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Histoire de la démocratie et du socialisme en Belgique depuis 1830
BERTRAND Louis - 1907

Louis BERTRAND, Histoire de la démocratie et du socialisme en Belgique depuis 1830

(Tome second, paru en 1907 à Bruxelles, chez Dechenne et Cie)

Tome II. Quatrième partie : Le mouvement socialiste de 1875 à 1905

Chapitre I. L'Europe de 1874 à 1905

Caractéristique du mouvement politique de ces trente dernières années - Réaction politique - Le militarisme - Le protectionnisme - L'expansion coloniale - La dette publique - Progrès industriel - La politique française - La situation en Angleterre - L'Allemagne politique et sociale - Le socialisme en Europe - L'Internationale reconstituée

(page 271) A la fin de l'année 1874, époque laquelle nous reprenons notre récit, l'Europe continuait subir le contre-coup de la réaction qui suivit la défaite de la Commune de Paris.

L'histoire politique et sociale de l'Europe, dans ces dernières années, est caractérisée par le développement considérable des armées et de la marine et par l'expansion coloniale.

La recherche de débouchés nouveaux pour l'industrie et le commerce, la création de colonies lointaines, capables de faire fructifier les énormes capitaux dont disposent les classes privilégiées d'Europe, nécessitèrent des dépenses importantes. De son côté, l'extension donnée au militarisme, par la généralisation du service militaire obligatoire, absorba à son tour des milliards, gonfla démesurément les budgets nationaux et augmenta la dette des Etats.

A l'heure qu'il est, la dette publique des principales nations de l'Europe s'élève à plus de 190 milliards, exigeant un tribut annuel de plus de six milliards de francs. Tous ces emprunts et les dépenses qu'ils entraînent ont été faites en grande partie au (page 272) profit de la classe capitalistes ; mais les charges qui en résultent ont été rejetées méthodiquement sur les masses ouvrières, par une politique protectionniste et par des impôts frappant surtout les denrées alimentaires.

En France, après l'écrasement de la Commune, la lutte s'établit entre les républicains d'une part ct les royalistes et bonapartistes d'autre part. Après quelques années, les républicains triomphèrent, définitivement, on peut l'espérer.

En 1880, l'amnistie générale fit rentrer en France les derniers condamnés de l'insurrection de 1871. Deux années plus tard, l'instruction gratuite, laïque et obligatoire était adoptée En 1884, Waldeck-Rousseau fit voter par le Parlement la loi sur les syndicats professionnels, cherchant ainsi à donner aux classes ouvrières une organisation méthodique, à l'instar de celle qui se développait en Angleterre. En 1889, le service militaire actif fut réduit de cinq à trois et depuis à deux ans. Survint la crise boulangiste et de 1890 à 1893, on vit se constituer les ministères de concentration. De 1895 à 1898, la direction politique de la France fut confiée à des ministères homogènes. Quelques années plus tard, en présence du péril clérical, on en revint aux ministères de concentration, mais cette fois-ci un ministre socialiste, Millerand, fit partie du cabinet et ainsi le parti socialiste, pour la première fois depuis 1848, participa au pouvoir ! Le « Bloc » se forma pour combattre les empiétements du cléricalisme qui, peu à peu, avait pénétré dans l'armée, l'administration, la magistrature et s'était emparé en grande partie de l'enseignement primaire, moyen et supérieur. Enfin en 1905, le ministère Combes fit triompher la séparation de l'Eglise et de l'Etat, réforme pleine de conséquences heureuses pour l'avenir.

Dès 1876, le mouvement ouvrier se reforma. Il eut d'abord un caractère très modéré sans doute et se recommanda d'un syndicalisme mélangé de proudhonisme, avec M. Barberet comme principal chef et inspirateur.

Mais en 1878, Jules Guesde, Gabriel Deville, Emile Massart et d'autres fondèrent le journal « l'Égalité », qui défendit le collectivisme marxiste, opposa cette doctrine à celle du syndicalisme coopératif de Barberet et entra en lutte avec celui-ci.

(page 273) Dans plusieurs ouvriers nationaux, les deux tendances se trouvèrent bientôt en présence et s’entrechoquèrent. Finalement, au Congres de Marseille de 1879, le principe collectiviste fut admis par la majorité des délégués et, dès l'année suivante, le Parti ouvrier français fut constitue.

