Nélis Guillaume, Joseph libéral
né en 1803 à Beauvechain décédé en 1896 à Bruxelles
Représentant entre 1857 et 1870, élu par l'arrondissement de Nivelles(Extrait de : E. BOCHART, Biographie des membres des deux chambres législatives, session 1857-1858, Bruxelles, M. Périchon, 1858, folio n°81)
NELIS, Guillaume-Joseph,
Né à Beauvechain, le 18 mars 1803
Représentant, élu par l’arrondissement de Nivelles.
Né à M. Nélis, après avoir fait ses humanités au collège de Louvain, étudia la médecine à l'université de la même ville. Après avoir passé son examen de docteur, il était à la veille de soutenir sa thèse, lorsqu'une cruelle épidémie sévit en 1826 à Groningue et dans la province de la Frise; dans cette ville, siége d'une université, les malades atteints du fléau étaient si nombreux que les médecins ne pouvaient suffire à les secourir. Dans ces tristes conjonctures, le gouvernement fit un appel aux universités de l'Etat. M. Nélis fut au nombre des sept jeunes médecins de l'université de Louvain qui obtinrent, sur leur demande, le périlleux honneur d'aller combattre l'épidémie. Ce généreux dévoûment fut récompensé par une médaille d'honneur que la société Tot nut van Algemeen leur décerna le 14 août 1827.
Le temps utilement employé à soigner les victimes de l'épidémie, retarda la défense de la thèse que M. Nélis devait soutenir pour terminer ses études ; ce ne fut que le 6 août 1827 qu'il obtint, avec la plus grande distinction le diplôme de docteur.
En possession de son titre, M. Nélis se rendit à Paris pour s'y perfectionner dans la science, et il revint, en 1828, se fixer à Wavre, où il exerça jusqu'en 1838.
Ce fut pendant cette période d'une utile et laborieuse carrière que M. Nélis reçut, ainsi que ses courageux condisciples de l'université de Louvain, la médaille d'or qui leur avait été décernée par les arrêtés du roi Guillaume, du 18 octobre 1828 et du 26 février 1830, en récompense des services qu'ils avaient rendus, en 1826, à Groningue et dans la Frise, récompense tardive sans doute, mais qui n'en est que plus honorable, puisqu'elle n'a été envoyée de Hollande en Belgique, qu'après la séparation des deux pays.
En 1838, M. Nélis, entraîné dans l'industrie, s'associa à un grand établissement de papeterie à la direction duquel il ne tarda pas à prendre une part très active. Il se retira de cette association en 1843, et il alla prendre, pour son propre compte, une papeterie à Virginal-Samme.
Cédant à la demande d'un grand nombre d'habitants de cette commune, il accepta des électeurs, en 1846, le mandat de conseiller communal, et il fut nommé bourgmestre par arrêté royal du 11 mars 1846.
L'impulsion qu'il sut imprimer aux diverses branches de l'administration communale, et surtout à l'amélioration des chemins vicinaux pour ainsi dire impraticables, lui suscita l'opposition de quelques hommes ennemis de tout progrès. En présence de cette opposition, il crut pouvoir renoncer à un mandat qu'il n'avait accepté que par dévoûment. Le Roi lui accorda sa démission des fonctions de bourgmestre, le 27 août 1853.
Elu, en 1848, conseiller provincial par le canton de Nivelles, M. Nélis s'acquitta de ce nouveau mandat de manière à en obtenir le renouvellement aux élections de 1851.
Le 27 décembre 1850, une Chambre de commerce ayant été instituée à Nivelles, M. Nélis en a été nommé membre et élu président ; il a conservé, sans interruption, ces honorables fonctions jusqu'à ce jour.
Les devoirs publics ne l'avaient pas empêché de travailler à l'agrandissement de son établissement industriel ; mais projetant l'érection d'une seconde papeterie, il renonça à une nouvelle candidature au conseil provincial, lors des élections de 1853, et en 1854, il établit une deuxième fabrique dans la même commune.
Le parti libéral de l'arrondissement de Nivelles, connaissant ses opinions politiques, aussi fermes que modérées, et l'indépendance de son caractère et de sa position, vint lui offrir une candidature à la représentation nationale, aux élections du 5 mars 1857, pour remplacer l'honorable comte Félix de Mérode.
