Peu de jurisconsultes ont possédé comme lui le droit romain et l'ancien droit Belgique. Comme avocat c'était un maître. Son esprit ouvert, élevé, de la plus rare souplesse, n'était d'ailleurs étranger à rien de ce qui est vraiment humain, à rien de qui est noble et beau. Il aimait la science : il avait fait de fortes et brillantes études et aimait à conter l'enthousiasme avec lequel il avait jadis suivi, à Berlin, les cours de Hegel et des grands professeurs de l'époque. Il aimait les arts, en véritable et délicat artiste.
Bien qu'il se fût dès longtemps retiré des luttes de la politique, il n'avait pas cessé de s'y intéresser. Ses opinions s'étaient sensiblement modifiées depuis 1847. Alors député libéral des travaux publics dans le premier cabinet Rogier-Frère, il avait fini, sous l'influence de l'âge, par incliner à droite. Du moins avait-il gardé un vif sentiment de la liberté, de sa grandeur, des bienfaits qu'elle répand, et un respect très vral de la liberté des autres. On pouvait ne pas partager ses opinions ; personne ne pouvait méconnaître la séduction de son intelligence ; sa conversation était exquise, vive et jaillissante autant que solide.
M. Hippolyte Rolin laisse un nom et un souvenir respectés dans le pays entier, et à Gand surtout il n'est personno qui ne s'associe au deuil de sa famille dont le chef actuel, M. G. Rolin-Jaequemyns, s'est déja acquis tant de titres à la reconnaissance de ses concitoyens.
Les funérailles de M. Hippolyte Rolin seront célébrées à Gand lundi prochain, à 10 heures et demie du matin, en l'église Saint-Pierre. Réunion à 10 heures, à la maison mortuaire, 13, rue Savaen.
(Extrait de l'Indépendance belge, du 13 mars 1888)
On célèbre aujourd'hui à Gand les funérailles de M. Hippolyte Rolin. Avec quelle solennité, nous le saurons bientôt, mais en attendant nous voulons compléter les renseignements que nous avons donnés dernièrement sur cette longue et brillante carrière, et surtout préciser, pour ne pas dire rectifier, une appréciation qui n'est entièrement conforme à la réalité des faits
Nous disiosn que vers la fin de sa vie, les opinions de l'ancien ministre de 1847 s'étaient modifiées, et que le libéral d'alors avait fni par incliner à droite. Voilà qui pourrait faire croire à une sorte de palinodie politique, bien que nous ayons eu soin de rappeler ce vif esprit de tolérance qui n'abandonna jamais Hippolye Rolin, toujours convaincu des bienfaits de la liberté. C'est assez dire que, catholique sincère et pratiquant, Rolin était tout le contraire d'un clérical. Ce serait méconnaître son carcatère et briser l'union morale de sa vie que de ne pas tenir compte de cette nuance à laquelle il attachait, lui, la plus grande importance. Catholique il le fut toujours: on peut concevoir que la réligiosité du vieillard désintéressé (Deux lignes du journal sont illisibles, à l'exception de "homme mûr au") même en 1847, alors que le grand gouvernement libéral auquel le congrès de 1846 avait donné une décision impulsion le portait à la Chambre et bientôt au pouvoir, ses convictions religieuses étaient bien ces croyances auxquelles il demeura fidèle jusqu'à son dernier jour, celles de tant de libéraux plus nombreux qu'on ne le pense dans notre pays, qui ont réalisé dans leur for intérieur le principe de la séparation de l'Eglise et de l'Etat. Et de même 40 ans plus tard, alors que retiré du forum et même du palais, vivant avec sa pensée, il la dirigeait de préférence vers ce royaume qui n'est pas de ce monde, suivant le verbe évangélique, il n'abdiquait point pour cela ses anciennes convictions de laïque animé de l'esprit des vieux parlements, pénétré des droits et des devoirs de la puissance publique et des prérogatives de la liberté civile.
Nous avons tenu à insister sur ce point essentiel au moment où les derniers hommages sont rendus à une éminente personnalité que le parti libéral revendique comme une de ses illustrations.