Lelièvre Xavier, Charles, Eugène libéral (1848-1868) puis catholique (1868-1876)
né en 1805 à Namur décédé en 1876 à Namur
Représentant entre 1848 et 1876, élu par l'arrondissement de Namur(E. BOCHART, Biographies des membres des deux chambres législatives, Session 1857-1858, Bruxelles, M. Périchon, 1858, folio n°71)
LELIEVRE Xavier-Charles-Eugène. Chevalier de l’Ordre Léopold, né à Namur, le 14 novembre 1805, représentant élu par l’arrondissement de Namur
Les études de M. Xavier Lelièvre ont été signalées par de brillants succès. A Namur, il reçut la Médaille d'or pour avoir obtenu tous les premiers prix dans ses classes d'humanités ; à l'Université de Louvain, il eut deux Mémoires couronnés; l'un, sur la Tentative en matière de crimes et délits, l'autre, sur l'Origine des douze tables. Ils ont été imprimés dans les Annales universitaires de 1825-1826.
Docteur en droit, M. Lelièvre revint à Namur. Fils d'avocat, il se livra avec ardeur au travail du barreau, et consacra tous ses loisirs à la collaboration du Courrier de la Sambre, journal dont le libéralisme eut, pendant plusieurs années, une haute influence.
Nommé, en octobre 1830, Juge suppléant au Tribunal civil de Namur, M. Lelièvre fut élu, en 1831, Suppléant au Congrès national.
De 1832 à 1844, renonçant à la politique active, M. Lelièvre se dévoua entièrement à l'exercice de sa profession d'avocat. En 1844, il prit part au mouvement, et fut délégué en 1846 au Congres libéral.
Sa carrière politique était tracée au mois de juin. Candidat libérale de Namur, il élu Membre de la Chambre des Représentants, et depuis lors il a toujours été renommé par le corps électoral.
L’honorable Député de Namur est l'un des hommes les plus laborieux de la Chambre : profondément versé dans la science du droit, il répand la lumière sur toutes les questions ardues, et, dans l'intérêt public, use de son initiative parlementaire.
En 1849, il fut l’auteur d'une proposition autorisant le pourvoi en cassation en matière de milice ; il prononça en faveur de la suppression du Conseil des mines. et demanda la révision de la loi du 23 septembre 1842 sur [instruction primaire. Son opinion était que l’intervention du clergé dans l’enseignement devait être réglée par voie administrative.
De concert avec M. Tesch, il proposa l'article 6 de la loi de juin 1849, relatif au droit accordé aux tribunaux de modérer les peines en cas de circonstances atténuantes, sans faire dépendre cette faculté du montant du préjudice causé.
En 1850, nommé Rapporteur pour la révision du régime hypothécaire, il fit preuve des connaissances les plus étendues comme Jurisconsulte.
L'année suivante, son rapport sur l'expropriation forcée le fit pénétrer dans le dédale de nos lois de procédure, et sa vaste érudition servit de flambeau dans toute la discussion du projet de loi.
En 1852, un ouvrage remarquable fut publié sous ce titre : Questions de droit sur les coutumes de Namur. L'auteur était M. Lelièvre; chargé des intérêts de la ville, avocat des premières familles de la province, il offrait à ses concitoyens le tribut de ses patientes recherches ; son livre est resté comme un monument élevé en l'honneur des vieilles institutions du Namurois.
En 1856, le Représentant de Namur, se joignit à la Députation de Liége pour proposer une réforme devenue indispensable dans le service des audiences : la récusation des magistrats, parents ou alliés de l'avocat ou de l'avoué de l'une des parties, fut le résultat de cette proposition.
L'honorable M. Lelièvre s'est déclaré en plusieurs occasions opposé au système qui livre à l'arbitraire du pouvoir exécutif le sort des étrangers résidant en Belgique. Il voulait que le pouvoir judiciaire fût appelé à donner son avis préalable dans ces sortes d'affaires, pour l'honneur et la sécurité de tous.
Le projet de loi sur les établissements de bienfaisance rencontra en lui l'un de ses plus savants adversaires.
L'honorable M. Lelièvre est, depuis 1850, Membre honoraire de la Société de sciences du Hainaut. Les services si utiles du laborieux Député de Namur ont été récompensés, en 1854, par la décoration de Chevalier de l'Ordre Léopold.