Un siége au Parlement ne convenait ni aux goûts modestes, ni aux habitudes de M. Nélis, qui n'accepta cette candidature que sur les vives instances de ses amis. Le résultat du scrutin ne lui fut pas favorable.
La position politique que M. Nélis avait prise dans l'arrondissement de Nivelles, ne lui permit pas de refuser une nouvelle candidature aux élections du 10 décembre 1857 et, cette fois, son nom sortit de l'urne à une imposante majorité.
Citoyen fidèle à ses convictions, n'ayant accepté l'honneur d'être représentant que pour être utile à son pays, et voulant l'amélioration des classes inférieures de la société par la moralisation, l'instruction et le travail, l'honorable député de Nivelles s'applique surtout à favoriser les progrès de l'agriculture, de l'industrie et du commerce.
(Extrait de J. TORDOIR, dans Nouvelle biographie nationale de Belgique, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 2007, t. 7, pp. 271-273.)
NÉLIS, Guillaume, Joseph, médecin, industriel et homme politique. né à Beauvechain le 18 mars 1803, décédé à Bruxelles le 19 avril 1896.
Epoux. depuis 1833, de Marie-Thérèse Kumps, née à Overijse le 14 juillet 1809, décédée, sans descendance, à Bruxelles, le 10 décembre 1861. Par sa mère Constance, née Vanhamme, Guillaume Nélis était lié une famille de fermiers-propriétaires principalement établis dans les différents villages qui composent l'actuelle commune de Beauvechain. Durant les années 1770, celle-ci avait eu l'occasion d'acquérir la propriété de plusieurs grandes exploitations agricoles. Sous le régime français, quelques biens nationaux étaient venus s'ajouter aux acquisitions précédentes. A l'époque de notre indépendance nationale, le docteur Guillaume Nélis – diplômé, depuis le mois d'août 1827, de l'université d'Etat de Louvain - appartenait bien à une des plus influentes familles de l'aristocratie agricole de l'est de l'arrondissement de Nivelles.
Etabli à Wavre, le jeune médecin s'était rapidement intéressé aux activités de l'industriel Bernard Mathieu qui avait été à l'origine en octobre 1833, de la création d'une papeterie à Basse-Wavre. En juillet 1837, associé à celui-ci, Nélis avait accepté d'investir des capitaux importants dans la société en commandite par actions connue sous la raison sociale « Mathieu, Nélis et Cie », constituée dans le but de contribuer au développement des installations industrielles wavriennes, mais aussi dans celui de permettre la création d' une nouvelle papeterie sous Gastuche, hameau de la commune de Grez-Doiceau, aidée en cela par la Banque de Belgique. Ayant abandonné la pratique médicale, Nélis occupa la direction de ladite société jusqu'en mars 1843.
Ses rapports avec Mathieu s' étant dégradés, il créa. en 1843-1845, sa propre papeterie sous Virginal-Samme, au moulin d' Asquempont. En septembre 1855, il acquit une usine similaire, sise en la même commune, au lieu-dit Restemont, dans le cadre de la liquidation de la société Mathieu et Cie. Trois années plus tard, il vendit finalement ces deux papeteries aux industriels bruxellois Babolein Olin et Gustave Demeurs et abandonna définitivement le monde de l'industrie active pour se consacrer entièrement à la vie politique et au développement la jeune chambre de commerce de Nivelles, structure qu'il présidait depuis le mois de décembre 1850.
Bourgmestre de Virginal-Samme de mars 1846 à décembre 1853, et conseiller provincial du Brabant, élu par le canton de Nivelles, du mois de mai 1848 au mois de mai 1854, Guillaume Nélis était devenu. en avril 1848, un des dirigeants de la société électorale libérale établie à Nivelles depuis 1846. Se qualifiant de libéral modéré - ou doctrinaire - il avait accepté une première candidature à la Chambre, dans l'arrondissement de Nivelles, en mars 1857, face au catholique baron Charles Snoy. En décembre 1857, une seconde candidature, dans un contexte politique plus favorable aux libéraux, lui avait permis de faire son entrée au sein de la Chambre des représentants. On notera qu'à l'époque, la plupart des proches parents de Nélis figuraient au rang des dirigeants de l'association électorale libérale établie à Jodoigne. Au sein du Parlement, réélu en juin 1859, juin 1863, août 1864 et juin 1868, le président de la chambre de commerce de Nivelles se présente comme un défenseur des intérêts industriels et agricoles de l'arrondissement de Nivelles, mais s'intéresse également à ces secteurs à l'échelle nationale. A l'époque, il est d'ailleurs un des membres du Conseil supérieur de l'industrie et du commerce.
