(Paru à Bruxelles en 1920, chez Vromant)
(page 93) Dans une lettre adressée à la reine Victoria, au mois de juin 1838 (vraisemblablement pendant la. seconde moitié de ce mois), Léopold 1er a exposé l'impression que la déclaration de lord Palmerston produisit en Europe :
« La déclaration faite par lord Palmerston, au commencement du mois de mai, au gouvernement de la Prusse, écrit le monarque, m'a beaucoup attristé. Elle était prématurée, parce que les négociations n'avaient pas encore été recommencées. Il semblait que le gouvernement anglais désirait affirmer aux Puissances septentrionales, qui avaient toujours fermement protégé la Hollande : « Vous vous imaginez peut-être que nous aurons des égards pour l'oncle de la Reine ; mais voyez donc, nous lui réglons son compte, plus lestement encore que du temps de notre dernier maître. » Cette impression avait été générale sur le continent ; on interprétait comme il suit la déclaration à la Prusse : « La reine et ses ministres sont donc entièrement indifférents sur le compte du roi, cela change entièrement la position, et nous allons faire main-basse sur lui. » A partir de ce moment, leur (sic) langage devint très impérieux ; on ne parla plus que d'actes de coercition, de bombardement, etc., etc. Je crois fermement, parce que je suis depuis de nombreuses années sur le pied d'une grande et sincère amitié avec Palmerston, je crois qu'il n'avait pas prévu lui-même l'importance qu'on attacherait à sa déclaration. Je dois dire qu'elle m'a plus blessé autant comme Anglais que comme Belge, puisque c'est d'Angleterre que je viens ici, choisi pour cette raison même. D'ailleurs, je suis heureux de le dire, jusqu'ici je ne me suis jamais trouvé dans la situation de vous demander un acte d'amabilité, de sorte que quels que soient les petits services que j'ai pu vous rendre, je restais parfaitement désintéressé. Le fait que la première intervention diplomatique de votre gouvernement dans nos affaires ait paru dirigé contre moi, a créé une émotion considérable sur tout le continent. Je ne vous demanderai jamais de faveurs, ni quoi que ce soit qui puisse être considéré comme (page 94) incompatible avec les intérêts de l'Angleterre, mais vous comprendrez qu'il y a une grande différence entre réclamer dès faveurs et être traité en ennemi. » (BARDOUX, La Reine Victoria d'après sa correspondance inédite, tome 1er, p. 174.)
Léopold 1er disait vrai : la déclaration de lord Palmerston avait amené un changement notable dans l'attitude des plénipotentiaires à Londres des cours du nord.
Après les premières communications de ce ministre à la Conférence, lorsqu'elle reçut notification de la Note néerlandaise du 14 mars, on parut admettre qu'il était impossible d'imposer encore à la Belgique une acceptation pure et simple des XXIV articles.
Sans aller jusqu'à désavouer l'attitude de leurs représentants, les cours de Berlin, de Vienne et de Pétersbourg laissèrent entendre qu'elle n'avait point eu l'heur de leur plaire. Le prince de Metternich s'était plu à répéter que, suivant lui, les membres de la Conférence avaient « eu tort de ne pas accepter aussitôt la signature du plénipotentiaire de la Hollande, le roi Guillaume plus de tort encore de n'avoir pas prévenu les cours de l'Europe, qui n'avaient pu donner d'avance des instructions à leurs plénipotentiaires. On aurait fait par cette acceptation un grand pas, et il aurait été très facile de s'expliquer ensuite. » (Lettre du comte de Louvencourt au chevalier de Theux, 21 mai 1838)
Persuadés par la déclaration de lord Palmerston sur la nécessité de maintenir sans modification les articles du traité du 15 novembre relatifs au territoire et à la dette, que le ministre britannique avait abandonné les idées défendues dans la séance du 19 mars 1838, les gouvernements prussien et autrichien crurent pouvoir tenter de faire triompher la politique russe désireuse obstinément, celle-ci, de voir admettre l'acceptation pure et simple des stipulations arrêtées en 1831. (Note de bas de page : Lettres de M. van de Weyer au chevalier de Theux, 5 et 8 juin 1838. « Si telle est l'intention des cours du nord, écrivait, le 5 juin, M. van de Weyer, toute négociation ultérieure devient à l'instant même impossible, et elles ne sauraient commettre de faute plus heureuse pour nous et plus favorable aux vues du gouvernement du roi. »)
Mais quelque favorable qu'il parût en ce moment aux desiderata des cours du nord, lord Palmerston n'entendait cependant pas s'inféoder à leur cause aussi étroitement que celles ci l'espéraient, et donner ainsi un démenti par trop éclatant à une déclaration vieille de six semaines à peine. Il s'empressa d'ôter à la Prusse, à l'Autriche et à la Russie, tout espoir à ce sujet. Rencontrant le baron de Bülow et le comte Pozzo di Borgo, il leur tint un langage aussi catégorique qu'explicite.
