de Moor Jean, François, Edouard libéral
né en 1821 à Luxembourg décédé en 1869 à Bruxelles
Représentant entre 1854 et 1869, élu par l'arrondissement de Neufchâteau(Extrait de : E. BOCHART, Biographie des membres des deux chambres législatives, session 1857-1858, Bruxelles, M. Périchon, 1858, pp. 23 et suivantes)
DEMOOR, Jean-Franois-Edouard,
Né à Luxembourg en 1821,
Représentant, élu par l’arrondissement de Neufchâteau,
M. Demoor, fils d'un ingénieur distingué, fait partie de la Chambre depuis 1854. Cet honorable Membre a toujours professé des opinions libérales, et s'est adonné spécialement aux questions de travaux publics.
Ses premières paroles furent en faveur de l'achèvement des routes dans une partie du Luxembourg, et de la distribution de la chaux à prix réduit pour les agriculteurs de cette province.
Lors de la discussion du crédit de 400,000 francs pour les petits employés, l'honorable M. Demoor exprime la crainte qu'on ne se soit arrêté à un chiffre insuffisant pour que la mesure devienne efficace.
A l'occasion du crédit pour l'exécution des travaux d'utilité publique, il accuse de partialité le projet soumis aux délibérations de la Chambre, et reprenant son thème favori :
« Dans le Limbourg vous voulez donner de l'eau, s'écrie-t-il, et aux Luxembourgeois vous refusez la chaux à prix réduit. »
A la session de 1855-1856, M. Demoor, fidèle à ses principes, demanda la permanence du crédit de 800,000 francs en faveur des employés inférieurs et des ouvriers salariés par l'Etat, et une part pour le Luxembourg dans le crédit de 1,983,000 francs, affecté au Département des Travaux publics.
Au budget de l'Intérieur, il revint, avec une louable ténacité, sur la question de la chaux à prix réduit, comme une nécessité pour la province qu'il représente.
En 1856-1857, l'honorable député, dans l'intérêt de l'instruction du peuple, demande la création d'une place d'inspecteur de l'enseignement primaire pour la province de Luxembourg. Il soutient de nouveau la demande de distribution de la chaux à prix réduit, la révision du tarif ardoisier, et donne son appui à la pétition des secrétaires communaux concernant la caisse de retraite.
Les vœux unanimes des populations, dont M. Demoor s'est fait l'organe, viennent enfin d'être entendus; M. le ministre de l'intérieur Rogier a présenté, dans la séance du 15 juin 1858, un projet de loi qui assurera une modique pension et procurera ainsi une honorable vieillesse aux secrétaires des communes-belges.
Réélu au scrutin général de 1857, M. Demoor fait actuellement partie du bureau de la Chambre en qualité de secrétaire.
Si M. Demoor n'était pas si connu pour son patriotisme, on pourrait croire que la chaux à prix réduit est son idée fixe, et qu'il ne s'occupe que des intérêts de clocher. Mais l'honorable Représentant n'est pas orateur ; il se résigne au rôle impartial d'auditeur dans les questions générales, et sa parole brève ne se fait guère entendre que pour les besoins spéciaux de ses commettants.
(Extrait de l’Echo du Parlement, 13 juin 1869)
Nécrologie.
Aujourd'hui. à onze heures, ont eu lieu au Quartier-Léopold et dans la paroisse de Saint-Josse-ten Noode, au milieu d’une grande affluence de notabilités, les funérailles de M. Edouard-François De Moor, membre de la Chambre des représentants, l’un des secrétaires de cette assemblée, chevalier de l'Ordre de Léopold, administrateur de la Société du Grand Luxembourg, etc., décédé à Bruxelles, le 10 courant, à l'âge de 48 ans.
La députation de la Chambre des représentants désignée par le sort, les membres du bureau, un grand nombre de représentants de cette assemblée, des membres du Sénat, MM. Pirmez. ministre de l'intérieur, Vanderstichelen, ministre des affaires étrangères, Bara, ministre de la justice, Renard, ministre de la guerre. Ch. Rogier et H. De Brouckere, anciens ministres et ministres d'Etat, etc., ont assisté aux cérémonies funèbres sous l'escorte de détachements du 3ème régiment de lanciers.
Des détachements de carabiniers et de grenadiers composaient en outre l'escorte pour les honneurs militaires funèbres à rendre à la dépouille du représentant défunt. Cette escorte était commandée par M. le colonel Jorissen, des carabiniers. Le corps de musique de ce régiment marchait en tête.
Au moment de la levée du corps faite en la maison mortuaire, rue Belliard,52, par le clergé de St-Josse-ten-Noode, un discours d'adieu a été prononcé par M. Dolez, président de la Chambre des représentants, au nom de cette assemblée. Le voici :
« Messieurs,
« Organe de la Chambre des représentants, je dois faire taire la douloureuse émotion de ma vieille amitié, pour déposer sur ce cercueil l'expression des regrets que nous consacrons à l'excellent collègue qui vient de nous être ravi d’une manière aussi inattendue que prématurée.
