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L'institution d'un Conseil d'Etat en Belgique
VELGE Henri - 1930

VELGE Henri, L’institution d’un Conseil d’Etat en Belgique

(Paru à Bruxelles en 1930 aux éditions de la société d'études morales, sociales et juridiques)

Avant-propos

(page 5) La question de l'institution d'un Conseil d'Etat a été agitée maintes fois en Belgique, depuis les débuts de notre indépendance. Rogier l'appelait déjà, en 1853, « cette très vieille et très difficile question si souvent débattue et toujours ajournée ! » Fréquemment il a été proposé par les autorités les plus qualifiées du monde politique et judiciaire, d'introduire dans notre organisation un rouage nouveau, sous l'un ou l'autre nom, appelé à jouer le rôle confié de semblables institutions dans d'autres pays. Après diverses tentatives auprès du parlement, après de nombreuses études de la doctrine, il semblait que la révision constitutionnelle de 1920-1921 allait permettre de réaliser la réforme si longtemps demandée. Il n'en fut rien.

Selon les tendances du Gouvernement de l'époque, deux idées devaient dominer cette révision constitutionnelle : accentuer le caractère démocratique de la représentation nationale et apporter à notre organisation constitutionnelle les améliorations que près d'un siècle d'expérience avaient suggérées. Si la première de ces idées fut réalisée, la seconde échoua complètement. Dans le domaine qui nous (page 6) occupe, un rapporteur systématiquement hostile et d'ailleurs insuffisamment documenté, fit rejeter le projet sans discussion sérieuse par une Chambre indifférente à un problème dont plusieurs aspects lui échappaient d'ailleurs, alors que toute son attention était concentrée sur le caractère politique de la révision. N'est-ce pas cependant de la démocratie bien comprise d’assurer, dans un pays comme le nôtre, une bonne confection des lois, une meilleure organisation administrative et l'institution de garanties contre l'arbitraire de l'administration et les excès de pouvoir : la Chambre des représentants ne l'a pas compris ainsi. Le Sénat, au contraire, envisagea le problème sous son véritable aspect, mais il dut renoncer à tenter de réaliser son idée devant l'opposition certaine de la Chambre. Tout ce que le Gouvernement, partisan de la réforme, put obtenir, ce fut de faire reconnaître par les Chambres que la question restait ouverte et qu'une modification constitutionnelle ne serait plus nécessaire pour réaliser ultérieurement les réformes.

Huit années sont passées ; des problèmes plus graves, la restauration économique et financière de la nation ont été au premier plan des préoccupations des Gouvernements qui se sont succédé depuis cette date.

Mais cette restauration est aujourd'hui achevée ; l'heure semble venue de reprendre l'examen des problèmes de la confection des lois, de la responsabilité (page 7) des autorités publiques et des garanties contre les excès de pouvoir.

Il ne nous a pas semblé qu'après tant de travaux importants consacrés à la question du Conseil d'Etat en Belgique, les débats puissent se rouvrir en prenant pour point de départ un document aussi partial et aussi incomplet que le rapport présenté en 1921 à la Chambre. C'est la raison de cette étude. Elle rappellera les tentatives infructueuses du passé, les travaux de tous ceux -ils sont nombreux et comptent parmi les notabilités de la politique et de la science du Droit en Belgique - qui se sont attachés à résoudre la question. Nous inspirant de ces travaux, ainsi que des constatations faites au cours d'une carrière administrative qui nous a mis en contact avec les services les plus divers de l'Etat, nous exposerons les données du problème tel qu'il se présente aujourd'hui, et nous nous attacherons à suggérer les solutions qui nous paraissent devoir être adoptées.

1er décembre 1929.