(page 95) « Il ne faut pas, leur dit-il, que vos cours se méprennent sur les intentions de la Grande-Bretagne et donnent à mes déclarations une portée qu'elles n'ont point. Nous n'entendons nullement contraindre la Belgique à subir purement et simplement les XXIV articles ; le bénéfice d'une négociation nouvelle lui est assuré et garanti, de même qu'à la Hollande ; et les deux parties, que nous considérons comme liées en ce qui concerne la dette et le territoire, doivent néanmoins être admises à modifier de gré à gré certains articles du traité. Que si, oubliant les engagements qui ont été pris à cet égard, les Puissances du nord retardaient de nouveau indéfiniment, par un retour aux XXIV articles, la conclusion d'un arrangement définitif, elles fourniraient à la Belgique, en agissant de la sorte, les arguments les plus puissants pour se soustraire à toutes ses obligations. En effet si, par votre fait, l'état actuel se prolonge, et qu'il soit impossible d'arriver à l'exécution définitive du traité, la Belgique sera en droit de déclarer qu'elle considère comme suranné et nul un acte auquel on n'aurait donné d'existence que sur le papier et, dans ce cas, la Grande-Bretagne, qui conteste encore aujourd'hui ce droit à la Belgique, se joindrait à elle, et lui donnerait son appui. Que vos cours y réfléchissent donc bien avant d'entrer dans cette voie. Le temps et les circonstances sanctionnent bien des prétentions qui paraissent peu fondées d'abord ; et l'on n'aura plus en 1848, sur les affaires de la Belgique, l'action que l’on peut encore légitimement exercer aujourd'hui. Il y aurait folie à croire que le roi Léopold, allié par des liens étroits à la famille royale de France et d'Angleterre, consolidé sur son trône par l'affection de ses sujets et la prospérité dont ils jouissent, pourrait être contraint plus tard à exécuter un traité qui serait resté lettre morte pendant un si grand nombre d'années.
M. de Bülow parut s'incliner devant la force de ce raisonnement, mais le diplomate russe, dominé par son impatience et connaissant la volonté bien arrêtée de son maître, voulut à peine écouter lord Palmerston (Lettre de M. van de Weyer à M. de Theux, 8 juin 1838).
Bientôt celui-ci fit un pas de plus en faveur de la Belgique. Il chargea le représentant de la reine à Berlin d'y renouveler les déclarations qu'il avait faites à MM. de Bülow et Pozzo di Borgo. A cette démarche, il en ajouta une autre. Le gouvernement français s'était montré disposé à admettre une négociation directe préalable entre le roi Léopold et le roi Guillaume sous la médiation des cinq cours. Dans la seconde quinzaine de juin, le ministre des Affaires étrangères de la reine Victoria chargea son représentant à Berlin de donner à M. de Werther lecture d'une missive par laquelle il manifestait sur ce point l'adhésion du cabinet de Londres aux intentions du cabinet de Paris.
M. de Werther éprouva, en entendant la lecture des deux dépêches de lord Palmerston, une profonde déception, une sorte de désespoir, (page 96) au dire du comte Bresson. Il s’écria que c'était la fin de toutes choses et l'équivalent de la dissolution de la Conférence. Il en appela à la déclaration récente et si précise du ministre britannique. Il se plaignit amèrement de ces contradictions si inusitées dans les rapports de gouvernement à gouvernement (Arch. du Min. des Aff. étr. à Paris, Prusse, 290, folio 25). Il avait compté sur un ralliement plus complet de l'Angleterre à la politique prussienne. Du coup, il sentit vaciller l'espoir, dont il se flattait auparavant, d'une terminaison prompte de l’affaire hollando-belge. La marche que la Grande-Bretagne et la France voulaient suivre, l'appui qu'elles paraissaient par là donner à des prétentions considérées par le cabinet de Berlin comme inacceptables, devaient fatalement, selon lui, conduire à des délais dont il paraissait impossible de prévoir le terme.
(Note de bas de page) A en croire le comte Bresson, la politique de lord Palmerston, en cette circonstance, aurait rencontré un censeur sévère dans la personne du représentant de l'Angleterre à Berlin : « Je sais, écrivait-il au comte Molé, le 14 juin, que lord W. Russell a écrit à lord John Russell, son frère, pour lui représenter tout le tort que ces soubresauts de lord Palmerston faisaient au cabinet anglais. Il le prie d'intervenir, ainsi que lord Melbourne, dans la direction de cette affaire et de mettre fin, fût-ce même au prix de la dissolution de la Conférence, à l'incertitude où l'Europe est plongée et à l'état de fermentation en Belgique, et qui déjà gagne la frontière française. Arch. du Min. des Aff.étr. à Paris, Prusse, 290, folio 35. (Fin de la note)
La nouvelle déclaration de lord Palmerston au cabinet de Berlin surprit le comte Molé (Lettre du comte le Hon au chevalier de Theux, 26 juin 1838). Il se hâta néanmoins, dès le 5 juillet, de marquer au gouvernement prussien qu'il était d'accord cette fois avec le cabinet britannique. « M. le baron de Werther doit avoir dit à cette occasion, écrivait le 6 juillet, M. Beaulieu au chevalier de Theux, qu'il espérait qu’une simple question de forme ne viendrait pas tout faire manquer ; du reste que l’on s'apercevra, aux premières propositions que feront les plénipotentiaires des trois Puissances, que le différend qui les sépare des deux Puissances maritimes est si petit que l’on n'éprouvera aucune difficulté à se rapprocher.
