Rodenbach Constantin catholique
né en 1791 à Roulers décédé en 1846 à Athènes
Représentant entre 1831 et 1839, élu par l'arrondissement de Sant-Nicolas Congressiste élu par l'arrondissement de Roulers(Extrait de : V. FRIS, dans Biographie nationale de Belgique, t. XIX, 1907, col. 591-594)
RODENBACH (Constantin-François), docteur en médecine, professeur, homme politique, publiciste, fonctionnaire et diplomate, né à Roulers le 21 octobre 1791, mort à Athènes le 5 décembre 1846. Il était le frère d'Alexandre et de Pierre et père de Constantin-Auguste.
Rodenbach étudia la médecine à Paris, devint médecin militaire et fut nommé chef d'ambulance dans la nouvelle armée que Napoléon lança contre l'Allemagne après la retraite de Russie. Il assista aux batailles de Lutzen et de Bautzen, dirigea l'hôpital de Dresde, fut fait prisonnier et conduit en Bohême. Il revint en Belgique en 1815, s'établit comme médecin praticien à Bruges en 1818, où il ne tarda pas à professer à l'école de médecine.
Outre plusieurs brochures et de nombreux articles dans des revues médicales belges et étrangères, Rodenbach publia sa thèse présentée à la Faculté de Médecine de Paris, le 29 janvier 1818 : De l'influence du climat sur l'homme malade ; puis, sa Consultation sur une question médico-légale relative à un parricide (Bruges, 1827). Ce travail, qui eut une seconde édition dès l'année suivante et qui fit du bruit dans le monde médical, a sauvé de l'échafaud un homme condamné à mort par la cour d'assises de la Flandre occidentale le 10 mars 1827. En 1829, Rodenbach fit paraître ses Considérations sur les colonies de fous (Bruxelles, 1829).
Avec ses frères Ferdinand, Alexandre et Pierre, il prit bientôt une part active à la campagne menée par les catholiques contre le gouvernement de Guillaume 1er, roi des Pays-Bas. Les Rodenbach se mirent à la tête du pétitionnement contre le monopole de l'enseignement officiel et contre les impôts sur la mouture et l'abatage en 1828 et 1829, et vouèrent au régime hollandais une haine mortelle.
Durant sa visite à la ville de Liége (23 juin 1829), le roi Guillaume, vexé des attaques incessantes de l'opposition, n'avait pu s'empêcher de glisser dans son discours à l'édilité liégeoise ces mots : « Je vois maintenant ce que je dois croire de ces prétendus griefs dont on a fait tant de bruit. On doit tout cela aux vues de quelques particuliers qui ont leurs intérêts à part. C'est une conduite infâme. » Ces mots imprudents décochés contre les pétitionnaires eurent un énorme retentissement. Constantin et Pierre relevèrent cette épithète et instituèrent, en imitation des Gueux du XVIe siècle, l'Ordre de l'Infamie. Ils firent frapper à, Bruges des insignes qu'on appela médaille d’infamie - ces décorations, attachées à un ruban vert, représentaient un livre et portaient à l'avers la devise « Rex. lnfamia nobilitat, - Lex. Fidèle jusqu'à l'infamie » et au revers les articles 151 et 161 de la Loi Fondamentale, concernant le droit de pétitionnement et le droit pour les Etats Provinciaux de faire valoir leurs griefs auprès du Roi et des Etats-généraux (juillet 1829). Le docteur Rodenbach fut un des organisateurs du banquet des protestataires à Bruges le 9 juillet.
Lorsque, l'année suivante, il eut appris le succès des patriotes contre les Hollandais durant les journées de septembre, il adhéra immédiatement au nouvel état de choses et se mit en rapport avec les membres du gouvernement provisoire.