Malheureusement, peu de temps après, des divisions surgirent et des chapelles se formèrent l'une après l'autre. Le Guesdisme s'établit d'un côté et le Possibilisme Broussiste de l'autre. Celui-ci se divisa à son tour. Mais à l'heure qu'il est, la paix est enfin faite entre les diverses nuances du parti socialiste français et l'unité a triomphé, grâce en grande partie à Jean Jaurès, qui y travailla avec une inlassable activité.


En Angleterre, les deux partis historiques, libéral et conservateur, continuèrent à se faire la guerre pour la possession du pouvoir politique, et le jeu de bascule se poursuit encore l'heure qu'il est.

En 1876, l'enseignement obligatoire fut organisé et la législation sociale se développa et s'améliora. En 1885, la réforme électorale fut votée. Est électeur désormais celui qui habite seul une maison d'un loyer d'au moins 250 francs par an. On sait qu'il est d'usage en Angleterre, dans les classes moyennes, d'habiter une petite maison par famille. Il existe quatre millions d'électeurs en vertu de la réforme électorale de 1885, mais il reste encore près de deux millions d'adultes mâles exclus du droit de vote.

La question irlandaise et la crise agraire de 1873-1879 firent naitre en Angleterre un mouvement très intense en faveur de la propriété collective du sol. La « Ligue pour la nationalisation » se constitua en 1882. L'année suivante, une autre ligue, à tendances plus radicales, fut fondée et avait pour but la « restitution de la terre ».

Henry George venait de publier son fameux ouvrage « Progress and Poverty » et le nombre de ses adeptes fut bientôt considérable. Deux lois furent votées autorisant les Communes à (page 274) racheter des terres pour les revendre par petits lots. On voulait, par ce moyen, une classe de petits paysans propriétaires.

Puis l’on assista à un mouvement fort intéressant de « socialisme municipal » qui n’a fait que grandir depuis vingt ans et est arrivé à arracher aux sociétés capitalistes l'exploitation des grands services publics de l'éclairage par le gaz et l'électricité, du transport par tramways et omnibus, du service des eaux alimentaires, etc., etc.

A ce mouvement, se rattache la « Fabian Society » qui, par la presse et les réunions, a fait une immense propagande d'un socialisme pratique et modéré.

Hyndman et quelques-uns de ses amis constituèrent la « Fédération sociale démocratique » à tendances marxistes, et fondèrent le journal « Justice ». Une vaste propagande fut organisée dans les grands centres, mais sans grands résultats.

Il faut en attribuer la cause principale aux idées non interventionistes fortement ancrées depuis un siècle dans le cerveau de la classe ouvrière, qui conserve une grande confiance dans le self help, c'est-à-dire l'effort personnel des individus et des groupes, en dehors de l'action gouvernementale.

On sait que les travailleurs anglais sont depuis de longues années organisés en associations professionnelles ou « Trade-unions », et qu'ils sont parvenus à obtenir des conditions de travail et des salaires supérieurs à ceux des autres ouvriers de l'Europe. Les Trade-unions sont à la fois des sociétés organisées pour la grève et pour la mutualité, l'assurance contre la maladie, le chômage, l'invalidité et la vieillesse.

Mais le mouvement et l'organisation trade-unioniste ne profitent qu'aux ouvriers exerçant un métier, alors qu'il reste en dehors d'eux toute une armée de travailleurs non qualifiés, de manœuvres, d'aides, ne possédant aucune capacité professionnelle.

En 1887, une crise intense frappa l'industrie anglaise et même européenne. Il y eut des milliers et des milliers d'ouvriers condamnés au chômage et, par suite, à la misère. Des manifestations à la fois grandioses et émouvantes de sans-travail firent une impression considérable à Londres. C'est alors que John (page 275) Burns, Tom Mann et William Thorne s’occupèrent d’organiser ces malheureux : manœuvres, ouvriers des ports, gaziers, etc. Le « nouveau trade-unionisme » avait des tendances plus radicales que l'ancien. Pendant plusieurs années, il essaya de pénétrer dans l’autre et de le faire marcher dans une voie plus avancée. Il y réussit en partie, mais le néo-trade-unionisme ne parvint pas rester debout ; les éléments ouvriers sur lesquels il devait s’appuyer n'étaient pas très cultivés et ils ne comprirent point l'intérêt qu’il y avait pour eux de s'organiser sérieusement pour la défense de leur salaire et l'amélioration de leur condition sociale.