M. Beaulieu ne put éviter les éclats de la mauvaise humeur éprouvée par le ministre prussien. « Il paraît, lui dit M. de Werther, au cours d'une conversation fugitive, que votre gouvernement a imaginé de proposer de lui laisser, moyennant une indemnité en argent, tous les territoires qu'il doit restituer à la Hollande en vertu du traité du 15 novembre. Soyez convaincu que cette proposition, si elle était faite, réussirait aussi peu que celle de vous abandonner, également à prix d'argent, notre province du Rhin. » (Lettre de M. Beaulieu au chevalier de Theux, 22 juin 1838).
(Note de bas de page) « Je vois que les Etats de la Confédération germanique, écrivait M. Beaulieu dans la même lettre, se montrent de plus on plus opposés à toute nouvelle transaction qui porterait atteinte à l'intégrité du territoire fédéral. Le roi de Wurtemberg s'est prononcé à cet égard pendant son séjour à Berlin, de manière à ne laisser aucun espoir d'arriver par les moyens pacifiques à nous maintenir en possession des territoires auxquels nous avons renoncé en 1831. La Confédération germanique, a dit Sa Majesté, a été aussi loin qu'elle pouvait aller ; de nouvelles concessions la déshonoreraient. » (Fin de la note)
M. de Werther manifesta également son aigreur au comte Bresson. (page 97). Il se déclara révolté par la proposition d'achat des populations qui devaient retourner au roi Guillaume : « Si nous proposions au grand-duc, dit-il, d'acheter l'évêché de Liége, qu'en penserait-on à Bruxelles ? Par là les Belges constatent eux-mêmes que les districts qu'ils prétendent garder ne leur appartiennent pas » (Arch. du Min. des Aff. étr. à Paris. Prusse, 290, n° 34).
Irrité du succès que la politique belge paraissait avoir remporté à ce moment à Londres et à Paris, M. de Werther chercha à faire infliger sur un autre point une humiliation au cabinet de Bruxelles. Comme nous l'avons vu, un comité luxembourgeois s'était formé à Arlon dans le but de provoquer de la résistance à l'exécution des XXIV articles. Les cours du nord se montrèrent mécontentes de son but, de son langage et de ses actes. Elles proposèrent à la France d'adresser en commun au gouvernement du roi Léopold une note dans laquelle on demanderait la dissolution de l'association. Le comte Molé refusa de se joindre à cette démarche qui lui paraissait extrême et offrit de faire notifier à Bruxelles par le ministre de France « l'opinion très prononcée du gouvernement français contre l'existence de ce comité. » Ce moyen terme fut accueilli pour le moment (Lettre du comte le Hon au chevalier de Theux, 26 juin 1838).
Sans se contenter de ce succès relatif, M. de Werther tenta à nouveau de rallier lord Palmerston, du moins d'une manière détournée,à l'acceptation pure et simple des XXIV articles, en chargea le baron de Bülow de sonder le ministre anglais sur une idée qu'il tenait beaucoup à réaliser. Se disant désireux d'éviter de se jeter dans toutes les difficultés qu'une négociation de détails devait nécessairement faire naître, le cabinet de Berlin avait pensé qu'il suffirait aux cinq grandes cours, dans l'intérêt européen, de lier les deux parties aux bases essentielles d'un traité définitif. Il voulait proposer à la Conférence de signer avec les Pays-Bas les XXIV articles, sauf les modifications dont les gouvernements belges et néerlandais pourraient convenir entre eux dans une négociation postérieure, directe et isolée.
A la première communication qui lui fut faite de ce projet, lord Palmerston répondit qu'il était de tout point inadmissible, qu'il fallait que toutes les parties se replaçassent sur le terrain de la négociation de 1833 et qu'il n'y avait de traité possible qu'à cette condition (Lettre de M. van de Weyer à M. de Theux, 2 juillet 1838).