(Extrait de l’Echo du Parlement, Bruxelles, le 24 août 1876)
M. Xavier Lelièvre, bourgmestre de Namur, est décédé hier matin, à sept heures et demie.
M. Lelièvre était souffrant et alité depuis quelques jours ; cependant un mieux semblait se manifester depuis la veille, lorsqu'il s'éteignit subitement, alors qu'on espérait le voir bientôt convalescent.
M. Xavier Lelièvre a rempli une longue carrière politique.
Elu membre de la Chambre des représentants le 13 juin 1848, il siégea au Parlement, sauf une courte interruption, de 1859 à 1864, jusqu'à sa mort ; son grand âge seul et let besoin de repos lui ont fait décliner toute candidature aux élections dernières.
A la commune, M. Lelièvre était arrivé comme conseiller communal le 7 octobre 1863. Nommé échevin le 4 janvier 1864, il fut nommé bourgmestre le 21 juillet 1867.
M Lelièvre, né le 14 novembre 1805, était commandeur de l’Ordre de Léopold.
(Extrait de la Meuse, Liège, du 26 août 1876)
M. Lelièvre n'a pas survécu longtemps à sa retraite de sa vie parlementaire. Il était plein de santé lorsque, il y a trois mois à peine, il renonça au renouvellement de son mandat législatif. Quelle que soit l'opinion que l'on alt da sa carrière politique et de ses nombreuses variations, on ne peut méconnaître que sa mort laisse un grand vide dans le Parlement. La Pasinomie renferme à chaque page des traces de son activité comme jurisconsulte et comme législateur. De nombreuses mesures de simplification on matière administrative et judiciaire sont dues a son initiative.
Il prit surtout une grande part à la discussion du nouveau code hypothécaire et de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique. Il est aussi l'auteur de l'article 8 de la loi de 1850 sur l'enseignement relatif a l'instruction religieuse. Bien qu’ayant une grande réputation comme jurisconsulte et comme avocat , il ne parvint jamais à conquérir une place parmi les orateurs, à cause de son débit embarrassé et de son élocution vicieuse, aggravée encore par son accent de terroir. Quand i1 s'animait, ce qui lui arrivait souvent, il devenait tout à fait impossible à comprendre.
Dans les relations privées, c'était un bomme agréable et plein d'aménité, mais d'une distraction qui aurait rendu des points à celle d'Ampère, qui est passée l'état de légende.
Il lui arrivait de dire vingt-cinq fois bonjour à la même personne dans la même réunion, et de lui demander des nouvelles de sa santé, y compris celle de sa femme, alors même que son interlocuteur était célibataire.
A la Chambre, M. Lelièvre avait l'art d'être toujours très bref. Il écrivait tout ses discours, qui n'avaient jamais plus de deux à trois feuillets et en faisait lui-même. pendant la séance, des copies pour la tribune des journalistes.
Bien qu'il eût eu l'air de faire ses adieux à la vie parlementaire, on lui supposait l'intention de solliciter un siège an Sénat aux élections de 1878.
II laisse une grande fortune. qui est exclusivement le fruit de son travail. Tel qu'on le connut, avec ses qualités et ses défauts, c'était un type vraiment original, et la Chambre a perdu en lui l'une de ses figures les plus caractéristiques. A l'époque où il siégeait sur les bancs de la gauche, son concitoyen, M. Wasseige, na laissait jamais passer l'occasion de parler après lui. Quand Lelièvre défendait un intérêt namurois , aussitôt son collègue clérical demandait la parole, et l'on peut dire que sans le premier, personne n'eût jamais eu I occasion de songer au second. C'est ainsi que M. Wasseige acquit une notoriété et devint ministre.
M. Lelièvre n'étant plus de la Chambre. il n'y aura lieu de le remplacer que comme bourgmestre à Namur, et l’on n'y parviendra pas sans peine. Sa place est, assure-t-on,. destinée un clérical, mais il y en a qui seraient tolérés par l'opinion publique, tandis qu'il y en a d'autres dont la nomination serait un véritable défi. L'on attribue à M. Delcour l'intention de choisir le plus intransigeant parmi les ultramontains du Collège ou du Conseil. Ce sera pour après les vacances et l’on attendra sans doute que les ministres soient réunis à Bruxelles pour prendre une résolution.