Notons enfin le mouvement coopératif anglais qui acquis une puissance considérable et qui, chaque année, s'est développé avec une merveilleuse ténacité.

Aujourd'hui, le parti libéral est revenu aux affaires. Les dernières élections lui ont été très favorables. On a assisté aussi la constitution du Parti du Travail qui a de nombreux députés à la Chambre des Communes et, chose extraordinaire, l'ancien meneur socialiste John Burns fait partie du cabinet libéral !


Dès le lendemain de la guerre 1870-1871, l'Allemagne unifiée s'organisa fortement au point de vue économique et politique.

Dans la première période décennale, deux grands conflits politique surgirent dans ce pays.

D 'abord Bismarck entama la lutte contre l'Eglise catholique. Cet événement porte dans l'histoire le nom de « Culturkamf », c'est-à-dire la lutte pour la civilisation et contre le cléricalisme. Les jésuites furent expulsés, les prêtres et les religieux appartenant au culte catholique, traqués.

Jusqu'en 1875, les socialistes allemands furent divisés en deux groupes. Un congrès, réuni à Gotha dans le cours de cette année, parvint à les réunir sous un programme commun, combinant à la fois les principes et les tendances des deux groupes ennemis, comptant ensemble 24,000 adhérents ; mais aux élections pour le Reichstag, en 1874, leurs candidats réunirent 350,000 suffrages.

(page 276) Cette unité eut des conséquences très favorables sur le socialiste.

En 1877, aux élections générales, les candidats socialistes obtinrent 493,000 soit 140,000 voix de plus qu'en 1847.

C’est alors que les dirigeants allemands, Bismarck en tête, prirent peur.

Le 11 mai 1878, un apprenti ferblantier, nommé Hoedel, commit un attentat sur la vie du vieil empereur Guillaume, qu'il ne réussit pas atteindre. 'l'rois semaines plus tard, le 2 juin, un nouvel attentat eut lieu et un déséquilibré, appelé Nobiling, parvint à tirer un coup de fusil sur l'empereur et le blessa légèrement.

Hoedel fut condamné à mort et exécuté ; Nobiling mourut dans un accès de folie.

Ces deux attentats excitèrent et indignèrent l'opinion au plus haut point contre les socialistes, qui y étaient cependant absolument étrangers et qui, toujours, avaient répudié le régicide. Mais ces faits, bien exploités par la presse bourgeoise de tous les partis, vinrent à point pour fournir à M. de Bismarck une arme contre la démocratie socialiste, arme qu'il avait réclamée en vain jusque-là au Reichstag.

Une loi contre les socialistes fut votée par le Parlement allemand, et elle devait entrer en vigueur le 21 octobre 1878.

Dès le 14 octobre, le Comité central électoral des socialistes allemands, composé des citoyens Hartmann, H. Brosch, C. Derossi et A. Geib, siégeant à Hambourg, lança un manifeste invitant les associations socialistes à se dissoudre sans attendre l'intervention de la police.

Le 19 octobre, le même comité publia un nouveau manifeste :

« C'est pour la dernière fois, écrivait-il, que nous nous adressons à vous comme membres du Comité central électoral du parti.

« La réaction chante victoire. La loi d'exception à la main, elle espère anéantir tout sentiment de solidarité parmi les travailleurs et désunir le mouvement démocratique socialiste.

« Les associations social-démocratiques ne sont plus possibles; les idées socialistes sont proscrites. Nous n'avons pas (page 277) besoin de vous faire ressortir la portée de ces mesures : chacun de nous sait que même sans association il possède des millions de compagnons et que les feux de joie de la réaction s’éteindront bientôt.3

La propagande ouverte, au grand jour, étant interdite, les membres du Comité central recommandèrent la propagande individuelle.

Le manifeste se terminait comme suit :

(page 278) S'il existe encore çà et là quelque organisation du parti, il y a donc lien de la supprimer.