Le gouvernement anglais continuait donc à vouloir fermement (page 98) que les négociations de 1833 servissent de bases et de point de départ aux pourparlers qui allaient s'entreprendre. Mais, si, à cette politique, la Belgique trouvait l'avantage de voir mettre un empêchement absolu à l'adoption pure et simple des XXIV articles, elle y rencontrait d'autre part un obstacle à l'accomplissement de ses ambitions territoriales En effet, en 1833, plusieurs articles d'un projet de traité entre la Belgique et la Hollande, notamment les articles concernant la délimitation du Luxembourg et du Limbourg, avaient été adoptés et paraphés. Ne pouvait-on craindre que les cinq Puissances et la Hollande ne vissent là des faits accomplis sur lesquels il n 'y avait pas à revenir ? La situation était délicate. Le roi Léopold et de M. de Theux eurent à ce sujet avec M. van de Weyer qui, pendant la seconde quinzaine de juin, s'était rendu à Bruxelles, plusieurs conférences. Le souverain, le ministre et le diplomate furent d'accord qu'il n'était pas possible de considérer comme nul et non avenu le consentement donné par la Belgique en 1833 (Note de bas de page : Cette politique fut énergiquement défendue par Charles Rogier, dans la séance du 12 mars 1839, lorsque la Chambre des représentants discuta le traité définitif.) ; - lord Palmerston ne l'aurait d'ailleurs jamais admis, - mais qu'il convenait de reprendre les pourparlers là où on les avait laissés, c'est-à-dire sur les questions de finances et de navigation, sans dire un mot du reste, en laissant le temps et les événements ouvrir de nouvelles voies de négociations dans les questions territoriales (Lettre de M. van de Weyer à M. de Theux, 14 juillet 1838). Le gouvernement belge désirait éviter que la Conférence exigeât de lui une déclaration relative aux articles paraphés en 1833 et désirait aussi que la Conférence elle-même s'abstint de faire une déclaration à cet égard. C'était, à son avis, le seul moyen de revenir, plus tard, sur le problème limbourgeois et luxembourgeois, lorsque l'opinion s'émouvrait en Hollande par suite des réductions que l'on espérait amener la Conférence à faire sur la rente des 8,400,000 florins (Lettre de M. de Theux à M. van de Weyer, I7 juillet 1838)
Sans y mettre de détours, M. van de Weyer aborda avec lord Palmerston la question de savoir comment et à quel point devait être reprise la négociation interrompue en 1833.
« Il me semble, lui dit-il, tout il fait inutile de recommencer à l'article premier, et d'exiger de nous des déclarations nouvelles. Reportons-nous à 1833. Or, à cette époque, la négociation fut suspendue au moment où l'on s'occupait de la dette et des stipulations fluviales. C'est là qu'il faut la reprendre, et cette marche paraît être la seule que l'on puisse adopter, et qui serait parfaitement conforme aux actes que nous avons posés et à vos propres intentions de vous assurer, avant tout, de la sincérité du désir que manifeste le cabinet de la Haye. »
(page 99) Lord Palmerston n'hésita pas à donner son assentiment à cette procédure, Il comprenait l'intérêt que la Belgique avait à suivre la marche proposée, marche qui lui paraissait rationnelle, et promit qu'à l'ouverture des négociations, il s'efforcerait de la faire prévaloir (Lettre de M. van de Weyer à M. de Theux, 2 juillet 1833).
Pour le succès de sa politique, pour fortifier son espoir d'arriver, au moyen d'arguments financiers, à faire triompher ses prétentions territoriales, il importait au gouvernement belge d'obtenir de la Conférence qu'elle admît le principe de l'éventuelle révision de la dette. Or, poussé par le désir sans doute de rassurer les créanciers anglais de la Hollande, lord Palmerston avait, dans sa déclaration de mai, montré la même intransigeance sur ce point que sur les modifications territoriales.
(Note de bas de page) M. Serurier écrivait à ce sujet de Bruxelles au comte Molé, le 17 mai 1838 : « Le grand fait est que le roi aurait déclaré à lord Hamilton et l'aurait chargé solennellement de déclarer à lord Palmerston, que S.M. ne reconnaissait pas à la Conférence le droit de prononcer souverainement sur les démêlés entre 1e roi des Pays-Bas et la Belgique, qu'aucune Puissance et aucun moyen ne pourrait forcer S.M., à acquitter non pas seulement les arrérages de la dette hollando-belge, mais la partie des huit millions quatre cent mille florins mis dans le partage sur le compte de la Belgique. » Arch. du Min. des Aff. étr. à Paris, Belgique, 16, n° 29 (Fin de la note).