« François-Edouard De Moor, fils d'un ingénieur de haute distinction, était né à Luxembourg le 29 mai 1821. Profondément dévoué à son pays. dont il aimait ardemment les libérales institutions, il eut, jeune encore, l'honneur d'être appelé au sein de la Chambre des représentants. Il n'avait que 33 ans lorsque l'arrondissement de Neufchâteau lui ouvrit, le 13 juin 1854, il y aura demain 15 ans, les portes de notre Parlement. Toujours fidèle à ses convictions, il y pratiqua sans cesse les principes d'un libéralisme prudent et ferme, et aucun zèle ne surpassa celui qu'Il apporta dans l'exercice de son mandat.
« Enfant du Luxembourg, il aimait sa province avec une passion toute filiale ; aussi ne manqua-t-il jamais une seule occasion de défendre énergiquement ses intérêts.
« L'agriculture et l'industrie luxembourgeoise n'oublieront jamais, j’en suis sûr, l'ardeur émue avec laquelle il prenait la parole au sein de notre Chambre, soit qu'Il s'agît d’enrichir sa province de routes nouvelles ou de chemins de fer, soit qu'il réclamât pour elles les encouragements dont il croyait qu'elles avaient besoin. El combien il était heureux quand un vote de la Chambre avait couronné ses efforts !
« Que n'aurais-je pas à rappeler si je voulais parler du dévouement qu'Il consacrait aux intérêts individuels de ses commettants ?... Il eut la satisfaction de voir ses services reconnus. Avec une invariable fidélité, l'arrondissement de Neufchâteau renouvela cinq fois le mandat qu'Il exerçait si dignement, et sa légitime popularité y était devenue telle, qu'aux dernières épreuves électorales sa candidature ne rencontra pas même de concurrent !
» A ces témoignages de la confiance de ses électeurs se joignirent ceux de la Chambre elle-même, qui après lui avoir confié les fonctions de secrétaire le 17 décembre 1857, l’y maintint par onze réélections successives. II était à mes côtés, exerçant cette mission, lorsqu'il ressentit les premières atteintes de la maladie au milieu de laquelle la mort est venue le surprendre, quand tous envisageaient son état avec la plus entière sécurité.
« Le 6 juin {863, le roi Léopold Ier lui avait décerné la décoration de son Ordre, juste récompense de son dévouement et de ses loyaux services.
« La vie trop courte d'Edouard De Moor fut donc celle d’un citoyen utile à son pays, animé de amour du bien public, et sa mémoire restera entourée de la considération qu'il a conquise et méritée.
« Le président de la Chambre pourrait s'arrêter ici. puisque c'était surtout de l'homme public dont il avait à retracer la vie. Mais ma vieille amitié doit aussi quelques paroles à l'homme privé, qu'il m'a si bien été donné d'apprécier.
« Doué d'un caractère aussi aimable que bienveillant, ayant toutes les qualités de l'homme du monde, rencontrant partout les sympathies les plus sincères et fondant les amitiés les plus durables, il apportait dans toutes ses relations une Incomparable cordialité, et c'est de lui qu'il est permis de dire qu'il ne rencontrait partout que des amis. Comme époux et comme père, il épanchait le trésor de son âme aimante sur les êtres chéris qui l'entouraient et pour lesquels, il y a quelques semaines, je l'entendais caresser des projets d'avenir. Ces projets, l'implacable mort les a rompus et remplacés, pour sa femme si dévouée comme pour ses jeunes enfants, par les souvenirs et les regrets.
« Cher collègue. excellent ami. reçois notre suprême adieu, et que ton âme chrétienne, accueillie par le Dieu créateur, soit en paix au sein de l'éternité. »
Les coins du drap mortuaire étaient tenus par MM. Dolez, président de la Chambre des représentants, Victor Tesch, ancien ministre de la justice, administrateur délégué du Grand-Luxembourg, Van Humbeeck et Reynaert, secrétaires de la Chambre.
Après le service et absoutes, le cortège s'est remis en marche pour se diriger vers la station du chemin de fer du Midi, d'où un train spécial a conduit le défunt et sa famille à Mons, lieu de l'inhumation.
(Extrait de l’Echo du Parlement, 18 juin 1869)
Les catholiques sont dans la jubilation quand ils peuvent tirer le doigt de Dieu de leur boîte à surprises.
Voici ce que nous lisons ce matin dans la correspondance bruxelloise du Courrier de l’Escaut, journal officiel de M. l'évêque Labis :
« Vous ayez appris la mort de M. le représentant de Moor ; il se plaignait depuis quelque temps, mais ni lui ni les autres ne prévoyaient une fin si prochaine et surtout si subite. La veille du jour qui fut son dernier, il soupait encore avec M. d'Hoffschmidt. Le lendemain, se trouvant au lit, il se sentit indisposé ; il demanda de l'eau, poussa un cri terrible et puis on ne l’entendit plus. - Chose singulière, M. de Moor est mort précisément quand on venait de distribuer à la Chambre les pièces de la fondation Jacquet, affaire dont il avait lui-même saisi l'assemblée législative. »
La sottise de certaines gens n'a bas de limites, il faut le reconnaître.