« Soyons aussi d'accord sur la nouvelle tactique qu'exigent ces temps d'affliction, ce sera pour nous la garantie meilleur avenir. »

La loi fut appliquée avec une rigueur extrême et les années et les mois de prison plurent sur les socialistes et ce, sous les moindres prétextes. Livres, journaux, brochures furent supprimés et interdits. Plus de trois cents associations ouvrières furent dissoutes : le petit état de siège, avec droit d'expulsion des villes contre les personnes réputées dangereuses, fut appliqué à Berlin, Leipzig, Francfort, etc. Bref, toute cette admirable organisation fut détruite.

La propagande continua cependant. Le journal « Sozialdemokrat » ainsi que de nombreuses brochures édités à Zurich pénétraient en Allemagne en contrebande.

Des congrès secrets eurent lieu à l'étranger...

Bismarck, pour être plus sûr de tuer la démocratie socialiste, combina alors le système de la cravache et du morceau de sucre. Il cravacha les socialistes et fit voter par le Reichstag une série de réformes sociales dans le but d'amadouer les travailleurs allemands.

Le Reichstag fut dissous en 1878, et les socialistes n'eurent plus que 437,000 voix, soit 60,000 de moins que l'année précédente.

Aux élections de 1881, ils n'en réunirent plus que 312,000.

Les deux élections suivantes augmentèrent cependant le nombre des voix socialistes. Ils en recueillirent, en 1884, 550,000 et 763,000 en 1887, soit, malgré la répression à outrance, malgré l'application des lois d'assurance contre la maladie, les accidents, l'invalidité et la vieillesse, un gain de près de 300,000 voix, en

La loi de répression contre le socialisme, votée pour dix ans, expirait le 1er octobre 1890. Elle ne fut pas renouvelée, vu son peu de succès, car quelques mois auparavant, aux élections générales, les socialistes avaient obtenu le chiffre colossal de 1 mil-lion 427,000 suffrages !

(page 279) Bismarck était battu. En outre il était démontré que la persécution n'avait pas abattu le courage des travailleurs socialistes, et que ce moyen de gouvernement n’était plus de saison, était impuissant à tuer l'idée.

Le 1er octobre 1890 fut un jour de triomphe pour la démocratie socialiste allemande ! Des médailles furent frappées en souvenir de cette victoire remportée sur Bismarck. On fêta joyeusement le retour des bannis et, dans de grandes assemblées, on chanta avec entrain et enthousiasme la « Marseillaise des Travailleurs. »

Depuis lors, la démocratie socialiste progresse normalement : les chiffres suivants en font foi : Elections de 1893, 1,786,000 suffrages ; Elections de 1898, 2,107,000 suffrages ; Elections de 1903, 3,087,000 suffrages.

Dans le but de s'attirer la sympathie des travailleurs, le vieil empereur Guillaume Ier, d'accord en cela avec Bismarck, avait doté l'Allemagne d'une série de réformes sociales vraiment remarquables.

En 1883, il fit voter la loi d'assurance obligatoire contre la maladie, qui fut appliquée à tous les travailleurs, ouvriers, ouvrières, domestiques et servantes. L'année d’après, ce fut le tour de l'assurance contre les accidents du travail et, en 1888, fut votée l'assurance obligatoire contre l'invalidité et la vieillesse.

En 1890, peu de temps après son accession au trône, Guillaume II convoqua à Berlin une conférence internationale à l'effet d'y discuter certains problèmes de législation ouvrière et d'établir une entente internationale dans ce but. On se borna y émettre une série de vœux, mais l'initiative était heureuse et elle commence à l'heure qu'il est à produire ses fruits. (note de bas de page : Le 15 avril 1904, fut signée à Rome une convention franco-italienne réglant certains points favorables aux ouvriers des deux pays, et, depuis lors, plus autres pays sont entrés dans cette voie.)

Mais l'Allemagne qui, industriellement parlant, a acquis une puissance énorme en Europe, est cependant restée une nation qui ne possède point le droit de se gouverner elle-même. L’Empereur exerce en quelque sorte un pouvoir personnel et les droits du (page 280) 280 parlement, issu du suffrage universel cependant, sont fort peu étendus.