Pourrait-on l'amener à abdiquer cette idée ? M. van de Weyer n'en désespéra point. On a vu comment, dans le grave entretien qu'il avait eu avec le ministre britannique, il s'était attaché à lui montrer qu'aux termes du protocole n° 48, la Belgique possédait le droit d'exiger la révision du chiffre de la dette. Lord Palmerston n'avait plus contesté ce droit, mais s'était borné à affirmer, sans faire toutefois aucune concession, l'équité de la décision prise par la Conférence lors des négociations de 1831
(Note de bas de page) Le 26 mai encore, M. de Theux écrivait au roi : « Je viens de voir M. Seymour. Il résulte d'une lettre qu'il a reçue de lord Palmerston que la liquidation de la rente de 8.400.000 florins n'est, dans son opinion, pas sujette à révision. » Le 21 juin, le prince de Ligne, qui se trouvait à Londres pour représenter le roi Léopold au couronnement de la reine Victoria, écrivait à M. de Theux : « Le général Sebastiani m'a assuré hier que la plus grande opposition qu'il trouvait en ce moment aux questions épineuses du territoire et de la dette provenait du ministère anglais lui-même ! »
Le 7 juin, M. de Theux mandait à M. van de Weyer : « La politique use de toutes sortes d’influences à Paris pour amener la, solution la plus prompte de la question hollando-belge. Lord Grandville s'est exprimé avec le comte Molé d'une manière bien défavorable sur la question de la dette. » (Fin de la note)
Stimulé par M. de Theux, M. van de Weyer s'appliqua à obtenir davantage. Les 11 et 12 juin, il eut, au sujet de la dette, deux longues entrevues avec le ministre anglais. Au cours de ces entretiens, il examina avec lui l'ensemble des pièces relatives à la question et il put lui faire admettre le principe de la révision aux termes du protocole n° 48 (Lettre de M. van de Weyer à M. de Theux, 12 juin 1838).
(page 100) « Que le gouvernement belge, dit lord Palmerston, prouve d'une manière évidente, que les tableaux fournis par les plénipotentiaires hollandais sont inexacts, et sa réclamation sera prise en sérieuse considération, et notre décision modifiée en conséquence » (Lettre de M. van de Weyer à M. de Theux, 2 juillet 1838).
Toutefois, d'après une déclaration qu'il faisait au comte Sebastiani, le ministre britannique mettait une réserve à cette promesse. Si la réduction demandée par le cabinet de Bruxelles, quelque juste qu'elle fût, se heurtait chez les Puissances du nord à un refus catégorique, lord Palmerston ne pensait pas qu'il fallût en faire une condition sine qua non de l'ajustement final de la question hollando-belge (Arch. du .Min. des Aff. étr. à Paris. Angleterre 650, n° 47, p. 342).
La Prusse nous avait nettement notifié qu'elle n'admettrait pas que nous restassions en possession des parties du Limbourg et du Luxembourg promises aux Pays-Bas. Elle ne se borna pas à des paroles. Avant même que commençassent les séances de la Conférence de Londres, avant que les Puissances du nord n'eussent envoyé des instructions à leurs plénipotentiaires, elle procéda sur les frontières belges à des mouvements de troupes d'où l'on pouvait déduire des menaces précises. (Lettres de M. de Theux au roi, juillet 1838. Lettre de Léopold Ier au chevalier de Theux, 27 juillet 1838).
M. de Theux demandait à ce sujet des explications à. la légation de Prusse à Bruxelles et le cabinet français chargeait son représentant à Berlin d'en réclamer au baron de Werther, tout en se préparant lui-même à prendre des précautions militaires. De son côté, lord Palmerston se montrait inquiet de ces armements. (Lettre du général Sebastiani au comte Molé. 13 juillet 1838. Arch. du Min. des Aff. étr. à Paris. Angleterre, 651, page 24 et n° 20, page 63).
A Bruxelles, comme à Berlin., on affirmait que les dispositions adoptées n'avaient d'autre but que de porter la force de certains corps d'armée à l'effectif complet de l'état de paix. (Lettres de M. de Theux au roi Léopold, 7 juillet 1338, et du comte le Hon au chevalier de Theux, 26 juillet 1838)
Cette réponse ne paraissait pas péremptoire aux interrogateurs, Ils ne pouvaient croire à l'absence de toute intention vis-à-vis de la Belgique dans le renforcement des garnisons prussiennes du Rhin et de la Moselle. A leurs yeux, le cabinet de Berlin, dans l'intérêt des prétentions germaniques, avait au moins voulu opposer une démonstration militaire aux velléités de résistance qui se manifestaient avec une sorte d'unanimité dans les provinces belges. Peut-être (page 101) encore ne nourrissait-il à ce moment contre celles-ci aucun projet d'agression et se bornait-il à chercher un moyen d'action sur les esprits.