Dès les derniers jours d'août, lors des troubles durant lesquels l'hôtel du député ministériel Sandelin fut dévasté (29 août 1830), il fit partie d'un comité de sûreté publique adjoint à la régence. Comme partout ailleurs, l'ancienne garde bourgeoise fut dissoute et remplacée par des corps nouveaux ; aussi, le 27 septembre, la garnison hollandaise, effrayée, quitta Bruges et s'embarqua le 30 à Ostende.
Entre-temps, sur les instances d'Alexandre Rodenbach, son frère Pierre avait ramené Louis de Potter à Bruxelles. Le gouvernement provisoire ainsi complété prit d'énergiques mesures pour la défense de la patrie et pour le maintien de l'ordre. Les frères Rodenbach secondèrent énergiquement les efforts du nouveau pouvoir et préparèrent la West-Flandre à la résistance.
Aux élections du 4 novembre, Constantin fut élu député de Roulers au Congrès National, où il eut bientôt l'occasion de se signaler. Le 23 novembre 1830, il fut désigné pour l'accomplissement d'une mission bien périlleuse ; ce fut lui qui, fidèle à ses promesses électorales, eut l'audace de proposer au Congrès National l'exclusion des membres de la famille d'Orange-Nassau de tout pouvoir en Belgique. Le discours entraînant qu'il prononça à cette occasion avec le plus grand sang-froid fut couvert de frénétiques applaudissements, et, le lendemain, le Congrès vota la déchéance des princes hollandais à une énorme majorité. Le 3 janvier, il proposa de s'occuper sans délai du choix du chef de l'Etat et de fixer un jour pour y procéder.
Le 1er mai 1831, Rodenbach, nommé commissaire de district en remplacement du comte de Bergeyck, vint s'installer à Saint-Nicolas. Il prit immédiatement des mesures pour assurer la défense du fort de Sainte-Marie sur l'Escaut, mais fut très mal secondé par le général Wauthier, gouverneur militaire de la Flandre orientale, pour la protection de cette partie de la frontière. Aussi les Hollandais s'emparèrent-ils du fort, le 2 août, et incendièrent-ils Calloo. Rodenbach, indigné « de l'imprévoyance, de l'apathie ou de la lâche trahison de quelques-uns des gouvernants », et peu confiant dans les autorités militaires, lança le 4 août un éloquent appel à la garde civique du district. Elle répondit à son espoir au-delà de toute attente et produisit un tel effet moral sur l'ennemi qu'il n'osa plus prendre l'offensive et qu'il se borna à « défendre son territoire ». C'est grâce à l'énergie et au courage de Rodenbach que le pays de Waes fut à l'abri de toute nouvelle invasion de l'ennemi.
Aussi, le 29 août, aux premières élections législatives, la population reconnaissante l'élit-elle comme membre de la Chambre des représentants.
Rodenbach remplit ce mandat jusqu'en 1839, époque à laquelle il fut remplacé par Charles Vilain XIIII. Le 30 avril 1832, il avait été nommé commissaire d'arrondissement à Malines.
L'année suivante il publia à Bruxelles ses Episodes de la révolution dans les Flandres de 1829 à 183, dans lesquels il ne craignit pas de dénoncer la faiblesse ou le mauvais vouloir de nombreux fonctionnaires et particulièrement des autorités militaires durant le gouvernement provisoire et la régence.
En 1839, le gouvernement désigna Rodenbach comme ambassadeur de Belgique en Suisse, poste qu'il échangea en 1842 contre celui d'Athènes ; il y mourut en 1846 et fut enterré sous un rocher en face de l'Acropole.
Cet homme de cœur à la figure aussi intelligente qu'énergique, et qui joignait à des connaissances variées une grande entente des affaires, fut honoré au cours de sa brillante carrière de plusieurs ordres étrangers ; il fut chevalier de l'ordre de Léopold et décoré de la Croix de fer. Son portrait, dessiné d'après nature par C. Baugniet, figure dans la Collection des portraits des membres de la Chambre des Représentants.