(Paru dans le journal, "La Liberté", en 1866 et 1867 et réédité par Jules Garsou, "Alexandre Gendebien. Sa vie, ses mémoires", paru à Bruxelles en 1930, chez René Van Sulper)
(pages 175 à 183) Ce furent diverses allégations de Théodore Juste, dans sa biographie du Régent (Elle parut vers la fin de 1866 ou tout au début de 1867), qui amenèrent la publication des Révélations historiques sur la révolution belge de 1830, dans le journal d'avant-garde démocratique,La Liberté (Note de bas de page : Cette feuille hebdomadaire avait été fondée en 1865 par une pléiade de jeunes gens qui, presque tous, parvinrent à de hautes destinées). Elle fut suivie des Aperçus de la part qu’a prise Alexandre Gendebien à la révolution de 1830.
Gendebien pria les rédacteurs de La Liberté d'insérer une lettre rectificative adressée à l'historien. Ils l'accueillirent avec empressement. « Les souvenirs de notre révolution - disaient-ils - sont trop rares pour ne pas les recueillir avec un soin pieux, surtout lorsqu'ils émanent d'une personnalité aussi éminente. Pour nous, pour nos lecteurs, pour l'intérêt de notre histoire nationale, nous publierons avec empressement les communications que M. Gendebien voudra bien nous envoyer.
« Le choix qu'il a fait de « La Liberté » est un honneur et une marque de sympathie dont nous apprécions la valeur. »
Cette première épître, datée du 22 janvier 1867, fut insérée en deux fois dans le journal. La première partie parut dans le numéro du 27 janvier ; la seconde, dans celui du 6 février. Elle fut suivie de plusieurs autres provoquées par le rebondissement de la polémique. (Note de bas de page : Devenu presque aveugle, Alexandre Gendebien, dont l'âge n'avait pas amorti la fougue et l'esprit combatif, dictait ses souvenirs à son petit-fils, M. l'ingénieur Mourlon, encore vivant. La dictée explique les quelques imperfections de style que l'on peut relever/)
L'ancien membre du gouvernement provisoire critiquait aussi l'indulgence témoignée au Régent par son biographe. A ce propos, il entrait dans d'assez longs développements sur le caractère bon, mais faible, de Surlet, sur son inaction qui devint un danger ; il rappelait sa première démission et celle de Charles de Brouckère comme ministres, la retraite de Goblet, la dislocation définitive du premier ministère.
Le 4 février 1867, Juste releva certaines assertions de Gendebien. Lorsque Gendebien prit connaissance de la réponse de Juste, il en conçut une violente irritation. Se laissant emporter par la colère, Gendebien qualifia Juste de calomniateur, se dit honoré de ses injures et lui reprocha « l’encens frelaté qu’il distribue à certains hommes, ses héros, monopoleurs impudents de tout ce qui a été fait de bien, de beau, de glorieux pendant et après 1830. »
Nous ne suivrons pas les deux adversaires dans la continuation de cette polémique qui se termina le 4 mars par un « dernier mot », très digne, de Juste, s’inclinant devant les services rendus au pays par son bouillant contradicteur qui, protestait-il, s’était « complètement mépris » sur ses intentions.
(page 197) Gendebien venait d'achever dans le numéro de « La Liberté », du 14 avril 1867, la reproduction de son discours du 1er février 1831, préconisant l'élection du duc de Nemours. Il s'arrêtait, disait-il, ne voulant pas pour le moment se laisser entraîner à des personnalités qui éveillaient en lui d’« amers souvenirs ».
Bientôt après cependant, dès le 28 avril, il annonce à MM. les rédacteurs de « La Liberté » son intention de continuer ses « révélations », et il les présente sous un titre nouveau.
« La bienveillante hospitalité que vous avez accordée à mes Révélations historiques - dit-il - m'encourage à entreprendre une œuvre que j'aurais dû accomplir depuis longtemps.
« Les devoirs de ma profession, mes nombreuses occupations ont été un premier obstacle.
« Puis, je n'hésite pas à l'avouer, le profond dégoût que m'ont inspiré les infamies du mois de mars 1831 et les lâchetés du mois de mars 1839 m'a souvent fait rejeter la plume que mes amis me mettaient dans la main pour accomplir, disaient-ils, un devoir impérieux auquel je n'avais pas le droit de me soustraire. Enfin, frappé de cécité presque complète, depuis le mois de mars 1859, en proie à de vives et très fréquentes douleurs, je fus forcé d'ajourner la promesse que j'avais faite à mes amis.
« Depuis, on m'a fait lecture de beaucoup d'écrits sur la Révolution de 1830. Ils m'ont révélé tant de flagorneries pour les moins médisants, tant d'oublis, de lacunes, souvent tant de calomnies inspirées par l'ambition et l'intrigue, que je sentis la nécessité de faire appel à mes souvenirs, de rétablir la vérité des faits sur les hommes et les choses de la Révolution, si étrangement méconnus, si déloyalement travestis. »