Le désir de se soustraire à l'exécution des stipulations territoriales du traité du 15 novembre ne diminuait pas en Belgique à mesure que le temps s'écoulait. Il acquérait même plus d'intensité (Lettre de M. de Theux à Léopold Ier, 14 juillet 1838). Il se trouvait entretenu par deux catégories très différentes de personnes : les premières inspirées par un patriotisme très sincère, quoique parfois trop peu éclairé ; les autres animées par des sentiments orangistes indéracinables et qui cherchaient à soulever une telle opposition contre l'exécution des XXIV articles que le gouvernement n'eût pu passer outre. Leur espoir à ces dernières était que les Puissances auraient dans ce cas envahi la Belgique, pays habité par des gens intraitables, et l'aurait replacée sous le joug de la Hollande. On a affirmé que l'or du roi Guillaume contribua notablement à échauffer l'esprit belliqueux de certains parmi ces Belges.
Quoi qu'il en soit, la réunion ordinaire des conseils provinciaux vint donner lieu à de nouvelles manifestations contre le traité du 15 novembre.
Cette réunion ne laissait pas que de préoccuper le gouvernement. Le roi notamment ne la voyait point se réaliser sans concevoir quelques craintes. « Il faudra, écrivait-il, au chevalier de Theux, tâcher autant que possible d'empêcher les Etats provinciaux de dire trop de bêtises. Notre position est de nouveau bonne, il ne faut rien faire qui la gâte et nous crée les difficultés les plus absurdes » (Lettre du 6 juillet 1838).
Tous les conseils, à l'exception de celui de la Flandre occidentale, votèrent des adresses au roi pour protester contre le démembrement du territoire. Ceux du Limbourg et du Luxembourg décidèrent de se rendre en corps près du monarque à Bruxelles afin de lui présenter la motion issue de leurs délibérations. A ce voyage on projeta de donner beaucoup d'éclat. Un grand nombre de jeunes gens, avec des compagnies de volontaires de la garde civique en uniforme, devaient accompagner les conseillers provinciaux, auxquels la capitale préparait « la réception la plus démonstrative » (Le journal Le Belge). Mais ce projet rencontra un accueil plus que froid près de M. de Theux et de ses collègues du cabinet. Lorsqu'il apprit qu'il était question du voyage de tout le conseil provincial du Luxembourg, le ministre des Affaires étrangères et de l'Intérieur fit savoir au gouverneur de cette province que, sauf en de grandes occasions, pour (page 102) complimenter le roi, il était contraire aux usages ; que des corps entiers fussent admis près du souverain. Il rappela que les Chambres avaient chargé une députation de remettre leurs adresses. Il priait M. de Steenhault de s'efforcer de faire confier à la députation permanente le soin de parler au nom du conseil, faisant en outre remarquer que le roi étant absent et ne devant pas rentrer en Belgique avant la fin de la session, il y aurait à son retour des inconvénients à recevoir le conseil, car une fois la session close, ses membres ne pourraient plus parler comme corps (Lettre du chevalier de Theux à M. de Steenhault, 9 juillet 1838).
Le ministère tenait évidemment à ce que la manifestation reçût le moins d'éclat possible et cherchait à éviter que la présence des conseillers provinciaux à Bruxelles ne donnât lieu à des démonstrations désagréables pour les Puissances de la Conférence. Cependant, lorsque la demande d'audience lui parvint, M. de Theux ne crut pas pouvoir se dispenser de la soumettre à Léopold 1er.
Autant et peut-être plus que ses ministres, le monarque aurait voulu empêcher l'arrivée dans la capitale des conseils provinciaux du Limbourg et du Luxembourg. Il était persuadé que si la Prusse réunissait des troupes, c'était en grande partie le résultat des mouvements et des agitations qui se produisaient sur la frontière (Lettre de M. van Praet au chevalier de Theux, 17 juillet 1838). Il eut d'abord l'intention de demander que les adresses lui fussent remises par l'entremise du ministre de l'Intérieur
(Note de bas de page) Le 11 juillet, M. van Praet écrivait à M. de Theux, de Neuilly, où il se trouvait avec la famille royale de Belgique : « Le roi me charge de vous écrire quelques mots en son nom. Ces démonstrations politiques des états provinciaux paraissent à S.M. sortir tout à fait des attributions dévolues à ces assemblées. Tout au moins il faut que le gouvernement ne les encourage pas. Elles constituent une fâcheuse habitude en général et dans la circonstance actuelle elles peuvent être d'un danger véritable. Le désir du roi serait donc que vous leur fassiez répondre qu’ils peuvent vous envoyer leurs adresses et que vous aurez soin de les transmettre à Sa Majesté. » (Fin de la note)
Cependant, après réflexion, on craignit sans doute que le refus de recevoir les conseils ne blessât trop vivement leurs membres. Le roi se décida donc à leur accorder l'entrevue désirée, mais il convoqua les Limbourgeois à Beverloo et les Luxembourgeois au château d'Ardenne.