Logiquement le développement du réseau ferroviaire belge figure dès lors au rang de ses principales préoccupations. On notera qu'il fut notamment un des administrateurs de la Compagnie du Chemin de fer de Tamines à Landen.
Dans le domaine généra], inféodé à Frère-Orban, il soutient de ses votes la politique libérale doctrinaire - notamment dans la question militaire - malgré quelques états d'âme qui le poussent à ne plus intervenir en dehors des sections la Chambre.
En juillet 1870, au lendemain de la chute du cabinet libéral suscitée par les désastreuses élections législatives du mois de juin précédent, il assiste, en tant que président de l'association libérale du canton de Nivelles - depuis 1864 - au Convent libéral de Bruxelles qui décide, théoriquement, de donner une ligne plus progressive au mouvement libéral - notamment en matière d'extension des droits électoraux, mais renoue très rapidement avec la ligne doctrinaire. Ses hésitations entraînèrent finalement la perte de son mandat parlementaire en août 1870 ; ce qui ne l'empêcha nullement de présider, en mars 1873, la réunion durant laquelle fut décidée la création de la première association destinée regrouper les fortes des libéraux de l'ensemble de l'arrondissement de Nivelles. Appelé, à l'époque, à exercer une des quatre premières vice-présidences de cette association libérale centrale, il abandonna, dès l'année suivante. toute forme de politique active, tout en restant un militant connu de l'opinion libérale.
Retiré de la vie politique, Guillaume Nélis demeura particulièrement actif dans le monde industriel, sachant tirer parti de ses nombreuses relations. C'était déjà grâce à celles-ci qu'en décembre 1863 avait pu voir le jour la société en commandite Solvay et Cie. Actionnaire de la Société des Produits Chimiques de Floreffe, Nélis avait accepté d'aider le jeune Ernest Solvay alors à la recherche de capitaux. Ami d'Alexandre Solvay, père d'Ernest, il avait lui-même investi de fortes sommes dans l' affaire, en compagnie d'Eudore Pirmez et de Gustave Sabatier. En 1865-1866, alors que la société traversait des moments difficiles, il avait consenti à la famille Solvay les prêts et garanties de prêts qui avaient finalement permis d'assurer la pérennité de l'entreprise de Couillet. Ancien commissaire de la Société Solvay et Cie. il était, en 1869, le deuxième actionnaire, par ordre d'importance, de cette même société.
En 1876, l'ancien député libéral de l'arrondissement de Nivelles fut déchargé de sa présidence de la chambre de commerce de Nivelles et de son mandat de membre du conseil supérieur de l'industrie et du commerce.
Propriétaire d'un hôtel de maître sis rue Belliard et d'une villa à Tubize, il décida de se consacrer aux voyages, séjournant fréquemment en France et en Italie. Veuf et sans enfant, il se consacra également à la protection de l'enfance malheureuse et tout particulièrement à celle des orphelins. En juillet 1875. il finança en partie la création d'un orphelinat qui ouvrit ses portes à Jodoigne, en décembre 1879. En 1893-1894, il construisit ensuite un hospice pour vieillards, à Beauvechain, son village natal, immeuble dont il fit don, l'année suivante, aux autorités locales. Dans son testament, passé la même année, il prépara la création de diverses bourses d'études destinées à des jeunes gens originaires du canton de Jodoigne et, dans un codicille du mois de mars 1896, il légua une somme de 500.000 francs à la ville de Bruxelles pour la création d'une école d'ans et métiers pour garçons : l' actuelle école des industries du bois, de l'ameublement, de la décoration intérieure et de la peinture, dont la version primitive fut également mise sur pied grâce au legs Godefroy.
A la suite de son décès, survenu le 19 avril 1896, ses nombreux neveux et nièces se partagèrent non seulement ses multiples parts dans la société Solvay. mais également plusieurs immeubles - dont plusieurs fermes - sis à Bruxelles et en Brabant wallon. Ses funérailles présentèrent un caractère religieux. Il n'appartint manifestement jamais la franc-maçonnerie, contrairement à de nombreux parlementaires libéraux du XIXe siècle.
J. TORDOIR