Avec l'appui de Bismarck et de ses successeurs, les grands propriétaires fonciers imposèrent à ce pays un régime protectionniste très étendu, qui eut pour conséquence de renchérir les denrées consommées par le peuple, sur qui pèsent encore les lourdes charges du militarisme, qui se développe constamment et absorbe des milliards chaque année.


Les autres nations de l'Europe, de second ou de troisième rang, ont nécessairement subi l'influence des événements qui se déroulèrent dans les trois grands pays dont nous venons de parler.

Au point de vue général, le fait le plus important de ces trente dernières années est assurément la montée formidable du flot socialiste.

Celui-ci résista au régime d'oppression mis en vigueur dans certains pays avec une sévérité incroyable ! Il résista également aux tentatives faites par les dirigeants bourgeois, dans le but d'améliorer les conditions d'existence des travailleurs par une législation protectrice de plus en plus développée.

Le succès des idées socialistes dans les masses effraya nécessairement les partis bourgeois et mit en pleine déroute, en Europe, une partie de la bourgeoisie libérale qui, par peur du socialisme, se jeta dans les bras de la réaction conservatrice et cléricale.

En Allemagne et en Angleterre, le libéralisme fut pendant des années en défaveur. En France, le parti républicain modéré et « progressiste » à la Méline, gouverna avec l'appui des réactionnaires conservateurs et cléricaux. Mais, depuis quelque temps, en présence des dangers du cléricalisme tout puissant, disposant de capitaux considérables, façonnant par l'enseignement les cerveaux des jeunes générations, la bourgeoisie libérale et républicaine semble se ressaisir et, avec l'aide et le concours de la classe ouvrière socialiste, elle fait un vigoureux effort pour (page 281) marcher dans la voie du progrès. En Angleterre, le libéralisme a pris de nouveau le dessus et, dans plusieurs pays d'Europe, la bourgeoisie libérale paraît vouloir faire un retour sur elle-même.


Le socialisme international qui, de 1866 à 1869, avait donne de si belles espérances, se disloqua, on l'a vu, en Congres de La Haye. En 1877, au congres de Gand, une tentative fut faite pour reconstituer l' « Association internationale des travailleurs », mais la présence de délégués de deux tendances hostiles, la tendance démocrate socialiste et l'anarchiste, eut pour effet d'accentuer encore les divergences au lieu de rapprocher ces deux membres de la famille socialiste.

A l'occasion de l'Exposition de Paris, en IS7S, un Congrès ouvrier international avait été convoqué. Le gouvernement prononça aussitôt l'interdit. C'est alors que des socialistes parisiens, Guesde, Gabriel Deville, Isidore Finance et d'autres convoquèrent une réunion privée, par invitation, dans un local de la rue des Entrepreneurs, à Grenelle. Mais la police veillait. De nombreuses arrestations furent faites et le Congrès ne put se réunir.

Mais, en 1880, les socialistes belges prirent l'initiative de la convocation d'un Congrès international. Il fut convoqué à Zurich en septembre 1881 ; mais là aussi il fut interdit, et les délégués, arrivés dans cette ville, se divisèrent en groupes et se rendirent séparément à Coire où le Congrès eut lieu quand même.

Pendant plusieurs années, les socialistes s'organisèrent dans leur pays respectif et, en 1889, lors d'une nouvelle exposition tenue à Paris, un Congrès eut lieu dans lequel on jeta les bases de la nouvelle « Internationale « qui, depuis lors, se réunit périodiquement tons les deux ou trois ans et tint des congrès à Bruxelles, en 1891, à Zurich, en 1893, à Pari, en 1900 et à Amsterdam, en 1904.

Aujourd'hui l'« Internationale » est réorganisée sur de nouvelles bases et elle constitue une force qui grandit chaque jour et qui, espérons-le, saura se discipliner, s'organiser d'une façon méthodique, (page 282) sans avoir à subir de nouvelles crises, capable de résister à tous les assauts. Ainsi elle apportera au monde la paix qui lui est plus nécessaire que jamais et saura réaliser son programme de transformation sociale pour le plus grand bien des travailleurs et avec l'appui des hommes de bonne volonté !