Cette solution ne satisfit pas tout le monde. Plusieurs conseillers, en votant l'adresse, espéraient bien pouvoir pour la remettre faire le voyage de Bruxelles et jouir de la manifestation préparée à leur intention. Le conseil provincial du Limbourg se contenta cependant de l'audience qu'il obtint au camp. Mais de nombreux conseillers luxembourgeois, après avoir été reçus par le roi au château d'Ardenne, se rendirent dans la capitale. Leur président sollicita au nom de ses collègues une audience des ministres. La réponse fut courte et sèche. M. de Theux lui écrivit trois lignes seulement :
(page 103) « Les membres du conseil provincial du Luxembourg ayant remis une adresse au roi, leur mission est accomplie. Les ministres ne peuvent les recevoir pour les entretenir de la situation politique de la province. » Les conseillers luxembourgeois ne se découragèrent pas cependant. Si on refusait de les recevoir comme corps politique, ils prétendaient être reçus comme citoyens luxembourgeois « en leurs propres et privés noms ».
La nouvelle requête reçut un accueil aussi sec que la première. Le ministre des Affaires étrangères et de l'Intérieur se contenta de répondre : « La nouvelle demande d'audience ayant le même but que la précédente, les ministres ne peuvent que persister dans leur refus. »
D'accord avec le roi, M. de Theux, tout en étant résolu de défendre jusqu'aux plus extrêmes limites les intérêts de la Belgique, montrait ainsi qu'il entendait en même temps éviter, sa popularité dût-elle en souffrir, des incidents provoqués par des intentions très patriotiques peut-être, mais qui auraient pu créer à l'étranger des impressions défavorables pour notre cause.
Le roi et son gouvernement avaient de graves motifs pour chercher à ménager les susceptibilités des Puissances européennes. Pendant que les conseils provinciaux délibéraient, Léopold Ier faisait un séjour à Paris. Il y voyait les principaux hommes d'État français dont il sondait les opinions et les intentions relativement aux intérêts belges en cause. Ses consultations ainsi que ses conversations lui apportaient la confirmation des renseignements recueillis par M. le Hon et lui montraient le danger que la Belgique rencontrerait en résistant coûte que coûte aux décisions de la Conférence de Londres et en provoquant l'intervention armée des Puissances. Le danger pouvait même venir d'un côté où personne en Belgique ne le soupçonnait.
A moment où le roi résidait en France, l'attention publique était en ce pays attirée sur nos affaires par les appels éloquents de plusieurs orateurs. Notre cause y fut défendue à la Chambre des Pairs, notamment par le marquis de Dreux-Brézé et par M. Villemain, qui s'attachèrent à montrer comment l'intégrité du territoire belge se rattachait aux exigences de la politique française. Mais notre principal avocat en cette circonstance fut le comte de Montalembert, qui résuma avec beaucoup de talent l'ensemble de nos réclamations et la légitimité de leurs motifs (Lettre de M. de Honorable au chevalier de Theux, 7 juillet 1838). Il soutint, comme (page 104) l'avaient fait avant lui des orateurs belges, que le traité des XXIV articles avait perdu sa force obligatoire par le refus prolongé de la Hollande de s'y rallier (Note de bas de page : Cette thèse avait été défendue, en dehors du parlement, par M. B. Dumortier dans sa sensationnelle brochure « La Belgique et les vingt-quatre articles »). Dans un langage de grande élévation, il indiqua les motifs qui soulevaient contre la Belgique libérale la formidable opposition des monarchies absolues.
« D'où vient, demanda-t-il, la haine de tous les pouvoirs absolus, de tous leurs partisans, contre la Belgique ? D'où vient le désir de l'amoindrir, de l'humilier ? Je vais vous le dire, Messieurs ; c'est parce que la Belgique a imité la. France, c'est parce qu'elle a montré qu'il y avait un heureux milieu possible entre le despotisme et la licence, que l'on pouvait secouer le joug d'une dynastie imposée par l'étranger ou infidèle à ses serments, sans se précipiter dans les saturnales de l'anarchie ! Voilà ce que la Belgique a fait. En le faisant, elle a porté un coup mortel aux pouvoirs absolus, parce qu'elle a montré aux peuples qu'ils pouvaient, dans une extrémité fâcheuse, se passer d'eux, sans tomber nécessairement dans le désordre. Elle a montré que la royauté, l'ordre, la religion, la prospérité matérielle pouvaient coexister avec la constitution la plus libérale. Voilà ce qu'a fait la Belgique et aussi ce qu'a fait la France. Voilà ce qui a excité contre la Belgique les haines des absolutistes de tous les pays, de toutes les nuances. Mais voilà aussi ce qui doit établir entre elle et nous une indestructible alliance, une glorieuse et féconde sympathie que je ne crains pas d'avoir invoquée aujourd'hui. »
Aucun des orateurs ne parvint à obtenir du comte Molé une parole en faveur de la Belgique. Ce n'est pas que sur certains points, sur les points principaux même de la question, il ne partageât les idées du comte de Montalembert. Au mois de septembre 1838, il déclarait qu'après un retard de sept années amené par le fait du gouvernement néerlandais, les Belges eussent été en droit de se considérer comme dégagés des clauses du traité du 15 novembre, même des stipulations territoriales. S'il avait eu l'espoir, disait-il, d'être secondé par le cabinet de Londres, il n'aurait pas hésité à faire de la conviction qu'il avait à cet égard la base de ses instructions (Arch. du Min. des Aff. étr. à Paris, Angleterre, 651, folio 156).
Mais, persuadé qu'il ne serait pas suivi par lord Palmerston, il ne voulait prendre à ce moment aucun engagement qui liât sa politique. Il se tira de la difficulté devant laquelle il se trouvait par une échappatoire, d'où, sans néanmoins être en mesure de faire état d'aucune promesse, les Belges pouvaient conclure qu'il était favorable à leur cause. « Cette Belgique, répondit-il, sur laquelle on me demande de prononcer une parole, n'en a pas besoin ; je prendrais à injure (page 105) qu'on me demandât sérieusement cette parole, attendu que je n'admets pas le doute » (Moniteur universel du 7 juillet 1838. Citation de M. Thonissen, La Belgique sous le règne de Léopold Ier, tome III, p. 241).
Quelque effet que la séance de la Chambre des Pairs eût sur l'opinion publique, elle ne devait en avoir aucun sur le gouvernement. Divers hommes d'État, que Léopold 1er était à même d'interroger, n’acceptaient pas non plus le point de départ théorique de la Chambre haute. « Le duc de Broglie, écrivait M. Jules van Praet au chevalier de Theux, d'après les ordres et en quelque sorte sous la dictée du roi, le duc de Broglie qui, un de ces jours, peut-être, aura à traduire en faits les vues qu'il exprime aujourd'hui comme observateur politique, déclarait encore dernièrement au duc d'Orléans que son principe à lui serait de respecter les traités. » Ce n'est pas que le roi ne rencontrât à Paris des dispositions très bienveillantes pour la Belgique, mais elles n'étaient pas de nature à permettre les illusions que certains esprits nourrissaient dans nos provinces. Sur la question financière seulement, on pouvait espérer rencontrer un appui véritable dans le cabinet français. Léopold 1er faisait donc recommander à son ministre des Affaires étrangères une très grande prudence. Il insistait sur la nécessité de ne point s'aventurer, de se refuser à tout engagement direct ou indirect, de voir venir les événements et de se réserver les bénéfices du temps (Lettres de M. Jules van Praet à M. de Theux, 10 et 11 juillet 1838).
Le roi rendait le chevalier de Theux particulièrement attentif à un danger qui pouvait surgir de la France elle-même.
« Le roi, écrivait M. van Praet le 12 juillet, continue avec fruit ses conférences politiques, et la tournure qu'elles prennent confirme ce que j'avais l'honneur de vous dire dans mes précédentes. Le roi des Français est animé d'un grand sentiment de bienveillance pour la Belgique, mais il résulte de tout ce qu'entend le roi Léopold, une conviction intime qu’un système qui consisterait pour la Belgique à demeurer entièrement passive et à attendre des mesures d'exécution de la part des Puissances, pourrait amener les plus graves conséquences. Il ne faut pas oublier (c'est le roi qui parle) que lorsque l'armée française a fait évacuer par les troupes hollandaises le territoire belge, à la fin de 1832, il a existé de la part de la France certaines prétentions militaires que le gouvernement belge a vivement combattues et dont il a triomphé.
(Note de bas de page On en trouve des traces dans ce qu'écrivait, le 6 mai 1838, M. Bresson au comte Molé : « La France ne peut s'exposer à une guerre que pour son propre compte, pour biffer le traité de 1815 et pour ressaisir sur le Rhin, aux dépens même de la Belgique, la position qui lui assure la suprématie en Europe. Si nous prenons les armes, ce but seul est dans les conditions nationales. Si nous voulons la paix, le traité de 1831 est encore la meilleure garantie. » Arch. du Min. des Aff. étr. à Paris, Prusse, 289, folio 263) (Fin de la note)
« L'esprit qui dictait ces prétentions existe toujours en France, et si les choses en venaient (page 106) au point que la conduite militaire des Puissances du nord obligeât la France à marcher de son côté, il n'y a ici presque point d'homme d'Etat qui ne trouverait que l'occupation temporaire de l'une ou l'autre forteresse belge serait une chose trop merveilleusement bien vue par les Chambres et le pays, et de nature à donner beaucoup de relief à un ministère quelconque. Les sentiments bien sincères et bien vrais du père de la reine des Belges ne seraient peut-être pas un contre-poids suffisant pour la balance, car vous n'ignorez pas que certains mots retentissent en France d'une manière surprenante. Le roi vous recommande donc d'avoir ces observations présentes à l'esprit et de ne point oublier que c'est de Paris qu'il vous les adresse. »